1La Pac (politique agricole commune) est une dimension de la construction européenne et de l’agriculture moderne qui a été largement investie par les sciences sociales1. Cela étant, c’est en général le cœur de la Pac qui est étudié, à savoir les secteurs agricoles les plus anciennement organisés par elle et/ou ceux qui nécessitent les plus importants investissements budgétaires. Le danger est de se laisser dépasser par les catégories institutionnelles et de n’étudier l’agriculture qu’en fonction des principaux secteurs visés par la Pac.

2Dès lors, l’étude des fruits et légumes dans la Pac présente un double intérêt : d’une part, un intérêt historique, empirique, de connaissance de l’objet, des effets de la Pac sur le fonctionnement du marché des fruits et légumes et, réciproquement, de la diversité de la Pac ; d’autre part, un intérêt épistémologique, dans le sens, où cette étude permet de se départir d’une lecture évolutionniste du monde rural en France.

3Ainsi, cette étude de la Pac dans le secteur des fruits et légumes amène à relativiser l’idée que cette dernière procède par la construction de protections de l’agriculture face au marché. L’OCM fruits et légumes participe de la constitution d’une filière marchande, tant par l’édiction de normes de commercialisation des produits que par les règles organisant les échanges et l’intervention publique dans ces échanges. Il s’agit avant tout d’une politique de compétitivité, construite autour du leitmotiv de l’organisation des producteurs. En adoptant une approche chronologique, on montrera les transformations qu’a connu l’OCM fruits et légumes, en particulier lorsqu’en 1996 sa réforme entraîne la progressive disparition des mesures de retraits (qui constituaient jusque-là un élément de sécurisation du revenu des producteurs) et le transfert d’une partie du budget vers le financement partiel des PO (programmes opérationnels) des OP (organisations de producteurs).

La Pac

4Elle est prévue par le traité de Rome (1957) qui définit ses cinq objectifs, à savoir : accroître la productivité de l’agriculture par le développement du progrès technique, augmenter les revenus de ceux qui travaillent dans l’agriculture, stabiliser les marchés, garantir les approvisionnements et, enfin, assurer des prix raisonnables au consommateur. Pour chaque secteur productif, c’est une OCM qui rend la Pac opérationnelle.

5La Pac vise à la fois l’unification interne des marchés agricoles (qui sont dotés de règles communes) et la protection de ces marchés vis-à-vis de l’extérieur de la CEE. Ces grands principes sont établis lors de la conférence de Stresa (du 3 au 11 juillet 1958) : l’unicité du marché (liberté des échanges entre les pays de la CEE), la préférence communautaire (les prix communautaires étant en général supérieurs aux prix mondiaux, est mis en place un système de prélèvements financiers aux frontières de la CEE) et la solidarité financière (financement commun des dépenses de la Pac). Ces trois principes sont mis au service d’un objectif final, le respect d’un prix minimum garanti.

6La Pac est surtout connue pour les OCM pour les céréales, le beurre ou la viande bovine. Dans le cadre de ces OCM, non seulement le marché intérieur est protégé, mais des organismes spéciaux d’interventions sont créés qui achètent les excédents afin de stabiliser le marché. Pour les fruits et légumes, la protection offerte par l’OCM se limite à une protection extérieure par des droits de douane.

7Les objectifs initiaux de la Pac sont de moderniser les structures productives agricoles pour sécuriser (en quantités) les approvisionnements alimentaires de l’Europe, permettre aux agriculteurs de vivre de leur métier et offrir en permanence au consommateur des denrées abondantes et à bas prix. À la fin des années 1950, l’Europe des six a déjà atteint l’autosuffisance alimentaire. L’augmentation de la production est tellement forte que les premiers excédents ne tardent pas à apparaître. Le marché laitier français connaît sa première crise excédentaire en 1968, la CEE est autosuffisante à partir de 1973, les stocks commencent à s’accumuler pour atteindre 700 000 tonnes de PLE (poudre de lait entier) et un million de tonnes de beurre en 1983. De même, dans le secteur céréalier, les stocks naissent au milieu des années 1970, et l’on compte 10 millions de tonnes de céréales stockées en 1988.

8En 1986 débutent, au sein du GATT, les négociations de l’Uruguay Round qui voient l’ouverture par les États-Unis d’une grande offensive contre les mécanismes de régulation des marchés agricoles de la CEE considérés comme entraves à la liberté des échanges. Se développent parallèlement des critiques de la Pac internes à la CEE, la Pac étant accusée de favoriser les gros producteurs au détriment des petits (puisque, dans bien des cas, plus on produit, plus on touche de subsides de la Pac) et de provoquer un cloisonnement des cultures (la perception des « aides de Bruxelles » étant liée à une production précise, l’agriculteur est incité à choisir ses cultures en fonction des aides). Une réforme de la Pac apparaît de plus en plus « nécessaire » dans les années 1980. En 1984 est prise la première grande mesure de limitation des quantités produites, avec l’instauration des quotas laitiers. Cette première mesure est suivie en 1988 par l’introduction des stabilisateurs par le conseil européen de Bruxelles, qui ont pour principe la réduction des aides attribuées au-delà de certaines quantités produites.

