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Que reste-t-il de l’éducation classique ?

 | 
Jean-Marie Pailler
, 
Pascal Payen

Cinquième partie. Relectures politiques : institutions et société

La culture du prince entre historiographie et idéologie

Stéphane Ratti

Texte intégral

  • 1 Je renvoie à l’édition en deux volumes, Paris, 1981, coll. « Points Histoire ».
  • 2 P. 107-126.
  • 3 P. 112.
  • 4 P. 113.

1À lire la table des matières du volume de l’Histoire de l’éducation dans l’Antiquité consacré par H.-I. Marrou au monde romain1, il est frappant de constater que l’aspect politique et idéologique de la question éducative tient une place très limitée. Seul le chapitre 8, « L’État romain et l’éducation » aborde, et en vingt pages seulement2, les liens entre l’action impériale et l’école. À Rome l’empereur intervient peu, il est vrai, en matière d’éducation et, même si des chaires d’État officielles ont existé à Rome sous Vespasien et Marc-Aurèle3, H.-I. Marrou rappelle justement que « le Haut-Empire n’a pas connu une éducation nationale étatisée4 ».

  • 5 Cf., ici même, K. Vössing, « L’État et l’école dans l’Antiquité tardive ».

2Je voudrais montrer ici, en focalisant mon regard sur l’Antiquité tardive, que les relations entre l’État romain et la culture, entre l’idéologie et la manière dont les sources historiographiques rendent compte par exemple de la culture des Princes, sont éminemment politiques et que si l’école d’État n’existait pas5, en revanche la question de la culture des empereurs est un sujet politique et une question d’État.

PRÉAMBULE

  • 6 P. 123.
  • 7 Firmicus Maternus, Mathesis 2, 29, 19 : honores illi maximos in IX loco in domo sua pleno lumine Lu (...)
  • 8 P. 124.

3Après avoir souligné, dans son chapitre 8, le prestige de la culture classique au « Bas-Empire », H.-I. Marrou en vient à la conclusion que les rhéteurs constituent le vivier naturel dans lequel l’administration impériale vient choisir ses juges, ses chefs de bureau, ses gouverneurs de province : « L’éloquence conduit aux plus hautes charges de l’État6.» Le constat ne saurait être infirmé et de nombreux témoignages illustrent ce type d’ascension, assez fréquente pour permettre à un astrologue de prédire les plus grands honneurs à un client doté par sa naissance de la scientia litterarum7. H.-I. Marrou voit dans cet état de fait la survivance, « à six ou sept siècles de distance8 », de la tradition classique illustrée par Isocrate qui estimait que l’art oratoire apprenait non seulement à parler et à penser, mais aussi à agir. Pareille analyse, à laquelle s’arrête en fin de compte H.-I. Marrou, est singulièrement apolitique et dépourvue de dimension idéologique.

  • 9 P. 123.
  • 10 Cf. P. Dufraigne, Aurélius Victor, Livre des Césars, cuf, 1975, p. XI-XII ; Ammien 21, 10, 6 et le (...)
  • 11 L’auteur du Bréviaire est accusé d’avoir trempé dans la conspiration de Théodore, mais sa disgrâce (...)

4En réalité, Ausone et Symmaque, dont les témoignages sont convoqués par notre auteur9, n’ont pas été tenus à l’écart de la vie politique ; ils ont exercé de très hautes fonctions l’un et l’autre, comme préfet du Prétoire pour le premier et préfet de la Ville pour le second, et ont vécu dans les sphères les plus proches du pouvoir. Pour demeurer dans la deuxième moitié de ce ive siècle, que nous enseignent les cas de ces lettrés parvenus aux charges de préfet du Prétoire, comme Aurélius Victor, ou de magister memoriae, comme Eutrope et Festus ? D’abord que la compétence littéraire mène aux responsabilités, c’est indéniable, mais surtout qu’une œuvre littéraire, commanditée ou non, rédigée en tout cas dans le cadre de fonctions officielles, constitue l’efficace tremplin politique d’une carrière quand elle plaît – c’est le cas pour Aurélius Victor, nommé gouverneur de Pannonie seconde par Julien, puis destitué sous Valens10) ou représente un risque grave de disgrâce si elle déplaît – ce qui est peut-être le cas d’Eutrope11.

  • 12 Cf. M.-P. Arnaud-Lindet, Liber memorialis, cuf, 1993, p. XX-XXII.
  • 13 Cf. St. Ratti, Les empereurs romains d’Auguste à Dioclétien dans le Bréviaire d’Eutrope, Besançon-P (...)
  • 14 Cf. H. W. Bird, « Eutropius and Festus : Some Reflections on the Empire and Imperial Policy in A. D (...)
  • 15 Cf. M. Festy, Pseudo-Aurélius Victor, Abrégé des Césars, cuf, 1999, p. LIII-LV.

