Lieux de mémoire aurevilliens : le cas du musée de Saint-Sauveur-le-Vicomte
p. 227-234
Résumés
Après la mort de Jules Barbey d’Aurevilly en 1889, le souvenir de l’écrivain se fixe en plusieurs lieux. D’abord ancrée à Paris dans l’appartement de la rue Rousselet, la mémoire aurevillienne fait l’objet à partir des années 1900 d’une progressive « normandisation ». À cet égard, le musée Barbey d’Aurevilly, créé en 1925 à Saint-Sauveur-le-Vicomte, constitue un terrain d’observation intéressant pour appréhender l’évolution de la réception de l’œuvre aurevillienne au cours du XXe siècle.
After Jules Barbey d’Aurevilly’s death in 1889, the writer’s remembrance was anchored in several places. First in Paris in the flat of the rue Rousselet, then from the 1900s, it tended to move gradually to Normandy. In this respect, the Barbey d’Aurevilly’s museum created in 1925 in Saint-Sauveur-le-Vicomte is an interesting observation ground to consider the evolution of the reception of the Aurevillian work in the 20th century.
Texte intégral
1Les colloques, publications, expositions et manifestations culturelles qui ont marqué l’année du bicentenaire de la naissance de Barbey d’Aurevilly témoignent de la place importante qu’occupent aujourd’hui l’œuvre et la personne de cet écrivain dans la recherche érudite et universitaire mais aussi dans l’imaginaire collectif français – ce qui n’a pas toujours été le cas. Ce que l’on pourrait appeler la mémoire aurevillienne a en effet considérablement évolué au cours du XXe siècle, et c’est cette évolution que nous retracerons ici en nous appuyant sur l’histoire du musée Barbey d’Aurevilly de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Par son histoire singulière, riche et mouvementée, ce musée concentre des enjeux qui touchent tant à la mémoire de l’écrivain qu’à la réception de son œuvre depuis la fin du XIXe siècle.
La progressive « normandisation » des lieux de mémoire aurevilliens
2L’histoire singulière du musée Barbey d’Aurevilly s’inscrit dans l’histoire, plus vaste, de celle des lieux de mémoire aurevilliens. Dans les années qui suivent la mort de Barbey en 1889, deux lieux majeurs se distinguent. Il s’agit d’une part de l’appartement parisien de la rue Rousselet, ce « tourne-bride de sous-lieutenant » où l’écrivain a vécu les dernières années de sa vie et que Louise Read1, sa secrétaire et amie, garde intact et fait parfois visiter aux admirateurs de Barbey, et d’autre part de l’appartement voisin de cette même Louise Read, sur le boulevard Saint-Germain. C’est là que l’on vient recueillir les souvenirs de celle que Barbey surnommait « Mademoiselle Ma Gloire », comme le raconte Hermann Quéru2 :
C’est vers la mi-juin 1924 que je rendis visite à Mlle Louise Read, en cet appartement du n° 2, boulevard Saint-Germain, au quatrième, où elle entretenait – et chérissait – une quantité de chats, descendance de ceux qui avaient été les favoris des écrivains ses amis. […] Elle se mit à parler d’abondance, contente de rappeler des souvenirs, ce qui devait lui être toujours agréable ; s’interrompait parfois, au bruit d’une galopade voisine : « C’est un chat. Il veut entrer, mais c’est inutile. » Ou bien la maritorne ouvrait la porte et gourmandait la pauvre demoiselle sur une question ménagère. Ainsi avait été dérangé le récit de la rencontre de Barbey chez Coppée3.
3Jean de Beaulieu, futur animateur des Cahiers aurevilliens, décrit quelques années plus tard l’appartement de Louise Read comme « un foyer où le culte de Barbey d’Aurevilly était pratiqué avec la plus grande ferveur et le plus grand désintéressement »4. Au milieu des chats et des souvenirs de l’écrivain, s’y réunit, jusque vers le milieu des années vingt, un petit cercle d’érudits formé notamment par Beaulieu, Jules Bertaut ou André Thérive qui fonderont en 1934 la Société Barbey d’Aurevilly.
