Chapitre 6. Les gangs et les guêpes

Marcus Felson

doi:10.4000/books.pum.5090

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Chapitre 6. Les gangs et les guêpes

Marcus Felson

p. 115-134

Extrait

1Dans l’imaginaire collectif, un gang de rue formé de jeunes est un groupe de petites brutes rebelles qui se serrent les coudes1. En 1980, le professeur Walter B. Miller a formulé une définition plus pointue d’un gang :

Un gang est une association librement constituée de pairs qui ont des intérêts communs, qui a un leadership clair, des liaisons hiérarchiques bien définies et d’autres caractéristiques organisationnelles, et ses membres agissent de concert pour atteindre un ou des buts précis qui impliquent habituellement des activités illégales et le contrôle d’un territoire, d’un lieu ou d’un type d’entreprise. (Miller, 1980, p. 12)

2Nous sommes en désaccord avec son idée qui tient en 59 mots. Ainsi décrit, on croit qu’un gang est très bien organisé, en dépit du jeune âge de ses membres. C’est souvent la vision qu’en ont les résidents du quartier où il sévit, les policiers et la population générale. Pour comprendre ce que sont les gangs, il faut éviter de les diaboliser ou de l

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1 Ce chapitre est une adaptation française du chapitre 20 de Marcus Felson (2006), Crime and Nature, Sage Publications.

2 Les jeunes sont plus souvent la cible de crimes, si bien que leur sécurité n’est jamais assurée, même hors des quartiers les plus dangereux, ce qui étend l’aire des activités des gangs.

3 Nous pensons que la façon dont les fonds de recherche sont distribués alimente cette confusion. Comme des subventions sont accordées pour l’étude des gangs, les chercheurs sont tentés de faire entrer autant de groupes que possible sous ce vocable.

4 Ce ne sont pas tous ces groupes qui utilisent le mot « Crips », et c’est souvent les policiers qui l’emploient. Nous maintenons que la présence des gangs sur de vastes territoires est largement exagérée.

5 La théorie des petits gangs aurait deux variantes : 1) la théorie des petits gangs non liés et 2) la théorie des petits gangs à deux niveaux. La première suggère que les petits gangs qui ont en commun une partie de leur nom sont totalement indépendants. La seconde implique une alliance informelle, pour répondre à des besoins ponctuels, entre petits gangs aussi indépendants.

6 Cela n’empêche pas qu’ils puissent faire beaucoup de mal avant de disparaître.

7 Les spécialistes de la question nous ont fait remarquer que les gangs tendent à disparaître, mais que leur image subsiste. Nous avançons que la plupart des gangs ne durent pas un an. Cela demeure à vérifier.

8 Certains avancent que les gangs qui ne durent pas ne sont pas les plus dangereux. L’attention portée à ces groupes est donc proportionnelle à la menace qu’ils représentent. Ce n’est pas faux, mais bien des gangs qui ne survivent qu’un an représentent réellement une menace. Aussi, la menace des gangs établis depuis plus longtemps découle de leur image plus grande que nature.

9 Nous utilisons le mot mort-né étant donné que le gang se forme et se dissout avant d’avoir accompli quoi que ce soit.

10 Nous utilisons le mot signal plutôt que symbole. Cela permet d’inscrire les gangs dans le contexte plus large de la nature. Le mot symbole implique une communication diffuse, alors que le mot signal véhicule un message plus précis, comme « ne me cherche pas, sinon tu vas me trouver ».

11 Il se peut que les signaux aient d’autres buts, mais ils ne constituent pas les principales raisons d’être d’un gang.

12 Nous utilisons le mot menace à dessein puisqu’il ratisse plus large que l’intimidation et s’applique en permanence. Le sumac vénéneux (herbe à puce) est nuisible, même si vous n’y êtes pas personnellement exposé.

13 On aurait pu ajouter à cette liste les menaces non verbales explicites (comme se passer les doigts sur la gorge pour montrer à quelqu’un qu’il aura des ennuis).

