19. Vers une archéologie du sel en Languedoc-Roussillon
p. 401-431
Résumés
Tandis que, ces dernières décennies, de la Saintonge à la baie de Somme, les recherches se sont multipliées sur la production de sel, le Languedoc présente aujourd’hui une Antiquité et un Âge du Fer paradoxalement sans archéologie, ni du fer, ni du sel, malgré les pages fondatrices de Fernand Benoît en 1965. En prélude à son lancement à travers un projet collectif, on pose ici la nécessité et l’urgence de développer une telle recherche, nécessairement diachronique. Le Languedoc présente en effet une variété d’indices du potentiel salinier sinon de son exploitation : sources salées, terrains sédimentaires miocènes, anciens étangs saumâtres et lagunes, salines médiévales et antiques, sites néolithiques tels celui de Boujan-sur-Libron. À partir d’un répertoire et de cartes, on souligne la répartition non strictement côtière de ce potentiel salifère et on questionne quelques concentrations particulières de richesses. On s’interroge sur l’absence apparente de production ignigène (certaines céramiques sont sans doute à réexaminer) et sur son articulation possible, dans le temps ou l’organisation sociale, avec les salines attestées depuis l’Antiquité (lato sensu). Une véritable archéologie du sel implique probablement des démarches directes (fouille de zones salines et de sites, diagnostics sur des terres basses avec atterrissements ayant piégé des areae salinae, mise en rapport de vestiges tels que bassins, amphores et résidus de poisson) comme par des approches indirectes (cortèges végétaux ou de conchyo- et malaco- faunes typiques du milieu salin). Enfin la réintroduction du sel dans l’archéologie méridionale conduit à interroger sous un angle nouveau un certain nombre de sites : ainsi, des salines antiques du Narbonnais aux liens entre le sel et les abbayes carolingiennes ou encore aux salins médiévaux du littoral, tout concourt à faire du Golfe du Lion un lieu majeur et ancien de production saline. Comment dans un tel contexte ne pas lire Lattes du point de vue du sel ? Jusqu’à envisager à titre d’hypothèse de travail Lattara comme centre d’un possible district saunier. Jusqu’à proposer aussi d’examiner le rôle possible du sel dans la réussite urbaine médiévale montpelliéraine.
From Saintonge to the Baie de Somme research on salt production has developed in the last decades except in Languedoc Roussillon. In this region Iron Age and Antiquity curiously lack any iron nor salt archaeologies, although F. Benoit published rich pages in 1965. Prior to a Collective Research Project, this paper is intended to underline both the necessity and the emergency of a diachronic salt archaeology development in Languedoc. Languedoc in fact shows a real variety of salt production resources: salt springs, salty miocene soils, ancient salted inner basins or lagoons, medieval or roman satlworks, neolithic salt production sites such as Boujan sur Libron. A catalogue of resources or production sites shows the non-strictly coastal distribution of resources and leads to question examples of peculiar goods concentrations in Pre-Roman times. Apparent lack of firing salt production in Languedoc is also a matter of question (some coarse wares are surely to be re-examined in the light of salt): probably predating the marine production mentioned since Antiquity (lato sensu) firing could have lasted, with varying importance through time or social organization. Developing salt archaeology probably means direct inquiry (detection and excavation of salt resource areas or production sites, trial trenching or test pitting of buried areae salinae in low lands showing deposit process, mapping distribution patterns of roman basins, amphora production, density in fish amphoras or fish remains). It also means indirect approaches such as the determination on archaeological sites of environmental indicators directly related to salt (molluscs and shells some of which indicate precisely salt concentration). Re-introducing the salt question into the archaeology of Southern France finally leads to consider with a new eye a few urban sites: in fact, from roman satlworks in Narbonne to the link between salt and carolingian abbeys in Languedoc or to the continuous salt production areas on its medieval shore, the Lion’s Gulf appears as a major and ancient centre for salt production (probably since Neolithic times). In such a context we would like to understand the VIth c. BC and etruscan city of Lattara also from the angle of salt production and exchange and, as maps suggest, to propose as a working hypothesis to place this walled Iron age town within a salt production district. Further examination of the part played by salt in the successful growth of medieval Montpellier is needed.
Entrées d’index
Mots-clés : sources
Keywords : salt springs
Texte intégral
1Tandis que de la Saintonge à la baie de Somme se sont multipliées, ces dernières décennies, les recherches sur la production de sel, le Languedoc présente aujourd’hui une Antiquité et un Âge du Fer paradoxalement sans archéologie du fer ni archéologie du sel. Pourtant en 1958 André Dupont publie un recensement des salines littorales qu’exploite dès 1959 Fernand Benoît dans la Revue des Études Ligures puis en 1965 dans son Hellénisation. Ces pages fondatrices rapprochent le vin et le sel, parlent du rôle de celui-ci dans les échanges et la fixation des marchés sous forme de ports, mettent en évidence les abbayes du sel. Et puis, plus rien ou presque. Sur les 985 pages de la thèse d’État de Michel Py parue à l’École Française de Rome en 1990, le sel tient en une note infrapaginale – qui parle des « nombreuses références » de Benoît mais aussi de ses « dangereuses extrapolations » – ainsi qu’en 10 lignes (Py, 1990, p. 448) :
On peut par contre invoquer la présence de coquillages marins à toutes les époques et sur presque tous les sites étudiés (ci-dessus doc. 81 A) pour appuyer l’hypothèse du sel nécessaire à la conservation des viandes : il ne serait guère logique en effet de croire que les populations indigènes se déplaçaient jusqu’au littoral pour ramener quelques mollusques. D’où l’idée que ces traces pourraient être les « signes » de la quête d’une denrée plus importante, telle que le sel.
2Pour le sel languedocien cette longue traversée du désert (qui couvre toute la période de modernisation de l’archéologie française) est marquée des effets de la nécessité documentaire. Car aussi féconds que fussent les développements des Benoît et contemporains, l’archéologie académique des années 1960-1970 s’embarrassait insuffisamment de faits précis et réitérés pour raisonner ou brosser de vastes tableaux pan-méditerranéens. Les jeunes chercheurs d’après 68 se sont fait un honneur de produire du document en fouillant (beaucoup plus) et d’accumuler comptages et statistiques pour définir, dater et comparer. Ce souci a pris, au risque de l’archéographie, une acuité particulière en Languedoc où l’on a été moins sensible au déploiement spatial et thématique de l’archéologie comme à son volet préventif, tous deux liés et intervenus dans les années 1980-1990 (Chartrain, 1991).
3Et pourtant, le Languedoc-Roussillon est encore aujourd’hui l’une des principales régions productrices de sel en France. La présente contribution entend donc poser la nécessité et l’urgence de développer une archéologie du sel, avec d’autant moins de mérite à le faire qu’on y arrive sur le tard et qu’autour du Golfe du Lion l’évidence sel brûle les yeux. On se réjouira que ce thème ait été récemment abordé à Lattes à propos de vestiges de poisson (Piquès, 2005).
I. Les ressources salifères
1. Littoral et lagunes
4A. Dupont a parfaitement décrit le potentiel salifère du littoral languedocien :
Qui réunit des conditions particulièrement favorables à l’exploitation du sel : forte salinité des eaux, évaporation intense favorisée à la fois par l’action du soleil et du vent, longue série d’étangs, allongés, peu profonds, séparés de la haute mer par une suite de flèches littorales sablonneuses et, la plupart du temps en communication régulière avec elle par un régime de graus (Dupont, 1958, p. 9).
5Comme nous le verrons, ces conditions ont effectivement favorisé l’implantation de nombreux salins sur le littoral (fig. 1, p. 404). Ce cadre est du reste largement comparable à plusieurs régions du Portugal, d’Espagne ou d’Italie connues pour avoir produit du sel.
6Malgré l’absence de véritables marées, les conditions climatiques dénudent régulièrement des espaces vasards ou sablonneux sur lesquels des efflorescences salées se développent, un peu de la même manière que sur les estrans atlantiques. On peut en retrouver : l’été au sein des espaces lagunaires asséchés par le vent et le fort ensoleillement ; en automne ou en hiver sur le littoral même ou sur les berges des étangs, après les tempêtes. Un bémol cependant car on sait désormais que la géographie côtière a beaucoup varié à l’Holocène et il faut envisager que certaines périodes ou situations aient dû être moins favorables à l’activité salinière.
Figure 1 : Les ressources salifères du Languedoc