4La mémoire aurevillienne est donc d’abord parisienne. Mais dans les premières décennies du XXe siècle, elle va progressivement se délocaliser dans le Cotentin et se « normandiser » – pour employer un néologisme cher à Barbey. On note plusieurs étapes dans ce transfert géographique. Tout commence en 1909 avec l’installation du buste de Barbey dans sa ville natale de Saint-Sauveur-le-Vicomte. L’inauguration de ce monument commandé à Auguste Rodin par un Comité créé à l’initiative de Georges Lecomte5, alors président de la Société des gens de lettres, donne lieu à une manifestation du souvenir présidée par l’académicien Frédéric Masson6 – les commémorations aurevilliennes se sont en effet, depuis Frédéric Masson en 1909 jusqu’à Yves Pouliquen en 2008, systématiquement effectuées sous le patronage de l’Académie française qui, ce faisant, a montré qu’elle n’avait pas tenu rigueur de ses attaques à l’auteur des Quarante médaillons de l’Académie. L’étape suivante de cette normandisation de la mémoire aurevillienne consiste en l’ouverture, en 1925, d’un musée consacré à Barbey d’Aurevilly dans un bâtiment du château de Saint-Sauveur-le-Vicomte ; l’académicien Henry Bordeaux7 préside aux cérémonies d’inauguration du musée et, dans son discours, célèbre le « Walter Scott normand » qu’est Barbey. Le 23 avril 1926, les cendres de Barbey, qui reposaient jusque-là au cimetière Montparnasse, sont transférées au champ de repos situé sous les tours du château de Saint-Sauveur-le-Vicomte, à côté de la tombe de son frère Léon d’Aurevilly. En août 1937, est posée une plaque commémorative sur la maison natale de Barbey à Saint-Sauveur-le-Vicomte ; Georges Lecomte, qui a entre-temps endossé l’habit vert, représente l’illustre institution lors de cérémonies officielles que Les cahiers aurevilliens décrivent comme « une des grandes manifestations régionalistes organisées à l’occasion de l’Exposition de 1937 » ou encore comme un événement à « caractère purement littéraire et normand » au cours duquel Gaston Rageot8, « orateur merveilleux et improvisateur sans égal », apporte sa pierre à la réappropriation normande de Barbey avec un exposé qui met « particulièrement en lumière le grand rôle joué par l’esprit normand dans la formation de l’esprit français »9. Enfin, en juin 1938, est installé, sur la place Thurin de Valognes, un buste de Barbey par Louis Allix : Valognes, ville dans laquelle l’écrivain venait séjourner dans les dernières décennies de sa vie, marque ainsi sa volonté de participer, au même titre que Saint-Sauveur-le-Vicomte, aux commémorations aurevilliennes.
5Moment majeur de cette « normandisation » de la mémoire aurevillienne, l’ouverture du musée Barbey en 1925 mérite d’être commentée. Si la création de ce musée s’inscrit dans une série de dates qui marquent l’ancrage progressif de la mémoire aurevillienne en terre normande, elle s’explique aussi en partie par des raisons matérielles et pratiques. En effet, au début des années vingt, le propriétaire de l’appartement de la rue Rousselet donne congé à Louise Read qui s’acquittait depuis 1889 du loyer de l’appartement. La voilà contrainte de trouver un lieu susceptible d’accueillir le mobilier, les vêtements, les objets et les livres ayant appartenu à Barbey. Elle se tourne alors vers le maire de Saint-Sauveur-le-Vicomte, Pierre Le Marinel, qui lui avait déjà, quelques années plus tôt et par l’intermédiaire de Léon Gosset10, manifesté le désir de créer dans sa ville un lieu dédié à la mémoire de l’enfant du pays. C’est donc la conjonction de la volonté politique de Le Marinel et de la situation matérielle de Louise Read qui permet la naissance du musée – naissance que l’ancienne secrétaire de Barbey salue par cette exclamation : « Quelle consolation pour moi dans le si grand déchirement de la séparation de tous ces souvenirs ! »11.