5Car un aide-mémoire comme celui d’Ampélius (le Liber memorialis, peut-être écrit à la fin du règne de Marc Aurèle pour l’éducation du futur empereur Macrin12), un breuiarium d’histoire romaine, un recueil De Viris illustribus, un Epitome de Caesaribus, s’ils sont œuvres de lettrés, sont aussi des instruments d’éducation : destinés au public ou, pour les deux premiers, au Prince, ils cherchent à transmettre une vision personnelle de l’histoire romaine et ont leur définition propre du modèle idéal de gouvernement ou une image qui leur appartient de ce que doit être un empereur parfait. Eutrope en vantant Auguste ou Trajan cherche à corriger le comportement de Valens ; en faisant l’historique des guerres d’Arménie13 ou des conflits parthiques14 il encourage le dédicataire du Bréviaire à reprendre les armes contre ces peuples ; l’Epitome de Caesaribus en résumant peut-être les Annales de Nicomaque Flavien cherche à réhabiliter la mémoire d’un des derniers païens militants15. C’est cette dimension partiale et fondamentalement idéologique des compendia historiographiques de l’époque tardive qui est passée sous silence par H.-I. Marrou.

  • 16 De la connaissance historique, 1981 (1954), coll. « Points Histoire », p. 120.

6L’auteur des passionnantes réflexions sur « la connaissance historique » savait parfaitement qu’on ne peut prêter à un historiographe latin une confiance totale et que toute œuvre renseignait plus sur les intentions de son auteur que sur la période historique traitée16. Il n’empêche que l’Histoire de l’éducation me semble faire l’impasse sur la dimension idéologique de certaines sources utilisées, par exemple l’Histoire Auguste, sur laquelle je m’attarderai dans un instant.

  • 17 A Conflict of Ideas in the Late Roman Empire. The Clash between the Senate and Valentinian I, Oxfor (...)
  • 18 « Valentinien Ier, le dernier des grands Pannoniens », Revue d’Histoire Comparée 3, 1946.
  • 19 P. 212, n. 17.

7Une explication pourrait être avancée. Au moment même où Marrou travaillait à l’Histoire de l’éducation, paraissaient les réflexions d’A. Alföldi sur les conflits idéologiques et culturels qui ont marqué les règnes de Valens et Valentinien. Une ébauche du livre à venir17 a été publiée dans un article de la Revue d’Histoire comparée en 194618, texte dont H.-I. Marrou a eu connaissance et qu’il cite à propos de l’« intérêt croissant porté par les empereurs du Bas-Empire aux choses de l’éducation19 ». Les réflexions d’A. Alföldi ont cette attention aux silences et aux partis pris aristocratiques de sources qui tendent aux Princes au pouvoir le miroir idéalisé de la Rome des temps anciens, lorsque le Sénat jouait pleinement son rôle et que la culture était vivante. Marrou a-t-il fait l’impasse sur ce que son contemporain avait avant lui mis en lumière ?

  • 20 Histoire de l’éducation, p. 63 : « Les trois chapitres qui vont suivre sont, en un sens, presque in (...)
  • 21 A. Momigliano, « Les historiens du monde classique et leurs publics : quelques suggestions », dans (...)

8Une raison plus sûre de cette mise entre parenthèses de l’idéologie me paraît résider dans l’idée simple qui guide Marrou dans la rédaction du volume consacré au monde latin. L’éducation à Rome n’est que la reproduction, avec des adaptations mineures, du modèle grec20. Tout est dit dans le volume consacré à la Grèce et le reste n’est que redite ou héritage de Platon et d’Isocrate. Or, pour en revenir à l’Empire romain et aux relations entre historiographie, culture, éducation et pouvoir, une différence fondamentale existe entre la Grèce et Rome. Le lien entre le pouvoir et l’historiographie n’a jamais été aussi fort que sous l’Empire romain21. Depuis Auguste il n’y a plus d’historiographie sans idéologie, et, si en Grèce on pouvait écrire l’histoire loin de sa patrie, dans cette espèce de liberté que procurait l’exil, en revanche, à Rome, on écrit l’histoire au service du pouvoir la plupart du temps ou, plus rarement, pour discrètement non pas s’y opposer (ces œuvres-là ont disparu dans les tourbillons de la damnatio memoriae), mais tenter de l’infléchir.

L’HISTOIRE AUGUSTE DANS L’HISTOIRE DE L’ÉDUCATION

  • 22 P. 172-173.
  • 23 A. Alföldi, A Festival of Isis in Rome under the Christian Emperors of the IVth Century, Budapest, (...)
  • 24 W. Hartke, Geschichte und Politik im spätantiken Rom, Leipzig, 1940 ; cf. A. Chastagnol, Histoire A (...)
  • 25 Histoire de l’éducation, p. 117 : « […] le témoignage, toujours suspect d’anachronismes, des auteur (...)

9Les sources tardives sont assez souvent utilisées par H.-I. Marrou dans le volume sur Rome, des panégyriques du ive siècle jusqu’à Ennode ou Cassiodore dans l’« Épilogue22 ». Il m’a paru intéressant de recenser et d’analyser les références à l’Histoire Auguste dans l’Histoire de l’Éducation parce qu’on dispose là d’une espèce de cas limite ou de cas d’école. En 1948, la date de rédaction de l’Histoire Auguste, qui est aujourd’hui à peu près unanimement reconnue par les spécialistes, avait déjà été pressentie par A. Alföldi23 et W. Hartke24 qui plaçaient le recueil entre 394 (bataille du Frigidus) et 398. H.-I. Marrou n’ignorait donc pas que le biographe était un faussaire et que ses informations devaient être prises avec précaution par les historiens25.

