INTRODUCTION ET RÉSUMÉ

1Ce cas se situe dans le prolongement du cas « Guy Lacasse, entrepreneur » qui décrit l’histoire d’un entrepreneur qui met en place un ensemble d’entreprises réseaux qui œuvrent en sous-traitance autour de son entreprise de fabrication de meubles, un concept qui s’apparente à de l’essaimage. Patrick est le neveu de Guy Lacasse et le fils de Réal Lacasse, un des deux frères qui ont été partenaires de Guy dans le Groupe Lacasse jusqu’au moment de la vente de 75 % de l’entreprise à Haworth pendant l’hiver 20001. Au moment où les entrevues pour ces cas ont été menées, entre avril et octobre 1999, le Groupe Lacasse se préparait à aller sur le marché boursier et Patrick était considéré comme l’un des deux ou trois candidats possibles pour diriger un jour le Groupe Lacasse, ou du moins pour y assumer un rôle de direction important aux côtés du fils de Guy, Robin.

2Ce cas est la contrepartie du cas « Guy Lacasse, entrepreneur », en ce sens qu’il décrit le rôle d’un entrepreneur sous-traitant « essaimé » qui fait partie du réseau mis en place par l’oncle Guy. Patrick est élevé dans un contexte de culture d’entrepreneuriat et de PME. Très jeune, il envisage la voie entrepreneuriale comme carrière et ne montre pas beaucoup d’intérêt pour l’école.

3Le cas décrit les débuts de l’entreprise et la façon, dont, à l’origine, elle est le produit du « système de Guy ». Grâce à son système organisationnel et à la diversification de ses produits, Partimeuble acquiert graduellement sa propre personnalité et est de plus en plus autonome sur le marché.

4L’intérêt du cas réside autant dans la description du profil et du cheminement d’un entrepreneur qui réussit que dans la présentation de la perspective « des autres » au sein du système Lacasse. Au départ, cet essaimage stratégique familial offre des avantages d’encadrement pour l’entrepreneur essaimé, mais faire partie d’un système où la marge de manœuvre est mince a aussi des inconvénients. Nous voyons de quelle façon Patrick se sort graduellement de cette dépendance pour assurer une meilleure stabilité à son entreprise.

OBJECTIFS D’APPRENTISSAGE

5►► Montrer la naissance, le développement et le cheminement d’un entrepreneur qui se construit.

6►► Illustrer une situation d’entreprise-réseau, à partir de la perspective d’un entrepreneur qui fait partie du réseau.

7►► Montrer de quelle façon un entrepreneur « essaimé » bénéficie de l’encadrement de départ, puis s’en dégage graduellement, même s’il demeure en partie dans une relation de sous-traitance.

8►► Montrer les particularités de gestion d’une entreprise qui fait partie d’un système familial.

9►► Illustrer une situation de réussite dans un secteur très concurrentiel.

QUESTIONS SUGGÉRÉES SUITE À LA LECTURE DE CE CAS

10►► Patrick Lacasse est-il un entrepreneur ?

11►► Patrick a-t-il bien su tirer son épingle du jeu avec le « système Lacasse » ?

12►► Qu’est-ce que Patrick aurait pu faire de mieux pour mieux utiliser le « système de l’oncle Guy » ?

13►► Aimeriez-vous travailler chez Partimeuble ? Si oui, quelle y serait votre contribution ?

14►► Aimeriez-vous faire partie du « système Lacasse » ? Pourquoi ?

15►► Quelles sont les conséquences pour Patrick de la présence de son père dans la direction du Groupe Lacasse ? De son départ après la vente à Haworth ?

16►► Quelles sont les forces et les faiblesses de Patrick Lacasse ? De Partimeuble ?

17►► Que suggérez-vous à Patrick Lacasse ?

18►► Quelles sont les options d’avenir pour Patrick ? Que lui conseillez-vous ?

DESCRIPTION DU CAS

19L’aventure entrepreneuriale de Patrick Lacasse2 est une des belles réussites chez les entrepreneurs de la Montérégie. Depuis bientôt 20 ans, son entreprise Partimeuble fait de la sous-traitance pour le Groupe Lacasse, le plus important fabricant de meubles de bureau au Québec et le deuxième au Canada. Ses affaires ont presque toujours marché rondement. Il a eu le succès précoce, dans sa jeune vingtaine. Pourtant, au sortir de l’adolescence, c’est de façon un peu candide qu’il décide de se lancer en affaires.

20Avant de devenir entrepreneur, Patrick Lacasse n’a pas travaillé comme employé pour le Groupe Lacasse. Il ne peut donc pas être considéré comme un entrepreneur essaimé au sens strict du terme. Pourtant, sans l’aide et les soutiens divers qu’il a reçus du Groupe Lacasse lorsqu’il s’est lancé en affaires, Patrick Lacasse, véritable entrepreneur sous-traitant digne de ce nom, n’aurait probablement pas réussi à relever les nombreux défis reliés à son initiative entrepreneuriale. La modestie de ses ressources, sa jeunesse, son manque d’expérience dans les affaires, son ignorance de l’industrie dans laquelle il se lançait, son manque de formation et de savoir-faire en production et la complexité de l’occasion d’affaires qu’il avait choisie d’exploiter auraient été autant de handicaps majeurs à la création et au démarrage de son entreprise ainsi qu’à sa survie en affaires. Et pourtant...

21Depuis sa création en 1982, Partimeuble a produit pour le Groupe Lacasse des lignes de produits divers et des composantes variées utilisées dans la fabrication des meubles de machines à coudre et des meubles de bureau. Au fil des ans, l’entreprise s’est constitué un savoir-faire spécifique dans ce domaine de telle sorte que le Groupe Lacasse classe cette entreprise, en l’an 2000, au nombre de ses cinq meilleurs sous-traitants. Il s’agit là d’une évaluation peu commune étant donné que Guy Lacasse, président du Groupe Lacasse, est reconnu comme étant très exigeant, en particulier envers les membres de sa famille, et qu’il existe une trentaine d’autres petites entreprises sous-traitantes que Guy Lacasse a aidées à naître dans son parc industriel privé de Saint-Pie-de-Bagot3.

22Patrick Lacasse est fier de cette reconnaissance, en particulier parce qu’elle vient de son oncle Guy qui n’est pas reconnu pour être un homme facile. Il considère qu’elle est bien méritée. Elle rend hommage à ses compétences et aux nombreuses années d’efforts et d’engagement profond qu’il a consacrées à la direction et à la croissance de son entreprise. Il pourrait même dire que c’est l’aboutissement de son rêve d’adolescent : bâtir une entreprise prospère. Mais il aime mieux y voir la marque d’une étape importante qu’il vient de franchir dans son cheminement entrepreneurial.