Sources : Fond CNRS, UMR 154, 1999.
2. Sources salées
7Deux sources salées sont actuellement identifiées, toutes les deux situées dans le département de l’Aude, au cœur du massif des Corbières dans des terrains d’âge triasique (fig. 1, p. 404).
8La source de Sougraigne donne naissance à un affluent de l’Aude qui porte l’hydronyme évocateur de Sals. Elle puise son sel dans les argiles salifères du Trias, plus précisément du Keuper (carte géologique de Quillan). Son taux de concentration en sel est actuellement de 5 à 10 g/l (informations BRGM, novembre 2001). Son débit et ses exutoires ont été l’objet de variations non négligeables sur d’assez courtes périodes. Au XIXe il est signalé six « griffes » (ou sources), alors qu’aujourd’hui il n’y en a plus qu’une. Son taux de salinité aurait alors été de 40 à 42 kg de sel par hl (Descadeillas, 1959), ce qui paraît considérable.
9Une deuxième source est signalée plus à l’Est à Durban-des-Corbières (fig. 1, p. 404), également située sur des terrains triasiques (carte géologique de Tuchan). Un ruisseau, qualifié de salé (appelé « Rec Salat »), est mentionné sur la carte IGN 1/25 000e à proximité d’un massif et d’une ferme dénommés « Salce ».
10Le reste du massif des Corbières pourrait recéler d’autres résurgences salifères puisqu’il y existe des affleurements du Trias relativement étendus.
3. Les étangs continentaux ou dépressions endoréiques
11Les étangs continentaux ou dépressions endoréiques, plus communément appelées « dépressions fermées » sont le résultat d’un phénomène de déflation éolienne d’âge pléistocène, propre au bas Languedoc (Ambert, 1995a et 2001). L’exemple le plus connu est le célèbre étang de Montady et son parcellaire si particulier. Il en existe au moins une centaine réparties sur tout le long de la plaine languedocienne jusqu’à la Camargue (fig. 1 et 2, p. 404 et 406), excepté entre Montpellier et Nîmes (Ambert, 2001, CEN L-R 2000). Beaucoup d’entre elles sont aujourd’hui totalement colmatées ou asséchées (Abbé 2003). Elles sont de forme circulaire ou ovoïde, peu profondes et aujourd’hui souvent en eau pendant l’automne et l’hiver, sèches l’été. Leur taille varie de quelques hectares à plusieurs centaines d’hectares. Certaines de ces dépressions, éloignées du littoral n’ont jamais pu être en contact avec la mer. Elles sont pourtant salifères (fig. 1, p. 404).
12Les mentions textuelles, médiévales ou modernes, ont été confirmées par les résultats des analyses malacologiques des prélèvements provenant des forages effectués par P. Ambert et J. André dans certaines dépressions fermées de l’Aude (Ambert et al., 1995) situées entre Narbonne et Carcassonne (fig. 2, p. 406). Plusieurs des carottes ont fourni des restes spécifiques des milieux aquatiques saumâtres indiquant :
à Ouveillan, malgré des échantillons assez pauvres, la présence de faibles indices de salinité (André, 1995b) alors que cet étang est dénommé salin (fig. 1 et 2, p. 404 et 406) ;
une salinité entre 0,5 et 1,2 % (André, 1995a, p. 254) dans certaines phases du colmatage d’Azille (fig. 1 et 2, p. 404 et 406) ;
la présence de faune saumâtre particulièrement abondante à Capestang (André et Geniez, 1995), à mettre en relation avec la communication directe que cet étang a pu avoir avec la mer pendant l’holocène (fig. 1 et 2,
p. 404 et 406).
13Nous ne disposons pas des mêmes résultats pour l’étang de Marseillette – le plus vaste du secteur puisqu’il a couvert jusqu’à 2 000 ha – les prélèvements n’ayant rien donné (fig. 1 et 2, p. 404 et 406). Pourtant plusieurs sources historiques récentes y signalent une forte salinité (cf. infra).
14La question de l’origine et des mécanismes provoquant la présence de sel dans ces dépressions n’est pas encore totalement résolue. Excepté Capestang, ce ne peut en aucun cas être le résultat de transgressions marines quaternaires, la localisation de la grande majorité d’entre elles ne le permettant pas. Il s’agit plus vraisemblablement de la conséquence du lessivage des sels minéraux provenant des terrains environnants, qui s’accumulent et se concentrent dans ces dépressions non drainées (Ambert, 1995b, p. 430). Les marnes miocènes d’origine marine du biterrois ont sans doute pu favoriser la salinité de Montady ou Ouveillan.
15L’intérêt suscité par ces milieux a largement varié au cours du temps. Enjeux économiques au Moyen Âge (Abbé, 2006), ils sont petit à petit considérés comme répulsifs. On a redécouvert récemment l’intérêt de ces milieux si spécifiques (Abbé, à paraître). Ces gisements sont a priori très prometteurs pour une problématique du sel.
Figure 2 : a. Étangs continentaux du Minervois ; b. Étangs continentaux du Narbonnais

Source : D’après la carte de Cassini, DAO P.-A. de Labriffe (SRA L-R, UMR 7041).
4. De la ressource à son exploitation
16Le potentiel salifère languedocien est donc abondant et varié. La question se pose par contre de savoir s’il y a eu exploitation de ces gisements et si oui, quand et comment. Pour aborder cet aspect nous avons retenu deux zones géographiques : le département de l’Aude dans lequel on retrouve les trois grands types de gisements salifères reconnus en Languedoc (littoral, sources salées, dépressions endoréiques) et le département de l’Hérault. Le Narbonnais (Aude) et le Montpelliérais (Hérault), deux secteurs lagunaires parmi les mieux documentés, seront alors analysés plus en détail.
Figure 3 : Table des lieux du sel en Languedoc-Roussillon – chronologie