10L’Histoire Auguste est citée, sauf erreur, vingt fois par H.-I. Marrou : p. 37 : Histoire Auguste, Hadr. 14, 9 ; Heliog. 32, 8 ; Alex. 27, 7 et 9 ; Hadr. 14, 8 ; Aur. 4, 9 ; Alex. 27, 7

p. 55 : Aur. 2, 2-4 ; Ver. 2, 5

p. 63 : Aur. 2, 2-4 ; Ver. 2, 5

p. 64 : Aur. 2, 2

p. 72 : Hadr. 18, 9 (et non 18, 11)

p. 85 (n. 33) : Hadr. 14, 8 ; Alex. 27, 7

p. 107 : Aur. 6, 3

p. 108 et p. 109 : Gord. 4, 6

p. 114 : Hadr. 16, 10-11

p. 117 : Pius 11, 3 ; Alex. 44, 4-5.

11C’est la Vie d’Hadrien et celle de Marc Aurèle qui arrivent en tête avec cinq citations chacune, puis la Vie d’Alexandre Sévère avec quatre citations, soit près de la moitié du total pour ces deux seules Vies. Ce n’est pas sans signification : l’historien a puisé dans les « Vies Principales », celles dont l’information est généralement considérée comme la plus digne de foi. Une seule référence est faite à une « Vie Secondaire », celle des Gordiens, à deux reprises.

  • 26 P. 37.

12Sur ces vingt références, six sont réunies p. 37, dans un chapitre consacré à « l’éducation grecque à Rome », plus précisément à son « adaptation à l’esprit latin ». L’auteur cherche à définir la place faite à la musique et aux arts plastiques dans l’éducation de l’empereur romain et se tourne pour ce faire vers les biographies impériales, les Douze Césars de Suétone et l’Histoire Auguste. H.-I. Marrou a alors cet aveu central pour nous : « Il n’importe pas à notre propos de classer et de critiquer ces témoignages, de valeur bien diverse : il me suffit de constater qu’ils attestent qu’aux ier-iie siècles de notre ère, comme aux ive-ve, l’art fait toujours partie de l’idée qu’on se fait de l’éducation d’un empereur et l’empereur, on le sait, définit le type idéal de l’humanité26

13Je crois qu’au contraire il importe de classer et de critiquer des témoignages tirés d’une œuvre aussi partiale et orientée que l’Histoire Auguste. Il est vrai que même si l’on sait depuis le xixe siècle et H. Dessau que l’auteur anonyme de la collection ment, déforme et livre des informations fausses, la méfiance nécessaire à l’égard de son témoignage n’est pas aujourd’hui toujours suffisamment pratiquée. On me permettra d’adopter cette position critique, enseignée par une expérience d’édition pour la cuf des Vies de Valérien et de Gallien.

  • 27 Fronton p. 215, 2 van den Hout ; Athénée 8, 361 ; Epitome 14, 2.

14H.-I. Marrou cite Hadr. 14, 9 pour prouver que la musique et le chant font partie intégrante de la culture nécessaire du Prince. Le fait est historique puisqu’il est confirmé par Fronton, Athénée et l’Epitome de Caesaribus27. Mais la nuance, de taille, qu’il convient d’apporter est contenue dans la passage même de la Vie d’Alexandre Sévère mentionné sans être cité par Marrou : cantauit nobiliter sed numquam alio conscio nisi pueris suis testibus (« il chantait de façon remarquable mais jamais en présence d’autres témoins que ses esclaves »). La pratique du chant ne déshonore pas son auteur si elle demeure confidentielle et surtout si elle ne sort pas de la sphère du privé.

  • 28 Suétone, Ner. 41, 4 ; cf. le commentaire de R. Turcan, Histoire Auguste, Vies de Macrin, Diaduménie (...)
  • 29 Heliog. 32, 7 : ridebat autem sic nonnumquam ut publice in theatro solus audiretur.

15Ainsi la référence faite par H.-I. Marrou à Héliogabale, mise sur le même plan que la précédente à Alexandre Sévère, prend en réalité une signification diamétralement opposée car elle vise à déconsidérer un empereur honni : ipse cantauit, saltauit, ad tibias dixit, tuba cecinit, pandurizauit, organo modulatus est (Heliog. 32, 8 : « On le vit personnellement chanter, danser, déclamer au son des flûtes, jouer de la trompette, de la pandore et faire des variations sur l’orgue hydraulique. ») Ce rappel figure dans un long développement consacré aux turpitudes nombreuses d’un Prince émule de Néron (lui-même amateur d’orgue hydraulique28), débauché (luxuriosus) et vicieux (libidinosus). La typologie des comportements est assez bien fixée dans l’Histoire Auguste pour que le goût d’Héliogabale pour la musique le discrédite absolument car c’est une preuve de sa libido ; son exhibitionnisme, qui le conduisait à se singulariser en public29, en est une de son absence de moderatio. Héliogabale, dans la lignée de Néron, préfigure Gallien.

  • 30 Praef. 1.

16En réalité, la fonction impériale exclut totalement de se livrer publiquement à des manifestations de frivolité, et ce qui était permis à l’empereur alors qu’il était simple priuatus ne l’est plus lorsqu’il a accédé au trône. L’exemple d’Alexandre Sévère, optimus princeps, est sans équivoque à cet égard : lyra, tibia, organo cecinit, tuba etiam, quod quidem imperator numquam ostendit (« il jouait de la lyre, de la flûte, de l’orgue et même de la trompette, mais il n’en fit jamais montre une fois devenu empereur »). Le verbe ostendit est clair : la grauitas de la fonction impériale interdit toute pratique des arts musicaux jugés, au moins depuis Cornelius Nepos30, leues.