AU SORTIR DE L’ADOLESCENCE : LE GRAND SAUT DANS LE MONDE DES ENTREPRENEURS ET DANS L’INDUSTRIE DU MEUBLE

23En 1982, lorsque Patrick Lacasse fait le choix de créer sa petite entreprise et de travailler comme premier sous-traitant pour le Groupe Lacasse, il n’a que 19 ans. Il sort à peine de l’adolescence. En ce temps-là, les ambitions du jeune homme dépassaient largement ses moyens. Il avait dans son coffre à outils d’entrepreneur une formation de niveau secondaire commercial et une connaissance fonctionnelle de l’anglais, mais surtout le courage et la détermination farouche de se lancer et de réussir en affaires. Son choix de carrière comme entrepreneur en surprend plus d’un, en particulier ses parents qui auraient souhaité qu’il poursuive ses études. D’autres jeunes de son âge auraient plutôt penché pour une profession libérale ou auraient envisagé leur carrière au sein de grandes organisations. Patrick Lacasse préfère faire les choses différemment. Il est conscient de ses choix. Il a réfléchi à ses forces et à ses faiblesses. Il sait ce qu’il aimerait et pourrait éventuellement accomplir :

Je ne pourrais pas dire que je me fiais à la présence de mes parents. Voulant nous aider, mon père nous a envoyés dans des collèges privés où il pensait qu’on poursuivrait nos études. Mais je n’avais aucun intérêt pour l’école.
Je ne ressentais pas le besoin de recevoir une grande éducation. J’ai fini mon secondaire V commercial dans une école de Saint-Hyacinthe. Plutôt du genre pratico-pratique, j’avais hâte de commencer à travailler. Issu d’une famille d’entrepreneurs, je m’étais dit : « Un jour, j’aurai mon entreprise. L’école n’est pas faite pour moi. J’apprendrai par l’expérience de la vie.
À l’âge de 18 ans, à peine sorti de l’école, j’ai eu l’occasion d’aller apprendre l’anglais en Ontario.

24Même s’il ne connaît rien dans le domaine de la production, Patrick Lacasse passe à l’action dans l’industrie du meuble. Il apprend progressivement par l’expérience et acquiert certaines aptitudes. Ses affinités avec cette industrie et avec le métier d’entrepreneur ne sont sans doute pas étrangères à ses origines familiales.

25En effet, Patrick Lacasse baigne, depuis sa naissance, dans une culture entrepreneuriale, vieille d’au moins trois générations. Son aïeul, Edouard Lacasse, était un entrepreneur prospère au début du siècle dernier. Il était propriétaire d’immeubles résidentiels à Granby et d’une usine de portes et fenêtres à Moncook, petite localité de la région, située près de Milton. Plusieurs frères de son grand-père paternel étaient également des entrepreneurs dans le domaine du bois dans la région de Roxton Pond près de Granby.

26Son père, Réal Lacasse, est aussi un entrepreneur. Jusqu’à tout récemment4, il était copropriétaire du Groupe Lacasse et y occupait le poste de vice-président, affaires générales. Avec Réjean et Guy, ses deux autres frères, les oncles de Patrick, il a créé et dirigé pendant plus de 40 ans cette entreprise reconnue dans la région de la Montérégie et dans le milieu des affaires du Québec et du Canada pour sa prospérité et son dynamisme. Il s’agit d’une entreprise qui a occupé une large place dans le secteur du meuble de bureau.

27Comme on le voit, la famille Lacasse offre de nombreux modèles d’entrepreneurs à succès auxquels le jeune Patrick peut s’identifier. C’est peut-être ce qui explique le mieux ses choix candides mais courageux d’adolescent. Il semble concevoir sa réussite en affaires comme allant un peu de soi. Son choix d’œuvrer dans une industrie perçue comme un peu vieillotte et dépassée par les jeunes, tant à cette époque qu’en 2000, s’inscrit logiquement dans une tradition de métier propre à la dynastie des Lacasse.

28Patrick Lacasse est le deuxième d’une famille de trois enfants. Sylvain, son frère aîné, est également entrepreneur ; son entreprise fabrique des chaises de bureau en sous-traitance pour le Groupe Lacasse. Sandra, sa jeune sœur, travaille comme denturologue dans le sous-sol de la maison familiale.

29Patrick Lacasse est donc bien préparé de par sa culture familiale pour se lancer en affaires. Il a aussi la volonté nécessaire pour le faire. Mais ces seuls ingrédients ne suffisent pas. Il attend le moment idéal. Lorsque cette occasion se présente, il s’empresse de la saisir au vol :

À cette époque, les frères Lacasse avaient l’intention de commencer la sous-traitance. Ils voulaient confier les départements à problèmes à des employés débrouillards ou à des personnes qui pouvaient leur enlever ces « épines du pied ». Les trois frères s’étaient mis d’accord pour confier en priorité à leurs enfants ces unités de sous-traitance. Mon père a offert cette occasion d’affaires à mon frère qui ne l’a pas vue comme telle puisqu’il n’a pas sauté sur l’occasion. J’ai alors proposé à mon père de m’en charger. Cela me fournissait une raison de sortir de l’école et de partir à mon compte comme je l’avais toujours voulu. J’ai commencé à travailler en 1982, à l’âge de 19 ans, pour le Groupe Lacasse. Je fabriquais des côtés de tiroirs de bureaux et des coffrets de machines à coudre à partir de bandes de fibres de bois imprimées et coupées en longueur. Je travaillais pour les frères Lacasse qui possédaient encore à ce moment-là le commerce des machines à coudre.

30C’est ainsi que, du jour au lendemain, Patrick Lacasse entre dans le monde des entrepreneurs. Pour y survivre, on ne peut pas dire qu’il se soit laissé porter par la vague. Ses capacités d’apprentissage, sa passion du métier et ses talents de fonceur se révèlent fort utiles au fil des années et des expériences aussi nombreuses que diverses qu’il a vécues.

PREMIÈRES EXPÉRIENCES DE TRAVAIL ET DE SOUS-TRAITANCE

31Comme il ne veut pas se lancer seul dans la production et qu’il désire exploiter de façon profitable cette occasion d’affaires, Patrick Lacasse n’hésite pas à solliciter l’aide d’un proche. Il engage un de ses amis avec qui il travaille pratiquement pendant deux ans.

32Sa première année comme entrepreneur lui donne surtout l’occasion d’apprendre le métier et d’acquérir une meilleure compréhension des rouages du système de sous-traitance. Il réfléchit profondément à la façon d’organiser différemment ses ressources et ses compétences afin d’en tirer profit au maximum. Il découvre la solution et s’empresse de convaincre le Groupe Lacasse de changer son mode de traitement :

Il ne s’agissait pas d’une entreprise de deux à quatre millions de chiffre d’affaires.
Au début, Lacasse me payait à l’heure. Je versais 7 $ à mon employé et je me gardais 10 $ pour payer l’électricité. N’ayant jamais été habitué à gagner 500 ou 600 $ par semaine, je trouvais ce système correct. Mais au bout d’un an et demi, j’ai réalisé que j’avais avantage à être payé à la pièce (des centaines et des milliers de pièce à 0,03 $ ou 0,05 $ la pièce). Comme je ne pouvais pas fabriquer plus de tiroirs qu’ils n’en avaient besoin, j’ai vite compris que je pouvais exécuter le travail en 40 heures plutôt qu’en 50. En sauvant une dizaine d’heures pour le même résultat, ça devenait plus profitable. J’ai ensuite engagé un deuxième employé et j’ai délaissé la production pour m’occuper des papiers, obtenir des commandes et faire effectuer le travail.

