Comment poser la question de la sexualité en Espagne pendant le premier franquisme : enjeux théoriques et méthodologiques
p. 389-404
Texte intégral
1Il semble a priori impossible de poser la question de la sexualité pendant le premier franquisme (les années 1940 et 1950) sans partir du point de vue de la répression sexuelle1. Celle-ci se serait principalement caractérisée par une absence totale de mise en discours du sexe à tel point que le franquisme pourrait aussi se définir comme une période de « mutisme du sexe ». Selon la théorie la plus répandue, la verbalisation de la sexualité et la diffusion du savoir sur la sexualité, si actives pendant les années de la Seconde République, auraient totalement cessé à partir de 1939 et la sexualité en tant que pratique aurait été marquée par une absence totale de liberté.
2Ce choix théorique attribue à la période qui nous intéresse une position particulière dans l’histoire de la sexualité en Espagne, à tel point qu’il serait possible de parler d’une « spécificité franquiste » qui se traduirait par une répression institutionnelle du comportement sexuel des individus et par un « mutisme » général du discours officiel qui aurait considéré la sexualité comme un thème tabou2. Cette « répression sexuelle » caractérisant le franquisme aurait duré jusque dans les années 1955-1956, pour s’amenuiser au moment de l’ouverture économique et sociale que connut l’Espagne à partir des années 1960, puis elle aurait disparu après la mort du dictateur en novembre 1975 avec l’arrivée de la démocratie3. Elle fut aussi systématiquement évoquée par les personnes ayant vécu cette période du premier franquisme et qui nous livrèrent leur témoignage dans le cadre de nos travaux de recherche antérieurs4.
3S’il semble aussi difficile d’échapper à cette idée de la répression sexuelle comme étant l’une des caractéristiques du régime franquiste, c’est avant tout parce que la majorité des études portant sur le sujet – en particulier celles qui furent publiées avant les années 1990 – partent de ce principe et tentent d’en démontrer les rouages et les conséquences. En témoignent les titres de certaines d’entre elles, comme par exemple La répression sexuelle dans l’Espagne de Franco5, Quarante ans sans sexe6, Histoires du sexe interdit7 ou Le sexe du franquisme8. Ces auteurs partent tous du postulat de l’existence d’une répression institutionnelle et morale, et la justifient notamment en considérant les années du premier franquisme comme une période de rupture radicale avec celle de la Seconde République, le plus souvent représentée comme un intervalle de libération sexuelle. Le régime franquiste aurait ainsi brisé l’élan libérateur qui soufflait jusque-là sur l’Espagne. De même qu’il aurait dépossédé les Espagnols de leur sexualité comme il le fit avec leurs libertés.
4Si l’on prend en compte certains paramètres, il est clair que l’on peut a priori utiliser le concept de répression sexuelle pour caractériser cette période de l’histoire de l’Espagne. Tout d’abord parce que les années 1920 et 1930 furent effectivement en Espagne celles des partisans d’une nouvelle conception de la sexualité qui ne perdura pas pendant le premier franquisme. Celle-ci était défendue par de nombreux intellectuels et médecins, souvent désignés comme les « Réformateurs sexuels » et qui considéraient qu’une nouvelle législation, ainsi que la mise en place d’une éducation sexuelle, contribueraient à améliorer la gestion des problèmes liés à la sexualité (avortement, prostitution, mères célibataires, etc.9).
5Les « Réformateurs sexuels », dont traitent d’autres contributions de cet ouvrage, s’attaquaient aussi à la morale sexuelle traditionnelle qu’ils considéraient comme la principale cause de ces maux, de même qu’ils contribuèrent aussi à interroger la place des femmes dans la société en remettant en question la double morale, celle qui imposait des normes de comportement sexuel différentes pour les hommes et pour les femmes10.
6Bien que cette nouvelle conception de la sexualité n’envisageait pas l’émancipation féminine telle que nous la comprenons aujourd’hui, les « Réformateurs sexuels » s’interrogeaient cependant sur les moyens d’améliorer la condition féminine, en prônant notamment une maternité consciente. À l’instar du célèbre endocrinologue Gregorio Marañon, ses partisans défendaient la nécessité du contrôle des naissances, de l’éducation sexuelle, et de la coéducation des sexes dans les écoles comme faisant partie intégrante de cette éducation, dans le but de libérer « la femme » du fardeau des grossesses à répétition et de lutter contre la mortalité infantile : plus les femmes étaient libres et éduquées, plus elles pouvaient « s’émanciper », c’est-à-dire assumer leur rôle de mère dans les conditions idéales et nécessaires au parfait développement de leur progéniture11.
7Par ailleurs, la Constitution républicaine de 1931 permit des changements radicaux en allégeant notamment la législation concernant la famille et le couple. Les réformes républicaines prévoyaient plus de libertés individuelles du point de vue de la relation avec l’autre sexe et, surtout, elles amenuisaient le pouvoir de l’Église catholique sur les institutions : mise de la famille sous la protection de l’État et non plus sous celle de l’Église, institution du mariage civil, légalisation du divorce par consentement mutuel, possibilité de vivre en concubinage, légalisation de l’avortement en Catalogne (dans le cadre de l’autonomie reconnue par la République), droit à la recherche de paternité pour les mères célibataires, laïcisation de l’éducation, instauration de la « coéducation » dans les écoles primaires et secondaires, projet d’éducation sexuelle dans les écoles, développement des thèses abolitionnistes concernant la prostitution, droit de vote accordé aux femmes, etc.12.