  • 31 Cf. l’Introduction de mon édition des Vies des deux Valériens et des deux Galliens, Histoire August (...)
  • 32 Gall. 11, 5-9 : Aeropagitorum praeterea cupiebat ingeri numero contempta prope re p. Fuit enim Gall (...)
  • 33 Gall. 11, 9.

17On trouvera la meilleure des confirmations du fait dans la Vie de Gallien. Dans un passage tiré probablement de sa source grecque31, le biographe se livre à une récusation en règle des mérites de Gallien qu’il ne peut, de ce fait même, complètement occulter : l’empereur s’intéresse de près à la vie politique et culturelle grecque, au point d’avoir été archonte et de souhaiter faire partie de l’Aréopage, au point encore d’avoir remporté sur cent autres concurrents un concours poétique grâce à un épithalame de sa composition32. Mais l’Histoire Auguste, qui déteste Gallien, est contrainte de préciser que ce dernier, tout cultivé qu’il était, ne méritait pas de régner. L’auteur doit récuser sa source en même temps qu’une espèce de vulgate (je reviens sur ce point plus bas) qui voulait que la culture littéraire légitime l’accès au pouvoir, et il le fait en des termes sans ambiguïté : Sed aliud in imperatore quaeritur, aliud in oratore uel poeta flagitatur33. (« Mais on requiert d’autres qualités chez un empereur, on demande autre chose à un orateur ou à un poète. »)

18La problématique est ici double : quelle place fallait-il faire, dans l’éducation du Prince, au modèle grec ? de quelle façon les sources historiographiques du ive siècle rendent-elles compte de la culture des Princes ?

  • 34 P. 55-56.
  • 35 « Les personnages nommément cités par la Vita Veri de l’Histoire Auguste », Historiae Augustae Coll (...)
  • 36 Ibid., p. 187.

19Marrou a fait preuve d’un jugement sûr sur les Vies de Marc Aurèle et Vérus lorsqu’il voit en elles des sources fiables à propos de l’éducation grecque et latine des deux Princes : « L’Histoire Auguste nous montre Marc Aurèle ou Lucius Vérus étudiant, sous des maîtres distincts, grammaire et éloquence à la fois en latin et en grec : pour une fois, on peut accepter son témoignage, puisque nous savons par ailleurs qu’ils ont bien, en effet, étudié la rhétorique à la fois sous Fronton et Hérode l’Athénien34. » En dehors d’Eutyclius Proculus de Sicca, tous les maîtres cités en Aur. 2, 2-4 et Ver. 2, 5 sont connus par d’autres sources et la qualité des renseignements fournis par la Vita Veri en ce passage a été confirmée par H.-G. Pflaum35, tout près de suivre T. D. Barnes pour placer cette Vie parmi les « Hauptvitae » et non les « Nebenvitae » de peu d’aloi36.

  • 37 Aur. 2, 2 : usus est […] musico Androne eodemque geometra.
  • 38 . Cf. Histoire de l’éducation, p. 56 : « L’évolution a dû se précipiter au iiie siècle, et surtout (...)

20Oui, l’éducation princière place l’héritage grec au cœur de son programme, mais il s’agit de rhétorique et de philosophie, de géométrie aussi, mais à peine de musique, considérée comme directement apparentée à la géométrie puisque le même professeur enseigne ces deux disciplines sœurs des mathématiques37. Non, l’exemple de ses illustres devanciers, Marc Aurèle et Lucius Vérus, ne cautionne pas les goûts dépravés d’un Gallien, dont la brillante rhétorique et la facilité pour les vers ne peut en aucun cas venir légitimer le règne. L’Histoire Auguste joue sur les nuances (la distinction public/privé par exemple) et surtout subordonne la signification de son information à ses a priori idéologiques. H.-I. Marrou savait parfaitement que le règne de Gallien, au cœur de ce iiie siècle en crise, constituait un tournant38, mais il n’a pas voulu aborder la question de la partialité de l’Histoire Auguste, car sa préoccupation première était de définir la place de la culture grecque sous l’Empire romain et non de s’interroger sur ce que valait cette culture aux yeux d’un membre des cercles païens traditionalistes de la fin du ive siècle.

CULTURE DU PRINCE, IDÉOLOGIE ET QUELLENFORSCHUNG

  • 39 De Caesaribus 8, 8.
  • 40 De Caesaribus 8, 7 : hi omnes, quos paucis attigi, praecipueque Caesarum gens, adeo litteris culti (...)
  • 41 De Caesaribus 8, 8 : quis rebus quamquam satis constet praestare mores, tamen bono cuique, praesert (...)

21Sous l’Empire, la culture du Prince, fruit de son éducation, légitime son accès au pouvoir. Ce principe a été énoncé en termes plus politiques par Aurélius Victor, qui se piquait d’être aussi un moraliste. Le savoir confère l’autorité, telle est la leçon adressée au chef suprême, summus rector : satis auctoritatis sumat eruditione39. La culture des Julio-Claudiens, leurs talents oratoires, auraient pu faire oublier leurs défauts s’ils n’avaient été aussi graves40 et, dans le meilleur des cas, les qualités naturelles s’allient aux apports de l’éducation41.

  • 42 E. g. Le Monde du 25 juillet 1999.

