Vicomtes et vicomtés
|Une géographie vicomtale de la Bourgogne des xie-xiie siècles
Texte intégral
- 1 Abréviations des sources citées :
– Cîteaux : J. Marilier, Chartes et documents concernant l’abbaye (...)
1La Bourgogne compte parmi les régions dans lesquelles l’institution vicomtale est la plus précocement attestée1. Trois notices contemporaines de Louis le Pieux, auxquelles il faut ajouter deux passages d’Agobard, attestent la présence de vicomtes en Atuyer et à Autun dès 817, puis à Lyon et à Dijon dans les années 820. Ces textes éclairent essentiellement les fonctions exercées par ces premiers vicomtes. Pagum regere, justitia peragere : c’est en ces termes qu’Agobard caractérise la mission de celui qui agit, à Lyon, vice comitis. Une terminologie encore flottante les désigne également comme missus comitis. Peut-être jouissent-ils, déjà, d’un bénéfice assis sur la terre fiscale. Des titulaires de ces fonctions, la documentation ne permet guère de connaître autre chose que leur nom. Du moins tend-elle à montrer, malgré ses évidentes limites, que les comtes bourguignons ont très vite eu recours à ces délégués ou « envoyés » apparus, semble-t-il, sous Charlemagne. Mais cette première impression doit aussitôt être nuancée. En dépit de l’apparition précoce des premiers vicomtes, et malgré la multiplicité des pagi bourguignons (voir carte), le phénomène vicomtal reste extrêmement discret dans une documentation pourtant relativement riche pour le IXe siècle : la quasi-absence d’autre mention carolingienne pose la question de la pérennité ainsi que de la généralisation de l’institution.
2Il faut pratiquement attendre le tournant du Xe siècle, et le temps des « principautés territoriales », pour rencontrer de nouveaux vicomtes. Les sources révèlent alors un profil social dominant : peu nombreux, les vicomtes bourguignons sont, vers 900, d’importants personnages, membres ou alliés de familles comtales, eux-mêmes déjà titulaires de la dignité comtale ou en passe de l’acquérir : comtes ici, disposant donc d’une autorité suffisante pour suppléer le comte titulaire, mais dépourvus de l’ancrage local qui leur permettrait de le supplanter, ils sont recrutés là par des marquis-comtes (Richard le Justicier, Guillaume le Pieux) que le cumul des honores retient ailleurs la plupart du temps, pour exercer la judicaria potestas en leur nom. Ces vicomtes n’ont d’ailleurs pas l’exclusivité de la représentation comtale, et peuvent être remplacés soit par de proches parents des comtes, soit par de simples missi ou autres domini. Avec la dislocation des principautés, les plus remarquables d’entre eux (ou leur descendance) deviennent les comtes les plus puissants : Gilbert de Chalon, Aubri de Mâcon ou Robert de Dijon en sont les parfaits exemples. Eux-mêmes sont désormais assistés de vicomtes, recrutés parmi leurs parents ou leurs fidèles – des vicomtes qui ne paraissent jamais aussi nombreux qu’au milieu du Xe siècle.
- 2 G. Duby, La société en Mâconnais aux XIe et XIIe siècles, Paris, 1971 (réimpr. 1988).
3On assiste pourtant, dans la seconde moitié du Xe siècle, à une nouvelle éclipse du phénomène vicomtal : la dernière mention d’un vicomte de Lyon date de 944, les dernières apparitions vicomtales à Dijon ou à Autun des années 950. En Mâconnais, où la documentation est exceptionnellement fournie, la liste vicomtale s’interrompt à partir de 964 ; et à Chalon, le dernier vicomte disparaît à la fin du siècle (999). Il est évidemment tentant de relier ce phénomène à la « mutation féodale » dont Georges Duby a naguère montré l’effet corrosif en Mâconnais2. Toute une combinaison de facteurs locaux concoure, en fait, à ce déclin vicomtal : à Dijon, par exemple, le vicomte est remplacé par des comtes ; à Lyon, c’est au contraire la vacance du comitatus qui peut expliquer l’absence de vicomte. On peut, sans qu’il soit utile de préciser ici davantage, conclure que l’évolution générale des pouvoirs dans la Bourgogne de l’an mil s’accompagne d’une tendance générale à la disparition des vicomtes.
4La raréfaction vicomtale dans la seconde moitié du Xe siècle ne correspond pas à une simple éclipse documentaire. Car, si à nouveau les mentions de vicomtes se multiplient à l’époque suivante, c’est une géographie vicomtale différente qui se met en place. Cette résurgence des XIe-XIIe siècles concerne essentiellement la Bourgogne septentrionale : nous l’avons observée dans l’espace formé des anciens pays lingons et éduens, où elle se traduit notamment par l’institution de vicomtes ducaux dans les castra de Dijon et de Beaune. En revanche, elle reste étrangère à la Bourgogne méridionale où l’on ne trouve désormais plus de vicomtes ailleurs qu’à Mâcon : la réapparition d’un vicomte de Mâcon, peu après l’an mil, puis la persistance d’une lignée vicomtale jusqu’à la fin du XIIe siècle, fait véritablement figure d’exception.
LA RÉAPPARITION DE VICOMTES EN BOURGOGNE SEPTENTRIONALE. UNE ILLUSTRATION : LES VICOMTES DUCAUX DE DIJON ET DE BEAUNE
- 3 Voir surtout R.-H. Bautier, « Les diplômes royaux carolingiens pour l’église de Langres et l’origin (...)
- 4 Cf. R.-H. Bautier, art. cit., p. 237-238, et J. Richard, Les ducs de Bourgogne et la formation du d (...)
- 5 Sur ces familles, C.B. Bouchard, Sword, Miter and Cloister. Nobility and the Church in Burgundy, 98 (...)
5L’ancien pagus Lingonensis, dans lequel l’évêque de Langres s’était vu reconnaître une part majeure de la puissance publique à la fin de l’époque carolingienne3, est partagé en plusieurs comtés qui connaissent des sorts différents. Les comtés les plus occidentaux finissent par subir l’attraction des puissances voisines, celle des comtes de Troyes comme le Barrois (Bar/Aube), ou celle des comtes de Nevers, comme l’ancien Lassois (Bar/Seine) et le Tonnerrois. Les comtés les plus orientaux sont généralement dévolus, au XIe siècle, à quelques grandes familles seigneuriales qui substituent le nom de leur château principal à celui du pagus dans leur titulature comtale4. Ce sont les Grancey, sires de Saulx, en Langrois, les Sexfontaines en Bolenois, les Clefmont en Bassigny, ou encore les Beaumont et les Fouvent en Atuyer5. Dijon est un cas particulier : les ducs de Bourgogne ont tôt fait main basse sur le castrum et en contrôlent le comitatus dès 1015. Devant une telle complexité, il est difficile de dégager un schéma clair en ce qui concerne le phénomène vicomtal. Deux grandes tendances caractérisent, avec une nuance et une exception, les comtés lingons aux XIe-XIIe siècles : une multiplication tardive des vicomtes au nord (où l’on dispose, sans doute, d’une meilleure documentation à partir de la fin du XIe siècle) ; au sud, au contraire, une rapide raréfaction, voire une disparition à laquelle le Dijonnais ducal apporte une exception de taille.
Une floraison septentrionale
- 6 Il convient néanmoins de signaler la vitalité de l’institution vicomtale dans ces régions, qui cont (...)
- 7 Yonne, I, no°95 : ce Wido vicecomes ne doit pas être confondu avec le vicomte de Dijon, Gui le Rich (...)
- 8 Molesme, I, no°22 et 28 (= Yonne, I, no°106) : Olricus vicecomes dans les deux cas.
- 9 Molesme, I, no°86 : strenuissimus miles Olricus nomine, Barrensis castri vicecomes ; id., no°105 : (...)
- 10 Cf. Yonne, I, 129 (1125/1136) et 259 (1146) ; Jully, p. 3 (1128) et 48 (1180).
- 11 Eudes, son fils Renaud, et Viard : Yonne I, no°129 (1125/1136), 240 (1144), 353-355 (1153) ; II, no(...)
- 12 Molesme, I, no°14 (1076/1077). Autres mentions vicomtales d’Evrard : id., I, no°21, 163-164. Son fi (...)
