Les Centulle de Béarn (fin xe siècle-1134)
p. 129-142
Texte intégral
1L’histoire de la vicomté de Béarn, entre la fin du Xe et le commencement du XIIe siècle, est indissociable de celle de la principauté de Gascogne1. Vers 977, le comte de Gascogne Guillaume-Sanche a pris le titre ducal qui était attaché depuis le IXe siècle au titulaire du comté de Bordeaux. Sous notre plume, le mot principauté renvoie à la double identité de duché et de comté de la Gascogne de ce temps. Avec celles de Dax, Marsan, Oloron, la vicomté de Béarn appartient à la première vague des vicomtés taillées au Xe siècle dans cette entité, et plus précisément dans la Grande Gascogne2. Ainsi est désignée, en suivant Renée Mussot-Goulard, la partie ouest du comté, pays d’élection des vicomtés, par opposition à la Gascogne orientale fragmentée en comtés « mineurs » (Fezensac, Armagnac, Astarac, Pardiac). Cette émergence intervient dans le contexte des invasions normandes. À la faveur de la désorganisation des pouvoirs qui prévaut alors, anciens viguiers et centeniers carolingiens s’y partagent la réalité du pouvoir avec les potentats locaux alleutiers. Eu égard à la grande indigence et à la faible fiabilité des données textuelles antérieurement au milieu du XIe siècle, la reconstitution de cette toile de fond reste conjecturale, même si elle ne manque pas de vraisemblance.
2Il ne s’agit pas exactement ici de reprendre ce dossier dans la mesure où il nous est apparu que le centre de gravité de l’histoire des Centulle, dans ce qu’elle a de singulier, ne se situe pas à la charnière du Xe et du XIe siècle, mais lors du « moment grégorien3 ». Une époque qui, heureusement, est un peu moins démunie en sources que celle qui précède4.
UNE HISTOIRE À CONSTRUIRE ENTRE PLUSIEURS BIAIS
3L’histoire des Centulle a très tôt constitué un enjeu politique comme élément du débat sur ce qu’on a longtemps appelé par abus « l’indépendance » du Béarn. C’est que la vicomté de Béarn, née dans le silence des textes avec la dynastie des Centulle, prolongée après 1134 par celle des Marsan, puis celle des Moncade et enfin celle des Foix, disparaît dans un coup d’éclat : sa proclamation comme « souveraineté » en 1347 par Gaston III Fébus. Cette situation, qui se prolonge jusqu’en 1620, date du rattachement du Béarn à la couronne de France, a donné lieu, outre à quelques fables plaisantes5, à un débat historiographique précoce pour légitimer ou dénier cette souveraineté. Un des acteurs majeurs de ce débat est le grand historien du début du XVIIe siècle, Pierre de Marca, défenseur de la théorie de la souveraineté relative, à qui l’on doit la conservation de bien des textes aujourd’hui disparus, dont les fragments du cartulaire de Lescar, essentiels pour notre propos. On se bornera à renvoyer pour tout ceci aux travaux décisifs de Pierre Tucoo-Chala, qui a, notamment, montré de quelle façon Pierre de Marca avait biaisé certaines pièces du dossier en faveur de la thèse d’une indépendance béarnaise6.
4L’identification de l’origine royale de la fonction vicomtale occupe ainsi, dans l’historiographie béarnaise, une place surdimensionnée. L’arsenal documentaire a été assez longtemps encombré par un apocryphe célèbre, la charte d’Alaon, qui faisait remonter la lignée des vicomtes de Béarn à Caribert, frère de Dagobert Ier et donc descendant de Clovis. Pour Pierre de Marca (1639), l’origine première de la vicomté est une concession consentie par le roi Louis le Pieux à un fils ou à un frère de Loup-Centulle, le duc de Vasconie condamné à l’exil en 819. Sa démonstration aura une belle descendance7. Pour Jean de Jaurgain (1902), c’est Charles le Chauve qui, vers 840, aurait conféré le Béarn à Centulle 1er, fils cadet du duc Loup-Centulle (Donat-Loup, l’aîné, recevant la Bigorre). Ces quêtes de l’origine royale, sur laquelle on ne s’attardera pas davantage ici, reposent sur quelques autres pièces non recevables, et notamment sur un texte de Lucq généralement tenu pour douteux8. R. Mussot-Goulard, en 1982, tout en acceptant l’authenticité de cette notice, en donne une autre lecture, qui identifie le rex cité par le texte non pas au Carolingien, mais au prince de Gascogne du moment, Sanche Mitarra, qui vivait vers le milieu du IXe siècle9.
5L’historiographie ancienne (qu’une partie de la littérature généalogique prolonge et amplifie par la voie d’Internet), a prétendu accéder aux origines de la dynastie vicomtale béarnaise par un raisonnement purement onomastique. Sachant que la Gascogne, à l’instar de l’espace ouest-pyrénéen, se caractérise par un usage habituel du nom double au Xe siècle, exceptionnel en Occident10, le travail généalogique repose sur deux postulats : 1) le nom Centulle est uniquement porté par la dynastie des vicomtes de Béarn (proposition abusive11) ; 2) cette dynastie a infailliblement appliqué la règle du nomen paternum (le premier nom du père devient le second nom du fils et redeviendra le premier pour le petit-fils, etc.)12. De l’attestation d’un Gasto Centulli en 981, on déduit ainsi l’existence d’un Centullus vers 950. En deçà, les rares personnages ainsi nommés qu’on peut glaner dans les documents, sont placés d’office dans une chaîne généalogique qui permet de parvenir jusqu’au Lupus Centulli Wasco cité par Eginhard au début du IXe siècle13. Le praticien le plus systématique de cette méthode positiviste est Jean de Jaurgain, dont l’œuvre monumentale, publiée il y a un siècle, a durablement influencé les travaux des généalogistes comme ceux des historiens14. Or, antérieurement à 980, l’alternance concerne des personnages qui n’étaient en aucun cas désignés comme vicomtes. De surplus, elle porte sur le couple Loup-Centulle et non sur le couple Gaston-Centulle. Le double avènement, dans le second Xe siècle, du nom Gaston (rare) et de la fonction vicomtale, marque le début d’une ère nouvelle15. Cela étant, entre 950 et 1050, la rareté des jalons textuels et la double incertitude de leur tradition et de leur datation ont conduit à restituer un nombre de générations variable selon les auteurs, d’où la confusion qui s’est instaurée dans la numérotation des Centulle et des Gaston.
UNE SUCCESSION DE CENTULLE ET DE GASTON
6Ne sont pris en compte que les six personnages attestés par des documents fiables comme vicomtes de Béarn. Entre crochets la numérotation la plus couramment en usage dans la littérature historique récente16.
7I. Gaston [1]-Centulle
Dates de règne :…981-988…
Nomination, titulature : Gasto Centullus de Bearno17, S. Wastonis Centulli vicecomitis18.
Alliance : ?
8Descendance : probablement Centulle, ci-après II.
Remarques : autres occurrences dans une charte fausse19, et une autre très suspecte20 ; selon Jaurgain, Vasconie, ce Gaston aurait pour père un supposé Centulle [II], lui-même présumé descendant d’un lointain Centulle [I] qui aurait vécu vers 840-845.
9II. Centulle [IV]-Gaston-Le Vieux
Dates de règne :…1010-1058
Nomination, titulature : Centullus de Bear21, vicecomitis Centulli Gastonis22, in vita comitis Sancii et vicecomitis C.23, Centullus vicecomes, vicecomite Centullo, Centullus Vetulus vicecomes Bearnensis et Olorensis24, Vicecomes Centullus Vetulus25.
Alliance : il épouse Angèle, parente du comte de Gascogne Guillaume-Sanche26.
Descendance : Gaston Centulle (ci-après III), Raymond Centulle, Auriol Centulle ( ?)27
Remarques : la longévité de ce Centulle pose problème. Plusieurs auteurs intercalent dans ce laps de temps deux vicomtes, Centulle [III] et Gaston [II]. Or, Centullus-Vetulus est attesté dès avant 1010 (au temps du comte Bernard) dans l’acte 4 du cartulaire de Lucq : l’hypothèse d’une exceptionnelle longévité est donc la plus plausible.
10III. Gaston [III] -Centulle
Dates de règne :…(1037)…
Nomination, titulature : vicecomitis nomine Guastoni Centulli28, vicecomes Gasto29, Gastonus, Bearnensis vicecomes30, Gasto de Bearn31.
11Alliance : Adalaïs de Lomagne.
Descendance : Centulle (ci-après IV) ; Oliba32, Hunaud (abbé de Moissac)33.
Remarques : l’existence de ce personnage, mort avant son père, est ignorée par l’auteur de la notice 152 du cartulaire de Dax, qui fait de Centulle-le Vieux le père de Centulle [V]. A tort : cf. cartulaire de La Sauve Majeure, acte 1250, et charte de San Juan de la Peña, Marca, HB, I, 426 (l. 4, c. 19).
12IV. Centulle [V]-Gaston-Le Jeune
Dates de règne : 1058-1090 (comte de Bigorre 1079-1090)
Nomination, titulature : vicecomes Centullus Juvenis34, Centullus vicecomes Viarnensis35, Hunaldus frater Domini Bearnensis… Centulli comitis Bearnensis… comitis de Bearnio36, Centullus Gastonis, vicecomes Bearnensis37, Centullione Lescariensi comite38, Centullus Bigorrensis qui est vicecomes Bearnensis et Oloronensis39, cum comite de Begorre, videlicet cum Centullo de Bearn40, Centullus gratia Dei comes Bigorrensis et Olorensis et Biarnensis41, (Gregoire VII pape) Centullo comiti salutem42, Centullus gratia Dei comes Bigorrensis et Olorensis et Biarnensis43, Jo Centol per la gracie de Diu bescomte de Bearn e comte de Begorre44, Centulli comitis Bigorrensis necnon et vicecomitis Viernensis45, Centulli comitis Bigorrensis46, comite domno Zentollo meum vassallum47, post obitum Centulli comitis Bigorensis et proconsulis Bearnensis48, in diebus Celtulli comitis49
Alliance : Gisla, ou Gisèle (répudiée en 1079 pour cause de consanguinité) ; puis Béatrix de Bigorre (1079). Cf. annexe 2
Descendance : 1) Gaston (ci-après, V), Raimond Centulle50 ; Osquinette qui épouse Bernard d’Arboucave51 ; 2) Bernard comte de Bigorre (1090-1114) ; 3) Centulle, comte de Bigorre (1114-1128).
