La Féodalité languedocienne - xie-xiie siècles
|Introduction
Texte intégral
- 1 « L’unité du Languedoc existe par sa langue mais plus encore dans cette communauté d’idéal qu’expr (...)
- 2 R. Boutruche, Seigneurie et féodalité, 1970, t. II, p. 313, note 1 (« Nous n’insisterons pas sur l (...)
- 3 M. Balard, J.-P. Genet, M. Rouche, Le Moyen Âge en Occident, 1990, p. 125. L’affirmation de cette (...)
1L’espace languedocien a longtemps été considéré comme une région à part, une anomalie dans le cadre général de l’évolution des sociétés européennes : un pays sans féodalité, où des spécificités méridionales et une brillante culture de cour étaient censées faire vivre une société fondée sur l’égalité, sur la célébration du paratge1. Il est vrai que la féodalité « classique » avait trouvé ses bases en d’autres contrées plus septentrionales, entre la Loire et le Rhin. En Occitanie, l’organisation féodale semblait embryonnaire, inachevée, épidermique2. Nombre de synthèses récentes continuent de propager cette idée d’une faiblesse congénitale de la féodalité languedocienne. « À mesure que l’on avance vers les régions méditerranéennes, la féodalisation fut plus tardive et incomplète », peut-on lire dans l’un des manuels universitaires les plus utilisés3.
- 4 Respectivement : A. R. Lewis, « La féodalité dans le Toulousain », 1964, p. 259 ; P. Ourliac, « La (...)
2La société méridionale telle qu’elle était décrite par les spécialistes de la région semblait en effet originale, fort éloignée du modèle de la féodalité septentrionale. « Vers 1050, la société de la France méridionale était en voie de militarisation, mais les facteurs et les instincts que nous avons coutume de considérer comme féodaux y faisaient défaut » ; « la féodalité du Midi est bien éloignée de la féodalité classique. Ses assises ne sont pas militaires ; elle ne connaît ni l’hommage, ni la vassalité et le fief n’a pas de rôle essentiel » ; le Midi « ignor[e] jusqu’au xiie siècle la vassalité, la féodalité, les révoltes urbaines et les servitudes collectives »4.
- 5 Les structures sociales de l’Aquitaine, Toulouse, 1968 ; Structures féodales et féodalisme, Rome, (...)
- 6 Cet ouvrage est une version remaniée et enrichie de notre thèse de doctorat : Structures féodales (...)
3Depuis une trentaine d’années cependant, l’historiographie méridionale a modifié notre vision de ces contrées, évolution scandée par trois colloques – à Toulouse en 1968, à Rome en 1978 et à Barcelone en 1989 – et par de grandes thèses d’État et des monographies régionales qui se sont attaché à décrire le Midi des xie-xiie siècles essentiellement à partir de sources diplomatiques 5. Elles ont accrédité l’idée que le Midi avait aussi connu une évolution féodale, que la fusion des empreintes romaine, wisigothique et franque avait pu donner naissance à une société qui, malgré ses différences avec le schéma septentrional, n’en méritait pas moins l’épithète de féodale. Mais jusqu’à présent, aucune de ces recherches n’a véritablement éclairé le fonctionnement institutionnel de cette société, les façons dont fief, serment et vassalité s’imbriquaient pour créer des hiérarchies de pouvoir. Voilà donc l’objet de ce livre, combler un vide en analysant les structures féodales6.
- 7 Voir en particulier R. Fossier, Enfance de l’Europe, 1982.
4Or, il faut avant tout s’accorder sur ce que l’on entend par féodalité. Marc Bloch avait décrit la société féodale dans une perspective sociologique nouvelle et globale. Elle s’est trouvée, depuis, éclatée entre un retour vers ses prémisses juridiques et une analyse anthropologique quelque peu dégagée des contingences sociales. L’institution du fief qui avait servi de référent à la dénomination de cette société a même été relativisée jusqu’à presque disparaître7. Il est donc nécessaire de réaffirmer que la féodalité est le mode d’organisation d’une société dans laquelle les liens d’homme à homme, le fief, la fidélité due pour celui-ci et le service rendu commandent l’ensemble des relations sociales et des rapports de domination. Le sujet n’est sans doute pas dans l’air du temps ; de façon générale, la tendance aujourd’hui est à dévaloriser le rôle de la féodalité. Et dans le Midi, l’intérêt s’est plus porté sur la description des groupes sociaux que sur les relations féodo-vassaliques.
