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Paysages en perspective

 | 
Philippe Poullaouec-Gonidec
, 
Gérald Domon
, 
Sylvain Paquette

Deuxième partie. Paysages et infrastructures

Chapitre 7. Paysages et esthétique des pylônes

Caroline Gagnon

Texte intégral

  • 1 Des réseaux de pylônes.
  • 2 Riendeau, R., « Les autoroutes de l’énergie : une incision dans l’environnement », Forêt et conserv (...)

1Les projets d’implantation de lignes de transport d’énergie1 dans le territoire, tant au Québec, en Amérique du Nord qu’en Europe, préoccupent de plus en plus les citoyens parce que celles-ci affectent leur qualité de vie et la qualité du paysage. De même, les équipements des lignes de transport d’énergie sont considérés comme imposants et laids. Les considérations esthétiques concernant les équipements qui sont exprimées par les citoyens dans les différentes études de perception des lignes de transport figurent d’ailleurs parmi les préoccupations les plus importantes et constituent un frein majeur au développement de nouveaux projets de transport d’électricité. Ces préoccupations se manifestent de plus en plus clairement : l’équipement déforme, détruit, dégrade le paysage2.

2Les préoccupations esthétiques envers les projets de lignes de transport d’énergie s’articulent donc principalement autour d’un enjeu de paysage. Ce qui se traduit par l’expression sociale de réticences, voire de contestations majeures à l’égard de nouveaux projets de lignes. L’enjeu de paysage s’ouvre également sur l’appréciation des espaces quotidiens familiers, à laquelle participent activement les lignes de transport par leur présence importante dans le territoire québécois.

  • 3 Furby, L. et al., « Public Perceptions of Electric Power Transmission Lines », Journal of Environme (...)

3Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’enjeu de paysage concernant ces infrastructures ne s’articule pas seulement sur le plan de l’esthétique formelle. Il se mêle à différentes préoccupations sociales souvent occultées quand on considère l’esthétique : préoccupations écologiques, de santé, économiques, politiques, techniques, psychologiques. Pourtant, ces dimensions participent à l’articulation des préoccupations esthétiques qui dépassent largement les seuls aspects visuels. Ainsi, une infrastructure jugée à risque pour la santé et la sécurité humaine peut être considérée comme « laide » par les citoyens bien qu’elle soit formellement intéressante. De même, le caractère écologique d’une installation peut favoriser son appréciation positive sans que la forme de l’équipement soit modifiée. Le schéma de la page suivante (Figure 7.1), inspiré de la recension de Furby et al.3, dénombre les principaux aspects concernés par l’enjeu de paysage dans la problématique esthétique des lignes de transport d’énergie. À la fin des années 1980, Furby et al. avaient déjà proposé un cadre conceptuel regroupant les différents éléments de la problématique sociale d’acceptation des lignes de transport. Ils soulignaient déjà l’imbrication des différentes dimensions de la problématique et leur difficile appréhension autonome.

  • 4 Berleant, A., Living in the Landscape: Toward an Aesthetics of Environment, Lawrence (KS), Universi (...)

4Cette façon d’aborder l’enjeu de paysage dans la problématique esthétique des lignes de transport d’énergie opte pour une conception renouvelée de l’expérience esthétique du paysage en reconsidérant l’esthétique traditionnelle à la lumière des théories plus récentes qui ont été développées par l’esthétique environnementale et l’esthétique du quotidien4.

Figure 7.1 : Aspects de l’enjeu de paysage dans la problématique esthétique des lignes de transport d’énergie.

SUR LE PLAN THÉORIQUE

  • 5 Berleant, A., « Aesthetic Perception in Environmental Design », dans Jack, L. N. (dir.), Environmen (...)

5La discussion des rapports entre esthétique et paysage s’appuie essentiellement sur les travaux d’Arnold Berleant5. Sa caractérisation de l’expérience esthétique permet d’établir une définition du paysage plus adaptée à la problématique. Berleant détermine trois modèles : le modèle contemplatif privilégié de l’esthétique traditionnelle, le modèle actif et le modèle participatif.

  • Le modèle contemplatif s’inscrit dans la doctrine de la séparation et de la distance et met l’accent sur l’espace physique. Il s’appuie sur l’héritage du XVIIIe siècle et de la peinture du paysage. Cette théorie de l’esthétique est centrée sur l’objet-paysage et sur l’universalité du jugement esthétique.

    • 6 Dewey, J., Art as Experience, New York, Pedigree Book, [1934] 1980, 355 p.; Merleau-Ponty, M., Phén (...)

    Le modèle actif poursuit l’héritage de l’esthétique pragmatique de Dewey et de l’esthétique phénoménologique de Merleau-Ponty6. Le monde objectif se distingue du monde perçu. Il est toujours expériencié par un humain percevant. Cette théorie de l’expérience esthétique s’attarde à la manière de s’engager dans une expérience spatiale et non sur les façons de l’objectiver et de la conceptualiser. Elle est centrée sur le sujet.

    • 7 Cette définition reprend donc l’idée que le paysage renvoie à une relation entre une réalité physic (...)

    Le modèle participatif, qui nous intéresse particulièrement, conduit à une esthétique de l'engagement pris ici dans son sens anglo-saxon. L’expérience esthétique dérive d’une force continue, d’une relation réciproque entre l’environnement et l’humain. Ce modèle reconnaît, contrairement au modèle actif, que les caractéristiques de l’environnement affectent le sujet percevant, mais ces caractéristiques ne sont pleinement perceptibles que dans l’expérience « impliquée » de l’individu dans l’espace. Le modèle participatif renvoie donc à une conception médiane du paysage, entre le territoire réel et la réception esthétique chez un individu. Il pourrait en l’occurrence trouver une résonance dans la théorie de la médiance de Berque7.

  • 8 Berleant, 1988, op. cit., note 6, p. 87.

6À partir de ces trois modèles, Berleant distingue deux attitudes possibles face à l’espace : la distanciation (attitude désintéressée) et l’engagement (attitude impliquée). Ces modes de relation esthétique au territoire renvoient à deux manières de définir le paysage : le paysage panoramique où l’observateur est distancié de la scène à contempler, et le paysage participatif où l’observateur est impliqué dans l’espace. L’importance relative du visuel distingue ces deux définitions : « One is a predominately visual idea of landscape, which we can call the panoramic landscape ; the other, the more intimate, participatory landscape8. » La première définition s’inscrit dans la tradition de l’art. La seconde définition, sur laquelle ce texte repose, participe d’une reconsidération des fondements de l’esthétique qui se détache de l’art pour s’ancrer dans l’expérience de la nature et du quotidien.

  • 9 Tremblay, F. et M. Gariépy, « Acteurs et processus du projet de paysage », dans Poullaouec-Gonidec, (...)

7L’expérience esthétique du paysage apparaît alors comme une expérience polysensorielle, participante et investie par plusieurs dimensions humaines. Elle se situe spatialement et temporellement et n’est pas exclusivement visuelle. Le paysage devient, en ce sens, un construit social, collectif ou individuel découlant d’une appréciation esthétique du territoire, appréciation qui n’est pas passive mais qui s’enracine dans l’expérience esthétique du paysage par l’implication des aspects physiques, spatiaux, psychologiques, culturels, historiques et sociaux de cette relation. L’enjeu de paysage se caractérise alors par le pôle collectif de cette expérience comme un enjeu social par lequel le territoire est investi de sens et de valeurs par la population9. Il s’appuie sur les différentes expériences esthétiques du paysage que les individus peuvent éprouver, vivre et sentir.

