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La Transformation du rapport salarial

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Christian Le Bas

Le modèle américain 1979-1982 : crise et recomposition de la négociation collective dans l’industrie automobile américaine

Benjamin Coriat

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Mots clés :

Salaires

Note de l’auteur

Ce texte a été présenté comme communication au colloque AMES (Automatisation et Mutation Economique et Sociale) qui s’est tenu à Paris les 29 et 30 septembre 1984.

Texte intégral

INTRODUCTION1

  • 1  Le texte qu’on va lire est un résumé extrait d’un rapport de recherche Cf. Coriat (1985a) à paraît (...)

11. Tout d’abord un rappel est nécessaire quant à l’objet de la recherche dont cette communication est extraite. Cette recherche portant sur le thème « L’Emploi dans les stratégies négociées d’Automatisation », se proposait de faire le point sur quelques grands accords clés afin de tenter de tirer quelques enseignements sur la manière dont les différentes dimensions et implications de l’automatisation ont pu entrer dans des dispositions explicitement négociées entre partenaires sociaux.

22. Après une phase d’étude bibliographique, nous nous sommes fixés sur le cas de l’industrie automobile américaine. Celle-ci en effet présente, pour notre objet, l’incomparable avantage d’être le lieu de procédures négociées parfaitement codifiées, se déroulant à échéances régulières (en général trois ans) et couvrant un domaine extrêmement vaste. De plus, dans le cas américain, la procédure est hautement centralisée : un syndicat unique, l’UAW (United Automobile Workers) négocie pour l’essentiel avec trois grandes firmes (les Big Three : Ford, General Motors et Chrysler).

3Dans le cadre d’une telle procédure et dans la période récente, des dispositions spécifiques concernant l’automatisation ont bien explicitement été négociées. Il s’agit notamment d’accords relatifs à la formation du personnel aux nouvelles technologies. Mais plus profondément cependant, c’est l’ensemble des contrats signés en 1979 et surtout en 1982 qui cherchent à enregistrer l’importance des mutations introduites par le trend nouveau d’automatisation engagé au cours de la décennie 70. C’est donc au delà des seules clauses spécifiques, l’ensemble des dispositions contractuelles nouvelles, qui doivent être examinées. Cet élargissement nécessaire de l’objet d’étude constitue au demeurant un considérable enrichissement de la recherche dans la mesure où elle permet de saisir la manière dont les partenaires sociaux traitent de l’automatisation dans la réalité de son contexte : celle d’une mutation d’ensemble de l’industrie automobile, mutation se déroulant elle-même dans le cadre d’une crise longue de l’accumulation du capital.

43. Ceci étant posé, le plan de cet article peut être présenté.

  • Une première section présente les principaux traits du Collective Bargaining traditionnel dans l’industrie automobile, et rappelle leur importance et leur signification.

    • 2  Les Accords 1984 non couverts dans cette communication sont présentés et analysés dans Coriat (198 (...)

    La seconde analyse les inflexions subies dans le Collective Bargaining pendant la période de crise 1979-19822.

  • En guise de conclusion, une troisième section s’interroge sur la signification du modèle américain.

I - 1948-1978 : LES TRAITS ESSENTIELS DU COLLECTIVE BARGAINING DANS L’INDUSTRIE AUTOMOBILE AMERICAINE

5C’est en général de 1948, année au cours de laquelle un accord historique a été signé entre l’UAW et General Motors, que date la naissance du Collective Bargaining aux Etats-Unis. Sans cesse renouvelé dans son principe, et sérieusement enrichi au fil du temps, cet accord va instituer jusqu’en 1978, un système complexe et étonnament stable de négociation collective. C’est ce système qui entre en crise d’abord dans le cas du contrat UAW-Chrysler en 1979, puis en 1982, dans les deux grands contrats de l’UAW avec General Motors et Ford. L’Emploi et l’Automatisation tiennent un rôle-clé dans les dispositions nouvelles de crise de 1979 et 1982. Un véritable modèle nouveau de négociation collective naîtra de cette période. Mais pour apprécier la signification de ces nouveautés, le système du Collective Bargaining doit d’abord être présenté.

6A partir de travaux récents sur ce thème (Katz [1984], Piore et Sabel [1984]), on peut admettre que le système du Collective Bargaining – le cas de l’industrie automobile étant largement exemplaire – présente trois séries de caractères hautement distinctifs. Ils sont relatifs :

  • au mode d’établissement et de fixation du salaire (Wage Rules) ;

  • aux modalités de la diffusion et de l’application des accords à travers les établissements ou les entreprises (système dit du « Pattern » ou du « Connective Bargaining » ;

  • à la définition et au contrôle des règles de travail (Work Rules et Job Control).

7De fait, ces trois séries de dispositions interagissent les unes avec les autres, et c’est bien dans ce sens qu’il s’agit d’un système même si il s’agit davantage d’un « empilement » de dispositions et de règles d’usage ou négociées, qui résultant de compromis passés à des périodes différentes, correspondent à des rapports de force qui ont eux-mêmes variés au cours du temps.

8Quelques précisions sont ici nécessaires.

§ 1 Modalité d’établissement du salaire (Wage Rule)

  • 3  Sur la naissance de la COLA et de l’AIF, et sur leur signification historique, voir Arthur M. Roos (...)

9A – En ce qui concerne l’établissement du salaire direct, et ce depuis 1948, le système est construit sur deux règles strictes et constamment réappliquées qui prévoient d’une part une indexation du salaire sur les prix, d’autre part une augmentation régulière et périodique du taux de salaire horaire. Ces deux règles correspondent à deux formules : la COLA et l’AIF3 que nous présentons maintenant rapidement.