33Au fil des ans, 1’effervescence et la passion de bâtir ont amené Patrick Lacasse à s’attaquer sans cesse à de nouveaux défis, de nouvelles occasions d’affaires, tout en accroissant de façon importante ses capacités organisationnelles. Il déménage à quelques reprises afin d’accroître sa superficie de travail. Il modernise ses équipements et raffine ses méthodes. En 2000, son entreprise emploie 70 personnes, preuve de sa croissance soutenue au cours des 10 dernières années :

Au bout de deux ans et demi, un deuxième département à problèmes est apparu chez Lacasse. À cette époque, Lacasse fabriquait des meubles de bureau. Le peu de tables de conférences à fabriquer nécessitait beaucoup trop de pieds carrés dans l’usine et entraînait souvent des retards de livraison. Il n’y avait plus de place pour agrandir le département. Lorsqu’ils m’ont demandé de prendre cette gamme de produits, j’ai déménagé pour obtenir davantage de pieds carrés. J’ai loué un des premiers locaux dans une bâtisse située au milieu du village et qui appartenait à la société de gestion du Groupe Lacasse. Il y avait même de la place pour agrandir. J’ai raffiné les méthodes et j’ai engagé des gens. J’avais alors cinq ou six employés. Ces tables étaient débitées à la main. J’étais payé également à la pièce, mais nous étions limités par un maximum de huit à neuf heures de travail par jour. Deux personnes avaient beau travailler sur le débitage de ces tables, nous ne pouvions pas faire plus qu’une trentaine de tables par jour. Comme la demande était supérieure à ce chiffre, les retards s’accumulaient.
À peine huit ou dix mois après le déménagement, Lacasse a lancé une gamme de meubles d’informatique dont je me suis occupé. J’ai engagé trois ou quatre autres personnes et nous avons agrandi la bâtisse pour pouvoir les fabriquer. En 1987, nous avons acquis la bâtisse actuelle qui venait d’être construite par Guy (50 000 pieds carrés). En 1988, j’ai acheté une machine à contrôle numérique qui, à l’époque, coûtait 155 000 $. Cette machine nous donnait la possibilité de débiter en une heure ce que nous fabriquions en une journée.
J’ai donc abandonné le département des tiroirs qui n’était plus réellement rentable comparé aux tables de conférences et aux meubles d’informatique. Nous fabriquions les meubles d’informatique de A à Z (produit fini et mis en boîte). Cette ligne m’a mis au monde par sa croissance phénoménale. »

34Patrick Lacasse a eu du plaisir à vivre ces belles aventures, mais il était loin d’avoir atteint la fin de son voyage entrepreneurial. Comme bien des entrepreneurs, il a connu, au début des années 1990, une période de stagnation due à la récession et ne se doutait pas que son entreprise allait connaître un nouvel essor après cette épreuve.

35Fort heureusement, le monde des affaires n’étant pas un fleuve tranquille, l’industrie du meuble au Canada a repris de la vigueur et, dès la fin de la récession de 1992, elle connaît une progression fulgurante avec une croissance annuelle moyenne de plus de 10 %5. De plus, le Groupe Lacasse qui s’était donné une marge de manœuvre plus grande en se constituant un fort arsenal de ressources d’appui durant les années 1980 poursuivait, dès 1993, ses objectifs d’expansion dans le créneau spécifique des meubles de bureau en mélamine. L’entreprise conservait ainsi sa longueur d’avance sur ses concurrents.

36Le fait également que Guy Lacasse ait choisi de confier plus de tâches de production à des sous-traitants pour se concentrer uniquement sur la conception, l’assemblage, le marketing et la distribution furent des décisions salutaires aussi bien pour le Groupe Lacasse que pour Partimeuble qui en dépendait entièrement jusqu’à tout récemment. C’est beaucoup moins le cas maintenant puisqu’il a commencé à recruter des clients à l’extérieur du Groupe Lacasse. Pour Patrick Lacasse, le défi était alors de solidifier la croissance et les revenus futurs de son entreprise, à l’ombre de ce géant, sans le perdre, ni se perdre.

LE MOT D’ORDRE DES DERNIÈRES ANNÉES : CONSOLIDER LA CROISSANCE DE PARTIMEUBLE ET APPORTER DE L’EAU NOUVELLE AU MOULIN

37Des produits aux cycles de vie de plus en plus courts en raison de percées technologiques constantes et des goûts changeants des consommateurs devenus mieux informés et plus exigeants qu’auparavant, caractérisent le monde des affaires de ce nouveau millénaire. Pour survivre à ces changements et s’ajuster à la mondialisation des marchés, les entreprises de tous les secteurs sont obligées de faire davantage preuve de créativité et de composer avec l’alliée de taille qu’est la technologie. C’est ainsi, pense-t-on, quelles peuvent réussir à pousser un peu plus loin les limites qualitatives et quantitatives de leur production et à proposer en permanence à leurs clients des produits et des services nouveaux ou améliorés et à prix concurrentiels.

38L’industrie du meuble n’échappe pas à cette réalité. Ainsi, la durée de vie d’un meuble, qui était d’une douzaine d’années voilà une décennie, est passée à quatre, cinq ou six ans, en l’an 2000. Par ailleurs, des besoins nouveaux en aménagement et en ameublement de bureaux à domicile de même qu’en structuration de l’espace de travail, tant hors résidence que dans les domiciles, se sont exprimés plus intensément ces dernières années. Ceci est dû en grande partie à l’augmentation du nombre de travailleurs autonomes et de télétravailleurs ainsi qu’à une utilisation de plus en plus grande de matériel informatique tant à la maison qu’au bureau.

39L’apparition sur le marché d’équipements assez minuscules pour être logés sur n’importe quel bureau a également contribué à la modification des besoins des consommateurs. Bien que l’ordinateur continue de régner en maître dans leur espace de travail, les gens ne veulent plus avoir un meuble spécifique pour celui-ci, comme c’était le cas au début des années 1980, lors de l’explosion du marché de l’ordinateur personnel. Depuis quelques années déjà, les consommateurs préfèrent des meubles flexibles, polyvalents, compacts, légers, solides, élégants et à prix abordables. L’intérêt d’un tel meuble offre la possibilité de le rallonger ou de le comprimer facilement et rapidement selon l’espace disponible et les besoins particuliers d’entreposage ou d’utilisation des fournitures et des équipements de bureau.

40Le Groupe Lacasse demeure très proche du marché et à l’écoute attentive des besoins des clients. Il a adapté ses meubles pour qu’ils comblent les attentes du marché, voire même qu’ils aillent au-delà. Ainsi, depuis deux ou trois ans, il ne fabrique plus de tables de conférence ni de meubles informatiques traditionnels typiques. Désormais, ses meubles accueillent n’importe quel matériel informatique.

41Depuis 1994, le Groupe Lacasse accorde une place de choix au design et à la recherche et développement à travers toute l’entreprise. Des ressources importantes y sont consacrées dans le but de concevoir des collections exclusives pour différentes clientèles et pour renouveler constamment les gammes de produits. L’innovation est ce qui a permis au Groupe Lacasse de conquérir des parts importantes de marché dans son créneau. En 1999, Guy Lacasse estimait que son système (formé par Groupe Lacasse et l’ensemble de ses sous-traitants) produisait environ 5000 meubles (tables, bureaux, bibliothèques et chaises) par semaine. Ses revenus ont maintenu un rythme de croissance annuelle de 15 à 20 %6.