9L’année 1992 marque le début d’une série de réformes (réforme Mac Sharry en 1992, accord de Berlin en 1999, compromis de Luxembourg en 2003, etc.) qui au-delà de leur diversité se caractérisent par une tendance commune : la limitation des politiques actives de soutien des prix, remplacées partiellement par le versement de soutiens directs aux agriculteurs. Ce soutien au producteur plutôt qu’à la production (ce qu’on appelle le « découplage ») est soumis au respect d’exigences en matière d’environnement, de santé et de bien-être animal et de protection des végétaux – clauses dite d’« éco-conditionnalité ». Cette réorientation des aides est achevée par la mise en place du système des DPU (droits à paiement unique) versé indépendamment de l’acte de production. Cette mesure est censée offrir à l’agriculteur une plus grande liberté dans le choix de ses cultures. Une nouvelle architecture de la Pac se dessine progressivement, à travers la division de celle-ci en deux piliers, le premier correspondant aux OCM et le second au « développement rural », le transfert de fonds du premier vers le second s’effectuant selon le principe de la « modulation ». Le développement rural fait partie des fonds structurels de l’UE (Union européenne) et vise notamment à aider les régions en retard de développement ou à favoriser les reconversions économiques des territoires.

L’OCM fruits et légumes

10Alors que la Pac « historique » visait, pour un certain nombre de cultures, à augmenter la production en la subventionnant et en la protégeant vis-à-vis des pays tiers, l’OCM fruits et légumes s’inscrit d’emblée dans une logique libérale d’élimination des entraves à la liberté des échanges. Ainsi, le règlement n^o 1035/72 du 18 mai 1972 met d’emblée l’accent sur la construction d’un marché unique des fruits et légumes, par la recherche d’« un équilibre entre l’offre et la demande, à un niveau de prix équitable pour les producteurs […], tout en favorisant la spécialisation à l’intérieur de la Communauté ». Dans cette perspective, les mesures mises en place servent essentiellement à équiper les acteurs pour leur permettre de jouer le jeu du marché, d’être réellement des acteurs marchands. Elles sont essentiellement de deux ordres : l’édiction ainsi que la mise en œuvre de normes de commercialisation des produits et la constitution d’OP.

11L’application de ces normes « devrait avoir pour effet d’éliminer du marché les produits de qualité non satisfaisante, d’orienter la production de façon à satisfaire aux exigences des consommateurs et de faciliter les relations commerciales sur la base d’une concurrence loyale, en contribuant ainsi à améliorer la rentabilité de la production ». Le règlement de 1972 place ces normes de qualité au centre du dispositif qu’il institue. Ces normes de commercialisation sont conçues de la manière suivante : elles spécifient les caractéristiques physiques que doit respecter le produit fini, ainsi que celles de son éventuel emballage. Plus précisément, ces caractéristiques portent sur l’apparence extérieure du produit : après avoir énuméré des caractéristiques minimales (le produit doit être entier, sain, propre, dépourvu d’humidité anormale ainsi que d’odeur ou de saveur extérieure), la norme définit la forme (son développement), la couleur, le calibre (ou sa taille) et l’état de l’épiderme du produit. En fonction du degré auquel les produits d’un même lot correspondent à ces exigences, le lot classé dans l’une des catégories de la norme, qui vont – dans un sens de qualité décroissante – de la catégorie Extra à la catégorie II (voire III dans certains cas). Chacune d’elle se définit en fait par une tolérance maximale en termes d’écart à la norme. La norme de qualité décrit ensuite les caractéristiques obligatoires pour l’emballage, la présentation (en particulier en termes d’homogénéité) et le marquage (qui doit mentionner la nature, la catégorie, le calibre et l’origine des produits) des lots. Les normes servent à la fois aux acteurs du marché dans la mesure où elles font office de référence dans les transactions et construisent des espaces d’équivalence qui permettent de comparer les produits, et aux pouvoirs publics à qui s’offre la possibilité de manipuler les normes de qualité pour éviter des déséquilibres trop importants du marché et des perturbations des prix. Les États membres sont chargés de mettre en place un système de contrôle des normes de qualité. Ce contrôle doit s’effectuer par sondage, à tous les stades de commercialisation.