6Le musée s’installe alors dans deux pièces situées au cœur d’un bâtiment de la cour basse du château de Saint-Sauveur, château partiellement en ruines qui accueillait à l’époque un hospice et un orphelinat. Il est inauguré en grande pompe à la fin du mois de juin 1925, sous la présidence d’Henry Bordeaux, et en présence de Lucien Descaves12 et de Paul Bourget. Le premier conservateur du musée est Louis Yver qui avait auparavant été au service de Mgr Anger-Billards, chapelain de Notre-Dame de la Délivrance et ami de Barbey à la fin de sa vie. Quand Jules Bertaut13 visite le musée près de dix ans après son inauguration, voici la description qu’il en donne dans Les cahiers aurevilliens :
Deux grandes pièces le constituent aujourd’hui. La première renferme, sous vitrines ou dans des armoires, une collection d’autographes et de portraits. La seconde est la copie exacte de la chambre de la rue Rousselet, le fameux « tournebride de sous-lieutenant » où le grand écrivain acheva ses ultimes années et rendit le dernier soupir. […] Le lit étroit d’acajou, les deux fauteuils de velours rouge en acajou également, les rideaux des fenêtres, la toilette exiguë, tout atteste la banalité de l’ensemble. Mais l’écritoire bien en vue, avec les plumes d’oie trempées, chacune dans une encre différente, sont là pour marquer la présence de l’écrivain. […] Le long de la glace on a encastré tels qu’ils étaient les photographies, cartes de visite, croquis de toute sorte laissés là par le romancier à la veille de sa mort14.
7Le musée est conçu comme ce que l’on appellerait aujourd’hui une « maison d’écrivain », c’est-à-dire un espace qui cherche à reconstituer un lieu de vie et de travail et à rendre palpable, comme l’écrit Bertaut, la « présence de l’écrivain ». Mais cette quiétude aurevillienne va être considérablement troublée par la Seconde Guerre mondiale.
Heurs et malheurs du musée Barbey d’Aurevilly
8En 1943, le château de Saint-Sauveur est réquisitionné par l’occupant pour loger des Géorgiens enrôlés dans l’armée allemande. Le maire de l’époque, Ernest Legrand, fait transférer les collections dans le grenier de l’hospice de Saint-Sauveur et met à l’abri les pièces les plus précieuses dans sa propre maison. Or les bombes qui s’abattent sur la ville le 10 juin 1944 détruisent plusieurs bâtiments publics et une grande partie des bâtiments du château dont seuls les murs du donjon et des tours résistent. Autant dire qu’il ne reste plus grand-chose des collections du musée : le manuscrit de Ce qui ne meurt pas, qui avait été emporté par le maire, brûle dans l’incendie de sa maison ; le mobilier est détruit, et nombre de livres, lettres et menus objets disparaissent. Quelques éléments, protégés par des malles ou des valises, sont cependant récupérés au milieu des décombres par Pierre Leberruyer qui jouera un rôle important dans la reconstitution du musée après la guerre et en deviendra le conservateur. Sont ainsi retrouvés des vêtements, de petits objets et des livres, ainsi que l’écusson qui ornait le fauteuil armorié de Barbey et le portrait, miraculeusement intact, de la mère de Barbey.