- 8 Dans la discussion qui suivit l’intervention d’E. Magnou-Nortier au colloque de Toulouse (Les stru (...)
5Sur tout cela, paradoxalement, les textes languedociens ont beaucoup à livrer. Parce que le Languedoc est longtemps apparu rebelle à la féodalité, on pourrait douter de sa capacité à contribuer à la définition de celle-ci. Dès 1968, Pierre Bonnassie avait cependant fait remarquer qu’on ne pouvait accorder un crédit sans limite aux enseignements tirés de textes issus presque exclusivement de sources ecclésiastiques8. Il convenait de mesurer ce biais en se tournant vers les sources laïques. D’autre part, le vocabulaire « classique » des institutions féodo-vassaliques semblait rare en ces terres. Mais était-ce vraiment révélateur d’une insignifiance de la féodalité ? Cela ne devait-il pas plutôt inciter à mieux définir les modalités languedociennes du régime féodal ?
- 9 RHGF, t. XVI, p. 159. Voir le dossier de cartes, p. 334-339.
6A Garona usque Rodanum, de la Garonne au Rhône. Ainsi Ermengarde de Narbonne définit-elle le Midi lorsqu’elle écrit au roi Louis VII en 11739. Le Languedoc qui constitue l’objet de notre recherche est borné par ces deux fleuves : à l’ouest de la Garonne commence le pays gascon ; au-delà du Rhône, on quitte le royaume pour entrer en terre d’Empire, dans la Provence alors dominée par les comtes de Barcelone et de Toulouse. Du nord au sud, la région est comprise entre les derniers contreforts méridionaux du Massif central, incluant Albigeois et Rouergue, et la mer, jusqu’au Roussillon catalan. À cette vaste zone géographique il faut aussi rattacher la frange orientale des Pyrénées, des Corbières au Razès et jusqu’à la vallée de l’Ariège, là où l’influence méditerranéenne continue à se faire sentir.
7Le pouvoir supérieur est théoriquement détenu par les comtes de Toulouse, qui ne connaissent de concurrents de rang comtal qu’à Carcassonne dans la première moitié du xie siècle et à Melgueil jusqu’aux années 1170 ; ils se heurtent aussi, à partir de 1070 et surtout au xiie siècle, à l’expansion catalane en Languedoc avec les acquisitions des comtes de Barcelone à Carcassonne, en Razès, à Millau et en Gévaudan. Mais, nous le verrons, la capacité d’intervention des comtes toulousains est bien affaiblie, entravée par l’implantation de nombreuses lignées vicomtales et seigneuriales, dont celle des Trencavel et celle des Guilhem de Montpellier qui seront au cœur de notre étude.
- 10 Le premier est édité depuis longtemps : A. Germain, Cartulaire des Guilhem de Montpellier, 1884-18 (...)
- 11 Sur les Guilhem, nous avons utilisé la thèse de H. Katsura (La seigneurie de Montpellier, 1996) et (...)
- 12 À l’initiative du vicomte Roger II (1167-1194) ; l’œuvre fut ensuite poursuivie et le cartulaire c (...)
8L’aire languedocienne présente en effet l’immense richesse d’avoir conservé deux magnifiques cartulaires laïques, précoces et volumineux, celui des Guilhem de Montpellier et celui des Trencavel10. Les Trencavel étaient, au début du xie siècle, vicomtes d’Albi et de Nîmes, puis à partir des années 1060, vicomtes de Béziers, Agde, Carcassonne et Razès. Les Guilhem étaient seigneurs de Montpellier, ville qu’ils contribuèrent grandement à créer et à développer à l’intérieur du comté de Melgueil, mais leur seigneurie s’étendait vers les marges du Biterrois et de l’Agadès11. Les deux cartulaires furent rédigés juste avant la Croisade albigeoise, au début du xiiie siècle pour les Guilhem, vers 1186-1188 pour les Trencavel12 : ils permettent donc de bien couvrir toute la période envisagée.
- 13 En fait, 615 actes et un bis sont numérotés (postérieurement à la rédaction proprement dite), mais (...)
- 14 De nombreuses donations à des églises n’ont été conservées que par les récipiendaires, et publiées (...)
- 15 Voir ci-après le tableau de répartition des actes par type et par siècle (p. 22).
- 16 Le cartulaire des Guilhem comprend 570 actes numérotés, mais 4 sont des doublets. Les chartes s’éc (...)