14 Il est clair qu’un groupe de jeunes marchant dans la rue peut être intimidant en soi, mais les signaux des gangs indiquent qu’un plus grand groupe pourrait se masser.

15 Voilà une donnée fascinante : des études en psychosociologie ont démontré que bien des gens réagissent davantage à leurs mauvaises expériences qu’aux bonnes (voir entre autres Baumeiser et coll., 2001). Si c’est le cas, il est inutile pour un gang de vous faire du mal à répétition pour qu’il vous obsède.

16 Nous avons forgé ce terme en nous demandant s’il y a un parallèle à faire avec les animaux. Les humains se fondent dans la nature, mais ils y ajoutent aussi une dimension.

17 Pour avoir soulevé ces questions, nous remercions les professeurs Malcolm W. Klein, de l’Université de Californie du Sud, et Arlen Egley du National Youth Gang Center.

18 Bien que notre approche théorique soit différente de celle du professeur Malcolm W. Klein, la politique que nous proposons recoupe la sienne dans une certaine mesure.

19 Nous l’avons déjà dit, le mimétisme müllérien a guidé notre pensée quand nous rédigions ce chapitre. Il ne s’agit pas d’une analogie, mais bien d’une transcription littérale de l’utilisation du signalement dans le but d’apeurer ses ennemis ou d’entraîner les gens à commettre des actes criminels. Pour mettre toutes les chances de leur côté, les gangs humains reprennent ce qui existe déjà dans la nature et s’appuient en plus sur l’impact des médias et la notoriété que les gangs ont gagnée avec le temps.

Le phénomène des gangs de rue

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Ce livre est cité par

Gravel, Jason. Wong, Jennifer S.. Simpson, Rylan. (2018) Getting in People’s Faces: On the Symbiotic Relationship between the Media and Police Gang Units. Deviant Behavior, 39. DOI: 10.1080/01639625.2016.1269547
Décary-Secours12, Benoit. (2020) « Des adolescents terrorisent le nord de la ville ». Criminologie, 53. DOI: 10.7202/1074196ar
González Castillo1, Eduardo. Goyette, Martin. (2015) Gouvernance urbaine et rassemblements de jeunes à Montréal-Nord. Autour de la notion de gang de rue. Criminologie, 48. DOI: 10.7202/1033839ar
Guay2, Jean-Pierre. Fredette, Chantal. Mercier, Marc-André. Dubé, Nathalie. Hobbs, Julie. Paixao, James. Brisebois, René-André. (2015) Définition des gangs et identification des membres à des fins policières1. Criminologie, 48. DOI: 10.7202/1033838ar

Le phénomène des gangs de rue

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Référence numérique du chapitre

Felson, M. (2014). Chapitre 6. Les gangs et les guêpes. In J.-P. Guay & C. Fredette (éds.), Le phénomène des gangs de rue (1‑). Presses de l’Université de Montréal. https://doi.org/10.4000/books.pum.5109

Felson, Marcus. « Chapitre 6. Les gangs et les guêpes ». In Le phénomène des gangs de rue, édité par Jean-Pierre Guay et Chantal Fredette. Montréal: Presses de l’Université de Montréal, 2014. https://doi.org/10.4000/books.pum.5109.

Felson, Marcus. « Chapitre 6. Les gangs et les guêpes ». Le phénomène des gangs de rue, édité par Jean-Pierre Guay et Chantal Fredette, Presses de l’Université de Montréal, 2014, https://doi.org/10.4000/books.pum.5109.

Référence numérique du livre

Guay, J.-P., & Fredette, C. (éds.). (2014). Le phénomène des gangs de rue (1‑). Presses de l’Université de Montréal. https://doi.org/10.4000/books.pum.5090

Guay, Jean-Pierre, et Chantal Fredette, éd. Le phénomène des gangs de rue. Montréal: Presses de l’Université de Montréal, 2014. https://doi.org/10.4000/books.pum.5090.

Guay, Jean-Pierre, et Chantal Fredette, éditeurs. Le phénomène des gangs de rue. Presses de l’Université de Montréal, 2014, https://doi.org/10.4000/books.pum.5090.

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