8Or, le régime franquiste vit le jour après trois années de guerre civile contre cette même République et pendant lesquelles les femmes républicaines avaient conquis l’espace public et politique et commencé à mettre en question leur rôle traditionnel dans la société13. Aussi, toutes ces réformes furent-elles logiquement bloquées radicalement, les lois et les décrets abrogés, au nom du retour à une morale religieuse traditionnelle. Une politique répressive fut appliquée qui permit au nouveau régime de conserver le pouvoir acquis par les armes et de mettre en place une stabilité politique pérenne. Dès le début de la guerre civile, le gouvernement de Burgos abrogea dans l’urgence de nombreuses lois républicaines considérées comme outrageantes pour la morale sexuelle : citons, par exemple, la suppression de la mixité scolaire (ce que l’on dénommait alors la « coéducation ») dans les écoles et les établissements d’enseignement secondaire14, l’interdiction du divorce, mesures qui furent appliquées dès le mois de septembre 193615, ou encore l’interdiction de la pornographie (curieusement associée à la « littérature socialiste, libertaire ») en décembre 1936 :
Sont déclarés illicites la production, le commerce et la circulation des livres, des journaux, des brochures (quelle que soit leur forme d’impression) et des gravures pornographiques ou de littérature socialiste, communiste, libertaire, et, en général, subversive.16
9Selon le politologue Guy Hermet, « il n’existait pas une doctrine ou des idées franquistes mais une conduite franquiste17 », essentiellement fondée sur les valeurs traditionnelles et catholiques et dont l’une des grandes lignes était l’éradication de toutes les valeurs « modernes » et « décadentes » défendues par les courants politiques de gauche, les principales armes pour ce faire étant la répression et la normalisation des comportements publics et privés, pratiques autoritaires qui caractérisaient donc le régime, essentiellement dans sa première étape phalangiste18.
10En effet, selon la doctrine franquiste,
nation et culture s’identifiaient au catholicisme et à la tradition ; tout ce qui se trouvait en marge de cela (les « hétérodoxes » selon Marcelino Menéndez y Pelayo) se trouvait également hors de la nation, et c’est dans la religion catholique qu’étaient puisés les principes idéologiques qui établissaient les caractéristiques d’un comportement anti-Espagne.19
11Aussi, l’analyse des discours diffusés pendant le premier franquisme met-elle en lumière l’établissement de normes sexuelles particulièrement restrictives : seule l’activité sexuelle à visée procréatrice et pratiquée au sein du mariage catholique était tolérée et dite « normale ». Toutes les autres formes de sexualités – comme par exemple, la sexualité avant ou en dehors du mariage, et principalement celle des femmes (qui se devaient d’arriver « vierges » au mariage), la sexualité, par nature « inféconde », comme la masturbation ou les relations homosexuelles, et même la sexualité inféconde au sein du mariage – étaient considérées comme immorales, comme des « aberrations », des « perversions » et composaient la liste des comportements sexuels dits « anormaux ».
12Toutes ces normes restrictives étaient soutenues par le Code pénal dont le texte fut codifié en 1944 : à titre d’exemple, l’avortement pouvait être condamné par des peines allant de un mois à six mois de réclusion, et en cas d’adultère, les peines pouvaient aller de six mois à six ans de prison20. Concernant l’avortement par exemple, on peut avancer les chiffres de 1 767 procès ouverts en Espagne entre 1944 et 1950 (donc en six ans), dont 200 pour la seule ville de Madrid21. Les femmes qui se trouvaient sous le coup de la justice pour avoir choisi l’interruption volontaire de leur grossesse (désignée alors comme « avortement criminel ») étaient le plus souvent dénoncées par les centres médicaux où elles se rendaient pour y être soignées. En effet, nombres d’entre elles développaient des infections graves après avoir subi un avortement clandestin.
13De manière plus anecdotique – en effet, nous avons répertorié peu de cas –, nous pourrions raconter l’histoire de ces trois hommes – un chauffeur de 21 ans, célibataire, un vendeur de persiennes de 24 ans, également célibataire et un journalier, marié, âgé de 28 ans – qui furent condamnés à deux mois et un jour de détention, à une amende de 1 000 pesetas, et à sept ans d’incapacité civile pour avoir vendu des boîtes d’allumettes contenant des photographies pornographiques. Il semble cependant qu’il y ait eu peu de condamnations pour diffusion clandestine de photographies pornographiques. Pour la ville de Madrid, nous avons répertorié seulement deux procès pour publication et diffusion clandestines de pornographie entre 1939 et 195222.
14Ajoutons pour terminer que même si la médicalisation de la sexualité, qui avait commencé au xviiie siècle, ne cessa pas avec le régime franquiste et même si l’Église catholique (premier pilier du régime) ne retira ni aux médecins, ni aux scientifiques en général, leur légitimité en matière de connaissance relative à la sexualité, c’était « à condition que les médecins soumettent ce savoir aux principes de la morale révélée, c’est-à-dire aux orientations de l’Église23 ».