9Cette abondance des sources laïques n’est pas le seul élément remarquable de la documentation. Le cartulaire des Trencavel se distingue par une typologie particulière des actes : ces vicomtes ont fait recopier 584 actes du début du xie siècle au début du xiiie13, qui concernent leurs rapports avec toute l’aristocratie régionale. Ils en ont exclu toutes les chartes qui ont trait à la gestion de leurs domaines fonciers, comme les donations de terres, les ventes ou les accensements14. En revanche, le cartulaire contient 322 serments, 82 inféodations – de châteaux principalement –, 55 accords, dont beaucoup de règlements de conflits féodaux : cela en fait une source de premier ordre sur l’aristocratie laïque15. Le cartulaire des Guilhem, avec ses 566 actes, est de conception assez proche, mais il est beaucoup mieux classé et organisé. Il comprend des séries de dossiers les uns thématiques (lettres et privilèges pontificaux, actes concernant les évêques de Maguelonne, les comtes de Melgueil, testaments, coutumes et usages de Montpellier, etc.), les autres géographiques. Il est beaucoup plus prolixe sur la seigneurie foncière – 217 actes transcrivent des transactions sur la terre, et sont aussi conservés plus de cinquante censiers ou rôles –, il fournit cependant aussi de belles séries de serments, au nombre de 139, et d’inféodations ou de reprises en fief de châteaux16. On insistera au demeurant sur l’ancienneté de ces actes. Le cartulaire des Trencavel compte 129 textes du xie siècle, dont 93 serments. Celui des Guilhem ne contient que 36 actes antérieurs à 1100, avec cependant une part non négligeable de 17 serments.
- 17 Archives nationales, J 300 à J 335 (vicomté de Nîmes, de la fin du xie à la fin du xiie siècle).
- 18 Bibliothèque nationale de France, collection de Doat, essentiellement volumes 165 à 169, complétés (...)
- 19 F. Miquel Rosell, Liber Feudorum Maior, 1945-1957 ; G. Feliu et J. M. Salrach dir., Els pergamins (...)
- 20 C. Devic et J. Vaissete, Histoire Générale de Languedoc, 1872-1875, vol. V et VIII (Preuves) ; G. (...)
10Ce corpus a été enrichi par les originaux du Trésor des chartes17 – une centaine d’actes nouveaux –, par quelques copies de la collection Doat18, mais aussi par des éditions de textes comme le cartulaire et le chartrier des comtes de Barcelone19, ou de façon plus éparse, par les preuves de l’Histoire générale de Languedoc de Devic et Vaissète, par les œuvres de Guillaume de Catel, de Pierre de Marca ou de A. Mahul20.
- 21 Les références complètes se trouvent dans la liste des sources (p. 349).
- 22 La Chanson de la croisade albigeoise, E. Martin-Chabot éd., 1931-1961 ; Chronique de Guillaume de (...)
- 23 Le Livre des miracles de sainte Foy, en premier lieu (éd. Robertini, 1994), ou les Vitae et Miracu (...)
- 24 Voir A. Loeb, Aimer et servir, 1992 (et « Les relations entre les troubadours et les comtes de Tou (...)
11Au total, nous avons donc réuni plus d’un millier d’actes des xie et xiie siècles – environ 1300 –, issus exclusivement d’archives laïques et qui concernent toute l’aristocratie régionale, un ensemble homogène, riche et varié. Le regard que l’on peut porter sur le Languedoc des xie-xiie siècles en est radicalement changé. Cela dit, les grands cartulaires ecclésiastiques ont aussi été consultés, mais laissés délibérément de côté, sauf pour quelques éléments de détail : ceux d’Aniane, de Gellone, de Béziers, d’Agde, de Nîmes, de Conques, de Vabres, de Douzens, de Lagrasse, de Lézat, de Saint-Sernin21. La quasi absence de sources narratives conservées pour cette période dans le domaine occitan a été partiellement comblée par les récits suscités par la Croisade albigeoise, la Chanson de la croisade et la Chronique de Guillaume de Puylaurens principalement22, mais aussi parfois par des textes hagiographiques23, ou par quelques pièces issues de la foisonnante production des troubadours24.
- 25 Les raisons de ce silence sont nombreuses. Traiter de ces problèmes aurait allongé démesurément l’ (...)
