Pour la loi du nombre : George Sand et la République des paysans
p. 103-116
Texte intégral
1En France, le suffrage universel (masculin) est, avant tout, un acquis révolutionnaire, intégré à la constitution de la IIe République par le décret du 5 mars 1848. Une fois rétabli au lendemain du coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte, il n’y eut plus de retour en arrière. Et pourtant, il faut attendre les premiers mois de la IIIe République pour que le suffrage universel – plus qu’une « comédie » sous le Second Empire – puisse enfin devenir, comme le dit Pierre Rosanvallon, « maître de lui-même1 ». Cette période de « la deuxième naissance du suffrage universel2 », comme l’appelle Raymond Huart, est conclue en novembre 1875 avec l’adoption de la loi organique sur l’élection des députés. Mais au lendemain de la défaite militaire, et après l’événement de la Commune, la perspective de cette (re)consécration légale ne va pas de soi. Le suffrage universel reste, d’un point de vue pratique, « une institution neuve3 », imprévisible, dont le fonctionnement autant que les principes suscitent une série de débats : dans les milieux libéraux et conservateurs, l’on voit resurgir, et avec une intensité inédite, les plus vives incertitudes et équivoques, exprimées dans une foule de brochures et d’articles sur les conditions de la démocratie moderne. Ainsi, à l’aube de la IIIe République, la question du suffrage devient, selon Rosanvallon, « en quelque sorte surinvestie4 » ; et l’un des enjeux principaux de cette vaste réflexion nationale est le pouvoir (dit disproportionné) exercé par un électorat paysan majoritaire. Électorat rural que l’on tenait responsable, comme le note Antoine Compagnon, du « péché originel du suffrage universel en France5 » : la dictature plébiscitaire de l’Empire. Que faire, alors, d’un système de suffrage qui avait mené à « la campagnocratie6 », pour emprunter le néologisme du libéral Prévost-Paradol ? Ayant tout juste plébiscité Napoléon III en mai 1870, les campagnes allaient-elles se rallier à la République ? Le paysan, émancipé par le suffrage universel, allait-il rester réactionnaire, voire impolitisable, à l’issue de l’Empire ?
2Autant de questions qui s’imposent aux esprits des hommes politiques, comme des intellectuels et écrivains, à l’automne de 1870. Et c’est sur ces débats que nous reviendrons dans ce chapitre, privilégiant la voix de l’une des plus éloquentes apologistes du suffrage universel (masculin) : George Sand. Le lendemain même de la proclamation de la République, Sand publie dans Le Temps une « Lettre à un ami » (nul autre que Gustave Flaubert) où elle qualifie le suffrage universel, sur un ton patriotique, de « mitrailleuse » qui fera la gloire de la France autrement : c’est « une arme que tous les Teutons ne lui arracheront pas7 ». Sand enfonce le clou dans ses contributions données aux journaux et dans sa correspondance, ainsi que dans l’œuvre commencée dix jours plus tard : son Journal d’un voyageur pendant la guerre. L’autrice entreprend d’y raconter, du 15 septembre 1870 au 10 février 1871, « l’effet du contrecoup des événements extérieurs8 », tel qu’elle l’entend depuis son exode au fond des campagnes berrichonnes. Chassée par la variole, qui sévit aux alentours de Nohant, Sand se rend dans la Creuse avec sa fille et ses petits-enfants. De là, elle note presque au jour le jour ses impressions sur une France profonde, isolée faute de nouvelles fiables et de communications régulières avec Paris, vivant l’invasion des Prussiens à travers la propagation des rumeurs et le recrutement hâtif de soldats – fils de paysans arrachés à la charrue. Les graves soucis intimes de l’autrice sont ainsi conjugués à une réflexion sur le sort collectif de la patrie, dont Sand – en mère, grand-mère, amie et citoyenne – se charge d’écrire ce qu’on appellerait aujourd’hui « l’histoire émotionnelle ». Certes, Sand a livré aux lecteurs de La Revue des deux mondes – la première livraison de son journal y paraît à peine trois semaines après l’achèvement de la dernière page – un témoignage précieux de la France des campagnes, et ceci à un moment où, selon Michelle Perrot, « la distance Paris-province, [...] qui constitue une des diagonales de son œuvre, ne lui a [jamais] paru si forte9 ». D’où les louanges d’Alexandre Dumas fils qui voit dans son témoignage une « lettre de Pline sur cette nouvelle éruption du Vésuve10 ». Ce qui retiendra ici notre attention sera pourtant moins l’aspect affectif ou documentaire du journal que la pensée politique que Sand y développe11. Car, tout en saluant l’avènement de la République, Sand se dit tourmentée par « un grand mépris, une sorte de haine douloureuse, une protestation que je vois grandir contre le suffrage universel12 ». Craignant l’ajournement indéfini des élections, Sand se livre à une défense ardente du suffrage universel, ne suspendant son Journal que deux jours après les élections législatives du 8 février 1871.