12Néanmoins, l’existence de ces normes ne suffit pas par elle-même à assurer le fonctionnement du marché : « compte tenu des caractéristiques du marché des fruits et légumes », l’OCM encourage la formation d’OP, dont les adhérents doivent se conformer à certaines règles, afin que les producteurs puissent réellement avoir une politique collective en termes de prix et de qualité des produits. Implicitement, le raisonnement qui est conduit est que les structures des exploitations sont trop petites pour que les producteurs puissent espérer peser sur le marché. Aussi, il importe de constituer à travers les OP des médiations marchandes à même de permettre une concentration de la « mise en marché », pour que l’offre puisse se confronter d’égal à égal avec une demande (les détaillants) alors elle-même en voie de concentration.

13Outre les normes de qualité et les OP, l’OCM met en place des mécanismes de gestion de crise, par l’intermédiaire des opérations de retrait. Ces opérations consistent à permettre aux OP de retirer des produits du marché lorsque les prix descendent au-dessous d’un certain seuil ou lorsque le marché est reconnu comme étant en situation de crise et à verser en échange au producteur une ICR (indemnité compensatrice de retrait), versée par un organisme public. Ces mesures de soutien au prix sont censées conserver un caractère exceptionnel, lié à une situation de crise2.

14A minima, les normes de qualité permettent de garantir la loyauté des échanges et d’organiser les transactions à distance en fixant un certain nombre de points de repères communs. En ce sens, elles offrent aux différents acteurs du marché un cadre conventionnel qui facilite leur travail. Dans un sens plus fort, on peut souligner que la mise en place de normes de qualité centrées sur l’apparence du produit présente une « affinité élective3 » avec la norme du libre-service mise en place progressivement par la grande distribution. Dans ce second sens, on peut voir la norme non seulement comme un point de repère conventionnel, mais aussi comme un outil (parmi d’autres) d’un durcissement vers la norme (sociale, et non seulement technique) du « zéro défaut ». Dans ce sens, la variété ou la variation apparaît comme un obstacle au déploiement d’une activité, obstacle qu’il faut éliminer par tous moyens afin d’obtenir son contraire, c’est-à-dire l’homogénéité et la régularité. Comme le fait remarquer G. Canguilhem, « normer, normaliser, c’est imposer une exigence à une existence, à un donné, dont la variété, le disparate s’offrent, au regard de l’exigence comme un indéterminé hostile plus encore qu’étranger4 ».

15Cette acception maximale de la norme s’est trouvée en outre renforcée par les modes de sélection variétale et les procédés culturaux qui se mettaient en place à l’époque. La sélection variétale visait en particulier à mettre au point des fruits présentant les meilleures qualités commerciales : rendement, présentation et conservation. La période qui suit l’après-guerre voit ainsi se réduire le nombre de variétés offertes sur le marché et la généralisation de certaines variétés nouvelles, telles que la Golden Delicious ou la Granny Smith pour la pomme. Cette généralisation témoigne de ce que l’on recherche moins l’adaptation d’une variété à un milieu que l’homogénéisation et la massification du marché. En effet, ces fruits semblent résoudre « en amont » les problèmes liés à la mise en place d’une agriculture intensive et d’un marché reposant sur le commerce à distance : ils offrent de bons rendements, une faible alternance5, une bonne présentation (couleur et forme régulières) et se conservent bien (ils résistent notamment aux chocs liés au transport). Ils ne sont pas forcément adaptés aux différents milieux dans lesquels on ambitionne de les cultiver et résisteront peut-être plus difficilement à diverses affections ou maladies mais, simultanément, on pense pouvoir mettre en place un mode de production faisant appel aux intrants chimiques (engrais, pesticides) permettant d’augmenter et de stabiliser les rendements indépendamment du milieu et de lutter efficacement contre les ravageurs des cultures6. Aussi, ces inconvénients passent au second plan et ce que l’on voit à l’époque, c’est l’incroyable capacité de ces nouveaux fruits à satisfaire aux exigences du commerce (présentation, conservation).

16Ces nouvelles variétés fruitières constituent un point d’appui essentiel dans le processus d’européanisation du marché. Dans le cas de la pomme, les échanges ne dépassent en général pas un cadre régional ou national : jusqu’au milieu des années 1950, des variétés adaptées à un milieu régional approvisionnent un marché lui-même régional. Le problème de la création d’un marché transnational tient à la capacité à mettre au point des fruits « passe partout », qui puissent être vendus dans n’importe quel pays de la CEE sans choquer les habitudes locales de consommation (apparence, goût des fruits). D’après un observateur de l’époque, c’est l’Italie qui, la première, ouvre la voie à l’européanisation du marché de la pomme à la fin des années 1950 :

[Les variétés italiennes] présentent des qualités de conservation exceptionnelles à l’époque, et supportent bien le transport. Et si leur goût est relativement neutre, leur couleur rouge qui est alors dans le verger européen la couleur dominante, leur permet de bien s’insérer dans les habitudes de consommation nationales. Alors que la pomme était un fruit qui ne débordait jamais les frontières nationales, l’Italie a ouvert pour ses propres produits un marché presque inexistant jusque-là : le marché européen.7

