1 Fin du siècle des ombres, Fayard, 1999, p. 314.

2 Elle est esquissée par Raymond Boudon, Raison. Bonnes raisons, Paris, PUF, 2003.

3 C’est ce qu’étiquetait Albert Soboul il y a quarante ans, abordant les Lumières à la lumière de la lutte des classes.

4 C’est l’accusation que porte en effet contre Furet Claude Mazauric, Sur la révolution française, Paris, Éd. Sociales, 1970. À regarder de plus près pourtant, la répartition des chercheurs dans cette polarisation réserve des surprises. En principe, oui, les historiens étiquetés « marxistes » ont préféré les explications infra-structurelles, — les « forces matérielles », l’économie, les relations de classe, — et les idéalistes, les explications qui mettent de l’avant les idées des agents et/ou celles de l’époque et ne s’évertuent du moins pas à les écarter — mais pourtant l’histoire des idées tout comme l’histoire des mentalités est en partie le fait de chercheurs marxisants, de Michel Vovelle à Zeev Sternhell.

5 Farewell to Reason, London, Verso, 1987, p. 19. Trad. Adieu la raison, Paris, Seuil, 1989.

6 Howard Zinn. www.digressmagazine.com/zinn/zinn1.

7 Scipio Sighele, Psychologie des sectes, Paris, Giard & Brière, 1898, p. 180.

8 Alfred Naquet, lettre à Henri Brissac, La Société collectiviste, Préf. de Jean Jaurès. Paris, Petite république, 1895, p. 16.

9 Georges Sorel, « Réflexions sur la violence », Mouvement socialiste, t. I, 1906, p. 275. Publié peu après en volume sous le même titre : Paris, Librairie des « Pages libres », 1908.

10 Les Polémiques pour l’interprétation du marxisme. Bernstein et Kautsky, Paris, Giard, 1900, p. 21.

11 La Décomposition du marxisme, p. 55.

12 Ibid.

13 Rapprocher encore ceci de Pierre Bourdieu avec son concept néo-thomiste d’Illusio. In-ludere, entrer dans le jeu, jeu sérieux qu’on (se) joue parfois jusque sur le lit de mort, mais jeu tout de même.

14 Cf. R. Boudon, Idéologie, p. 77.

15 Boudon, Cognition, p. 50.

16 Maurice Barrès et le nationalisme français, Paris, Colin, 1972. Nouvelle édition augmentée de « De l’historicisme au nationalisme de la Terre et des morts », Paris, Fayard, 2000.

17 Paris, Seuil, 1978.

18 Y compris ceux de l’extrême gauche comme Albert Regnard et Auguste Chirac. Voir plus loin les disputes connexes sur les origines de gauche du syncrétisme fasciste.

19 La « Bande à Morès » (formée des bouchers de la Villette dirigés par le Marquis de Morès) en 1890 préfigure les squadristes italiens de 1919-1920.

20 Droite révolutionnaire, p. 21.

21 Sternhell, Mario Sznajder et Maia Ashéri, Naissance de l’idéologie fasciste, Paris, Fayard, 1989, p. 15.

22 Sternhell, Ni droite ni gauche. L’idéologie fasciste en France, Paris, Seuil, 1983 ; 3^e éd. refondue et augmentée d’un essai-préface inédit de 106 pages, « Morphologie et historiographie du fascisme en France », Paris, Fayard, 2000 et, au format poche, Complexe, 2000. Voir aussi: Avineri, Shlomo & Ze’ev Sternhell, Europe’s Century of Discontent. Legacies of Fascism, Nazism, and Communism, Jerusalem, Hebrew UP, 2003.

23 Pp. 83-94.

24 P. 83.

25 Berstein, loc. cit.

26 Je renvoie au livre de J.-L. Loubet del Bayle sur Les Non Conformistes de années trente, Seuil, 1969.

27 Ni droite, p. 159.

28 Berstein, loc. cit., p. 88.

29 Annales ESC, 1984, vol. 39, n° 4, pp. 849-861. Citation p. 849.

30 Comme le Faisceau de Georges Valois qui ira vite à l’échec intégral. Valois, cet ancien anarcho-syndicaliste tourné royaliste, fondateur du Cercle Proudhon en 1911, s’évertuait à démontrer et à faire hautement savoir en créant son mouvement que le régime de Mussolini s’était inspiré en réalité de doctrines socialistes-nationales toutes inventées en France du côté de Barrès et de Sorel et qu’il s’agissait de se les rapproprier.

31 Pierre Milza, Les Fascismes, Paris, Imprimerie nationale, 1985, p. 41.

32 Winock, Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France, Paris, Seuil, 1990. Nouv. éd. 2004, p. 245.

33 Edouard Drumont et Cie : antisémitisme et fascisme en France, Paris, Seuil, 1982.

34 L’Antisémitisme de plume, Paris, Berg, 1999.

35 Histoire de l’antisémitisme, tome III : De Voltaire à Wagner, Paris, Calmann-Lévy, 1968. Voir aussi Le Mythe aryen. Essai sur les sources du racisme et des nationalismes, Paris, Calmann-Lévy, 1971 ; Paris, Presses-Pocket, 1994.

36 Édouard Drumont et Cie, p. 35.