12À partir de cet ensemble de sources, il s’agissait donc de décrire les structures féodales. Par conséquent, on ne trouvera pas ici une monographie seigneuriale, ni une recherche exhaustive sur une dynastie ou une région. Nous n’avons pas voulu faire l’histoire de la lignée des Trencavel, ni a fortiori de celle des Guilhem. Les liens entre la plus haute aristocratie et l’Église ne seront pas non plus traités pour eux-mêmes ; ils ont déjà été l’objet d’une thèse, celle d’Élisabeth Magnou-Nortier il y a trente ans, et, quelles que soient les révisions qui pourraient être apportées, elles ne trouveront pas leur place ici. La ville en tant que corps social et politique sera aussi laissée de côté, les rapports entre pouvoirs urbains et pouvoirs seigneuriaux pourraient en soi constituer le sujet d’une autre recherche. Enfin – et plus crucial pour notre sujet – le rapport à la terre, la seigneurie couramment appelée foncière, les relations entre seigneurs et paysans ne seront pas abordés25. Cette recherche ne porte pas sur la société féodale dans son ensemble, mais sur les structures du pouvoir au sein du groupe aristocratique.
- 26 Le débat a commencé sur une édition : G. Bois, La mutation de l’an mil, 1989 (réactions dans : L’a (...)
- 27 S. Reynolds, Fiefs and Vassals, 1994 ; comptes rendus par F. L. Cheyette, 1996 ; E. Magnou-Nortier (...)
- 28 S. Reynolds a ignoré la très riche documentation catalane et a lu un peu vite une petite partie de (...)
13La féodalité n’est pas dans l’air du temps, avons-nous dit. Pourtant la production scientifique récente tendrait à faire croire le contraire. Les aménagements apportés par les historiens du Midi au modèle féodal « classique » et la remise à plat des définitions qu’ils ont suscitée ont entraîné depuis une dizaine d’années ce que nous pourrions appeler un choc en retour : une mise en cause de la validité du modèle juridique, sociologique, économique, et une série d’interrogations sur le rythme et les modalités des changements intervenus entre ixe et xie siècles. Dans les années 1990, deux débats se sont entrecroisés, partis l’un de France26, l’autre d’Angleterre27. Le questionnement sur la mutation aura peu de place dans cet ouvrage, les sources qui constituent la base de cette étude révèlent une société déjà féodalisée – c’est ce que nous tenterons de démontrer – et ne remontent pas au-delà du premier tiers du xie siècle. Nous espérons en revanche apporter plus d’éléments au second débat, celui qui porte sur la définition-même de la féodalité – ou plutôt sur l’existence même d’une féodalité –, débat dans lequel il nous semble que les sources issues du Midi au sens large ont été quelque peu escamotées28.
14En l’absence d’une grande synthèse récente sur l’histoire des pouvoirs en Languedoc aux xie et xiie siècles, un premier chapitre est consacré à brosser un tableau chronologique de l’évolution politique de ces régions. Partant de l’extrême fin du xe siècle et du démembrement des principautés territoriales issues de l’Empire carolingien, il restitue la trame des événements jusqu’à la Croisade albigeoise, en faisant sa juste place à la « guerre de cent ans » du xiie siècle, grande oubliée de l’historiographie nationale. Il s’agit de présenter schématiquement les diverses puissances comtales, vicomtales et seigneuriales qui ont pesé sur le devenir du Midi, en prenant en compte les derniers acquis de la recherche en généalogie, en anthroponymie ou en diplomatique. Pour ouvrir ce livre, une histoire événementielle à l’ancienne donc, sans laquelle l’analyse des structures socio-politiques ne peut se déployer. Les trois chapitres suivants sont centrés sur les serments. Ailleurs, il n’en reste le plus souvent que la mention dans une charte, le détail d’un rituel dans une narration. Les paroles se sont envolées. Le Languedoc au contraire présente l’originalité d’en avoir conservé les textes en de très nombreux exemplaires – environ 500 –, et c’est sur le discours que peut se fonder l’analyse. Cette source majeure a constitué la base de réflexions sur la fidélité (« Des serments de fidélité », chapitre 2), sur le fief (« Des serments féodaux », chapitre 3), sur la vassalité (« Des serments féodo-vassaliques », chapitre 4). Mais bien entendu cette information a été complétée aussi souvent que nécessaire par les renseignements issus de très nombreuses inféodations et reprises en fief, notamment pour cerner les façons selon lesquelles serment, fief et hommage se confortaient pour édifier de véritables réseaux féodaux. Les seigneurs du Languedoc, pris dans les filets du fief et de la foi jurée, fidèles ou infidèles à leur parole, ne manquaient pas de s’affronter : les modes de résolution de ces conflits entre grands, exclusivement entre laïcs, sont l’objet du cinquième chapitre. Le dernier présente enfin un cas – mais qui prétend à l’exemplarité – illustrant le fonctionnement du pouvoir dans une des principautés méridionales, celle des Trencavel qui dirigèrent six vicomtés, de l’Albigeois à la plaine languedocienne, du Nîmois au Razès.