- 13 Molesme II, no°672 (1107/1116) : Guido vicecomes Clari Montis, identique à Guiardus vicecomes de id (...)
- 14 Saint-Bénigne, no°375 IV [1092-1101] : donation faite in presentia Vuidonis, comitis Saliciensis, e (...)
- 15 J. Richard, Ducs de Bourgogne, p. 89.
- 16 Gui de Grancey, frère du seigneur Girard de Grancey, est la souche des comtes de Saulx du XIIe sièc (...)
- 17 Cf. Chevrier-Chaume, « répertoire biographique », p. 311 (soulignent que le nom d’Hilbertus est « f (...)
- 18 Même s’il est, par deux fois, présenté comme heres du seigneur (dominus) Josbert de Meuse. Les sire (...)
6Commençons par les comtés septentrionaux, dont la « situation vicomtale » n’est pas sans évoquer les régions voisines, relevant de la province ecclésiastique de Sens hors de notre zone d’étude6. Un premier vicomte, nommé Gui, est mentionné en Tonnerrois dans les années 1058/10657. Son fils ( ?), le vicomte Ouri, apparaît d’abord comme témoin du comte de Tonnerre, puis du comte de Bar-[sur-Seine]8 : dès le début du XIIe siècle, cet « Ouri de Tonnerre » se qualifie de « vicomte du château de Bar9 », titre relevé par ses descendants10 alors que d’autres vicomtes se succèdent à Tonnerre au XIIe11. Ailleurs, la transmission héréditaire du titre vicomtal n’est pas évidente. Cela tient peut-être aux circonstances politiques : un vicomte Évrard est mentionné dans le comté de Bar-[sur-Aube] dans l’un des derniers actes du comte Simon (1076/1077) ; il conserve le titre vicomtal après le transfert du Barrois au comte de Troyes, mais son fils Renaud, seigneur de La Ferté-[sur-Aube], n’en est jamais revêtu12. On relève d’autres vicomtes isolés, comme « Gui, vicomte de Clefmont », dans le Bassigny des « comtes de Clefmont » au début du XIIe siècle13, ou le vicomte Ybert qui accompagne, quelques années plus tôt, le comte Gui de Saulx14. Jean Richard inclinait à voir en Ybert « un cadet de la famille seigneuriale de Saulx dont le chef se serait considéré comme en droit d’attribuer un titre vicomtal en tant que comte de Langres15 ». En fait, rien ne permet de rattacher l’intéressé à la famille comtale, ni même à celle des seigneurs de Grancey dont elle est issue16. Son homonymie avec Hilbertus de Curtaone, miles de Salice, connu vers 1130, laisse penser que les comtes de Saulx ont recruté un vicomte parmi les vassaux de leur château17. De même, le titre de vicecomes Clari Montis semble montrer que le vicomte Gui, en Bassigny, est étroitement associé – sinon subordonné – aux comtes de Clefmont18.
7Dans les comtés lingons plus méridionaux (et moins nombreux), la question vicomtale paraît nettement plus simple. Dans l’ancien pays d’Atuyer où, désormais, les seigneurs de Beaumont-[sur-Vingeanne] et ceux de Fouvent se partagent l’autorité comtale, aucun vicomte ne paraît exister aux XIe-XIIe siècles. On ne connaît, en outre, aucun successeur au vicecomes Oscarensium de 892. En revanche, des vicomtes apparaissent à Dijon au XIe siècle : leur institution semble étroitement liée à l’affirmation de l’autorité ducale. Du moins est-ce la conclusion suggérée par les corrections qui paraissent nécessaires dans la liste des vicomtes de Dijon.
- 19 Le vicomte Robert, père de Lambert de Chalon, ne semble pas pouvoir être qualifié de « vicomte de D (...)
- 20 Chronique de Saint-Bénigne, p. 189 ; Chronique de Bèze, p. 259. Ce sont les seuls textes relatifs à (...)
- 21 Sur Hunaud, cf. Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 292.
- 22 Saint-Bénigne, no°274 : Raoul est encore simple moine.
- 23 Bouchard, Sword, p. 307.
- 24 Chr. Settipani, « Les origines maternelles… », p. 27.
8Le plus ancien vicomte de Dijon appartiendrait au Xe siècle : il s’agirait de Raoul le Blanc19, devenu moine à Saint-Bénigne, puis grand-prieur de Bèze aux débuts de l’abbé Guillaume de Volpiano (990). Ces indications proviennent de la Chronique de Bèze (rédigée vers 1135), dans un passage emprunté à celle de Saint-Bénigne (rédigée vers 1050) mais auquel d’importants remaniements ont été apportés20. Le chroniqueur de Saint-Bénigne explique qu’au début de son abbatiat, Guillaume « retînt auprès de lui » le jeune Hunaud, futur prieur de Saint-Michel de Tonnerre21, puis il évoque le cas de Raoul le Blanc (futur grand-prieur de Bèze). Celui de Bèze inverse la chronologie de deux personnages, afin d’accorder les premières faveurs de Guillaume à Raoul, qu’il considère comme le véritable restaurateur de Bèze. Ce faisant, il fausse la date de son accession au priorat, qui n’est pas antérieure à 1020/102122 ! Constance Bouchard voit en Raoul l’un des fils du comte Lambert de Chalon23. L’hypothèse est écartée, pour d’évidentes raisons d’ordre chronologique, par Christian Settipani pour qui Raoul le Blanc « appartient de toute évidence à la génération suivante et pourrait être un fils du comte Raoul24 ». Mais la parenté entre le comte Raoul (milieu Xe) et Raoul le Blanc (…1020/1021…) reste difficile à préciser, et le titre vicomtal de ce dernier nous paraît loin d’être pleinement assuré : seul le chroniqueur de Bèze qualifie Raoul de vicecomes Divionensis ; celui de Saint-Bénigne le présente comme quidam huius castri Divionensis civis, nobili ortus genere et, malheureusement, aucun autre texte n’évoque le personnage. Bref, le titre et la chronologie de Raoul le Blanc sont fournis par une source trop contestable pour que celui-ci puisse être maintenu dans la liste des vicomtes de Dijon.
- 25 Vita Garnerii (prévôt de Saint-Etienne de Dijon), dans Recueil des historiens de la Gaule, X, p. 38 (...)
- 26 Saint-Germain, I, p. 79 : Wido miles cognomento Burgundiolus, habituellement identifié à Gui le Ric (...)
- 27 Saint-Bénigne, no°260 : S. Vuidonis militis. Ce diplôme de Robert le Pieux est daté du 6 février 10 (...)
- 28 Saint-Germain, I, no°57 : S. Widonis vicecomitis Divionis.
- 29 Saint-Bénigne, no°324.
- 30 Saint-Etienne, no°75 (après 1050). Proconsul désigne un vicomte, consul un comte. A la même époque, (...)
9Sur cette liste, telle qu’elle est communément admise, une seconde correction paraît souhaitable. Elle concerne ce Gui le Riche qui aurait été vicomte dès 1015. D’après la Vita Garnerii, le comte Hugues de Beaumont et son consanguineus « Gui, surnommé le Riche, vicomte de Dijon », auraient confié la défense du castrum de Dijon à un certain Humbert de Mailly lorsque le duc Robert entreprit de s’en emparer (1015)25. Or, Gui le Riche n’apparaît pas avant 103026 ou 103127, encore simple miles, et il n’est cité qu’une seule fois comme vicecomes Divionis en 1042/1043 : sa souscription vient curieusement en dernière position, sur une charte du duc Robert, après celle de plusieurs milites et même du prévôt de Beaune28. Gui redevient d’ailleurs simple miles Divionensis dès le 1er mars 104329, après avoir transmis le titre vicomtal à son fils Gautier, que le vocabulaire romanisant en vogue à Dijon au milieu du XIe siècle désigne également comme « proconsul30 ». Gui le Riche semble donc n’avoir porté que tardivement et momentanément le titre de vicomte. Cela aura suffit au rédacteur de la Vita Garnerii pour le lui attribuer rétrospectivement, dès 1015. L’aurait-il conservé s’il avait réellement été l’un des principaux organisateurs de la résistance dijonnaise au duc Robert ? Cela paraît d’autant moins vraisemblable qu’un, voire deux autres personnages l’ont précédé Gui le Riche dans la dignité vicomtale.