17Mais ces variétés italiennes, bien qu’aisément exportables, sont surtout adaptées aux conditions de cultures d’Italie. Aussi, à partir des années 1960, elles sont concurrencées puis supplantées en Europe par la variété américaine Golden Delicious, facilement cultivable et mieux adaptée à une demande « exprimée en termes de standards internationaux » :

Si ses qualités organoleptiques ne satisfont pas les meilleurs palais, la neutralité de son goût a du moins le mérite de ne heurter aucune des habitudes de consommation nationales.8

18Ces fruits (avec d’autres variétés venues d’Amérique du Nord) vont alors rapidement être adoptés et se répandre sur l’ensemble du verger français et accompagner son expansion dans les années 1960 :

Tableau 11. Évolution variétale de la production française de pommes (production récoltée en milliers de tonnes).

19L’expansion de la production passe en premier lieu par le développement des « fruits américains », qui s’opère au détriment des variétés traditionnelles contenues notamment dans la catégorie « autres », qui, en 1962- 1963 représente 38 % de la production (contre 27,8 % pour la variété Golden). On note aussi que le total des variétés des « reinettes » (Reine du Mans, Clochard) baisse en valeur absolue, passant de 106 300 tonnes en 1962-1963 à 43 300 en 1980-1981, alors que dans le même temps la production totale de pommes fait plus que doubler. Ainsi, la répartition variétale du verger français de pommes est très marquée puisqu’une seule variété accapare les deux tiers de la production. Au début des années 1980, les « fruits américains » représentent quant à eux 85 % de la production.

20Entre les années 1940 et 1960, ce régime de sélection variétale est en outre inscrit dans des institutions et des cadres juridiques, depuis la création du GNIS (Groupement national interprofessionnel des semences9) et du CTPS (Comité technique permanent de la sélection10) jusqu’à la mise en place au niveau international du certificat d’obtention végétal par l’Upov (Union internationale pour la protection des obtentions végétales) en 1961 en passant par le décret du 22 janvier 1960 instituant un catalogue des espèces et variétés de plantes cultivées, destiné à établir « la liste limitative des variétés ou types variétaux dont les semences ou plants peuvent être commercialisés en France ». C’est le CTPS qui définira les conditions requises pour l’inscription d’une variété au catalogue. L’Inra devra conduire une expérimentation pour décider si une variété déposée par un demandeur satisfait à ces conditions, les frais d’expérimentation étant entièrement à la charge du demandeur. Pour qu’une variété soit inscrite au catalogue, il faut qu’un obtenteur et un « mainteneur11 » acceptent d’engager des fonds assez importants. L’inscription au catalogue est valable pour une période de 10 ans et peut être renouvelée sur demande de l’obtenteur. Désormais, les pouvoirs publics ne se préoccupent donc plus seulement de protéger les innovations et de discipliner la concurrence en protégeant les appellations, mais établissent aussi la liste des variétés susceptibles d’être cultivées sur le territoire national et donc d’être consommées. Le choix des variétés cultivées est ainsi en grande partie prédéterminé par le dispositif de l’inscription au catalogue officiel des variétés12.

21L’organisation de la première mise en marché constituait l’autre dimension principale de la première OCM fruits et légumes : c’était une condition nécessaire de la constitution d’une offre marchande et de la mise en concurrence des offres sur le marché des fruits et légumes. C’est vraisemblablement le modèle belge et néerlandais de l’organisation des producteurs qui a inspiré le dispositif des OP. Face à la concentration très rapide du secteur du commerce après la seconde guerre mondiale et en raison du caractère très épars de la production de fruits et légumes dans ces deux pays, la première mise en marché des produits est attribuée à un nombre réduit d’OP aux pouvoirs étendus, qui vendent selon le dispositif de la criée (veiling en flamand et néerlandais). Cette organisation de la filière permet aux producteurs de faire face à la grande distribution montante et de négocier d’égal à égal avec elle.

22On n’aboutit pas à une telle concentration de la première mise en marché en France. Le monde des OP reste longtemps un monde très fragmenté, morcelé, constitué de regroupements à petite échelle de producteurs, souvent uniquement sur une base locale. En 1997, une mission parlementaire recense par exemple 320 groupements de producteurs en France (parmi lesquels on compte notamment 127 coopératives, 87 syndicats et 35 Sica13) qui ne représentaient que 50 % de la production nationale. Concernant cette période « historique » de la première OCM fruits et légumes14, des observateurs pointent souvent un manque d’organisation et de projets collectifs qui iraient au-delà de la standardisation et de la compétitivité par les rendements :

Le commercial de l’OP, on ne lui fixait jamais d’objectifs précis. Et puis il y avait des gens très différents dans les OP, donc assez vite, les gens se désolidarisaient, ou il y avait des gens qui s’excluaient d’eux-mêmes. […] Quand on s’accorde sur quelque chose sans qu’il y ait un contrat de signé, trois mois plus tard, à cause d’un aléa climatique ou d’une fluctuation du marché, il y en a qui considèrent l’accord comme caduque.
Entretien, consultant en agriculture