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
17Les périodes pré et protohistoriques seront abordées de manière encore relativement spéculatives. Nous nous contenterons d’examiner et de présenter les vestiges archéologiques situés dans l’environnement des gîtes précédemment recensés. Nous accorderons une attention particulière aux biens dits de prestige ou découvertes inhabituelles. En l’état de nos investigations, il s’agira dans la plupart des cas de juxtapositions. Certaines de ces juxtapositions sont toutefois suffisamment significatives pour nous amener à proposer une relation de ces vestiges avec le sel. Relations que nos futurs travaux viseront à préciser. En effet, pour ces périodes les seules traces objectives d’une installation de production de sel remontent au Néolithique et sont celles qui ont été mises en évidence à Boujan-sur-Libron (Cassen et al., 2004, 2006 et dans ce volume). Du fait de l’état des recherches, encore balbutiantes dans la région, ce système y fait encore figure d’unicum.
18Nous aborderons par la suite les évidences que nous fournissent les témoins antiques et les références médiévales. Dans cette optique nous avons dressé1 un inventaire régional des sites saliniers connus par la fouille, par les cartes ou par les textes. Le catalogue de 40 références datables et localisables ainsi obtenu peut être classé par ordre chronologique (fig. 3, p. 407) et cartographié.
II. Narbonnais, Corbières, Minervois : pistes et évidences
1. Golfe et lagunes du Narbonnais
a. Le cadre géographique et ses évolutions
19Cette zone a subi de nombreuses et importantes modifications géomorphologiques. Il semble acquis qu’au maximum de remontée du niveau marin – encore mal daté (2500 av. J.-C. ?) – le massif de la Clape était une île (fig. 4, p. 409), donnant sur la mer à l’Est et sur une lagune à l’Ouest (Rescanières, 2002). Les géologues ne sont toutefois pas d’accord sur l’ampleur du phénomène, la datation exacte de la mise en place du cordon littoral séparant la lagune de la mer et le colmatage de cette lagune (Ambert, 1995b ; Guy, 1990 ; Rescanières, 2002 ; Verdeil, 1990). Toujours est-il que les entrées marines holocènes ont laissé de nombreux sédiments fortement salés, dont certains éloignés de plusieurs kilomètres du rivage actuel (étang de Capestang, rivages nord de l’étang de Bages-Sigean).
20La morphologie des lagunes narbonnaises et leur ouverture sur la mer, combinée au climat – fort ensoleillement, faible pluviométrie, vent souvent très fort plus de 200 jours par an – se révèlent encore aujourd’hui particulièrement favorables à la production de sel. D’ailleurs de nombreux salins étaient encore en cours d’exploitation au XXe siècle (fig. 4, p. 409). Aujourd’hui seul celui de St Martin sur la commune de Gruissan est encore en activité (Roth, 1998).
Figure 4 : Le Narbonnais