- 31 Saint-Bénigne, no°260 : S. Remigii vicecomitis. S. Vuidonis militis…
- 32 Saint-Bénigne, no°198 (990/1007) : coram Richardo comite atque Hugone et Odone fratribus ejus, alii (...)
- 33 Une série de « comtes de Dijon » couvre la seconde moitié du Xe siècle, de Raoul (951-958) à Richar (...)
- 34 Cf. Saint-Bénigne, no°338 (1054) : Sur les six semaines pendant lesquels le duc a l’exclusivité de (...)
10Le premier est le vicomte Rémi, dont la souscription précède celle de Gui, pour lors miles, dans le diplôme de Robert le Pieux daté du 6 février 1016, mais rédigé en 103131. Rémi est d’ailleurs issu des mêmes rangs que Raoul le Blanc et Gui le Riche, celle des cives Divionenses, les « nobles hommes de Dijon » qui assistent le comte Richard quelques années auparavant 32. La disparition des comtes de Dijon33, puis la mainmise ducale sur le castrum ont dû s’accompagner de l’institution d’un vicomte – concession faite à la notabilité locale, conciliable avec un meilleur contrôle ducal de ce qui subsiste du comitatus34.
- 35 Saint-Bénigne, no°315 : S. Airardi vicecomitis.
- 36 On ne connaît aucun vicomte ducal ailleurs qu’à Dijon et à Beaune (cf. infra). Contra : Chevrier-Ch (...)
- 37 Cf. les identifications faites par les éditeurs : Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », pas (...)
- 38 Cluny, no°2949 : S. Eyrardi vicecomitis.
- 39 Saint-Bénigne, no°338, précité (cf. tunc).
- 40 Saint-Bénigne, no°375 (1092-1101) : [I] Potestatem itaque ville, supranominate tenuit quidam Vuido, (...)
11Rémi dut avoir pour successeur immédiat, non pas Gui le Riche, mais un certain Erard dont on possède deux mentions simultanées (1034/1039). La première se trouve dans la restitution ducale de la pôtée de Veuvey, située en Beaunois mais dépendante de l’abbaye dijonnaise de Saint-Bénigne35. La question se pose donc de savoir si Erard doit être considéré comme vicomte de Dijon ou de Beaune36 ? En dépit de l’absence de date de lieu et de précision géographique accolée au titre de vicecomes, le contexte suggère une réponse : le duc de Bourgogne agit, en l’espèce, entouré de plusieurs évêques et de tout un groupe de personnages qui, soit laïques, appartiennent au Dijonnais ou à l’Atuyer, soit ecclésiastiques, sont les dignitaires de l’église de Langres37 : par conséquent, Erard paraît être vicomte de Dijon, plutôt que de Beaune. C’est d’ailleurs une seconde charte ducale relative à la pôtée dijonnaise de Gevrey qui fournit la seconde mention du vicomte Erard38. Curieusement, le nom d’Erard se retrouve, quelques années plus tard (1042/1043), dans une autre charte du duc Robert, accompagné du titre de miles Castellione : sa souscription précède celle – évoquée ci-dessus – de « Gui, vicomte de Dijon ». L’identification de ce chevalier au vicomte homonyme n’est pas prouvée, mais on peut remarquer que, de tous les premiers vicomtes connus de Dijon, Erard est le seul à ne pas figurer parmi les cives Divionenses. Il ne paraît pas impossible que le duc Robert ait tenté d’imposer un vicomte étranger au castrum. La nomination de Gui le Riche montrerait, en ce cas, que le duc de Bourgogne a pourtant dû composer avec la noblesse locale. Ce schéma reste très hypothétique, et ne doit pas occulter le fait que les seuls éléments fiables dont on dispose sur les premiers vicomtes de Dijon – Rémi (1031), Erard (1034/1039) et Gui (1042/1043) – proviennent de chartes ducales. C’est dans un second temps, après l’abandon du comitatus Divionensis par le duc Robert39, que le titre vicomtal gagne en autonomie comme en témoigne sa transmission par voie matrimoniale dans la seconde moitié du XIe siècle : la dignité vicomtale passe en effet, par mariage, du « proconsul » Gautier, fils de Gui le Riche, à Thibaud de Beaune, puis à Josbert le Roux, seigneur de Châtillon, dont le fils, Josbert de La Ferté, mourra sans enfants : l’union de sa nièce Sybille avec Eudes le Champenois permettra aux seigneurs de Champlitte de devenir vicomtes de Dijon à partir de 117040.
Les vicomtes de Beaune
- 41 Le castrum de Beaune, attesté dès 958, est le siège d’une curia comitis mentionnée en 1004. Au débu (...)
12L’installation de vicomtes est également attestée, comme pratique ducale, à Beaune. Cet autre castrum, proche de celui de Dijon mais relevant de l’ancien pagus Augustodunensis, est lui aussi le siège d’un comitatus dévolu au duc à partir de 101641.
- 42 Ce vicomte Eudes est essentiellement connu comme fondateur du prieuré Saint-Etienne de Beaune par u (...)
- 43 Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 266.
- 44 Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 293.
- 45 Chronique de Saint-Bénigne, p. 166 [= Saint-Bénigne, no°243].
- 46 Saint-Bénigne, no°315. Le vicomte Erard mentionné dans les souscriptions paraît être un vicomte de (...)
13Dans les premières années du XIe siècle, apparaît un vicomte Eudes qui s’intitule simplement vicecomes, mais que le roi Robert qualifie de vicecomes Belno castri : la Chronique de Saint-Bénigne nous apprend qu’il est le fils (naturel) d’Henri le Grand, duc de Bourgogne, ce qui en dit suffisamment sur les raisons de son installation comme vicomte à Beaune42. Aucun de ses deux fils ne paraît lui avoir succédé dans le titre vicomtal. Le premier, Azelin, alias Ainon, est attesté comme abbé de Moutier-Saint-Jean (en Tonnerrois) de 1012 à 104043. Le second, Jean, a pu être présenté comme vicomte de Beaune44, mais le chroniqueur de Saint-Bénigne ne lui attribue pas cette qualité45, et c’est sans titre qu’il souscrit, en 1034/1039, la charte par laquelle le duc Robert restitue la pôtée beaunoise de Veuvey à Saint-Bénigne46.
- 47 En ce sens déjà : M. Chaume, « Les anciens vicomtes de Beaune et la fondation de Cîteaux », Bulleti (...)
- 48 Saint-Germain I, no°57 : S. domini Roberti ducis ; S. domne Helie sue uxoris ; S. Hugonis filii eju (...)
14Le vicomte Thibaud, témoin à une donation de ce même duc Robert et de sa femme Hélie, en 1042/1043, est vraisemblablement vicomte de Beaune47 : l’acte consiste en une donation de la terre de Villebichot, sise in pago Belnensi, et l’autre souscription vicomtale de l’acte (S. Widonis vicecomitis Divionensis) permet d’exclure Dijon48. Le personnage ne doit pas être confondu avec « Thibaud de Beaune » qui devient vicomte de Dijon à la fin du XIe siècle.
- 49 Cluny, no°3516 : Hugo, vicecomes de Belna, et Rainardus, frater ejus.
- 50 Saint-Bénigne, no°398 : Raynardum vicecomitem Belnensem.
- 51 Cf. M. Chaume, art. cit., p. 73-74. Cîteaux, no°23.
- 52 Cîteaux, no°101.
15Deux autres personnages sont formellement attestés comme « vicomtes de Beaune » dans le dernier quart du XIe siècle. Le premier, Hugues, est connu par une seule mention : il figure, avec son frère Renard, parmi les laudatores et testes du duc Eudes, lorsque celui-ci donne à l’abbaye de Cluny, en 1076/1079, la pôtée de Montelie dont il avait précédemment doté sa femme Sybille49. Le second est ce Renard donné comme fidejussor par le duc Eudes qui renonce, en 1101, à certaines mauvaises coutumes avant son départ à Jérusalem50. Généralement identifié au frère précité du vicomte Hugues, le vicomte Renard pourrait aussi être le fils. Il est surtout connu pour son rôle actif, en 1098/1099 et aux côtés du duc de Bourgogne, dans la fondation de l’abbaye de Cîteaux, située aux confins des diocèses de Chalon et d’Autun, sur une terre venant du patrimoine de sa femme Hodierna51. Lorsque les cinq fils de Renard confirment et complètent les libéralités paternelles, en 1134/1143, aucun ne porte le titre vicomtal52 : celui-ci ne fait donc pas l’objet d’une transmission héréditaire à Beaune.