13V. Gaston [-IV] Le Croisé
Dates de règne : 1090-1131.
Nomination, titulature :Gastonis vicecomitis52, Ego Guastonus peccator Viarnensis vicecomes53, Gastone vicecomite de Bearn54, dompnus Gasto Bearnensis vicecomes55, venerabili Gastone Bearnesium vicecomes56, Gasto vicecomes de Bearno, nobilis et strenuus homo57, Gastonis Bearnensis viceconsulis58, Favente Gasto principi59, Gastonem Bearnensem tunc comitem Fezenciacem60, Bearnensium proconsul Guasto61. La majorité des occurrences se trouvent dans la documentation aragonaise62.
Alliance : Talèse, nièce du roi d’Aragon Sancho Ramirez.
14Descendance : Centulle (ci-après VI), Guiscarde, (veuve du vicomte Pierre de Gabarret), vicomtesse de Béarn en 1134.
15Remarques : Gaston succède à son père sur la seule vicomté de Béarn.
16VI. Centulle [VI]
Dates de règne : 1131-1134 (mort à Fraga, 17 juillet).
17Nomination, titulature : Centullus filius Gastonis Bearnensis vicecomes63, Ego Centullus vicecomes Bearn ; Ego Centullus Gastonis filius64. Une majorité d’occurrences au sud des Pyrénées65.
Alliance : pas d’épouse connue.
Descendance : sans postérité.
18La rareté et le manque de fiabilité des données textuelles n’autorisent pas, selon nous, le moindre raisonnement sur l’évolution des formes de nomination et de titulature attachées aux vicomtes antérieurement au milieu du XIe siècle66. Cette frontière temporelle est encore de mise quand on se risque à esquisser un « portrait de famille » des Centulle. À chaque génération, le titre est dévolu à un seul enfant (sans doute l’aîné, mais aucun texte ne le stipule). Le système lignager est strict : nulle branche ne se développe hors du tronc. Centulle-le Vieux paraît avoir associé de son vivant son fils Gaston au titre vicomtal67. La mort prématurée de Gaston a entraîné une succession inaccoutumée de deux Centulle, qui explique l’ajout précoce, dans les chartes, des épithètes de différentiation – Vetulus, – Juvenis. Si Gaston IV est associé à certains actes de son père68, ce précautionneux « tuilage » dynastique n’est pas allé sans inflexions dans la politique vicomtale, notamment dans le choix des personnes en charge de hautes responsabilités69. Les vicomtes béarnais prennent préférentiellement épouse dans des familles de la noblesse d’un rang supérieur au leur (comte de Gascogne, comte de Bigorre, roi d’Aragon). Le mariage avec Angèle, parente du comte Sanche Guillaume, aurait conforté l’arrogance de Centulle-le Vieux70.
19L’identification des puînés est parfois délicate. En l’absence d’une indication de parenté explicite, il semble qu’on puisse considérer comme tels les personnages dont le cognomen est de Bearnio et le nomen Centulle. Mais pour un Artardus miles Bearnensis, le doute est de mise71. Un seul puîné fut chasé dans le haut clergé : Hunaud, demi-frère de Centulle-le Jeune, abbé de Moissac72. Les autres sont allés se fondre dans les rangs des milites locaux (cavers) et donner encore plus de lustre à ce groupe social en pleine ascension. Il ne semble pas, sauf à tomber dans la surinterprétation comme l’a fait Jaurgain, que ces personnages aient transmis aux générations ultérieures les éléments du capital symbolique contenus dans leur nomination73.
20Hypergamie des aînés, hypogamie des puînés, la règle semble avoir caractérisé également le sort des filles74. Toutefois, la condition des femmes, au sein de la dynastie, a basculé entre la fin du XIe et le début du XIIe siècle. Jusqu’au règne de Centulle-le Jeune, les femmes sont longtemps restées dans l’obscurité (non nommées, affublées de femina en guise de titulature75), pour finir, avec Gisla, dans l’humiliation. Elles passent ensuite en peu de temps sur le devant de la scène. Talèse est associée aux actes de Gaston IV76, et apparaît comme vicomtesse de Béarn77, titre qu’elle porte devenue veuve. Sa fille Guiscarde, déjà veuve, est d’emblée viccomitissa. Après le temps des vicomtes s’amorce ainsi le temps des vicomtesses. Ce sont elles qui, de Guiscarde à Marie (unie en 1171 à Guillaume de Moncade), et de Marie à Marguerite (mariée en 1252 à Roger-Bernard de Foix), assureront la continuité de la dynastie jusqu’à la fin de l’histoire de la vicomté de Béarn (1347).
LES CENTULLE ENTRE UN DUC ET UN ROI
21Si on laisse de côté la problématique de l’origine royale (voir plus haut) on en revient simplement au fait qu’au départ, le vicomte de Béarn, comme tous les autres vicomtes, exerce une autorité déléguée auprès du comte de Gascogne. Et dès lors la question qui importe est de savoir quand et comment s’est opéré le passage d’une autorité déléguée à une autorité auto nome. Plaçons-nous en 1032, date à laquelle le duc Sanche Guillaume choisit de se faire inhumer en Béarn, à Saint-Julien de Lescar. Depuis un demi-siècle le comte de Gascogne avait veillé à organiser et à contrôler l’encadrement religieux de ce pays en fondant les monastères de Lucq (981), Lescar (981), Larreule (996), Saint-Pé de Generès (1022). Le vicomte de Béarn apparaît comme un relais local du duc, auquel il est clairement subordonné : il joue un rôle de témoin, d’adjutor et de defensor des fondations ducales78. Il est un possessor parmi d’autres de biens fiscaux et, s’il a pour mission d’en assurer la préservation (cura), c’est le comte-duc qui en dispose79. Est-il pour autant un vassal docile ? Quelques indices conduisent à en douter. S’il est vrai que le duc n’a pas cessé de tenir les vicomtes du Béarn en main80, Centulle IV, dès le premier tiers du XIe siècle, est présenté comme un magnus dominator terrae81. Et le vicomte dispose, par ailleurs, d’un important ensemble de biens patrimoniaux dans le nord-est du Béarn, le Vic-Bilh (Vicus Vetulus) qui constitue le point d’ancrage originel de la lignée82.
22Postons-nous à présent un demi-siècle plus tard. Plus exactement en 1087. À cette date, le duc Guillaume VII confirme une importante donation consentie par Gui Geoffroi au vicomte de Béarn Centulle [V] (par ailleurs comte de Bigorre) en raison de son aide et de sa fidélité83. Ce donativum consiste en un ensemble de droits domaniaux et régaliens (fiscus, res comitis) que le duc possédait en Béarn : douze « conduits » (droits de gîte) le long des vallées des gaves, le dominium sur la villa de Carresse et Salies-de-Béarn, ses « honneurs » en Soule. Tout donne à penser, on va le voir, qu’il s’agit là des derniers lambeaux de ce qui constituait le domaine comtal et ducal en Béarn84.
23Ce basculement correspond à la crise de succession du duché de Gascogne, qu’il n’y a pas lieu ici de narrer par le détail85. L’ancienne dynastie étant tombée en quenouille (1032), le principat gascon est revendiqué par plusieurs prétendants au nom des femmes. En 1039, le comté de Bordeaux, qui on le rappelle confère le titre de duc, se sépare du comté de Gascogne, et échoit en 1044 à Gui-Geoffroi, frère du comte de Poitiers. Le titre de comte de Gascogne est alors porté par le comte d’Armagnac Bernard Tumapaler, jusqu’à ce que Gui-Geoffroi entreprenne de le lui contester une fois avoir lui même recueilli le titre de comte de Poitiers et de duc d’Aquitaine (1058). Après avoir vaincu son rival par les armes (bataille de la Castelle), Gui-Geoffroi s’empara du titre comtal gascon (1063).
24Les Centulle furent partie prenante dans cet affrontement. La présence constante pendant les années de crise de Centulle-le Vieux auprès du comte d’Armagnac, dont il était à la fois le neveu et le gendre86, témoigne de l’engagement du vicomte béarnais87. Là encore, le quasi silence des sources a conduit les historiens à échafauder une palette de scénarios, souvent contradictoires88, dans lesquels la question de l’éventuelle prétention de Centulle au titre comtal et sa mainmise sur les droits comtaux dans sa vicomté se télescopent. Il convient donc de réexaminer ce dossier.
25Centulle a accompagné le comte de Poitiers à Barbastro au lendemain même de la bataille de La Castelle : son attitude est celle d’un allié, non d’un vaincu. Il semble donc y avoir eu ralliement dès avant l‘affrontement décisif, un ralliement qu’on peut imaginer âprement négocié, mais qui s’avèrera durable. En 1073, Centulle est en guerre contre les fils de Tumapaler89. L’affrontement de La Castelle a sans doute moins clairement tranché la situation qu’on ne l’a dit. Gui-Geoffroi sentait sa position si peu assurée qu’il fit don de 15 000 sous au vaincu – qui se retira au monastère de Saint-Mont – pour prix de la potestas sur le comté90. L’époque semble avoir été propice aux transactions de cette nature91. Il est plausible que Gui-Geoffroi ait, en outre, consenti ou confirmé à Centulle à cette occasion l’abandon de la plupart de ses droits comtaux en Béarn.