15Toutes les formes de discours officiel s’inscrivaient dans un schéma pyramidal : l’Église catholique, qui détenait les principes du savoir sexuel, définissait les pratiques dites « illicites » de la sexualité en les distinguant d’une pratique « normale » ; le discours scientifique, et notamment celui des médecins, appuyait et démontrait la véracité de cette définition ; la justice et la morale en vigueur condamnaient les écarts et les transgressions ; l’objectif étant d’imposer et de justifier un modèle unique de comportement sexuel dit « normal » : le couple hétérosexuel, légitime et procréateur.
16Donc, a priori, comme nous le disions au début, tout semble nous conduire vers l’idée que la question de la sexualité pendant le premier franquisme est difficilement envisageable autrement qu’à travers le prisme de la répression sexuelle. Pourtant, les études analysant de près ou de loin la sexualité pendant cette période et publiées après les années 1990 tendent à remettre en question ce postulat de la répression sexuelle comme point de départ de la réflexion. C’est le cas, par exemple, de la thèse de doctorat de Jesús Pérez López intitulée Le discours pédagogique relatif à la sexualité en Espagne (1940-1962) [El discurso pedagógico relativo a la sexualidad en España (1940-1962)], ou encore du très important ouvrage, déjà cité, de Francisco Vázquez García et Andrés Moreno Mengíbar, Sexe et raison. Une généalogie de la morale sexuelle en Espagne (Sexo y razón. Una genealogía de la moral sexual en España), qui consacre quelques chapitres au franquisme. Personnellement, dans le cadre de nos recherches, nous avons toujours envisagé la question en nous écartant de ce concept de répression sexuelle car il pose plusieurs problèmes, à la fois théoriques et méthodologiques.
Le « mutisme sexuel » du franquisme : une réalité ?
17Si l’on part du principe que « l’établissement d’un concept plus ou moins strict de normalité obligera à une éducation et à un contrôle du comportement sexuel rigide et étendu à de nombreuses sphères : familiale, scolaire, religieuse, médicale et sociale24 », il est alors clair que la mise en place des normes sexuelles et la conformité des comportements à ces normes ne pourraient pas exister sans au moins une mise en discours du sexe. Et c’est bien ce que les ouvrages publiés avant les années 1990 omettent d’analyser. Ils partent du constat de l’existence d’une doctrine restrictive et ils en démontrent les conséquences négatives sur les individus (ignorance, frustration, méconnaissance de l’autre sexe, sexualité non réalisée, etc.), sans cependant insister sur les mécanismes de verbalisation de cette doctrine.
18Or, si l’on s’y attarde, on constate rapidement qu’il existait véritablement une mise en discours du sexe. Dans le cas du premier franquisme, elle permettait de normaliser les comportements sexuels des futurs adultes, et d’éviter l’extension des comportements dits « pathologiques » : masturbation, homosexualité, activité sexuelle qualifiée de « désordonnée », c’est-à-dire tournée vers le plaisir et non pas vers la procréation. L’analyse des mécanismes du discours pédagogique relatif à la sexualité diffusé pendant le premier franquisme nous permet donc de déchiffrer les constituantes de la norme sexuelle et d’en définir les différents paramètres.
19Pendant les années 1920 et 1930, la vulgarisation du savoir sexuel s’était notamment manifestée par de grands meetings, par la création de revues sur la sexualité et par le projet d’une éducation sexuelle dans les écoles primaires25. Il est certain que tout ce foisonnement, ce fourmillement autour de la sexualité cessa avec l’arrivée du régime franquiste. Toute cette littérature – au sein de laquelle « on trouvait de tout : des ouvrages strictement médicaux, des ouvrages de divulgation de ceux qu’on appelait “sexologues”, qui étaient médecins ou pas, des romans, etc.26 » – ne pouvait désormais voir le jour sans avoir passé auparavant l’obstacle de la censure et obtenu le fameux nihil obstat.
20Peut-on cependant affirmer que la sexualité ne fut plus du tout l’objet d’un discours sous le franquisme ? La diffusion du savoir sexuel se poursuivit en effet pendant le premier franquisme mais « elle se situe seulement à un autre niveau, celui du discours savant, du manuel de psychiatrie ou de psychologie, de médecine familiale ou d’hygiène du mariage – ces textes sur la vie conjugale saine si courants dans les foyers à partir de la moitié des années cinquante27 ».
21Le discours des années 1940 s’évertuait ainsi à définir une « norme sexuelle » (sexualité procréatrice pratiquée au sein du mariage religieux) et décrivait des sexualités transgressives (homosexualité, masturbation, tendances au désir et au plaisir sexuels, sexualité extraconjugale, etc.). Aussi, pour diffuser cette norme unique de comportement, le régime franquiste dut-il conserver une forme de discours abordant amplement le thème de la sexualité. Nous nous sommes donc intéressés à la réalité du discours sur la sexualité pendant les dix premières années du franquisme, ce qui nous a amenés à reconsidérer cette période en nuançant les thèses sur le « mutisme sexuel » et en analysant les formes de diffusion de ce discours.