- 52 Le « vicomte » Houdoin est évoqué, sans précision ni référence, par J. Richard, Les ducs de Bourgog (...)
- 53 Saint-Bénigne, no°367 : donation par Girard, sire d’Arnay cum laude et consensu domini mei Aganonis (...)
- 54 Saint-Bénigne, no°371 (1088/1098) : parmi les témoins, Hugo archidiaconus, Girardus, Oddo (non titr (...)
- 55 Rien par exemple, en dehors de l’homonymie, ne permet de lier les vicomtes Eudes de 1004/1005 et de (...)
16Plusieurs historiens de la Bourgogne ont voulu compter le Beaunois au nombre des comtés dans lesquels « le vicecomitatus s’est dédoublé », et ont ajouté au vicomte résidant à Beaune, un autre personnage portant le même titre à l’ouest du pagus : il s’agirait, en l’occurrence, d’un certain Houdoin, puis d’un Eudes « frère du premier seigneur connu d’Arnay-le-Duc et d’Houdoin de Mimeure », dont la vicomté aurait pour siège le château d’Antigny. Le premier de ces vicomtes paraît fictif52. Le second est effectivement mentionné en 108853, c’est-à-dire entre les vicomtes Hugues (1076/1079) et Renard (1098). Cela suffit-il à prouver une dualité vicomtale en Beaunois à la fin du XIe siècle ? On ne connaît aucun successeur à Eudes qui, par ailleurs, semble avoir perdu son titre peu après son unique mention comme vicomte54. L’hérédité du titre vicomtal n’étant pas démontrée à Beaune55, nous sommes donc plus enclin à porter Eudes sur une liste unique de vicomtes de Beaune, intercalé entre Hugues et Renard, qu’à voir en lui la souche d’un second lignage vicomtal en Beaunois.
LA RARÉFACTION DES VICOMTES EN BOURGOGNE MÉRIDIONALE. L’EXCEPTION DES VICOMTES DE MÂCON
- 56 Flavigny, no°40 (1004). Sur le comte Aimon, G. de Manteyer, Les origines de la Maison de Savoie en (...)
- 57 Sur la « décadence du pouvoir comtal […] en Auxois et en Duesmois », cf. J. Richard, Les ducs de Bo (...)
- 58 Les comtes de Chalon dominent la région charolaise, sans que cela ait un rapport avec le prétendu s (...)
- 59 En ce sens, p. ex., J. Richard, Les ducs de Bourgogne, p. 89.
17Eudes (1003-1005), Thibaud (1042/1043), Hugues (1076/1079), un second Eudes (1088), puis Renard (1098-1101) : force est de constater, en l’état des sources disponibles, qu’un seul vicomte paraît simultanément en fonction dans l’Autunois ducal : le premier, au début du XIe siècle, se dit simplement « vicomte » mais il est effectivement considéré comme « vicomte du château de Beaune » (1005) ; les suivants portent tantôt le seul titre de vicecomes, tantôt celui de vicecomes Belnensis. Cette terminologie flottante peut-elle s’expliquer par le fait que ces vicomtes étendent leur ressort sur les comtés éduens voisins ? En 1004, un vicomte Gérard souscrit une donation testamentaire du comte Aimon, amministrator rei publice comitatus Alsinsis atque Dusmensis56. Mais aucun autre vicomte n’a pu être repéré, ni en Auxois, ni en Duesmois, pas plus avant qu’après cette mention isolée57. Le Mémontois voisin, pour lequel on ne connaît pas de comtes particuliers, semble également dépourvu de vicomtes. L’absence de « vicomtes d’Autun » est un autre trait caractéristique58. Réduit à la portion méridionale de l’ancien pagus Augustodunensis, le comté d’Autun relève directement des ducs de Bourgogne au XIe siècle. Pourtant, contrairement à ceux de Beaune et de Dijon, c’est un comté sans vicomte59. On ignore si cela a un lien avec le fait qu’Autun soit le siège d’une civitas, et non d’un castrum comme les précédents. Autun n’est pas la seule cité désormais dépourvue de vicomtes : une telle absence est au contraire de règle en Bourgogne méridionale.
- 60 Les noms des deux évêques contemporains de Chalon, Raoul (977-994) et Lambert (994-1015), posent la (...)
- 61 Saint-Marcel, no°107 (960).
- 62 Paray, no°8 (977) : Rodbertus igitur vicecomes Cabilonensis, frater domni Lamberti comitis, vir inl (...)
- 63 En 1019, un Ugo vicomes (sic) appose sa souscription à un acte de l’évêque Hugues d’Auxerre, comte (...)
- 64 Un Robert, vicedominus Cabilonensis, est mentionné en 1087 (Saint-Bénigne, no°364). Pour Chevrier-C (...)
- 65 Cluny, no°2925 (la date de l’acte est à déduire des souscriptions des comtes Hugues et Thibaud) : S (...)
18L’apparition d’un « vicomte de Chalon », au milieu du Xe siècle, est la conséquence de la promotion comtale de Robert, vicomte du comte Gilbert, et d’une répartition des rôles entre ses deux fils, sans doute destinée à « verrouiller » un pouvoir désormais nettement territorialisé60. Le fils aîné, Lambert, est associé à son père dans les fonctions comtales61 ; le cadet, Robert, apparaît peu après, pourvu du titre vicomtal. Les mentions du vicomte Robert, attesté de 968 à 999, sont relativement nombreuses. Deux actes le désignent de façon explicite comme vicecomes Cabilonensis ou vicecomes Cabilonis civitate62 ; le premier ajoute au titre vicomtal l’ancien prédicat de vir inlustris, mais réserve le qualificatif de dominus à son frère, le comte Lambert : il consiste en une donation de manse à l’abbaye de Paray que ce dernier vient de fonder ; le second est la restitution d’un homme à l’abbaye de Saint-Marcel per voluntatem senioris [sui] Hugonis comitis : la fonction vicomtale maintient donc Robert dans un lien d’étroite subordination, même après que son neveu Hugues, futur évêque d’Auxerre, ait succédé au comte Lambert ( 978). Robert n’agit donc jamais seul. Dans la demi-douzaine d’autres actes qui le mentionnent, il paraît systématiquement aux côtés de son comte de parent. Cette apparente absence d’autonomie réduit pour ainsi dire l’honneur vicomtal à un simple titre. Celui-ci ne survit d’ailleurs pas à Robert : Hugues se contentera d’associer son neveu Thibaud à l’exercice du pouvoir comtal – avec le titre de comes – quelques années avant qu’il ne prenne sa succession à Chalon ; et il ne paraît pas que le comte Thibaud ait jamais eu de vicomte63, ni ses successeurs64. Il est vrai qu’une vicomtesse Ermessende souscrit, avec les comtes Hugues et Thibaud, la donation d’un vicomte Guigue dans les années 1030 ; mais la présence des comtes de Chalon à cet acte qui intéresse le Lyonnais, paraît uniquement s’expliquer par leur parenté avec cette Ermessende65. Il n’y a donc plus de vicomte à Chalon après 999.
- 66 Sur Adémar : Cluny, no°656. Il n’existe aucun travail satisfaisant sur les vicomtes de Lyon en géné (...)
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- 75 Mâcon, no°96 et 268 (ces deux actes évoquent Hugo/Ugo vicecomes, mais la mention de Willelmus frate (...)
- 76 Dernière mention de Guigue : Savigny, no°648 (1030/1037) ; première d’Archimbaud : Cluny, no°2922 ( (...)
- 77 Ce que l’on peut déduire, pour Montmerle, de sa pseudo-donation du castrum (Cluny, no°2925) et du f (...)
- 78 Cf. Cluny, no°2925.
