« Il n’a pas oublié qu’il a eu une autre vie »

Nathalie Bittinger

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« Il n’a pas oublié qu’il a eu une autre vie »

Enchevêtrements temporels et recompositions textuelles dans la littérature chinoise francophone

Nathalie Bittinger

p. 210-228

Extrait

Articuler historiquement le passé ne signifie pas le connaître « tel qu’il a été effectivement », mais bien plutôt devenir maître d’un souvenir tel qu’il brille à l’instant d’un péril1.

1Quelles tensions, au sein du processus de création et dans le travail de textualisation, peut-on déceler dans les œuvres de la « création chinoise francophone » ? La situation historique de celle-ci au sein du champ littéraire d’accueil est spécifique, puisque l’écrivain, d’origine chinoise, déplacé hors de son espace-temps initial vers un ailleurs francophone (France, Canada…), doit faire face, au moins dans un premier temps, à une altérité linguistique, culturelle, historique et esthétique. Toutefois, dans un deuxième temps, ce positionnement instable relève davantage de l’interstice, de l’entre-deux : les traits chinois et les lignes francophones s’entremêlent à partir d’un point de vue quelque peu décentré, à la fois dans et hors de ces configurations mouvantes. Or, ce décentrement laisse d

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1 Walter Benjamin, « Thèses sur la philosophie de l’histoire » (1940), dans L’Homme, le langage, la culture, Paris, Denoël, 1974, p. 186.

2 On peut se reporter à Denis Bertrand et Jacques Fontanille (dir.), Régimes sémiotiques de la temporalité. La flèche brisée du temps, Paris, Presses universitaires de France, 2006.

3 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, trad. Noël et Liliane Dutrait, La Tour d’Aigues, L’Aube, édition de poche, 2001.

4 François Cheng, Le dit de Tianyi, Paris, Albin Michel, 1998.

5 Dai Sijie, Par une nuit où la lune ne s’est pas levée, Paris, Gallimard, 2007.

6 Voir Paul Ricœur, Temps et Récit, 2. La configuration dans le récit de fiction, Paris, Seuil, 1984, rééd. 1991.

7 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., p. 200.

8 Ibid.

9 François Cheng, Le dit de Tianyi, op. cit., p. 17.

10 Voir Edmond Cros, Le sujet culturel. Sociocritique et psychanalyse, Paris, L’Harmattan, 2005, p. 57 ou p. 66-67, par exemple.

11 Se reporter à François Hartog, Régimes d’historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil, 2003, p. 19. Celui-ci fonde la notion heuristique de « régimes d’historicité » au profit de l’analyse, dans un sens restreint, de la « manière dont une société traite son passé », et dans un sens large, de la « modalité de conscience de soi d’une communauté humaine ».

12 Notre approche théorique relève de la sociocritique. Sur l’historicité propre au texte, voir Xavier Bourdenet, « L’historicité : un objet à construire », dans Claude Duchet, Entretiens sur la sociocritique, réalisés par Patrick Maurus avec le concours de In-Kyoung Kim et Isabelle Tournier, Lyon, Presses universitaires de Lyon, à paraître.

13 Dominique Maingueneau, Le contexte de l’œuvre littéraire : énonciation, écrivain, société, Paris, Dunod, 1993, p. 27.

14 Paul Ricœur, La mémoire, l’histoire, l’oubli, Paris, Seuil, 2000, rééd. 2003, p. 100.

15 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., p. 101.

16 Ibid., p. 187.

17 Denis Bertrand et Jacques Fontanille (dir.), Régimes sémiotiques de la temporalité, op. cit., p. 21.

18 Dai Sijie, Par une nuit où la lune ne s’est pas levée, op. cit., p. 62.

19 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., p. 200.

20 François Cheng, Le dit de Tianyi, op. cit., p. 22

21 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., p. 62.

22 François Cheng, Le dit de Tianyi, op. cit., p. 9-10.

23 Ibid., p. 9.

24 On trouve ce même motif dans Le livre d’un homme seul, puisque, à l’injonction de Marguerite, « Écris ton expérience personnelle, ce que tu as vécu en tant qu’individu. Il faut l’écrire, ça aura une grande valeur ! », le « tu » répond que « le jour viendra où les milliers et les milliers de tonnes d’archives seront ouvertes ; ce que j’aurais écrit ne sera plus qu’un tas de vieux papiers bons à jeter », dans Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., p. 110 (nous soulignons).

25 François Cheng, Le dit de Tianyi, op. cit., p. 11.

26 Ibid.

27 Ibid., p. 9.

28 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., respectivement, p. 24, 66 et 85.

29 François Cheng, Le dit de Tianyi, op. cit., p. 15.

30 Ibid., p. 211.

31 Ibid., p. 295.

32 Dai Sijie, Par une nuit où la lune ne s’est pas levée, op. cit., p. 193-194.

33 Ibid., p. 195.

34 Ibid., p. 201-202.

35 Ibid.

36 Ibid., p. 168-169.

37 Selon les distinctions d’Émile Benveniste, retravaillées par Jean-Claude Coquet, La quête du sens, le langage en question, Paris, Presses universitaires de France, 1997, p. 56 par exemple.

38 Ibid., p. 40-41.

39 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., p. 237.

40 Ibid., p. 200.

41 Ibid., p. 237.

42 Ibid.

43 François Cheng, Le dit de Tianyi, op. cit., p. 440.

44 Ibid., p. 11.

45 Ibid., p. 442.

46 Gao Xingjian, Le livre d’un homme seul, op. cit., respectivement p. 48 et p. 93.

47 Ibid., p. 129.

48 Ibid., p. 11 et p. 20.

49 Ibid., p. 335-337.

50 Ibid., p. 238.

51 Ibid., p. 255-256.

52 Dai Sijie, Par une nuit où la lune ne s’est pas levée, op. cit., p. 11.

53 François Cheng, Le dit de Tianyi, op. cit., p. 10.

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Référence numérique du chapitre

Bittinger, N. (2012). « Il n’a pas oublié qu’il a eu une autre vie ». In G. Thouroude & R. Silvester (éds.), Traits chinois/Lignes francophones (1‑). Presses de l’Université de Montréal. https://doi.org/10.4000/books.pum.3975

Bittinger, Nathalie. « “Il n’a pas oublié qu’il a eu une autre vie” ». In Traits chinois/Lignes francophones, édité par Guillaume Thouroude et Rosalind Silvester. Montréal: Presses de l’Université de Montréal, 2012. https://doi.org/10.4000/books.pum.3975.

Bittinger, Nathalie. « “Il n’a pas oublié qu’il a eu une autre vie” ». Traits chinois/Lignes francophones, édité par Guillaume Thouroude et Rosalind Silvester, Presses de l’Université de Montréal, 2012, https://doi.org/10.4000/books.pum.3975.

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Thouroude, Guillaume, et Rosalind Silvester, éd. Traits chinois/Lignes francophones. Montréal: Presses de l’Université de Montréal, 2012. https://doi.org/10.4000/books.pum.3948.

Thouroude, Guillaume, et Rosalind Silvester, éditeurs. Traits chinois/Lignes francophones. Presses de l’Université de Montréal, 2012, https://doi.org/10.4000/books.pum.3948.

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