22De nos jours encore, ce principe semble reconnu dans certaines circonstances. À la mort du roi du Maroc, Hassan II, en juillet 1999, la presse unanime42 faisait état des brillantes études du nouveau roi, Mohammed VI, auteur d’une thèse de droit à Nice, pour montrer en lui un héritier légitime du pouvoir.

23Au vie siècle, les adversaires du roi Théodoric mettaient en avant son pseudo-illettrisme pour tenter de discréditer la monarchie goth.

  • 43 À deux reprises, 61 : dum inlitteratus esset … et 79 : igitur rex Theodoricus inlitteratus erat et (...)
  • 44 Histoire du Bas-Empire, Paris-Bruxelles-Amsterdam, 1949, vol. II, p. 791-792.
  • 45 Éducation et culture dans l’Occident barbare, vie-viiie siècle, Paris, 1962, p. 96-97 avec la bibli (...)

24L’accusation, dont on a la trace dans les Excerpta Valesiana43, avait été si habilement insinuée dans les esprits que des historiens modernes s’y sont laissé prendre. Comment accepter que l’Italie fût placée sous la direction d’un barbare ignorant ? L. Schmidt, puis E. Stein44 et P. Riché45 ont fait justice de cette calomnie, mais l’anecdote révèle combien le point de l’éducation du Prince est un sujet sensible.

  • 46 J.-P. Callu, « En amont… » (n. 10), p. 107.

25Dans la seconde moitié du ive siècle, la culture du Prince devient ainsi un objet de polémique entre des sources historiographiques qui se recopient mutuellement tout en se répondant les unes aux autres, bref des sources qui sont « interactives46 ».

  • 47 De Caesaribus 42, 23 : litterarum ad elegantiam prudens.
  • 48 Ibid : atque orandi genere leni iocondoque. La correction ornandi proposée par M. Festy, Abrégé des (...)
  • 49 Epitome 42, 18 : facundiae cupidus, quam cum assequi tarditate ingenii non posset, aliis inuidebat.
  • 50 Ammien 21, 16, 4 : doctrinarum diligens adfectator, sed cum a rhetorice per ingenium desereretur ob (...)

26Dans le cas de Constance II, par exemple, on assiste à un clivage des sources très net. Pour Aurélius Victor, son contemporain, le Prince était un lettré47 et un homme plutôt éloquent48. En revanche, pour l’Epitome de Caesaribus, Constance II nourrit des ambitions sans commune mesure avec ses capacités intellectuelles réelles49 marquées par sa lenteur d’esprit, sa balourdise, tarditas. Ammien Marcellin émet un jugement encore plus sévère et dénonce le caractère fallacieux de l’amour de Constance pour les lettres : l’empereur n’est qu’un fat, un prétentieux, adfectator doctrinarum50. L’explication de cette opposition entre les sources tient aux préférences politiques des historiographes. Aurélius Victor publie le De Caesaribus du vivant de Constance II, tandis que l’Epitome et Ammien ont fait de Julien un modèle indépassable de culture et, pour Ammien en particulier, de gouvernement. Les talents littéraires et la culture de Constance constituent un enjeu idéologique, et les sources cristallisent leur vision personnelle de l’histoire et des gouvernants autour de cet enjeu.

  • 51 Eutrope 10, 17, 1 : uno a Persis atque altero proelio uictus pacem cum Sapore, necessariam quidem, (...)
  • 52 Ammien 25, 9, 8-9.
  • 53 Ammien 25, 10, 14-17 et le commentaire de J. Fontaine, Ammien Marcellin, Histoire, Livres XXIII-XXV (...)

27Il est possible d’aller encore plus loin et de mêler les acquis de la Quellenforschung à notre réflexion présente sur les enjeux idéologiques du débat sur la culture. Prenons le cas de l’empereur Jovien, successeur de Julien. Les historiographes latins de la fin du ive siècle n’apprécient guère ce Prince au règne relativement éphémère qui dut, après la défaite de Julien contre les Perses, en 364, restituer d’importants territoires aux vainqueurs. C’est le cas d’Eutrope qui rappelle que la paix infamante signée par Jovien n’eut pas de précédent51, ou encore d’Ammien Marcellin52. Ce dernier dresse de Jovien le portrait le moins avantageux que l’on possède du Prince, pâle émule de Constance II, le prédécesseur de Julien. Ammien n’a aucune sympathie pour Constance et, par delà Julien, le héros que ses qualités mettent au-dessus de son devancier comme de son successeur, la comparaison implicite avec Constance dessert encore davantage Jovien53.

  • 54 Ammien 25, 10, 15.
  • 55 10, 18, 2.
  • 56 Cf. le même sens de ciuilitas chez Ennode, dans le panégyrique de Théodoric, paneg. p. 264, 13 Hart (...)
  • 57 13, 14, 20 : « non sans expérience des lettres » (p. 218, 16 Dindorf).
  • 58 44, 3 : litterarum studiosus ; cf. le commentaire de M. Festy (n. 15), p. 214.

28Ammien dit ainsi de Jovien qu’il est mediocriter eruditus54,« d’une culture moyenne ». Mais Eutrope, peu suspect de sympathie pour Jovien, le juge ciuilitati proprior55, ce que l’on peut comprendre par « plutôt porté à la culture56 ». Le goût de Jovien pour les belles lettres est attesté par Zonaras57 et, dans le domaine latin, par l’Epitome de Caesaribus58.