3Les élections de février porteront au pouvoir une majorité monarchiste et conservatrice, les campagnes, majoritaires, ayant dédaigné les candidats républicains. « Majorité rurale, honte de la France ! » : telle est l’apostrophe lancée par le jeune radical Gaston Crémieux à l’Assemblée nationale en février 1871. Si les campagnes soutiennent, par la suite, la République, le vote rural n’en reste pas moins longtemps l’objet d’angoisses obsessionnelles, mettant en péril l’attachement républicain à la souveraineté du nombre. C’est à la veille des premières élections que Sand traite justement, dans son Journal, de ces craintes. « Comment organiser une nation où le paysan ne comprend pas et domine la situation par le nombre13 ? » Penser une République en mesure de tirer sa légitimité du suffrage universel, sans pour autant se compromettre par son électorat des campagnes : c’est, en quelque sorte, le dilemme obsédant de ces mois de solitude14. Depuis sa retraite rustique, Sand assume la tâche de représenter et d’expliquer les méfiances de la paysannerie devant la nouvelle République, et ceci dans le but de s’interroger sur le bien-fondé d’un régime qui semble vouloir en faire abstraction. Ce qui ressort de ces réflexions est une Sand engagée, dont le rapport au paysan recouvre un intérêt plus politique qu’esthétique, plus abstrait qu’ethnographique15. Plus que d’autres, je l’affirme, Sand a voulu penser l’obstacle que pose le paysan pour la pensée républicaine, en se faisant à la fois sa meilleure apologiste et sa meilleure critique.
Le mépris de la masse
4Abordons, donc, ce large procès du suffrage universel – en faveur duquel Sand offre son plaidoyer – par le biais d’une lettre du 12 octobre 1871 de son fameux correspondant, Flaubert. Celui-ci tonne contre un modèle de suffrage qui suppose une (fausse) équivalence de qualité entre les électeurs :
Tout homme (selon moi), si infirme qu’il soit, a droit à une voix, la sienne, mais n’est pas l’égal de son voisin, lequel peut le valoir cent fois. [...] Je vaux bien vingt électeurs de Croisset. L’argent, l’esprit et la race même doivent être comptés, bref toutes les forces. Or, jusqu’à présent, je n’en vois qu’une : le nombre16 !
5Cette arrogance peut nous sembler particulièrement flaubertienne. Mais la remise en question de l’égalité devant l’urne électorale n’en reste pas moins répandue. « Et sera-t-il raisonnable, demande l’historien Joseph Guadet, de mettre en balance le vote d’un Rothschild ou d’un Thiers avec celui d’un balayeur de rues17 ? » Joseph Guadet et Hippolyte Taine figurent parmi ceux qui préconisent le suffrage à deux degrés (ou indirect) comme moyen de canaliser le corps électoral18. D’autres, comme Flaubert, réclament « une aristocratie légitime19 », composée d’une élite de l’intelligence. À la tête de cette réaction se trouve Ernest Renan, dont le réquisitoire contre la démocratie, La Réforme intellectuelle et morale, écrit au printemps 1871, est rapidement devenu, selon Compagnon, « le bréviaire des antimodernes20 ». La patrie vaincue doit se laisser guider, soutient-il, par « la partie éclairée de la nation21 », si elle veut ressusciter ses nobles idéaux patriotiques, esthétiques et militaires d’autrefois. Le pari de la thèse renanienne est donc de reconstituer la tête de la France, en écartant (ou décomptant) ceux qui en sont devenus les maîtres-imposteurs, le peuple en général, mais surtout le paysan, que Renan appelle « l’intrus22 » par excellence.
6Ainsi affiché par ces figures conservatrices, ce mépris de la masse n’a peut-être rien d’étonnant. Plus révélateur pourtant est l’avis de certains républicains contemporains qui, Rosanvallon nous le rappelle, « disaient presque la même chose23 ». Prenons pour exemple le journal radical-républicain, Le Rappel, qui demande, à la veille de la Commune, l’ajournement du suffrage rural, s’adressant ainsi au paysan :
Des théoriciens, qui ne connaissent rien du peuple des campagnes, ont voulu vous appeler pour un rôle pour lequel vous n’étiez pas faits. Tout vous manque pour le remplir, le temps, l’instruction, la moralité, le patriotisme. Retournez à vos champs, à vos charrues, à vos bœufs24.