26Le dispositif de l’acte de donation de 1087 est précédé par un exposé dont les termes sont les suivants : Quia Centullus comes fuit illi fidelis et adjuvavit in necessitate sua. L’acte est, rappelons-le, rédigé par Gui-Geoffroi huit jours avant son décès92. Il se préoccupe donc vraisemblablement de laisser à son successeur une situation nette. Centulle ne tient-il pas déjà de facto ce qui lui est donné ? En tout état de cause, Gui-Geoffroi semble avoir atteint son but puisque Centulle-Le Jeune et Guillaume IX entretinrent, pour ce que l’on en sait, de bonnes relations93.
27Cette bonne entente fut sans doute facilitée par le faible intérêt que Guillaume IX manifeste pour le sud de la Gascogne. Car le fait important de ces années là est le basculement du Béarn de l’orbite des ducs d’Aquitaine à celle des rois d’Aragon. Pierre Tucoo-Chala a souligné combien étaient symétriques entre 1050 et 1060 les situations de l’Aragon et du Béarn. En 1063, ce qu’on a appelé la « croisade » de Barbastro inaugure un siècle et demi d’immersion des Béarnais dans les affaires nord-ibériques et un basculement du rapport de forces en faveur de l’Aragonais94. Dès lors, même si Centulle [V] réserve, dans l’hommage qu’il prête à Sancho Ramirez, sa fidélité au comte de Poitou, il est devenu le vassal du roi d’Aragon95, qui lui a donné en mariage Talèse, sa plus proche parente en état de convoler.
28La profondeur de l’engagement des vicomtes béarnais dans les affaires aragonaises a fait l’objet d’études suffisamment précises pour qu’il ne soit pas besoin ici d’entrer dans les détails96. Notamment pour tout ce qui concerne le couple formé par Gaston [IV] Le Croisé et Alphonse le Batailleur dans les combats de la Reconquista97. Au regard de cet engagement, la présence de Centulle à la cour du duc de Gascogne, non dénuée de signification, est de peu de poids. Il en va de même avec la saisie par une cour ducale d’un différend touchant le village béarnais de Carresse. Ces faits permettent simplement de démontrer que le Béarn n’a pas acquis le statut d’indépendance que lui prêtait Marca. Mais cela, il y a déjà bien longtemps qu’aucun historien ne le conteste.
29En 1090, à la mort de Centulle-le Jeune, l’union personnelle Béarn-Bigorre prit fin. Gaston [IV], fils du premier lit, gouverna la vicomté de Béarn, et Bernard, puis Centulle, fils de Béatrix, gouvernèrent successivement le comté de Bigorre. De façon significative, c’est dans les sources ibériques que l’on trouve le plus grand nombre d’actes où est mentionné le vicomte béarnais Gaston [IV], héros de la première Croisade glorifié par Guibert de Nogent. De façon significative, aussi, dans l’épopée guerrière de la Reconquista du premier tiers du XIIe siècle, le comte de Bigorre demeura à l’ombre du vicomte son frère. Au-delà, Gaston-le Croisé exerce une forme de « leadership » de la féodalité gasconne impliquée dans les affaires ibériques, un rôle qui, durant le premier XIe siècle, avait été assuré par les comtes eux-mêmes98.
LES CENTULLE ENTRE VICOMTES ET COMTES
30Alors qu’antérieurement à l’an mil on dénombre seulement dans le bassin de l’Adour cinq vicomtés (Dax, Marsan, Béarn, Oloron, Lavedan), on assiste, au-delà, à un fort accroissement du nombre de vicomtés dans cette même région. Vers 1100 on peut en dresser la liste suivante99 : Arberoue, Baïgorry, Béarn, Corneillan, Dax, Labourd, Lavedan, Louvigny, Maremme, Marsan, Miramont100, Montaner, Orthe, Sault, Soule, Maremme, Tartas. Cette sorte d’inflation du titre vicomtal prend place dans le contexte d’émergence d’un haut baronnage formant un groupe social perçu en tant que tel et, sans doute, conscient de sa propre existence. C’est ce qu’atteste un acte du cartulaire de Dax. Dans cette charte récit datée de 1081, le narrateur, un homme proche des événements, rapporte une réunion à laquelle assistent les vicomtes de Dax, de Maremme et d’Orthe ainsi que d’autres nobles de la région. Il caractérise ainsi l’assistance : isti omnes vicecomites vel electissimi barones vicecomitibus equipollentes, et cum hiis alii nobiles quorum nomina longum est ponere101.
31Cette vision des faits correspond à une étape du processus de dévolution en cascade des attributs régaliens vers un groupe de puissants toujours plus nombreux. Ce processus, qui caractérise le XIe siècle en général, se trouve clairement corrélé, ici, à la montée en puissance de la seigneurie châtelaine comme forme de réduction de la sphère d’exercice de l’autorité publique à l’échelle locale. Plusieurs des vicomtes de la seconde génération tirent leur pouvoir de la détention d’une forteresse (Corneillan, Louvigny, Miramont, Sault, Montaner…). Les micro-vicomtés tendent à prendre vie dans les jointures incertaines des anciennes entités territoriales en devenir. L’exemple emblématique est, à cet égard, la vicomté de Corneillan102, aux limites de l’Armagnac, du Béarn, du Tursan et de la Rivière-Basse. De cette banalisation – dans les deux sens du terme – de la fonction de lieutenance du comte semble résulter une logique de dévaluation du titre vicomtal.
32Or, tel ne fut pas le cas pour les vicomtes de Béarn qui, au contraire, s’engagent au même moment dans une logique de recomposition des pouvoirs territoriaux à rebours de celle qui prévaut autour d’eux (voir annexe 3). Les Centulle ont entrepris avec succès une politique d’agrandissement de leur territoire de puissance par la conquête militaire et d’annexion de deux vicomtés limitrophes : celle d’Oloron et celle de Montaner. L’affaire la plus importante est celle d’Oloron ; elle se situe vers 1030-1050. L’histoire de la vicomté d’Oloron est aussi éphémère que mal connue103, et son épilogue est longtemps resté nimbé de mystère104. Le plus simple est de se caler d’emblée sur le texte qui donne la version la plus explicite et la plus fiable des faits : il s’agit de la charte notice 152 du cartulaire de Dax, texte fondamental cité plus haut. Le narrateur décrit ainsi la situation : « Il y avait alors un vicomte d’Oloron du nom de Loup-Aner, auquel le vicomte de Béarn n’avait pas concédé de son vivant certaines parties de la vicomté d’Oloron parce qu’il n’était pas de naissance légitime. » En effet, la vicomté d’Oloron dépendait dans son ensemble de la vicomté de Béarn (generali enim reversione ad Bearnensem vicecomitatus Olorensis redibat).
33Même sans connaître les faits précis derrière cette allusion, les enseignements qu’il livre sont fondamentaux. Du point de vue du narrateur, qui écrit un peu plus d’un demi-siècle après cet événement, dès le règne de Centulle-le Vieux qui s’achève en 1058, le vicomte de Béarn est en position de créer ou de supprimer une vicomté autre que la sienne en décidant de sa consistance territoriale. Mais aucun texte ne permet de savoir s’il a, en fait, sollicité et obtenu l’assentiment du comte105. En tout état de cause, l’absorption de la vicomté d’Oloron constitue une étape fondamentale. En effet, cette vicomté inclut les trois vallées d’Ossau, Aspe, Barétous, elles-mêmes cadres de pouvoirs locaux considérables (des vigueries, fort mal connues). Elle inclut les routes de cols dont le contrôle conditionne la dimension transpyrénéenne de l’action des vicomtes béarnais. La vicomté de Béarn, jusqu’alors centrée sur le Vicus Vetulus (Vic-Bilh) orienté vers l’espace toulousain, devient une seigneurie tournée vers l’Espagne et, de là, une société impliquée dans la dynamique qui est celle des sociétés hispano-chrétiennes. L’annexion de la vicomté de Montaner intervient sous le règne de Gaston [IV]-Le Croisé. Celui-ci avait épousé Talèse (ou Thérèse) nièce adultérine du roi d’Aragon Sancho-Ramirez et petite fille et héritière, du côté de sa mère, d’Arnaud-Aner vicomte de Montaner106. L’annexion, très vraisemblablement au titre de dot, semble effective à l’extrême fin du XIe siècle, après la mort du dernier vicomte présent (sans le titre) dans la charte de consécration de Saint-Pé en 1096107.
34À côté des vicomtés annexées au Béarn, il y eut celles qui se trouvèrent satellisées. Sur le flanc ouest de la vicomté d’Oloron, la vicomté de Soule se trouva vassalisée dans le cadre de la donation de1087108, au terme d’une longue et difficile entreprise guerrière109. Aux marges nord de la vicomté de Béarn avec la Chalosse et le Tursan, deux seigneuries, bien plus modestes, dont les titulaires apparaissent épisodiquement parés du titre de vicomtes, se trouvent en fait dans l’orbite des vicomtes béarnais : les vicomtes de Sault110, et ceux de Miramont111. Ces vicomtes se distinguent mal des barons que le cartulaire de Dax qualifie on l’a vu d’equipollentes. On les trouve dans plusieurs listes de témoins mélangés, sans leur titre, à d’autres personnages qui n’ont jamais porté le titre vicomtal (comme les sires d’Andoins, de Gabaston, de Miossens…)112.
35En définitive vers 1100, les vicomtes béarnais sont à la tête d’un complexe féodal territorialement compact, intégrant deux autres vicomtés. À la manière d’Adhémar de Chabannes qualifiant le duc Guillaume V d’Aquitaine de quasi rex, ils ont sans nul doute été perçus comme étant des quasi comites. L’examen des titulatures est révélatrice de l’ambiguïté dans laquelle baigne Centulle-le Jeune après 1079 : comte béarnais de Bigorre ou comte de Béarn au titre de la Bigorre, voire comte de Béarn aux yeux du pape ou des moines de Moissac. La séparation entre les deux seigneuries, après sa mort, met pratiquement fin à cette ambiguïté, et c’est par les titres de proconsul ou de princeps, alliés à des épithètes d’excellence personnelle (venerabilis, nobilis et strenuus homo…) que l’on distingue Gaston [IV].