- 79 Au point qu’un acte de la fin du XIe siècle mentionne encore une terre ayant appartenu à son cuisin (...)
- 80 Guigue est donc présent en tant que seigneur du château voisin, même s’il arbore son titre de vicom (...)
19Guigue est le seul « vicomte de Lyon » attesté en tant que tel, postérieurement au vicomte Adémar de 94466. Mais le titre de vicecomes Lugdunensis lui est conféré par la seule rubrique d’une charte clunisienne, sur l’exactitude de laquelle (sic) il est permis de s’interroger67. Guigue est simplement qualifié de vicomes dans le corps de l’acte, qui lui-même paraît assez douteux : connu seulement par l’intermédiaire du cartulaire B de Cluny (début XIIe), son contenu est en contradiction avec d’autres textes relatifs aux biens concernés, dont certains ont en outre fait l’objet d’une longue contestation entre les moines de Cluny et un potentat voisin, Robert l’Enchaîné68. L’existence du vicomte n’est pas en cause : c’est un personnage influent, que le pape Benoît VIII compte parmi les principes et optimates totius Burgundiae en 102269, et qui intervient notamment, en compagnie d’autres « princes » dans une affaire lyonnaise au cours des années 103070. Ce profil atypique, pour un vicomte, est renforcé par le grand nombre de mentions et de renseignements que la documentation fournit sur le personnage. Tout porte à croire qu’un seul et même personnage se cache derrière 1°) Guigue, frère de Lambert, Bérard et Guillaume, mentionné sans titre au début des années 99071 ; 2°) le vicomte Guigue, fils de Bérard et Blismode, frère de Guichard, et mari d’Eufémie, jusqu’au début des années 103072 ; 3°) le vicomte Guigue, frère de Guillaume, cité autour des années 102073 ; et 4°) les multiples mentions d’un vicomte Guigue (sans indication de parenté) entre 1017 et 1033 environ74. En revanche, différents éléments semblent désigner Guigue, non pas comme vicomte de Lyon, mais comme vicomte de Mâcon : il assiste le comte Otton II, à plusieurs reprises, entre 1018 et 103075 ; sa femme Eufémie est la fille du vicomte Narduin [de Mâcon] (964-966) ; lui-même, dès 982, arbore une première fois le titre vicomtal que Narduin, au soir de sa vie, ne porte plus ; et l’on perd sa trace peu avant 1037, date à laquelle Archimbaud le Blanc est à son tour attesté comme vicomte de Mâcon76. Guigue apparaît donc comme un personnage influent, possesseur de nombreuses terres tant en Mâconnais qu’en Lyonnais, le long de la vallée de la Saône, où il contrôle les châteaux de Montmerle et, sans doute, de Riottiers77. Amicus et propinquus des puissants comtes de Chalon78, il passe également – nous l’avons dit – pour l’un des « princes de la Bourgogne ». Bien qu’il paraît avoir marqué ses contemporains79, des zones d’ombre n’entourent pas moins, pour nous, le personnage : vicecomes dès 982, il ne ressurgit avec cette qualité et ne se montre actif qu’entre 1015 et 1035 environ. Vicomte de Mâcon, certainement, l’est-il également de Lyon ? Sa possession de Montmerle suffit à expliquer son intervention dans l’affaire lyonnaise de 1030/1037 : l’église d’Arnas, qui en est au cœur, jouxte ses propres possessions80. Et les Le Blanc, qui lui succèdent comme vicomtes de Mâcon, ne seront jamais en Lyonnais que co-seigneurs de Riottiers.
- 81 Sur les Le Blanc, J. Richard, « Aux origines du Charolais. Vicomté, viguerie et limites du comté en (...)
- 82 Cluny, no°2777 (1023) et 2845 (av. 1031).
- 83 Hypothèse suggérée par J. Richard, « Aux origines… » p. 99. Pour un indice en ce sens, cf. le nom d (...)
- 84 Cf. l’acte par lequel le vicomte Hugues [fils d’Archimbaud] donne au chapitre Saint-Pierre de Mâcon (...)
- 85 Cf. note précédente. C’est évidemment à tort que Bernard conclut à l’existence d’une « vicomté terr (...)
- 86 Comme la garde des chemins, cf. Mâcon, no°589 (début XIIe) : Preterea dixerunt comitis esse caminos (...)
- 87 Mâcon, no°622 ; Cluny, no°4279 ; Forez, no°1289-1291.
- 88 Forez, no°1296 (1180/1190) : Artaudus li Blans, quondam vicecomes Matisconensis (« Naguère vicomte, (...)
- 89 Cluny, no°4312 (1187).
- 90 Note des éd. sous Forez, no°1296 (n. 2, p. 44).
- 91 Sur les enfants d’Artaud : Forez, no°31 (1220).
20Les Le Blanc sont, avec et après Guigue, les seuls vicomtes bourguignons à recevoir le titre de dominus. Ce n’est pas à leur fonction vicomtale qu’ils le doivent mais, comme leur prédécesseur, à leur pouvoir propre : les Le Blanc font longtemps figure de grands seigneurs grâce à leurs châteaux de Montmelard et Bois-Sainte-Marie en Autunois méridional, de Dun-le-Roi et Châteauneuf au Sud du Mâconnais, et de Crozet en Roannais81. Fils aîné d’un Artaud mentionné autour de l’an mil, Étienne tient des terres en bénéfice du comte de Mâcon82. Il meurt avant 1031, et c’est son frère Archimbaud qui, le premier, porte dès 1037 le titre vicomtal. Il est possible qu’un mariage soit à l’origine de cette acquisition83. Cependant, le vicecomitatus reste, au XIe siècle comme à l’époque carolingienne, un « honneur » tenu du comte84 : c’est une fonction assortie d’une dotation (res de vicecomitatu)85 et emportant certaines obligations86. L’institution n’en a pas moins évolué, puisque le titre vicomtal fait désormais l’objet d’une transmission héréditaire, renforcée par la longévité du lignage. Chaque fils aîné, dans la descendance d’Archimbaud, sera donc vicomte de Mâcon, jusqu’à la fin du XIIe siècle. Artaud le Blanc est le dernier de sa lignée à revêtir le titre de vicomes Matisconensis en 118087. Quelques années plus tard, le quondam d’un scribe prend acte de sa déchéance88 : victime d’une « ruine retentissante », il n’est plus que seigneur de Châteauneuf89. Malheureusement « on n’a jamais expliqué, de façon satisfaisante, faute de textes explicites, la ruine d’Artaud et la perte de la dignité vicomtale, pourtant depuis longtemps héréditaire, et qu’il dut céder à un agnat90.» La seconde est, à n’en pas douter, la conséquence de la première, et non d’une extinction lignagère91. Toute la question reste de savoir si elle résulte d’une déchéance ou d’un abandon…
Notes
1 Abréviations des sources citées :
– Cîteaux : J. Marilier, Chartes et documents concernant l’abbaye de Cîteaux 1098-1182, Rome, 1961.
– Chronique de Bèze : Chronique de l’abbaye de Saint-Bénigne de Dijon suivie de la chronique de Saint-Pierre de Bèze, éd. Bougaud et Garnier, Dijon, 1875.
– Chronique de Saint-Bénigne : idem.
– Cluny : Recueil des chartes de l’abbaye de Cluny, formé par A. Bernard, complété, révisé et publié par A. Bruel, Paris, 1876-1894.
– Flavigny : The Cartulary of Flavigny, édité par C.B. Bouchard, Cambridge (Mass.), 1991.
– Forez : Chartes du Forez antérieures au XIVe siècle, publiées sous la dir. de G. Guichard et alii, Mâcon, 1933-1980.
– Langres : Chartes inédites des IXe et Xe siècles appartenant aux archives de la Haute-Marne (851-973), publiées par A. Roserot, Auxerre-Paris, 1897.
– Mâcon : Cartulaire de Saint-Vincent de Mâcon connu sous le nom de Livre enchaîné, publié par M.-C. Ragut, Mâcon, 1864.
– Molesme : Cartulaires de l’abbaye de Molesme, publiés par J. Laurent, Paris, 1907.
– Paray : Cartulaire du prieuré de Paray-le-Monial, suivi d’un appendice de chartes, publiés par le chanoine U. Chevalier, Paris, 1890.