10– La COLA (Cost of Living Adjustement), on l’a dit, instaure une formule d’indexation du salaire sur les prix, ce qu’en Europe après guerre, on appellera aussi l’échelle mobile des salaires. Dans l’accord de 1948, conclu pour deux ans, il est prévu que le salaire augmentera de 1 % chaque fois que l’indice des prix (Consumer Index Prices) s’élèvera de 1,14 %. Pour les travailleurs en chaîne (Line Workers), le lien est plus rigoureux : 1 % d’augmentation du salaire horaire pour chaque augmentation de 1 % de l’indice des prix. De même pour certaines catégories de travailleurs hautement qualifiés, des avenants particuliers et plus favorables que ce que prévoient les dispositions généralement applicables, sont négociés.

11Parallèlement à la COLA, est instaurée :

12– l’AIF (Annual Improvement Factor) qui, dans l’accord de 1948, prévoit une augmentation annuelle de 3 cents de l’heure, ce qui représente pour l’époque, environ 3 % du salaire horaire. Théoriquement, l’AIF vient tenir compte de l’accroissement annuel de la productivité et de la part qui en revient au travail ; il en résultera, comme on le verra (cf. § 4) certaines contreparties exigées des syndicats en ce qui concerne cette question-clé de l’évolution de la productivité que sont les règles de travail (Work Rules).

13La signification de ces dispositions est de grande portée puisque pratiquement, c’est l’établissement de règles assurant l’augmentation du pouvoir d’achat (ou si l’on préfère du salaire réel) qui résulte de l’application de la double formule de 1948. (En contrepartie, et pendant toute la durée de l’accord, – le premier sera de deux ans, le second de cinq ans, les suivants tri-annuels, – le syndicat non seulement renonce à la grève, mais veille à faire rigoureusement accepter toutes les dispositions de l’accord par l’ensemble des syndicats de base qui y sont soumis).

14Ainsi sans risque d’erreur, on peut affirmer que le système AIF + COLA constitue la clé de voûte de tout le Collective Bargaining. Et c’est cette clé même qui dans la période 1979-1982 est mise en question.

15B – La mise en chômage et sa protection. Au-delà du taux de salaire horaire, et sous le vocable général de « Fringe benefits », c’est un ensemble de prestations aussi variées que complexes qui sont négociées dans les contrats collectifs d’entreprise ou de branche. Pratiquement, il s’agit de l’essentiel de prestations qui, en France, sont gérées centralement par la Sécurité Sociale. Hors les « pensions)) – allocations de retraite dont nous ne dirons rien ici – les dispositions clés concernent les modalités de la mise en chômage (système dit du « Lay-off/Recall ») et les indemnités qui y sont associées. S’il convient de s’arrêter sur ces points, c’est que là encore on apercevra que les négociations de 1979-82, sont porteuses de nombreuses innovations dont l’appréciation n’est pas aisée.

16■ Lay-off et Recall :

  • 4  Sur la genèse et les conditions de l’affirmation du Lay-off/Recall, basé sur le droit d’antériorit (...)

17Une souplesse particulière du système américain, consiste dans le fait que l’entreprise peut, pratiquement sans préavis et à tout moment, « ajuster » le volume de l’emploi aux variations conjoncturelles – quelqu’en soit la cause au demeurant : mévente, rupture d’approvisionnement, retournement cyclique... Pour ce faire, l’entreprise procède à la mise en « Lay-off » du nombre des travailleurs jugés par elle surnuméraires. Exclu du travail, le travailleur reste cependant en principe formellement rattaché à l’entreprise. Aussi, est-il contractuellement admis, qu’au moment de la reprise, ces travailleurs, écartés de l’emploi, possèdent « un droit au Recall)) (Rappel) : c’est à eux, que l’entreprise qui a procédé au Lay-off doit d’abord s’adresser avant, si besoin en est, de procéder à des embauches « extérieures »4.

  • 5  L’importance de cette pratique des listes basées sur la seniority, apparaîtra clairement si l’on p (...)

18Petit à petit, cette pratique du Lay-off/Recall s’est compliquée en s’organisant autour d’une autre notion-clé du contrat collectif américain. Celle du droit d’antériorité (Seniority) qu’on peut aussi traduire (quoique plus platement) par « ancienneté ». En vertu de ce principe, ou de ce droit d’antériorité, l’entreprise ne peut procéder au Lay-off que suivant un ordre d’ancienneté (en commençant par les plus récents embauchés) extrêmement rigoureux et suivant une liste, méticuleusement tenue, souvent atelier par atelier5. Dans les contrats collectifs stabilisés autour des années 50 et 60, il est admis que le droit au Recall vaut pour une durée d’un an. Passé cette période, le droit est « suspendu » et devient dépendant des rapports de force et des contextes locaux.

19Parallèlement à cette progressive modification du système Lay-off/ Recall, aujourd’hui de règle dans l’ensemble de l’industrie, la négociation s’est concentrée sur le montant et la durée des allocations chômage, que celles-ci résultent des Lay-off ou des licenciements.

20■Le SUB (Supplementary Unemployment Benefits) : l’assistance chômage

21Limité à quelques industries dont tout particulièrement celle de l’Automobile, le SUB prévoit à partir d’une cotisation essentiellement patronale une série de prestations dont les plus importantes concernent les travailleurs mis en Lay-off. A partir de 1967, le SUB dans l’industrie automobile prévoit une indemnité de 95 % du salaire pour une durée de 52 semaines. Comme on le voit cette période, et ce n’est pas le fait du hasard, coïncide avec celle d’extension des droits au Recall.

22Au total, cette première série de traits distinctifs du Collective Bargaining appelle quelques remarques.

23– Il faut tout d’abord noter que si le système est remarquablement stable, il n’est pas dépourvu d’une certaine plasticité et adaptabilité. Ainsi en 1964 et 1967, par exemple, des concessions sont faites sur la COLA, mais elles visent à permettre la consolidation du SUB. Système complexe, une certaine « régulation » peut, si nécessaire, s’effectuer entre les différentes dispositions.