LES CENTULLE ENTRE ÉGLISE ET CHÂTEAUX
36L’avènement de la dynastie vicomtale béarnaise comme puissance largement autonome du sud de la Gascogne, reconnue comme telle par les contemporains, est indissociable de l’histoire de l’Église dans cette région. Cette histoire présente des singularités qui s’enchâssent dans le mouvement de réforme de l’Église que l’on a coutume de qualifier de grégorien.
37La singularité majeure tient à l’existence, durant près d’un siècle (977-1059), de l’évêché de Gascogne. Plus que les sièges épiscopaux eux-mêmes, souvent tombés au rang de modestes bourgades, ce sont les monastères, majoritairement fondés par les comtes, qui structurent cet espace113. Il s’agit d’une très vaste entité regroupant six évêchés : Lescar, Oloron, Aire, Dax, Bayonne, Bazas114. Selon Robert-André Sénac115, cette entité est née, dans le contexte de crise provoqué par les incursions normandes, de l’initiative du duc Guillaume-Sanche au profit de son frère Gombaud. Elle s’inspire peut-être du modèle des évêchés nord-ibériques créés à la suite de la conquête musulmane. Après Gombaud (977-avant 988) se sont succédé trois autres pontifes : Arsieu d’Arracq (ou Raca, 988-vers 1025), Sanche (1025) et Raimond de Bazas autrement nommé Raimond-le Vieux (vers 1025-1059).
38Le moment essentiel, pour notre propos, est celui de la dislocation de cet agrégat et de la restauration épiscopale des églises mères. Ce moment complexe et fécond coïncide en effet avec, à la fois, la crise de succession du comté de Gascogne, et le mouvement de réforme de l’Église. Or ce mouvement, avant même d’être impulsé par les pontifes romains et leurs légats, a d’abord été animé par les initiatives venues de la métropole provinciale. L’action des Centulle se situe dans la zone de friction entre les acteurs de ces deux courants réformateurs.
39L’histoire de l’Église gasconne du milieu du XIe siècle est dominée par la figure d’Austinde, archevêque d’Auch entre 1049 et 1066, dont l’action réformatrice s’avéra, au moins sur un aspect essentiel, décisive116. C’est lui, en effet, qui mena à bien l’effacement de l’évêché de Gascogne et la restauration des anciens sièges épiscopaux, au lendemain du concile de Toulouse de 1058.
40Ceux d’Oloron et de Lescar nous intéressent directement. À la tête du premier, Austinde plaça Stephanus, nommé par l’historiographie tantôt Étienne de Lavedan ou Étienne de Mauléon (Soule) et de fait membre de ces deux maisons vicomtales apparentées117. À Étienne, mort en 1061 succéda Amat, légat du pape en 1074118. La cité épiscopale héritière de l’antique Beneharnum, devenue Lescar, est décrite vers la fin du Xe siècle comme ruinée. Vers 980, le comte Guillaume-Sanche y avait édifié un monastère. Au moment de la restauration du siège épiscopal, la situation y est complexe. En effet le dernier évêque de Gascogne, Raimond-le Vieux, y avait conservé la jouissance du temporel après sa déposition. C’est sans doute pour cette raison qu’Austinde y fit élire Grégoire de Montaner. Cet illustre personnage, membre du lignage des vicomtes de Montaner, ancien moine de Cluny, était par ailleurs abbé de Saint-Sever, qu’il conduisit à son apogée de 1044 à 1072119. Alors qu’il était également devenu abbé de Sorde, il fut élu à Lescar en 1059 jusqu’en 1070, et il le fut peu après à Dax entre 1063 et 1068 (ce qui lui valut, dans le cartulaire de cette église, une peu flatteuse image de cumulard120). Avec Grégoire on commence à percevoir comment le mouvement réformateur local se tresse de façon complexe et paradoxale avec la réception dans le sud de la Gascogne de l’influence de Cluny121.
41C’est le comte d’Armagnac Bernard Tumapaler qui a ouvert la voie d’une relation directe entre le prince et Cluny susceptible de court-circuiter l’ordinaire et de contrarier ses projets. Bernard Tumapaler avait fondé en 1050 à Saint-Mont un monastère comtal qui se trouva en butte à l’hostilité d’Austinde. Le comte fit alors venir à Saint-Mont des moines de Cluny, ce qui plaça cet établissement hors d’atteinte de l’archevêque122. Dans son sillage, on note en Gascogne une flambée de rattachements à Cluny ou à Saint-Victor123. Centulle-le Jeune, parent de Tumapaler, ne fut pas en reste124. Prenant la mesure du souffle réformiste impulsé depuis Rome, il prit le parti de jouer systématiquement la carte d’une relation privilégiée avec le Saint-Siège et avec les pôles majeurs de l’Église universelle que sont alors Cluny et Saint-Victor de Marseille. Ce faisant il faisait sienne la politique menée par son seigneur et allié, le roi d’Aragon Sancho Ramirez et se taillait auprès du pape une image de parangon de prince chrétien : amator justiciae, defensor pauperum et propagator pacis.
42Cependant, cet élogieux portrait est inclus dans le préambule de la lettre que le pape Grégoire VII adressa en 1079 à Centulle et dont le dispositif consistait en une injonction à se séparer de son épouse Gisla en raison d’un degré de parenté prohibé125. Sur la nature de ce lien parental, les sources sont étrangement muettes, et rien n’est dit sur le lignage auquel appartenait cette nobilis femina. Les conseillers du pape sont Bernard, l’abbé de Saint-Victor, et Amat, évêque d’Oloron et légat. La plupart des anciens historiens ont loué la pieuse attitude de soumission du vicomte béarnais qui obtempère sur le champ126. Centulle répudie en effet son épouse qui va finir sa vie à Marcigny-sur-Loire127, le premier monastère clunisien féminin et, en réparation de sa faute, il édifie à Morlaas une église dédiée à sainte Foi, dont il fait donation à Cluny (1079)128. Cela fait, fort de l’appui de Pons, l’évêque de Tarbes, il convole avec Béatrix, l’héritière du comté de Bigorre, et il prend aussitôt le titre de comte de Bigorre (1079). Les anciens historiens, majoritairement des ecclésiastiques, se sont vertueusement récriés contre l’idée qu’il ait pu s’agir d’une manipulation : tout au plus une providentielle coïncidence. Or, l’opération a été dénoncée, à ses dépens, par l’évêque de Lescar Bernard de Bas qui avait succédé à Grégoire (1072-1080)129. L’on soupçonne fort qu’Amat ait arrangé l’affaire en tant que légat. Ses capacités manipulatrices sont bien connues, de même que l’étroite complicité qui le lie au vicomte130. Centulle V a donc joué des contradictions du mouvement réformateur pour accéder au titre comtal à la faveur de l’union personnelle Béarn-Bigorre. (Voir en annexe ce délicat dossier textuel)
43Or, dans le même temps, ce vicomte a intégré à son action la nature séparante de l’idéologie réformatrice tout en faisant siens les modes de domination de son temps. Sans doute a-t-il estimé qu’une tentative d’implantation forte de son pouvoir dans la cité épiscopale ne pouvait qu’entraîner le déclenchement de conflits avec l’évêque, avec pour conséquence une possible brouille avec Amat131. Il décida qu’il avait mieux à faire en enracinant sa puissance dans son château de La Hourquie à 12 km de là, au cœur de ses possessions patrimoniales du Vic-Bilh132. Ainsi naquit Morlaas133. En créant, avec le château, un nouveau complexe de pouvoirs composé notamment d’une ville neuve dotée d’un statut de bourgeoisie, d’un prieuré clunisien dédié à sainte Foi et d’un atelier monétaire, attribut régalien par excellence134, le vicomte ne fait rien d’autre que doter le Béarn d’un bourg castral135. Bien d’autres faits manifestent que, à l’instar de la haute aristocratie méridionale136, il a pris toute la mesure de la « révolution castrale » et qu’il entendait bien en garder le contrôle137, tout en en retirant des profits138. Seigneurs châtelains plus puissants que tous les autres maîtres de châteaux de leur vicomté, les Centulle semblent être parvenus à stopper, vers la fin du XIe siècle, le processus en cascade qui conduisait à la dévolution de prérogatives juridictionnelles à des seigneurs commandant des entités territoriales de plus en plus petites. Mais ce processus, ici comme ailleurs, avait bel et bien commencé à transformer la géographie et l’équilibre des pouvoirs.
44Le fait de réévaluer cet aspect des choses n’implique aucunement de sous-estimer l’important renforcement de l’armature ecclésiale impulsé par Gaston IV et Talèse, un volet généralement privilégié par les historiens. Avec la fondations de monastères (Saint-Sigismond d’Orthez, Sauvelade) et d’hôpitaux (Gabas, Mifaget, Lacommande), le Béarn s’affirme au temps de Gaston et de Talèse comme un espace de convergence organisé des grandes voies jacobites.
45Pour implanter durablement le pouvoir vicomtal dans la cité d’Oloron, Centulle prit une initiative qui, elle, semble plutôt inspirée par la politique du souverain aragonais auprès duquel il avait guerroyé outre Pyrénées. Là, il fonda vers 1080 une poblation139, sans doute sur le modèle de Jaca140. Sans que l’on soit encore totalement certain de la topo-chronologie des faits, il est assuré que cette initiative eut pour effet durable la transformation de l’antique dualité de sites d’Iluro entre deux pôles de pouvoir : Oloron, ville vicomtale juchée sur l’ancien oppidum, et Sainte-Marie, dans la plaine, héritière d’une agglomération romaine et centre du pouvoir épiscopal. Soit, sous une autre configuration, une même stratégie de séparation topographique des lieux de pouvoirs.
LE SIÈCLE DES CENTULLE
46En raison de la grande longévité de leur règne, les figures de Centulle-le Jeune et Centulle-le Vieux dominent le XIe siècle béarnais. Le Béarn et la société béarnaise vont durablement conserver la marque de leur action et de leurs options.