22Les discours sur la sexualité diffusés pendant cette période se voulaient essentiellement « pédagogiques ». Dans sa thèse de doctorat portant sur le discours pédagogique relatif à la sexualité, Jesús Pérez López répertorie ainsi un total de 214 ouvrages, publiés entre 1939 et 1951, abordant directement ou indirectement le thème de la sexualité du point de vue pédagogique, et pas moins de 536 ouvrages publiés entre 1939 et 1962, dont certains furent d’ailleurs édités plusieurs fois au cours de la période franquiste28.
23Les auteurs de ces ouvrages à visée pédagogique défendaient généralement la nécessité d’une mise en discours du sexe, considérant le silence des éducateurs comme une méthode pédagogique non appropriée et appartenant à un autre temps :
Ainsi, parallèlement au désir vain de répondre à la curiosité de la jeunesse avec des vérités approximatives, on voit poindre chez les moralistes le désir de former des adultes pour qui l’autre sexe n’existerait pas et qui réussiraient, en somme, à oublier qu’ils en possèdent un eux-mêmes.29
24Cette éducation sexuelle (ou éducation sanitaire) avait pour but de normaliser les comportements de la population de façon à ce que celle-ci respecte les principes de la normalité sexuelle. Ainsi, cette mise en discours devait-elle permettre « de leur faire comprendre [aux enfants et aux adolescents] que cet instinct [l’instinct sexuel], comme tous les autres instincts, doit être placé sous la dépendance de la volonté et de la raison, et d’instinct purement animal, se convertir en un instinct humain30 ». En cela, le premier franquisme ne se différenciait pas vraiment des autres époques de l’histoire d’Espagne avant la Seconde République, et il est impossible de parler de rupture inhérente à ce nouveau régime concernant la rationalisation de la sexualité. Il existait un réel discours sur la sexualité, et ses objectifs étaient bel et bien pédagogiques.
25De plus, pendant les dix premières années du franquisme, les producteurs du discours sur la sexualité se plièrent au même processus que leurs prédécesseurs : volonté de lutter contre les « perversions » et les maux liés à la sexualité, défense de la nécessité d’une « éducation sexuelle », critique et mise en relief de la responsabilité des périodes antérieures. La sexualité et la lutte contre ce qui était considéré comme sexuellement « pathologique » ou « anormal » s’inscrivaient donc parmi les préoccupations pédagogiques du moment31.
26Si l’on suit les principes énoncés dans les manuels destinés aux enfants et aux adolescents, leur initiation sexuelle devait avant tout être progressive. Au fur et à mesure de leur maturité physique et psychique, ceux-ci pouvaient donc être expuestos (« exposés ») à des informations de plus en plus précises qui levaient progressivement le voile sur le « mystère de la procréation ». Cette initiation devait permettre aux futurs adultes d’intérioriser les interdits imposés par la morale sexuelle dominante.
27Ces auteurs s’intéressaient aussi particulièrement à ce qu’ils considéraient comme des « transgressions » de la « norme sexuelle ». La sexualité conjugale était peu abordée mais, par contre, on s’évertuait à définir, détailler, expliquer toutes ces sexualités considérées comme « hors norme », ce qui impliquait une diversité des discours (médical, moraliste, juridique, hygiéniste…). Ces différents discours s’intéressaient tous aux mêmes points : les causes des « perversions », les solutions pour empêcher leur apparition chez l’enfant et l’adolescent, les moyens de « guérir » ces « déviations sexuelles » et les formes de punitions adaptées, car cette « éducation sexuelle de la population » passait aussi par la punition morale ou pénale :
L’incitation à parler du sexe continue aussi dans le domaine du discours juridique et pénal, à travers l’expertise psychiatrique en relation avec les délits de scandale public, des abus sexuels et des crimes sexuels.32
La spécificité franquiste en question
28Une fois que l’on a démontré que l’idée de « mutisme du sexe » n’était pas une particularité du premier franquisme, on peut s’interroger également sur la question de la « spécificité franquiste » en replaçant le discours sur la sexualité des années 1940 et 1950 dans une continuité historique.
29Pendant le franquisme, les pratiques sexuelles furent l’objet d’une puissante normalisation dirigée par l’Église catholique, à tel point qu’il semblait impossible de concevoir et de vivre une sexualité en marge de celle du couple hétérosexuel, marié et procréateur. Mais on peut se demander si cette normalisation était propre au franquisme. En effet, n’était-ce pas déjà pas le cas en Espagne, notamment au xixe et au début du xxe siècle, avant la Seconde République ?
30Nous l’avons dit, les périodes des années 1920 et 1930 furent marquées par l’émergence d’une nouvelle conception de la sexualité défendue par les « Réformateurs sexuels ». Cette émergence peut être considérée comme « une réaction […] aux normes morales rigides et dominantes33 ». Réaction qui s’explique aussi car les modèles de comportements sexuels et de conception de la sexualité « étaient fermement et strictement établis et, en grande partie intériorisés par ceux qui les supportaient » :
N’importe quelle pratique sexuelle au sein du mariage qui ne fût pas le coït réalisé de façon « orthodoxe » pouvait être considérée comme une perversion, ne parlons pas ici des relations hors mariage ou entre personnes du même sexe. Rappelons que l’Église interdisait même le coitus interruptus.34
31Il est clair que cette analyse pourrait tout aussi bien s’appliquer à la situation pendant le franquisme, et qui plus est, pendant le premier franquisme. Outre des normes sexuelles complètement traditionnelles, le discours sur le sexe diffusé pendant le premier franquisme ne développait rien de particulièrement nouveau et les théories développées l’avaient déjà été au cours des siècles précédents en Espagne. Par exemple, concernant le problème de la masturbation, au xixe siècle, le Dr José de Letamendi, définissait déjà cette pratique sexuelle comme une pathologie, de même qu’il considérait que la relation conjugale devait s’appuyer sur deux piliers essentiels : le travail de l’homme et la fécondité de la femme35.
