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Une société marchande

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Patrice Poujade

Partie I. À dos de mulet : la montagne et le commerce

À dos de mulet : la montagne et le commerce

Texte intégral

1La zone que nous étudions se caractérise par sa situation montagnarde et frontalière. Ce travail privilégie la partie située au nord de la montagne, mais nous ne négligeons pas pour autant l’autre côté, ne serait-ce qu’en raison des liens qui unissent les deux versants et dont le commerce est un des aspects. Nous nous plaçons, en fait, sur un axe du commerce reliant le Languedoc et la Gascogne aux Pays catalans. C’est, en premier lieu, au pays lui-même et à ses passages que nous nous consacrerons, avant de nous tourner vers le commerce, objet essentiel de cette partie. La source notariale nous indique un certain nombre de produits faisant l’objet de transactions impliquant marchands et habitants de la région. Elle fait apparaître aussi des acteurs venus de plus loin, marchands toulousains, andorrans, catalans, limousins ou auvergnats, par exemple. Ainsi, ce type de document peut être utilisé pour une approche qualitative du commerce (organisation, acteurs, pratiques, etc.), l’approche quantitative étant, de toute façon, bien difficile à mettre en œuvre, sinon utopique, pour l’époque étudiée. On s’en doute, la documentation ne nous renseigne pas de façon exhaustive sur tout ce qui se vend et s’achète : le panorama qui s’en dégage n’en est donc que partiel et ressortit à un négoce d’un certain niveau, qui n’est pas celui de détail. C’est avec ces limites en mémoire et d’autres qui se feront jour, qu’il faut aborder cette partie. Celle-ci s’ouvrira dans son premier chapitre par une description sommaire de la zone d’étude et des connexions qui unissent son versant nord et son versant sud. Mais l’essentiel de son propos concernera la circulation des marchandises.

2L’analyse des reconnaissances de dettes consenties aux marchands au milieu du xviie siècle nous donne, déjà, une idée des différentes orientations des marchés que nous aurons à préciser. À Tarascon, l’achat de fer et de laine sont les deux activités principales enregistrées par les notaires. À Ax, la laine domine très nettement les achats. Pour ce qui est des ventes, dans les deux cas, les animaux (ovins, bovins, équins) représentent une activité importante, très majoritaire à Ax, et laissant une place très secondaire aux grains. À Tarascon, les animaux sont talonnés, voire dépassés en valeur, par les « marchandises sans précision » que vendent les marchands à des confrères d’autres villes ou à des voituriers venant s’approvisionner chez eux. C’est un type de transaction très fréquent dans le commerce transpyrénéen. Certains marchands tarasconnais se sont spécialisés dans ce genre de négoce où les affaires les plus importantes concernent des marchandises destinées au commerce outre-Pyrénées, emportées à crédit par des marchands migrants installés en Catalogne et en Andorre.

3Pour ce qui concerne l’orientation des marchés d’autres villes ou bourgs de notre zone d’étude, à Vicdessos le commerce du fer domine alors que dans le Pays de Sault et le Donezan, les ventes d’animaux sont nombreuses, en particulier les mulets pour ce qui est de Belcaire. Si le bois n’y est pas absent, c’est bien Quillan qui en est la terre d’élection puisque les transactions le concernant éclipseraient presque celles se rapportant à la laine et aux animaux. Enfin, les actes notariés de Chalabre reflètent de façon assez nette la spécialisation textile de la ville : achats de laine et transactions textiles sont courants.

Tableau no 1. Un panorama commercial du haut Pays de Foix au milieu du xviie siècle au prisme des reconnaissances de dettes

Tableau no 1. Un panorama commercial du haut Pays de Foix au milieu du xviie siècle au prisme des reconnaissances de dettes

4De tout ce qui précède et à la lecture du tableau précédent, on retiendra l’importance de la commercialisation des produits issus de l’agriculture et de l’élevage. S’ils n’apparaissent pas avec autant de force, les matières premières (minerai de fer et bois surtout) et les produits transformés n’en sont pas moins importants. Chaque fois qu’un produit l’imposera, nous nous pencherons sur un pan fondamental du commerce, celui qui franchit les Pyrénées et en même temps une frontière politique. Mais avant toute chose, c’est à ces montagnes que nous nous devons.

Table des illustrations

Titre Tableau no 1. Un panorama commercial du haut Pays de Foix au milieu du xviie siècle au prisme des reconnaissances de dettes
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/11109/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 252k

© Presses universitaires du Midi, 2008

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