  • 59 M. Festy, Abrégé des Césars (n. 15), p. XV-XX ; cf. le compte rendu que j’ai donné de cet ouvrage d (...)

29La tonalité d’ensemble de la notice de l’Epitome est relativement favorable à Jovien, bien davantage que les pages correspondantes chez Ammien, dont l’objectif est avant tout de faire l’apologie de Julien. Une hypothèse, à mes yeux très solide, a été émise par M. Festy dans sa récente édition de l’Epitome dans la cuf : la tradition favorable à Jovien que l’on décèle dans le chapitre 44 remonterait à Nicomaque Flavien, source essentielle de l’anonyme depuis au moins le règne de Sévère Alexandre (222-235)59.

  • 60 Cf. St. Ratti, Les empereurs… (n. 13), p. 75-84.
  • 61 Cf. St. Ratti, « Jérôme et Nicomaque Flavien : sur les sources de la Chronique pour les années 357- (...)

30Il y a de même chez Eutrope, dans le chapitre 17 du livre 10, des traces très nettes d’éléments favorables à Jovien. Outre la mention faite de la ciuilitas du Prince, dont on sait que c’est un élément décisif de distinction des bons empereurs60, Eutrope rappelle sa liberalitas et ajoute encore : uir alias neque iners neque inprudens (10, 17, 3 : « C’était un homme qui ne manquait d’ailleurs ni de vigueur ni de prudence »). L’adverbe alias indique clairement que l’auteur du Bréviaire fait la part des choses entre d’une part son jugement personnel sur un Prince dont il condamne l’attitude lâche dans la défaite et à qui il ne pardonne pas l’infamie liée aux abandons de territoire consécutifs à une expédition à laquelle il a personnellement participé et d’autre part les informations dont fait état une source qu’il avait probablement lui-même utilisée dans son récit de la période 357-364, à savoir les Annales de Nicomaque Flavien61.

  • 62 Sur le légitimisme de Nicomaque Flavien à l’égard de la dynastie constantinienne, cf. J.-P. Callu, (...)
  • 63 Cf. A. Piganiol, L’Empire chrétien, Paris, 1972, p. 165-166.
  • 64 Sur la politique religieuse de Jovien, cf. R. Soraci, L’imperatore Gioviano, Catania, 1968, p. 61-8 (...)
  • 65 Panégyrique 12, cité par A. Piganiol, L’Empire chrétien (n. 53), p. 165.

31Il resterait à se demander pourquoi le champion du paganisme, Nicomaque Flavien, avait présenté Jovien sous un jour plutôt favorable. Ce n’est pas le lieu d’approfondir ici une question sur laquelle je me propose de revenir ailleurs. Disons simplement que l’hypothèse du légitimisme affiché par les Annales de Nicomaque Flavien à l’égard de la dynastie constantinienne prend de plus en plus de poids, surtout dans l’hypothèse d’une édition des Annales avant 38362. Jovien cherchait à passer pour un nouveau Constantin63, et, s’il n’a aucun lien de parenté avec lui, il renoue cependant avec sa politique de tolérance religieuse64. Les païens ont apprécié et Thémistius, dans son Panégyrique de 364, fait l’éloge de cette tolérance65. Peut-être est-ce cet aspect des choses qui aura séduit l’auteur des Annales qui se serait dès lors appliqué à dresser un portrait aussi nuancé de Jovien qu’Ammien l’avait caricaturé au noir pour faire, par contrecoup, ressortir les mérites de Julien.

32On le voit, la simple mention de la culture du Prince, ou au contraire sa négation, conduit très loin l’interprétation. J’ai voulu montrer, à travers les exemples de Constance et de Jovien, que les sources historiographiques tardives, dont les interconnexions sont de mieux en mieux connues grâce à la Quellenforschung, font de la culture du Prince un enjeu idéologique dont l’interprétation impose de ne jamais extraire leur témoignage du contexte politique dans lequel elles ont été composées.

Notes

1 Je renvoie à l’édition en deux volumes, Paris, 1981, coll. « Points Histoire ».

2 P. 107-126.

3 P. 112.

4 P. 113.

5 Cf., ici même, K. Vössing, « L’État et l’école dans l’Antiquité tardive ».

6 P. 123.

7 Firmicus Maternus, Mathesis 2, 29, 19 : honores illi maximos in IX loco in domo sua pleno lumine Luna constituta decreuit, praesertim quia in nocturna genitura conditionis suae secuta potestatem in decernendis honoribus habuit principatum ; doctrinam etiam et tantam litterarum scientiam inmutatis domibus Saturnus Mercuriusque decreuerunt ut oratio eius ac stilus ueteribus auctoribus conferatur. « La Lune, pleine, installée dans le neuvième lieu, dans sa propre maison, lui a décerné les plus grands honneurs : d’autant que, s’agissant d’une géniture nocturne, elle appliquait un pouvoir de droit et avait la priorité pour décider des honneurs ; en outre, Saturne et Mercure, après avoir échangé leurs maisons, lui ont accordé une si grande science et une si grande connaissance des lettres que son éloquence et son style peuvent se comparer à ceux des auteurs anciens », (trad. P. Monat, cuf, 1992).