7La dénonciation – courante, d’ailleurs – du paysan comme être crédule, illettré, superstitieux, grossier, même sauvage n’était guère réfutée par les pères fondateurs de la République. Au lendemain de la Commune, Léon Gambetta avait reconnu ce retard rural, qualifiant les paysans d’« intellectuellement en arrière de quelques siècles sur la partie éclairée du pays » – la grande tâche de la République étant justement de les instruire, de les concilier à l’énorme projet de « refaire la patrie25 ». Dans l’intervalle, les républicains ne cessent d’insister, souligne Chloé Gaboriaux, sur « l’aberration que constitue à leurs yeux l’existence de citoyens français qui n’ont pas conscience de l’être26 ». En effet, si les lois scolaires de Jules Ferry devaient représenter une étape capitale dans l’intégration d’une paysannerie dite « arriérée », c’était aussi au niveau du sentiment national que s’articulait son éventuel apprentissage de la citoyenneté. Renan s’indigne de l’esprit étroit du paysan qu’il dit « [indifférent] à la gloire du pays27 », dominé comme il l’est par ses intérêts palpables : « [L]e paysan veut avant tout acheter de la terre, arrondir son champ28. » Si d’autres, Gambetta compris, s’abstiennent de mettre en doute la loyauté du paysan comme soldat et contribuable, ils n’en restent pas moins sceptiques sur sa fidélité à l’idée, ou principe, de la patrie.
8Effectivement, l’image qui revient dans ces réflexions sur le suffrage rural est celle d’un paysan attaché à sa glèbe, absorbé par le labeur de la terre, vivant dans un cercle qui ne s’étend pas au-delà du clocher de la paroisse. « Toute la journée il est aux champs, remarque Hippolyte Taine, et le travail agricole cloue la pensée de l’homme à la terre. [...] [I]l n’y a guère que des images et point d’idées dans sa tête29. » Le philosophe reprend l’expression paradigmatique de la division du travail intellectuel et manuel inscrite dans La République de Platon, et selon laquelle, Jacques Rancière nous le rappelle, « l’ouvrier n’a pas le temps d’être ailleurs qu’à sa tâche30 ». Ainsi exclu du domaine de la pensée, le paysan ne disposerait pas du loisir nécessaire à la participation politique effective. Ces « étrangers de l’intérieur », pour emprunter l’expression de Gaboriaux, semblent aussi inciviques qu’ils sont indifférents à l’actualité des affaires nationales31. « Très-peu lisent le Moniteur des communes, affiché à la mairie, souligne Taine, on voit [les paysans] bouche béante, autour du lecteur qui épelle et ânonne, avaler, sans les digérer, les phrases emphatiques, abstraites, disproportionnées, dont un rédacteur parisien les fournit32. » Si la lecture de la presse représente, ainsi que le prétend Benedict Anderson, un moyen privilégié de s’intégrer dans « la communauté imaginée » de la nation, l’agriculteur – même lettré – s’en trouve ainsi écarté : il manque à sa « cervelle inculte33 » l’esprit critique autonome qui lui permettrait de distinguer légendes et rumeurs des nouvelles34.
9En effet, si grand est l’abîme qui doit séparer l’homme cultivé de l’homme cultivateur, qu’« il faudrait, dit Taine, un George Sand pour traduire nos idées dans leur langue. Idées et langue, rien ne nous est commun ; nos phrases générales, notre littérature de citadins n’entrent pas dans leurs têtes35 ». L’idée d’une Sand médiatrice, voire traductrice, n’avait évidemment rien de nouveau en 1872. Taine évoque sans doute l’autrice des « bergeries » de la fin des années 1840, qui s’est imposé la tâche de « parler clairement pour le Parisien, naïvement pour le paysan36 ». Ou bien la Sand propagandiste du gouvernement provisoire au printemps 1848, qui s’est faite le relais de la politique républicaine du centre auprès de la plèbe rurale. Dans une série de brochures, Sand a recouru à un personnage de son invention, le paysan berrichon Blaise Bonnin, pour atténuer le scepticisme de ses « concitoyens » ruraux devant la République. Le peuple de Paris, suppliait-elle en avril 1848, était la « brave armée » du peuple des campagnes ; l’ouvrier des villes « est un frère qui combat pour son frère37 ». Évidemment, le désespoir l’attend ; et au lendemain d’une élection présidentielle qui fait revivre la légende napoléonienne, Sand dira son impatience, du moins entre amis, envers les paysans toujours méfiants de « c’te chetite république à laquelle ils ne comprennent rien38 ». L’exercice du suffrage universel devait trahir, précisa-t-elle dans une lettre du 30 septembre 1848, la « minorité sublime » des grandes villes, cette avant-garde héroïque qui était « destinée à être écrasée par la majorité vendue à la bourgeoisie39 ». À la limite, a-t-elle osé suggérer dans le Bulletin de la République du 15 avril 1848, que « le peuple qui a fait les barricades » avait le droit de ne pas respecter les résultats des futures premières élections si celles-ci ne faisaient pas triompher « la vérité sociale40 ». Sand a ainsi provoqué un tollé en justifiant une insurrection populaire en cas de triomphe de la réaction provinciale.
