1. Mausolée d’Auguste1

1Le mausolée est la sépulture monumentale construite par Auguste au nord du Champ de Mars. On y retrouve la tradition étrusque des tombes à tumulus, même si le modèle est bien entendu le mausolée d’Alexandre le Grand qu’Auguste avait visité à Alexandrie.

2Le mausolée d’Auguste se trouve à l’extrémité nord du champ de Mars entre la Via Flaminia et le Tibre. Octave décida probablement de sa construction en 29 av. J.-C., après sa victoire sur Antoine et la conquête de l’Égypte, pour servir de tombeau à la famille impériale. Ses vestiges s’élèvent aujourd’hui sur la Piazza Augusto Imperatore.

3D’inspiration hellénistique, c’est un édifice circulaire de 87 m de diamètre qui atteignait environ 45 m de haut. Le corps extérieur, d’environ 12 m de haut, est surmonté d’un amas de terre en forme de tumulus planté de cyprès. L’entrée du mausolée est tournée vers le sud, flanquée à droite et à gauche de deux obélisques qui se trouvent aujourd’hui sur la Piazza del Quirinale et la Piazza dell’Esquilino. C’est également devant le mausolée d’Auguste que les Res Gestae rédigées par Auguste étaient affichées. Les Res Gestae (littéralement, les exploits) d’Auguste sont une sorte de testament dans lequel l’empereur énumère à la première personne tout ce qu’il a réalisé pendant son règne. Le texte est essentiellement connu par une copie gravée sur un des murs du temple de Rome et d’Auguste à Ankara en Turquie (l’ancienne Ancyre). Cette copie est toujours visible aujourd’hui tandis que les plaques affichées devant le mausolée d’Auguste ont disparu.

4L’intérieur du mausolée est composé de plusieurs couloirs concentriques et, au centre, se trouve la chambre sépulcrale. Elle est située juste en dessous de la statue de l’empereur qui culminait tout en haut du mausolée et qui était donc visible depuis une grande partie de la ville.

5Le monument servit de sépulture impériale jusqu’à l’époque de Trajan : les cendres de Marcellus, Agrippa, Octavie, Drusus l’Ancien, Caius et Lucius César, Auguste, Drusus le Jeune, Livie, Tibère, Agrippine (femme de Germanicus), Néron et Drusus (frères de Caligula), Claude, Britannicus et Nerva y furent déposées.

Mausolée d’Auguste.

Mausolée d’Auguste sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du mausolée d’Auguste, avec les Res Gestae au premier plan.

2. Méridienne d’Auguste et Ara Pacis2

6Ce qu’on appelle aujourd’hui l’« Horologium d’Auguste » est en réalité une méridienne monumentale. Cette méridienne était un instrument solaire qui permettait de savoir précisément, à midi, quel était le degré du signe zodiacal du jour.

7Étant donné son échelle, c’était un outil très efficace pour vérifier l’exactitude du calendrier, car il donnait avec précision les dates des solstices et des équinoxes.

8La méridienne d’Auguste sur le champ de Mars utilisait comme gnomon l’obélisque qu’Auguste avait fait installer une centaine de mètres à l’ouest de l’Ara Pacis en 10-9 av. J.-C. L’obélisque a été retrouvé en 1748, brisé en cinq morceaux, à environ 6 m sous le niveau de la rue. Il avait été érigé par le pharaon Psammétique II au début du VI^e siècle av. J.-C. à Héliopolis, en Égypte, d’où Auguste le fit transporter à Rome en 10 av. J.-C. Il a été restauré et relevé en 1792 à environ 200 m au sud de son emplacement original, sur la Piazza Montecitorio, face au palais du même nom qui est aujourd’hui le siège de la Chambre des députés italienne. L’obélisque est haut de 21,78 m sans compter le socle.

9Au IV^e siècle apr. J.-C., la méridienne était très en dessous du niveau de l’époque constantinienne. Elle ne fonctionnait plus correctement depuis le milieu du I^er siècle apr. J.-C. et elle avait été par la suite transformée en bassin. Tout le secteur était fortement urbanisé, contrairement à ce qui est représenté sur la maquette de P. Bigot qui a, par ailleurs, suivi une hypothèse encore admise jusqu’à une époque très récente en ne représentant pas une méridienne au sol mais un immense cadran solaire.

10L’autel de la paix (Ara Pacis) fut érigé sur l’ordre du Sénat, en 13 av. J.-C., lors du retour d’Auguste de Gaule. Il se situait à l’origine le long de la Via Flaminia, aujourd’hui via del Corso. Il est abrité aujourd’hui dans un musée situé entre le Tibre et le mausolée d’Auguste. Cet autel, dédié à la paix, fut inauguré en 9 av. J.-C. L’Ara Pacis se compose d’un autel entouré d’une enceinte de marbre rectangulaire mesurant 11,630 m sur les côtés ouest et est qui portent les ouvertures, et 10,625 m sur les côtés nord et sud. À l’intérieur, on accédait à l’autel proprement dit par trois marches disposées sur les quatre côtés. Un des côtés possédait cinq marches supplémentaires pour faciliter au prêtre l’accès à la table d’autel. L’Ara Pacis avait deux entrées, larges de 3,60 m, situées sur les longs côtés. L’édifice était richement orné, à l’intérieur comme à l’extérieur, de bas-reliefs. Chaque angle extérieur était garni d’un pilastre de marbre à chapiteau corinthien. À l’intérieur, le soubassement était formé de larges rainures verticales imitant une palissade de bois. Les parois de la partie supérieure étaient agrémentées de festons, de bucranes et de patères.