24– Le système n’a pas supprimé tensions et grèves, mais celles-ci sont relativement circonscrites et n’ont jamais abouti à des crises majeures ou à des ruptures des compromis de base.

25– Quant au salaire direct lui-même, il est remarquable de constater qu’il est quasi insensible aux variations conjoncturelles ou cycliques dans un pays où, traditionnellement, elles demeurent fortement marquées. Sans doute cela tient-il au fait que considéré dans son ensemble, et abstraction faite des dépressions cycliques, la période 1948-1978 est une période de croissance continue pour l’industrie automobile américaine.

26La relative stabilité du système des salaires est encore renforcée par la pratique du Connective Bargaining qui constitue la deuxième grande caractéristique du système des relations industrielles dans l’industrie automobile.

§ 2 Le Connective Bargaining : la socialisation du contrat

27L’expression « Connective Bargaining » désigne une double spécificité du système des relations industrielles américaines, particulièrement accentuée dans l’industrie automobile. Il s’agit du double fait que :

  • Le « Master Contract » (Contrat central) négocié avec une compagnie « cible » – traditionnellement choisie tous les trois ans par UAW – est ensuite reconduit pratiquement dans les mêmes termes, avec les autres compagnies de la branche ;

  • Même si théoriquement le contrat central est renégocié dans chaque établissement local de la compagnie, pour ce qui concerne ses conditions d’application particulières, s’est affirmé une très forte tendance à l’homogénéisation et à l’uniformisation des dispositions à travers les établissements d’une même compagnie.

  • 6  Si nous insistons sur ce point c’est que là encore, et sans doute est-ce l’un des résultats les pl (...)

28Ainsi, brièvement, le Connective Bargaining peut être défini comme consistant en une double socialisation, inter et intra entreprises des dispositions d’abord centralement négociées avec une entreprise cible de la branche6. Cette caractéristique du contrat collectif dans l’automobile ne s’est pas établie en un jour, et aujourd’hui l’uniformité formelle peut masquer des différences profondes pour tout ce qui concerne en particulier l’effectivité des règles de travail (Work Rules). Ce système ne s’est progressivement imposé que parce que des facteurs puissants ont milité pour une centralisation toujours plus haute de la négociation. Plus que jamais, c’est le heu de se souvenir que l’UAW est le syndicat unique de l’automobile et que la branche se ramène en fait à trois constructeurs essentiels.

29Malgré des différences qui n’ont pu être effacées, il reste que le système du Connective Bargaining présente des particularités et une signification économique remarquable.

30– Il contribue souvent efficacement à abolir la compétition entre travailleurs individuels (ainsi d’ailleurs en est-il du droit d’antériorité – la fameuse Seniority) et par là, il décourage fortement les compagnies de procéder à des transferts inter-entreprises d’emplois ou à de nouvelles localisations, le coût salarial étant en principe sensiblement le même. Le Connective Bargaining est ainsi un puissant instrument institutionnel de non flexibilité à la baisse du salaire.

31– Dans une économie et une branche fortement marquées par les variations conjoncturelles ou cycliques, il est aussi un instrument de stabilisation du pouvoir d’achat et joue incontestablement un rôle contre-cyclique, pour autant du moins qu’il s’agit de cycles à amplitude courte.

  • 7  Elaborée autour d’une tradition française, il est significatif d’observer que ces principes de car (...)

32Il s’agit bien ainsi d’une de ces dispositions institutionnelles-clé, relatives au rapport salarial, par où des auteurs contemporains voient l’un des fondements d’un mode nouveau de régulation, caractéristique de l’après-guerre, et de la double hégémonie du Fordisme et du Keynésianisme7.

§ 3 Le Job Control System : la définition négociée des règles et des standards de travail

33L’ultime grande caractéristique des relations industrielles et du contrat collectif dans l’automobile, réside dans l’extraordinaire détail, soin et minutie, accordés de manière négociée et codifiée à la description des règles des normes et des standards de travail suivant les métiers, les départements ou même les postes de travail. L’ampleur de ces dispositions ne peut être saisie que si l’on garde en mémoire plusieurs des caractéristiques de l’histoire industrielle américaine. Il faut en effet se souvenir que le syndicalisme américain s’est construit d’abord et avant tout sur le Craft System, c’est-à-dire la défense et l’organisation des métiers et du travail qualifié. Aussi, même lorsque le cours et la force des choses aidant, l’Unionisme s’est développé sur une base industrielle – ce qui fut le cas de UAW, tôt détaché en 1935 de l’AFL pour venir grossir les rangs du CIO – la vigilance dans la pratique de défense des métiers, à partir de la négociation des règles de travail, est demeurée haute et vive.

34Surtout, et sans doute est-ce là l’essentiel, l’assentiment explicite ou tacite à l’économie de marché et à la libre entreprise dont a bénéficié l’économie américaine, notamment après la Deuxième Guerre mondiale, a trouvé une sorte de contrepartie dans une attitude du syndicalisme américain (et tout particulièrement dans l’automobile), qui s’est organisé tout entier et souvent arc-bouté dans la définition et la défense de règles de travail où les Unions ont originellement puisé l’essentiel de leur identité et de leur rapport de forces.

35Ce fait s’exprime de façon particulièrement claire et paradoxale dans le destin du Taylorisme dans l’industrie américaine. Passé la période de l’opposition déclarée (on peut considérer que l’échec et la répression des vagues de grèves de 1919 après la Première Guerre mondiale en constituent un moment-clé), le Scientific Management s’est développé plus tôt, plus rapidement et plus en profondeur que dans tout autre pays. Le caractère paradoxal des choses est que, là plus qu’ailleurs, à l’exception notable de la Grande-Bretagne – la contrepartie de cette acceptation a été la définition beaucoup plus stricte, détaillée et pointilleuse qu’ailleurs des Work Rules résultant de l’application du Scientific Management et pour lesquels les employeurs sont tenus d’accepter un certain contrôle syndical en quoi consiste précisément le Job Control System.