  • 10 Pour en voir un exemple, se référer à la figure 7.2, plus loin dans le texte.
  • 11 Gagnon, C., « Perceptions actualisées des équipements et lignes de transport d’énergie », dans Find (...)
  • 12 Cette hypothèse est celle que soutient l’auteure dans son projet de recherche doctorale en cours.

8Ce texte s’attarde aux préoccupations paysagères, exprimées à travers les préoccupations esthétiques des citoyens concernant les lignes de transport d’énergie à très haute tension et leur présence sur le territoire. Il s’efforce de situer le rôle du design des équipements parmi ces préoccupations paysagères, celui-ci étant généralement considéré par les gestionnaires de projet comme une stratégie de prise en charge de l’enjeu de paysage et d’acceptation sociale des lignes de transport. L’appréciation esthétique des équipements est le concept-clé qui permet d’aborder la compréhension du rôle du design dans l’articulation de l’enjeu de paysage, l’appréciation étant modulée par la relation de l’équipement au territoire. Bien que la relation esthétique se déploie surtout dans l’expérience paysagère de l’équipement, elle s’alimente également de l’appréciation en soi du pylône, moins dans ses modalités expérientielles que symboliques, formelles, imaginaires, techniques, fonctionnelles et matérielles. L’appréciation esthétique de l’équipement se distingue ainsi de l’appréciation paysagère en ce sens qu’elle pourrait se soustraire des considérations paysagères et se centrer uniquement sur une appréciation artistique de l’objet. Toutefois, c’est à la lumière de la problématique sociale à laquelle se rattachent les considérations paysagères que l’appréciation esthétique des équipements s’appréhende avec le plus de pertinence. Elle demeure néanmoins concernée par les autres lectures possibles de l’équipement et implique ainsi tous les aspects qui interviennent dans la relation esthétique, au-delà de celles qui sont strictement concernées par le paysage et ses modalités. Par exemple, au-delà de son appréciation esthétique et de sa nature paysagère, l’équipement, comme le pylône classique en treillis10, évoque en soi le monde de l’électricité et l’univers industriel. Il est qualifié de structure imposante et mécanique qui rappelle les jeux de mécano tout en évoquant un certain rapport avec le corps. « C’est un géant de métal, un bonhomme d’acier, un éléphant, une colonne évasée, une tour métallique, un gros mécano ; le pylône treillis suscite autant de qualificatifs qui démontrent bien son caractère imposant voire agressant, son rapport symbolique et analogique au corps et sa nature industrielle11. » De même, il peut faire l’objet d’un regard artistique et devenir un sujet particulièrement intéressant si on le soustrait de son rapport au quotidien. Ainsi, dans l’articulation de l’enjeu de paysage, l’appréciation esthétique de l’équipement se déploie dans la rencontre de l’univers du pylône en soi avec l’espace dans lequel il est implanté et prend sens. C’est la réunion entre le monde de l’équipement et le paysage qui fait naître la relation dépréciative, d’où l’importance de l’enjeu de paysage au sein de la problématique esthétique12.

  • 13 Leclerc, A. et al., Accompagnement d’expertise en design industriel et en paysage : orientations po (...)
  • 14 Cette réflexion se poursuit dans le projet doctoral de l’auteure qui repose sur une démarche d’enqu (...)

9Cette réflexion est éclairée par trois projets de recherche centrés sur le design des pylônes à très haute tension, afin d’illustrer la pertinence de la question paysagère dans l’appréciation esthétique des équipements. Les deux premiers font suite à une collaboration entre la division TransÉnergie d’Hydro-Québec et la Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal. Ils visaient une révision des catalogues d’équipements par l’énoncé de critères de design mieux adaptés à la problématique paysagère13. La troisième recherche sur laquelle s’appuie plus particulièrement ce texte est le fruit d’un travail sur la question de l’appréciation esthétique des équipements de transport d’énergie au Québec14. Cette étude interroge les modalités appréciatives et évaluatives des équipements sur les plans visuel et formel mais surtout « expérientiels » par une analyse de type expert et une enquête qualitative en profondeur. Elles posent ainsi un regard nuancé sur les mesures d’amélioration esthétique des équipements de transport d’électricité, plus précisément celles du design des pylônes, dans une perspective paysagère. Elle s’inscrit dans une réflexion parallèle aux principes de l’évaluation environnementale des lignes d’Hydro-Québec.

ENJEU DE PAYSAGE ET LIGNES DE TRANSPORT D’ÉNERGIE

  • 15 Bureau d’audiences publiques sur l’environnement.
  • 16 Le Groupe Viau inc. en collaboration avec Le Groupe Entracto inc., Méthode d’étude du paysage pour (...)

10L’enjeu de paysage au Québec à l’égard des projets de lignes de transport est manifeste depuis le début des années 1980, mais est plus marqué depuis les années 1990. On en reconnaît l’émergence dans le discours social et la demande paysagère (BAPE15, revue de presse, enquête) ainsi que dans la prise en charge de certains aspects du paysage dans certaines méthodes d’évaluation environnementale adoptées par les gestionnaires de projets de lignes16.

  • 17 CIGRE, 1999, op. cit., note 17 ; Entre les lignes – recherche et communication, Perception des impa (...)

11Sur le plan international, l’enjeu se cristallise également dans les années 1990, bien qu’il émerge tout particulièrement dans la seconde moitié du XXe siècle. Plusieurs études de perception effectuées auprès de la population témoignent de l’importance de la problématique paysagère dans les projets d’implantation d’infrastructures17.

  • 18 Levy, 1997, op. cit., note 18.

12Aux États-Unis, par exemple, les préoccupations esthétiques concernant les lignes électriques sont apparues dès le début du siècle dernier avec des mouvements s’inspirant du City beautiful dans les années 1920, qui réclamait l’enfouissement des câbles de distribution, pour culminer à la fin des années 1960 vers des préoccupations paysagères18. Les préoccupations esthétiques concernant les lignes de transport d’énergie seraient étroitement liées aux considérations environnementales des citoyens, considérations qui se seraient progressivement polarisées sur des questions de paysage. De même, ces préoccupations ont contribué à considérer l’apport du design industriel dans la conception des équipements comme moyen de leur prise en charge.

  • 19 Levy, 1997, op. cit., note 18.
  • 20 CIGRÉ, 1999, op. cit., note 17.

13Dans son analyse historique, Eugene Levy19 souligne que les projets de lignes de transport sont concernés par des perceptions qui dérivent de la transformation de la nature. Elles instaurent, dans la vie moderne, une relation dichotomique entre la nature et la technologie ; les enjeux de paysage émergent ainsi à leur interface. Ce constat aurait amené les promoteurs à s’intéresser à l’amélioration esthétique des lignes et de leurs équipements avec des mesures d’aménagement – notamment des projets de design de pylônes. C’est à travers les processus d’évaluation environnementale et les études d’impact que le plus souvent on analyse l’enjeu de paysage et qu’on le prend en charge, il est alors examiné sous l’angle des impacts visuels, des impacts humains et des impacts sur le paysage20.