47C’est alors que se forge l’identité territoriale du Béarn « classique ». En 1100 le Béarn est bien différent du pagus centré sur la cité de Beneharnum, hérité de l’Antiquité tardive, qui était celui de l’an 1000. Sur la frontière orientale, Centulle [V] a imposé une transgression territoriale en détachant du Béarn, au profit de la Bigorre, le fragment de territoire correspondant à l’abbaye de Saint-Pé141. L’affaire déclencha une longue tempête qui permet de mettre au jour la prégnance des limites préexistantes, tant religieuses142, que coutumières143. En sens inverse, dans aucun document Gaston [IV], ni sa femme Talèse ne s’intitulent vicomte de Montaner ; il y a eu fusion dans le Béarn. Sur le côté occidental, s’est semblablement posée la question de la « béarnisation » de terres annexées. La vicomté de Soule, seulement vassalisée entre 1086 et 1104, ne sera jamais béarnaise. Par contre, passé le règne de Centulle-le Jeune, le titre de vicomte d’Oloron s’efface, et les Oloronenses deviennent des Bearnenses. Le pays de Salies et celui d’Orthez suivront le même sort. La monnaie, la législation forale, les routes144, constituent des instruments d’intégration efficaces. Sans attendre la scripta notariale. Le fait de ne pas se désigner, sauf exception145, comme vicomte de Lescar (qui avait éclipsé Beneharnum dès le IXe siècle) a sans doute facilité l’intégration de territoires ressortissant à d’autres diocèses.
48À la fin du XIe siècle, le vicomte de Béarn intègre à l’exercice du pouvoir bien des pratiques communes à la féodalité méridionale (comme par exemple la rendabilité des châteaux). Mais le Béarn paraît plus proche du « pactisme » qui prévaut sur le versant aragonais. Nous ne nous attarderons pas à développer cet aspect essentiel des choses qui a tout récemment fait l’objet de plusieurs contributions concordantes de la part des historiens de « l’école de Pau146 ».
49En cette période de changements rapides de la société, le vicomte ne semble avoir jamais cessé d’être le garant de la paix et de l’autorité publique. Depuis Paul Ourliac, on s’accorde à voir dans l’idéologie qui inspire ces seigneurs une influence des idées isidoriennes147, mais le mot pax gravé au revers de la monnaie de Morlaas est tout aussi bien le programme du propagator pacis loué par Grégoire VII (Cf. Annexe 4). Les rapports entre le vicomte et son aristocratie prennent une forme contractuelle par échange de serments, le vicomte s’engageant le premier. Le pacte « est le premier fondement du l’autorité publique en Béarn » (J.-P. Barraqué). Les accords particuliers, devenus coutumes, ont fusionné dans un recueil évolutif ayant force de loi sur l’ensemble de la vicomté : ainsi auraient vu le jour les fors de Béarn148. Le mérite de Centulle-le Jeune et de son fils Gaston est d’avoir précocement compris l’intérêt qu’ils avaient à élargir des bases de leur pouvoir en adaptant ce pactisme aux forces émergentes de la société : ainsi ont vu le jour, en écho aux pratiques ibériques, le for d’Oloron (circonstanciel), et le for de Morlaas (progressivement étendu à tous les bourgs du Béarn). Dès la fin de la dynastie, les bourgeois de Morlaas apparaissent aux côtés des « barons de la terre » dans une charte solennelle149.
50À lire toutes les autres « histoires de vicomtes », s’est confirmée la singularité des vicomtes de Béarn. La séquence des Centulle est le moment fondateur d’une histoire dynastique qui se prolonge jusqu’en 1347. L’habile construction politique de Centulle [V] a été éclipsée par la dimension épique des prouesses de Gaston-le Croisé, dont la renommée est sans commune mesure avec la modestie du titre vicomtal150. La guerre a sans nul doute constitué un facteur de structuration majeur du pouvoir vicomtal béarnais151. Mais cette histoire s’inscrit, aussi, dans ce que nous sommes tenté d’appeler la « modernité » de la féodalité du XIe siècle, que dénote ici l’alliance du destrier et du denier. En jouant entre enracinement castral et Église universelle, entre espaces en féodalisation du nord et territoires en expansion du sud, cette dynastie est parvenue à faire d’un obscur pagus rural une puissance régionale.
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51Comme toujours dans l’histoire des pays gascons, c’est vers l’amont de l’an mil que les choses deviennent obscures et problématiques. La documentation en est la cause. À supposer, comme c’est aujourd’hui la tendance, que l’autorité publique n’ait subi en ce pays aucune éclipse, sous quelle forme imaginer cette continuité ? Les indices de résistance des Centulle au pouvoir ducal, autour de l’an mil, paraissent trahir l’existence d’un pouvoir local fort qui ronge son frein. Quelle datation, et donc quelle signification donner aux mottes féodales qui parsèment le pays (mais sans doute pas avec une plus grande densité qu’ailleurs)152 ? À quel titre, et avec quels moyens, les ancêtres du premier vicomte connu auraient-ils exercé une autorité publique sur le pays ? Est-il imaginable que le pouvoir ait depuis longtemps été tenu par une famille d’alleutiers du Vic-Bilh tardivement habillée du titre de vicomtes par les comtes de Gascogne ? Aristocratie héritée d’une souche sénatoriale tardo-antique et/ou apparentée avec l’aristocratie wisigothique ou austrasienne ? Comment l’aristocratie de ce canton isolé aurait-elle pu être, plus qu’ailleurs, la dépositaire d’une idéologie de gouvernement isidorienne en dehors de l’existence de centres urbains et/ou monastiques ? Faut-il voir dans cette idéologie un héritage ancien ou, plus vraisemblablement peut-être, un emprunt récent à la monarchie navarraise ? On est loin de pouvoir dresser un tableau cohérent des permanences, des discontinuités et des emprunts, comparable à celui que J.-J. Larrea a pu proposer pour le versant navarrais153.
52En définitive, faute de pouvoir appréhender la situation des siècles qui ont précédé l’an mille, ce que l’on est en mesure de mettre au jour n’est rien d’autre que la remarquable capacité de fortes individualités à bâtir et à faire reconnaître une solide entité féodale dotée d’une large autonomie, en tirant le meilleur parti du riche potentiel de changement du XIe siècle.
Notes de bas de page
1 L’étude de fond la plus récente sur l’histoire de la Gascogne entre Xe et XIIe siècle reste celle de Renée Mussot-Goulard, Les princes de Gascogne, Marsolan, 1982 (il y sera désormais fait référence sous la forme abrégée Princes).
2 En raisonnant en termes géographiques, on doit ajouter la vicomté de Lavedan aux quatre autres vicomtés attestées dès avant l’an mil dans le bassin de l’Adour.
3 L’article de Dominique Bidot-Germa, « Le Béarn des premiers Centulle : une histoire de l’an mil, ses sources et son écriture », Revue de Pau et du Béarn, no 33-2006, p. 9-29, a paru entre la tenue du colloque d’Albi et la publication des actes. Cette publication, plus complémentaire que contradictoire de la nôtre, nous évitera de réitérer un certain nombre de démonstrations.
4 À l’inverse du parti pris adopté par R. Mussot-Goulard, Princes…, nous avons privilégié, sauf cas de discussion érudite, les références aux publications quand il en existait de satisfaisantes. Voici, classées par ordre alphabétique, les références complètes des sources qui seront dorénavant citées en abrégé : Cart. Auch : Cartulaire Noir de l’église métropolitaine Sainte Marie d’Auch, C. Lacave-Laplagne-Barris, Paris-Auch, 1899 ; Cart. Bigorre : Le cartulaire de Bigorre, X. Ravier, B. Cursente, Paris, 2005 ; Cart. Dax : Cartulaire de la cathédrale de Dax. Liber Rubeus (XIe-XIIe siècle), G. Pon, J. Cabanot, Dax, 2004 ; Cart. La Réole : Cartulaire du prieuré conventuel de Saint-Pierre de La Réole, Ch. Grellet-Balguerie, Archives historiques de la Gironde, t. V, 1863 ; Cart. La Sauve– Majeure : Grand cartulaire de La Sauve-Majeure, Ch. Higounet, A. Higounet-Nadal, Bordeaux, 1996 ; Cart. Lucq : « Cartulaire de Saint-Vincent de Lucq », L. Barrau-Dihigo, R. Poupardin, Revue du Béarn et du Pays-Basque, 1904 ; Cart. Madiran, Cartulaire de Madiran, BNF, coll. Doat, t. 152, fol. 146-225 ; Cart. Morlaas, Cartulaire de Sainte-Foi de Morlaas, L. Cadier, Bull. Soc. Sciences Lettres et Arts de Pau, 1883, p. 3-71 ; Cart. Saint-Mont : Cartulaire du prieuré de Saint-Mont, J. Maumus, J. de Jaurgain, Paris-Auch, 1904 ; Cart. Saint-Seurin : Cartulaire de l’église collégiale Saint-Seurin de Bordeaux, J.-A. Brutails, Bordeaux, 1897 ; Cart. Sorde : Cartulaire de l’abbaye Saint-Jean de Sorde, P. Raymond, Paris-Pau, 1873 ; Chartes Saint-Sever : P. D. Du Buisson, Historiae monasterii Sancti Severi libri X, Pédegert, Lugat, Aire-sur-l’Adour, 1876 ; Docs. Beatus : « Documents transcrits à la fin du Beatus », E. Nortier (éd.), dans Saint-Sever. Millénaire de l’abbaye, Mont-de Marsan, 1986 ; Docs reconquista : Documentos para el estudio de la reconquista y de la repoblación del valle del Ebro, J.-M. Lacarra (éd.), Zaragoza, 1985 ; Docs Saint-Pé : Documents historiques relatifs à l’abbaye de Saint-Pé (de Geyres), G. Balencie dans Annuaire du Petit Séminaire de Saint-Pé, année 1887, p. 254-302 ; Fors Béarn : Les fors de Béarn, P. Ourliac, M. Gilles, Paris, 1990 ; L.O. Bayonne : Le Livre d’Or de Bayonne, J. Bidache (éd.), Pau, 1906. Certains cartulaires (Lescar, Larreule, Sauvelade) et plusieurs chartes sont connus à travers les fragments publiés à titre de Preuves par Pierre de Marca, Histoire de Béarn, Paris, 1639, ouvrage réédité par V. Dubarat, Pau, 1894-1912. C’est à cette réédition, qui a fait l’objet d’un reprint et qui est disponible dans la plupart des bibliothèques, qu’il sera fait référence sous la forme Marca, HB suivi des indications de tomaison, pagination, partie, chapitre.