– Saint-Bénigne : Chartes et documents de Saint-Bénigne de Dijon, publiés et annotés par G. Chevrier et M. Chaume, Dijon, 1953-1986.
– Saint-Benoît : Recueil des chartes de l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, réunies et publiées par M. Prou et A. Vidier, Paris, 1900.
– Saint-Etienne : Les chartes de l’abbaye de Saint-Étienne de Dijon des origines au XVe siècle, vol. 1, éd. J. Courtois, Dijon, 1907.
– Saint-Germain : R. Poupardin, Recueil de chartes de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, Paris, 1909.
– Saint-Marcel : The Cartulary of St.-Marcel-lès-Chalon, édité par C.B. Bouchard, 1998.
– Savigny : Cartulaire de l’abbaye de Savigny, suivi du petit cartulaire de l’abbaye d’Ainay, publié par A. Bernard, Paris, 1853.
– Yonne : Cartulaire général de l’Yonne, édité par M. Quantin, Auxerre, 1854-1860.
2 G. Duby, La société en Mâconnais aux XIe et XIIe siècles, Paris, 1971 (réimpr. 1988).
3 Voir surtout R.-H. Bautier, « Les diplômes royaux carolingiens pour l’église de Langres et l’origine des droits comtaux de l’évêque » (1985), repris dans Chartes, sceaux et chancelleries. Études de diplomatique et de sigillographie médiévales, Paris, 1990, I, p. 209-242.
4 Cf. R.-H. Bautier, art. cit., p. 237-238, et J. Richard, Les ducs de Bourgogne et la formation du duché du XIe au XIVe siècle, Dijon, 1954, p. 80-84.
5 Sur ces familles, C.B. Bouchard, Sword, Miter and Cloister. Nobility and the Church in Burgundy, 980-1198, Ithaca-Londres, 1987, Appendix A, p. 255 et suiv. Nombreux renseignements, également, dans G. Chevrier et M. Chaume, « Répertoire biographique », dans Saint-Bénigne, II, p. 261 et suiv.
6 Il convient néanmoins de signaler la vitalité de l’institution vicomtale dans ces régions, qui contraste avec ce que l’on observe en Bourgogne méridionale. La consultation du Cartulaire général de l’Yonne donne une idée cette présence vicomtale : on ne relève pas moins de 90 mentions vicomtales dans les deux premiers tomes, qui comptent presque 900 actes des XIe-XIIe siècle : les vicecomites plus fréquemment cités sont les vicomtes de Sens, de Joigny, de Saint-Florentin et de Tonnerre, mais de nombreux actes concernent également ceux de Clamecy, de Rougemont, de Lagny, d’Avallon (on assiste même à une multiplication des lignées vicomtales en Avallois : aux vicomtes d’Avallon, connus à partir du dernier quart du XIe siècle, viennent s’ajouter des vicomtes de Blacy au milieu du XIIe, avant les vicomtes de Saulieu au XIIIe). En revanche, il est rarement question de vicomtes d’Auxerre.
7 Yonne, I, no°95 : ce Wido vicecomes ne doit pas être confondu avec le vicomte de Dijon, Gui le Riche (cf. infra).
8 Molesme, I, no°22 et 28 (= Yonne, I, no°106) : Olricus vicecomes dans les deux cas.
9 Molesme, I, no°86 : strenuissimus miles Olricus nomine, Barrensis castri vicecomes ; id., no°105 : vicecomes Olricus de Tornodoro. Il s’agit du même personnage, accompagné dans les deux cas de sa femme Leceline, de ses enfants Gui, Adam, Marguerite, etc.
10 Cf. Yonne, I, 129 (1125/1136) et 259 (1146) ; Jully, p. 3 (1128) et 48 (1180).
11 Eudes, son fils Renaud, et Viard : Yonne I, no°129 (1125/1136), 240 (1144), 353-355 (1153) ; II, no°418 (1190).
12 Molesme, I, no°14 (1076/1077). Autres mentions vicomtales d’Evrard : id., I, no°21, 163-164. Son fils Renaud (sans titre) : id., no°69, 100, 118, 164, 174.
13 Molesme II, no°672 (1107/1116) : Guido vicecomes Clari Montis, identique à Guiardus vicecomes de id., no°671 et 674.
14 Saint-Bénigne, no°375 IV [1092-1101] : donation faite in presentia Vuidonis, comitis Saliciensis, et Hilberti vice comitis. Voir aussi le no°379.
15 J. Richard, Ducs de Bourgogne, p. 89.
16 Gui de Grancey, frère du seigneur Girard de Grancey, est la souche des comtes de Saulx du XIIe siècle, lui-même comte des années 1070 aux années 1120. Sur les Grancey, cf. Bouchard, Sword, p. 332-334.
17 Cf. Chevrier-Chaume, « répertoire biographique », p. 311 (soulignent que le nom d’Hilbertus est « fort rare en Bourgogne »).
18 Même s’il est, par deux fois, présenté comme heres du seigneur (dominus) Josbert de Meuse. Les sires de Choiseul, localement prépondérants, ne se diront jamais vicomtes au XIIe siècle (cf. C. Bouchard, Sword, p. 314-316).
19 Le vicomte Robert, père de Lambert de Chalon, ne semble pas pouvoir être qualifié de « vicomte de Dijon ». Cf. Chr. Settipani, « Les origines maternelles du comte de Bourgogne Otte-Guillaume », Annales de Bourgogne, 66 (1994), p. 5-63.
20 Chronique de Saint-Bénigne, p. 189 ; Chronique de Bèze, p. 259. Ce sont les seuls textes relatifs à ce Raoul.
21 Sur Hunaud, cf. Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 292.
22 Saint-Bénigne, no°274 : Raoul est encore simple moine.
23 Bouchard, Sword, p. 307.
24 Chr. Settipani, « Les origines maternelles… », p. 27.
25 Vita Garnerii (prévôt de Saint-Etienne de Dijon), dans Recueil des historiens de la Gaule, X, p. 382.
26 Saint-Germain, I, p. 79 : Wido miles cognomento Burgundiolus, habituellement identifié à Gui le Riche.
27 Saint-Bénigne, no°260 : S. Vuidonis militis. Ce diplôme de Robert le Pieux est daté du 6 février 1016, mais il a été rédigé en 1031, et les titres attribués aux témoins, dont les souscriptions rappellent les noms, sont contemporains de la rédaction de l’acte (voir les remarques des éditeurs, p. 49-51).
28 Saint-Germain, I, no°57 : S. Widonis vicecomitis Divionis.
29 Saint-Bénigne, no°324.
30 Saint-Etienne, no°75 (après 1050). Proconsul désigne un vicomte, consul un comte. A la même époque, le comte Thibaud est qualifié de Cabilonicae consul urbis (Cluny, no°3391).
31 Saint-Bénigne, no°260 : S. Remigii vicecomitis. S. Vuidonis militis…
32 Saint-Bénigne, no°198 (990/1007) : coram Richardo comite atque Hugone et Odone fratribus ejus, aliisque nobilibus viris Divionis castri, Vualterio, Hugone, Remigio, Humberto ; id., no°215 (1002/1016) : comes Richardus, cum pluribus civibus Divionensibus, videlicet Vualterio, Remigio, Humberto, aliisque nobilibus... On reconnaît Humbert de Mailly, auquel la Vita Garnerii attribue un rôle important. Gautier aurait-il un lien avec Gui le Riche, dont les fils portent les noms de Gautier et de Gui ? Il pourrait s’agir de son père.
33 Une série de « comtes de Dijon » couvre la seconde moitié du Xe siècle, de Raoul (951-958) à Richard (cité à la note précédente).
34 Cf. Saint-Bénigne, no°338 (1054) : Sur les six semaines pendant lesquels le duc a l’exclusivité de la vente du vin, quatre le sont au titre du ducatus, et deux pro Divionensi comitatu, quod tunc tenebam in mea manu.