11La décoration extérieure se composait, comme celle de l’intérieur, de deux registres. Le soubassement était orné sur ses quatre côtés de feuilles d’acanthe entrelacées (en rinceaux). Des scènes mythologiques, allégoriques ou historiques, constituaient le registre supérieur. Sur le côté ouest, à gauche de la porte en regardant vers l’intérieur, étaient représentés le Lupercal (la grotte dans laquelle la louve aurait nourri Romulus et Rémus selon la légende) avec Mars, Faustulus, les jumeaux et la louve ; à droite, était représenté Énée sacrifiant aux pénates avec son fils Ascagne. Sur le côté est, à gauche de la porte : une femme assise avec deux enfants dans les bras, symbolisant, selon les interprétations, Tellus (la terre), Vénus, la Paix ou l’Italie ; à droite de la porte : Rome personnifiée, assise sur un trophée d’armes. Sur les côtés nord et sud, sont représentées deux grandes processions. L’identification des personnages est hypothétique : il semble qu’il s’agisse de prêtres, de magistrats, de licteurs et de membres de la famille impériale. Parmi ces derniers, on pense reconnaître notamment Auguste, Agrippa et Livie sur le côté sud.

Ara Pacis.

Intérieur de l’Ara Pacis.

Ara Pacis sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle de l’Ara Pacis, avec sa polychromie, et l’obélisque de la méridienne d’Auguste en arrière-plan.

3. Colonne de Marc-Aurèle3

12Situé le long de la Via Flaminia, aujourd’hui via del Corso, ce monument est resté presque intact. Élevé à la gloire de Marc-Aurèle et imitant la colonne Trajane, il raconte les exploits guerriers de l’empereur. Probablement réalisée entre 181 et 195 apr. J.-C., la colonne, composée de vingt tambours, raconte les épisodes marquants des guerres de Marc-Aurèle, contre les Germains et les Sarmates, en commençant par le franchissement du Danube, les deux campagnes étant séparées par la figure de la Victoire. Cet empereur plus philosophe que guerrier mourut pourtant au front.

13Formé de blocs de marbre blanc, avec un escalier en spirale à l’intérieur et cinquante-six fenêtres rectangulaires, ce monument est couronné par un chapiteau dorique. Seule sa hauteur originelle de 52 m environ a été altérée de 4 m par la surélévation de la rue et de la place. Le soubassement primitif, très haut, mesurait 10,50 m et était décoré, sur trois côtés, d’une frise de Victoires et de festons, détruite par le pape Sixte Quint en 1589. Celui-ci, par ailleurs, fit restaurer la colonne et plaça à son sommet la statue en bronze de saint Paul.

14Cette colonne est certainement l’œuvre d’un groupe de sculpteurs et les dessins eux-mêmes ont dû être conçus par plusieurs artistes. Les sujets sont plus grands que ceux de la colonne Trajane, le relief plus accentué, et cela, au détriment de la finesse du travail. On voit là une tendance à la simplification, à la schématisation, qui annonce déjà le style qui sera celui du III^e siècle apr. J.-C.

Colonne de Marc-Aurèle.

Colonne de Marc-Aurèle sur la maquette de Paul Bigot.

4. Temple d’Hadrien4

15Ce temple fut construit en 145 apr. J.-C. par Antonin le Pieux qui le dédia à Hadrien, alors divinisé. Les onze colonnes restantes du temple d’Hadrien, sur les treize initiales de ce côté du bâtiment, sont d’ordre corinthien et en marbre blanc. Leur diamètre est de 1,44 m, leur hauteur de 15 m. On les voit maintenant sur le côté nord de la Bourse, Piazza di Pietra.

16Une monnaie d’Antonin de 151 apr. J.-C. représente le temple comme un édifice octostyle.

17Les colonnes s’élevaient sur un grand podium en péperin, d’environ 4 m de haut, recouvert à l’origine de marbre comme les murs de la cella. Chaque colonne reposait sur un socle sur lequel étaient représentées des figures allégoriques des provinces romaines. Entre les colonnes, étaient placés des trophées. La cella était couverte d’une voûte en berceau à caissons dont on peut encore voir un élément à l’intérieur de la Bourse. Certains reliefs restants sont conservés dans la cour du Palazzo dei Conservatori et au musée national de Naples. Le temple était situé au milieu d’un portique de 100 m sur 90 m.

Temple d’Hadrien.

Temple d’Hadrien sur la maquette de Paul Bigot.

5. Temple de Matidia5

18C’est Hadrien qui a construit le temple de Matidia, la mère de son épouse Sabine, sur le champ de Mars. Il lui fut dédié après sa mort, survenue en 119 apr. J.-C. Son emplacement a été repéré grâce à une conduite d’eau sur laquelle figurait l’inscription « Templo Matidiae ». On a pu ainsi fixer sa position à proximité de la Piazza Capranica.

19Cinq grandes colonnes de cipolin (1,70 m de diamètre) retrouvées près de la Piazza Capranica ont été interprétées comme appartenant à cet édifice. Quelques restes de ces colonnes sont encore visibles aujourd’hui dans le Vicolo della Spada di Orlando (ruelle de l’épée de Roland parce que, selon une légende, une colonne aurait été fendue en deux par Durandal, cette fameuse épée) et deux autres sont incorporées dans la maison au numéro 17 de la Piazza Capranica. Un médaillon, frappé en 120-121 apr. J.-C., représente le temple au revers, encadré de deux portiques qui sont peut-être identifiables avec la basilique de Matidia et Marciana.

Temple de Matidia sur la maquette de Paul Bigot.

6. Panthéon6

20Situé sur le champ de Mars, entre les thermes d’Agrippa et les thermes de Néron, le Panthéon est certainement le mieux conservé de tous les édifices romains. Comme son nom grec l’indique, ce temple à la cella circulaire et au toit en coupole est consacré à « tous les dieux » et particulièrement à Mars et à Vénus, protecteurs de la gens Iulia.