36C’est l’ensemble de ce système qui, dans les conditions de la crise de 1979-1982, va se trouver profondément bouleversé.

II – 1979-1982 : UN MODELE CONTRACTUEL DE TYPE NOUVEAU

37Pionnier en 1948 et 1950 dans l’établissement des formules contractuelles de l’après-guerre, un privilège moins glorieux revient aussi à l’UAW, à partir de 1979, celui d’avoir ouvert la voie à des concessions contractuelles majeures (Concession Bargaining) dans tout le pays après qu’elles aient été concédées tout d’abord à Chrysler. L’AIF, la COLA, les PPH (Personal Paid Hohdays), toutes les grandes conquêtes de 30 ans de mouvement ouvrier, sont – en principe provisoirement – abandonnées. Comment en est-on arrivé là ?

38C’est à différents éléments qui ont conjugué leurs effets qu’il faut se référer pour expliquer la crise du Collective Bargaining qui pendant trente ans avait été reconduit sous une forme pratiquement non modifiée. Ces éléments peuvent être regroupés dans trois séries de phénomènes.

39Après les avoir brièvement rappelés (§ 1), les nouvelles dispositions institutionnelles sont présentées (§ 2,3 et 4).

§ 1 Le contexte et l’esprit de la négociation

401 – D’abord et avant tout, il faut rappeler que les négociations de 1979-82 se font au sein d’un des plus violents retournements cycliques de l’après-guerre – tant en amplitude qu’en durée. Concernant l’ensemble de l’économie américaine, il est comme toujours particulièrement fort dans l’automobile. Les tableaux joints en annexe permettent de visualiser rapidement l’ampleur des dégâts provoqués par la crise. Pour la seule industrie automobile (à l’exclusion des camions), le niveau d’emplois passe de 735 000 en 1978 à 530 000 en 1982, ce sont 200 000 emplois qui sont perdus en l’espace de quelques années. Cette situation va créer des difficultés particulières pour l’UAW, dans la mesure où une partie importante de sa propre clientèle traditionnelle se trouve en Lay-off et dans certains cas en dehors de la période de bénéfice des indemnités chômage. On apercevra que cette préoccupation de l’UAW (protéger sa clientèle traditionnelle et renégocier les conditions de l’indemnisation chômage) explique certaines des dispositions nouvelles qui seront négociées dans le contrat de 1982.

412 – Ensuite, et plus profondément, la fin de la décennie révèle, sous la pression de la concurrence japonaise, une fragilité insoupçonnée de l’industrie automobile américaine qui doit affronter des changements majeurs. Il faut ici noter que, pour la première fois depuis plusieurs décennies, l’industrie automobile est confrontée à une mutation qui concerne tant la technologie du process, que la technologie du produit. Pionnière dans cette double mutation, l’industrie japonaise occupe rapidement une place privilégiée sur le propre marché intérieur américain, menaçant l’équilibre des grandes firmes nationales. Il faudra toute l’activité d’un lobby formidablement puissant pour obtenir que des quotas soient imposés aux fabricants japonais : les immatriculations japonaises sont limitées à 1,8 million de véhicules par an. Dans ce contexte, les firmes américaines s’engagent dans des programmes immenses de robotisation (cf. Annexe III).

423 – Enfin le type de comportement développé par les firmes automobiles appuyé et relayé par la législation et la jurisprudence fédérales prennent un tour et un accent déstabilisateur pour le syndicalisme, et dans certains cas revêtent des dimensions nettement anti-syndicales. Il s’agit ici de plusieurs phénomènes connexes. Tout d’abord dans le mouvement de réindustrialisation qui a démarré déjà dans la décennie 70, les localisations privilégiées sont souvent celles du Sud et de l’Ouest où les conditions de syndicalisation sont beaucoup plus draconiennes. UAW voit ainsi s’effriter sa base syndicale. Dans le même temps, la nouvelle administration fédérale américaine établit une jurisprudence beaucoup plus dure en ce qui concerne les conditions de la reconnaissance du syndicat et plus généralement pour tout ce qui concerne les conflits relatifs à l’application du droit du travail. Enfin, bien qu’il s’agisse ici d’un élément de caractère un peu différent, les grandes firmes de l’automobile multiplient la pratique de la sous-traitance industrielle dans comme hors des Etats-Unis, ce qui contribue à vider encore les grandes usines syndicalisées de leurs effectifs et de leur base traditionnelle. (Cf. sur tous ces points : Bluestone et Harrison [1982]).

  • 8  L’ensemble de la négociation Chrysler est rapporté en détail dans notre rapport de recherche, CORI (...)

43Dans ce contexte extrêmement défavorable au syndicalisme s’ouvre une période dite de « Concession bargaining » dont rien n’indique qu’elle soit aujourd’hui achevée. Dans l’automobile, on l’a dit, c’est l’épisode Chrysler qui inaugure le Concession Bargaining, et ce dès 1979. Mais il est par trop particulier pour servir d’instrument de réflexion8. Les deux grands contrats de 1982 avec Ford et General Motors que nous allons examiner maintenant sont, au contraire, parfaitement illustratifs de la crise et du nouveau cours qui va affecter le Concession Bargaining.