42Le Groupe Lacasse doit ces excellents résultats en grande partie à la qualité du travail de ses sous-traitants. En retour, ces derniers, à l’instar de Patrick Lacasse, n’hésitent pas à reconnaître que le Groupe leur a été d’un soutien majeur pour qu’ils s’adaptent aux changements rapides du marché, qu’ils apprennent les rudiments de leur métier et assurent la croissance de leur entreprise. Patrick Lacasse commente sa relation avec le Groupe :

Durant les années où nous fabriquions les tables de conférence et les meubles d’informatique, nous entreposions beaucoup. Nous avions des stocks énormes. Avec le temps, le marché a changé d’exigences ; nous n’avions jamais la bonne grandeur ou la bonne couleur puisque nous offrions plus d’une trentaine de couleurs et d’épaisseur. Nous n’avons pas eu le choix. Il a fallu changer. Ce n’est plus rentable, aujourd’hui, de maintenir des stocks qui grugent ta liquidité. Avec nos systèmes, nous pouvons produire de petites quantités en dix jours. Depuis les dix dernières années, c’est ainsi que nous travaillons sur le meuble de bureau.
En réalité, les petites quantités sont très coûteuses, car tu apportes toujours des ajustements aux machines pour couper un morceau (des plans de coupe) pour un meuble. Nous avons donc mis au point de petites techniques et nos machines ont été acquises en fonction de petites quantités. Nous sommes rapides pour les petites quantités. Par contre, les grosses quantités nous handicaperaient.
Le Groupe Lacasse ne s’est jamais retenu d’aider ceux avec qui il travaille. Au début, Lacasse supportait nos comptes fournisseurs. Nous achetions toutes nos matières premières chez lui et cela nous a énormément aidés. Nous le faisons encore aujourd’hui. Nous bénéficions aussi de ses commandes régulières. Ainsi, nous pouvions nous concentrer sur la production, ce qui est très important pour un entrepreneur en période de démarrage.

43La croissance de Partimeuble, au cours des 15 premières années, a été harmonieuse, mais largement tributaire de l’expansion phénoménale de Groupe Lacasse. Patrick Lacasse, conscient de cette dépendance, ne s’en est pas préoccupé outre mesure, car jusque-là, ses affaires se portaient bien et il arrivait à peine à suivre la demande croissante qui provenait du Groupe Lacasse. Au cours des trois dernières années, par contre, certains événements, comme la vulnérabilité de son entreprise, lui ont ouvert les yeux. Il a compris qu’il était temps d’y prêter attention.

44Patrick Lacasse sait reconnaître les occasions d’affaires lorsqu’elles passent et n’hésite pas à mordre dedans à belles dents :

Chez Lacasse, nous sous-traitons du temps et fonctionnons avec des heures. Le Groupe nous accorde 2000 heures de travail par semaine. Nous avons pris ce risque et cela a toujours assez bien fonctionné. Mais depuis plus d’un an, Lacasse a diminué un peu l’ouvrage qu’il nous donne. Il n’atteint plus comme par le passé le maximum d’heures de travail qu’il nous accordait, mais plutôt 1500 ou 1600 heures par semaine. Nous avons comblé le manque d’heures par des gammes de produits et de petits contrats que nous sommes allés chercher à gauche et à droite.
Il y a trois ans, nous nous sommes lancés à notre propre compte dans une gamme un peu différente que Lacasse avait acquise : les meubles de condominiums. Nous faisons affaires avec un designer de New York. Je suis son manufacturier.
Lacasse avait fabriqué ces gammes de produits pendant presque trois ans mais ce n’était pas la gamme dans laquelle le Groupe voulait s’engager. Ce produit faisait bien son affaire lorsqu’il n’y avait pas de travail. Mais dès qu’il en a eu beaucoup, il mettait ce client un peu de côté ou le servait en deuxième. Je sentais que le client n’était pas satisfait, car j’avais toujours un pied dans les bureaux de Lacasse ce qui me permettait de savoir ce qui s’y passait. J’ai alors appelé ce client et lui ai dit : « Un jour, si tu n’es pas satisfait, je suis là. » Je cherchais des produits qui éviteraient d’avoir tous mes œufs dans le même panier. Je prenais de l’ampleur et tout l’investissement était strictement concentré sur Lacasse. Le risque était cependant étudié. S’il s’était agi d’étrangers, j’aurais pensé différemment. Mon père était là et il n’est pas du genre à vouloir me causer des problèmes.

45Depuis deux ans, Patrick Lacasse consacre la majeure partie de son temps à la recherche de nouveaux clients. Il a compris que non seulement il y avait des risques à dépendre d’un seul client mais aussi qu’il pouvait exploiter, de façon plus avantageuse, ses actifs et ses capacités organisationnelles pour satisfaire les besoins d’autres clientèles. Ainsi, ne ménageant pas ses efforts, il noue des contacts dans les segments de marché où il flaire des occasions d’affaires. Au début de cette exploration, les résultats n’étaient pas très encourageants mais Patrick Lacasse a appris de ses expériences et a continué à déployer ses efforts. Il semble que le créneau des meubles pour foyers de personnes âgées qu’il a aussi ciblé soit un domaine potentiellement rentable :

Depuis quelques années, nous cherchions d’autres branches. Un an avant de nous lancer dans les meubles de condominium, quelqu’un m’avait approché pour fabriquer des meubles pour foyers de personnes âgées. Nous avons fait des tentatives dans ce marché à trois reprises en obtenant quelques petits contrats mais Lacasse nous embourbait avec une vague d’ouvrage pour huit à douze mois. Lorsque le Groupe a diminué ses heures, nous en avons profité pour nous lancer dans les meubles de condominium. Cela nous a donné l’occasion de voir que nous pouvions faire autre chose. La personne à qui nous vendions les meubles de condominium m’avait promis un gros chiffre d’affaires qu’il n’a pas respecté.
Comme nous avions déjà développé des méthodes rentables, nous sommes allés chercher davantage de contrats dans les meubles pour foyers de personnes âgées, une gamme un peu semblable aux meubles de condominium et passablement simples à construire. Nous avons découvert que ce secteur n’était pas très exploité et nous avons accepté plus d’ouvrage. Nous avons meublé cinq des dix nouveaux centres construits récemment par le gouvernement et avons augmenté nos profits.
Dans l’avenir, nous espérons que ces gammes vont se développer. Je vais tout de même garder un bout de terrain pour le Groupe Lacasse, puisque nos opérations ont toujours été rentables avec lui. C’est avec lui que nous sommes venus au monde et que nous avons acquis la machinerie, etc. Pour l’instant, je ne retirerais aucun avantage majeur à l’écarter complètement pour fabriquer autre chose. J’ignore où cela finira. J’ignore aussi ce que deviendra le secteur dans lequel nous nous lançons. Actuellement, les meubles de condominium et de foyers pour personnes âgées représentent 25 % de mon chiffre d’affaires. J’ai encore 75 % de mes activités de production chez Lacasse. »

46Dans les années à venir, Patrick Lacasse aimerait augmenter la part que représentent les contrats externes dans son chiffre d’affaires pour ne consacrer que 40 % ou moins de sa production au Groupe Lacasse. Pour mieux comprendre ce revirement, il ne faut pas uniquement s’arrêter à la volonté de ce dernier de réduire la vulnérabilité de son entreprise par rapport à son principal donneur d’ordres, il faut également regarder le système Lacasse conçu et mis en place par Guy Lacasse, l’artisan de ce système. Comme c’est le cas de toute entreprise, ce système connaît des cycles et certaines faiblesses.