Source : DAO P.-A. de Labriffe (SRA L-R, UMR 7041).
b. Néolithique
21Dans les années trente, à la suite de travaux agricoles un dépôt de trois grandes lames de hache est mis au jour (Héléna, 1937), sur la presqu’île du Doul à Peyriac-de-Mer (fig. 4, p. 409). Pour M. Ricq-de-Bouard (1996, p. 145-146 et fig. 46) ces pièces sont :
Par leurs dimensions (208, 356 et 337 mm) et la perfection de leur fini (…) tout à fait exceptionnelles pour le Midi de la France et s’apparentent aux grandes haches dites « d’apparat », trouvées dans les mégalithes bretons de la région de Carnac.
Le fait le plus remarquable du dépôt du Doul est qu’il associe une hache en éclogite d’origine lointaine, à une hache en amphibolite calcique, d’origine locale ou à la rigueur régionale.
22Par régional il faut entendre au minimum une soixantaine de kilomètres et plus vraisemblablement plus de 100 km à vol d’oiseau.
23Le contexte de leur découverte n’est pas très clair. Les descriptions de l’époque évoquent de « grandes tâches circulaires constituées par des boues noires apportées de l’étang voisin » (Héléna, 1937, p. 72). P. Héléna les interprète à l’époque comme « des restes de tumulus qui protégeaient des tombes aux précieuses dépouilles ». Tombes qui n’ont pas été retrouvées.
24Nous disposons donc :
d’un dépôt de haches, aux tailles exceptionnelles, fabriquées à partir de matériaux d’origines lointaines ;
qui pourraient provenir d’un tertre funéraire, potentiellement constitué de vases lagunaires ;
situé à quelques dizaines de mètres des salins de St Paul, attestés par les textes dès le haut Moyen Âge.
c’est également dans le même secteur qu’a été retrouvée l’épitaphe du Salinator (cf. infra).
25Toutes proportions gardées, l’association de l’ensemble de ces éléments rappelle fortement la situation du Golfe du Morbihan où S. Cassen a mis en relation l’existence de grands monuments funéraires (longs tumulus) – constitués de terres marines, renfermant en leur sein des objets de prestige d’origine particulièrement lointaine (grandes haches en roches alpines par exemple) – avec une production salinière néolithique (Cassen, 2000).
26On rappellera également l’existence de nombreuses grottes sépulcrales situées dans le massif de La Clape (fig. 4, p. 409). Les éléments mobiliers qu’elles ont livrés sont généralement variés, de grande qualité et les matériaux dans lesquels ils ont été fabriqués sont pour certains parfois d’origine lointaine voire très lointaine. On citera pour exemple la grotte de Bringaïret à Armissan qui a livré un mobilier tout à fait remarquable, généralement attribué au Néolithique final ou aux tout débuts de l’Âge du Bronze (Claustre, 1994). On citera pour mémoire : de longues lames en silex, brutes ou retouchées ; des poignards triangulaires en silex à retouches en écharpe ; de nombreuses perles de formes variées réalisées dans des matériaux divers de provenance exogène (talc, calcaire, schiste, variscite, fluorite, stéatite), mais surtout un ensemble de 72 petites perles en pâte de verre qui, pour ces hautes époques, pourraient provenir d’Italie du Nord, d’Egypte ou de Méditerranée orientale.
c. Protohistoire
27Les mentions de nombreux salins en Narbonnais pour les périodes historiques nous amènent comme de rares autres (Gayraud, 1981, p. 91 et 543) à nous interroger sur le démarrage de ces productions et finalement sur les raisons ayant présidé à l’émergence des oppida protohistoriques du secteur. En effet on ne connaît pas moins de cinq sites fondés entre les VIe-Ve siècles av. notre ère, tous situés directement sur le domaine lagunaire, à proximité de lieux identifiés postérieurement comme salins (fig. 4, p. 409). Dès leur origine ces oppida sont des acteurs actifs du commerce méditerranéen et les récepteurs d’un luxueux mobilier grec, étrusque ou phénicien. La question du terme de ces échanges est donc à poser. Trois d’entre eux (Pech-Maho, Le Moulin à Peyriac, Ensérune) sont situés à très faible distance de salins attestés à l’époque médiévale ou moderne. Quant aux deux autres (Fleury, La Moulinasse et Narbonne, Montlaurès), des salines y sont très fortement suspectées à proximité.
28On ne peut complètement se satisfaire des hypothèses généralement émises qui consistent à considérer ces gisements comme de simples débarcadères où les navigateurs de la Méditerranée ne feraient que passer, déposant de prestigieux témoins matériels de leur culture à des indigènes incultes et assoiffés de vin, sans rien emporter ou presque en retour. Les cratères hellénistiques d’Ensérune déposés dans des tombes (Schwaller, 1994), le casque d’apparat celtique de Montlaurès au décor de corail qualifié d’exceptionnel (Chazelles et al., 1994 et Feugère, 2000), ou les vases richement décorés trouvés en contexte domestique à Sigean, Peyriac ou Fleury (Granier, 2004 ; Solier, 1994 ; Solier et Barbouteau, 1994), montrent des communautés largement ouvertes sur l’extérieur, possédant un « pouvoir d’achat » ou d’échange particulièrement élevé. Comme l’évoquait F. Benoît (Benoît, 1959 et 1965), le fait salinier, comme la métallurgie du fer – et pas uniquement le commerce de l’étain ou des céréales généralement mis en avant – nous paraissent pouvoir compter parmi les facteurs capables d’expliquer la densité et la prospérité de ces gisements.
d. Antiquité et Moyen Âge
29Actuellement les premières évidences indubitables de production de sel remontent à l’Antiquité. On dispose en effet de l’épitaphe d’un Salinator2 (C.I.L XII, 5360, Dellong, 2002, p. 529 ; Dellong, 2005 p. 105 ; Gayraud, 1981, p. 544-545), retrouvée entre les communes de Peyriac-de-Mer et Bages sans doute à faible distance des salins de St Paul. Cette inscription concerne deux affranchis dont l’un, Lucius Salonius Hilarius, est marchand ou plus vraisemblablement producteur de sel. Elle est datée du début du Ier siècle de notre ère.
30À la fin du Ve siècle (465-466), Sidoine Apollinaire fait une description poétique de la ville de Narbonne et de ses campagnes. Il y mentionne explicitement l’existence de salinae, (Sidoine Apollinaire, Carmen, XXIII, 37-68, Gayraud, 2002, p. 56) sans toutefois donner plus de précisions tant sur leur localisation que sur leur ampleur ou les techniques utilisées.
31C’est dès 779 (Bonnet, 1954, p. 42), mais de manière plus certaine au IXe et surtout au Xe siècle que commencent à apparaître les premiers textes relatifs à des échanges, achats ou conflits liés à des salines du Narbonnais (Bonnet, 1954 ; Dupont, 1958 ; Gayraud, 1981, p. 91). Plusieurs établissements monastiques de l’Aude (Caunes-Minervois, Fontfroide, Lagrasse – fig. 5, p. 413), mais également de l’Hérault (Aniane) ou d’Italie (Cluse en Piémont) se voient doter de salins ou en acquièrent dans la région de Narbonne. Ils sont malheureusement souvent difficiles à localiser du fait de toponymes ayant disparu ou de dénominations différentes pour des lieux similaires. À ces époques des salins sont exploités à Capestang, Ste Lucie ou St Paul. Il n’est jamais fait mention de détails techniques, mais l’on peut raisonnablement supposer qu’à cette époque le sel est produit dans des marais salants. Il faut par ailleurs signaler qu’entre les IXe et XIe siècles le port de Narbonne a été le lieu d’un important trafic saunier (Caille, 1990, p. 43).
2. Les sources salées
a. Sougraigne
32Des deux résurgences salées des Corbières seule l’exploitation de Sougraigne est documentée (fig. 5, p. 413). Des salins sont mentionnés dès 881 sous Carloman (Leenhardt, 1939, p. 8) dans le Razès – comté d’origine carolingienne aux limites fluctuantes recouvrant une grande partie du Sud Sud-Ouest du département de l’Aude. Sougraigne, situé aux confins Sud-Est du Razès, correspond probablement à cette mention textuelle. On sait par ailleurs que cette source est exploitée à l’époque moderne puisqu’une importante contrebande y est signalée entre 1750 et 1850. À cette époque des pratiques ignigènes sont explicitement mentionnées et 22 établissements permanents dénombrés en 1839 (Descadeillas, 1959).
33Des indices font fortement suspecter une exploitation dès le milieu du IIe millénaire av. notre ère. En effet, à quelques dizaines de mètres de la résurgence, juste au-dessus du cours d’eau, des prospections de surface3 ont permis de recueillir un nombre conséquent de tessons de l’Âge du Bronze moyen. Par ailleurs, on nous a tout récemment signalé l’existence d’un site du Premier Âge du Fer, ayant livré quelques fragments d’amphores étrusques (VIIe-Ve av. J.-C.), situé un peu plus en aval de la résurgence que le précédent. L’existence de ces sites à proximité immédiate d’un cours d’eau fortement chargé en sel permet d’envisager sérieusement une mise à profit de cette ressource dès la Protohistoire.
34Sans que l’on puisse les mettre en relation directe avec le sel, d’autant plus que la zone possède un très fort potentiel géologique et minéralogique (cuivre, plomb argentifère, lignite, ambre, jayet), il faut signaler quelques découvertes de vestiges remarquables à peu de distance de la Sals. La commune de Sougraigne a livré deux petits dépôts d’objets en bronze datés de l’Âge du Bronze moyen et final (Guilaine, 1972, p. 124, 357, 401). Légèrement plus loin, mais moins de 10 km en aval de Sougraigne, il a été trouvé une hache en jadéite d’une trentaine de centimètres de long (Guilaine, 1996, p. 128, fig. 5) et deux roues en bronze provenant vraisemblablement d’un char processionnel de la fin de l’Âge du Bronze (Guilaine, 1972, p. 298, 391, pl. X.3 ; Vaquer, 1994). On ne connaît malheureusement pas précisément les contextes de ces découvertes.
Figure 5 : L’Aude