32Autre exemple : en 1853, Pedro Felipe Monlau publiait L’hygiène du mariage ou Le livre des époux (La higiene del matrimonio o El Libro de los casados). Cet hygiéniste catalan proposait de « compléter la vieille stratégie destinée à combattre la masturbation infantile et adolescente à l’aide d’une technique au caractère pédagogique qui obtienne de meilleurs résultats36 ». Cette méthode pédagogique apportant de « meilleurs résultats » était celle-là même que préconisaient les auteurs du discours relatif à la sexualité diffusé pendant le franquisme. En effet, Pedro Felipe Monlau insistait sur la progressivité de l’initiation sexuelle. Il s’agissait d’instruire les enfants en prenant pour exemple le monde végétal, puis le monde animal, et en transmettant chaque fois le strict minimum afin de calmer la curiosité de l’enfant, puis celle de l’adolescent. Cette « éducation sexuelle » devait être transmise de façon méthodique, mais surtout évolutive : plus l’enfant grandissait, plus il pouvait être « exposé », comme nous l’avons déjà indiqué.
33Aussi paradoxal que cela puisse paraître, certains auteurs tenaient même compte des théories freudiennes sur la sexualité infantile. En effet, même s’ils considéraient que l’enfant fut dénué de toute propension au désir et au plaisir sexuels, ils admettaient qu’il était néanmoins doté d’une curiosité sans borne qui pouvait à tout moment l’amener à s’interroger sur la sexualité. Pour illustrer ce fait, médecins et moralistes utilisaient le nom de Freud lui-même : « Il est indubitable que l’instinct sexuel existe depuis la plus tendre enfance, comme Freud le signala37. »
34On ne refusait donc pas l’existence d’une « libido précoce pré-pubère chez les enfants », même si on estimait que la sexualité infantile était une « déviation » au même titre que celle de l’adulte au comportement sexuel « anormal ».
Le problème méthodologique
35Partir de l’hypothèse répressive pose un deuxième problème, d’ordre méthodologique cette fois-ci. Les ouvrages publiés avant les années 1990 proposent avant tout une étude des discours et, à partir de cela, ils prétendent offrir une photographie des comportements sexuels et intimes des Espagnols pendant le premier franquisme. C’est ainsi qu’ils constatent que les relations entre les hommes et les femmes en dehors du mariage devinrent difficiles, voire impossibles, en raison de tous les interdits qui pesaient, mais aussi en raison de l’obligation de s’inscrire dans le seul cadre d’une sexualité de procréation. De même, toutes ces études furent le plus souvent inspirées par les souvenirs et les expériences personnelles de leurs auteurs et la vision proposée est parfois prise au piège de la subjectivité.
36Mais a-t-on tout dit lorsque l’on a dit que la sexualité était réprimée et que les normes étaient restrictives ? Si l’on prend pour exemple la question de la sexualité féminine, on constate que l’analyse des discours met en relief l’existence d’une double morale qui imprégnait fortement la société espagnole des années 1940 et qui conditionnait les rapports entre les sexes, générant une inégalité entre les hommes et les femmes. Cette double morale garantissait aux hommes une certaine liberté sexuelle avant, mais aussi pendant le mariage et elle limitait celle des femmes qui se devaient de rester vierges jusqu’au mariage et surtout de ne ressentir ni désir ni plaisir sexuel. N’oublions pas que la prostitution réglementée était officiellement tolérée jusqu’en 195638. On admettait par ailleurs que la frigidité était une manifestation presque « normale » de la sexualité féminine.
37Pourtant, si l’on confronte cette représentation de la sexualité féminine aux réalités quotidiennes et donc à des sources susceptibles d’en rendre compte le plus clairement possible, celle-ci, sans être tout à fait contredite, perd cependant de sa force. Prenons, par exemple, le cas de la masturbation dont l’analyse en tant que pratique permet justement de comprendre la distance qui pouvait exister entre le discours, les volontés officielles et les réalités quotidiennes. Pour cela, nous pouvons nous baser sur les travaux du docteur Ramón Serrano Vicéns (1908-1978).
38En effet, ce médecin entama dans les années 1930 une étude du comportement sexuel humain, étude qu’il poursuivit au cours du premier franquisme. Il s’intéressa en particulier à la sexualité féminine et, entre 1932 et 1961, il interrogea un total de 1 417 femmes, qui étaient toutes ses patientes. Les résultats de son enquête furent publiés tout d’abord en 1971 dans un ouvrage intitulé La sexualité féminine. Une recherche statistique et psychique directe. Sur ces 1 417 femmes que le Dr Ramón Serrano Vicéns a pu rencontrer et écouter, 90 % avouèrent avoir pratiqué la masturbation au moins une fois au cours de leur vie et près de 62 % d’entre elles découvrirent spontanément « cette forme de satisfaction sexuelle39 ».