47Comme Patrick Lacasse, certains sous-traitants ont décidé de s’adresser à des clientèles externes, tout en continuant d’échanger mutuellement en réseau des services, des informations et du savoir-faire avec le Groupe Lacasse. Il s’agit pour ces sous-traitants de diminuer leur dépendance envers une seule entreprise. D’autres, moins nombreux, ont tout simplement préféré se retirer de ce réseau pour voler de leurs propres ailes.

48Dans ce malentendu, il semble que la relation d’affaires, vieille de près de deux décennies entre le Groupe et ses sous-traitants a besoin d’une sérieuse mise à jour. En effet, le Groupe veut toujours continuer à contrôler les activités des sous-traitants mais, d’autre part, les sous-traitants se sentent de plus en plus piégés, voire captifs d’un système qui, selon eux, ne fonctionne pas à leur avantage et ils veulent pouvoir considérer le Groupe Lacasse comme un client parmi d’autres.

LE SYSTÈME LACASSE : UN SY5TÈME DE SOUS-TRAITANCE OU D’ESSAIMAGE ?

UN DÉPART PAR LA SOUS-TRAITANCE AU GROUPE LACASSE

49Lorsqu’en 1978, Guy Lacasse achète une terre de 100 arpents à Saint-Pie-de-Bagot pour y construire un parc industriel privé, il n’a pas d’autre rêve que d’en faire une grappe industrielle7 qui reproduirait, à peu de choses près, les modèles allemand et italien de l’entreprise-réseau, et fonctionnerait selon le principe du « juste-à-temps » avec des PME sous-traitantes. Lors d’un voyage d’affaires en Europe, l’année précédente, alors qu’il visite des usines de fabrication de meubles en plastique stratifié en Allemagne, en Belgique, en France et en Italie, il est séduit par ce modèle. Il y voit une application concrète d’un concept d’usines de production à valeur ajoutée que le discours politico-économique du Québec véhicule à cette époque mais qui, jusque-là, était demeuré vague et abstrait dans son esprit.

50Tout en gardant en tête l’image globale du système qu’il veut mettre en place et qui doit l’aider à réaliser ses ambitions qui sont de faire de son entreprise un géant mondial dans son secteur, et de Saint-Pie « la capitale du meuble en Amérique du Nord », Guy Lacasse fait preuve d’ingéniosité et d’engagement profond à plusieurs égards. Ainsi, pour assurer un accès facile à son parc, en 1978, il convainc le gouvernement de terminer la construction de la route 235 qui relie le parc à Saint-Hyacinthe et, par conséquent, à la route transcanadienne. De plus, Guy Lacasse paie une part importante des coûts engagés par la municipalité de Saint-Pie pour aménager les routes, les égouts et installer des lampadaires ; le tout servant à améliorer la qualité de vie des habitants, le développement du village et, par ricochet, celui du parc industriel.

51Dans la conception de son système de sous-traitance, Guy Lacasse veut aller au-delà des soutiens techniques et de gestion généralement accordés par les donneurs d’ordres à leurs fournisseurs/sous-traitants. Ainsi, il conçoit l’ossature de son système au moyen de plates-formes sur lesquelles il peut continuellement greffer des atouts originaux qui répondent aux besoins des entrepreneurs en phase de démarrage. Il imagine et offre à ces derniers des avantages qu’ils trouveraient difficilement ailleurs.

52C’est également de cette façon qu’il les convainc de venir s’installer près de lui, dans son village, pour faire affaires avec ou sans lui. Dans cette perspective, ses premiers projets de construction dans le parc industriel sont destinés à la mise en place d’infrastructures adéquates à la production et à l’habitation. Patrick Lacasse, le pionnier de la sous-traitance chez Lacasse, est le témoin oculaire des premiers moments de gestation et de rodage de ce qu’on appellera le « système Lacasse ». Au fil du temps, il demeure toujours présent. Il suit de près l’évolution des choses. Il connaît bien les moments de grandeur et de misère de ce système :

Guy s’est battu assez fort pour construire et enrichir le parc industriel à Saint-Pie. Mon père désirait également acheter des terrains ici pour bâtir une écurie et une piste de course. Voyant cela, Guy l’a devancé et a acheté du même cultivateur tous les terrains en vue de réaliser sa passion : son parc industriel. C’est rare de voir un parc industriel dans un petit village comme Saint-Pie.
Au début, Guy construisait des bâtisses au hasard, espérant qu’un jour quelqu’un s’y intéresserait. Son idée a toujours été de faire grossir son parc industriel et d’amener les fournisseurs dans son village afin qu’ils soient le plus près possible de son entreprise. C’était, en fait, une bonne idée.
Lorsque j’ai déménagé dans la bâtisse actuelle en 1987, je l’ai acquise tout de suite. Je lui ai dit : « Je ne la louerai pas, car je suis en affaires pour longtemps. » Il était assez content. E m’a fait une offre et nous avons négocié. La bâtisse coûtait une centaine de milliers de dollars. Mon père connaissait la valeur du terrain et de la bâtisse. Le terrain n’avait pas coûté réellement cher à Guy. Il ne faisait pas énormément d’argent avec la bâtisse mais il se rattrapait avec le terrain. Si nous achetions le terrain au prix de M. Tout le Monde et que nous regardions le coût de la bâtisse, c’était correct. Guy ne faisait pas un énorme profit. Mon père a endossé une partie de l’emprunt à la banque.

53En somme, au début des années 1980, le parc industriel ne dispose que d’un minimum de structures pour accueillir son premier sous-traitant. Le système Lacasse en est encore à ses premiers balbutiements. Par contre, dès 1988, il passe à sa vitesse de croisière et les premières entreprises essaimées, issues du Groupe Lacasse, intègrent le système, de même que d’autres sous-traitants. La confiance et d’autres types de soutiens se greffent de façon cumulative à la plate-forme du système Lacasse, débouchant sur une relation synergique mutuellement bénéfique aux différents partenaires.

DE LA SOUS-TRAITANCE À L’ESSAIMAGE

54De 1980 à 1987, le Groupe Lacasse négocie et signe des accords stratégiques avec d’autres entreprises de son secteur, comme Raynor Marketing et Panval, ainsi qu’avec une importante société québécoise de financement, la Société d’investissement Desjardins (SID). Ses objectifs sont, d’une part, de s’appuyer sur ces partenaires pour contrôler ses marchés en amont et en aval et, d’autre part, de se doter de capacités organisationnelles plus grandes, comme une usine de production ultramoderne fonctionnant en réseau avec des PME satellites et selon le principe du « juste-à-temps ».

55Muni de ces ressources d’appui, le Groupe Lacasse constate également que la demande ne cesse d’augmenter dans le créneau du mobilier de bureau. Il décide de s’y concentrer et se départit de sa division des meubles de machines à coudre qui est à l’origine même de l’entreprise. Guy Lacasse, dont le souci a toujours été de créer des entreprises à Saint-Pie, encourage l’un de ses employés de la première heure devenu contremaître, Lucien Ravenelle, à lancer une entreprise à son compte pour continuer l’exploitation de cette division. Afin de l’aider à démarrer, on transfère même une partie de la machinerie, qu’il n’a pas à payer, dans les prémisses de la nouvelle entreprise.