La voix du bon sens
10Rien de tel, bien entendu, en 1870. Cette fois-ci, Sand refuse d’« écrire en l’honneur du gouvernement de la République41 ». Elle revient néanmoins dans son Journal à la même impasse politique. En effet, Sand se fait l’interprète justement du paysan pour son public parisien – moins, cette fois, pour disputer ses tendances réactionnaires que pour les étaler, voire les justifier. Afin d’éclaircir ce geste, je veux m’attarder sur un passage où, dans une longue prosopopée, Sand fait parler « Jacques Bonhomme », figure de la paysannerie qui l’a longtemps captivée42. Et elle n’est pas la seule à le faire intervenir dans les débats politiques du moment. Dans une caricature du Charivari du 8 juin 1872, Honoré Daumier dépeint Jacques en électeur qui résiste à la tentation (combien faible !) de la monarchie, incarnée par une vieille décrépite en robe de mariée. Il figure également comme le prétendu auteur provincial d’une brochure anticommunarde – pastiche du traité Qu’est-ce que le Tiers-État ? de l’abbé Sieyès – qui appelle à « décapitaliser Paris » : Qu’est Paris en France ? Absolument tout. Que doit-il être ? Infiniment moins (1871). Chez Sand, Bonhomme s’apprête à participer aux élections :
Jacques Bonhomme, toujours patient, toujours prudent, s’approchant de l’urne avec son sourire de paternité narquoise, dira [au génie de la France] :
— C’est trop tôt, ou c’est trop de projets à la fois ; nous verrons cela aux prochaines élections. [...]
Il pourrait dire aussi et il dira quand il saura parler :
— Vous êtes l’esprit, je suis le corps. Vous êtes le génie, la passion, l’avenir ; je suis de tous les temps, moi ; je suis le bon sens, la patience, la règle. [...] Nous voulons être et nous sommes le frein social, le pouvoir qui enchaîne les passions et qui décrète l’apaisement43.
11Ici, Sand se joue, sciemment, des deux sens de la voix : en votant, en donnant sa voix, le paysan a (pour ainsi dire) parlé ; et Sand prononce, en son nom, ses paroles prudentes. Si ce travail de ventriloquie est nécessaire, c’est que, Sand le souligne, Jacques n’a pas encore trouvé sa voix (« il dira quand il saura parler ») ; elle anticipe ainsi un discours à venir, inventé à partir du geste muet du paysan-électeur, et par lequel celui-ci pourra justifier le rôle – de lourde arrière-garde – qu’il se voit destiné à jouer dans la vie politique.
12À cet effet, Sand fait répéter à Jacques la vision dualiste de la France qu’elle-même vient d’énoncer, selon laquelle le paysan serait « le corps physiologique », le ventre précisément, qui « gêne notre âme ardente » en imposant « la brutalité de ses appétits44 ». Autrement dit, ce qui fait défaut au paysan, dans l’imaginaire sandien, c’est surtout le principe, c’est l’idéal : « Le fait ! le paysan ne croit pas à autre chose45. » « Son idéal, s’il en a un, précise-t-elle, c’est l’individualisme46 » – le désir acharné, disons, d’avoir un champ à soi. Cette conception de la mentalité paysanne n’était guère originale, on l’a déjà vu : Sand prétend identifier dans la paysannerie – pour emprunter les termes de Rancière – « la “lumpenisation” d’une classe », dont le but exclusif se limite à « la stricte conservation de soi47 ». Le paysan ne saurait sacrifier ses intérêts palpables au nom des intérêts de classe (selon le Karl Marx du 18 Brumaire de Louis Bonaparte) ni au nom de l’intérêt de la patrie (selon Renan). Ce qui pourrait nous surprendre, en réalité, c’est que Sand n’y oppose point un contre-discours en tant que tel. Elle se garde de contester ce portrait de « ses préjugés, de ses entêtements, de son ignorance48 », choisissant plutôt de prêcher la tolérance : « [I]l faut aimer et respecter le paysan quand même49. » Prenons comme emblématique de cette manœuvre sa lettre à Henry Harrisse du 12 février 1871 :
Le paysan, c’est-à-dire le nombre, n’a pas de parti. Il ne veut, dit-on, que ses intérêts. Mais ces intérêts, c’est la vie, c’est le pain, la viande que nous consommons, c’est la matière, la vie matérielle que les théoriciens oublient, eux qui ne savent pas qu’un épi n’est pas un chardon50.
13Le prétendu matérialisme du paysan se trouve ainsi reformulé en pierre angulaire de la patrie ; la matière représente le point aveugle du savant, dont la sophistication et l’expertise ne s’étendent pas, évidemment, aussi loin que la vie des champs. En désignant les limites d’un savoir d’élite, Sand formule son argument contre ceux (Flaubert et Renan compris) qui voulaient l’aménagement du suffrage universel – c’est-à-dire, pour reprendre la formule de son Journal, « une aristocratie intellectuelle51 ». Enfermés dans leur coterie, ces penseurs ignorent « ce qui se passe, ce qui se dit et se pense de l’autre côté de leur mur52 ». C’est donc à l’encontre de la théorie politique que Sand valorise, ici et ailleurs, le prétendu « bon sens » du paysan – terme que l’autrice déploie plusieurs fois dans le Journal pour désigner une sagesse (anti-intellectuelle), enracinée dans l’expérience pratique et ordinaire de tout un chacun.