5 Comme l’origine commune des Béarnais et des Suisses à partir de l’homonymie Béarnais-Bernois.
6 P. Tucoo-Chala, La vicomté de Béarn et le problème de sa souveraineté des origines à 1620, Bordeaux, 1961, cf. notamment l’état de la question p. 11-21.
7 Cf. notamment : L’art de vérifier des dates, Paris, 1818, t. IX, p. 249-255 ; De Mas Latrie, Trésors de chronologie d’histoire et de géographie, Paris, 1889, p. 1556-1557.
8 Cf. en dernier lieu Bidot-Germa, « Le Béarn des premiers Centulle… ».
9 Mussot-Goulard, Princes…, p. 146.
10 L’anthroponymie, document d’histoire sociale des mondes méditerranéens médiévaux, Rome, EFR, 1996, dont P. Martinez-Sopena, « L’espace pyrénéen », p. 80-81.
11 Cf. par exemple la famille de prêtres de ce nom à Saint-Frajou (Comminges) au Xe siècle, dans Cart. Auch, acte 47.
12 R. de Saint-Jouan, Le nom de famille en Béarn et ses origines, Paris, 1966 : les pointages chiffrés de cet auteur permettent de relativiser la fréquence et la durée d’emploi de la pratique du nomen paternum.
13 Mussot-Goulard, Princes…, p. 88, note 150.
14 Jean de Jaurgain, La Vasconie. Étude historique et critique, Pau, 1898 : cet ouvrage reste très utile en raison de l’abondance des références et des citations
15 Telle est aussi l’opinion de Mussot-Goulard, Princes…, p. 146. et de Bidot-Germa, « Le Béarn des premiers Centulle… », qui souligne à juste raison qu’on n’a pas accordé une attention suffisante au nom de Gaston par rapport à Centulle.
16 Voir Jaurgain, Vasconie…, II, p. 533-551 ; tableau synoptique des principales restitutions généalogiques (qui nourrissent les sites web de généalogie), dans Bidot-Germa, « Le Béarn des premiers Centulle… », p. 15.
17 Chartes Saint-Sever, p. 149 ; Ch. Higounet, Saint-Sever, millénaire de l’abbaye. Colloque international 25, 26 et 27 mai 1985, Mont-de-Marsan, Comité d’études sur l’histoire de l’art en Gascogne, 1986, p. 28, soupçonne que les noms simples ont été ultérieurement complétés par des mentions géographiques.
18 L.O. Bayonne, acte 1 (année 981) ; cf. Mussot-Goulard, Princes…, p. 143, note 106.
19 La charte de Saint-Sever en 963 où apparaît Gasto Centulli vicecomes est fausse, Docs. Beatus, 2.
20 Le fragment de charte de Lucq, non inclus dans le cartulaire (mais reproduit comme appendice de la publication, p. 28), uniquement connu par Marca, HB, I, 265 (l. 3, c. 3), datable des années 961-984, qui met en jeu un Gasto Centulli vicecomes, sert de base à bien des raisonnements (Mussot-Goulard, Princes…, p. 140,146). Cette pièce est pour le moins suspecte, cf. en dernier lieu Bidot-Germa, « Le Béarn des premiers Centulle… », p. 12. La teneur en est la suivante : Quando Dominus Willelmus Sancii Comes Gasconiorum dedit villam de Luco Deo et S. Vincentio, Gasto Centuli, vicecomes B. nolebat assentiri et dimittere partem suam : sed tandem acquievit, victus precibus Garsiae abbatis, qui ei suam consanguinitatem cum dicto comite replicavit, et quomodo venisset de Hispania avus Domni Willelmi, ubi se contulerat pater ejus tempore domni Ludouici imperatoris ; qui quidem rex de hac patria vestituram dedit avo vicecomitis, qui erat de ejus progenie : et dedit Deo et S. Vincentio partem suam super altare.
21 Cart. Saint-Seurin, 9 (vers 1036).
22 Marca, HB, I, 354 : fondation de Larreule, 1010-1032.
23 Cart. Lucq, 8.
24 Cart. Lucq, 4 : confirmation sous le comte Bernard (999-1010) d’une donation faite sous Guillaume Sanche (mort en 999), mais rien ne dit que Centulle-Le Vieux était alors présent.
25 Ces deux occurrences dans Cart. Lucq, 5.
26 Cart. Lescar, Marca, HB, I, 3 62 (l. 4, c. 6) : Centullus Gastonis vicecomes injurias reparare nolebat, fidens affinitati ducis Sancii propter nuptias Angelae ; Mussot-Goulard, Princes…, p. 179, note 103, y voit une sœur du duc Sanche Guillaume.
27 Docs Saint-Pé, respectivement 27, Ramundus Centulli, frater Gastonis vicecomitis Bearnensis ; et 19 : Oriolus Centulli, miles Bearnensis ; cf. ci-après, note 73.
28 Marca, HB, 1, 383 (l. 4, c. 10) ; très problématique est la mention de Gastoni Centulli in Beiarn, dans un acte précisément daté de 1030 (Docs Beatus 3), qui coexiste avec des personnages ne régnant pas à cette date (comme Austinde d’Auch).
29 Cart. Lescar, Marca, HB, I, 358 (l. 4, c. 5).
30 Cart. Madiran, acte 1, fol. 154, datation de circa 1037 (épiscopat d’Heraclius en Bigorre).
31 Cart. La Sauve-Majeure, 1250.
32 Cart. Saint-Mont, 78 : ego… femina Oliba soror… Centulli comitis Bigorrensis… et vicecomitis Viernensis, (acquiert la terre d’un miles pour le compte de Saint-Mont).
33 Chartrier de Moissac, Marca, HB, I, 403 : Hulnaldus frater Centulli comitis Bearnensis. Hunaud est le demi-frère de Centulle, né du second mariage de sa mère Adalaïs, vicomtesse de Brulhois, avec le vicomte Roger de Gabarret. Hunaud a reçu la vicomté de Brulhois qui échoira à la maison de Béarn après la mort de celui-ci, vers 1105.
34 Cart. Lucq, 5.
35 Cart. Morlaas, 1 (1079).
36 Ces trois occurrences extraites du Chartrier de Moissac, Marca, HB, 1, 403 (l. 4, c. 15).
37 Docs Saint-Pé, 18.
38 Cart. Saint-Mont, 23, vicecomes Bearnensis, Docs Saint-Pé, 15.
39 Cart. Bigorre, 43.
40 Cart. Bigorre, 29.
41 Charte San Juan de la Peña, Marca, HB, 1, 426 (l. 4, c. 19).
42 Lettre de Grégoire VII, voir plus bas note 125 et Annexe 2.
43 Charte San Juan de la Peña (1077), Marca, HB, I, 427 (l. 4, c. 19).
44 For d’Oloron, (vers 1080), éd. P. Ourliac, M. Gilles, Fors de Béarn, Paris, 1990.
45 Cart. Saint-Mont, 78, même formule dans Cart. Saint-Pé, 2 (Bearnii), vers 1079.
46 Cart. Saint-Mont, 76.
47 Charte de condamnation du meurtrier de Centulle V, publ. Marca, HB, I, 430 (l. 4, c. 20).
48 Docs Saint-Pé, 8.
49 Cart. Sorde, 8.
50 Docs. Saint-Pé, 27 : Ramundus Centulli, frater Gastonis comitis.
51 Cart. Saint-Mont, 87-4 : Bernardus, miles de Arbocava, gener Centulli comitis.
52 Cart. Saint-Mont, 88 ; cart. Lucq, 16.
53 Cart. Morlaas, 3.
54 Cart. La Réole, 87-64.
55 Cart. Sorde, 6, 57, cart. Lescar, Marca, HB, II, 60 (l. 5, c. 10).
56 Cart. Lescar, Marca, HB, II, 53 (l. 5, c. 10).
57 Cart. Sauvelade (1128), Marca, HB, II, 113 (l. 5, c. 21).
58 Cart. Sorde, 146.
59 Cart. Lucq, 16.
60 Cart. Noir Auch, 134 (vers 1110).
61 Docs Saint-Pé, 6.
62 On n’énumèrera pas les 59 occurrences contenues dans les seuls Docs Reconquista. Elles sont bien entendu adaptées au contexte aragonais ; Gaston est dit vicecomes non pas de mais à Zaragoza, Uncastillo Montreale, Huesca, ou bien senior, dominator, presidente dans ces localités ; il est tantôt nommé vicecomes Gaston, tantôt Gaston de Bearne.
63 Docs Saint-Pé, 5.
64 Deux emplois dans la même charte, Cart. Morlaas, 5.
65 Docs Reconquista : 13 occurrences de vicecomes Centol ; à noter l’absence de référence au Béarn et le fait qu’au sud aussi, on rencontre des présentations du personnage comme filius vicecomitis Gastonis (no 109, 212).
66 Contrairement à Mussot-Goulard, Princes…, p. 149.
67 Cart. Lucq, 4 : facto… sacramento patris, Gasto filius eius eisdem verbis similique modo… juravit.
68 Docs Saint-Pé, 2 : Guastone filio suo simul confirmante et donante.
69 Cart. Morlaas, 19 : Gaston IV a une magna contentio avec le puissant monetarius de Morlaas installé par son père.
70 Cf. ci-dessus note 26 et Mussot-Goulard, Princes…, p. 179, note 103.
71 Docs. Saint-Pé, 25 (date indéterminée).
72 Cf. ci-dessus note 32.
73 Jaurgain, Vasconie…, p. 538-539 : Auriol Centulle (qui reçoit pour cognomen un de Bearno non donné par les textes) aurait eu quatre enfants, selon une filiation de pure imagination : Atardus miles Bearnensis (qui devient Artard de Béarn), le personnage nommé Arnaud de Clarac dans une charte, (qui est rebaptisé Arnaud de Béarn dit de Clarac), et Tecla, mère d’Auger de Miramon (qui devient Tècle de Béarn).