56Le Groupe Lacasse accouche d’un deuxième entrepreneur essaimé, Alain Couture, propriétaire-dirigeant de Multipièces Alain. Contremaître au Groupe Lacasse depuis 1961, Alain Couture crée, en 1988, son entreprise qui fabrique des tiroirs pour Lacasse. C’est Guy qui l’a encouragé et lui a même offert de louer une bâtisse et de garantir son prêt bancaire. Alain Couture et son associé Paul Leclerc de Création Meubles ainsi que Pierre Croteau de Procar sont d’autres entrepreneurs que le Groupe Lacasse a essaimés. Ils ont, comme d’autres essaimés et sous-traitants, bénéficié de l’appui de Guy Lacasse qui leur a offert la logistique, l’aide financière nécessaire, les conseils techniques, les transferts de savoir-faire ou le coaching pendant et après le démarrage de leurs entreprises. Patrick Lacasse en témoigne :

Pour m’aider, Lacasse m’avançait l’argent pour acheter la matière première au complet chez lui. Négocier les volumes et les taux auraient exigé que j’aie quelqu’un dans le bureau pour s’en occuper. Pour couvrir le temps que les employés prenaient pour négocier les achats de matières premières, je donnais environ 2 % de plus à Lacasse. En contrepartie, j’achetais toute ma mélamine chez lui et lui revendais, ensuite, les produits à la pièce puisqu’il fonctionnait avec une liste de prix. Nous avions la possibilité de payer moins cher la matière première chez Lacasse que si nous l’achetions directement de l’usine du manufacturier.
Un autre avantage de la sous-traitance et de l’essaimage chez Lacasse est le soutien que tu reçois dans le transfert des connaissances et de l’expertise dans la pratique des affaires et dans la façon de gérer une entreprise ; ça t’apprend à marcher et à comprendre les besoins de l’entreprise. Ça te procure de bonnes bases et une certaine sécurité personnelle. Autant de choses que tu n’acquerrais pas facilement si tu te lançais seul en affaires.

57Le système Lacasse n’est cependant pas une organisation philanthropique. Le fait d’être propriétaire de la quasi-totalité des infrastructures du parc industriel et d’être à proximité de ses sous-traitants lui confère un ensemble d’avantages sous formes de rendements sur investissements, d’économie de coûts de transport et d’inventaire ainsi que d’un meilleur contrôle de la qualité. Guy Lacasse est clair à ce sujet lorsqu’il dit « n’avoir pas fait de l’essaimage ni de la sous-traitance pour des prières8 ». Il ajoute :

Par le passé, j’ai investi dans quelques entreprises sous-traitantes mais je ne veux plus le faire même si je continue à investir dans la bâtisse et dans l’équipement pour les dépanner. Je loue la bâtisse 3 S le pied carré, avec un bail de cinq ans. Ils peuvent aussi acheter la bâtisse. J’augmente chaque année s’ils réussissent, afin de faire une moyenne de 4 $. Je ne réalise pas un gros profit. Je fais ça pour l’argent, mais c’est aussi une satisfaction de succès9.
Je n’ai pas à m’occuper du produit, ni à y investir de l’argent. Comme mes sous-traitants sont installés dans le parc industriel, ils gardent les stocks et j’évite les coûts de transport. Le développement est plus efficace avec un voisin. De plus, avec un fournisseur de Toronto situé à 335 kilomètres d’ici, il devient difficile d’obtenir une meilleure qualité. Ici, mon personnel au contrôle de la qualité effectue des visites régulières chez les sous-traitants. La facilité de développer un produit entre aussi en ligne de compte, puisque nous réalisons la recherche avec l’ingénieur de Tuba, par exemple, en l’espace de peu de temps10. »

58Guy Lacasse a peut-être un peu trop veillé à ses intérêts dans ce système et il a fini par dilapider une partie du capital de confiance que lui accordaient ses sous-traitants. Les marges à partir desquelles ces derniers peuvent travailler lorsqu’ils agissent comme sous-traitants pour Lacasse sont en effet très minces. Ils semblent tous intéressés à diversifier leurs activités de sorte à devenir moins dépendants du Groupe Lacasse. Ces diversifications peuvent cependant servir le Groupe Lacasse à maintenir son avantage concurrentiel. En effet, les marges accrues qu’ils obtiennent en travaillant pour d’autres ou en développant leurs propres produits permettent aux essaimés de renouveler leurs équipements et de hausser les types de technologies utilisées pour la fabrication. De plus, cela leur permet d’augmenter leurs sources d’informations et d’apprentissages et d’être beaucoup mieux informés de ce qui se passe dans les marchés de leurs secteurs d’activité.

DE L’ENTHOUSIASME DES DÉBUTS AUX TENSIONS ENTRE ESSAIMANT ET ESSAIMES

59Plusieurs essaimes estiment que Guy Lacasse est trop exigeant que ce soit pour les coûts à payer en retour de ses différents services, pour les prix des composants ou pour les produits finis que le Groupe fournit.

60Des essaimés/sous-traitants reprochent à Guy Lacasse de manquer de transparence sur ses marges bénéficiaires. Ils déplorent aussi son entêtement à maintenir certaines règles du jeu et à en ajouter d’autres à son avantage. Comme on le voit, l’argent est le nerf de cette guerre :

C’est une petite bataille lorsqu’il s’agit d’aller chercher quelques sous dans les poches de Guy. Il devient très vite radical. Il est difficile d’approche, surtout lorsque nous voulons tirer la couverture de notre côté. Il ne déroge pas. Il ne donne pas facilement. Il a toujours rêvé de posséder ce qu’il a actuellement avec des sous-traitants.
Au début, il nous faisait croire que nous étions limités à vie à gagner un certain salaire. Comme nous ne prenions pas assez de risques, il limitait un peu notre salaire. Guy me disait que Bombardier contrôlait les sous-traitants en leur demandant de voir leur bilan une fois par an. Il voulait procéder ainsi, mais je lui ai dit : « Jamais, c’est personnel. Le jour où je vous offrirai le mien, c’est parce que vous m’aurez offert le vôtre en premier. » Je me suis battu longtemps contre ça. Il n’a jamais vu nos chiffres. Quand je lis le bilan chez mon comptable, je le passe tout de suite dans le déchiqueteur. Je ne le garde pas pour être certain qu’aucune page ne se perde.
Son comptable ne se trompe pas beaucoup de 2 à 3 %. Il connaît nos achats de matières premières. Quand je fabriquais entièrement pour eux, il connaissait notre marge bénéficiaire. Je pouvais jouer un peu, mais tu n’apprends pas à un singe à faire des grimaces. Aujourd’hui, notre part de marché externe peut le mêler un peu puisqu’il n’y connaît rien. Pour le réconforter, j’ai dit à Guy : « Maintenant, je suis un peu autonome. Je vais continuer d’acheter ma matière première chez vous. Vous pouvez alors jouer avec des rabais de volume et votre pourcentage. Je ne tiens pas à les avoir. Cela vous donne toujours la possibilité de négocier de meilleurs taux. »
Guy a souvent décidé des pourcentages de nos augmentations sans gêne. Ainsi, en nous vendant la matière première, il était en mesure de décider de ne pas augmenter nos prix pour les produits finis. Pourtant, il augmentait sans cesse les prix des matières premières. C’était incompréhensible. Ce n’était pas normal et nous le lui avons dit à maintes reprises : « Si nous ne faisons pas d’argent, nous ne pourrons jamais acquérir de la nouvelle machinerie ni continuer à vous fournir des produits de qualité dans les meilleurs délais.
Guy a continué ainsi jusqu’à il y a deux ans, lorsque certains sous-traitants ont démissionné. Je suis allé le voir et je lui ai dit : « Moi, je ne peux plus travailler pour faire trois ou quatre millions de chiffres d’affaires et 30 000 $ de profits. Je préfère travailler chez vous à 35 000 $ ou 40 000 $ par année et ne pas avoir les problèmes de gestion du personnel et d’investissement. » Il a fallu quasiment que Guy aille voir les bilans de certains d’entre nous pour s’assurer que nous lui disions la vérité. Il voulait voir le fond et il l’a finalement vu.