14Certes, ce geste sandien s’inscrit dans une longue tradition : ainsi que le précise Sophia Rosenfeld, « partout, les partisans de la démocratie ont reconnu, ne fût-ce que pour la forme, la valeur épistémologique du jugement collectif, quotidien et instinctif des gens ordinaires53 ». Il suffit, bien sûr, de jeter un œil sur les brochures qui plaident contre le suffrage universel en 1871 pour se faire une idée des fins antidémocratiques auxquelles le terme peut être exploité54. Mais, chez Sand, c’est justement le « gros bon sens populaire » qui s’impose comme la condition même d’une République démocratique et, qui plus est, pacifique. « Il faut que la lourde main de Jacques Bonhomme nous empêche de nous égorger, écrit-elle à Juliette Adam le 22 février 1871, que l’idéal soit contenu quelque temps et que le brutal bon sens nous détourne du suicide55. » Le paysan, le bon sens et, implicitement, le suffrage universel – tous ici posés en équivalents – acquièrent ainsi une fonction historique dans l’imaginaire sandien : celle d’amener la paix et de tempérer la passion radical-républicaine, qui menaçait de susciter une nouvelle guerre civile. En effet, nous décelons dans les écrits de Sand de cette époque une tempérance à l’égard de l’idéalisme républicain dont elle avait pourtant été le chantre, et ceci dans la mesure où elle nous met en garde, ainsi que le note Brigitte Diaz, contre « les dangers d’un idéal brandi comme alibi pour de nouvelles et paradoxales dictatures politiques56 ». Si Sand ne cesse d’insister sur le principe inviolable du suffrage universel – entendu comme « l’expression de la volonté de tous, bonne ou mauvaise » –, c’est justement pour combattre ce qu’elle dénonce comme une sorte d’absolutisme républicain, dont elle accuse notamment les hommes politiques regroupés autour de Gambetta, champion de la guerre à outrance57. Face à ceux qui placeraient la République au-dessus de cette expression de la souveraineté du peuple, l’avis de Sand est tranchant : « Aucune tyrannie ne peut être légitime, pas même celle de l’idéal58. » Ainsi, tout en dénonçant les ravages d’une invasion prussienne, Sand en vient à cibler, dans la toute dernière injonction de son Journal, un autre ennemi, celui-ci venant de l’intérieur : « Serrons nos rangs et méfions-nous de l’étranger ! Il est facile à reconnaître : c’est celui qui se dit plus Français que la France59. » Ou bien, pourrait-on ajouter, plus républicain que la République.
15Cet avertissement même en dit long sur les paradoxes qui s’installèrent en ces moments de crise nationale – paradoxes auxquels, j’insiste, Sand se montre particulièrement sensible. Effectivement, l’autrice se pose, dans son Journal, les questions que Rosanvallon renverra, à son tour, aux pères fondateurs de la République : « [L]es républicains sont-ils philosophiquement vraiment des démocrates ? » Sont-ils prêts à accepter comme condition de la République la « supériorité épistémologique de la démocratie60 » ? Si la voix lucide de Sand pèse dans les débats contemporains sur le suffrage, c’est qu’elle nous oblige à affronter justement l’aporie dans laquelle la pensée républicaine risque de sombrer : qu’est-ce que la République, se demande-t-elle, si elle n’a pas foi en la capacité du nombre ? Si elle ne croit pas que le demos, dans son ensemble, sait se représenter ? Très tôt, Sand s’est rendu compte que la figure du paysan est devenue, on l’a vu, une sorte de symptôme de ces contradictions, en tant qu’il apparaît à la fois comme le cas limite du citoyen-électeur quasiment incapable de voter en connaissance de cause, et comme l’antihéros classique, dont l’esprit rétrograde a empêché la cause républicaine. En faisant l’apologie du paysan, Sand n’a pas voulu – soyons clair – faire abstraction de ces obstacles : elle déplore, au contraire, « l’état d’enfance où on l’a systématiquement tenu61 » ; et au fond, il lui reste toujours le regret que le suffrage universel n’ait pas été établi en 1848 avec la condition obligatoire de l’instruction gratuite62. Et pourtant, si Sand a très bien reconnu l’impératif pédagogique qui s’impose à la démocratie – Rosanvallon l’appelle le projet « démopédique63 » –, elle a néanmoins voulu mettre en valeur un savoir paysan, une sagesse, dont l’intellectuel reste ignorant : elle n’a cessé de croire « l’ignorance du prolétaire honnête par instinct ou par habitude » supérieure à « l’égoïste sensualité » développée par l’instruction64. Autrement dit, dans l’imaginaire sandien, le sens du nombre est forcément « bon ». Quoique imparfait, le suffrage universel porte une autorité qu’on n’a pas le droit de méconnaître – même s’il reste, pour l’autrice, moins l’expression d’une égalité conquise que la condition même d’une égalité à venir.