39Autre exemple : dans le cadre de nos recherches, nous avons pu obtenir plusieurs témoignages de femmes et d’hommes ayant vécu pendant le premier franquisme et qui ont accepté de nous parler de leur sexualité (74 témoignages en tout). Si les femmes entendues n’ont pas fait allusion à la masturbation, certaines d’entre elles nous ont raconté avoir eu des rapprochements très intimes avec leur futur mari avant le mariage (baisers, caresses, voire parfois des relations sexuelles complètes). Certains des hommes entendus nous ont confiés, quant à eux, avoir eu leur première relation sexuelle avec une autre femme que leur future épouse ; dans ces cas, il s’agissait d’une amie. Les femmes – certaines tout au moins – pouvaient donc, elles aussi, vivre une sexualité avant le mariage40.
40C’est aussi ce que nous révèle l’analyse des procès pour avortement. Grâce aux dépositions jointes aux dossiers judiciaires, qui souvent retracent la vie des accusées, il est facile de constater que nombre d’entre elles vivaient une sexualité que nous considérerions aujourd’hui comme « normale », c’est-à-dire une sexualité consentie et choisie, inspirée par l’amour ou le désir et parfois bien loin des normes sexuelles dominantes. L’étude d’autres sources que le discours peut donc nous permettre de dégager un peu la question de la sexualité féminine de l’hypothèse répressive et cette démarche peut évidemment s’appliquer à toutes les sexualités dans l’approche des pratiques sexuelles.
41On constate donc assez rapidement que l’analyse du discours relatif à la sexualité ne permet pas de cerner la réalité des comportements sexuels des Espagnols qui vivaient sous le premier franquisme et que partir de l’hypothèse répressive restreint les champs de questionnement et empêche d’atteindre le « point aveugle » de la sexualité, l’intimité même des Espagnols, pour autant qu’il soit possible de la saisir. Pour notre thèse de doctorat, nous avons d’ailleurs été confrontés à la nécessité de créer tout un corpus qui n’existait pas afin de pouvoir tenter de répondre à cette question de la manière la plus objective possible. Outre les témoignages directs, les archives judiciaires, ou encore les enquêtes comme celles du docteur Serrano Vicéns, d’autres sources (comme la presse ou la littérature autobiographique) peuvent nous permettre de comprendre et d’analyser les comportements sexuels sous le premier franquisme en prenant en compte d’autres paramètres que celui de la répression sexuelle (qu’il ne s’agit toutefois pas de nier).
42Nous dirons donc pour conclure qu’il n’existait donc pas de « spécificité franquiste » en matière de sexualité, de même que le « mutisme du sexe » ne peut pas servir de principe de départ lorsqu’on pose la question de la sexualité pendant le franquisme. Et, s’il n’est pas question d’affirmer que l’hypothèse répressive est tout à fait fausse et qu’elle ne doit pas être prise en compte lorsqu’on pose la question de la sexualité pendant le premier franquisme, il est cependant nécessaire de s’en libérer quelque peu, afin de pouvoir replacer cette question dans le cadre d’une histoire globale de la sexualité en Espagne qui prendrait en compte les discours, les représentations de la sexualité, mais aussi les pratiques sexuelles elles-mêmes.
43La politique du premier franquisme était directement inspirée par les principes de l’Église catholique, et en partie par le fascisme italien41. Afin de redonner à l’Espagne la grandeur impériale qu’elle possédait au temps des Rois catholiques à la fin du xve siècle, les idéologues du régime franquiste puisaient leurs idéaux dans un passé lointain et cherchaient à « nettoyer » la culture espagnole des empreintes laissées par les systèmes politiques antérieurs, et notamment par la Seconde République42. Cette épuration des valeurs républicaines dites « modernes » et donc « subversives », ne concernait pas uniquement le plan politique, mais aussi le plan économique, et surtout social. De ce fait, la conception de la sexualité, et surtout l’établissement du concept de normalité sexuelle, subirent de grands changements avec la mise en place du régime franquiste, du point de vue discursif et législatif.
44Le discours officiel franquiste utilisait certaines grandes lignes argumentaires concernant la pédagogie relative au sexe développées à la fin du xviiie siècle, et plus particulièrement au cours du xixe siècle. Ce fut notamment le cas pour les thèmes de la masturbation et des « perversions » sexuelles. Pendant le premier franquisme comme pendant le xixe siècle, on prêtait à la masturbation les conséquences les plus désastreuses sur la santé de celui qui la pratiquait, de même qu’on considérait ce dernier comme « un pécheur ». La lutte antimasturbatoire, qui commença à la fin du xviiie siècle pour s’atténuer quelque peu à partir des années 1930, prit un nouvel essor en Espagne à partir de 1939. Certains ouvrages furent d’ailleurs réédités et à nouveau diffusés43.