23L’une des réticences qu’expriment de manière récurrente les producteurs vis-à-vis des OP tient à la périssabilité des produits, et au « jeu du mistigri » qu’elle induit entre les metteurs en marché :

Quand tu es dans un grand groupe ça fait du monde à nourrir et tu t’aperçois que le système coopératif, il a basculé de l’autre côté. Quand tu es une petite structure qui n’est pas trop mal gérée, ton commercial il arrive à défendre ton produit encore directement avec ses commerçants, quand tu es une grosse structure, la masse elle est tellement importante, ça coûte tellement cher qu’au final c’est comme si tu allais voir l’expédition. Y a un grand groupe qui a été repris dans le coin, et finalement les producteurs se rendent compte, ce qu’on leur dit c’est : « Bon vous êtes à 42 kilos au m² en tomates ? Ben faut passer à 48 si voulez être plus compétitifs. » Là ils sont arrivés dans un système où… c’est fini quoi… Et au final on leur paie guère plus cher que ce qu’ils avaient à l’expédition. C’est un rouleau compresseur qui s’est mis en marche : petite structure ça va, tu arrives bien à te défendre, et puis maintenant c’est devenu tellement une grosse structure que chacun défend sa peau, et puis ça part… Les volumes c’est plus les mêmes, or quand tu as du volume, les clients en face ils savent te mettre la pression.
Entretien, maraîcher, exploitation de 6 hectares

24Les OP font notamment peser sur leurs adhérents la contrainte d’apporter toute leur production15 à l’OP, mais souvent sans réelle politique commerciale collective. Ainsi, la mission sénatoriale de 1997 avance dans son rapport final que les groupements de producteurs « constitués pour renforcer le pouvoir de négociation des producteurs vis-à-vis des partenaires “aval” de la filière, […] constituent parfois un obstacle à une concentration plus poussée. Ainsi, à côté d’organisations ayant une véritable démarche commerciale, il existe certaines structures “boîtes aux lettres” dont la fonction est de permettre de bénéficier des aides et du retrait : ces groupements totalement sclérosés ou dépassés ont souvent une logique de production sans vocation commerciale affirmée et sont source d’affrontement permanent avec les producteurs16. » De même, la commission européenne souligne que « des organisations de producteurs sans grandes ambitions commerciales ne justifient leur existence que par le retrait qu’elles gèrent ou les subventions structurelles qu’elles reçoivent, et que des régions, où les OP sont minoritaires et où l’on trouve d’autres opérateurs commerciaux, semblent jouer leur rôle d’une manière jugée plutôt satisfaisante par un grand nombre de producteurs locaux17 ». Ce constat animera la réforme de l’OCM de 1996 qui ira dans le sens d’un renforcement du rôle ainsi que d’une plus grande responsabilisation des OP et limitera drastiquement la place des retraits dans le fonctionnement du marché.

25En effet, les retraits, destinés à l’origine à éviter de manière ponctuelle des perturbations trop importantes du marché qui auraient pu provoquer des crises, ont progressivement été détournés de leur fonction. En effet, l’ICR avait été fixée en référence au prix de production dans les premiers temps du système et n’avait pas réellement été modifiée depuis, en tout cas pas en tenant compte des gains de productivité réalisés au cours du temps, tant et si bien que le retrait devenait une fin en soi et constituait pour certains un débouché plus attractif que le marché ou, en tout cas, permettant de couvrir les coûts de production. Ces abus ont finalement servi de prétexte pour une remise en cause globale du système des retraits, ce qui a abouti à la suppression progressive des outils de gestion du marché lors de la réforme de 1996. Le triple constat d’OP qui trop souvent n’assumaient pas leur fonction de gestion du marché, de mécanismes de gestion des crises pervertis devenus un élément structurel du revenu de certains producteurs et de l’horizon d’une nouvelle réforme de la Pac amène la Commission à entamer des travaux en vue d’une réforme de l’OCM fruits et légumes.