*
16En fin de compte, Sand a soutenu, pourrait-on dire, et bien avant Jules Ferry, que « la République sera la République des paysans ou elle ne sera pas65 ». Faire confiance à la volonté de la population la plus arriérée, accepter le peuple tel qu’il est – en sa majorité –, c’est la tâche que Sand, archi-idéaliste du siècle, s’impose au cours des années terribles. A-t-on donc affaire à un assouplissement de son radicalisme antérieur ? au délaissement de ses convictions quarante-huitardes ? Tel est, du moins, le sage portrait que les intellectuels de la IIIe République voulaient en faire : peu après sa mort en 1876, Hippolyte Taine vantera le « calme » de la dernière Sand, remise sur la « voie droite » après un temps « de révoltes et d’orages66 ». Une dizaine d’années plus tard, Elme-Marie Caro insistera de même dans sa biographie de l’autrice sur le « notable apaisement » qui se produit en elle dans la dernière période de sa vie67. Certes, l’hostilité de Sand à l’égard de la Commune, qui éclate au milieu de la publication de son Journal, y est pour beaucoup ; et elle lui vaudra des accusations, de la part de certains contemporains exaltés, de n’être « pas assez républicaine68 ». Toute critique de Sand est, évidemment, obligée de donner sens à son apparent délaissement du peuple parisien au printemps 1871. Fini son projet de rallier le paysan à l’ouvrier insurgent des villes : la seule république qui compte, insiste-t-elle, c’est la république « consentie69 ». Déjà, en prenant le parti de la plèbe rurale dans son Journal, Sand se laissait passer – elle le savait très bien – pour « réactionnaire70 ». Mais une telle injure, laisse-t-elle entendre, ne serait qu’un moyen de censure, de disqualifier toute critique de la politique républicaine, surtout de gauche, comme menace ? Quoi qu’il en soit, Sand nous invite à réfléchir sur l’opportunité d’emprunter – sans pour autant épouser – la voix de la réaction.
17Le scepticisme de Sand face à la Commune est évidemment ancré dans ces interrogations sur le bien-fondé d’un régime républicain qui ne saurait comprendre ni accepter la volonté d’un peuple qui n’est guère fait à son image. « C’est au pouvoir émanant du suffrage universel que [la Commune] en veut », entraînée comme elle l’est par un « mépris de tout ce qui n’est pas elle71 », écrit Sand à Flaubert le 14 septembre 1871. La semaine suivante, Sand reprend le fil de son Journal, réaffirmant sa foi en le suffrage rural, malgré tout :
Les communeux comptent sans le paysan, et le paysan c’est la France matérielle invincible. Il fera encore la loi cette fois-ci, avec tous les inconvénients de son ignorance, mais avec tous les bénéfices de son esprit de conservation. Je l’ai dit, je le dis encore, c’est le sauveur inconscient, borné, têtu ; mais je n’en vois pas d’autre72.
18Il nous reste, je crois, à saisir toutes les nuances de cette dernière Sand populiste, qui s’adresse au centre de la périphérie. C’est une Sand obstinée, qui avance ses opinions en reculant, pour ainsi dire. D’où peut-être le geste de déviation qui marque la dernière entrée de son Journal : « Mais ce ne sont pas là mes affaires, dit la fourmi, et je ne suis qu’une fourmi dans ce chaos de montagnes écroulées et de volcans qui surgissent73. » Ainsi Sand joue à se diminuer, à disqualifier même sa prise de parole en matière politique, à travers cette allusion à une fable de La Fontaine, laquelle tourne justement autour de la figure d’un intrus74. Implicitement, c’est un geste qui rétablit la séparation des sphères : en tant que femme, ses réflexions sur l’avenir du suffrage universel masculin sont forcément déplacées. En ce sens, les interventions de Sand dans le domaine politique sont teintées d’ironie, destinées à s’effacer, à se désavouer, à se ranger du côté des réflexions intimes, voire du bon sens : Sand nous livre une pensée politique qui n’en est pas une.
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1 Dans Les Châtiments (1853), Victor Hugo s’attaque aux « comédies de suffrage universel » que représentent les scrutins du Second Empire : Victor Hugo, Les Châtiments, Paris, Flammarion, 2018, p. 259. Particulièrement jusqu’en 1863, l’administration désignait les candidats officiels. Voir Pierre Rosanvallon, Le Sacre du citoyen : histoire du suffrage universel en France, Paris, Gallimard, 1992, p. 409.
2 Raymond Huart, Le Suffrage universel en France (1848-1946), Paris, Aubier, 1991, p. 107.
3 Pierre Rosanvallon, Le Sacre du citoyen, op. cit., p. 409.
4 Ibid., p. 408. C’est Rosanvallon qui souligne.
5 Antoine Compagnon, Les Antimodernes : de Joseph de Maistre à Roland Barthes, Paris, Gallimard, 2005, p. 31.
6 Anatole Prévost-Paradol, article sans titre, Le Journal des débats politiques et littéraires, 20 août 1868, p. 1.
7 George Sand, « Lettre à un ami » [31 août 1870], Le Temps, 5 septembre 1870, p. 3.
8 George Sand, Journal d’un voyageur pendant la guerre, Michelle Perrot (éd.), Bordeaux, Le Castor astral, 2004, p. 199. Désormais, les références à cet ouvrage se feront sous la forme abrégée « Journal ».