8 P. 124.

9 P. 123.

10 Cf. P. Dufraigne, Aurélius Victor, Livre des Césars, cuf, 1975, p. XI-XII ; Ammien 21, 10, 6 et le commentaire de J. Fontaine, cuf, p. 227 ; J.-P. Callu, « En amont de l’Histoire Auguste », 357-387 (Notes sur quelques réflexes politico-culturels de la génération de Symmaque), Historiae Augustae Colloquium Genevense, Bari, 1999, p. 87-107, ici p. 91.

11 L’auteur du Bréviaire est accusé d’avoir trempé dans la conspiration de Théodore, mais sa disgrâce sous Valens peut aussi être la conséquence d’une vision trop flatteuse du règne de Julien : cf. St. Ratti, « La ciuilitas et la iustitia dans le Bréviaire d’Eutrope : des qualités de famille ? », Revue des Études Anciennes 98 (1-2), 1996, p. 197-205, ici p. 201, n. 52.

12 Cf. M.-P. Arnaud-Lindet, Liber memorialis, cuf, 1993, p. XX-XXII.

13 Cf. St. Ratti, Les empereurs romains d’Auguste à Dioclétien dans le Bréviaire d’Eutrope, Besançon-Paris, 1996, p. 247-248.

14 Cf. H. W. Bird, « Eutropius and Festus : Some Reflections on the Empire and Imperial Policy in A. D. 369-370 », Florilegium 8, 1986, p. 11-22 ; St. Ratti, Les empereurs… (n. 13), p. 168.

15 Cf. M. Festy, Pseudo-Aurélius Victor, Abrégé des Césars, cuf, 1999, p. LIII-LV.

16 De la connaissance historique, 1981 (1954), coll. « Points Histoire », p. 120.

17 A Conflict of Ideas in the Late Roman Empire. The Clash between the Senate and Valentinian I, Oxford, 1952.

18 « Valentinien Ier, le dernier des grands Pannoniens », Revue d’Histoire Comparée 3, 1946.

19 P. 212, n. 17.

20 Histoire de l’éducation, p. 63 : « Les trois chapitres qui vont suivre sont, en un sens, presque inutiles : les écoles romaines, qu’il s’agisse de leur cadre, de leur programme, de leurs méthodes, ne font qu’imiter les écoles hellénistiques ; l’adaptation au milieu linguistique latin n’entraîne pas de modifications profondes dans la pédagogie : le lecteur s’étonnera certainement du caractère littéral de cette transposition, un transfert pur et simple beaucoup plus qu’une imitation. »

21 A. Momigliano, « Les historiens du monde classique et leurs publics : quelques suggestions », dans Problèmes d’historiographie ancienne et moderne, Paris, 1983, p. 53-70, ici p. 64.

22 P. 172-173.

23 A. Alföldi, A Festival of Isis in Rome under the Christian Emperors of the IVth Century, Budapest, 1937, p. 45-46.

24 W. Hartke, Geschichte und Politik im spätantiken Rom, Leipzig, 1940 ; cf. A. Chastagnol, Histoire Auguste, Les empereurs romains des iie et iiie siècles, Paris, Bouquins, 1994, p. XXIX.

25 Histoire de l’éducation, p. 117 : « […] le témoignage, toujours suspect d’anachronismes, des auteurs de l’Histoire Auguste… »

26 P. 37.

27 Fronton p. 215, 2 van den Hout ; Athénée 8, 361 ; Epitome 14, 2.

28 Suétone, Ner. 41, 4 ; cf. le commentaire de R. Turcan, Histoire Auguste, Vies de Macrin, Diaduménien, Héliogabale, cuf, 1993, p. 228-229.

29 Heliog. 32, 7 : ridebat autem sic nonnumquam ut publice in theatro solus audiretur.

30 Praef. 1.

31 Cf. l’Introduction de mon édition des Vies des deux Valériens et des deux Galliens, Histoire Auguste IV 2, cuf, 2000.

32 Gall. 11, 5-9 : Aeropagitorum praeterea cupiebat ingeri numero contempta prope re p. Fuit enim Gallienus, quod negari non potest, oratione, poemate atque omnibus artibus clarus. Huius illud est epithalamion quod inter centum poetas praecipuum fuit. Nam cum fratrum suorum filios iungeret <et> omnes poetae Graeci Latinique epithalamia dixissent, idque per dies plurimos, ille, cum manus sponsorum teneret, ut quidam dicunt, saepius ita dixisse fertur :
« Ite, agite, o pueri, pariter sudate medullis
omnibus inter uos, non murmura uestra columbae,
brachia non hederae, non uincant oscula conchae. »
Longum est eius uersus orationesque conectere quibus suo tempore tam inter poetas quam inter rhetores emicuit. « Gallien s’illustra de fait, on ne peut le nier, par son éloquence, sa poésie et tous les arts. De lui est l’épithalame suivant qui se distingua parmi cent autres poètes. En effet, comme il mariait les fils de ses frères et que tous les poètes grecs et latins avaient récité des épithalames, et ce pendant bon nombre de jours, lui, tenant les mains des fiancés, à ce que certains rapportent, répéta, dit-on, à plusieurs reprises les mots que voici :
“Allez, ouste les enfants, à l’unisson transpirez,
entre vous de toute votre moelle ;
aux colombes d’être vaincues par vos soupirs,
aux lierres par vos étreintes,
aux coquilles par vos baisers !”
Il serait trop long de rassembler ses vers et ses discours, grâce auxquels il brilla à son époque tant parmi les poètes que parmi les rhéteurs ».