45L’amalgame entre l’immoralité et les idéologies politiques de gauche, qui apparaît dans le décret de la Junte de Burgos cité plus haut, était un fait récurrent dans le discours des années 1940. La condamnation de la pornographie (qui incluait la sexologie) portait un véritable sens politique. En condamnant la dite « pornographie », et donc toutes les formes de sexualité qui ne respectaient pas la morale catholique, le nouveau régime censurait du même coup les idéologies politiques de gauche, et par conséquent celles des partisans de la Seconde République. Selon les idéologues du premier franquisme, le binôme « ami/ennemi », « Espagne/anti-Espagne » s’exprimait aussi à travers le comportement sexuel : un individu qui menait une vie dissolue, « malhonnête », pouvait être soupçonné de communisme, de marxisme, de républicanisme, bref d’appartenir au camp des ennemis et, par ce type de comportement sexuel, il marquait d’emblée son opposition au nouveau régime.
Notes de bas de page
1 Voir l’étude générale de Jos Van Ussel, Histoire de la répression sexuelle, traduction de l’allemand par Catherine Chevalet, Paris, Robert Laffont, 1972.
2 Pour l’époque moderne, voir, par exemple, André Fernandez, Inquisition et répression sexuelle en Aragon (1560-1700), Paris, L’Harmattan (Recherches et documents Espagne), 2003.
3 Francisco Vázquez García et Andrés Moreno Mengíbar, Sexo y Razón. Una genealogía de la moral sexual en España (Siglos xvi-xx), Madrid, Akal, 1997, p. 41-42.
4 Anne-Gaëlle Regueillet, La sexualité en Espagne pendant le premier franquisme (1939- 1950), thèse de doctorat soutenue sous la direction de Jean-Louis Guereña, Tours, Université François-Rabelais, 2005, 2 vol.
5 L. Alonso Tejada, La represión sexual en la España de Franco, Barcelona, Caralt, 1977.
6 Feliciano Blázquez, Cuarenta años sin sexo, Madrid, Ed. Sedmay, 1977.
7 Rafael Domínguez Molinos, Historias del sexo prohibido, Madrid, Rafael Domínguez, 1988.
8 Óscar Caballero, El sexo del franquismo, Madrid, Editorial Cambio 16, 1977.
9 Alison Sinclair, Sex and Society in Early Twentieth-Century Spain. Hildegart Rodríguez and the World League for Sexual Reform, Cardiff, University of Wales Press, 2007 ; Marie-Aline Barrachina, « Maternidad, feminidad, sexualidad… », art. cit.
10 Yannick Ripa, « Féminin/masculin… », art. cit.
11 Raquel Álvarez Peláez, « Medicina y moral sexual en la España de preguerra », Asclepio. Revista de Historia de la Medicina y de la Ciencia, vol. XLII, no 2, 1990, p. 204.
12 Anne-Gaëlle Regueillet, La sexualité en Espagne…, op. cit., annexe I, p. 668-670 ; Marie-Aline Barrachina, Femmes et démocratie. Les Espagnoles dans l’espace public (1868- 1978), Paris, Sedes-Cned, 2007, p. 79-89.
13 Mary Nash, Rojas. Las mujeres republicanas en la Guerra Civil, Madrid, Taurus (Pensamiento), 1990.
14 Ramón Navarro Sandalinas, La enseñanza primaria durante el franquismo (1936-1975), Barcelona, PPU (Historia de la Educación, Serie Maior), 1996, p. 42.
15 L. Alonso Tejada, La represión sexual en la España de Franco, op. cit., p. 38-39.
16 Décret du 23 décembre 1936, dans Ministerio de la Gobernación, Sanidad Nacional. Disposiciones oficiales sanitarias emanadas del Ministerio de la Gobernación y otros centros durante los años 1936, 1937 y 1938, Madrid, Gráfica Universal, 1940, p. 86-87. Voir Manuel L. Abellán, « El discurso prohibido por la censura durante el primer franquismo », dans Myriam Díaz-Diocaretz et Iris M. Zavala (éd.), Discurso erótico y discurso transgresor en la cultura peninsular, siglo xi al xx, Madrid, Ediciones Tuero, 1992, p. 183-198.
17 Guy Hermet, L’Espagne au xxe siècle, Paris, Presses universitaires de France, 1992, p. 205.
18 Francisco Vázquez García et Andrés Moreno Mengíbar, Sexo y Razón…, op. cit., p. 171-179 ; Anne-Gaëlle Regueillet, « Norma sexual y comportamientos cotidianos en los diez primeros años del franquismo : noviazgo y sexualidad », dans Jean-Louis Guereña (éd.), La sexualidad en la España contemporánea…, op. cit., p. 229-245.
19 Manuel Tuñón de Lara, « Cultura e ideología », dans José Antonio Biescas et Manuel Tuñón de Lara (éd.), España bajo la dictadura franquista (1939-1875), Madrid, Editorial Labor (Historia de España, X), 1980, p. 440. Nous traduisons comme dans les autres cas.
20 Voir Inmaculada Blasco Herranz, « Actitudes de las mujeres bajo el primer Franquismo : la práctica del aborto en Zaragoza durante los años 40 », Arenal. Revista de historia de las mujeres, vol. 6, no 1, 1999, p. 165-180.