- 29 Dans une chronique donnée au Monde, le 27 octobre 1978.
15Dans le Languedoc des Trencavel et des Guilhem, les modalités de fonctionnement des rapports socio-politiques au sein de l’aristocratie, les liens de domination et de dépendance, le partage des compétences et les hiérarchies induites sont bien éclairés par des sources riches et variées. Notre but est de démonter ces rouages et d’analyser comment ils jouent les uns par rapport aux autres. Loin de nous en revanche l’idée de proposer un nouveau modèle. Georges Duby, tirant les conclusions du colloque de Rome en 1978, affirmait déjà « qu’il ne faut décidément plus parler de féodalité « classique », que le modèle a fait son temps. Qu’il n’existe pas non plus de féodalité « parfaite », ou plutôt que toutes le sont plus ou moins à leur façon »29. Ces pages se proposent d’examiner et de démêler les modalités de fonctionnement d’une de ces féodalités, celle des pays d’entre-Rhône-et-Garonne.
Cartulaire des Trencavel et cartulaire des Guilhem (annexe de l’introduction)
Classement des actes du cartulaire des Guilhem, par type et par date :

[lettres pontif. = bulles et privilèges pontificaux ; donations : toutes transactions sur la terre, y compris les testaments ; accords : conventions, règlements de conflits, etc. ; serments : serments féodaux (sont incluses dans le total les rares sécurités, au nombre de 8) ; inféodations : donation en fief, principalement de châteaux ; rôles : rôles d’albergues, de feudataires, censiers.]
Notes
1 « L’unité du Languedoc existe par sa langue mais plus encore dans cette communauté d’idéal qu’exprime le “Paratge” : un idéal qui est fait de loyauté, d’équité, de fidélité, de respect du droit, tout ce qui oppose le Midi aux chevaliers croisés », P. Ourliac, « Réalité ou imaginaire : la féodalité toulousaine », 1983, rééd. 1993, p. 98.
2 R. Boutruche, Seigneurie et féodalité, 1970, t. II, p. 313, note 1 (« Nous n’insisterons pas sur les féodalités épidermiques. Dans le Midi languedocien… »). Le terme « Occitanie » est à comprendre dans un sens géographique ; il nous sert ici à éviter l’expression « sud de la France », qui ne peut se comprendre qu’en référence à un État-nation qui n’existait pas encore.
3 M. Balard, J.-P. Genet, M. Rouche, Le Moyen Âge en Occident, 1990, p. 125. L’affirmation de cette incomplétude se retrouve de-ci de-là, dans des études plus spécialisées, voir par exemple Y. Sassier, « De l’ordre seigneurial à l’ordre féodal », 1994, p. 202 ; ou T. Pecout, « Féodalité », 1997, p. 587 (« Le fief n’est pas le pivot des relations de l’aristocratie dans les régions méditerranéennes (à l’exception du royaume de Sicile), où l’on parle même de féodalité sans fief »).
4 Respectivement : A. R. Lewis, « La féodalité dans le Toulousain », 1964, p. 259 ; P. Ourliac, « La “féodalité méridionale” », 1983, p. 11 ; E. Magnou-Nortier, La société laïque et l’Église, 1974, p. 651.
5 Les structures sociales de l’Aquitaine, Toulouse, 1968 ; Structures féodales et féodalisme, Rome, 1980 ; Catalunya i França meridional, Barcelone, 1991. Le Midi pris dans un sens large, au-delà du Languedoc, a été l’objet de nombreuses thèses au cours des trente dernières années : P. Bonnassie, La Catalogne, 1975-1976 ; J.-P. Poly, La Provence, 1976 ; M. Bourin-Derruau, Villages médiévaux en Bas-Languedoc, 1987 ; G. Giordanengo, Le droit féodal, 1988 ; J.-L. Biget, Albi et l’Albigeois, 1993 ; M. Mousnier, La Gascogne toulousaine, 1997 ; L. To Figueras, Família i hereu, 1997 ; B. Cursente, Des maisons et des hommes, 1998 ; J. J. Larrea, La Navarre, 1998 ; C. Duhamel-Amado, Genèse des lignages méridionaux, 2001 ; publications auxquelles on peut ajouter les travaux de T. N. Bisson et A. J. Kosto (la liste se trouve dans la bibliographie complète en fin de volume).