L’esprit de la négociation : le salaire contre l’emploi

44C’est en janvier 1982, qu’est signé avec Ford un contrat qualifié « d’historique ». Si l’expression est, sans doute, quelque peu exagérée, il est certain que les contrats de 1982 (signés d’abord avec Ford, ils seront étendus, à quelques modifications près, à General Motors) contiennent des dispositions qui constituent de puissantes innovations dans la structure du Collective Bargaining. En effet, si des concessions salariales importantes sont faites par les syndicats – après Chrysler la chose était attendue –, la nouveauté est venue de ce que au moins formellement, à ces concessions sont associées de véritables contreparties. Pour l’essentiel, sans rompre totalement avec la structure classique du Collective Bargaining, le contrat 1982 porte les marques évidentes d’une inflexion profonde. Quant au fond, il s’agit de contreparties réciproques. Les syndicats cèdent sur les salaires, les entreprises concèdent des garanties nouvelles sur la sécurité de l’emploi et l’indemnisation chômage.

45Mais cette structure nouvelle ne s’affirme qu’à travers, comme à l’accoutumée, un jeu complexe de dispositions. Elles peuvent être regroupées en trois titres qui concernent le salaire, le chômage et l’emploi, la formation aux nouvelles technologies.

§ 2 Le salaire : abaissement du salaire réel et partage des bénéfices

46C’est ici, par excellence, le domaine des concessions faites par UAW. Le montant total des concessions salariales faites est situé à un volume qui oscille entre 600 millions et un milliard de dollars (pour la seule entreprise Ford). Elles viennent de :

  • Suspension de l’AIF pour toute la durée du contrat. Le gel des salaires est ainsi assuré.

  • La COLA est maintenue, mais les trois premières échéances sont reportées à 18 mois.

47Ainsi la formule de base AIF + COLA est fondamentalement altérée, puisqu’aucune progression du pouvoir d’achat n’est prévue d’un côté, et que de l’autre les délais d’application de la COLA se traduisent en fait par une certaine perte du pouvoir d’achat réel.

48D’autres concession sont aussi faites :

  • Les nouveaux embauchés ne toucheront que 85 % du salaire de leur catégorie pendant les six premiers mois, 90 % les six suivants et 95 % les six suivants. Une fois embauchés, ils ne récupéreront pas les différences de salaire qu’ils ont dû concéder au moment de l’embauche.

    • 9  Dès 1976, et surtout en 1979, avec GM et Ford, UAW poursuivant l’objectif d’une semaine de travail (...)

    Les Personal Paid Holydays (PPH) sont supprimés pour toute la durée du contrat (soit 8 à 9 jours par an pendant 30 mois9>.

49Au total, il s’agirait de concessions estimées à 200 dollars par voiture (contre 500 chez Chrysler après les trois rounds de 1979, 1980, 1981).

50Devant l’ampleur de ces concessions, une soupape est néanmoins introduite. En substitution de l’AIF qui a disparu de ce contrat apparaît le profit sharing : une formule de partage des bénéfices. Au delà de la concession, si la formule venait à se confirmer, il s’agirait d’une mutation fondamentale dans le mode d’établissement du salaire : à un principe rigide et automatique d’augmentation du salaire se substituerait une formule beaucoup plus souple et aléatoire faisant dépendre les hausses des performances individuelles de chaque compagnie. Il convient de préciser que ces concessions salariales, considérables comme on a pu le mesurer, ont été obtenues par les entreprises américaines qui ont sans cesse fait valoir le considérable différentiel de salaires entre l’industrie américaine (on estime que le salaire horaire, charges indirectes comprises s’élève à 22/23 dollars aux Etats-Unis, contre 12 à 14 au Japon, quoique ces chiffres puissent être longuement discutés). UAW en faisant ces concessions salariales, entendait œuvrer à la restauration de la compétitivité des entreprises américaines, en particulier il s’agissait de leur permettre de réinvestir sur le marché des automobiles petites et moyennes, pratiquement entièrement tenu par les Japonais.

§ 3 Les contreparties sur l’emploi

51Les « contreparties » – souvent conditionnelles comme on le verra – consistent toutes en des innovations institutionnelles. Elles concernent tant les indemnités de chômage que des garanties concernant l’emploi existant. Elles sont examinées séparément.

Renforcement et allongement des indemnités de chômage

52Tout d’abord le SUB est prolongé de 26 semaines pour les travailleurs disposant d’une ancienneté suffisante, ce qui permet à certains travailleurs en Lay-off de recommencer à bénéficier de certaines allocations chômage.

53Ensuite, et c’est la nouveauté à laquelle il est donné le maximum de publicité, est instauré un GIS (Guaranted Income Stream) – Flux de revenu garanti – qui assure une garantie de revenus de l’ordre de 50 % du salaire antérieur pour les travailleurs licenciés disposant d’au moins 15 ans d’ancienneté, et ce jusqu’à l’âge de la retraite. En apparence, il s’agit d’une nouveauté de considérable importance. Dans la pratique, le système s’avèrera très limitatif. Le refus d’un emploi offert aux bénéficiaires du GIS – y compris en dehors de la branche et à des taux de salaire inférieurs à ceux antérieurement tenus – amenant suppression du bénéfice du GIS.

54Au total, à travers cette double mesure, il s’agit d’une adaptation du SUE à des Lay-off d’une durée plus longue que prévue. Le GIS de son côté permettant un certain ecrêtement accompagné de mesures sociales des classes d’âge les plus élevées de la branche.

Moratoires sur les fermetures d’usines et mesures de maintien des emplois menacés

55Ici, deux séries de mesures négociées ont été prises.

56a – Des Moratoires sont prononcés sur des usines dont la fermeture était annoncée. En fait, l’application de ces dispositions est quelque peu complexe. Plusieurs cas sont prévus :

  • le cas de fermeture pure et simple par cessation d’activité jugée non rentable ;

  • le cas d’usine fermée parce que la compagnie préfère recourir à la sous-traitance (out sourcing) nationale ou internationale.