Études de perception des lignes de transport d’énergie : le paysage comme enjeu récurrent

  • 21 International Electric Transmission Perception Project, 1996, op. cit, note 18.
  • 22 Pour connaître l’ensemble des recherches, on peut consulter la bibliographie de l’ouvrage de l’Inte (...)

14Une recension exhaustive des études sur la perception des lignes jusqu’en 1996 de l’International Electric Transmission Perception Project (IETPP)21 constate que les enquêtes scientifiques conduites sur ce sujet sont très récentes. La plupart des recherches recensées ne traitent pas spécifiquement de la question de l’appréciation esthétique des lignes de transport d’énergie, et la dimension esthétique est le plus souvent comprise dans des recherches de plus large portée qui se penchent sur la perception générale qu’ont les publics des lignes de transport d’énergie. Selon les auteurs de l’IETPP, les études portent essentiellement sur les perceptions des riverains à la suite de la construction d’une ligne22.

  • 23 International Electric Transmission Perception Project, 1996 (op. cit, note 18), p. 48.

15Parmi les études consultées par le groupe de recherche de l’IETPP, la perception esthétique est généralement étudiée sous deux aspects : l’apparence de la ligne et l’effet sur le paysage23. Par ailleurs, les auteurs retiennent que les lignes de transport, par leur grande visibilité, leur manque d’attrait et leur incongruité avec le paysage naturel provoquent un impact dominant. Cet impact pourrait en l’occurrence être déterminé par le design des lignes et, pour ces raisons, les auteurs affirment que les aspects du design des équipements et de leur implantation mériteraient un examen approfondi.

16En combinant les différents thèmes abordés par les études recensées, ils concluent néanmoins que la dimension esthétique est l’impact perçu comme le plus important.

  • 24 CIGRÉ, 1999, op. cit., note 17.

17En utilisant une méthodologie différente mais dans un même désir de classification, le CIGRÉ, organisme regroupant plusieurs compagnies d’électricité à travers le monde, a mené un sondage en 1999 parmi 36 d’entre elles afin de classer les différents impacts observés lors du passage d’une nouvelle ligne. De cette enquête, il ressort que les impacts visuels se situent au deuxième rang lors du passage appréhendé d’une nouvelle ligne, le premier rang étant occupé par les impacts associés au danger potentiel des champs électromagnétiques sur la santé24.

18Parmi les études sur la perception esthétique des lignes, on trouve généralement des enquêtes de préférences paysagères, des sondages sur la mesure des effets de la ligne sur le paysage environnant et des études comparatives sur les préférences entre différents types d’équipements. Elles démontrent que la problématique esthétique des lignes de transport dépasse largement leur seule apparence : elle se pose davantage en termes de valorisation, de préservation et de protection du paysage.

19De même, il ne faut pas oublier que les principales limites de ces recherches résident précisément en ce qu’elles abordent de manière très générale l’attitude des populations à l’égard des lignes et soumettent ainsi peu d’éléments de compréhension du phénomène de dépréciation du paysage par les équipements.

Perception esthétique et design des pylônes

20Bien que ces études fournissent des éléments permettant de confirmer la pertinence de la problématique paysagère dans l’appréciation esthétique des équipements et plus précisément dans le design des pylônes, elles sont insuffisantes pour légitimer à elles seules le design comme pratique de prise en charge de ces enjeux. Tout au plus, elles indiquent que le design peut jouer un rôle dans l’appréciation esthétique des lignes et qu’il est souhaitable d’y investir davantage d’efforts de recherche.

  • 25 CIGRE, 1999, op. cit., note 17 ; Desjeux, S. et D. Taponier, Retour d’expérience sur l’implantation (...)

21Dans d’autres écrits sur la question plus spécifique du design des équipements comme stratégie d’amélioration esthétique des pylônes, on la qualifie de souhaitable mais elle ne constitue pas un gage d’acceptation sociale d’un projet. De même, il ne semble pas exister un équipement idéal qui ferait consensus et qui saurait répondre adéquatement à la problématique paysagère25.

22Néanmoins, les compagnies de transport d’électricité ont eu de moins en moins le choix d’ignorer les dimensions esthétiques des projets de lignes de transport. En réponse à ces préoccupations, elles ont adopté différentes stratégies d’aménagement dont les principales sont l’intégration des lignes au paysage par des principes d’insertion ou d’absorption et le re-design des équipements. Il importe de s’attarder maintenant aux considérations pratiques que l’enjeu de paysage engendre dans le cadre des méthodes d’évaluation développées par les compagnies d’électricité, notamment par Hydro-Québec.

Méthodes d’évaluation des impacts sur le paysage

  • 26 Le Groupe Viau inc. et al., 1992, op. cit., note 17.
  • 27 Ibid.

23Les différentes méthodes d’évaluation qui examinent l’ensemble des impacts sur le paysage visent principalement la mesure de la visibilité de la ligne. En ce qui concerne Hydro-Québec, on détermine les impacts visuels définitifs d’un projet à partir de trois variables : résistance de l’unité de paysage, degré d’intégration (absorption et insertion) et degré de perception26. Ces variables résultent d’une méthode d’évaluation du paysage développée par Hydro-Québec dans les années 1990 et qui se rattache au processus plus large d’évaluation environnementale des projets de lignes de transport. Dans cette approche, l’atténuation des impacts visuels met l’accent sur des stratégies d’intégration au paysage en utilisant deux principes d’aménagement : l’absorption et l’insertion. L’absorption désigne « la capacité du paysage à dissimuler les composantes d’un équipement » et l’insertion réfère à « la capacité du paysage à recevoir un nouvel équipement dans sa composition sans en transformer son caractère particulier27 ».

  • 28 Gariépy, M., « L’Analyse de paysage au sein de l’évaluation environnementale ou l’aménagement à l’è (...)

24Actuellement en révision, la méthode spécialisée du paysage d’Hydro-Québec a suscité des critiques liées notamment à la préséance de la notion de visibilité sur les autres aspects de l’expérience du paysage, comme en témoigne Gariépy28 dans cet extrait :

  • 29 Gariépy tire cette citation du Groupe Viau inc. et al., 1992, op. cit., note 17.

Même si les méthodes d’analyse du paysage prétendent à une prise en compte globale du paysage et affirment véhiculer une approche qui correspond à « l’examen du paysage concret, du paysage visible et du paysage symbolique29 », elles relèvent exclusivement d’une logique d’intégration optimale au paysage, qu’il soit question d’absorption – l’objectif étant alors de limiter la comparaison de symboliques différentes, en agissant avant tout sur la visibilité d’un ouvrage, en cherchant à vrai dire à le camoufler – ou d’insertion.

25Au sujet du design des équipements, il importe de rappeler qu’il s’agit d’une stratégie marginale, utilisée en dernier recours lors de la procédure habituelle des études environnementales portant sur les projets de lignes de transport. Généralement, la démarche usuelle implique plutôt une sélection systématique d’équipements « standards » (généralement en treillis).