21Le Panthéon a été construit à l’origine par Agrippa entre 27 et 25 av. J.-C. Les fouilles menées en 1996-1997 montrent qu’à cette époque, il était déjà circulaire et orienté au nord. L’édifice brûla en 80 apr. J.-C. sous Titus : Domitien se chargea de sa restauration. À nouveau incendié sous Trajan en 110 apr. J.-C., Hadrien le reconstruisit durant les premières années de son règne, entre 118 et 125 apr. J.-C., en reprenant les fondations de l’époque augustéenne, mais environ 90 cm au-dessus. À cette occasion, Hadrien fit inscrire sur le fronton de l’édifice le nom du premier bâtisseur, Agrippa. Une restauration fut effectuée par Septime Sévère et Caracalla en 202 apr. J.-C.

22Dans son état actuel, le Panthéon est formé extérieurement d’une partie circulaire reliée à une partie antérieure, le pronaos, à colonnes et fronton. Il est en opposition formelle avec les temples de type hellénique. La coupole, dont le diamètre est égal à la hauteur totale de l’édifice (43,30 m), est revêtue de caissons et percée en son centre d’une ouverture de 9 m de diamètre, seule source de lumière. Un tel diamètre est resté inégalé jusqu’au XX^e siècle.

23Un portique, large de 33,10 m et profond de 15,50 m, constitue la façade du Panthéon. Il possède seize colonnes au total, hautes de 14,15 m (base, fût, chapiteau et entablement), avec des fûts de granite monolithiques surmontés de chapiteaux corinthiens en marbre blanc : huit sur la façade, deux sur chaque côté (la colonne d’angle non comprise) et deux rangées de deux divisant le portique en trois parties dans le sens de la largeur. Avec ces divisions de colonnes, le pronaos se présente comme un temple à trois nefs avec trois grandes niches pour fond : la niche centrale, avec sa porte en bronze rectangulaire, sert d’entrée au Panthéon, les deux niches latérales, circulaires, contenaient certainement les statues d’Auguste et d’Agrippa.

24L’intérieur de la rotonde, construite en blocage à revêtement de briques, était autrefois luxueusement revêtu de marbre sur les parties basses. L’intérieur est rythmé depuis la base par une suite de superbes colonnes monolithes réparties devant les huit niches alternativement arrondies et rectangulaires.

25Le Panthéon fut fermé au IV^e siècle apr. J.-C. par les empereurs chrétiens, comme tous les autres lieux de culte païens. Donné au pape Boniface IV par l’empereur byzantin Phocas, il fut ensuite transformé en église sous le nom de Santa Maria ad Martyres en 609 apr. J.-C. C’est très certainement à cette transformation que l’on doit l’extraordinaire degré de conservation du Panthéon. Celui-ci fut malheureusement dépouillé de ses bronzes, notamment au XVII^e siècle par Urbain VIII, qui les fondit pour réaliser le baldaquin sous la coupole de la basilique Saint-Pierre. Dans ce sanctuaire reposent aujourd’hui deux rois d’Italie, Victor-Emmanuel II et Humbert I^er, ainsi que des artistes comme Raphaël.

Panthéon.

Panthéon sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du Panthéon.

7. Thermes de Néron7

26Cet édifice thermal fut construit par l’empereur Néron en 64 apr. J.-C. Il était situé dans la partie centrale du champ de Mars, entre le Panthéon et le stade de Domitien. Les thermes de Néron étaient d’un type tout à fait nouveau. Bien qu’on les connaisse fort mal, ils semblent avoir présenté pour la première fois le plan symétrique qui devait devenir caractéristique des grands thermes impériaux du II^e siècle apr. J.-C. Couvrant une superficie d’environ 23 000 m², ils mesuraient 190 m sur 120 m. Ils furent restaurés et agrandis (40 000 m²) par Sévère Alexandre dont ils prirent et conservèrent le nom, Thermae Alexandrinae, jusqu’à la fin de l’Empire. Ces thermes étaient alimentés par l’Aqua Alexandrina, aqueduc branché sur l’Aqua Virgo. Il reste peu de vestiges des thermes de Néron : un tronçon de paroi sous le Palazzo Madama et deux colonnes de granite via Sant’Eustachio. Deux des colonnes furent utilisées en 1666 pour restaurer l’angle gauche du pronaos du Panthéon.

Emplacement des thermes de Néron.

Thermes de Néron sur la maquette de Paul Bigot.

8. Stade de Domitien8

27La Piazza Navona occupe à l’heure actuelle l’emplacement de la piste du stade de Domitien : elle en a conservé la forme rectangulaire allongée avec un petit côté courbe au nord.

28Construit par Domitien, le stade fut restauré par Sévère Alexandre. Des jeux athlétiques à la grecque y étaient organisés. L’obélisque qui se trouve maintenant au centre de la Piazza Navona et qui porte une dédicace hiéroglyphique à Domitien s’élevait probablement à l’origine dans le temple d’Isis du champ de Mars. Sous une construction moderne, du côté courbe, on peut voir des vestiges de la cauea. Les gradins de la partie rectiligne sont conservés dans les souterrains de l’église Sainte-Agnès-en-Agone. L’hagiographie chrétienne localise à proximité du stade le lupanar où a dû avoir lieu le martyre de la sainte.

29Le stade de Domitien mesurait 275 m sur 106 m. Il se distingue d’un cirque par ses dimensions plus petites, l’absence de séparation médiane (spina), d’obélisque et de boxes de départ (carceres). La cauea comprenait deux niveaux superposés, les maeniana. On estime que 30 000 spectateurs pouvaient prendre place dans le stade et ils se distrayaient en regardant les jeux athlétiques à la grecque : la course à pied, le pugilat, le lancement du disque et du javelot mais aussi la boxe. Cependant, le peu de succès que ces spectacles rencontrèrent auprès du public romain conduisit à une reconversion de l’édifice. Les travaux récents menés par J.-F. Bernard montrent du reste qu’il avait peut-être été conçu dès le départ comme un monument polyvalent, apte aussi à accueillir des combats de gladiateurs, voire des chasses.

Piazza Navona à l’emplacement du stade de Domitien.