6 Cet ouvrage est une version remaniée et enrichie de notre thèse de doctorat : Structures féodales dans le Languedoc des Trencavel ( xie-xiie siècles), soutenue en 1997 à l’Université Toulouse II-Le Mirail.
7 Voir en particulier R. Fossier, Enfance de l’Europe, 1982.
8 Dans la discussion qui suivit l’intervention d’E. Magnou-Nortier au colloque de Toulouse (Les structures sociales de l’Aquitaine, 1968, p. 484).
9 RHGF, t. XVI, p. 159. Voir le dossier de cartes, p. 334-339.
10 Le premier est édité depuis longtemps : A. Germain, Cartulaire des Guilhem de Montpellier, 1884-1886 ; le second est inédit, possédé par la Société archéologique de Montpellier (coté Ms 10) ; pour une analyse précise du cartulaire, de sa date de rédaction, de sa composition, voir notre article, « Le cartulaire des Trencavel », 1993.
11 Sur les Guilhem, nous avons utilisé la thèse de H. Katsura (La seigneurie de Montpellier, 1996) et les nombreux travaux de C. Duhamel-Amado.
12 À l’initiative du vicomte Roger II (1167-1194) ; l’œuvre fut ensuite poursuivie et le cartulaire complété sous Raimond Roger, son fils, entre 1201 et 1206.
13 En fait, 615 actes et un bis sont numérotés (postérieurement à la rédaction proprement dite), mais 32 sont des doublets. Le premier texte daté est de 1028, mais un certain nombre de serments non datés prêtés à Aton II (vicomte vers 990-vers 1032) doivent être antérieurs. Le texte le plus récent est de 1214, mais il s’agit là d’un ajout postérieur d’une autre main. L’acte le plus récent intégré au cartulaire est de 1206.
14 De nombreuses donations à des églises n’ont été conservées que par les récipiendaires, et publiées dans l’Histoire générale de Languedoc ou dans les divers cartulaires ecclésiastiques ; par ailleurs, des chartes concernant la gestion des terres devaient être présentes en grand nombre dans le chartrier vicomtal : en témoignent les originaux conservés par le Trésor des chartes (qui concernent la vicomté de Nîmes, dévolue à un cadet Trencavel en 1129, puis passée aux comtes de Toulouse et enfin aux rois de France : les archives ont suivi le même cheminement). Roger II a fait volontairement confectionner un cartulaire aristocratique et féodal.
15 Voir ci-après le tableau de répartition des actes par type et par siècle (p. 22).
16 Le cartulaire des Guilhem comprend 570 actes numérotés, mais 4 sont des doublets. Les chartes s’échelonnent de 980 à 1202. Voir ci-après le tableau de répartition des actes par type et par siècle (p. 22). Ces deux cartulaires laïques mériteraient une analyse précise pour élucider les choix de transcription, dans la lignée de la magnifique étude que vient de livrer P. Chastang sur les cartulaires ecclésiastiques méridionaux (Lire, écrire, transcrire, 2001).
17 Archives nationales, J 300 à J 335 (vicomté de Nîmes, de la fin du xie à la fin du xiie siècle).
18 Bibliothèque nationale de France, collection de Doat, essentiellement volumes 165 à 169, complétés par quelques actes tirés des volumes 38, 40, 75, 153, 248.
19 F. Miquel Rosell, Liber Feudorum Maior, 1945-1957 ; G. Feliu et J. M. Salrach dir., Els pergamins de l’Arxiu comtal de Barcelona, 1999. Sur le cartulaire des comtes, voir A. Kosto, « The Liber Feudorum Maior », 2001.
20 C. Devic et J. Vaissete, Histoire Générale de Languedoc, 1872-1875, vol. V et VIII (Preuves) ; G. de Catel, Histoire des comtes de Tolose, 1623 ; G. de Catel, Mémoires de l’histoire de Languedoc, 1633 ; P. de Marca, Marca Hispanica, 1688 ; A. Mahul, Cartulaire… de Carcassonne, 1857-1882.