74 Cart. Saint-Mont, 76 : Osquinette (souvenir d’une campagne de Huesca ?) a épousé un miles du Tursan Bernard d’Arboucave ; ibid., 78 (1079-1090) ; Oliba évolue dans le milieu des chevaliers locaux.
75 Ci-dessus note 33.
76 Par exemple : Docs Saint-Pé, 6 : Guasto simul cum uxore sua dicta Talesia.
77 Marca, HB, II, 91 (l. 5, c. 16), ibid. II, 112 (l. 5, c. 21) ; Docs Reconquista, no 109, 328 (Viscondesa de Bearn).
78 Cart. Lucq, 4.
79 Docs Saint-Pé, 11 (1010-1032) : c’est du moins la vision des clercs de Lescar, favorables au pouvoir comtal.
80 Le cartulaire de Lescar, Marca, HB, I, 280 (l. 3, c. 6), rapporte le meurtre par un miles béarnais du nom de Loup Fort de quodam vicecomite Vasconiae… propter fidelitatem comitis : peut-il s’agir d’un vicomte de Béarn ? (Mussot-Goulard, Princes…, p. 158) ; cf. aussi supra, note 20, la problématique charte de Lucq ; même s’il s’agit d’un faux, l’hostilité prêtée au vicomte Gaston Centulle doit ressortir au principe de vraisemblance (sauf en cas de forgerie postérieure au XIe siècle).
81 Cart. Lescar, Marca, HB, I, 362 (l. 4, ch. 6).
82 En témoignent les diverses donations rapportées par les cartulaires de Lucq, de Lescar et les chartes de Saint-Pé. Un raisonnement régressif se fondant sur les censiers du XIVe siècle (notamment Arch. départ. Pyrénées-Atlantiques, E 317), pourrait permettre de se faire une idée globale de la densité du domaine direct vicomtal dans ce secteur.
83 Cart. Bigorre, 29 : Dedit ei fiscum sicut Centullus comes fuit illi fidelis et adjuvavit illum in necessitate sua (…) XII conductus quos (…) habebat in Clarag, et a Clarag usque ad Arganion in Bearn et a Maria in Oleron et omnia quod pertinent ad ipsos conductus de re comitis.
84 Nous nous rallions à l’opinion généralement émise par les historiens sur ce sujet.
85 Mussot-Goulard, Princes…, p. 187-224.
86 Cart. Saint-Mont, 1 : nepote meo Centullo.
87 Mussot-Goulard, Princes…, p. 191.
88 Voici un résumé des interprétations contradictoires jusqu’ici avancées (on trouve sous la plume du seul Marca deux narrations légèrement différentes). 1) Les droits comtaux sont tombés de facto sous le pouvoir du vicomte lors de la disjonction du ducatus et du comitatus. Les actes de 1086-1087, qui ne concernent que des miettes résiduelles, y mettent un point final (Marca, HB, 1, 361 (l. 4, c. 6)) ; 2) Centulle V avait, au titre d’Angèle, des prétentions à faire valoir sur la succession comtale ; il a négocié avec Bernard, en échange de son appui, la reconnaissance des droits de juridiction régaliens sur le Béarn (Marca, HB, I, 364, (l. 4, c. 7)) ; 3) Centulle, instigateur de la révolte de Bernard s’est trouvé après La Castelle dans le camp des vaincus et Gui-Geoffroi a envahi ses terres (Abbé A. Breuils, Saint Austinde archevêque d’Auch (1000-1068) et la Gascogne au XIe siècle, Auch, 1895, p. 217-219) ; 4) Centulle a aidé Geoffroi notamment lors de la bataille de La Castelle, et le donativum récompense cet appui (Jaurgain, Vasconie…, I, p. 250, suivi par Jean-Baptiste Laborde, Paul Lorber, Histoire de Béarn, t. 1, Pau, 1932, p. 163 et Tucoo-Chala, La vicomté, p. 33) ; 5) L’opposition entre Centulle et Gui-Geoffroi n’a jamais débouché sur un conflit ouvert ni sur une revendication de souveraineté : Mussot-Goulard, Princes, p. 219-220 (analyse quelque peu contradictoire avec le titre donné au chapitre correspondant : « L’affrontement béarno-aquitain »).
89 Cart. Saint-Mont, 23.
90 Cart. Saint-Mont, 7. Le texte narrant la conversio du comte d’Armagnac qui se retire en 1062-1063 comme moine dans le monastère de Saint-Mont dont il est le fondateur, se présente comme une sorte de « copier-coller » composite qui a très tôt suscité la méfiance des historiens (notamment J.J. Monlezun, Histoire de la Gascogne, Auch, 1846, t. 2, p. 34). Cette pièce sert de fondement à deux interprétations divergentes de l’histoire du conflit entre Bernard d’Armagnac et Gui-Geoffroi. Pour les uns, le comte Tumapaler aurait accepté dès 1052 le rachat des droits comtaux par Gui-Geoffroi, puis se serait renié après 1058 : voir surtout abbé A. Breuils, Saint-Austinde…, p. 217, Jaurgain, Vasconie…, t. I, p. 248 et plus récemment Raphaela Averkorn, Adel und Kirche in der Grafschaft Armagnac. Das cluniasensische Priorat Saint-Jean-Baptiste de Saint-Mont (1036-1130), Bochum, 1997, p. 71-73 (nous remercions X. Ravier de nous avoir aidé à traduire cette importante contribution). Pour les autres, Gui-Geoffroi aurait donné à son rival 15 000 sous après le combat de La Castelle pour s’assurer de son renoncement définitif à la potestas comtale ; cf. Mussot-Goulard, Princes…, p. 219-220 ; J.-B. Marquette, dans S. Lerat (dir.), Landes et Chalosse, Pau, 1983, p. 158. Nous inclinons à croire que ce second scénario est le plus vraisemblable, mais une justification aurait impliqué l’étude de fond d’un texte qui ne concerne qu’indirectement notre sujet.
91 Cf. la vente des droits sur la vicomté de Béziers et Agde au comte de Barcelone entre 1067 et 1070, H. Débax, La féodalité languedocienne, XIe-XIIe siècles, Toulouse, 2003, p. 59-71.
92 Cart. Bigorre, 29 : Gui-Geoffroi étant décédé le 24 septembre 1086, la donation consentie VIII dies antequam moreretur intervient le 16 septembre.
93 Mussot-Goulard, Princes…, p. 225.
94 P. Tucoo-Chala, Quand l’Islam était aux portes des Pyrénées. De Gaston IV-Le Croisé à la croisade albigeoise, Pau, p. 32.
95 Cf. notamment la sentence prononcée par Sancho Ramirez à l’encontre du meurtrier du comes domno Zentolle meum vassallum, publiée, après Marca, par J.M. Lacarra dans Colonización, parias, repoblación y otros estudios, Zaragoza, 1981, p. 148.
96 Cf. en dernier lieu J.-P. Barraqué, « Béarn et Aragon aux XIe et XIIe siècles », dans Ph. Sénac (dir.), Aquitaine-Espagne (VIIIe-XIIIe siècles), Cahiers de Civilisation Médiévale XII, Poitiers, 2001, p. 175-188.
97 J.M. Lacarra, « Los franceses en la reconquista y repoblación del valle del Ebro en tiempos de Alfonso el Batallador », réed. dans, Colonización, p. 155 ; Mussot-Goulard, Princes…, p. 225-232 ; et surtout Tucoo-Chala, Quand l’Islam…, p. 43-141.
98 M. Bull, Knightly piety and the lay response to the first Crusade. The Limousin and Gascony, v. 970-c. 1130, Oxford, 1993, part. p. 94.
99 La plupart sont attestées dans les cartulaires de Sorde et de Dax.
100 Pour Marsan et Miramont, voir la contribution de J.-M. Fritz dans ce volume.
101 Cart. Dax, 152.
102 B. Cursente, « Le “casted” de Corneillan (Gers), ou le pouvoir seigneurial partagé (début du XIIe siècle) », dans Château et pouvoir, Xe-XIXe siècle, Bordeaux, 1996, p. 19-27.
103 Mussot-Goulard, Princes…, p. 143.
104 Idem, n. 112, elle n’a pas eu connaissance de ce texte quand elle dénie tout crédit à l’hypothèse de Marca qui se fonde précisément sur lui.
105 Le narrateur de la charte dacquoise ne fait pas mystère de ses sentiments anti-béarnais ; si la mainmise sur la vicomté d’Oloron avait fait l’objet d’une transgression, il y a lieu de croire qu’il en aurait fait état.
106 Marca, HB, II, 30-33 (l. 5, c. 5) ; J.-B. Laborde, P. Lorber, Histoire de Béarn…, p. 179-180.
107 Cart. Saint-Pé, 15 ; Arnaldus Anerii de Monteanario et fillii ejus ; le devenir de cette descendance est inconnu.
108 Cart. Bigorre, 29 : il s’agit d’une concession par Guillaume IX de droits remontant à Sanche-Guillaume qui s’ajoute au donativum de son père : similiter dedit ei. C. adhuc illi illico dominium quod comes Sancius in Valle Sola (tenebat).
109 Cart. Dax, 152.
110 Cart. Sorde, 57 : vicecomes de Salt (1105-1119).
111 Voir la contribution de J.-M. Fritz dans ce volume.
112 À titre d’exemple, cf. la liste de témoins de l’acte de confirmation de la consécration de Saint-Pé de Génerès, en 1096, Docs Saint-Pé, 15.
