Voies civiques
p. 192-203
Texte intégral
AVINGUDA GAUDI
PROJET COMMENCÉ EN SEPTEMBRE 1984 ET ACHEVE EN SEPTEMBRE 1985
ARCHITECTE : M. QUINTANA
SCULPTURE : A. FENOSA
DISTRICT : EIXAMPLE

État antérieur

Vue aérienne
SITUATION URBAINE
1L’avenue Gaudi est une voie diagonale qui relie deux bâtiments monumentaux, construits par des architectes barcelonais célèbres : l’église de la Sagrada Familia, de Gaudí, et l’Hôpital Sant Pau, de Lluis Domenèch i Montaner, imposant ensemble de bâtiments qui occupe un méga-îlot entier. Cette avenue a été tracée au début du XXe siècle, suite aux propositions du Plan Jaussely de 1905.
2A cette époque, la bourgeoisie réclamait une hiérarchisation de la trame orthogonale de Cerdà, jugée trop monotone et régulière, par le biais de voies civiques monumentales reliant des édifices de prestige, pour créer des perspectives visuelles. Lieux de représentation du mode de vie bourgeois, ces voies devaient avoir un caractère de promenade. Malgré l’origine de son tracé, l’avenue Gaudí n'a jamais rempli ce rôle et manquait d'identité ; avec l’augmentation du trafic, ses intersections avec la grille de l’Eixample créaient des problèmes de fluidité de la circulation, par ailleurs assez limitée dans la zone adjacente.
CONCEPTION
3La transformation de l’avenue Gaudi en voie civique dote une partie densément peuplée de l’Eixample d’un espace public attrayant. Une large promenade occupe le centre de lasection ; ses intersections ont été réaménagées en petites places carrées, et la circulation réorganisée de manière à ne pas couper la promenade. Le long de celle-ci, deux voies de services, à circulation réduite, desservent les quatre tronçons de l’avenue, dont les bâtiments accueillent au rez-de-chaussée des services et usages commerciaux complémentaires à l’usage résidentiel. La promenade est très animée et fréquentée par les usagers et les flâneurs.
4Un mobilier urbain du début du siècle a été récupéré et ponctue la promenade (colonneslampadaires de l’architecte Pere Falquès). Il dialogue avec des structures légères modernes, de treillis métallique, des bancs sobres et un alignement de sphères de ciment, éléments que l’on retrouve de plus en plus à Barcelone et dont l’inspiration se trouve au parc Güell, réalisé par Gaudi. Un stationnement souterrain complète le projet.

Mobilier urbain

Vue vers la Sagrada Familia

Promenade centrale, avec les lampadaires de Falquès (XIXe siècle) réhabilités

Vue vers l'Hôpital Sont Pau
MOLL DE LA FUSTA
PROJET COMMENCÉ EN 1982 ET ACHEVÉ EN 1987
ARCHITECTE : M. DE SOLÀ-MORALES
SCULPTEUR : R. LICHTENSTEIN
DISTRICT : CIUTAT VELLA