57Dans ces deux cas, petit à petit, s’est affirmée la même pratique. La compagnie qui entend procéder à une fermeture, en fait l’annonce préalable aux syndicats locaux concernés. Ceux-ci disposent alors d’un délai pour faire une offre à la compagnie lui permettant de retrouver sa compétitivité et de surseoir ou de renoncer à la fermeture. Cette offre consiste fondamentalement en une modification des Work Rules – c’est-à-dire une nouvelle répartition des tâches et des fonctions – permettant une plus haute productivité. Notons qu’il s’agit sans doute là, quoique de maniére n on spectaculaire – de la mutation la plus essentielle née des contrats de 1982. Sous la pression et la menace du chômage, les syndicats vont être obligés de renoncer à des dimensions essentielles du Job Control. En gagnant la flexibilité dans l’usage de la force de travail, les compagnies brisent le dispositif principal de défense qu’avait élaboré le syndicalisme américain en contrepartie de son acceptation tacite du Taylorisme. La revue Business Week parle d’une « révolution dans l’atelier » susceptible de favoriser des gains de productivité de l’ordre de 25 %.

58Il faut ici encore préciser que négociée d’abord chez Ford comme élément conditionnel de la fermeture d’usine, la renégociation des Work Rules devient dans le contrat GM de droit et générale (pratiquement Ford bénéficiera de ce même droit quoiqu’il ne fut pas avec lui centralement négocié).

59Ces dispositions sont sans doute de celles qui furent le plus vigoureusement contestées. Outre qu’elles mettaient légalement en cause le principe du Job Control, on s’est longuement interrogé sur le point de savoir si le relèvement de la productivité par l’augmentation des rythmes de travail était bien à même de préserver le volume de l’emploi.

60b – Des expériences d’emploi garanti pour 80 % des travailleurs dans quatre usines de la GM et deux de chez Ford sont introduites. L’emploi n’est garanti que pour la durée du contrat. Il s’agit bien entendu de travailleurs à haute Seniority, mais ils doivent en contrepartie accepter des changements de postes, là encore contraires à tout l’esprit et à la pratique du Job Rule. Dans certaines usines, l’expérience a été rapidement abandonnée, les travailleurs ayant préféré renoncer à l’emploi garanti, plutôt que d’accepter la flexibilité intrene sur les postes de travail qui en étaient la condition.

§ 4 Commissions paritaires de formation aux nouvelles technologies

61Bien que des dispositions relatives aux nouvelles technologies soient présentes dans les contrats de 1976 et 1979, il est clair que l’importance qu’elles tiennent dans les contrats 1982, constituent une autre grande nouveauté institutionnelle.

62A titre d’illustration, c’est le cas des dispositions prévues dans le contrat UAW-Ford qui est ici exprimé.

63Au terme de l’accord central (Master Contract) est créé un National Development and Traning Center : NDTC (Centre national de développement et de formation). Constitué sumne base rigoureusement paritaire (moitié de représentants de la direction, moitié de représentants des travailleurs), dès 1982, il met en place trois séries de programmes.

Le NVRAP : National Vocational Retraining Assistance Plan

64Comme son nom l’indique, il s’agit d’un plan d’assistance aux travailleurs désireux de suivre des cours de formation afin de se recycler dans une... discipline ou un métier. Il présente plusieurs caractères originaux. Il est réservé aux travailleurs en Lay-off. L’assistance concerne le fait que c’est le NVRAP qui paie le ou les cours suivis par le travailleur. Celui-ci choisit librement le, ou les cours suivis sur une liste établie par le NVRAP et qui couvre des formations offertes sur l’ensemble du pays. Une restriction est faite : le plan n’assure les frais qu’à concurrence de 1000 dollars par travailleur et par an.

65Il s’agit comme on le voit d’une forme souple qui fait appel à l’initiative et aux préférences des postulants à la formation.

Le TVR : Targeted Vocational Retraining

66Toujours destiné à des travailleurs en Lay-off, le TVR s’est fixé des objectifs très précis. Il s’agit cette fois de cours intensifs (près de 16 à 50 semaines) destinés à des travailleurs déjà qualifiés et sélectionnés pour des formations relativement « pointues » aux nouvelles technologies. Celles-ci sont établies en fonction des déficits ou demandes existants sur le marché du travail. Ce plan ne concerne qu’un nombre restreint de travailleurs : 350 ont été sélectionnés au cours d’une première phase en 1982.

Le CGC : Career Counseling and Guidance

67Ce programme concerne cette fois prioritairement les travailleurs bénéficiant d’un emploi. Il s’agit, en leur donnant accès à des formations par eux souhaitées (mais négociées avec le Management) de les aider à réaliser un plan de carrière à travers une série échelonnée dans le temps de formation. Ceci pouvant se faire de manière interne ou externe à l’entreprise.

68Comme son nom l’indique, le programme a pour but d’aider et de conseiller les individus et les groupes qui poursuivent certains objectifs de carrière dans des métiers ou une profession liés aux nouvelles technologies.

69Chez GM, quoique sous des formes différentes, des plans de même nature ont été mis enplace à la suite des contrats de 1982.

III – CONCLUSIONS : LE MODELE AMERICAIN ET SA SIGNIFICATION

70Parvenu au terme de cette étude, il est possible de résumer en quelques propositions les principaux points acquis comme les questions que fait surgir le « modèle américain ».

711 – Il est clair que la structure traditionnelle du Collective Bargaining – telle qu’elle s’est constituée et affirmée dans la période 1948- 1978 – sort profondément modifiée de la crise de 1979-1982.

722 – Tant au niveau micro que macro économique, l’effet « régulateur » du Collective Bargaining se trouve de ce fait annulé par les nouvelles dispositions négociées à la faveur de la crise. Ceci peut être nettement établi sur pratiquement tous les points-clé de la structure traditionnelle.