26Les pylônes traditionnels à treillis (Figure 7.2) sont choisis dans les catalogues d’équipements des promoteurs et constituent l’option la moins coûteuse. Il est plutôt rare que les promoteurs envisagent de sélectionner des équipements plus appropriés au contexte d’implantation et encore plus rare qu’ils suggèrent un re-design des pylônes. La détermination d’impacts visuels et paysagers importants dans une étude d’impacts poussera les promoteurs à songer à des stratégies de rechange. C’est donc a posteriori par rapport aux études que le design des équipements devient une option, mais il demeure assujetti aux principes d’intégration maximale au paysage qui ont pour effet de réduire la hauteur et la largeur de l’équipement « standard ». En somme, le design est une stratégie d’atténuation des impacts sur le paysage et, le plus souvent, il est utilisé dans des situations où aucune autre stratégie d’aménagement est possible. Il constitue une option peu utilisée car elle est considérée comme très coûteuse. On fait intervenir le design sur des sections de ligne restreintes qui sont fortement contestées par la population. Cette manière de faire est largement répandue chez des promoteurs et correspond à une pratique de positionnements ponctuels de pylônes « améliorés esthétiquement » ou, pour reprendre le terme de l’entreprise Électricité de France, « architectures », dans les situations critiques.

Figure 7.2 : Pylônes traditionnels à treillis à 735 kV à St-Bruno. (Source : Caroline Bergeront, Chaire en paysage et environnement, 2002)

LES PYLÔNES ET LE PAYSAGE AU QUÉBEC

  • 30 BAPE, Réseau de transport La Grande – tronçon la Vérendrye-Duvernay, Rapport d’enquête et d’audienc (...)
  • 31 BAPE, Poste de ligne à courant continu à 450kV, Radisson-Nicolet-Des Cantons, Rapport d’enquête et (...)

27Au Québec, les préoccupations d’ordre esthétique ont émergé au début des aimées 1980 avec le projet de ligne La Vérendrye-Hertel30. Lors de ce projet, certains citoyens faisaient déjà valoir le caractère distinctif du paysage de villégiature de la région, en insistant sur les éléments qualitatifs du territoire. Toutefois, c’est avec le projet de ligne Radisson-Nicolet-Des Cantons31 que l’argumentation esthétique et paysagère prend le dessus et devient un enjeu majeur. Rappelons qu’Hydro-Québec projetait d’implanter une ligne aérienne au-dessus du fleuve. Les oppositions locales évoquaient les retombées négatives du projet sur le caractère patrimonial et emblématique des berges du fleuve dans la portion Grondines-Lotbinière du tracé. Elles ont obligé le promoteur à modifier son projet et à retenir une traversée sous-fluviale beaucoup plus coûteuse et complexe sur le plan technique. Ici, l’amélioration esthétique de la ligne passe tout simplement par sa disparition, l’intégrité de la traversée du fleuve, en tant que patrimoine à protéger, étant la principale façon de conserver ce paysage.

  • 32 CIGRÉ, 1999, op. cit., note 17 ; Entre les lignes – recherche et communication, 1993, op. cit., not (...)

28Cette préoccupation de protéger ce paysage emblématique du Saint-Laurent dépassait largement son caractère local. Elle n’a toutefois pas permis de stigmatiser tout projet de lignes autour de la question paysagère, mais a amorcé un débat qui est en voie de devenir récurrent lors de l’implantation de lignes de transport d’énergie au Québec. Ce débat s’exprime avec plus ou moins d’intensité, selon le contexte d’implantation et la mobilisation des oppositions locales. Néanmoins, il semble avoir lieu de plus en plus en dehors d’une dynamique locale, comme en témoigne généralement le discours public sur les lignes de transport d’énergie et les études de perception menées auprès de la population en général32.

  • 33 BAPE, Ligne à 735 kV Des Cantons-Lévis et poste Appalaches, Rapport d’enquête et d’audience publiqu (...)
  • 34 Hydro-Québec, Enseignements du suivi environnemental : Ligne à 735 kV des Cantons-Lévis et poste de (...)

29Dans la vallée verdoyante du lac Williams au début des années 1990, l’enjeu de paysage, de nature plus locale, n’a pas stoppé l’implantation de la portion de la ligne Des Cantons-Lévis33 à 735kV, qui a été contestée comme celle de Grondines-Lotbinière. Néanmoins, compte tenu de la présence du lac et de la topographie particulière de cette section de tracée, les pressions locales ont favorisé l’implantation d’une dizaine de pylônes portiques tubulaires, nouvellement dessinés pour remplacer le pylône traditionnel à treillis, dans le bassin de la vallée (Figures 7.3 et 7.4). Le changement d’équipements a été suggéré par un opposant local qui connaissait l’existence de ce modèle alternatif. Le suivi environnemental du paysage, effectué à la suite de l’implantation de la ligne, a toutefois relevé que cinq pylônes tubulaires auraient pu « assurer une meilleure transition avec les pylônes rigides à treillis34 » et favoriser une meilleure intégration au paysage.

30Dans ce cas, puisque les stratégies d’absorption par les éléments du milieu végétal n’étaient pratiquement pas envisageables et l’enfouissement irréalisable, le design de pylônes s’est avéré une façon d’atténuer l’impact négatif sur la qualité du paysage. Pour certains, en particulier les représentants municipaux sondés par Hydro-Québec, la présence des nouveaux équipements constituait une amélioration esthétique non négligeable en comparaison de l’équipement traditionnel à treillis. Pour d’autres, la ligne instaure toujours une fracture importante dans la vallée, quel que soit le type d’équipement implanté. De même, il faut souligner que le design des équipements est utilisé de manière ponctuelle, non pas dans une considération du paysage dans son ensemble, mais comme stratégie de médiation sociale, c’est-à-dire comme monnaie d’échange pour la présence de la ligne.

Figure 7.3 : Positionnement des pylônes tubulaires et des pylônes traditionnels à treillis dans la vallée du lac Williams, ligne Des Cantons-Lévis. (Source : Hydro-Québec, 2000, p. 26)

Figure 7.4 : Implantation de pylônes tubulaires dans la vallée du lac Williams, ligne Des Cantons-Lévis. (Source : Caroline Bergeront, Chaire en paysage et environnement, 2002)

  • 35 BAPE, Projet de ligne à 315 kV Grand-Brûlé Vignan, Rapport d’enquête et d’audience publique, no 148 (...)
  • 36 BAPE, Projet de ligne à 735 kV Saint-Césaire – Hertel et poste de la Montérégie, Rapport d’enquête (...)

31Les deux plus récents projets de lignes de transport d’énergie soumis à l’examen du BAPE au Québec ont permis de démontrer l’émergence d’un enjeu de paysage parmi les préoccupations des citoyens : le projet de ligne Grand-Brûlé-Vignan35, qui a été rejeté par le BAPE devant la nécessité contestée du projet et le projet Hertel-Des-Cantons36, qui longe désormais l’autoroute 10 dans les Cantons-de-l’Est au Québec.

  • 37 Gagnon, 2005, op. cit., note 12.