Vue aérienne avant travaux
SITUATION URBAINE
5Ce grand projet fait partie de deux opérations plus vastes. Il est à la fois un tronçon de la voie de ceinture du littoral, aménagé comme voie civique et promenade, et un élément du projet de remodelage d'une ancienne partie du port en « port urbain », en continuité directe avec la Barceioneta et le nouveau front de mer du Village Olympique.
6L’emplacement est depuis des siècles un lieu privilégié de promenade des Barcelonais. Au XVIe siècle déjà, la Vieille Ville a connu une croissance vers la mer, à partir du noyau gothique. Le roi Charles Ier est le bâtisseur de la deuxième muraille de Barcelone, sur laquelle a été construite la première promenade (« paseo »), qui permettait d'observer tout le port du haut d’un balcon de cinq à six mètres au-dessus du niveau de l’eau. La muraille et les façades des bâtiments longeant la rue Ample (parallèle au front de mer) ont défini la limite entre la ville et l’eau et leur association repré sente une image très forte de l’identité de la ville, jusqu’à la démolition des murailles, au XIXe siècle.
7A l’époque de l’Extension de Cerdà, qui fut aussi marquée par les exigences nouvelles liées à l’industrialisation, la relation du port et de la ville change profondément, le port s’organisant désormais comme entité indépendante : les jetées se spécialisent, des bâtiments nouveaux sont construits le long du front de mer, qui constituent désormais une barrière entre le tissu urbain et l’eau ; ainsi les citadins perdent le contact visuel avec la mer. De grands entrepôts sont construits le long du Passeig de Colom, tracé à l’époque de l’exposition de 1888. La promenade conserve alors un caractère civique, elle est plantée de palmiers et reste un lieu de promenade et de parades.
8Cependant le poids de la grande circulation urbaine de transit s’y fait bientôt sentir, suite à l’aménagement d'autres voies importantes qui relient désormais le centre historique aux quartiers extérieurs. Le Passeig de Colom supportera non seulement la circulation entre les Ramblas et la Via Laietana, mais aussi celle entre le boulevard Parallèle et la Ciutadella, ainsi que la charge provenant des récentes Rondos, construites sur le tracé de la troisième muraille. Celles-ci constituent ainsi avec le Passeig de Colom un grand anneau de circulation en contact avec les zones extérieures.

Coupe

Passeig de Colom, vue vers l’ouest
9Avant sa « réurbanisation », le Passeig de Colom était pratiquement devenu une autoroute à douze voies reliant l’est et l’ouest du littoral métropolitain. Avec le déplacement progressif des activités du port vers l’ouest, dans la Zona Franco, la frange littorale a vu l’abandon puis la démolition des entrepôts, qui servaient ultimement comme dépôts de bois (d’où le nom Moll de la Fusta, « fusta » signifiant bois, en catalan). L'esplanade est restée déserte depuis le milieu des années 1970, mais était redevenue accessible. Les Barcelonais ont alors spontanément recommencé à se promener le long de ce grand espace ouvert, malgré l’absence d'aménagements.
CONCEPTION
10L’ensemble du projet du Moll de la Fusta se compose de trois sections parallèles à la mer : le Passeig de Colom, une terrasse surplombant la mer et le Moll de la Fusta proprement dit (appelé aussi Moll de Bosch i Alsina), l’esplanade longeant la mer. Entièrement construit sur des terrains publics (57,6 % appartenant à la Ville de Barcelone, 39,1 % au Port autonome et 3,3 % constituant une servitude de la compagnie de chemin de fer RENFE), il a impliqué la suppression de la voie ferrée, qui séparait précédemment le Passeig de Colom du Moll de la Fusta.

L’esplanade supérieure : voies centrales réservées au bus

Le pont-levis et la voie de desserte du port vus de la terrasse supérieure
11Deux objectifs devaient être réconciliés dans le projet : l’ouverture de la ville sur la mer, avec la création d’un grand espace public, et un réaménagement des voies de circulation qui ne constitue pas une barrière. La voirie devait résoudre à la fois les problèmes de circulation locale et permettre le passage de la voie de circulation rapide de la ceinture littorale.
12Le Passeig de Colom est traité comme une voie civique, qui relie comme auparavant le Parallèle (à l’ouest) et le Passeig Picasso (à l'est), aux limites de la Ciutat Vella. Il comporte six voies (trois dans chaque sens), encadrées par deux rangs de palmiers, dont certains ont été plantés il y a cent ans, sur le premier tracé. Ces voies passent de part et d’autre d’un espace central aligné sur le monument de Christophe Colomb (situé à l'extrémité ouest), où l’on retrouve les deux voies de bus ; cet espace central hérité de l’ancien boulevard — avec ses balustrades, ses bancs et ses lampadaires — est traité dans le style du début du siècle.
13La terrasse légèrement surélevée, adjacente au Passeig de Colom, a deux fonctions bien distinctes. Du niveau supérieur, conçu comme une esplanade-promenade, agrémentée de bancs de céramique colorée (dans la tradition de Gaudi), de pergolas et de petits kiosques (où des restaurants ont été aménagés en 1988), la vue s’offre sur la mer, le port et la Barceloneta, ainsi que sur l’esplanade en contrebas, à laquelle la terrasse est reliée par des passerelles rappelant la forme des structures métalliques qu’on voit dans le port. Au niveau inférieur sont logés un stationnement souterrain et six voies rapides ; quatre vies sont couvertes par l’esplanade, deux sont à ciel ouvert et desservent exclusivement le port Avec les voies du niveau supérieur, l’ensemble est constitué de quatorze voies. Dans le projet plus vaste du Port urbain, des connections sont aménagées avec le Secteur Oriental de la Ciutat Vella et la Barceloneta (prolongement des voies et grande place du Portai de Mar).