Stade de Domitien sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du stade de Domitien avec, au premier plan, les artéfacts pour la course en armes.

9. Odéon de Domitien9

30L’odéon était un petit théâtre couvert destiné en particulier aux spectacles musicaux. Situé au sud du stade de Domitien, l’odéon, construit par ce même empereur à l’imitation des odéons grecs, pouvait recevoir 10 000 spectateurs. Il s’y tenait les concours d’éloquence, de poésie et de musique. Aujourd’hui, la façade du Palazzo Massimo occupe l’emplacement de la cauea de l’odéon de Domitien. De l’époque antique, seule une colonne monolithe en cipolin est encore visible, Piazza dei Massimi. Elle appartenait peut-être à la scène de l’odéon.

Colonne de l’odéon de Domitien.

Odéon de Domitien sur la maquette de Paul Bigot.

10. Thermes d’Agrippa10

31Les thermes d’Agrippa sont les thermes publics les plus anciens de Rome (à l’origine thermes privés, légués par testament au peuple romain). Ils furent construits sous Auguste par Agrippa de 25 à 19 av. J.-C., entre le Panthéon et le théâtre de Pompée, au nord de l’aire sacrée du Largo Argentina. Il en reste les structures murales autour de la grande salle circulaire, coupée aujourd’hui par la via dell’Arco della Ciambella. Quand Agrippa termina la construction de l’Aqua Virgo à Rome, ses thermes purent fonctionner. L’édifice, dont murs et sols étaient revêtus de marbres précieux, mesurait environ 100 m de large (sens est-ouest) sur 120 m de long.

32Son plan est connu grâce à la Forma Vrbis Romae (plan de la ville de Rome datant du début du III^e siècle apr. J.-C.) et grâce à des dessins de la Renaissance réalisés par B. Peruzzi, A. Palladio et D. Rossi. Comme dans les plus anciens édifices thermaux, les pièces s’organisaient irrégulièrement autour d’une grande salle circulaire, une étuve à coupole dont le diamètre interne approchait les 25 m. On sait que les thermes d’Agrippa furent restaurés une première fois après l’incendie de 80 apr. J.-C., une autre fois par Hadrien. Une dernière intervention se situe à l’époque de Constance et Constantin. Tout près des thermes, côté ouest, un lac artificiel avait été agencé, le Stagnum Agrippae, alimenté également par l’Aqua Virgo. Étant représenté sur le plan sévérien, il est probable qu’il fut utilisé comme piscine des thermes.

Thermes d’Agrippa.

Thermes d’Agrippa sur la maquette de Paul Bigot.

11. Saepta Iulia11

33Les Saepta Iulia, enceinte destinée aux votes, étaient un vaste portique (310 m sur 120 m), situé près du Panthéon, où se réunissaient les assemblées électorales des Romains. Commencés par César en 54 av. J.-C. pour remplacer les anciens Saepta de la République, mais laissés inachevés à sa mort, ils furent terminés par Agrippa en 27 av. J.-C. À l’origine lieu des assemblées populaires et militaires, les Saepta devinrent sous l’Empire un marché de luxe, puis un lieu de promenade très fréquenté. Ils furent incendiés en 80 apr. J.-C. et restaurés deux fois, sous Domitien et sous Hadrien. Les seuls restes visibles aujourd’hui sont les vestiges d’une paroi adossée au Panthéon.

Emplacement des Saepta Iulia.

Saepta Iulia sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle des Saepta Iulia à l’époque républicaine.

Restitution virtuelle des Saepta Iulia au IV^e siècle apr. J.-C., désormais transformés en marché.

12. Temple d’Isis et temple de Sérapis12

34Le temple d’Isis sur le champ de Mars est un bon exemple du syncrétisme de la religion romaine, qui accueille les divinités étrangères. Cet édifice s’insère dans un ensemble monumental qui porte le nom d’Iseum. L’allée qui mène au temple d’Isis s’apparente à un dromos, une allée bordée de sphinx tels qu’on en trouve en Égypte. Elle était probablement bordée à la fois de sphinx et de lions. Tous les éléments présents dans l’Iseum ne sont pas réellement égyptiens, au sens qu’ils n’ont pas été importés d’Égypte. Certaines des statues de style égyptien présentes dans l’Iseum ont été façonnées en Italie, par les Romains eux-mêmes, qui préfèrent les créer plutôt que d’aller chercher des objets originaux car il est très coûteux de faire venir des artéfacts d’Égypte. Le voyage est long, incertain et par certains aspects, dangereux. Or la demande d’objets égyptiens est forte à Rome : les riches aristocrates en sont friands pour décorer leurs maisons. Un marché est donc apparu et certains artisans locaux s’en sont emparés. Quand on regarde l’architecture de l’Iseum en détail, par exemple les célèbres colonnes en granite gris, on constate d’abord une volonté de reproduire l’artisanat égyptien en utilisant les mêmes techniques et les mêmes matériaux. Les architectes sont par exemple allés chercher un granite de l’île d’Elbe, très proche dans sa couleur des granites égyptiens. Ils ont aussi rétréci le bas des colonnes, comme les Égyptiens. Mais certains des reliefs sculptés au bas des colonnes sont spécifiquement romains, même si les représentations de profils sont très connotées égyptiennes. Quelques-unes de ces colonnes sont encore visibles aujourd’hui au musée du Capitole et nous permettent de voir les spécificités romaines. Les personnages sont tout d’abord représentés avec des couronnes sur la tête alors qu’en Égypte, ils portent plutôt des rubans. Ensuite, certains arborent des châles par-dessus leurs tuniques, ce qui n’est pas habituel dans l’art égyptien. L’analyse pétrographique réalisée sur les colonnes montre qu’elles ne remontent pas au-delà du I^er siècle apr. J.-C. Elles datent donc de la reconstruction du temple d’Isis sous Domitien.