35 Saint-Bénigne, no°315 : S. Airardi vicecomitis.
36 On ne connaît aucun vicomte ducal ailleurs qu’à Dijon et à Beaune (cf. infra). Contra : Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 270 : « II ne paraît pas qu’Erard ait été vicomte de Beaune ni de Dijon. On peut songer à un titre vicomtal attaché au Mémontois (il existe, en effet, un Erard de Blaisy à une date très voisine de celle-ci : Mirac. S. Benigni, 20) ; mais aussi à la vicomté dont Eudes, frère de Girard I, sire d’Arnay [-le-Duc] était titulaire un demi-siècle plus tard » (Sur cet autre Eudes, cf. infra.)
37 Cf. les identifications faites par les éditeurs : Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », passim.
38 Cluny, no°2949 : S. Eyrardi vicecomitis.
39 Saint-Bénigne, no°338, précité (cf. tunc).
40 Saint-Bénigne, no°375 (1092-1101) : [I] Potestatem itaque ville, supranominate tenuit quidam Vuido, cognomine Dives, qui habuit filium nomine Vualterium ; cujus scilicet Vualterii filiam sumpsit in matrimonio Tetbaldus de Belno, vice comes Divionensis ; de hoc autem Tetbaldo et de ista uxore ejus fuit orta quedam puella, quam sumpsit in uxorem Josbertus de Castellione. Josbert vicomte : Cluny, no°3809 (1101). Pour la suite, toutes références utiles dans Bouchard, Sword, p. 326.
41 Le castrum de Beaune, attesté dès 958, est le siège d’une curia comitis mentionnée en 1004. Au début du XIe, le comté est détenu par Otte-Guillaume, qui semble en avoir hérité de son beau-père, le duc Henri († 15 oct. 1002), mais en 1032, il fait retour au duc.
42 Ce vicomte Eudes est essentiellement connu comme fondateur du prieuré Saint-Etienne de Beaune par un groupe d’actes des années 1003-1005 : cf. Chronique de Saint-Bénigne, p. 164 [= Saint-Bénigne, no°220] ; Saint-Bénigne, no°227 (charte épiscopale de 1004) et 233 (diplôme royal de 1005). Le Nécrologe de Saint-Bénigne (Obituaire du XIIe s. = Dijon, BM, ms. 634) signale son décès : Depositio Odonis vicecomitis qui dedit monasterio sancti Benigni cellam Belnensem (cité par Chevrier-Chaume, II, p. 21).
43 Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 266.
44 Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 293.
45 Chronique de Saint-Bénigne, p. 166 [= Saint-Bénigne, no°243].
46 Saint-Bénigne, no°315. Le vicomte Erard mentionné dans les souscriptions paraît être un vicomte de Dijon (cf. supra).
47 En ce sens déjà : M. Chaume, « Les anciens vicomtes de Beaune et la fondation de Cîteaux », Bulletin de l’Académie de Dijon, 1923, p. 73-77, ici p. 75.
48 Saint-Germain I, no°57 : S. domini Roberti ducis ; S. domne Helie sue uxoris ; S. Hugonis filii ejus ; S. Henrici fratris ejus ; S. Willelmi comitis Nivernensis ; S. Humberti Vergiacensis ; S. Bosonis militis ; S. Theobaldi vicecomitis ; S. Harnardi militis Castellione ; S. Balduini militis, S. Rainaldi militis ; S. Hyngelerii militis ; S. Rainerii prepositi Belnensis ; S. Widonis vicecomitis Divionensis.
49 Cluny, no°3516 : Hugo, vicecomes de Belna, et Rainardus, frater ejus.
50 Saint-Bénigne, no°398 : Raynardum vicecomitem Belnensem.
51 Cf. M. Chaume, art. cit., p. 73-74. Cîteaux, no°23.
52 Cîteaux, no°101.
53 Saint-Bénigne, no°367 : donation par Girard, sire d’Arnay cum laude et consensu domini mei Aganonis, Heduensis episcopi, et fratrum meorum, Hugonis archidiaconi, Oddonis vicecomitis et Hulduini de Mimuris.
54 Saint-Bénigne, no°371 (1088/1098) : parmi les témoins, Hugo archidiaconus, Girardus, Oddo (non titré) et Hulduinus fratres ipsius…
55 Rien par exemple, en dehors de l’homonymie, ne permet de lier les vicomtes Eudes de 1004/1005 et de 1088.
56 Flavigny, no°40 (1004). Sur le comte Aimon, G. de Manteyer, Les origines de la Maison de Savoie en Bourgogne 910-1060, Rome, 1899, p. 506-507.
57 Sur la « décadence du pouvoir comtal […] en Auxois et en Duesmois », cf. J. Richard, Les ducs de Bourgogne, p. 83. Plus loin (p. 89), l’auteur classe le Duesmois dans la liste des comtés qui « gardent encore au XIe et XIIe siècles un vicomte unique », et l’Auxois dans celle des comtés où « le vicecomitatus s’est dédoublé » (« en Auxois, vers l’an mil, un vicomte paraît résider à Semur et un autre à Thil »), sans s’appuyer sur aucune référence. Le vicomte Gérard de 1004 est le seul que nous ayons pu rattacher à ces régions.
58 Les comtes de Chalon dominent la région charolaise, sans que cela ait un rapport avec le prétendu statut de vicomtes d’Autun de leurs prédécesseurs du Xe siècle.
59 En ce sens, p. ex., J. Richard, Les ducs de Bourgogne, p. 89.
60 Les noms des deux évêques contemporains de Chalon, Raoul (977-994) et Lambert (994-1015), posent la question de savoir si cette emprise familiale ne s’étend pas à la plus charge ecclésiastique. Bouchard, Sword, p. 391, ne paraît pas convaincue.
61 Saint-Marcel, no°107 (960).
62 Paray, no°8 (977) : Rodbertus igitur vicecomes Cabilonensis, frater domni Lamberti comitis, vir inlustris ; Saint-Marcel, no°9 (994/999) : Rotbertus vicecomes Cabilonis civitate. Autres mentions du vicomte Robert : Saint-Benoît, no°57 (968), Paray, no°165 (977) et 213 (999), Cluny, no°1383 (974), 1537 (980), 1789 (988) et 2484 (999).
63 En 1019, un Ugo vicomes (sic) appose sa souscription à un acte de l’évêque Hugues d’Auxerre, comte de Chalon (Cluny, no°2722). Pour cette raison, certains auteurs font de lui un « vicomte de Chalon » (Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 307). Ce Ugo souscrit cependant après l’évêque et le comte de Mâcon, auprès desquels on le retrouve en 1016/1022 (Mâcon, no°268) : il n’est autre que le vicomte Guigue de Mâcon, une correction de Ugo en Wigo s’imposant dans les deux actes cités.
64 Un Robert, vicedominus Cabilonensis, est mentionné en 1087 (Saint-Bénigne, no°364). Pour Chevrier-Chaume, « Répertoire biographique », p. 306), « il s’agit […] d’un vicomte de Chalon, plutôt que d’un vidame épiscopal ; on doit néanmoins observer que son signum est inséré parmi ceux des clercs, et non pas parmi ceux des laïques » ; c’est précisément ce qui nous conduit à la conclusion contraire, le Robert en question étant inconnu par ailleurs.
65 Cluny, no°2925 (la date de l’acte est à déduire des souscriptions des comtes Hugues et Thibaud) : S. Guigonis vicecomitis. S. Hugonis comitis. S. Tietbaldi comitis. S. Ermessendis vicecomitisse. S. Hugoni. Cette Ermessende, inconnue par ailleurs, paraît identique à la sanctimonialis parens mea nomine Ermensendis à laquelle Thibaud (1039-1065) fait allusion dans un acte sans date (Saint-Marcel, no°31). Les souscriptions de l’acte clunisien sont autrement inexplicables, malgré son caractère douteux (cf. infra).
66 Sur Adémar : Cluny, no°656. Il n’existe aucun travail satisfaisant sur les vicomtes de Lyon en général, ni sur le vicomte Guigue en particulier. Les articles d’A. Bernard (« Essai historique sur les vicomtes de Lyon, de Vienne et de Mâcon du IXe au XIIe siècle », Revue forézienne, 1867, p. 101-125 et 153-171) et de J. Deniau (« Note sur les vicomtes de Lyon aux Xe et XIe siècles », Bulletin de la Diana, XXX (1947), p. 42-46) sont sans intérêt. Autrement plus sérieuse, la thèse d’H. Gerner (Lyon im Frühmittelalter, Cologne, 1968, p. 133-135) s’intéresse à Guigue, mais appelle certaines corrections.