9 Michelle Perrot, « George Sand, une républicaine contre la Commune », dans Claude Latta (dir.), La Commune de 1871 : l’événement, les hommes et la mémoire, Saint-Étienne, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2004, p. 154.
10 Cité dans George Sand, Correspondance, Georges Lubin (éd.), Paris, Classiques Garnier, 2013, vol. 22, p. 381.
11 Sur l’aspect documentaire, voir Brigitte Diaz, « Le Journal d’un voyageur pendant la guerre : du reportage au témoignage », Cahiers George Sand, no 37, 2015, p. 169-189.
12 Journal, p. 120.
13 Ibid., p. 35.
14 Dans sa lettre à Henry Harrisse du 12 février 1871, Sand déclare que « la République a été fondée chez nous le jour où nous avons proclamé le suffrage universel », George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 304.
15 À propos de la dimension ethnographique, voir Daniel Bernard, « Le regard ethnographique de George Sand », dans Noëlle Dauphin (dir.), George Sand : terroir et histoire, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 81-103 ; et Anne-Marie Thiesse, « Science du peuple et devoir démocratique en littérature : du folklore au roman paysan », dans Martine Reid & Michèle Riot-Sarcey (dir.), George Sand : littérature et politique, Nantes, Éditions Pleins Feux, 2007, p. 157-163.
16 Gustave Flaubert & George Sand, Correspondance (1863-1876), Thierry Gillybœuf (éd.), Rennes, La Part commune, 2011, p. 504. C’est Flaubert qui souligne.
17 Joseph Guadet, Du suffrage universel et de son application dans un monde nouveau, Bordeaux, P. Chaumas, 1871, p. 4.
18 Voir Hippolyte Taine, Du suffrage universel et de la manière de voter, Paris, Hachette, 1872, p. 44.
19 Gustave Flaubert & George Sand, Correspondance, op. cit., p. 473. C’est Flaubert qui souligne.
20 Antoine Compagnon, Les Antimodernes, op. cit., p. 36. Notons que Renan envoie un exemplaire de sa Réforme intellectuelle et morale à Sand. Voir George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 690.
21 Ernest Renan, La Réforme intellectuelle et morale, Paris, Michel Lévy Frères, 1871, p. 67.
22 Ibid., p. 68.
23 Pierre Rosanvallon, « Renan, père fondateur de la République ? », dans Henry Laurens (dir.), Ernest Renan : la science, la religion, la République, Paris, Odile Jacob, 2013, p. 362.
24 Victor Vallein, « Le suffrage rural », Le Rappel, 11 mars 1871, p. 2. Paul Ribot pose un jugement similaire sur l’ignorance des paysans dans Du suffrage universel et de la souveraineté du peuple, Paris, Michel Lévy Frères, 1874, p. 48.
25 Discours prononcé à Bordeaux le 26 juin 1871. Voir Léon Gambetta, Discours politiques de M. Gambetta (juin 1871-octobre 1873), Paris, Ernest Leroux, 1874, p. 49.
26 Chloé Gaboriaux, La République en quête de citoyens : les républicains français face au bonapartisme rural (1848-1880), Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 2010, p. 241.
27 Ernest Renan, La Réforme intellectuelle et morale, op. cit., p. 23.
28 Ibid., p. 18.
29 Hippolyte Taine, Du suffrage universel, op. cit., p. 25.
30 Jacques Rancière, Le Philosophe et ses pauvres, Paris, Flammarion, 2007, p. iv.
31 Chloé Gaboriaux, La République en quête de citoyens, op. cit., p. 250.
32 Hippolyte Taine, Du suffrage universel, op. cit., p. 26.
33 Ibid.
34 Sur la presse, voir Benedict R. Anderson, L’Imaginaire national : réflexions sur l’origine et l’essor du nationalisme, Pierre-Emmanuel Dauzat (trad.), Paris, La Découverte, 1996, p. 46-47.
35 Hippolyte Taine, Du suffrage universel, op. cit., p. 28.
36 Voir l’avant-propos de George Sand à François le Champi, André Fermigier (éd.), Paris, Gallimard, 2005, p. 53.
37 George Sand, « Paroles de Blaise Bonnin aux bons citoyens », dans Politiques et polémiques (1843-1850), Michelle Perrot (éd.), Paris, Imprimerie nationale, 1997, p. 287.
38 George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 8, p. 727. C’est Sand qui souligne.
39 Ibid., p. 638.
40 George Sand, Politiques et polémiques, op. cit., p. 403.
41 Journal, p. 108.
42 « Jacques ! dans ma pensée », écrit-elle dans son journal de décembre 1851, « j’ai toujours personnifié le peuple sous ce nom, Jacques Bonhomme, c’était le symbole de la servitude patiente au Moyen Âge, », George Sand, Œuvres autobiographiques, Georges Lubin (éd.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1970, vol. 2, p. 1221. Julie Bertrand-Sabiani traite de cette personnification populaire chez Sand dans « De l’utopie à l’histoire : Mauprat et le Journal de décembre 1851 », dans Noëlle Dauphin (dir.), George Sand : terroir et histoire, op. cit., p. 219-230.