21 Les références complètes se trouvent dans la liste des sources (p. 349).
22 La Chanson de la croisade albigeoise, E. Martin-Chabot éd., 1931-1961 ; Chronique de Guillaume de Puylaurens, J. Duvernoy éd., 1976. Une pénétrante analyse de l’extrême rareté des sources narratives est à trouver dans l’article de T. N. Bisson, « Unheroed Pasts », 1990 ; voir aussi A. G. Remensnyder, Remembering Kings Past, 1995 et R. Lafont, « Pour rendre à l’oc », 1999. Il ne faut cependant pas oublier la Chanson de sainte Foy, composée vers 1060-1070, peut-être en Rouergue (E. Hoepffner et P. Alfaric, La Chanson de sainte Foy, 1926 ; F. de Gournay, « Relire la Chanson », 1995).
23 Le Livre des miracles de sainte Foy, en premier lieu (éd. Robertini, 1994), ou les Vitae et Miracula de saint Géraud, saint Fulcran, saint Bertrand (voir les références, ci-dessous, p. 350)
24 Voir A. Loeb, Aimer et servir, 1992 (et « Les relations entre les troubadours et les comtes de Toulouse », 1983), et L. M. Paterson, Le monde des troubadours, 1999.
25 Les raisons de ce silence sont nombreuses. Traiter de ces problèmes aurait allongé démesurément l’ouvrage et alourdi le travail – dont le cadre originel était celui d’une thèse nouveau régime. Cet aspect a de plus été déjà abordé à de multiples reprises par des travaux antérieurs pour l’aire géographique retenue. Enfin, le cartulaire des Trencavel est muet à ce sujet, par la décision délibérée du vicomte qui en a ordonné la confection.
26 Le débat a commencé sur une édition : G. Bois, La mutation de l’an mil, 1989 (réactions dans : L’an mil. Rythmes et acteurs d’une croissance, 1991) ; et une réédition : J.-P. Poly et E. Bournazel, La mutation féodale, 1980, rééd. 1991 ; D. Barthélemy, « La mutation féodale a-t-elle eu lieu ? », 1992 ; J.-P. Poly et E. Bournazel, « Que faut-il préférer au “mutationnisme” ? », 1994 ; T. N. Bisson, « The “Feudal Revolution” », 1994 ; D. Barthélemy, « Encore le débat sur l’an mil ! », 1995 ; A. Barbero, « La polemica sulla mutazione feudale », 1995 ; « Debate : The Feudal Revolution », 1996 (articles de D. Barthélemy et S. D. White) et 1997 (articles de T. Reuter, C. Wickham et T. N. Bisson) ; S. Carocci, « Signoria rurale e mutazione feudale », 1997 ; D. Barthélemy, La mutation de l’an mil a-t-elle eu lieu ?, 1997 ; L’an mil en 2000, 1999 ; « El debate sobre el cambio feudal », 2000 ; Les origines de la féodalité, 2000 (article de D. Barthélemy et réponse de P. Bonnassie).
27 S. Reynolds, Fiefs and Vassals, 1994 ; comptes rendus par F. L. Cheyette, 1996 ; E. Magnou-Nortier, « La féodalité en crise », 1996 ; D. Barthélemy, « La théorie féodale à l’épreuve de l’anthropologie », 1997.
28 S. Reynolds a ignoré la très riche documentation catalane et a lu un peu vite une petite partie des sources languedociennes (voir les critiques de F. L. Cheyette, dans le compte rendu cité à la note précédente).
29 Dans une chronique donnée au Monde, le 27 octobre 1978.
Table des illustrations
![]() | |
---|---|
Titre | Classement des actes du cartulaire des Trencavel, par type et par date : |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/13146/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 112k |
![]() | |
Titre | Classement des actes du cartulaire des Guilhem, par type et par date : |
Légende | [lettres pontif. = bulles et privilèges pontificaux ; donations : toutes transactions sur la terre, y compris les testaments ; accords : conventions, règlements de conflits, etc. ; serments : serments féodaux (sont incluses dans le total les rares sécurités, au nombre de 8) ; inféodations : donation en fief, principalement de châteaux ; rôles : rôles d’albergues, de feudataires, censiers.] |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/13146/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 55k |
© Presses universitaires du Midi, 2003