35Il ne reste rien aujourd’hui du temple d’Isis en lui-même. Deux émissions monétaires nous renseignent toutefois sur sa forme. En 71 apr. J.-C., à l’époque de Vespasien, l’édifice portait un fronton en forme de demi-cercle. Il fut détruit par un incendie qui ravagea une partie de Rome en 80 apr. J.-C. D’après une autre monnaie, Domitien a ensuite reconstruit le temple d’Isis avec un toit plat, en forme de terrasse.

Obélisque du temple d’Isis sur la place de la Minerve.

Temple d’Isis sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du temple d’Isis.

*

36Le temple de Sérapis sur le champ de Mars était intimement lié à celui d’Isis. Il jouxtait les Saepta Iulia dans lesquels les votes étaient organisés à l’époque républicaine. Son plan ressemble étrangement à l’extrémité du canope de la villa d’Hadrien à Tivoli. Les spécialistes se demandent donc si Hadrien ne se serait pas inspiré de ce temple de Rome pour construire une partie de sa villa.

Temple de Sérapis sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du temple de Sérapis.

13. Porticus Diuorum13

37La Porticus Diuorum (le portique des divins) se trouve au sud-est de l’Iseum du champ de Mars.

38Cette place est très importante car elle a été construite à l’emplacement de l’ancienne Villa Publica dans laquelle les empereurs Vespasien et Titus avaient passé la nuit la veille de leur triomphe sur la Judée. C’est du moins ce que nous raconte l’auteur Flavius Josèphe qui est contemporain de ces événements.

39Quand Domitien fit construire cette grande place à portiques quelques années après, il choisit précisément cet emplacement car c’est là que son père Vespasien et son frère Titus avaient commencé leur fameux triomphe. Il leur dédiera d’ailleurs les deux temples qui se trouvent de chaque côté de la place.

40On pense que la tradition de commencer le parcours du triomphe dans la Porticus Diuorum s’est maintenue par la suite, en souvenir du triomphe sur la Judée et parce que cette place monumentale était adaptée, par sa taille, au rassemblement d’une partie de l’armée. Les portiques latéraux permettaient également de préparer le butin sur les chars ou les brancards qui allaient parcourir la ville.

41La principale source d’information que nous possédons pour restituer cet espace est la Forma Vrbis Romae, ce grand plan de marbre qui a été réalisé par les Romains eux-mêmes à l’époque sévérienne.

Porticus Diuorum sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle de la Porticus Diuorum.

14. Porticus Minucia14

42La Porticus Minucia Frumentaria se trouve sur le champ de Mars, à proximité de la zone sacrée du Largo Argentina. Cette grande place de 150 m sur 115 m, entourée d’un portique sur ses quatre côtés, était fréquentée par les citoyens qui étaient éligibles aux distributions gratuites de blé. Le centre de la place est dominé par le Temple des nymphes. Il existe une hypothèse selon laquelle la liste des ayants droit aux distributions gratuites de blé était, au moins à une certaine époque, conservée dans ce temple. Il s’agirait donc plus d’un lieu de dépôt d’archives que d’un lieu de culte. Or ce temple a subi un incendie criminel au I^er siècle av. J.-C. et on se demande si le but des incendiaires n’était pas justement de faire disparaître ces listes. Ces dernières devaient en effet être révisées pour diminuer le nombre de citoyens pouvant bénéficier des distributions gratuites de blé.

43À partir de Septime Sévère, le service impérial qui s’occupait de la distribution du blé fut jumelé avec le service des aqueducs, celui du curator aquarum. Le rapprochement des fonctionnaires chargés des approvisionnements en eau et en blé se justifie puisqu’à cette époque des quantités importantes de blé étaient moulues dans des moulins à eau. C’est peut-être ce qui explique la présence d’un temple dédié aux nymphes au sein d’un portique consacré aux distributions de blé.

44La distribution du blé était organisée à l’abri du portique. Quarante-quatre ou quarante-cinq guichets étaient régulièrement répartis et ils portaient chacun un numéro différent. Le citoyen qui venait chercher du blé devait apporter une tessère, un document administratif, qui portait le numéro du comptoir et le jour où il devait se présenter. Il repartait ensuite avec un sac de blé de 35 kg. Il faut imaginer cette place très encombrée, certainement bruyante, puisque, selon certaines estimations, ce sont environ 230 tonnes de blé qui étaient distribuées ici chaque jour à près de 6 600 personnes.

Temple des nymphes.

Porticus Minucia sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle de la Porticus Minucia avec son Temple des nymphes.

15. Aire sacrée du Largo Argentina15

45L’espace appelé aujourd’hui « aire sacrée du Largo Argentina » était entouré dans l’Antiquité par un portique et il comprenait quatre temples d’époque républicaine, qui sont désignés conventionnellement avec les quatre premières lettres de l’alphabet du nord au sud. Les chercheurs s’accordent maintenant sur les divinités auxquelles ces temples étaient voués : le temple A est celui de Juturne, le B celui de la Fortune de ce jour, le C est dédié à Feronia et le D aux Lares Permarini. Cette aire a été considérablement remaniée au cours des âges, ce qui a entraîné des modifications successives de son niveau de sol. D’un point de vue historique, cet ensemble a une connotation particulière car il est attenant à la curie de Pompée, dont le mur du fond se trouve entre les temples B et C, et dans laquelle Jules César a été assassiné aux ides de mars 44 av. J.-C., lors d’une séance du Sénat.

46Le temple A se trouve à l’extrémité nord de l’aire sacrée du Largo Argentina et sa construction remonte au milieu du III^e siècle av. J.-C. Cet édifice est encore relativement bien conservé aujourd’hui et l’état que nous voyons correspond à la restauration qui a suivi l’incendie destructeur du champ de Mars en 80 apr. J.-C.

47Le temple B est le plus récent des quatre temples et c’est le seul à se présenter avec une cella circulaire. Il reste suffisamment d’éléments archéologiques pour savoir qu’il présentait des colonnes de style corinthiennes, avant d’être muré à l’époque tardive.