61Les relations entre le Groupe Lacasse et ses entreprises satellites sont en forte mutation depuis les dernières années. La majorité des sous-traitants ont cessé de croire, comme au début de l’aventure, que ce système pourrait vraiment les aider à réaliser leur rêve d’entrepreneur. Sans vouloir sortir totalement du système, certains, suivant l’exemple de Patrick Lacasse, ont choisi d’aller chercher une clientèle externe. D’autres, comme Mario Trépanier, propriétaire de Entreprise TM, ou Pierre Turgeon, propriétaire de ComPoint, ont décidé de ne plus faire affaires avec le Groupe Lacasse. Toujours installés dans le parc industriel, ils sont maintenant de simples locataires de services essentiels à leurs activités de production.

62Dans tous ces cas, il semble que la volonté d’indépendance lié à l’esprit d’entreprise se soit exprimée chez des sous-traitants qui se sentaient captifs du système de leur donneur d’ordres. Guy Lacasse a probablement pris conscience des frictions et qu’il devait désormais laisser son système ouvert, quitte à trouver d’autres soupapes de sécurité :

« À la suite des récentes crises, Guy a peut-être compris qu’il ne devait plus exiger l’exclusivité de ses sous-traitants. Dernièrement, il nous a dit de ne pas nous gêner pour obtenir du travail ailleurs. Cependant, pour être moins vulnérable par rapport à ses sous-traitants, il a procédé à de nouveaux aménagements et investissements dans son usine. Il a acquis des pieds carrés de surface, ce qui lui a procuré un peu plus de flexibilité. Il a agrandi des postes de travail et acheté de nouvelles machines qui lui permettent d’aller chercher un peu plus de volume. De temps à autre, il peut se passer des sous-traitants en faisant fonctionner son usine au maximum. Mais je ne crois pas qu’il puisse devenir complètement indépendant. Il doit garder quelques sous-traitants, comme porte de sortie, sinon il risque de perdre des clients non satisfaits.

63Guy Lacasse pense que ses actions sont cohérentes avec sa philosophie des affaires. Il conçoit que c’est de bonne guerre d’être le plus fort dans son secteur d’activité et de tirer profit de presque toutes les occasions d’affaires qui se présentent. C’est pourquoi il n’hésite pas, dans certaines occasions, à racheter à ses sous-traitants/essaimés les entreprises qu’il avait aidé à créer mais qui ont fait faillite faute d’une gestion prudente et intelligente. Le secteur du meuble de bureau en est un où la concurrence est très forte sur les prix. Pour conserver sa place dans le marché et pour l’agrandir, il faut pouvoir offrir des prix très compétitifs. La sous-traitance est une des façons qui a permis au groupe de le faire. Mais combien de temps réussira-t-on à maintenir ce système, d’autant plus que plus de 95 % de l’entreprise a été vendue au groupe américain Haworth au printemps 2000.

64Guy Lacasse est indifférent à l’idée qu’on se fait de lui et de son goût pour le profit. Toutefois, il est beaucoup plus émotif face à ce qu’il considère comme de l’ingratitude de la part de ses sous-traitants :

Ce qui me fait de la peine, c’est le peu de reconnaissance des gens. Seulement un ou deux d’entre eux sont venus me donner la main et me remercier. Ils réussissent, mais ils vous diront que je suis un money maker. Ce qui est un peu vrai11.

65Indépendamment de la façon dont on voit les résultats de Guy Lacasse dans son parc privé et dans son village et peu importe l’évaluation qu’on peut faire de la manière suivant laquelle il y parvient, le fait est qu’il a défini ses propres critères comme individu et comme entrepreneur, en puisant très profondément dans ses expériences de vie et d’affaires. Sans vouloir se battre continuellement contre les préjugés et les fausses perceptions des uns et des autres, il préfère s’identifier aux qualités de l’individualité et de l’indépendance personnelle. Il continue de travailler et de nourrir beaucoup d’optimisme pour l’avenir du Groupe Lacasse, celui du parc industriel ainsi que celui du système Lacasse de sous-traitance et d’essaimage.

PATRICK LACASSE, PARTIMEUBLE ET L’AVENIR

66Comme individu et entrepreneur, Patrick Lacasse a aussi ses propres valeurs et ses repères personnels qui témoignent, à leur façon, de ses expériences et de son optimisme face à l’avenir. Dans la trentaine avancée, Patrick Lacasse trouve toujours très excitantes ses expériences d’entrepreneur. Il est cependant un adepte inconditionnel du ressourcement et de l’apprentissage continus. Cela se comprend bien lorsqu’on sait que son credo est l’équilibre travail-famille :

Je ne possède pas une grosse entreprise, mais je suis heureux. Mon père ne nous a jamais mis de côté. Il arrivait tard les jours de semaine, mais il a toujours été présent pour nous les fins de semaine. Je ne veux pas faire manquer cela à ma fille de cinq ans. Ce serait trop facile de se laisser entraîner dans le système et de travailler entre 12 et 15 heures par jour et d’être absent les fins de semaine, mais je ne serais pas heureux.
Je converse régulièrement avec mon père. D’après ce que je comprends aujourd’hui de la vie, il faut être heureux dans ce qu’on fait. Qu’est-ce que ça donne de réaliser 400 millions de dollars de chiffre d’affaires si ça te pousse à toujours t’exclure du côté social et à devenir une machine ? Si tu te brûles par les deux bouts, tu en paieras le prix à un moment donné. Je touche du bois. Je n’ai pas manqué de grand-chose dans la vie. J’ai eu de très bons parents. J’ai une petite entreprise dans laquelle je m’épanouis et j’ai le contact humain.
Le monde des affaires d’aujourd’hui diffère de celui d’il y a 30 ans. Il est beaucoup plus exigeant sur le plan financier et vis-à-vis du stress. Il ne s’agit plus de posséder une entreprise, il faut s’y investir énormément. Mais pour celui qui en a envie, ça reste toujours une belle expérience. Je veux prendre le temps d’élever ma famille et je veux garder la santé.