37 Le 15 août 1889, le mouvement blanquiste éclate. La « vieille garde » et ceux que sont en bonne place pour devenir députés avec l’appui du Parti national boulangiste suivent Ernest Granger, lequel crée une nouvelle structure, le Comité central socialiste révolutionnaire, CCSR. Ils auront accès à la presse boulangiste « de gauche », L’Intransigeant, le Démocrate, la République de Vergoin et ils créent leur propre journal, le Blanquiste. Ces « socialistes-collectivistes » proposent comme slogan pour le Premier mai [1890] : « Vive la République nationale ! » C’est la haine de la « juiverie cosmopolite » qui assure leur passage audit socialisme national. Après les révélations du journaliste Mermeix sur Les Coulisses du boulangisme, où on apprend « d’où vient l’argent » — de la Duchesse d’Uzès et d’autres cassettes ultra-réactionnaires, — les autres leaders « révolutionnaires » chercheront à déshonorer définitivement Granger et les « socialistes nationaux » en votant une résolution le 20 septembre 1890 « avéré que le sieur Granger n’a été élu député que grâce au concours politique et financier des princes, des curés et des monarchistes ».

38 Ni droite ni gauche, p. 29.

39 Naissance de l’idéologie fasciste, p. 15.

40 Droite révolutionnaire, p. 403.

41 Les admirateurs de Georges Sorel ont été choqués de voir Sternhell déchiffrer chez ce grand éveilleur d’idées le premier cas de cette « révision du marxisme » qui se prêtait à une prochaine « synthèse » avec le nationalisme « organique et tribal ». Le classement de Sorel en « préfasciste » est éminemment unilatéral : « Sorel a été revendiqué par Gramsci le communiste, Gobetti le libé ral, Mussolini le fasciste. À l’instar des interprétations traditionnelles de droite, Sternhell ne retient que le cas du troisième », objecte Jacques Julliard. Michel Charzat dans les Cahiers Georges Sorel s’en prend à Sternhell sur le point factuel de savoir si le vieux Sorel, comme on le col porte, a admiré le premier fascisme et s’il peut être vu comme précurseur de la « révolution fasciste ». « Légendes » tenaces, réplique-t-il. Sorel emploie l’essentiel de ses dernières années (il meurt deux mois avant la Marche sur Rome) à défendre avant tout Lénine et les bolcheviks. « Aucune trace d’inclination pour l’agitation fasciste et pour son chef. » Dans La Décomposition du marxisme, dans L’Avenir socialiste des syndicats, Réflexions sur la violence, Sorel ne fait souvent que donner un tour philosophique à des idées sui generis émanant du monde syndical, spéciale ment du courant syndicaliste-révolutionnaire. Sorel ridiculise le déterminisme fataliste du prétendu « marxisme orthodoxe », il admire l’héroïsme prolétarien et ce qu’il voit comme anti-bourgeois, viril et batailleur dans le mouvement ouvrier, mais c’est à l’unisson des doctrinaires de l’« Action directe » et des « minorités agissantes ». À ce compte, c’est la doctrine des idéo logues de la CGT qui devrait être visée par Sternhell — et donc, une partie, la plus militante et résolue, du mouvement ouvrier français. Admettons que ceci soit établi, il faudrait alors en tirer toutes les conséquences.

42 Je renvoie à mon livre La Démocratie, c’est le mal. Un siècle d’argumentation anti-démocratique à l’extrême gauche, 1815-1914, Québec, PU Laval, 2004.

43 Comment nous ferons la révolution, Paris, Tallandier, 1909. Pataud et Pouget : l’un est chef du syndicat des électriciens, l’autre, directeur de la Voix du peuple, organe de la CGT. Nous trouvons dans ce roman d’anticipation une conception de l’État syndicaliste-révolutionnaire dont Pouget et Pataud ne font que puiser les principes dans la propagande cégétiste. Le syndicalisme anéantit l’État bourgeois mais c’est pour s’y substituer totale ment. L’un des premiers actes des insurgés est d’évacuer le Palais-Bourbon, d’en chasser les parlementaires, même et surtout les socialistes. Le mouvement syndical français en prenant le pouvoir devient l’État ; la population entière des deux sexes, mise au travail, se trouve intégrée aux fédérations syndicales. La démocratie règne mais c’est celle de la CGT, des bourses locales, des fédérations corporatives, du Congrès national et des comités confédéraux. Les travailleurs seuls ont voix délibérative (mais tous les hommes valides doivent travailler) ; le suffrage et le droit de discussion sont inséparables des fonctions professionnelles.

44 Sternhell, Ni droite ni gauche, préface de 2000, « Morphologie et historiographie du fascisme en France », p. 12.

45 Sternhell, in Michel Dobry, dir., Le Mythe de l’allergie française au fascisme, Paris, Albin Michel, 2003, p. 363.

46 Ni droite, loc. cit., p. 22.

47 P. 45.

48 P. 45.

49 Fayard, 2006 — où il définit les anti-Lumières comme « révolte contre un projet de civilisation rationaliste, individualiste, fondée sur des valeurs universelles », p. 19.

50 Et en arrivant, en aboutissant sous la Guerre froide, aux deux grands prédécesseurs, libéraux et anti communistes, de Sternhell lui-même en tant qu’historien des idées : Isaiah Berlin, « objet de nos jours d’un véritable culte », et Jacob Talmon ! Voir Sternhell, dir., The Intellectual Revolt against Liberal Democracy. International Conference in Memory of Jacob L. Talmon, Jerusalem, Israel Academy of Sciences and Humanities, 1996.

51 Z. Sternhell dans Michel Dobry, Le Mythe de l’allergie, p. 381.

52 Et les contiguités et voisinages en complicités.

53 Le Marxisme dans les Grands récits. Essai d’analyse du discours, Paris, L’Harmattan et Québec, PU Laval, 2005.

54 Raymond Boudon, Le Juste et le Vrai, Paris, Fayard, 1995, p. 341.

55 Rationalité et cynisme, Paris, Minuit, 1984, p. 17.

56 Jean-François Lyotard, Le Différend, Paris, Minuit, 1983, p. 38.

57 Critical Realism, Post-Positivism, and the Possibility of Knowledge, London, Routledge, 2004.