32En analysant les mémoires déposés lors des audiences publiques, il ressort que le passage d’une ligne est perçu comme un vecteur de destruction du paysage, comme une atteinte à la qualité de vie et à l’intégrité du territoire. Le pylône, en tant que figure archétypale, demeure un objet industriel qui s’oppose à l’aspect naturel et patrimonial du paysage, à la quiétude recherchée pour accéder à une meilleure qualité de vie et à la préservation de la virginité du territoire. Toutefois, ces aspects sont inscrits dans une dynamique de projet dont on ne peut s’exclure et qui participe activement à la modulation de l’appréciation esthétique de la ligne projetée. Par exemple, les mémoires ne font aucunement état de solutions de rechange qui existent pour choisir un autre type d’équipement plus approprié au contexte. La question du design des équipements, comme moyen d’atténuer l’impact sur le paysage, est donc absente dans les mémoires. D’une part, il semble évident que l’exercice auquel mènent les audiences publiques s’appuie davantage sur une logique de contestation plutôt que sur une recherche d’alternative en termes de conception matérielle. D’autre part, laisser entrevoir la possibilité d’un changement d’équipement pourrait occulter la démarche contestataire à tel point que l’argument du design devient une façon indirecte de parvenir à l’acceptabilité sociale du projet de ligne. On préfère le plus souvent ne pas suggérer une telle alternative37. En l’occurrence, l’appréciation esthétique de l’équipement, en situation de projet, se module sur la seule question de la présence de la ligne et non pas sur la forme de l’équipement.

33Pourtant, lors de la réalisation de la ligne Hertel-Des Cantons, c’est précisément l’option d’un redesign des pylônes qui a été favorisée, et non une modification majeure du tracé ou une remise en cause de la nécessité de la ligne. Ainsi, face à l’enjeu appréhendé et dans un souci d’économie de coûts, les ingénieurs d’Hydro-Québec ont conçu un nouveau pylône portique, cette fois dans le même esprit « industriel » que le pylône traditionnel à treillis. L’option du pylône portique tubulaire employé dans le projet Des Cantons-Lévis aurait été envisageable mais trop coûteux. Pourtant, dans un souci ponctuel de réduire l’impact négatif sur le paysage, quelques pylônes portiques tubulaires ont été disposés aux abords de la traversée de la rivière Richelieu, marquant du même coup une différenciation fonctionnelle et symbolique entre les pylônes à treillis et tubulaires (Figure 7.5).

DE L’ENFOUISSEMENT DES LIGNES AU DESIGN DES PYLÔNES

  • 38 Entre les lignes – recherche et communication, 1993, op. cit., note 18 ; Priestley et Evans, 1996, (...)

34Force est d’admettre que l’enjeu de paysage peut être la source de modifications majeures d’un projet de ligne, comme dans le cas de Grondines-Lotbinière. Dans d’autres cas, il est plus souvent pris en charge par des stratégies locales d’aménagement. Dans plusieurs des projets présentés, la question du paysage a conduit au redesign des pylônes. Il est toutefois difficile de mesurer ici l’efficacité réelle du design, l’enjeu de paysage étant souvent articulé dans le cadre d’une ligne projetée. Seules des études post-projet permettraient d’en évaluer la portée. Les résultats des études menées à ce jour sur de telles expériences contextuelles au Québec, aux États-Unis et en France38 demeurent souvent mitigés en ce qui concerne le design.

Figure 7.5 : Traversée de la rivière Richelieu : implantation ponctuelle de pylônes portiques tubulaires aux abords du cours d’eau. (Source : Hydro-Québec, 2004)

  • 39 Voir à ce sujet l’argumentation développée par Étienne Lyrette dans son mémoire de maîtrise, Lyrett (...)

35La dynamique d’opposition associée à l’enjeu de paysage, du moins lorsqu’on la considère dans son déploiement à propos de la venue d’un projet, est souvent perçue comme une illustration du syndrome NYMBY (pas dans ma cour)39 parce que le caractère subjectif de l’argumentation esthétique et de la qualité de vie est considéré comme personnel. Pourtant, la contestation de la ligne Grondines-Lotbinière et à l’instar des commissaires du BAPE lors du projet Hertel-Des Cantons, il apparaît que les questions paysagères, lorsqu’elles sont associées à la signification du territoire et à l’attachement qu’on éprouve pour lui, semblent de plus en plus avoir une portée sociale et collective que les promoteurs continuent à sous-estimer. À cet égard, la traversée sous-fluviale négociée en raison de l’opposition collective vient ici consacrer le passage d’un enjeu de nature local à un enjeu national. C’est peut-être ici que s’arrête le syndrome « pas dans ma cour » : l’enjeu de paysage n’apparaît plus comme un enjeu personnel mais comme un enjeu majeur qui dépasse les retombées négatives sur l’environnement immédiat des riverains.

LE PAYSACE ENTRE ENJEU LOCAL ET ENJEU DE SOCIÉTÉ

  • 40 Montpetit, C., P. Poullaouec-Gonidec et G. Saumier, « Paysage et cadre de vie au Québec : réflexion (...)
  • 41 Projet de ligne de transport électrique Radisson-Nicolet-Des Cantons qui devait traverser le Saint- (...)
  • 42 Montpetit, Poullaouec-Gonidec et Saumier, 2002, op. cit., note 42, p. 167.

36De plus en plus, l’implantation d’une ligne de transport concerne la population en général, c’est-à-dire que l’enjeu d’une ligne devient un enjeu de société, un enjeu ne se limitant plus à l’impact local et régional. Montpetit et al.40 soulignent avec justesse que les projets de lignes de transport d’énergie ont contribué activement par le passé à une prise de conscience paysagère dans la population. Celle-ci a vu le jour « lors de cas retentissants qui ont été soumis à l’examen d’audiences publiques ou qui ont fait les manchettes41 »42. Toutefois, il importe de relever que cet enjeu de paysage ne semble pas s’exprimer de la même manière d’un projet à un autre.

  • 43 Il est peut-être utile de rappeler que les méthodes d’évaluation environnementale insistent sur les (...)

37Bien que la recension des écrits autour des projets de lignes démontre très clairement que la question de l’appréciation esthétique des équipements est intimement liée aux préoccupations paysagères, lorsqu’on la saisit en situation quotidienne, force est d’admettre que ce phénomène complexe n’est appréhendé que sous le couvert de la notion d’impact. Dans ces recherches, l’esthétique est réduite à la seule notion de visibilité, en considérant la distance et la portion visible de l’équipement comme sources d’impacts majeurs43.

  • 44 Entre les lignes – recherche et communication, 1993, op. cit., note 18.
  • 45 Ibid.

38Ainsi, les impacts visuels et les impacts sur le paysage concernent uniquement la visibilité de l’équipement et font peu état du phénomène plus global de la perception esthétique, phénomène humain plus complexe à appréhender et qui implique de multiples dimensions. Ainsi, il pourrait être pertinent d’investir le sens et les significations portées de la ligne de transport d’énergie selon sa typologie formelle et matérielle, de questionner les représentations qu’elle engendre, de soutenir l’argumentation esthétique par les théories sur la psychologie de la perception d’un tel équipement dans le territoire, de son histoire « locale » et culturelle, du phénomène d’observation et de proximité de l’équipement et de sa relation d’échelle et de dépasser ainsi le caractère générique des études du milieu récepteur. À titre d’exemple, une large étude de perception réalisée par Entre les lignes inc. au Québec en 199344, portant sur les relations de proximité des riverains, affirmait que les mesures d’intégration envisagées dans les cas étudiés n’influençaient pas l’impact visuel d’une ligne : « Autrement dit, voir beaucoup la ligne n’induit pas une évaluation plus négative que la voir peu45. » Selon les auteurs de cette étude, les gens qui ne voient pas de lignes ont tendance à surestimer les impacts perçus de la part de ceux qui habitent à proximité. Devant ces résultats, comment la notion d’impacts visuels peut-elle être utile pour comprendre ce phénomène de préséance perceptive de la ligne sur sa visibilité ? Que dire également de l’effet des événements comme le verglas sur l’appréciation des lignes, les pylônes perdant du même coup leur image de solidité, ou encore l’influence du discours politique ou médiatique sur l’articulation de l’appréciation esthétique ? Comment mettre de côté les peurs causées par les champs électromagnétiques sur la santé et l’appréciation que l’on se fait d’un équipement, si l’on croit profondément qu’il représente une atteinte à notre santé ? Tous ces aspects semblent interférer dans la problématique esthétique et ils ne peuvent être totalement dissociés de l’enjeu de paysage.