73■Tout d’abord à la rigidité des salaires à la baisse (COLA) et au principe de l’augmentation périodique du salaire réel (COLA + AIF) a été substitué un « gel » ou un abaissement du salaire réel (suppression de l’AIF, effet retardé du COLA). De plus, les formules de « profit sharing » (partage des bénéfices) ont eu pour effet de flexibiliser les hausses éventuelles en les rendant conditionnelles et liées aux performances particulières et individuelles de chaque compagnie.

74■Ainsi, le rôle de socialisation des gains de productivité à travers les entreprises et les compagnies autrefois assuré par le « Connective Bargaining » est lui aussi largement mis en cause. D’abord parce que le même « Master Contract » ne concerne plus que les seules GM et Ford (Chrysler, Volkwagen, AMC y échappent totalement), ensuite plus subtilement parce que la renégociation locale des Work Rules creuse des différences profondes suivant les entreprises en principe soumises au même Master Contract (au sein de la GM comme au sein de Ford).

75On peut ainsi soutenir que la période 1979-1982, tout en permettant une double offensive des entreprises sur le terrain du salaire et de la productivité, a considérablement affadi et affaibli le rôle traditionnel du Collective Bargaining. De « politique keynésienne des revenus sans Etat keynésien » (Piore et Sabel [1984]) qu’il était, le Collective Bargaining s’est aligné sur les nouvelles tendances de la recherche de la flexibilité qui se sont faites jour à l’occasion de la crise économique.

763 – Dans le même temps, des dispositions « positives » nouvelles – quoique que conditionnelles et limitées – ont fait leur apparition. Elles concernent la tentative de mieux garantir l’emploi pour les catégories de travailleurs disposant d’une certaine ancienneté, mais il s’agit ici au fond d’une extension et d’une application de la Seniority aux conditions de la crise. Ceci vaut tout particulièrement pour ce qui concerne les nouvelles dispositions relatives au SUB, et l’institution nouvelle du GIS.

77Au delà encore, on peut admettre que le Collective Bargaining s’est élargi à des domaines nouveaux : l’out sourcing (la sous-traitance) entre dans la négociation collective, la formation devient objet de discussions et de décisions paritaires, dans certains cas, l’accès aux informations (concernant notamment les nouvelles technologies) est mieux réalisé.

78Cette série de dispositions nouvelles peut être ainsi considérée comme constituant des « contreparties » obtenues par les syndicats en échange des concessions, notamment salariales qu’ils ont dû effectuer.

794 – C’est en ce sens qu’il est possible de parler d’un nouveau « modèle » américain de négociation collective dans la crise. Quant à sa signification et sa portée, les experts sont divisés. Certains, tel Mitchell (1980 et 1983) souteinnent qu’il ne s’agit que d’une inflexion provisoire, d’autres, au contraire, (Piore et Sabel [1984], Katz [1984]) voient dans les contrats de 1979-82, les prémisses d’une structure entièrement nouvelle. L’avenir dira ce qu’il en est.

80Pour notre part, on se bornera à faire remarquer que le nouveau « modèle » paraît remarquablement en « phase » avec d’autres dimensions de la régulation « néo-libérale » qui se met en place à l’occasion de la crise dans pratiquement tous les grands pays développés. De là, il paraît clair aussi que l’avenir du « nouveau modèle » est profondément « solidaire » de ces autres tendances de la gestion macro-économique qui est faite de la crise.

81C’est l’efficacité de cette nouvelle gestion macro-économique de la crise, pour ce qui concerne sa capacité tant à absorber les dépressions les plus brutales, qu’à assurer les nécessaires redéploiements, qui décidera de la possibilité de reconduire et d’affiner le nouveau modèle de négociation collective. Il est clair en tout cas que les mutations dans les relations industrielles que nous venons d’indiquer dans le cas américain, sont partie intégrante de la nouvelle régulation d’ensemble qui cherche à se mettre en place 10.

Bibliographie

REFERENCES

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R. BOYER, Les transformations du rapport salarial dans la crise actuelle. Aspects économiques et sociaux, in Critique de l’Economie politique, Revue, no 15-16, avril-juin, 1981.

B. CORIAT, Relations industrielles, Rapport salarial et Régulation : L’inflexion néo-libérale, in Consommation, no 3, 1982.

B. CORIAT, L’Emploi dans les Stratégies négociées d’Automation – Le Modèle amrécian – Rapport de recherche CRESST pour le programme AMES, 1985a.

B. CORIAT, Les Accords 1984, Technologie, Emploi, Solaire dans l’industrie automobile américiane, in Travail no 9, America, America (Travail, 6 boulevard Richard Lenoir, 75010 Paris), 1985b.

F. HARBISON : The General Motors – United Auto Workers Agreement of 1950, in Journal of Political Economy, octobre, n° 5,vol. LVIII, 1950.

INTERSOCIAL, Revue mensuelle, Divers numéros, 1980-1983.

H. KATZ, Shifting gears, Changing labor relations in the US Automobile industry, Forth coming, MIT Press, 1984.

LABOR Monthly Reviews, Revue mensuelle, Divers numéros, 1980-1983.

G. MARGIRIER, Quelques aspects des transformations récentes du rapport salarial, in Critiques de l’Economie politique, no 26-27, Paris, La Découverte.

D. MITCHELL, Union, Wages and Inflation, ed. The Brookings Institution, Washington DC, 1980.

OCDE, Les Etats-Unis, Série Etudes Economiques, 1983-84, Paris.

M. PIORE, C. SABEL, The Second Industrial Divide : Possibilities of Prosperity, Forthcoming, New York, Basic Books, 1984.