48Le temple C est le plus ancien des quatre temples de la zone sacrée du Largo Argentina. Il aurait été construit entre la fin du IV^e et le début du III^e siècle av. J.-C.

49Le temple D a probablement été construit au début du II^e siècle av. J.-C. et c’est le temple le moins bien préservé de l’aire sacrée du Largo Argentina.

50Les temples A, C et D ont disparu de la maquette de P. Bigot.

Aire sacrée du Largo Argentina, avec le temple A (Juturne) au premier plan.

Temple B (Fortune de ce jour) du Largo Argentina sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du Largo Argentina, avec, de droite à gauche, les temples B (muré), C et D.

16. Complexe pompéien16

51Le théâtre de Pompée est le premier théâtre permanent à avoir été construit à Rome. Il dominait la plaine du champ de Mars à une hauteur de 45 m (soit une hauteur équivalente à celle du Capitole) et il jouait symboliquement le rôle d’une « colline sacrée ». Les travaux ont certainement commencé en 61 av. J.-C., sur un terrain appartenant peut-être à Pompée. La cauea avait un diamètre de 158 m et pouvait accueillir jusqu’à 20 000 spectateurs.

52D’après des lettres de Cicéron datant de 55 av. J.-C., nous savons que des jeux grandioses eurent lieu pour l’inauguration du théâtre, certainement le 29 septembre, jour de l’anniversaire de Pompée. C’est cette année-là également qu’il fut élu consul pour la seconde fois. L’édifice fut successivement restauré par Auguste (en 32 av. J.-C.), Tibère, Domitien (en 80 apr. J.-C.), Dioclétien et Maximien. Sa façade semi-circulaire se constituait d’arcades ouvertes faites de blocs de travertin. Nous ne savons pas s’il présentait une superposition des ordres (dorique, ionique, corinthien). Le théâtre était luxueusement décoré à l’intérieur de marbre et de stuc. Il abritait de nombreuses œuvres d’art, dont quelques-unes ont été retrouvées, notamment une statue d’Hercule en bronze doré de 3,85 m, aujourd’hui au musée du Vatican. Face à l’immense cauea, dont le sommet était surmonté, au centre, du temple de Vénus Victrix (inauguré seulement en 52 av. J.-C.), se trouvait la scène, à plusieurs étages, sur laquelle étaient placées de grandes statues de muses avec Apollon. Deux de ces sculptures sont maintenant visibles au Louvre et au musée national de Naples.

53Derrière la scène se trouvait un quadriportique impressionnant par ses dimensions – il mesurait environ 180 m sur 135 m – et décoré d’œuvres d’art. Sous le portique, sur le côté opposé au théâtre et face à lui, se trouvait une grande exèdre rectangulaire, ornée d’une statue de Pompée, qui fut utilisée comme curie pour les réunions du Sénat. C’est là que fut assassiné César en 44 av. J.-C. Des vestiges de l’exèdre sont encore visibles. En revanche, il ne reste rien du portique. Le jardin qui se trouvait au centre du portique comprenait une série de petites fontaines dont on a découvert des traces.

54Il reste peu de choses du théâtre lui-même (quelques tronçons de corridors rayonnants en opus reticulatum dans les caves des habitations du quartier) mais sa forme est bien marquée dans le tracé des rues, notamment la courbure interne des gradins dans la via di Grotta Pinta. Le Palazzo Orsini Pio Righetti (Campo dei Fiori) s’appuie sur des substructions qui pourraient être celles du temple de Vénus Victrix mais l’hypothèse est toujours discutée.

Persistance urbaine du théâtre de Pompée.

Théâtre de Pompée sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du théâtre de Pompée couvert par les vélums.

Restitution virtuelle du portique du théâtre de Pompée.

17. Théâtre de Balbus17

55Le théâtre de Balbus, relativement petit en comparaison des deux autres théâtres du champ de Mars, celui de Pompée (20 000 places) et celui de Marcellus (15 000 places), pouvait accueillir un peu plus de 11 000 spectateurs. Inauguré en 13 av. J.-C., ce théâtre fut construit avec le trésor de guerre de Lucius Cornelius Balbus, ami d’Auguste et banquier de Rome, qui triompha des Garamantes, un peuple africain. Il se composait de trois étages – l’étage inférieur d’ordre dorique, le deuxième ionique et le troisième corinthien – et s’ouvrait par une série d’arcades. Son diamètre était d’environ 90 m alors que ceux du théâtre de Pompée et du théâtre de Marcellus étaient respectivement de 158 m et de 130 m. L’incendie de 80 apr. J.-C. détruisit une partie de l’édifice, dont il ne reste rien aujourd’hui malgré la restauration probable de Domitien. Le théâtre a été longtemps mal localisé à l’emplacement du Monte dei Cenci. On sait depuis 1960 de façon certaine qu’il se situait en réalité sous l’actuel Palazzo Mattei Paganica.

56Sur la maquette de P. Bigot, sa position est inversée avec celle du cirque Flaminius.

Théâtre de Balbus.

Théâtre de Balbus sur la maquette de Paul Bigot.

18. Portique d’Octavie18

57Sur le côté nord du cirque Flaminius, Auguste construisit le portique d’Octavie en hommage à sa sœur entre 33 et 23 av. J.-C. À l’emplacement de cet édifice s’élevait auparavant le portique de Metellus, commencé en 146 av. J.-C. et inauguré en 131 av. J.-C. Metellus Macedonicus avait déjà englobé dans son portique l’ancien temple de Junon Regina, auquel il avait adjoint un temple dédié à Jupiter Stator. Auguste ajouta à cet ensemble la curie d’Octavie et une bibliothèque. Il agrandit en outre le portique vers le nord. Ce dernier mesurait désormais 119 m sur 132 m.