L’enjeu de paysage concerne-t-il uniquement les riverains ?

39La plupart des préoccupations visuelles s’expriment par rapport aux riverains de lignes de transport et non pas par rapport à la population en général qui fréquente ces équipements, à un moment ou à un autre. Les questions qui se posent par rapport aux études de perception des riverains de lignes sont nombreuses. L’expérience d’implantation, avec ses aléas politiques, économiques et techniques, peut jouer dans la perception des équipements de proximité tout autant que le fait de choisir délibérément d’habiter près d’une ligne. Dans ce sens, les perceptions des riverains de lignes, bien qu’elles soient essentielles dans la compréhension du phénomène d’appréciation esthétique, ne sont pas suffisantes. Les limites des études concernées par l’expérience riveraine renvoient plus globalement à la portée même de l’enjeu de paysage. L’implantation d’une nouvelle ligne concerne-t-elle uniquement les riverains ou implique-t-elle l’ensemble de la population ? Ces riverains sont-ils des citoyens plus préoccupés par les projets de lignes de transport ? Qu’arrive-t-il par exemple de l’implantation aux abords des autoroutes qui devrait affecter les usagers de la route autant que les propriétaires riverains ? Plus largement, quels sont les usagers de la route à considérer ? Ceux qui la fréquentent souvent ou ceux qui en font l’expérience occasionnellement, les routiers ou les touristes ?

Expérience esthétique du paysage : au-delà du visible

40Somme toute, une définition beaucoup plus large de la dimension esthétique d’une ligne est à adopter afin de dépasser les limites actuelles des études d’impacts visuels. Ainsi, malgré un nombre important d’études et de méthodes, la dimension paysagère de l’équipement demeure somme toute peu explorée en soi, du moins dans ses aspects expérientiels. Elle est soit assujettie aux questions plus globales des perceptions des lignes, soit assimilée aux notions d’apparence et de composantes visuelles. Pour sa part, et bien qu’elle semble être la source des nombreuses préoccupations paysagères dans le discours social, l’expérience esthétique du paysage générée par la présence d’une ligne de transport est peu étudiée de manière approfondie.

41Les compagnies de transport d’énergie cherchent à réduire la portée de l’enjeu de paysage en tentant de le résoudre par deux stratégies visuelles fondées sur une conception panoramique du paysage : celle du déni par le camouflage de la ligne ou celle de l’embellissement par le redesign des équipements. Dans le premier cas, on fait fi de la présence de la ligne comme élément structurant le territoire en faisant des gestes d’aménagement qui visent à réduire la visibilité de la ligne. Dans le deuxième cas, on entend montrer qu’un bel équipement devient un facteur essentiel à la préservation du paysage. Ces stratégies reposent sur la conviction qu’une amélioration esthétique du pylône induit une meilleure perception du paysage et donc une meilleure acceptabilité sociale des lignes. Pourtant, l’ensemble des études de perception démontre une plus-value minimale de la stratégie de design bien qu’elle permette de renforcer la notoriété publique du promoteur. À cet égard, on constate que la plupart des projets de design d’équipement aux États-Unis, en Europe et au Québec, deviennent des stratégies de médiation sociale pour répondre aux préoccupations citoyennes, mais surtout pour les atténuer. Comment ces stratégies d’amélioration esthétique peuvent-elles conduire à une meilleure acceptation sociale des projets de lignes, c’est-à-dire comment le design, considéré ici à la fois dans la pratique du design industriel et de l’architecture de paysage, peut-il participer à une prise en charge des préoccupations paysagères ?

D’UNE LOGIQUE D’EMBELLISSEMENT À UNE LOGIQUE PAYSAGÈRE

  • 46 Rothstein, P. D., « The Re-emergence of Ethnography », dans Industrial Design Today, IDSA Chicago D (...)

42Le design demeure à ce jour un outil déterminé par la préséance des impacts visuels dans la compréhension de l’enjeu de paysage. Il n’est pas ainsi une mesure qui intervient dans la formation du paysage, mais il relève davantage d’une stratégie ponctuelle de règlements de conflits. Pointant, le design comme pratique pluridisciplinaire rendrait possible, s’il intervenait en amont des projets, une prise en charge beaucoup plus globale de l’enjeu de paysage en faisant appel à des outils de compréhension sociale. Pensons aux différentes méthodes qualitatives46 qui font d’ailleurs désormais partie de la démarche de conception en design et qui permettent de mieux investir la relation des individus aux objets et à l’espace, en laissant une large place à la parole et aux points de vue des individus concernés par les projets.

  • 47 Voir à ce sujet la réflexion sur l’esthétisation globale développée par Wolfgang Welsch dans Welsch (...)

43La logique d’embellissement47 qui hante désormais nos environnements quotidiens omet malheureusement d’investir la relation sensible à l’espace, en se penchant presque uniquement sur les dimensions visuelles, plus près du modèle artistique que le modèle naturel. Si le paysage devenait non pas le ramassis hétéroclite de belles infrastructures, comme un musée, mais trouvait plutôt résonance dans la signification profonde qu’on lui porte, ne serait-on pas en mesure de lui porter une attention renouvelée ? Selon cette perspective, l’amélioration esthétique des équipements de transport par le design ne saurait se limiter à une tentative cosmétique de réparation du paysage, mais devrait devenir une manière de prendre en charge l’enjeu de paysage dans toute sa complexité, aux dépens parfois d’une non-intervention.

  • 48 Zorgno, A.-M., « Electricity and Land », Rassegna, vol. 17, n° 63, Electricity. United-States and U (...)
  • 49 Bosoni, G., « The “Form” of Power Lines, Between Design, Architecture and Landscape », Domus, no 78 (...)

44En questionnant les projets d’amélioration esthétique des pylônes, Zorgno48 rappelle qu’actuellement la majorité des projets se limitent uniquement au design de la structure du pylône, évitant du même coup d’investir le projet de design d’une réflexion plus vaste sur l’implantation de la ligne dans le territoire. Et Bosoni49 d’en rajouter, en affirmant que les projets d’équipement concernent non seulement le design industriel mais interpellent le design en tant que pratique plus globale, car le paysage est intimement interpellé dans ce genre de démarche. L’enjeu de paysage, pour être pleinement investi dans les projets de lignes de transport d’énergie, doit être considéré comme un enjeu social, certes, mais articulé dans des pratiques qui peuvent vraiment en tenir compte dans son ensemble, sans pour autant le limiter aux seuls aspects visuels. Cela signifie surtout qu’il faut revoir les démarches des projets pour mieux encadrer et faire valoir les points de vue des citoyens, puisque l’enjeu de paysage émerge de leurs préoccupations concernant le territoire.