43 Journal, p. 121-122. Je souligne.
44 Ibid., p. 119.
45 Ibid., p. 118.
46 Ibid., p. 119.
47 Jacques Rancière, Le Philosophe et ses pauvres, op. cit., p. 144.
48 Journal, p. 25.
49 Ibid., p. 119.
50 George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 305. C’est Sand qui souligne.
51 Journal, p. 151.
52 Ibid., p. 149.
53 Sophia Rosenfeld, Common Sense: A Political History, Cambridge, Harvard University Press, 2011, p. 3. Je traduis.
54 Voir le pamphlet monarchiste La Politique du bon sens, Tours, Cattier, 1871, dont l’auteur anonyme s’attaque justement à l’« égalité mensongère » proclamée par le suffrage universel (p. 7). Une autre brochure anonyme de la même année, Bon sens et politique, Paris, Charles Douniol, 1871, se voudrait un pastiche du « bon sens » en matière de politique, notamment les lois qui régissent le suffrage.
55 George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 315-316.
56 Brigitte Diaz, « Entre spleen et idéal : George Sand et l’écriture de l’histoire (1870-1871) », dans Damien Zanone (dir.), George Sand et l’idéal : une recherche en écriture, Paris, Honoré Champion, 2017, p. 274.
57 George Sand, « Réponse à une amie », Le Temps, 14 novembre 1871, p. 1-2.
58 Journal, p. 143.
59 Ibid., p. 205.
60 Pierre Rosanvallon, Le Sacre du citoyen, op. cit., p. 452. C’est Rosanvallon qui souligne.
61 Journal, p. 152.
62 George Sand exprime ce regret dans son Journal, p. 117. Voir également sa lettre à Henry Harrisse du 12 février 1871 : George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 305.
63 Pierre Rosanvallon, Le Sacre du citoyen, op. cit., p. 470.
64 Lettre à Flaubert du 14 septembre 1871, dans George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 549. Sand poursuit son argument ainsi : « Cette instruction obligatoire que nous voulons tous par respect pour le droit humain, n’est cependant pas une panacée dont il faille s’exagérer les miracles. »
65 Discours de Périgueux du 15 avril 1884, dans Jules Ferry, Discours et opinions de Jules Ferry, Paul Robiquet (éd.), Paris, Armand Colin, 1897, vol. 6, p. 280.
66 Hippolyte Taine, « Au directeur-gérant du Journal des Débats », Journal des débats politiques et littéraires, 2 juillet 1876, p. 3.
67 Elme-Marie Caro, George Sand, Paris, Hachette, 1887, p. 190.
68 Lettre à Edmond Plauchut du 16 juin 1871, dans George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 424. C’est Sand qui souligne. À propos de l’attitude de Sand envers la Commune, voir Géraldi Leroy, « Une “chimérique insurrection” : la Commune de Paris dans les Agendas et la Correspondance de George Sand », dans Noëlle Dauphin (dir.), George Sand : terroir et histoire, op. cit., p. 263-273 ; et Claire White, « Back to her Sheep: The Commune and Peasant Politics in George Sand’s Nanon », Nineteenth-Century French Studies, no 49, 2021, p. 460-476.
69 Journal, p. 109.
70 Ibid., p. 108.
71 George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 554.
72 Lettre du 22 septembre 1871 à sa fille, Solange Clésinger, dans George Sand, Correspondance, op. cit., vol. 22, p. 564-565.
73 Journal, p. 204. C’est Sand qui souligne.
74 George Sand fait allusion à la fable de La Fontaine, « Le geai paré des plumes du paon », qui se termine ainsi : « Je m’en tais, et ne veux leur causer nul ennui :/ Ce ne sont pas là mes affaires », dans Jean de La Fontaine, Œuvres complètes, Jean-Pierre Collinet (éd.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, vol. 1, p. 152. Le geai se transforme en fourmi dans la citation de Sand.
Auteur
Claire White est professeure associée à l’Université de Cambridge et membre du Girton College. Ses recherches portent principalement sur la politique du travail, les classes sociales et l’histoire intellectuelle. Elle a écrit Work and Leisure in Late Nineteenth-Century French Literature and Visual Culture (Palgrave Macmillan, 2014) et est coéditrice de trois ouvrages collectifs, dont notamment The Labour of Literature in Britain and France, 1830-1910: Authorial Work Ethics (Palgrave Macmillan, 2018). Elle est également l’autrice d’une dizaine d’essais sur Émile Zola.
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Biographie & Politique
Vie publique, vie privée, de l'Ancien Régime à la Restauration
Olivier Ferret et Anne-Marie Mercier-Faivre (dir.)
2014