Source : DAO P.-A. de Labriffe (SRA L-R, UMR 7041).
b. Durban-des-Corbières
35On sait encore peu de choses sur la source de Durban (fig. 5, p. 413) actuellement connue par la seule toponymie, sans mentions historiques attestées à ce jour. Parmi les rares sites reconnus aux alentours du « Rec Salat », l’oppidum du Carla, situé 2 km plus à l’Ouest à la limite de la commune d’Albas, est occupé entre les Ve et IIIe s. av. notre ère (Solier, 1992, p. 353-356) et livre, au cœur du massif des Corbières, de nombreuses importations méditerranéennes. J. Guilaine signale sur Durban la découverte de deux dépôts de l’Âge du Bronze, qualifiés de « Launaciens ». Mais ces découvertes sont anciennes et mal documentées, et seule une partie des objets nous est parvenue (Guilaine, 1972, p. 347, 391, fig. 131).
3. Les Étangs continentaux
36Comme nous l’avons signalé, il existe en Languedoc une troisième ressource salifère : les dépressions fermées. Nous disposons encore d’assez peu d’informations sur les exploitations ou récupération de sel qu’elles auraient pu générer.
a. Capestang
37Des salins sont mentionnés à Capestang (fig. 5, p. 413) dès 990 et 1110 et continuent de procurer des revenus aux archevêques de Narbonne au milieu du XIVe siècle (Abbé, 2006, p. 88 ; Dupont, 1958, p. 10). Aux époques médiévales et modernes il y en a sans doute également dans l’espace qu’occupait l’étang de Narbonne. Plusieurs salins mal localisés sont mentionnés dans de petits étangs qui ont dû éclore et disparaître au gré des fluctuations du milieu (Dupont, 1958). Tous ces espaces sont, à ces périodes, éloignés de la mer de plusieurs kilomètres. Contrairement aux autres dépressions fermées qui font l’objet de tentatives d’assèchement à partir du XIIIe, l’étang de Capestang procure jusqu’au XVIIe s. suffisamment de revenus à ses propriétaires, les chanoines de Narbonne, pour que ceux-ci préfèrent conserver leurs salins plutôt que de récupérer des terres agricoles (Abbé, 2006, p. 115).
b. Ouveillan
38Quelques kilomètres plus à l’Ouest (fig. 5, p. 413), une exploitation de « L’Étang Salin » d’Ouveillan (fig. 2-b, p. 406), est attestée à la fin du XIe siècle (Abbé, 2006, p. 89 ; Larguier sd., p. 168). Dans le cas de cet étang, dépression non drainée qui n’a jamais été en relation avec la mer, le sel est alors récolté par « simple ramassage sur les rives ou par extraction » (Larguier sd., p. 169). Aucune précision n’est livrée sur l’existence d’autres traitements. Toutefois, les analyses palynologiques liées aux campagnes de carottage menées par P. Ambert, ont permis à M.-F. Sanchez-Goni de mettre en évidence la présence de micro-charbons tout au long de la séquence. Cette constatation l’a conduit à émettre « l’hypothèse que des incendies naturels ou artificiels se sont produits durant toute la période étudiée » (Sanchez-Goni, 1995, p. 273). En l’absence de datations absolues on ne connaît ni la durée ni la date du phénomène, cependant ces charbons pourraient correspondre aux restes d’une étape ignigène du processus de production.
39Pour les périodes antérieures au Moyen Âge, les pourtours de l’étang d’Ouveillan connaissent une importante occupation, uniquement reconnue par des prospections de surface. Il y est signalé deux sites de l’Âge du Fer, considérés comme importants car ayant livré précocement (VIe siècle av. notre ère) divers produits d’importation (céramiques attiques, étrusques, puniques) que l’on ne retrouve généralement que sur les oppida du littoral (Barthès, 1994, p. 182). Il existe également autour de cet étang une forte concentration de sites du Néolithique final/Chalcolithique se rapportant aux cultures véraziennes et campaniformes (fig. 6, p. 415). Ces sites livrent un matériel de broyage original ainsi que des restes de minerai de cuivre, ce qui est peu fréquent, surtout loin des gîtes de minerai. Il serait là aussi surprenant que ces sites n’aient pas mis à profit la présence de l’Étang Salin, ne serait-ce que pour l’utiliser en tant que pré salé pour le bétail comme cela a pu être suggéré (Marsac, 1995, p. 168).
Figure 6 : Ouveillan

Source : DAO P.-A. de Labriffe (SRA L-R, UMR 7041).
b. Marseillette
40C’est le plus vaste étang continental de la région puisqu’il recouvre entre 1 500 et 2 000 ha (fig. 2-a, p. 406). En 960 les abbayes de Caunes et de Lagrasse (fig. 5, p. 413) y possèdent des droits de pêche et de pacage. Toutefois on ne dispose pour Marseillette que d’une seule mention d’exploitation de sel datée de 1383. Dans ce texte l’évêque de Carcassonne et l’abbé de Lagrasse passent un accord pour exploiter le sel (Abbé, 2006, p . 89). Par la suite on sait que les différentes entreprises d’assèchement entamées à partir du XVIe s. y ont été particulièrement laborieuses du fait de la présence du sel. Au milieu du XVIIIe s. il s’agit d’une terre non cultivable constituée de « boue en hiver et d’un magma dur rempli de sel en été » (Ferrasse, 1971-72).
41Au début du XIXe s. il fait l’objet d’une énième tentative d’assèchement qui est rapidement abandonnée à cause de la formation d’efflorescences salées. Les cultures n’y sont finalement possible qu’après désalinisation des terrains par ennoiement prolongé de 40 à 60 jours.
42Plusieurs sites sont connus sur son pourtour mais on ne note rien d’exceptionnel excepté un très gros dépôt d’objets en bronze découvert à proximité, à Rieux-Minervois, et malheureusement fondu avant toute étude (Guilaine, 1972, p. 399). D’après certaines estimations il aurait regroupé plus de 150 kg d’objets métalliques de l’Âge du Bronze, ce qui est tout à fait considérable.
III. Le sel du Lez : approche préliminaire du sel ancien dans la région de Montpellier
43Le catalogue actuel permet de pointer plusieurs phénomènes que nous observerons maintenant sur l’Hérault.
1. Un peu de toponymie ne nuit pas
44Il semble, en premier lieu, exister une toponymie du sel, également notée par plusieurs communicants du colloque (voir dans ce volume : T. Lane pour les Fenlands ; M. Alexianu, O. Weller et R. Brigand, pour la Roumanie ; P. Pétrequin et O. Weller pour le Jura). Nous avons ainsi testé la distribution spatiale des toponymes (Hamelin, 2000) les plus explicites en sal-, salin- ou fontsalade (en occitan « source salée ») par rapport à la localisation des évaporites, en général profondes dans l’Hérault, par rapport également à celle des étangs intérieurs salés ou non, enfin à celle des étangs lagunaires littoraux (fig. 7, p. 417). Il en ressort des couplages explicites, ainsi une concentration toponymique, principalement celle en salin-, sur la zone littorale, avec une particulière intensité sur Montpellier et les étangs de Mauguio (fig. 7 groupe A, p. 417). Cependant la moitié des toponymes saliniers, avec dominance de sal-, se répartit sur l’intérieur : un groupe (C) occupe le pied du massif calcaire de l’Hortus, un autre (B) gravite sur Clermont l’Hérault qu’il est tentant de rapprocher du lac et rivière du même nom, le Salagou (littéralement possible : « écoulement salé »). Un quatrième chapelet (D) marque l’Ouest de Bédarieux en décalage d’une commune avec les évaporites d’Hérépian. En limite de l’Aude, le fort groupement E associe tous nos radicaux à des étangs salés et à un gîte de gypse. Enfin un groupe sal- et marseil- se concentre (fig. 7 F, p. 417) autour du gisement salin de profondeur de Boujan dont la surface accueille le site producteur Néolithique de Salaisons (Cassen et al., 2004, 2006 et dans ce volume). Sur la base des briquetages de la Seille et de Marsal comme de l’étang narbonnais de Marseillette nous avons par curiosité examiné la distribution des toponymes en marseill- (mar/sal- littéralement « étendue salée/mer de sel ») : au nombre de 7 occurrences, ces derniers (marseillan, marsillargues, marseille, marseillette, macilia et massilia à Montpellier au XIIIe s.) apparaissent parfaitement intégrés aux groupements halotoponymiques4. D’autres radicaux semblent intéressants, tels ceux liés à la couleur (ros- ou alb-) utilisée aux marais (Boudou, 1992) pour identifier la précipitation des différents sels5.
Figure 7 : Sel et toponymie, Hérault