58La première restauration du portique eut lieu après l’incendie de 80 apr. J.-C., la seconde, sous Septime-Sévère, après l’incendie de 191 apr. J.-C. Les traces que l’on voit aujourd’hui correspondent au propylée et au portique sud. Deux des colonnes corinthiennes du propylée sont restées intactes tandis que les autres ont été remplacées par un arc donnant accès à l’église Sant’Angelo in Pescheria. Sur l’architrave on peut encore lire l’inscription dédicatoire sévérienne, datable de 203 apr. J.-C. Des deux temples qui se trouvaient au centre de l’édifice ne subsistent de celui de Junon Regina que quelques éléments dans les caves des constructions modernes. Nous savons par les notices de Pline que de nombreuses œuvres d’art ornaient cet ensemble.

Propylée du portique d’Octavie.

Portique d’Octavie sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du portique d’Octavie. Le propylée est à droite, devant le théâtre de Marcellus.

19. Cirque Flaminius19

59La construction du cirque Flaminius a certainement été déterminante pour l’orientation de la partie méridionale du champ de Mars. Ce cirque a été construit par le censeur Caius Flaminius Nepos (vaincu par Hannibal à Trasimène) en 221 av. J.-C. On lui doit également la réalisation de la Via Flaminia qui menait de Rome à la mer Adriatique. Avec la construction du théâtre de Marcellus, le cirque de Flaminius a été en partie démoli et transformé en place. C’était le second cirque construit à Rome, le premier étant le Grand Cirque. Des courses de chars et des jeux s’y déroulaient à dates fixes : les Ludi Apollinares. La plèbe pouvait aussi s’y réunir (Concilia Plebis). Le cirque Flaminius mesurait 297 m de long sur 120 m de large. Il s’ouvrait vers l’extérieur, comme le théâtre de Marcellus, sur une série d’arcades en travertin. Les arcades de l’étage inférieur, la porte principale et une partie des gradins étaient encore visibles au XVI^e siècle. Quelques vestiges ont été retrouvés en sous-sol.

60Nous savons depuis 1960 que P. Bigot a mal localisé cet édifice : inversé avec le théâtre de Balbus, le cirque Flaminius se trouvait en réalité à l’ouest du théâtre de Marcellus et au sud du portique d’Octavie.

Emplacement du Cirque Flaminius.

Cirque Flaminius sur la maquette de Paul Bigot.

20. Théâtre de Marcellus20

61Le théâtre de Marcellus remplaça probablement un théâtre démontable d’époque républicaine. La surface couverte tripla, de sorte que presque tous les édifices environnants furent démolis pour être reconstruits à proximité. Cet important lieu de spectacles, avec sa façade semi-circulaire, fut un des trois théâtres permanents de Rome. Il fut sans doute terminé en 17 av. J.-C. mais l’inauguration officielle par Auguste, qui le dédia à son neveu et héritier Marcellus, mort prématurément, se situe vers 13 ou 11 av. J.-C. Ce fut le plus grand théâtre de Rome après celui de Pompée : il pouvait accueillir 15 000 spectateurs. Son diamètre était de 130 m, sa hauteur de 33 m (il en subsiste 20 m). Les voûtes étaient en maçonnerie. Au-delà de l’orchestra, dont le diamètre était de 37 m, s’élevait la scène orientée sud-ouest, à plusieurs étages, dont la seule restauration connue est celle de Vespasien. Il n’en reste maintenant qu’un pilier et qu’une colonne. La façade semi-circulaire est en travertin. Son architecture à ordres superposés prépara celle du Colisée. Les deux premiers niveaux sont encore partiellement visibles. Les arcades du premier niveau sont encadrées par des demi-colonnes lisses, sans base, avec chapiteaux toscans ; l’entablement est dorique. Au second étage, les demi-colonnes ont des bases attiques ; les chapiteaux et l’entablement sont ioniques. On ne sait rien du troisième étage pour lequel n’ont été identifiés que quelques demi-chapiteaux corinthiens.

62Le théâtre était encore actif au V^e siècle. Il devint ensuite une forteresse. Il fut occupé par les Savelli et devint au XVIII^e siècle propriété des Orsini dont le palais occupait la partie haute.

Théâtre de Marcellus et colonnes du temple d’Apollon Sosianus sur la droite.

Théâtre de Marcellus sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du théâtre de Marcellus.

21. Temple d’Apollon Sosianus21

63Il y avait dans l’Antiquité deux temples à proximité immédiate du théâtre de Marcellus : un temple de Bellone, la déesse de la guerre, et un temple dédié à l’Apollon médecin, le seul clairement visible aujourd’hui, facilement identifiable grâce à trois colonnes remontées en 1940. Il ne s’agit pas de l’état le plus ancien du temple, mais de la reconstruction effectuée au I^er siècle av. J.-C. par un lieutenant d’Antoine, du nom de Sosius, d’où la désignation de « Sosianus » donnée par la suite à ce temple.