26L’esprit de la réforme de 1996 consiste à accentuer le caractère marchand de la filière en limitant le recours aux opérations de retrait et en continuant à ouvrir le marché aux échanges extérieurs, cela tout en renforçant le rôle des OP, en leur donnant des pouvoirs plus étendus pour qu’elles remplissent leur rôle de concentration et d’amélioration de la compétitivité de l’offre, dans le contexte d’un secteur détail devenu oligopolistique18 dans les principaux pays consommateurs de fruits et légumes. Le règlement insiste en particulier sur le statut, le rôle et les prérogatives des OP. L’OP est une personne morale constituée à l’initiative de producteurs de fruits et légumes qui a notamment pour but d’assurer la programmation de la production, de promouvoir la concentration de l’offre, de réduire les coûts de production et de régulariser les prix à la production, ainsi que (et c’est une nouveauté) de promouvoir des pratiques culturales et des techniques de production et de gestion des déchets respectueuses de l’environnement. Les producteurs membres de l’OP sont dans l’obligation d’appliquer les règles de l’OP (en matière de production, de commercialisation et de protection de l’environnement) et de vendre par son intermédiaire la totalité de leur production. Ce sont les États membres qui attribuent la reconnaissance du statut d’OP aux groupements qui en font la demande, sous condition d’un nombre de membres et d’un volume de production commercialisable minimaux ainsi que de l’apport de garanties quant à l’effectivité de leur action19. Les États membres doivent effectuer des contrôles réguliers quant au respect des conditions de reconnaissance.

27Cette insistance sur les OP comme élément d’organisation d’une filière que l’on souhaite voir fonctionner selon le principe d’un marché décentralisé se double d’une reconnaissance du rôle des organisations et accords interprofessionnels. Les interprofessions peuvent établir des contrats-types, des règles de commercialisation, des règles de production plus strictes que la réglementation ou des règles relatives à la protection de l’environnement, dont un état membre peut décider l’extension en fonction de la représentativité de l’interprofession. Cet élément va se traduire en France par la substitution des comités de bassin aux CEAFL (Comités économiques agricoles fruits et légumes) « comme structures fédératrices des OP à un échelon local. […] Les Comités peuvent demander à l’autorité administrative l’extension à l’ensemble des producteurs de leur région de compétence, de certaines règles acceptées par les groupements de producteurs, concernant l’organisation des productions, la mise en marché, la commercialisation et la promotion des ventes20. »

28Le processus d’ouverture du marché aux échanges extérieurs ainsi que la quasi-suppression des outils d’intervention sur les marchés marquent un approfondissement de la libéralisation de la filière, libéralisation « encadrée » par des politiques d’organisation de la production et d’accords interprofessionnels. Avec la réforme de 1996, les OP deviennent la clé de voûte de l’OCM fruits et légumes. Le premier effet attendu de la réforme était la concentration de l’offre (i.e. de la première mise en marché) : une augmentation de la taille moyenne des OP (nombre d’adhérents et volumes commercialisables), de la part de la production organisée dans la production totale étant donné que l’on s’efforçait de les rendre plus attractives pour les producteurs et, à part constante, une réduction du nombre d’OP (étant donné que les critères de reconnaissance des OP devenaient plus restrictifs).

29On peut constater, en France tout au moins, que la part de la production commercialisée par les OP reste à peu près stable, entre 50 et 55 %21. Parallèlement, le nombre d’OP reconnues augmente entre 1996 et 1998 :

30Ces chiffres regroupent des OP de statuts différents. En particulier, certaines de ces OP assurent la commercialisation des produits de leurs adhérents tandis que d’autres ne le font pas, comme les associations, syndicats, et GIE (Groupements d’intérêts économiques). On parle alors d’OP non commerciale. Les OP commerciales (coopératives et Sica), déjà fortement implantées avant 1996, voient leur nombre augmenter après la réforme. Ces OP étaient dotées des formes juridiques et d’organisation les plus adaptées au nouveau cadre créé par le règlement n^o 2200/96. À l’inverse, on est frappé par la décroissance très rapide du nombre de syndicats (qui passent en deux ans de 78 à 49 unités), c’est-à-dire les organisations qui étaient accusées de se préoccuper surtout de la gestion des retraits (les OP « boîtes aux lettres » dénoncées dans le rapport de la Commission européenne). En ce sens, la réforme est un succès car elle aboutit à l’élimination des structures les plus « opportunistes ». En revanche, de nouvelles formes d’OP (GIE, SA, SARL) apparaissent pour profiter des incitations du nouveau cadre de l’OCM, parfois aussi de manière très opportuniste.

31Si malgré l’augmentation du nombre d’OP et la disparition des syndicats « à l’ancienne » dédiés à la gestion des retraits on n’observe pas d’extension de la part de la production couverte par les OP, c’est entre autres parce que les syndicats à qui la reconnaissance du statut d’OP a été retirée essaiment souvent en de plus petites entités qui, elles, vont faire preuve de leur efficacité et obtenir la reconnaissance du statut d’OP22. De même, on n’assiste pas à un mouvement de concentration de l’offre. Les pouvoirs publics sont prompts à regretter ce manque de concentration de la mise en marché. Un rapport du ministère de l’Agriculture sur l’arboriculture fruitière dans le Vaucluse note ainsi que

l’insuffisance de poids économique des OP sur une filière-produit conduit à leur incapacité à pouvoir regrouper une offre suffisante, à en assurer une bonne segmentation et à fidéliser des acheteurs importants en leur assurant sur une campagne, les volumes, les qualités et les flux […] ce qui pourrait conduire à des accords avec l’aval permettant d’atténuer les aléas de campagne. […]
Il en résulte en période de crise une situation où les difficultés économiques des producteurs s’ajoutent aux difficultés de leurs OP et dans ce contexte ce sont les producteurs indépendants qui tirent le mieux leur épingle du jeu en vendant directement leur production à des expéditeurs ou en livrant leur production sur les marchés [de production].23