33 Gall. 11, 9.

34 P. 55-56.

35 « Les personnages nommément cités par la Vita Veri de l’Histoire Auguste », Historiae Augustae Colloquium 1972-1974, Bonn, 1976, p. 174-178.

36 Ibid., p. 187.

37 Aur. 2, 2 : usus est […] musico Androne eodemque geometra.

38 . Cf. Histoire de l’éducation, p. 56 : « L’évolution a dû se précipiter au iiie siècle, et surtout dans la terrible crise qui ébranle le monde romain à partir de 235. Elle se trouve, je l’ai dit, pratiquement accomplie au siècle suivant ».

39 De Caesaribus 8, 8.

40 De Caesaribus 8, 7 : hi omnes, quos paucis attigi, praecipueque Caesarum gens, adeo litteris culti atque eloquentia fuere, ut, ni cunctis uitiis absque Augusto nimii forent, tantae artes profecto texissent modica flagitia.

41 De Caesaribus 8, 8 : quis rebus quamquam satis constet praestare mores, tamen bono cuique, praesertim summo rectori, utroque, si queat, iuxta opus : sin aliter, uitae proposito immensum progrediente, elegantiae satis atque auctoritate sumat eruditione.

42 E. g. Le Monde du 25 juillet 1999.

43 À deux reprises, 61 : dum inlitteratus esset … et 79 : igitur rex Theodoricus inlitteratus erat et sic obruto sensu ut in decem annos regni sui quattuor litteras subscriptionis edicti sui discere nullatenus potuisset.

44 Histoire du Bas-Empire, Paris-Bruxelles-Amsterdam, 1949, vol. II, p. 791-792.

45 Éducation et culture dans l’Occident barbare, vie-viiie siècle, Paris, 1962, p. 96-97 avec la bibliographie n. 36.

46 J.-P. Callu, « En amont… » (n. 10), p. 107.

47 De Caesaribus 42, 23 : litterarum ad elegantiam prudens.

48 Ibid : atque orandi genere leni iocondoque. La correction ornandi proposée par M. Festy, Abrégé des Césars (n. 15), p. 208, n. 27, renforce encore le texte. Voir les réflexions de M. Festy dans la même note.

49 Epitome 42, 18 : facundiae cupidus, quam cum assequi tarditate ingenii non posset, aliis inuidebat.

50 Ammien 21, 16, 4 : doctrinarum diligens adfectator, sed cum a rhetorice per ingenium desereretur obtunsum, ad uersificandum transgressus, nihil operae pretium fecit.

51 Eutrope 10, 17, 1 : uno a Persis atque altero proelio uictus pacem cum Sapore, necessariam quidem, sed ignobilem fecit, multatus finibus ac nonnulla imperii Romani parte tradita.

52 Ammien 25, 9, 8-9.

53 Ammien 25, 10, 14-17 et le commentaire de J. Fontaine, Ammien Marcellin, Histoire, Livres XXIII-XXV, Commentaire, CUF, 1977, n. 727, p. 287.

54 Ammien 25, 10, 15.

55 10, 18, 2.

56 Cf. le même sens de ciuilitas chez Ennode, dans le panégyrique de Théodoric, paneg. p. 264, 13 Hartel : educauit te in gremio ciuilitatis Graecia praesaga uenturi.

57 13, 14, 20 : « non sans expérience des lettres » (p. 218, 16 Dindorf).

58 44, 3 : litterarum studiosus ; cf. le commentaire de M. Festy (n. 15), p. 214.

59 M. Festy, Abrégé des Césars (n. 15), p. XV-XX ; cf. le compte rendu que j’ai donné de cet ouvrage dans Antiquité Tardive 7, 1999.

60 Cf. St. Ratti, Les empereurs… (n. 13), p. 75-84.

61 Cf. St. Ratti, « Jérôme et Nicomaque Flavien : sur les sources de la Chronique pour les années 357-364 », Historia 46 (4), 1997, p. 479-508. En outre, Eutrope est tenu par le fait que l’apothéose de Jovien a été décidée par Valentinien et Valens – le commanditaire du Bréviaire – dont l’abréviateur doit nécessairement louer la benignitas (10, 18, 2).

62 Sur le légitimisme de Nicomaque Flavien à l’égard de la dynastie constantinienne, cf. J.-P. Callu, « En amont… » (n. 10), p. 96 ; St. Ratti, « Sur la source du récit de la mort de Gallien dans l’Histoire Auguste (Gall. 14, 1-11) », Historiae Augustae Colloquium Genevense, éd. F. Paschoud, Bari, 1999, p. 259-276, ici p. 275.

63 Cf. A. Piganiol, L’Empire chrétien, Paris, 1972, p. 165-166.

64 Sur la politique religieuse de Jovien, cf. R. Soraci, L’imperatore Gioviano, Catania, 1968, p. 61-80 ; A. Piganiol, L’Empire chrétien (n. 53), p. 165. Socrate, HE 3, 25, 4, p. 225, 24-25 Hansen cite les paroles de Jovien affirmant détester les conflits et préférer la concorde, la paix religieuse, passage que Cassiodore, HE 7, 4, 5, traduit ainsi : ego contentiones odii ; eos autem qui ad concordiam festinant diligo pariter et honoro (p. 388, 18 Hanslik-Jacob).

65 Panégyrique 12, cité par A. Piganiol, L’Empire chrétien (n. 53), p. 165.

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