M. REDER, The Significance of the 1948 General Motors Agreement, in The Review of Economies and Statistics, February, no 1, vol. XXXI, 1949.

A. REES, The Economies of Trade Unions, ed. The Cambridge Economie Handbooks, 1962.

A. ROSS, The General Motors Wage Agreement of 1948, in the Review of Economics and Statistics, February no 1, vol. XXI, 1949.

J. SLAUGHTER, Concessions ans how to beat them, Labor Education and Research Project, 1983.

UNITED AUTO WORKERS :
– Agreement between General Motors and UAW.
– Agreement between Ford and UAW.
– Research Bulletin, Monthly, proposed by the Research Department of UAW, 1982.

Annexes

ANNEXE 1

Les cycles de l’après-guerre – Emploi et production

SUITE ANNEXE 1

Production, emploi et utilisation des capacités dans l’industrie

ANNEXE 2

Annexe 2. 1

Evolution de la production domestique de voitures et camions aux USA.

ANNEXE 2

Annexe 2. 2.

L’Evolution de l’emploi dans l’industrie automobile américaine.

ANNEXE 3

A) GENERAL MOTORS

B) FORD

SUITE ANNEXE 3

C) CHRYSLER

Prévision de parc de robots

1983

1988

Soudure par point

240

437

Soudure à l’arc

197

Peinture

43

Manutention

139

Assemblage

100

Application adhésif et produit d’étanchéité

72

Divers

40

TOTAL

240

988

D) AMC

Prévision du parc de robots

Type de robot

1982

1988

ACHATS

Soudure

58*

138

80

Peinture

0

10

10

Assemblage manutention

0

10

10

Total

58

158

100

* Dont 31 Cybertech

ANNEXE 4 PREVISION DANS LE «TEMPS D’ASSEMBLAGE» (Projet Buick 1983)

ASSEMBLY TIME – BUICK CITY PROPOSAL vs ENGINEERING STANRD (Hours per Car)

ASSEMBLY TIME – BUICK CITY PROPOSAL vs ENGINEERING STANRD (Hours per Car)

Notes

1  Le texte qu’on va lire est un résumé extrait d’un rapport de recherche Cf. Coriat (1985a) à paraître sous forme d’ouvrage.
Les données présentées ici ont été obtenues notamment à partir d’une mission effectuée aux USA en avril 1984. Je tiens à remercier tout particulièrement MM. Harry Katz, Michael Piore et Harley Shaiken du M.I.T., Mark Kesselman de Columbia University, ainsi que les Managers de AMC, Ford et Chrysler, et les syndicalistes de l’UAW qui ont bien voulu me recevoir et répondre à mes questions. Des dimensions souvent essentielles de cette recherche ont bénéficé de leurs avis, de leurs conseils, et de leur expérience.

2  Les Accords 1984 non couverts dans cette communication sont présentés et analysés dans Coriat (1985b).

3  Sur la naissance de la COLA et de l’AIF, et sur leur signification historique, voir Arthur M. Roos (1949) et M.W. Rder (1949) ; ainsi que Frederick Harbison (1950).

4  Sur la genèse et les conditions de l’affirmation du Lay-off/Recall, basé sur le droit d’antériorité, voir notamment le remarquable petit essai de D. Montgomery et R. Schaltz, Pacing lay-off, in Montgomery (1979).

5  L’importance de cette pratique des listes basées sur la seniority, apparaîtra clairement si l’on précise, ce qui sera examiné plus tard, que la seniority est aussi le principe organisateur des promotions dans les classifications ouvrières, là aussi sur la base d’une liste d’antériorité élaborée au moins en partie sous le contrôle syndical.

6  Si nous insistons sur ce point c’est que là encore, et sans doute est-ce l’un des résultats les plus nets de la période 79-82, le principe du Connective Bargaining est rompu. Des contrats différents sont signés dans chacune des compagnies, et les conditions locales d’application vont varier grandement dans les établissements de chaque compagnie.

7  Elaborée autour d’une tradition française, il est significatif d’observer que ces principes de caractérisation et de périodisation commencent à se développer aux Etats-Unis où des courants non mineurs de la théorie les ont, au moins en partie, adoptés. Cf. Gordon et Edwards, Piore et Sabel. Pour une présentation du contenu essentiel de ces thèses cf. Boyer (1981) et Coriat (1982).

8  L’ensemble de la négociation Chrysler est rapporté en détail dans notre rapport de recherche, CORIAT [1985a].

9  Dès 1976, et surtout en 1979, avec GM et Ford, UAW poursuivant l’objectif d’une semaine de travail de 4 jours (par semaine) avait obtenu qu’un certain nombre de jours dans l’année, soit fériés et payés « à titre personnel » et ce indépendamment des jours féris nationaux traditionnels au calendrier américain. Ce recul sur les Personal Paid Holidays est bien évidemment hautement significatif de l’ampleur des concessions qui ont dû être faites.

Table des illustrations

Légende Les cycles de l’après-guerre – Emploi et production
URL http://books.openedition.org/pul/docannexe/image/37065/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 111k
Légende Production, emploi et utilisation des capacités dans l’industrie
URL http://books.openedition.org/pul/docannexe/image/37065/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 117k
Légende Evolution de la production domestique de voitures et camions aux USA.
URL http://books.openedition.org/pul/docannexe/image/37065/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 52k
Légende L’Evolution de l’emploi dans l’industrie automobile américaine.
URL http://books.openedition.org/pul/docannexe/image/37065/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 55k
URL http://books.openedition.org/pul/docannexe/image/37065/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 70k
URL http://books.openedition.org/pul/docannexe/image/37065/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 67k
Titre ASSEMBLY TIME – BUICK CITY PROPOSAL vs ENGINEERING STANRD (Hours per Car)
URL http://books.openedition.org/pul/docannexe/image/37065/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 28k

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