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
2. Le sel
45Il est paradoxal qu’à ce jour en Languedoc l’unique attestation archéologique de production du sel relève de la période Néolithique (chasséen de Boujan-sur-Libron, fig. 8, p. 418). Le processus d’identification indique la voie, très attentive et indirecte, pour développer l’approche du sel qui, invisible à l’archéologue, ne saurait le rester totalement à l’archéologie. Porter l’enquête de terrain sur des secteurs ciblés et revisiter salis occulo et certains cortèges de témoins et de mobiliers est, pour la période de la première agriculture comme pour la protohistoire, une voie obligée. Les sites et oppida des étangs de Narbonne, Ensérune et ses étendues salées, tout comme en montpelliérais les sites du Lez, les terramare de Mauguio ou le secteur de l’ancien étang et des dépôts de bronze de Launac (Guilaine, 2004 ; Guilaine et al., à paraître) sont des objets de choix pour rechercher une possible production salinière, ignigène ou non, pour aborder la place du sel dans les échanges voire pour discuter l’éventualité de principautés protohistoriques riches du sel (et du fer ?).
Figure 8 : Sel dans l’Hérault – Néolithique

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
a. L’Antiquité
46Au vu des textes et données sur le sel à l’époque romaine, il est clair que cette denrée était alors non seulement un bien déjà ancien et perçu finement selon son origine ou ses qualités, mais aussi parfois très administré. À côté d’une large production de petite échelle certains centres saliniers majeurs (Guadalquivir, Valençais, Baléares, Narbonnais, côte tyrrhénienne, Vénétie et côtes adriatiques, Sicile, sites intérieurs turcs) ont dû, le cas échéant avec leur port, relever de grandes familles régionales ou du pouvoir impérial. On mesure encore moins bien, en parallèle des salines littorales, la place probable de toute une production terrestre : conduite à partir des eaux salées (comme à Añana en Espagne carolingienne) et par tables, ou de manière ignigène, elle peut également avoir recouru à la technique minière, sans doute en progrès quantitatif sinon qualitatif à l’époque romaine.
47Pour les environs de Montpellier et le département de l’Hérault (fig. 9, p. 419), les sources de l’Antiquité (lato sensu) désignent, à l’Est de la région, un pôle en Camargue, qui confine directement avec les étangs de Montpellier/Mauguio. Strabon (Géog, IV, 1, Lasserre, 1966) indique en effet des salines près d’Arles. La vita de l’évêque St. Hilaire (Vita, Acta Sanctorum, Mai, II p. 30) mentionne, toujours sur Arles, au milieu du Ve s. AD des salines avec roues élévatrices (Gayraud, 1981, p. 544) tandis qu’au VIe siècle les moines de St. Claude dans le Jura font venir du sel de Camargue (Bruand, 2002, p. 193). Notons que trois des cinq références romaines du Languedoc concernent l’Antiquité Tardive et attestent l’existence des deux pôles : le Narbonnais et la Camargue. La rareté de la documentation, par rapport au Moyen Âge, ne saurait être surestimée : elle peut constituer le reliquat documentaire normal après des pertes archivistiques échelonnées sur 2000 ans. Avec son vide central entre Narbonnais et Camargue, elle renvoie sans doute seulement à quelques centres majeurs ou administrés, comme le montre la situation carolingienne.
Figure 9 : Sel dans l’Hérault – Antiquité

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
b. Les VIIIe et IXe siècles
48À cette époque (fig. 10, p. 420), les principales zones de production françaises, tant terrestres que littorales, apparaissent en place, fait remarquable qui pose la structuration de notre géographie salinière comme antérieure, d’autant que l’échelonnement de zones productrices alors observable de la Somme au Marais Poitevin est déjà acquise à l’Âge du Fer. La continuité est également nette avec l’Antiquité méridionale puisque les deux pôles saliniers romains connus, Camargue et Narbonnais, sont également les 2 seuls grands centres attestés et reconnus des historiens entre Rhône et Pyrénées pour la période carolingienne.
49Pour l’Hérault deux salines sont cependant enregistrées. Celle, intérieure, de Montels dans une zone fiscale et dans le secteur des lacs salés du Nord du fleuve Aude, relève en 899 de l’archevêché de Narbonne. Celle de Sète, littorale, apparaît en 822 rattachée à l’abbaye d’Aniane fondée par St. Benoît vers 782. Faudrait-il ajouter le lieu de « Porquières », mentionné en 799 au Sud de la future Montpellier comme dépendance de cette même abbaye ? La suite des évènements y inciterait, des salines y étant présentes à partir de 1179. En revanche aucun lien (fig. 11, p. 421) n’apparaît entre les zones salinières et l’abbaye carolingienne de Gellone fondée par Guilhem vers 804, ni avec l’évêché de Lodève6.
Figure 10 : Le sel du Midi dans la France carolingienne

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
50Quoiqu’il en soit, le IXe siècle élimine le vide salinier que semblait montrer l’Antiquité entre Camargue et Narbonnais, sans doute en raison de lacunes documentaires que la création toute récente de grandes abbayes vient alors combler. Peu avant 800 le missus dominici Théodulfe est envoyé par un Charlemagne impérial et guerrier raffermir la levée de l’impôt par les comtes (Magnou-Nortier, 1994). Entre Arles et Narbonne son parcours pourrait ne pas avoir été indifférent à la richesse saline, complétant tous les évêchés par Substantio7 et le Razès (mines et sel de Sougraigne pour ce dernier, probable sel des étangs de Maguelone/Mauguio pour Substantio).
Figure 11 : Sel dans l’Hérault – VIIIe-IXe siècles