REMERCIEMENTS

45L’auteure tient à remercier le Fonds FCAR et la Fondation Desjardins de leur appui financier pour la recherche sur l’appréciation esthétique des équipements de transport d’énergie. Elle ne saurait également oublier le soutien d’Hydro-Québec, par sa division TranÉnergie, aux recherches menées à la Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal.

Notes

1 Des réseaux de pylônes.

2 Riendeau, R., « Les autoroutes de l’énergie : une incision dans l’environnement », Forêt et conservation, Octobre 1988, p. 18-22 ; Billy, P. de, « Les pylônes : la rançon du progrès ? », Continuité, hiver 1990, p. 50-53.

3 Furby, L. et al., « Public Perceptions of Electric Power Transmission Lines », Journal of Environmental Psychology, vol. 8, 1988, p. 19-43.

4 Berleant, A., Living in the Landscape: Toward an Aesthetics of Environment, Lawrence (KS), University Press of Kansas, 1997, 200 p.; Carlson, A., « Environmental Aesthetics », dans E. Craig (dir.), Routledge Encyclopedia of Philosophy, Londres, Routledge, 2002, consulté le 31 mai 2005 à cette adresse: <http://www.rep.routledge.com/ article/M047SECT5>; Ligth, A. et J. M. Smith, The Aesthetics of Everyday Life. New-York, Columbia University Press, 2005 ; Saito, Y., « Everyday Aesthetics », Philosophy and Litterature, no 25, 2001, p. 87-95.

5 Berleant, A., « Aesthetic Perception in Environmental Design », dans Jack, L. N. (dir.), Environmental Aesthetics : Theory, Research, and Applications, Cambridge, Cambridge University Press, 1988, p. 84-97 ; Berleant, 1997, op. cit., note 5.

6 Dewey, J., Art as Experience, New York, Pedigree Book, [1934] 1980, 355 p.; Merleau-Ponty, M., Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, 531 p.

7 Cette définition reprend donc l’idée que le paysage renvoie à une relation entre une réalité physico-spatiale et une qualification subjective du regard. En cela, elle est très proche de celle qui est articulée dans l’introduction du présent ouvrage, mais elle s’en distingue dans ses modalités appréciatives qui ne s’effectuent pas uniquement par un processus de distanciation cognitive mais se caractérisent également par une implication physique, sensible, spatiale dont il est impossible de totalement s’exclure, même cognitivement. Par exemple, des dispositions psychologiques ou physiques du sujet (distraction, sentiment de mélancolie, confort, bruit, etc.) pourront en tout temps intervenir dans l’appréciation du paysage. À cet égard, il est utile de se référer à la notion de facteurs externes du texte de David E. W. Fenner, « Aesthetic Experience and Aesthetic Analysis », Journal of Aesthetic Education, vol. 37, no 1, printemps 2003, p. 40-53. Quanta Berque, il définit la médiance comme le « sens d’un milieu ; à la fois tendance objective, sensation/perception et signification de cette relation médiale », tiré de Berque, A., Médiance : de milieux en paysages, Montpellier, Reclus, Géographiques, 1990, p. 48.

8 Berleant, 1988, op. cit., note 6, p. 87.

9 Tremblay, F. et M. Gariépy, « Acteurs et processus du projet de paysage », dans Poullaouec-Gonidec, P., S. Paquette et G. Domon (dir.), Les Temps du paysage, coll. « Paramètres », Montréal, Les Presses de l’université de Montréal, 2003, p. 219-246.

10 Pour en voir un exemple, se référer à la figure 7.2, plus loin dans le texte.

11 Gagnon, C., « Perceptions actualisées des équipements et lignes de transport d’énergie », dans Findeli, A. et al., Inscription spatiale des équipements de transport d'énergie : révision des critères de design – Annexe A, rapport de recherche de la Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal déposé à la division TransÉnergie d’Hydro-Québec, 2005.

12 Cette hypothèse est celle que soutient l’auteure dans son projet de recherche doctorale en cours.

13 Leclerc, A. et al., Accompagnement d’expertise en design industriel et en paysage : orientations pour l’étude de conception de pylônes esthétiques à encombrement réduit, rapport de recherche de la Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal déposé à la vice-présidence Environnement d’Hydro-Québec, 2000 ; Findeli, A. et al., Inscription spatiale des équipements de transport d’énergie : révision des critères de design-Annexe A, 2003, rapport de recherche de la Chaire en paysage et environnement de l’Université de Montréal déposé à la division TransÉnergie d’Hydro-Québec, 2005.

14 Cette réflexion se poursuit dans le projet doctoral de l’auteure qui repose sur une démarche d’enquête qualitative effectuée auprès d’une douzaine d’individus de la population en général afin de mieux saisir comment s’articule, sur le plan esthétique, la dépréciation paysagère par les équipements.

15 Bureau d’audiences publiques sur l’environnement.

16 Le Groupe Viau inc. en collaboration avec Le Groupe Entracto inc., Méthode d’étude du paysage pour les projets de lignes et de postes de transport et de répartition, pour le service Ressources et Aménagement du territoire, direction Recherche et Encadrements, vice-présidence Environnement, Hydro-Québec, 1992, 325 p. ; CIGRÉ, High Voltage Overhead Lines : Environmental Concerns, Procedures, Impacts and Mitigations, Working Group 22.14 Environmental Concerns and Regulatory Controls, octobre 1999, 103 p.

17 CIGRE, 1999, op. cit., note 17 ; Entre les lignes – recherche et communication, Perception des impacts générés par la présence et l’exploitation des lignes de transport-phase 2 : sondages auprès des populations vivant à proximité des lignes de transport, rapport préliminaire présenté à la vice-présidence Environnement d’Hydro-Québec, 1993 ; Levy, E., « The Aesthetics of Power : High-Voltage Transmission Systems and the American Landscape », Technology and Culture, vol. 38, n° 3, 1997, p. 575-607 ; Furby et al., 1988, op. cit., note 3 ; International Electric Transmission Perception Project, Perception of Transmission Lines : Summary of Surveys and Framework for Further Research, rapport de recherche, 1996 ; Priestley, T. et G. W. Evans, « Resident Perceptions of a Nearby Electric Transmission Line », Journal of Environmental Psychology, vol. 16, no 1, mars 1996, p. 65-74.

18 Levy, 1997, op. cit., note 18.

19 Levy, 1997, op. cit., note 18.

20 CIGRÉ, 1999, op. cit., note 17.

21 International Electric Transmission Perception Project, 1996, op. cit, note 18.

22 Pour connaître l’ensemble des recherches, on peut consulter la bibliographie de l’ouvrage de l’International Electric Transmission Perception Project, 1996 (op. cit., note 18), p. 179-191.