Vue de la terrasse supérieure vers la Barceloneta
14Quant à la vaste esplanade au bord de l’eau (le Moll de la Fusta proprement dit), elle est plantée de manière régulière de deux espèces de palmiers, l’une haute et élancée, l’autre basse et touffue. La plantation aligne plusieurs rangées (espacées de 17 mètres), offrant l’image d’un ordre global. Le mobilier est simple : trois types de lampadaires de style finXIXe siècle, et des bancs de bois regroupés. Le pavé existant de roches basaltiques a été nettoyé et rénové et l’herbe pousse au jointures. Le projet comporte également une série de sculptures, dont celle de Roy Lichtenstein, qui occupe une position stratégique à l'extrémité est du Passeig de Colom.

Vue aérienne d’ensemble : au premier plan, la sculpture monumentale de Roy Lichtenstein

Vue depuis le bord de l'eau vers le niveau supérieur
VIA JÚLIÀ
PROJET COMMENCÉ EN JANVIER 1985, TERMINÉ EN AOÛT 1986
ARCHITECTES : B. DE SOLA ET J.M. JULIÀ, SERVICE DES PROJETS URBAINS
SCULPTEURS : S. AGILAR ET A. ROSELLÓ
DISTRICT : NOU BARRIS

État antérieur avec l’emplacement de la Place F. Layret
SITUATION URBAINE
15Voie importante pour la structuration du district de Nou Barris, la Via Júlia est directement en relation avec les voies principales du réseau métropolitain de l’est barcelonais, faisant le lien entre l’avenue de Valldaura, à partir de la Place Uucmajor, et le tracé de la deuxième ceinture.
16La section très large de la Via Jûlia avait été planifiée dans les années 1960, dans la perspective d’un raccord aux futures voies métropolitaines. Ses chaussées étaient cependant séparées par une dénivellation assez importante, dans sa partie supérieure, et l’espace interstitiel était occupé par le stationnement des voitures.
17Dans la partie supérieure de la Via Jûlia, le tunnel du métro avait créé une barrière visuelle qui n'ajoutait rien à un paysage déjà assez désolé ; il ressortait de terre, à certains endroits, de 1,50 m au-dessus du niveau de la chaussée. Un autre problème technique requérait une solution d’ensemble ; il s’agissait d'unifier le système d’infrastructures (réseau d’acqueducs, de gaz et de l’éclairage public), en connectant les parties anciennes et nouvelles, dans un quartier où le développement s’était fait très rapidement.
CONCEPTION
18L’aménagement de la Via Jûlia comme « axe civique » a pris en compte ces problèmes d’ordre technique en les intégrant à la conception d’un espace public de rassemblement et de promenade, destiné à tout le quartier de Prosperitat et comportant deux tronçons d'égale importance. La section supérieure est divisée en trois parties :
- L’extrémité est de l’esplanade est occupée par une place de jeux. La rambla est ponctuée par une haute tour d’éclairage, oeuvre du sculpteur Antoni Roselló, qui surplombe le rond-point qui termine la Via Jûlia. Dans toute cette section, la chaussée nord est plus élevée que la chaussée sud et le raccord des rues se fait, pour les piétons, en traversant l’esplanade centrale et en empruntant une série d’escaliers qui rejoignent l’autre chaussée.
- Au milieu, une place couverte de treillis métallique peut accueillir diverses activités et rassemblements de quartier ; elle comprend aussi les sorties du métro.
- La troisième partie est traitée comme un jardin public bordé d’allées et de bancs ; juste avant son point de jonction avec le deuxième tronçon de la Via Júlia, cette section est marquée par une autre sculpture monumentale, élégante et aérienne, conçue par Sergio Aguilar.