32Le schéma du règlement n^o 2200/96 (qui, rappelons-le, est presque exclusivement orienté par la référence aux relations entre producteurs et grande distribution) peine à trouver une « prise » sur certaines filières fruits et légumes nationales, en particulier en France. Si la grande distribution a en effet pris une place prépondérante dans le commerce de détail de fruits et légumes frais, d’autres circuits (des circuits traditionnels, passant par les marchés physiques, ou des circuits courts inventés en réaction à la montée de la grande distribution) n’en gardent pas moins une grande vitalité et les producteurs sont très attachés à ces circuits qui leur permettent de conserver une forme d’équilibre dans leurs débouchés et d’entretenir des relations plus personnelles avec l’aval de la filière, relations dans lesquelles ils s’estiment mieux à même de défendre la qualité de leurs produits. L’OCM de 1996 présentait donc le risque d’effets contre intuitifs, voire d’effets pervers : « Trop concentrer l’offre risque de faire exploser les marchés physiques (MIN) et de proximité (épiciers locaux, vente directe…) et donc de renforcer le poids de la grande distribution, l’inverse de ce qui est recherché24 ! » C’est pourquoi, outre le fait que l’on va faire preuve d’une certaine souplesse dans la reconnaissance des OP, certains pans de la production vont soigneusement éviter de rentrer dans le secteur organisé. Ainsi, concernant le département des Bouches-du-Rhône, Montigaud s’interroge sur la très faible organisation économique des producteurs, les OP couvrant seulement 13 % du tonnage total : « La raison apparente en est la cohabitation ou la proximité de zones de production et de consommation entraînant la présence de circuits de commercialisation complexes, diversifiés (dont certains, très modernes, basés sur la recherche d’économies de coûts, ignorent les OP) avec persistance de circuits “traditionnels” fonctionnant avec de petites exploitations et des expéditeurs spécialisés25. » De plus, les statuts de certaines formes d’organisation collective, notamment les Sica, imposent que les producteurs détiennent la majorité des parts (75 % dans le cas des Sica), ce qui laisse peu de marge de manœuvre à des expéditeurs très présents dans ces circuits hors grande distribution, et qui de ce fait préfèrent souvent ne pas s’engager dans une démarche de constitution d’une OP.

33En outre, il est important de souligner que les OP, ni avant ni après la réforme, ne sont organisées selon un modèle unique et que la réforme permet certaines innovations en favorisant les regroupements entre producteurs selon des projets précis, au-delà d’une simple logique territoriale de regroupement. Ainsi, à côté des OP traditionnelles, ou organisées selon un modèle hiérarchique, on trouve des OP fédératives26 ou interprofessionnelles, regroupant des producteurs et des expéditeurs (voire des producteurs-expéditeurs), qui ne se définissent pas par un cahier des charges productif ou une spécification de la qualité mais par la maîtrise de circuits de commercialisation hétérogènes et la capacité à optimiser la variabilité de la production et de l’état du marché en jouant de manière souple entre ces différents circuits (exportation, grande distribution française, marchés, ventes directes). Enfin, sont apparues récemment des OP clubs qui se caractérisent par un processus de production spécifique – par exemple la PFI – assis sur un cahier des charges et par la valorisation de la qualité des produits. On enregistre aussi la constitution de réseaux ou d’alliances d’OP, dans le cadre desquels plusieurs OP s’accordent sur un cahier des charges commun ou une marque commune pour traiter directement avec des acheteurs importants : « Ceci entraîne la construction de marques de fabricants (Covapi, Granny-Sud, Désirs de fruits, Rougeline…) ou de distributeurs (Filière Qualité Carrefour, Terre et Saveur, de Casino, Filière Auchan27. » Des structures émergent regroupant parfois plusieurs OP qui mettent en place un marketing des produits maîtrisé par les structures de commercialisation, ce qui est une relative nouveauté dans le secteur.

34Aujourd’hui toutefois, plus de 300 OP couvrent seulement 50 % de la production nationale. En outre, la politique de structuration de l’offre poursuivie à travers le financement des OP est en partie contrecarrée par les évolutions de la Pac pour les autres cultures. En effet, à partir de 1992, le niveau de garantie des prix pour le « cœur de la Pac » (comme les céréales par exemple) devient moindre, et les agriculteurs concernés peuvent anticiper une baisse de leurs revenus. En conséquence, ils pouvaient être tentés de reconvertir une partie de leurs terres vers des cultures de fruits ou de légumes (mais plutôt de légumes, qui sont des cultures annuelles, et qui présentent donc moins d’« irréversibilités ») lorsque le marché pour ces produits était favorable. C’est ce qui s’est par exemple produit pour la carotte, vers laquelle se sont tournés bon nombre de producteurs situés dans les bassins céréaliers secondaires, tels que l’Aquitaine, reconfigurant complètement la géographie de la production nationale de carottes en quelques années, et pénalisant fortement les zones de productions « historiques », comme la Basse-Normandie :

Marché unique, marché inique ?

