1 Dans leur ouvrage, Macedo et ses collaborateurs (2005) invitent également à tenir compte de la tension entre les temporalités. Si sur le court terme le lien entre engagement associatif et engagement politique est avéré, il n’en reste pas moins que sur un plus long terme l’engagement associatif ne cesse de croître tandis que la participation aux élections ne cesse de diminuer, à tout le moins aux États-Unis (Jennings et Stocker, 2004). C’est ici qu’il peut être utile de considérer l’évolution des formes d’engagement et de participation.
2 Parti le plus à gauche de l’échiquier politique québécois, si l’on s’en tient aux partis disposant d’un représentant à l’Assemblée nationale.
3 Il convient aussi de souligner que l’imagination sociologique est sans doute plus facile dans une province où la croissance économique avoisine 1,4 % (Banque Royale du Canada, juin 2013) que dans un pays où elle est de 0,1 % (Banque de France, juin 2013).
4 La construction de l’État-providence québécois s’inscrit dans un contexte d’effervescence des mouvements sociaux. Si ces groupes ont participé à la naissance de l’État-providence, ils s’en sont aussi démarqués en revendiquant plus d’autonomie et en critiquant la bureaucratie et le système libéral. En outre, le duplessisme (du nom du premier ministre qui dirigea le Québec de 1944 à 1959) avait légué une tradition de collaboration avec la société civile grâce aux associations œcuméniques. Deux éléments étaient donc présents pour ouvrir la voie à la légitimité des pratiques du système communautaire : des groupes et un mouvement social antérieur à la modernisation de l’État, ainsi qu’une « critique artiste », pour reprendre la référence de Jetté aux travaux de Boltanski et Thévenot (1991). C’est cette dernière qui luttera à la fois pour une mission de défense des droits (et non seulement de distribution de services) et l’autonomie des groupes.
5 Je ne nomme pas le pays car mon interlocutrice ne l'a elle-même pas fait.
6 C’est là une piste de recherche que je souhaite explorer dans les années à venir. Comme je le disais précédemment, la politisation comme le conflit sous-jacent à celle-ci ne sont pas naturels, les acteurs sociaux ayant plutôt tendance à éviter celui-ci comme la politique d’ailleurs (voir par exemple Donovan et Bowler, 2004 ; Hibbing et Theiss-Morse, 2002 ; Mansbridge, 1983 ; Mutz, 2002). On peut donc aisément comprendre que cette même politisation soit encore moins naturelle dans un contexte où les acteurs sociaux sont plus démunis que les autres en matière de ressources sociales et cognitives. Il faut ainsi resituer mes propos précédents dans un contexte québécois où l’influence de la mouvance communautaire a été déterminante dans la défense des droits des populations les plus démunies (voir entre autres les écrits de Shragge, 2006).
7 Chemins de fer canadiens.
8 C’est la mise au jour de scandales politiques mettant en cause le parti au pouvoir Union Montréal qui incita plusieurs élus sous cette bannière à siéger comme indépendants.
9 Pour l’auteur américain, la notion fait référence aux interactions et aux liens entre les individus, à savoir aux réseaux sociaux et aux normes de réciprocité et de confiance qui en résultent (Putnam, 2000).
10 Putnam (2000) a répondu à ces critiques en distinguant entre deux types de liens : bonding et bridging. Le premier renvoie à des liens à l’intérieur de groupes homogènes partageant une identité ethnique ou religieuse, par exemple. La loyauté interne y est forte et peut s’accompagner d’une méfiance à l’endroit de l’extérieur. Le second renvoie à des relations entre des individus appartenant à des groupes différents et dont les valeurs peuvent diverger. C’est ce type de relations qui est censé œuvrer à une confiance des individus dans la société. Comme le note Hamidi (2003) dans son compte rendu éclairant des thèses de Putnam et de leurs critiques, cette position ne dissipe pas toute ambiguïté puisque si Putnam reconnaît que le capital social se développe davantage dans le premier cas, il n’a les effets escomptés à l’endroit de la société que dans le second cas…
11 27 et 28 Août 2010, parc nature du Cap-Saint-Jacques, Montréal.
12 Sur le budget participatif du Plateau, se reporter, entre autres, aux travaux de Latendresse (2006) ; Patsias et al. (2013) ; Rabouin (2009).
13 Durant mes séjours universitaires, j’ai toujours été frappée par la différence dans l’accueil réservé au lecteur potentiel, selon les traditions académiques. Les États-Unis et le Canada (et d’ailleurs surtout les États-Unis) craignent le terroriste et le pique-assiette (celui qui n’a pas payé les frais requis pour l’usage de la bibliothèque). Mais la carte montrée, le Sésame s’ouvre et à l’exception des livres rares prisonniers de la réserve, le lecteur est lâché en liberté entre les étagères. En France, disons dans les bibliothèques françaises que j’ai visitées, le livre n’est pas tant protégé du « terroriste » que de son prétendu ami le lecteur, entre celui-là et celui-ci officie le personnel de la bibliothèque, gardien du trésor. Le lecteur ne peut donc se perdre dans les rayons. Si les livres incarnent le savoir et donc le pouvoir, il y a là peut-être une piste à suivre…
14 Là où la démocratie antique avait instauré l’alternance au sein de la relation commandement-obéissance, les modernes instaurent des séparations : entre religieux et politique, public et privé, domestique et politique. Cette organisation fait écho à une conception de la liberté qui repose sur un individu à la fois émancipé de sa communauté originelle et préservé du pouvoir de l’État. Divisé, le pouvoir est affaibli et l’individu dispose d’espaces où l’État ou toute autre autorité ne peuvent l’atteindre. Un tel agencement contrarie la relation commandement-obéissance au centre de la démocratie des Anciens. La séparation entre représentant et représenté permet en effet de contourner celle-ci.