67 Cluny, no°2925 : Charta qua Guigo vicecomes Lugdunensis dat monasterio Cluniacensi castrum Monti Meruli et alias res in villis Liver et Rotnens. Cette rubrique est-elle vraiment celle du cartulaire, ou a-t-elle été « arrangée » par les éditeurs ? Comp. Cluny, no°2831, placé par eux sous la rubrique Charta qua Wigo vicecomes et uxor ejus Eufemia dant monasterio Cluniacensi res suas in villis Ronnenco et Nova Cella, alors que l’original porte Wigonis vicecomitis in villa Ronnenco et in Novacella et les copies des cartulaires B et C, Wigo et uxor villam de Ronnenco et Wigo et uxor omne(m) hereditate (m) sua(m) in Ronnenco…
68 Cluny, no°2925 est une donation, par le vicomte Guigue, du château de Montmerle, d’un manse situé à Liver et de toutes les condamines qu’il possède à Reneins. Autres versions de donations à Reneins : Cluny, no°1775, 2000 et 2831. Litige entre Cluny et Robert l’Enchaîné, seigneur du château de Montmerle (que ses descendants conservent en alleu jusqu’à son inféodation au seigneur de Beaujeu dans la première moitié du XIIe siècle), Cluny, no°3577.
69 Papsurkunden 896-1046, éd. H. Zimmermann, Vienne, 1984, no°530.
70 Savigny, no°648 [1030/1037 (1032 ?)] : transaction relative à l’église d’Arnas, entre l’abbé Itier de Savigny et l’abbesse Autrude de Saint-Pierre, in praesentia archiepiscoporum scilicet Lugdunensis et Viennensis, necnon episcopi Malleni [évêque de Grenoble, v. 1030-1037], seu etiam Vuigonis vicecomitis atque aliorum principum.
71 Cluny, no°310 (s. d.), 1859 (990/991) et 1934 (992/993). Personnages liés à ceux de Cluny, no°924 (s. d.), 1343 (974), 1418 (976) et 1638 (983).
72 Saint-Benoît, no°68 (982) ; Mâcon, no°113 (1016/1031) et Cluny, no°2831 (= Monumenta palaeographica Medii Aevi, Series Gallica, Les plus anciens documents originaux de l’abbaye de Cluny, éd. H. Atsma, S. Barret et J. Vezin, Turnhout, 2002, no°67). Voir aussi Cluny, no°1775 (987/996).
73 Papsurkunden, no°530 (supra) (1022) ; Mâcon, no°268 (1016/1022) ; Cluny, no°928 (s. d.), 2760 (1022). Sur Guillaume et sa descendance, cf. aussi Cluny, no°2626 (1005), 2956 (1041), 3333 (1047/1048), 3380 (1062).
74 Cluny, no°2712 (1017/1025), 2370 (av. 1031), 2172 (994/1049) ; Savigny, no°648 (1030/1037) ; Mâcon, no°96 (av. 1031) ; Severt, Chron. episc. Matisc., p. 86 (1027).
75 Mâcon, no°96 et 268 (ces deux actes évoquent Hugo/Ugo vicecomes, mais la mention de Willelmus frater ejus, dans le second, confirme une nécessaire correction en Wigo) ; Cluny, no°2712 (Wigo).
76 Dernière mention de Guigue : Savigny, no°648 (1030/1037) ; première d’Archimbaud : Cluny, no°2922 (1037).
77 Ce que l’on peut déduire, pour Montmerle, de sa pseudo-donation du castrum (Cluny, no°2925) et du fait que ses neveux, les Enchaînés, en sont les seigneurs jusqu’au XIIe siècle ; pour Riottiers, castrum auquel sont liés les détenteurs de la judicaria potestas en Lyonnais au Xe siècle (cf. Cluny, no°1272 et 1456), la seigneurie châtelaine des Le Blanc (vicomtes de Mâcon), attestée avant 1140, ne nous semble pas pouvoir s’expliquer autrement que par des droits hérités de Guigue.
78 Cf. Cluny, no°2925.
79 Au point qu’un acte de la fin du XIe siècle mentionne encore une terre ayant appartenu à son cuisinier (Cluny, no°3666 : terram illam quae fuit olim coqui vicecomitis Wigonis).
80 Guigue est donc présent en tant que seigneur du château voisin, même s’il arbore son titre de vicomte [de Mâcon].
81 Sur les Le Blanc, J. Richard, « Aux origines du Charolais. Vicomté, viguerie et limites du comté en Autunois méridional (Xe-XIIIe siècles) », Annales de Bourgogne, XXXV (1963), p. 81 et suiv. (p. 99-100).
82 Cluny, no°2777 (1023) et 2845 (av. 1031).
83 Hypothèse suggérée par J. Richard, « Aux origines… » p. 99. Pour un indice en ce sens, cf. le nom de Béatrice, femme d’Archimbaud (Cluny, no°2939), qui paraît avoir d’abord été mariée à Ouri de Bâgé, mort avant 1031 : Ouri apparaît quelques temps auprès du vicomte Guigue et sa veuve Béatrice donne, pour l’âme de son senior, un courtil qui terminatur a mane terra vicecomitis Wigonis (Cluny, no°2370). Cela permet de supposer un lien entre le vicomte Guigue et cette Béatrice : il s’agirait de sa fille, dont le remariage avec Archimbaud aurait ouvert la succession vicomtale à celui-ci.
84 Cf. l’acte par lequel le vicomte Hugues [fils d’Archimbaud] donne au chapitre Saint-Pierre de Mâcon une chapelle Saint-André avec ces précisions : Sunt autem eae res de vicecomitatu quem teneo, quas […] concedo, consentiente Widone comite, seniore meo. Acte rapporté au XVIIe siècle par Jacques Severt dans sa Chronologie des évêques de Mâcon (p. 118) [Texte reproduit par A. Bernard, « Essai historique sur les vicomtes » (art. cit.), p. 164] et confirmé par le nécrologe de Saint-Pierre dont la BnF conserve l’original [VIII kal. (nov.)] : Ob. Ugo vicecomes qui reddidit huic ecclesie capellam S. Andreae cum vircaria, annuente Vuidone comite (Obituaires de la province de Lyon, t. 2, éd. J. Laurent et P. Gras, Paris, 1965, p. 497).
85 Cf. note précédente. C’est évidemment à tort que Bernard conclut à l’existence d’une « vicomté territoriale » de Mâcon située dans la région de Charlieu : non seulement sa localisation est erronée, mais l’expression res de vicecomitatu garde son sens classique de « dépendance de l’honneur vicomtal ».
86 Comme la garde des chemins, cf. Mâcon, no°589 (début XIIe) : Preterea dixerunt comitis esse caminos custodire cum episcopo, comitem XV dies de banno habere, vicecomitem XV, canonicos XV.
87 Mâcon, no°622 ; Cluny, no°4279 ; Forez, no°1289-1291.
88 Forez, no°1296 (1180/1190) : Artaudus li Blans, quondam vicecomes Matisconensis (« Naguère vicomte, et non feu vicomte, puisqu’il scelle la charte », rappellent les éd.).
89 Cluny, no°4312 (1187).
90 Note des éd. sous Forez, no°1296 (n. 2, p. 44).
91 Sur les enfants d’Artaud : Forez, no°31 (1220).
Notes de fin
52 Le « vicomte » Houdoin est évoqué, sans précision ni référence, par J. Richard, Les ducs de Bourgogne, p. 89, n. 4, d’après M. Chaume, « Recherches sur les anciens vicomtes de Beaune et leur descendance », Bulletin de la Société d’Archéologie de Beaune, XLIX, 3 (1947), p. 13. N’ayant pu consulter cet article, nous n’avons par ailleurs trouvé aucune trace d’un vicomte Houdoin. Une autre source nous a-t-elle échappé ? Le Répertoire biographique des éditeurs des Chartes de Saint-Bénigne n’évoque pas le nom d’Houdoin [v° « Eudes, vicomte » (p. 273)] à l’appui d’une éventuelle parenté avec le vicomte Eudes, pourtant frère d’un Houdoin.
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