35La réforme de l’OCM fruits et légumes correspond à une politique de compétitivité de l’offre dans un double contexte de concentration de l’aval de la filière (grande distribution) et d’ouverture internationale du marché (UE et bassin méditerranéen principalement28). Elle implique un renforcement d’une logique de sélection des exploitations les plus « performantes » par le marché en contrepartie des politiques d’équipement de l’offre. La réforme de l’OCM poursuivait ainsi une double logique, d’une part de segmentation de l’offre (par des subventions aux produits et modes de production de qualité), d’autre part de réduction du nombre de producteurs et de concentration des exploitations. Dans un pays comme la France où la part de la production « organisée » est historiquement faible, une baisse très importante du nombre de producteurs a été enregistrée pendant les années 2000.

Tableau 14. Évolution des vergers fruitiers de plus de 50 ares en France.

36Si cette baisse du nombre de producteurs allait en quelque sorte de pair avec une politique de compétitivité de l’offre, les producteurs ont néanmoins manifesté à de nombreuses reprises l’injustice que constitue à leurs yeux cette réforme. D’une part, ils font valoir que s’il est normal de vouloir corriger les effets pervers du système des retraits, il n’est pas acceptable de le supprimer au prétexte de ces effets pervers. Les fruits et légumes étant en majorité des produits périssables, les producteurs ne peuvent reporter leurs ventes en cas de baisse des cours. La quasi-suppression des outils de gestion conjoncturelle du marché a été vécue comme particulièrement inéquitable et favorisant la grande distribution. Tant et si bien que des outils conjoncturels ont été réintroduits au niveau national, en particulier à travers le mécanisme du coefficient multiplicateur mis en place en 2005. En outre, la réforme de l’OCM achève le mouvement amorcé avec la première OCM de constitution d’un vaste marché unique, par la standardisation des produits, l’harmonisation d’un droit européen des signes de qualité ou encore la centralisation au niveau européen des procédures d’homologation des produits phytosanitaires. Il y a donc une unification du marché en ce qui concerne les marchandises, les produits. Mais simultanément, les producteurs font valoir que l’Europe reste un espace fortement cloisonné, traversé par des logiques de concurrence, entre États souverains et de compétitivité nationale, qui introduisent en permanence des distorsions de concurrence dans la première logique d’unification du marché. En quelque sorte, les syndicats de producteurs opèrent une « pragmatique du fétichisme de la marchandise29 », visant à dévoiler la diversité des rapports sociaux (et, en l’occurrence, politiques) qui se cachent derrière l’homogénéité apparente des marchandises, à dénoncer les mises en invisibilité de pratiques hétérogènes derrière l’apparente homogénéité des produits échangés. Par exemple :

Comment lutter contre les importations encouragées par la grande distribution quand les coûts de la main d’oeuvre sont de 182 euros par mois en Pologne, 406 euros au Portugal, 515 euros en Espagne contre 1 286 euros en France, souligne André Boulard, président de la chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône. Toute la question est de savoir si les pouvoirs publics veulent préserver une agriculture de qualité avec des normes qui ont un coût face à des concurrents n’ayant pas les mêmes contraintes.30

37Le secteur des fruits et légumes est à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de la Pac. Il bénéficie d’une OCM mais reçoit très peu de subventions européennes31. Cette OCM ne correspond pas à une politique des structures et de moins en moins à une politique de gestion conjoncturelle des marchés (restriction des opérations de retraits). Elle s’affirme ainsi comme une politique de compétitivité, axée sur les OP. Ceux-ci constituent l’élément censé conférer une force collective aux producteurs, afin d’équilibrer leurs relations avec la distribution.

38Le rôle des OP apparaît contradictoire, ou en tout cas reposer sur une ambiguïté entre organisation de l’offre et concentration de l’offre. De ce fait, les transformations actuelles du secteur des OP semblent révéler la pluralité des tendances qui traverse la filière fruits et légumes : premièrement, une tendance à la professionnalisation-spécialisation d’un secteur, permettant à la fois de faire face à la grande distribution et de répondre à ses exigences, deuxièmement, une tendance à la libéralisation, ouvrant au contraire le marché des fruits et légumes à tous types d’exploitations agricoles, troisièmement, une tendance à la diversification, à la fois des modes de production, des circuits commerciaux et de la qualité des produits.