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
51Apparaissant pour la première fois depuis l’Antiquité entre delta du Rhône et Narbonnais, le secteur de la future Montpellier regroupe au total deux, voire trois, des onze mentions de salines carolingiennes du Languedoc. Cette période montre une production de sel à la fois intérieure et littorale ainsi que le rôle des abbayes et des évêchés. En définitive à l’époque carolingienne une situation peut-être similaire à celle du Moyen Âge central pourrait transparaître dans ce qui peut constituer l’affleurement documentaire d’une réalité plus consistante. Une question se pose ainsi au médiéviste : les zones productrices de cette époque sont-elles nouvelles et les abbayes jouaient-elles réellement un grand rôle ? Ou bien cette double image de nouveauté et de prépondérance est-elle un pur biais dû aux archives que ces établissements étaient quasiment les seuls à produire et détenir ? D’issue incertaine, l’interrogation appelle une recherche archéologique sur la géographie des lieux de production et sur la place du sel dans les habitats et les échanges civils.
3. Le sel médiéval
a. Le Moyen Âge central
52De l’an 1000 à 1200 l’Hérault regroupe onze des dix-neuf mentions de salines du Languedoc-Roussillon (fig. 12, p. 422). Deux d’entre elles concernent des étangs intérieurs (Villeveyrac « pour faire une saline » et Capestang), aucune n’a trait à l’exploitation d’une source ou rivière salée. Ces zones de production sont régulièrement réparties mais le secteur de Sète/Frontignan ne figure pas au tableau (accident documentaire probable car il est présent à la période carolingienne et du XIIIe-XVe s. à l’actuel). Ces salines sont rattachées aux abbayes, celle d’Aniane (en permanence auprès des salins dès sa fondation carolingienne et par ailleurs très présente en Montpelliérais), celle de St. Géniès sous Béziers, celle de Valmagne dans les collines du Nord du bassin de Thau. Mais on trouve également en bonne place la cathédrale d’Agde et l’évêque de Maguelone. La règle de cet attachement est la proximité géographique. Toujours aucune saline ne relève de l’abbaye de Gellone, aucune du comte de Mauguio apparu au Xe s., aucune non plus des Guilhem de Montpellier ni de la ville elle-même formée autour de l’An Mil également.
Figure 12 : Sel dans l’Hérault – Xe-XIIe siècles

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
53Le fait saillant, « nouveauté » peut-être toute relative (cf. Porquières, supra), réside dans l’importance des salines montpelliéraines, documentées depuis la fin du Xe siècle. Géographiquement elles s’échelonnent sur la côte depuis le site épiscopal paléochrétien de Maguelone, à l’Ouest, et les étangs de Mauguio, à l’Est, par une transition insensible vers les salins de la petite Camargue d’Aigues Mortes (par exemple ceux de Peccaïs attestés depuis le IXe s. en lien avec l’abbaye paléochrétienne de Psalmodi).
b. Le Bas Moyen Âge
54Quatre des six salines que le département de l’Hérault continue de concentrer (sur neuf mentions régionales, effectif en baisse sur la période précédente) se situent sur la côte montpelliéraine, de Maguelone à Mauguio (fig. 13, p. 423). La diversité des dépendances, notamment abbatiales, précédemment observée semble se réduire à l’évêché de Maguelone et à la seule abbaye de Lagrasse dans l’Aude (salin sans doute modeste d’Ingril sur Sète). Cette rareté et celle des mentions peuvent traduire la raréfaction des actes et du mouvement de la propriété. Ce trait, joint à l’évident groupement submontpelliérain, pourrait constituer l’indice d’une concentration devenue effective au XIIIe siècle après la mobilité des Xe-XIIe siècles.
Figure 13 : Sel dans l’Hérault – XIIIe-XVe siècles

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
4. Le discours de la diachronie
55La distribution spatiale des zones salinières montre que parallèlement à la production littorale il existe une provenance intérieure du sel (fig. 14, p. 424). Sans doute de moindre importance (quatre mentions dont celle néolithique de Boujan sur Libron), cette ressource pourrait s’être tarie au XIIIe siècle (les six attestations sont alors toutes littorales) suite à des processus agraires ou économiques (Abbé, 2006), peut-être écologiques, ou bien suite à décision politique (limitation au littoral pour un meilleur contrôle ?).
56Sans prétendre être une mesure, le comptage des mentions du IXe au XIIIe siècles (fig. 15, p. 424) fait ressortir l’importance des salines sub-montpelliéraines (10 occurrences sur 15, fig. 16, p. 425), importance à laquelle fait écho un groupement toponymique (supra). Se traduisant par de rares mentions, l’existence d’un évêché à Béziers comme à Agde, de surcroît tous deux débouchés fluviaux vers les sociétés agropastorales des collines et des caus ses, n’incite pas à attribuer cette concentration de signalements de salines à la réunion, sur Maguelone, Montpellier et Mauguio, d’un évêché, d’une ville et d’un siège comtal et monétaire. C’est plus probablement du côté de la faible profondeur et de l’importance des surfaces en étangs et lagunes offertes par le littoral montpelliérain qu’il faut chercher l’explication. L’examen diachronique de la documentation nous paraît au total clairement proposer l’existence d’un « district saunier » entre Aigues-Mortes et Maguelone. Au Moyen Âge ce secteur est d’ailleurs (Dupont, 1958, p. 10-18), après le Narbonnais, l’une des principales possessions épiscopales de salines.
Figure 14 : Hérault : le sel intérieur

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
Figure 15 : Hérault : Le sel du littoral

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
Figure 16 : Hérault – le sel littoral

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
Figure 17 : Lattes, Maguelone et les Etangs