21 Anne-Gaëlle Regueillet, La sexualité en Espagne…, op. cit., p. 517.
22 Ibid., p. 74. Voir Jean-Louis Guereña, Un infierno español. Un ensayo de bibliografía de publicaciones eróticas españolas clandestinas (1812-1939), Madrid, Libris, 2011, p. 27, 157 et 338-339 ; Galderich (Albert Domènech), « Un conde cornudo, la misèria pornográfica dels inicis del franquisme », Et Piscolabis Librorum Maioris, 31 janvier 2011, http://librorummaioris.piscolabis.cat/2011/01/ (consulté le 27 mai 2014).
23 Jesús Pérez López, El discurso pedagógico relativo a la sexualidad en España (1940-1962), Madrid, Editorial de la Universidad Complutense de Madrid, 1993, p. 155.
24 Raquel Álvarez Peláez, « Medicina y moral sexual… », art. cit., p. 201.
25 Francisco Vázquez García et Andrés Moreno Mengíbar, Sexo y Razón…, op. cit., p. 134.
26 Raquel Álvarez Peláez, « Literatura sobre el sexo en la España de los años veinte y treinta del siglo xx : entre la medicina y la pornografía », dans Jean-Louis Guereña (éd.), La sexualidad en la España contemporánea…, op. cit., p. 150. Voir Jean-Louis Guereña, Les Espagnols et le sexe…, op. cit., p. 33-95.
27 Francisco Vázquez García et Andrés Moreno Mengíbar, Sexo y Razón…, op. cit., p. 172.
28 Jesús Pérez López, El discurso pedagógico…, op. cit., annexes ; Anne-Gaëlle Regueillet, La sexualité en Espagne…, op. cit., p. 95-98.
29 Dr. André Berge, La educación sexual de la infancia, traduit du français par F.G. Velasco, Barcelona, Luis Miracle Editor, 1953, p. 9.
30 Ibid., p. 13.
31 Anne-Gaëlle Regueillet, La sexualité en Espagne…, op. cit.
32 Francisco Vázquez García et Andrés Moreno Mengíbar, Sexo y Razón…, op. cit., p. 172.
33 Raquel Álvarez Peláez, « Literatura sobre el sexo… », art. cit., p. 150.
34 Ibid., p. 149-150.
35 Anne-Gaëlle Regueillet, La sexualité en Espagne…, op. cit., p. 41. Sur la masturbation, voir Francisco Vázquez García et José Benito Seoane, « La campaña médica antimasturbatoria en España (1800-1900) », dans Jean-Louis Guereña (éd.), La sexualidad en la España contemporánea…, op. cit., p. 23-56 ; Fernando Álvarez-Uría, « El sexo de los niños. Aproximación socio-histórica a los códigos médico-psicológicos sobre la masturbación infantil », Serie Psicoanalítica, no 4, 1983.
36 Francisco Vázquez García, « Claves genealógicas… », art. cit., p. 111.
37 Dr. V. Rodríguez, Higiene de la infancia, Madrid, CSIC, 1946, p. 203.
38 Jean-Louis Guereña, « Marginación, prostitución y delincuencia sexual : la represión de la moralidad en la España franquista (1939-1956) », dans Conxita Mir, Carme Agusti et Josep Gelonch (éd.), Pobreza, marginación, delincuencia y políticas sociales bajo el franquismo, Lleida, Universitat de Lleida (Espai/temps, 45), 2005, p. 165- 194 ; Id., « Prostitución y franquismo : vaivenes de una política sexual », dans Raquel Osborne (éd.), Mujeres bajo sospecha. Memoria y sexualidad (1930-1980), Madrid, Editorial Fundamentos, 2012, p. 143-164.
39 Dr. Ramón Serrano Vicéns, La sexualidad femenina. Una investigación estadística y psíquica directa, Oviedo, Ediciones Jucar, 1975, p. 30.
40 Anne-Gaëlle Regueillet, « Norma sexual y comportamientos cotidianos… », art. cit., p. 239-245.
41 José Luis Pastor Pradillo, El Espacio Profesional de la Educación Física en España. Génesis y formación (1883-1961), Alcalá, Universidad de Alcalá, 1997, p. 434.
42 Voir Marie-Aline Barrachina, Propagande et culture dans l’Espagne franquiste…, op. cit., p. 179-197.
43 Par exemple : R.P. Ramón Ruiz Amado, La educación de la castidad, Madrid, Razón y Fe, 1908. Cet ouvrage fut réédité en 1940 et en 1948.
Auteur
Anne-Gaëlle Ferrandi Regueillet
Docteure de l’université François-Rabelais de Tours (2005) avec une thèse portant sur la question de la sexualité en Espagne pendant les dix premières années du Franquisme, elle a participé aux activités du CIREMIA (Tours) ainsi qu’à celles du CERC (Pointe-à-Pitre). Après avoir enseigné à l’université François-Rabelais, puis à l’université des Antilles et de la Guyane, elle est actuellement professeure d’espagnol et de français en Norvège. Elle a publié « Deux continents, deux exemples de Caudillisme : la montée au pouvoir de Trujillo (1930-1961) et de Franco (1939-1975) » (dans De l’Hispaniola à la République Dominicaine, édité par Monique Boisseron, 2009) et « Norma sexual y comportamientos cotidianos en los diez primeros años del franquismo : Noviazgo y sexualidad » (dans La sexualidad en la España contemporánea (1800-1950), édité par Jean-Louis Guereña, 2011).
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