113 R.A. Senac, « Essai de prosopographie d’abbés de monastères gascons (945-1059) », Bull. de la Société de Borda, t. 108, 1983 ; K. Wollasch, « Question clés du monachisme européen avant l’an mille », dans Saint-Sever, millénaire…, p. 14-25.
114 Cart. Lescar, Marca, HB, I, 379 (l. 4, c. 9) : Raymundus episcopus more antecessorum suorum sex episcopatus tenuit…
115 R.-A. Sénac, « Essai de géographie et d’histoire de l’évêché de Gascogne (977-1059) », Bulletin philologique et historique, année 1980, p. 11-25.
116 Abbé A. Breuils, Saint-Austinde…, chap. 7.
117 Certains historiens, notamment Mussot-Goulard, Princes…, p. 201, assimilent, aventureusement selon nous, ce Stephanus au Stephanus Garcia qui est le principal auteur du Beatus de Saint-Sever.
118 Max Fazy, « Essai sur Amat, évêque d’Oloron, archevêque de Bordeaux et légat du Saint-Siège », Bibliothèque de la Faculté des Lettres de l’Université de Paris, XXIV, 1908, p. 80-142 : la première attestation certaine d’Amat comme évêque d’Oloron et comme légat date de 1074.
119 Saint-Sever, millénaire de l’abbaye…
120 Cart. Dax, acte 152 : Qui tanto ampliores tenebat honores, tanto minor erat ad
121 B. Guillemain, « Les moines sur les sièges épiscopaux du sud-ouest de la France aux XIe et XIIe siècles », dans Études de civilisation médiévale offertes à E.R. Labande, Poitiers, 1974, p. 377-384.
122 Breuils, Saint-Austinde…, chapitre VI (présentation des faits outrageusement favorable à l’archevêque).
123 Mussot-Goulard, Princes…, p. 206, note 155 : sept donations entre 1064 et 1068.
124 La réflexion de J. Wollasch : « Quel gain (…) pour l’histoire de la Gascogne, ainsi que pour l’histoire des clunisiens du Xe et XIe siècle (…), si nous pouvions disposer d’une monographie sur les vicomtes du Béarn… », dans Saint-Sever, millénaire…, p. 21, semble ignorer la situation documentaire de la région avant le milieu du XIe siècle.
125 La lettre apostolique, adressée à Centullo comiti, a été publiée par Marca dès 1639, HB, I, 393 (L. 4, c. 12) ; l’édition de référence est celle de E. Caspar, Das Register Gregors VII (Mon. Germ. Hist. Epistolae selectae, I, 2), Berlin-Dublin-Zürich, 1967, p. 431. Nous la reproduisons ici même dans l’Annexe 2.
126 Il n’est pas indifférent de noter que Centulle n’hésita pas à passer outre la réprobation, pour cause de consanguinité, de l’union projetée entre son fils Gaston et Talèse, notifiée par Urbain II au roi Sancho Ramirez ; cf. C. Laliena, La formacion del estado feudal. Aragon y Navarra en la época de Pedro I, Huesca, 1996, p. 135, note 142.
127 Marca, HB, II, 397-400 (L. 4, c. 14) : traduction de l’épisode miraculeux de la vie de moniale de Gisla rapportée par Pierre – le– Vénérable ; J. Wollasch, Saint Sever. Millénaire…, p. 21, note 34, qui renvoie au livre, alors sous presse, de E.-M. Wischermann, Marcigny-sur-Loire. Gründungs und Frühgeschischte des ersten Cluniacenserinnpriorates (1055-1150), que nous n’avons pas pu consulter.
128 Cart. Morlaas, 1 et note 9.
129 Cart. Lescar, Marca, HB, I, 416 (L. 4, c. 17) : Centullus (…) dimittens legitimam uxorem, matrem Gastonis quam habebat, Bernardum Ep. de posessione sua ejecit violenter, et Pontium Bigorrensem Ep. In possessionem monasterii induxit, tali pacto ut ille concederet illicitas nuptias Bigorrensis comitissae quod B. prohibebat ; quem tamdiu persecuum per assiduam querellam et interdicta quae inde faciebat a toto episcopatu ejecit, et in exilio mortuus et apud Forum Julii est sepultus.
130 Cart. Dax, 152 ; de façon plus générale C.J. Hefele, Histoire des conciles, V, 1, Paris, 1912, p. 247.
131 C’est le choix du comte de Fezensac Aimeric-Forton à Auch, Cart. Auch, 77 (1068-1097).
132 Bidot-Germa, « Le Béarn des premiers Centulle… », p. 21 ; le vicomte possède par ailleurs en Vic-Bilh les trois châteaux de Cadillon, Escurès, Maubec (qui seront donnés en gage lors de l’hommage au roi d’Aragon de 1170), plus déjà certainement le château de Pau qui apparaît dans le cartulaire de Morlaas à la même époque.
133 Les données documentaires essentielles sont contenues dans le Cartulaire de Morlaas ; elles sont mises en perspective avec les faits archéologiques par Ph. Araguas et alii, Vic-Bilh, Morlaas, Montanérès, Inventaire topographique, Ministère de la Culture, Paris, 1989, p. 488-499.
134 Initiative symétrique de celle du roi d’Aragon Sancho Ramirez, créateur de l’atelier de Jaca ; G. Schlumberger, A. Blanchet, Numismatique de Béarn, Paris, 1893 (réed. Biarritz, 1998) ; T.N. Bisson, Conservation of coinage. Monetary exploitation an its restraint in France, Catalonia and Aragon, c. 1000-1225AD, Oxford, 1979, part. p. 54-55.
135 Cf. simplement l’article fondateur d’André Debord, « Les bourgs castraux dans l’Ouest de la France », dans Châteaux et peuplement dans l’Europe occidentale du Xe au XVIIIe siècle, Flaran 1, Auch, 1980, p. 57-73 (rappelons que la majorité de ces bourgs sont fondés entre 1060 et 1070).
136 H. Débax, « L’aristocratie méridionale autour de 1100 », Les Cahiers de Saint-Michel de Cuxa, XXXVI, 2005, p. 7-20 ; J. Morsel, L’aristocratie médiévale, Paris, 2004, chap. 3.
137 P. Ourliac, M. Gilles, Fors… : les articles19 et 21 qui appartiennent au noyau primitif du texte du temps de Centulle, visent à donner un coup d’arrêt à la diffusion du pouvoir châtelain (interdiction de bâtir de nouveaux châteaux) et à contenir l’autonomie des seigneuries châtelaines déjà installées (devoir de rendabilité).
138 Doc. Saint-Pé, 2 (vers 1078) : Centulle évoque le servitium malum lié à son château de Cadillon ; cart. Dax, acte 101 : fondation en 1106 du château et du bourg de Mongiscard pour contrôler le pays d’Orthez.
139 Nous renvoyons à notre article consacré à la poblation d’Oloron à paraître dans les Actes du colloque d’Oloron de décembre 2006 (sous presse).
140 El fuero de Jaca. Estudios, Jaca, 2003.
141 Il s’agissait de récompenser l’évêque de Bigorre pour son soutien lors de son remariage avec Béatrix. Les contestations des évêques de Lescar se prolongent durant tout le premier tiers du XIIe siècle ; bon exposé des faits dans J.-B. Laborde, P. Lorber, Histoire de Béarn…, p. 182-183.
142 Docs Saint-Pé, 11 : infra terminos episcopatus Lascurriensis (1010-1032).
143 Ibid., 14 : patet per mensuras villae et consuetudines a Bigorritanis et Bearnensibus mensuris et consuetudinibus differentes. Au lendemain de la bataille de La Castelle, il avait été demandé à Gui-Geoffroi de mesurer les limites entre les deux diocèses en tant que duc de Gascogne (J.-B. Laborde, P. Lorber, Histoire de Béarn…) Dans ce contexte, le coup de force de Centulle résonne comme l’affirmation provocatrice d’un changement de mains du dominium.
144 Les routes vicomtales décrites par l’article 37 du For Général (Ourliac, Gilles, Fors…, p. 163), dessinent des sortes d’agrafes venant solidariser des composantes territoriales dont l’intégration au Béarn apparaît tout à la fois récente, fragile et stratégiquement essentielle. La route allant du pont de la Faderne à Osserain correspond au pays d’Orthez laborieusement annexé entre la fin du XIe et la fin du XIIe siècle. Celle qui va de la côte de Laurede au Somport unit le Vic-Bilh et le Montanérès à la vallée d’Aspe ; celle qui va de Génerès à Biusaillet joint le Montanérès à l’Ossau.
145 Cart. Saint-Mont, 23 : cum Centullione Lescariensi comite, et, en symétrique, ibid., 7, 43 : Bernardus Viernensis episcopus(1079).
146 J.-F. Baulon, « Le Béarn vers 1100 à travers ses fors : la paix du vicomte et ses limites », Revue de Pau et du Béarn, 23,1996, p. 11-38 ; J.-P. Barraqué, « Béarn et Aragon… » ; D. Bidot-Germa, « Le Béarn des premiers Centulle… ».
147 P. Ourliac, « La justice et la paix dans les fors de Béarn », Les pays de Garonne vers l’an mil. La société et le droit, Toulouse, 1993, p. 195-206.
148 P. Ourliac, M. Gilles, Les fors…
149 Docs Saint-Pé, 5 (1131-1134) : et alii multi barones ipsius terrae et de burgensibus Morlanis…
150 À propos des prouesses de Gaston-IV, reprises par tous les historiens, est à rappeler le remarquable travail effectué sur les sources par Pierre de Marca : Marca, HB, 2, 34-46 (l. 1, c. 6 et7).
151 Ce point a justement été souligné par J.-F. Baulon, « Le Béarn vers 1100… ».
152 Nous ne suivons pas, sur cette question des mottes, l’exploitation qu’en fait R. Mussot-Goulard, Princes…, p. 146-147, qui est une surinterprétation manifeste.
153 J.-J. Larrea, Le Navarre du IVe au XIIe siècle. Peuplement et société, Paris-Bruxelles, 1998, part. chap 5 (Le roi et les seniores), et 9 (La crise du vieil ordre politique).
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