64À cet endroit existait déjà au milieu du V^e siècle av. J.-C. un autel dédié à Apollon (Tite-Live, Histoire romaine, 3, 54, 15), dans une zone vierge de constructions importantes, entre l’emplacement du futur cirque Flaminius et le Capitole. Cette zone s’appelait les Prata Flaminia (les prés Flaminiens). On décida de construire un premier temple à l’emplacement de l’autel suite à une épidémie (une pestilentia) en 443 av. J.-C., « pour la santé du peuple » (« pro ualetudine populi », Tite-Live, Histoire romaine, 3, 63, 7). Ce temple fut consacré en 431 av. J.-C. à l’Apollo Medicus, c’est-à-dire l’Apollon médecin des Grecs arrivé à Rome par l’intermédiaire des Grecs du sud de l’Italie. Pendant longtemps ce temple fut le seul dédié à Apollon à Rome. Après la construction du cirque Flaminius, on l’appelait parfois le temple d’Apollon in Circo. Ce vieil édifice républicain fut reconstruit à ses frais par un ancien gouverneur de Syrie, Caius Sosius, en 34-33 av. J.-C. Sosius était un partisan d’Antoine, donc un adversaire d’Octave, et son projet venait en quelque sorte contrebalancer la décision d’Octave d’élever sur le Palatin un autre temple à Apollon (voué au dieu par Octave en 36 av. J.-C. durant la campagne contre Sextus Pompée, voué une deuxième fois avant la bataille d’Actium en 31 av. J.-C., mais les travaux avaient débuté en 36 av. J.-C.). Sosius et Octave se réconcilieront par la suite. Il faut dire que ce temple était important pour la famille d’Octave car, d’après Suétone et Cassius Dion, Atia, la mère d’Octave, s’était fait porter une nuit en litière à l’intérieur de l’ancien temple à l’occasion d’une cérémonie religieuse (en 63 av. J.-C.). Elle s’y endormit et fut visitée par un serpent pendant la nuit. À partir de là elle porta une tache sur son corps qui avait la forme d’un serpent et ne put jamais la faire disparaître. Neuf mois après naquit Octave (Suétone, Auguste, 94, 4).

65Le nouveau temple à l’Apollon Medicus fut légèrement décalé en arrière par rapport à l’ancien pour laisser plus de place à la construction du théâtre de Marcellus. Les parties restaurées permettent d’avoir une idée de la hauteur du podium, de la délicatesse des bases et de l’originalité des cannelures des colonnes (marbre de Carrare) : alternance de cannelures larges et de cannelures étroites. Nous sommes à une époque charnière de l’architecture publique romaine qui commence à être de plus en plus luxueuse. Sur la frise alternent bucranes et guirlandes. Une partie de la décoration du fronton a pu être reconstituée. Elle était composée de sculptures grecques originales du V^e siècle av. J.-C. figurant une amazonomachie, la lutte mythique entre les Grecs et les Amazones. Ce qui est étonnant, c’est qu’à cause du manque de recul, cette décoration n’était visible que de la galerie du premier étage du théâtre de Marcellus. Une partie de la modénature et des éléments d’architecture sont encore conservés aujourd’hui au musée de la Centrale Montemartini. En outre un petit espace d’exposition aménagé dans une cour à l’arrière du temple et accessible par la via Montanara permet de voir d’autres fragments de la décoration du temple d’Apollon et du théâtre de Marcellus.

Temple d’Apollon Sosianus au premier plan.

Temple d’Apollon Sosianus sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du temple d’Apollon Sosianus, accolé au temple de Bellone à droite.

22. Temple de Bellone22

66Le temple de Bellone se trouve sur le champ de Mars, entre le temple d’Apollon Sosianus et le portique Toscan. C’est un édifice ancien qui a été construit par Appius Claudius Caecus à partir de 296 av. J.-C. Aujourd’hui à Rome, il est difficile de repérer son emplacement car il n’en reste quasiment plus rien. Seuls quelques fragments de colonne, un chapiteau et une base ont été mis au jour. Les fouilles archéologiques ont également permis de retrouver la trace d’un cercle dans le sol du dallage situé devant le temple de Bellone. Or, devant ce temple justement, les sources littéraires nous apprennent qu’il y avait une columna bellica (une colonne de guerre). D’après les textes, notamment ceux de Festus (33 L) et d’Ovide (Fastes, 6, 201-207), il était usage de lancer un javelot au-dessus de cette petite colonne, ou peut-être depuis cette colonne, au moment du déclenchement d’un conflit.

67Le temple de Bellone n’est pas représenté sur la maquette de P. Bigot.

Au premier plan, emplacement du temple de Bellone. En arrière-plan, théâtre de Marcellus et temple d’Apollon Sosianus.

Restitution virtuelle du temple de Bellone, avec le portique Toscan au premier plan.

23. Portique Toscan23

68Le portique Toscan est, de façon tout à fait classique, situé en bordure d’une place. Il est composé de deux branches : la première longe le temple de Bellone sur le champ de Mars, du côté du Capitole, et l’autre se poursuit à l’arrière des temples d’Apollon Sosianus et de Bellone. Ce portique date probablement de l’époque augustéenne, ce qui en fait une construction contemporaine de celle du théâtre de Marcellus. D’après les sources archéologiques, on estime qu’il s’élevait sur 6,60 m de haut.

69Ce portique n’est pas représenté sur la maquette de P. Bigot.

Restitution virtuelle du portique Toscan.

24. Temples du Forum Holitorium24

70Le Forum Holitorium était délimité par les pentes du Capitole, le théâtre de Marcellus et le Tibre. Il faisait partie des centres commerciaux disséminés autour du Forum romain. À l’origine, chaque forum était destiné à la vente d’un produit particulier : les bovins et les ovins se vendaient au Forum Boarium, les légumes et les herbes au Forum Holitorium, les porcins au Forum Suarium, le pain et les céréales au Forum Pistorium, les poissons au Forum Piscarium.

71En bordure du Forum Holitorium, à l’emplacement actuel de la basilique San Nicola in Carcere se trouvaient, dans l’Antiquité, trois temples républicains : celui de Janus, celui de l’Espérance (Spes) et celui de Junon Sospita (la Salvatrice). Il est difficile de les identifier plus précisément avec certitude. Cependant il semblerait que le plus près du théâtre de Marcellus soit celui de Janus, bâti par Caius Duilius. L’édifice central serait identifié comme étant le temple de Junon Sospita, construit entre 197 et 194 av. J.-C. par Caius Cornelius Cethegus. Il y avait sans doute un quatrième temple, dédié à la Pietas, sur le Forum Holitorium. Détruit lors de la construction du théâtre de Marcellus, il n’en reste aujourd’hui aucun vestige.

Forum Holitorium.

Forum Holitorium sur la maquette de Paul Bigot.

Restitution virtuelle du Forum Holitorium.