Plan : Place Llucmajor (1) et les deux tronçons de la Via júlia (2 et 3).
19La section inférieure a été dessinée selon un autre principe. Plutôt que de maintenir une « rambla » centrale, les chaussées ont été séparées par une très belle lignée de hauts palmiers. L’espace récupéré au centre se reporte à la périphérie, permettant un élargissement considérable des trottoirs, qui accueillent maintenant de part et d’autre des voies de circulation des promenades plantées ; plusieurs terrasses de restaurants se sont installées le long de ces trottoirs et contribuent à l’achalandage et à l’animation du lieu.

Vue générale de la section supérieure de la Via Júlia

Coupe

La section inférieure de la Via jùlia

La tour d’illumination d’Antoni Roselló marque la fin de la Via jùlia

Jardin dans la section supérieure de la Via Julia

Partie couverte : espace de rassemblement

Le début de la section supérieure

« Aux nouveaux Catalans »
AVINGUDA RIO DE JANEIRO
PREMIÈRE PHASE, AU CROISEMENT DE L'AVENUE DE VALLDAURA, COMPLÉTÉE EN 1983
TRONÇON RELIANT L’AVENUE DE VALLDAURA À LA MERIDIANA RÉALISÉ EN 1987
ARCHITECTES : P. BARDAJI ET C. TEIXIDOR
SCULPTEUR : A, ROQUÉ
DISTRICT : NOU BARRIS

État antérieur
SITUATION URBAINE
20L’avenue Rio de Janeiro est un tronçon de la ceinture intérieure définie dans le plan de voirie métropolitaine. Après son raccordement à la Meridiana, elle passe le long du quartier Prosperitat et d’un « polygone » moderniste des années 1960. Les expropriations avaient depuis de nombreuses années laissé un vide important dans ce tissu passablement désarticulé.
CONCEPTION
21A l'occasion de la rédaction du plan de voirie métropolitaine, à la fin des années 1980, on a développé une approche qui cherche à conjuguer la résolution des problèmes de circulation avec des aménagements civiques et d’embellissement urbain, dans une perspective « néo-haussmanienne ».

Dénivellation entre les chaussées et aménagement de l'interstice
22L’avenue Rio de Janeiro est un bon exemple de ce type d’aménagement. Le site, comme celui de la Via Júlia, comporte une différence de niveau assez importante. On retrouve ici aussi deux chaussées à des niveaux différents. Mais la section centrale n'est pas traitée comme une rambla, sinon comme un espace de transition ; celui-ci forme une épine dorsale aménagée de manière « sculpturale », par des rampes, des escaliers, un mobilier urbain sobre et élégant Les deux extrémités de cet élément urbain sont marquées par les formes abstraites et monumentales des sculptures d’Agustí Roqué.
23L’avenue est bordée de très larges trottoirs, plantés de doubles rangées d’arbres. Le trottoir nord accueille plusieurs terrasses de petits restaurants ; il est aménagé en continuité avec les rues et les places appartenant aux trajets piétonniers du quartier de Prosperitat. Le trottoir sud unifie les accès aux blocs typiquement modernistes, implantés de manière indépendante de l’espace de la rue. L’alignement est renforcé par la présence d’une contreallée destinée au stationnement.
24Dans cette solution, la configuration d'ensemble de la voie permet une suture entre des tissus différents, tout en créant des espaces publics significatifs de part et d’autre des chaussées de circulation et une image urbaine forte.

Aménagement du trottoir nord

Aménagement du trottoir sud

Détail de l'interstice
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