Source : A. Chartrain (SRA Montpellier/chercheur associé au LAMM Aix).
57Ne faut-il pas alors lire du point de vue du sel certains centres du multipôle urbain8 qui se cristallise autour de l’An Mil sur Montpellier ? Explorer par exemple pour Maguelone une figure d’évêché lagunaire et salinier, à l’instar de Chioggia sous Venise. S’interroger aussi sur la cité de Lattara, attestée en 500 BC avec des niveaux profonds étrusques et implantée en milieu deltaïque, au cœur de ce district (fig. 17, p. 425). Comment dès lors ne pas penser que la production et l’échange de sel ont dû jouer un rôle pour Lattes, et un rôle dans sa formation, sa pérennité voir sa conformation ? Le sel pourrait bien avoir constitué une denrée majeure de Lattara.
Conclusion
58Ce tour d’horizon confirme qu’il existe une importante production salinière attestée dès l’Antiquité et pendant tout le Moyen Âge.
59Pour les époques les plus reculées on rappellera la mise en évidence d’une production néolithique de sel par lixiviation de terres salées cristallisées par procédé ignigène à Boujan-sur-Libron « Les Salaisons » (Cassen et al., 2004, 2006 et dans ce volume). On ne manquera pas de souligner la présence systématique de grandes haches en roches tenaces à proximité de ressources salifères avérées comme au Doul et dans une moindre mesure à proximité de Sougraigne, sans qu’il faille considérer qu’il y ait un lien évident entre ce mobilier de prestige et la production salinière. De la même manière il serait tentant de mettre en relation les découvertes de mobilier d’exception d’origine lointaine se rapportant au Néolithique avec les facilités que procure le milieu narbonnais. Quant aux sources salées des Corbières, encore bien mal documentées d’un point de vue archéologique, elles laissent toutefois entrevoir des potentiels non négligeables mises à profit sans doute dès l’Âge du Bronze.
60Il faut très vraisemblablement envisager une production dès l’Âge du Fer où nous avons vu sur la zone littorale une série d’oppida se créer dès le VIe siècle avant J.-C. et concentrer une quantité impressionnante de mobilier méditerranéen de grande qualité. N’étant sans doute pas le seul élément en cause, le fait salinier est toutefois très certainement à réévaluer comme du reste l’envisageait F. Benoît.
61Les sites de production médiévaux sont nombreux et plutôt bien documentés, excepté d’un point de vue technique. Ils s’égrènent alors sur l’ensemble du littoral, mais également à l’intérieur des terres en relation avec les dépressions fermées. Il reste à mieux cerner le rôle qu’ont pu jouer ces nombreuses dépressions salifères, avant et pendant le Moyen Âge, et la nature des procédés techniques mis en œuvre. La question se pose par exemple de l’existence ou non d’une production ignigène (actuellement non attestée autour de ces gisements) et de ses rapports avec les marais salants (Gouletquer, 2002).
62Un Projet Collectif de Recherche se met ainsi en place à notre initiative afin de développer, dans la diachronie, une recherche jusque-là trop délaissée qui n’en est qu’à ses prémisses en Languedoc où le potentiel apparaît pourtant remarquable par sa diversité autant que par sa qualité.
Bibliographie
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Carte géologique de Quillan, BRGM.
Carte géologique de Tuchan, BRGM.
Notes de bas de page
1 Essentiellement pour le Languedoc et à partir de Dupont, 1958, Benoît, 1965 et Bruand, 2002.
2 V(ivit) L(ucius) Salonicus, L(ucii et) P(ublii) l (ibertus) Buccio sibi et (obito) L(ucio) Salonio L(ucii et) P(ublii) l (iberto) Hilario Salinatori.
3 Cette découverte est le fruit des travaux de M. Christian Raynaud.
4 Avant de questionner cum grano salis l’intéressant Marseille (du Vieux Port), il convient bien entendu d’examiner l’ensemble des toponymes en marseill-.
5 Ros-, présent sur notre groupement D, est par exemple attesté sur 3 sites saliniers : Rosières aux Salines à Warangéville, Rosignano sur le littoral pisan ou Rosalbon saline médiévale de Montpellier ; la question du sel serait sans doute à examiner de près pour la ville étrusque de Roselle au bord de la paléolagune de Grosseto/Vetulonia.
6 Attesté à partir du Ve s., cet évêché jamais siège comtal et pour lequel nous ne connaissons plus d’évêque entre 683 et 817 (Schneider et Garcia, 1998), reste hors du parcours de Théodulfe.
7 Oppidum, agglomération secondaire antique (Sextantio) et bourg médiéval situé au franchissement du Lez par la Via Domitia, actuellement Castelnau-le-Lez.
8 Oppidum de Murviel et les Gardies, La Roque, Sextantio et Lattes ; agglomérations romaines de Murviel, Lattes et Sextantio ; agglomération épiscopale paléochrétienne de Maguelone, formations urbaines Xe-XIe de Montpellier et Mauguio, castrum médiéval de Lattes.
Auteurs
Archéologue de l’Antiquité rurale et urbaine latto sensu, est Conservateur en Chef du Patrimoine au Ministère de la Culture et de la Communication, membre du Comité des Publications de la Recherche Archéologique et chercheur associé au LAMM (UMR 6572). En poste à la Direction régionale des Affaires Culturelles du Languedoc-Roussillon depuis 1994, il a entre 1996 et 2000 conçu et piloté de grandes opérations (A.75, Gazoduc du Midi et Tramway de Montpellier). Il est actuellement en charge du développement de l’archéologie du Grand Montpellier. Il mène parallèlement des recherches sur les chemins et la structuration agraire du montpelliérais, de l’Âge du Fer à l’an Mil. L’évidence d’échanges écologiquement étagés entre le littoral et les collines, intensément exploitées, le conduit naturellement à envisager la question du sel et sa place tant à Lattara créée au VIe s. av. J.-C. que dans le fait urbain montpelliérain. On peut citer plusieurs publications : Vignaud A., Carozza L., Chartrain A. et Raux A., 2005, « Circonstances de la découverte, résultats du diagnostic et détermination des enjeux de la fouille » in Carozza L., La fin du Néolithique et les débuts de la métallurgie en Languedoc central – les habitats de la colline de Puech Haut à Paulhan, Hérault, p. 33-39 ; 2004, « A lovely child », avant-propos in Thernot R., Bel V., Mauné St., L’établissement rural antique de Soumaltre (Aspiran, Hérault), Montagnac, Éditions M. Mergoil, p. 9-18 ; Favory F. avec la collaboration de Chartrain A., Christol M., Escallon G., Richard J.-Cl., Soyris P. et Touzard J.-M., 2002, « 29. Le Castellas, Murviel lès Montpellier (Hérault) » in Fiches J.-L. (dir.), Les Agglomérations gallo-romaines en Languedoc-Roussillon, 2 vol., M.A.M. 13, Lattes, p. 419-468 ; 1991, « Regards sur l’archéologie française et son évolution : éléments de bibliographie », les Nouvelles de l’Archéologie, 43, p. 13-18.
Ingénieur d’études au Service régional d’archéologie en Languedoc-Roussillon, chargé de la gestion du département de l’Aude, et rattaché à l’UMR 7041 du CNRS, équipe Protohistoire européenne. Formé à l’Université de Paris I, il a d’abord étudié les pratiques funéraires des premières communautés d’agriculteurs du nord de la France. Associé, puis intégré à l’équipe de la Vallée de l’Aisne (ex ERA 12 du CNRS), il participe aux travaux de cette équipe sur les sociétés néolithiques et protohistoriques du nord de l’Europe. C’est avec l’Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales (AFAN) qu’il s’investit dans les premières grandes opérations de sauvetage archéologique en milieu rural (TGV Atlantique, TGV Nord, Autoroute A5 Melun-Troyes). Il a alors l’occasion de travailler sur la question de l’acquisition du silex au Néolithique grâce à la fouille de minières de silex. À l’instigation de S. Cassen et en collaboration avec A. Chartrain, il développe depuis ces dernières années des travaux relatifs à l’archéologie du sel dans la région où il travaille. Il a publié notamment : Cassen S., Labriffe P.-A. de et Ménanteau L., 2004, « Sels de mer, sels de terre ; indices et preuves de fabrication du sel sur les rivages de l’Europe occidentale, du Ve au IIIe millénaire », Caduernos de Arqueologia de la Universidad de Navarra, 12, p. 9-49 ; Cassen S., Labriffe P.-A. de, Ménanteau L., 2006, « Le sel chauffé des baies marines d’Armorique-Sud durant les Ve et IVe millénaires av. J.-C. : à la recherche (Ouest-européenne) de croyances et de faits techniques », in Hocquet J.-C., Sarrazin J.-L. (dir.), Le sel de la Baie, histoire, archéologie, ethnologie des sels atlantiques, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, p. 33-54 ; 2006, « De grands trous néolithiques : les structures d’extraction de silex du Pays d’Othe (Aube, France), éléments d’une chaîne opératoire originale et partagée ? », in Frère-Sautot M.-C. (dir.), Des trous…, structures en creux pré et protohistorique, Montagnac, éditions Mergoil, coll. Préhistoires 12, p. 27-36 ; Labriffe P.-A. de, Loison G., Léa V., Hassler A., 2007, « De la fosse au mégalithe, de l’individuel au collectif : les architectures funéraires en Languedoc oriental et en Provence durant les Ve et IVe millénaires », in Moinat P., Chambon P. (dir.), Les cistes Chamblandes et la place des coffres dans les pratiques funéraires du Néolithique moyen occidental, Cahiers d’Archéologie Romande 110, Mémoires de la Société Préhistorique Française XLIII, p. 27-39.
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