23 International Electric Transmission Perception Project, 1996 (op. cit, note 18), p. 48.

24 CIGRÉ, 1999, op. cit., note 17.

25 CIGRE, 1999, op. cit., note 17 ; Desjeux, S. et D. Taponier, Retour d’expérience sur l’implantation du pylône « Corolle » : synthèse détaillée des résultats, rapport de recherche du groupe Argonautes – recherche conseil en sciences humaines, 2000 ; Entre les lignes – recherche et communication, 1993, op. cit., note 18 ; Institut de Sondages Lavialle, Lignes à haute tension EDF : appréciation – par les riverains – des pylônes classiques versus architectures, rapport de recherche, 2000 ; International Electric Transmission Perception Project, 1996, op. cit, note 18 ; Priestley et Evans, 1996, op. cit., note 18 ; National Grid, Summary, <www.nationalgrid.com/uk/social&environement/tower_design.asp#>, 2002, consulté le 15 octobre 2004.

26 Le Groupe Viau inc. et al., 1992, op. cit., note 17.

27 Ibid.

28 Gariépy, M., « L’Analyse de paysage au sein de l’évaluation environnementale ou l’aménagement à l’ère de la rectitude politique », dans Poullaouec-Gonidec, P., B. Lassus et M. Gariépy (dir.), Le paysage, territoire d’intentions, Paris, Édtions L’Harmattan, 1999, p. 94-113.

29 Gariépy tire cette citation du Groupe Viau inc. et al., 1992, op. cit., note 17.

30 BAPE, Réseau de transport La Grande – tronçon la Vérendrye-Duvernay, Rapport d’enquête et d’audience publique, 1980.

31 BAPE, Poste de ligne à courant continu à 450kV, Radisson-Nicolet-Des Cantons, Rapport d’enquête et d’audience publique n° 22, 1987 ; Billy de, 1990,op. cit., note 2 ; Lyrette, E., La dynamique sociale entourant l’implantation d’une infrastructure majeure : le cas du parc éolien Le Nordais, mémoire de maîtrise, Université du Québec – Institut national de la recherche scientifique – Urbanisation, culture et société, 2003.

32 CIGRÉ, 1999, op. cit., note 17 ; Entre les lignes – recherche et communication, 1993, op. cit., note 18 ; International Electric Transmission Perception Project, 1996, op. cit, note 18 ; Levy, 1997, op. cit., note 18 ; Furby et al, 1988, op. cit., note 3.

33 BAPE, Ligne à 735 kV Des Cantons-Lévis et poste Appalaches, Rapport d’enquête et d’audience publique no 68, 1993.

34 Hydro-Québec, Enseignements du suivi environnemental : Ligne à 735 kV des Cantons-Lévis et poste des Appalaches à 735 kV-230 kV, 2000, p. 31.

35 BAPE, Projet de ligne à 315 kV Grand-Brûlé Vignan, Rapport d’enquête et d’audience publique, no 148, 2001.

36 BAPE, Projet de ligne à 735 kV Saint-Césaire – Hertel et poste de la Montérégie, Rapport d’enquête et d’audience publique, 2000.

37 Gagnon, 2005, op. cit., note 12.

38 Entre les lignes – recherche et communication, 1993, op. cit., note 18 ; Priestley et Evans, 1996, op. cit., note 18 ; Desjeux et Taponier, 2000, op. cit., note 26 ; Institut Lavialles, 2000, op. cit., note 26.

39 Voir à ce sujet l’argumentation développée par Étienne Lyrette dans son mémoire de maîtrise, Lyrette, 2003, op. cit., note 33.

40 Montpetit, C., P. Poullaouec-Gonidec et G. Saumier, « Paysage et cadre de vie au Québec : réflexion sur une demande sociale émergente et plurielle », Cahiers géographiques du Québec, vol. 46, no 128, 2002, p. 165-189.

41 Projet de ligne de transport électrique Radisson-Nicolet-Des Cantons qui devait traverser le Saint-Laurent, projet de ligne Duvemay-Anjou, reconstruction de la côte des Éboulements dans Charlevoix et, plus récemment, projet de ligne de transport Grand-Brûlé-Vignan en Outaouais.

42 Montpetit, Poullaouec-Gonidec et Saumier, 2002, op. cit., note 42, p. 167.

43 Il est peut-être utile de rappeler que les méthodes d’évaluation environnementale insistent sur les pratiques d’aménagement qui visent notamment à réduire cette visibilité et qui sont associées aux principes d’aménagement par intégration : l’insertion ou l’absorption.

44 Entre les lignes – recherche et communication, 1993, op. cit., note 18.

45 Ibid.

46 Rothstein, P. D., « The Re-emergence of Ethnography », dans Industrial Design Today, IDSA Chicago Design Education Conference Proceedings, 2002 ; Julier, G., The Culture of Design, Londres, Sage Publications (s.d.) ; Frascara, J. (dir.), Design and the Social Sciences : Making Connections, Londres et Washington, Taylor & Francis, 2002.

47 Voir à ce sujet la réflexion sur l’esthétisation globale développée par Wolfgang Welsch dans Welsch, W., Undoing Aesthetics, Londres, Sage Publications Ltd, 1997, p. 83-85.

48 Zorgno, A.-M., « Electricity and Land », Rassegna, vol. 17, n° 63, Electricity. United-States and USSR, France and Italy, 1995, p. 70-81.

49 Bosoni, G., « The “Form” of Power Lines, Between Design, Architecture and Landscape », Domus, no 78, p. 85.

Table des illustrations

Légende Figure 7.1 : Aspects de l’enjeu de paysage dans la problématique esthétique des lignes de transport d’énergie.
URL http://books.openedition.org/pum/docannexe/image/10587/img-1.jpg
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Légende Figure 7.2 : Pylônes traditionnels à treillis à 735 kV à St-Bruno. (Source : Caroline Bergeront, Chaire en paysage et environnement, 2002)
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Légende Figure 7.3 : Positionnement des pylônes tubulaires et des pylônes traditionnels à treillis dans la vallée du lac Williams, ligne Des Cantons-Lévis. (Source : Hydro-Québec, 2000, p. 26)
URL http://books.openedition.org/pum/docannexe/image/10587/img-3.jpg
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Légende Figure 7.4 : Implantation de pylônes tubulaires dans la vallée du lac Williams, ligne Des Cantons-Lévis. (Source : Caroline Bergeront, Chaire en paysage et environnement, 2002)
URL http://books.openedition.org/pum/docannexe/image/10587/img-4.jpg
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Légende Figure 7.5 : Traversée de la rivière Richelieu : implantation ponctuelle de pylônes portiques tubulaires aux abords du cours d’eau. (Source : Hydro-Québec, 2004)
URL http://books.openedition.org/pum/docannexe/image/10587/img-5.jpg
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Auteur

Obtenu un baccalauréat en design de l’environnement de l’Université du Québec à Montréal et une maîtrise en aménagement de l’Université de Montréal. Elle termine actuellement son projet de thèse de doctorat, dirigée par Philippe Poullaouec-Gonidec et Diane Bisson, qui porte sur l’appréciation esthétique des équipements de transport d’énergie au Québec. Elle est boursière du FCAR (bourse de doctorat de recherche) et de la fondation Desjardins (subvention « société et environnement »). Elle travaille depuis plus de cinq ans à la Chaire en paysage et environnement sur des recherches qui lui permettent d’approfondir les questions d’évaluation esthétique et d’acceptabilité sociale des lignes de transport d’énergie selon les logiques propres au paysage, tout en contribuant à positionner le rôle du design industriel parmi ces préoccupations. Elle agit également à titre de chargée de cours à l’École de design industriel de l’Université de Montréal.

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