67Patrick Lacasse demeure respectueux des valeurs familiales tout en étant fortement axé sur la croissance de son entreprise. Même lorsqu’il dirige cette dernière, il ne cesse de prôner ces valeurs dans ses rapports avec ses employés, car ceux-ci semblent faire partie de sa grande famille. Ainsi, il est convaincu que « tout linge sale ne peut se laver qu’en famille » :

Mon entreprise n’est pas syndiquée parce que je suis à l’écoute de mes employés. Même si le nombre d’employés augmente, nous sommes encore une petite équipe, mais c’est plus difficile de garder l’esprit de famille. Il y a deux ou trois clans, mais c’est normal. Je leur ai toujours dit qu’opter pour un syndicat pour régler nos différends, c’est comme mettre quelqu’un entre toi et ta femme pour décider. Je ne crois pas que ce soit là la meilleure recette. Ma porte est toujours ouverte et mon numéro de téléphone n’est pas confidentiel. J’essaie d’être le plus ouvert possible. J’aime faire plaisir et être à l’écoute de mes employés. Il fout toutefois des limites puisque je vise à faire des sous. Je ne le cache pas.

68Au fil des ans, ses efforts à la direction de Partimeuble ont toujours porté fruits. En l’an 2000, son entreprise dispose d’une flexibilité accrue grâce à des équipements modernes, une usine qui fonctionne sur trois quarts de travail, cinq jours par semaine et un personnel dévoué. Partimeuble s’est bâti une solide expertise dans son secteur et peut répondre plus efficacement qu’auparavant aux exigences de plusieurs clients tant sur le volume, la variété et la qualité des produits finis ou des composants que sur les délais de livraison. Sa santé financière est bonne. Patrick Lacasse en est le seul actionnaire. Il a presque toujours développé son entreprise par ses propres moyens et a même été essaimant, à l’occasion :

Quand je me suis lancé dans les meubles d’informatique, j’ai offert le département des côtés de tiroirs à la première personne que j’avais embauchée, mon copain de longue date. Il l’a dirigé et l’a revendu à un employé de Guy pour aller travailler ailleurs. Lorsqu’il est devenu chômeur il y a deux ans, je l’ai réengagé.

69Patrick Lacasse n’est pas arrivé à ces résultats tout seul. De son propre aveu, la contribution de collaborateurs loyaux et engagés dans l’entreprise y a été pour beaucoup :

Sans être prétentieux, je suis le meilleur sous-traitant de Lacasse, car je me suis bâti une équipe sérieuse et solide. Pour preuve, à quelques reprises, Lacasse nous a envoyé beaucoup de choses, car mes employés solutionnaient des problèmes que son personnel n’arrivait pas à solutionner. Mon contremaître est exceptionnel. Il travaille comme s’il s’agissait de son entreprise. Tout comme moi, il a un sens humain, mais il faut que le travail se hisse aussi, j’imagine qu’il est très respecté. J’essaie de m’entourer de gens avec lesquels je ne suis pas obligé de me battre, mais je fais de petits tests de temps en temps. Nous n’avons pas peur de dire à un employé : « C’est beau, nous sommes contents de toi. » L’équipe se sent ainsi valorisée même si nous ne sommes pas parfaits. En fait, nous n’avons pas d’autre choix que de travailler avec ce style d’encouragement.

70Parmi ses apprentissages, Patrick Lacasse a compris que, si l’exercice de la direction d’une entreprise peut être exaltant, il peut aussi être difficile à certains égards. Ainsi, il avoue :

Le plus difficile est de gérer non pas nécessairement des employés, mais la relation patronale avec eux. Par exemple, lorsque mon contremaître me confie qu’il trouve difficile qu’un employé lui confie de ne pas avoir de vie familiale parce qu’il ne voit pas ses enfants, je l’approuve. Nous leur avons déjà offert la possibilité d’alterner le quart de nuit et de soir, mais ils nous ont avoué qu’ils auraient de la difficulté à se faire à un roulement de vie différent étant donné que leur sommeil s’est habitué à un certain rythme. Ceux de nuit se sont ainsi fait un train de vie avec lequel ils composent. Je suis quelqu’un d’émotif Mais je n’ai plus de place le jour. Je ne peux plus agrandir sur ce terrain, ni construire ailleurs pour le moment, car il s’agit d’un gros mouvement et d’une grosse somme d’argent.
En ce moment [septembre 1999], je ne suis pas en mesure de décider de ce qui est mieux pour l’avenir de mon entreprise, car je ne sais pas si les frères Lacasse vont vendre leur entreprise ou la léguer aux enfants.

71Patrick Lacasse trouve qu’il lui est difficile de décider de l’avenir de son entreprise tant que son père et ses deux oncles n’auront pas décidé de ce qu’ils veulent faire. Réal et Réjean, les deux frères de Guy, qui sont copropriétaires du Groupe Lacasse voudraient vendre et prendre leur retraite. Même Guy Lacasse, maintenant au début de la soixantaine, envisage d’arrêter partiellement. Les trois frères étaient presque tous d’accord pour que la relève soit familiale. Ainsi, Patrick et Robin (fils de Guy) et Hugo (fils de Réjean) étaient les trois prétendants au poste de président que le conseil de famille avait choisis, mais les frères ont décidé de vendre à une entreprise familiale américaine qui ressemble à la leur. Guy conserve la direction, mais ses frères ont décidé de prendre leur retraite.

72Au moment des entrevues pour la rédaction de ce cas, soit entre avril et septembre 1999, Patrick Lacasse voyait l’avenir de son entreprise avec beaucoup d’ambiguïté. En effet, s’il s’engageait dans un projet d’agrandissement et que, peu de temps après, il se voyait confier la haute direction du Groupe Lacasse, il se retrouverait dans une situation embarrassante. D’un autre côté, même s’il n’entreprenait pas de projet, compte tenu des changements intervenus dans les relations entre Partimeuble et le Groupe, l’ambiguïté persisterait, ce qui le forçait à faire davantage preuve de prudence et de clairvoyance quant au positionnement de son entreprise par rapport aux nouveaux créneaux de marchés dans lesquels il voulait se positionner.

73Depuis la vente des actions de l’entreprise à Haworth, une entreprise américaine basée à Holland, au Michigan, l’embarras de Patrick Lacasse face à l’avenir de son entreprise semble en partie résolu. En effet, il a été convenu avec les nouveaux partenaires que Robin Lacasse pourrait succéder à son père Guy à la tête du Groupe, lorsque ce denier prendra sa retraite à l’âge de 65 ans. Ses deux frères ont vendu la totalité de leurs actions et pris leur retraite lors de la transaction. Avec une nouvelle direction, et compte tenu du récent penchant de Guy Lacasse pour une entreprise un peu plus centralisée afin de réduire sa vulnérabilité par rapport aux sous-traitants, quelle sera l’évolution du système Lacasse et la place que pourra y occuper Partimeuble ? Autrement dit, vers quel pôle le système Lacasse penchera-t-il, la sous-traitance, l’essaimage ou une autre approche ?

74Depuis que son père n’a plus aucune participation dans le Groupe, Patrick Lacasse doit désormais penser à protéger ses propres intérêts, car il est toujours en relation d’affaires avec le Groupe. Comment envisager son avenir et celui de son entreprise ? Comme entrepreneur sous-traitant ou comme entrepreneur essaimé rattaché au Groupe Lacasse et à Haworth ? Comme entrepreneur indépendant ?