9Ces souvenirs sauvés du sinistre vont servir de base aux collections présentées dans le second musée Barbey d’Aurevilly inauguré plus de dix ans après la fin de la guerre, en 1956. Deux pièces d’un bâtiment du vieux château réaménagé après guerre, situées au-dessus de la porte d’entrée de la haute cour, accueillent ces collections, sous l’œil de Roger Marie, conservateur, et de Pierre Leberruyer, conservateur adjoint. Là encore, l’inauguration du musée donne lieu à des manifestations commémoratives qui sont cependant colorées d’une nuance plus grave que celles qui les ont précédées, au sens où elles sont fortement marquées par le souvenir du traumatisme de la guerre et des destructions qu’elle a entraînées – destructions parmi lesquelles on compte celle du buste valognais de Barbey par Allix, fondu en 1941. Le discours prononcé à cette occasion par l’académicien Jacques de Lacretelle, qui préside à l’inauguration, est ainsi teinté d’une gravité nouvelle :
Aujourd’hui, après les dévastations de la guerre, vous tenez à montrer que le souvenir du grand écrivain est encore vivace dans sa ville natale. Vous désirez lui restituer sa place, rassembler ses reliques, prouver qu’une cité qui se redresse et se renouvelle n’est pas, pour autant, oublieuse. Vous affirmez ainsi que la gloire du passé ne doit pas être séparée des promesses de l’avenir et que le culte de la tradition constitue le mortier le plus solide pour édifier des choses neuves15.
10La mémoire de cette « gloire du passé » qu’est Barbey d’Aurevilly est désormais liée à celle du patrimoine normand – patrimoine humain et architectural mais aussi patrimoine économique et naturel qui a souffert des « dévastations de la guerre ».
11La guerre vient donc en quelque sorte parachever la normandisation d’une mémoire aurevillienne qui avait d’abord été construite sur les reliques parisiennes de l’écrivain. Certes, le patrimoine local était déjà présent avant la guerre lors des manifestations commémoratives – comme en témoigne la présence, attestée dans la presse locale à plusieurs reprises, de jeunes gens en costume traditionnel ou celle du poète manchois Louis Beuve16, qui récite son « Ode à Barbey » en patois lors des cérémonies de 1925, 1937 et 1938. Mais après la Seconde Guerre mondiale, la présence du patrimoine normand est considérablement renforcée, comme on peut le noter dans les cérémonies de 1956 qui, après l’allocution de Jacques de Lacretelle, donnent à voir un spectacle du Groupe Folklorique de Valognes et se closent avec une conférence de Jean Frémaux illustrée de diapositives et intitulée « Le Cotentin touristique à travers l’œuvre de Barbey d’Aurevilly ». C’est à cette époque que l’on commence à porter une attention accrue aux « lieux aurevilliens » : l’abbé Toussaint et Pierre Leberruyer publient leurs travaux respectifs sur Carteret et sur Saint-Sauveur17 ; on crée le comité des Pèlerinages aurevilliens, présidé par Hermann Quéru, qui organise en 1957 un pèlerinage à Granville-Avranches, un autre autour de Saint-Sauveur en 1959, puis à Valognes en 1960 et à Carteret en 1961. Aussi Hermann Quéru peut-il noter à cette occasion que « le pays entier n’est-il pas appelé à bénéficier du mouvement qui va se produire autour du nom et du génie de notre grand Normand ? ». La question reste en suspens pour ce qui concerne le « pays entier », mais elle trouve une réponse résolument positive pour ce qui concerne le pays normand. Le terroir manchois trouve en Barbey un guide permettant la valorisation d’un patrimoine dont l’intégrité a été entamée par les tourments de la guerre.
12Si la mémoire aurevillienne, mémoire immatérielle, s’étend à partir des années cinquante au territoire normand tout entier, il importe parallèlement de reconstruire les collections matérielles du musée Barbey d’Aurevilly, et c’est ce à quoi vont s’atteler ses conservateurs successifs. Différentes sources vont permettre d’enrichir les collections :
- le dépôt d’œuvres d’art : le buste en bronze de Barbey par Zacharie Astruc, propriété de l’État autrefois conservée au Louvre, est mis en dépôt au musée en 1959. À ce geste de l’État s’ajoute, en 1963, une somme allouée au titre des dommages de guerre qui permet de faire des aménagements dans le musée, tant au niveau de la présentation des collections que de leur conservation ;
- les dons et les legs, très nombreux, parmi lesquels on compte le manuscrit des Disjecta membra, qui constitue aujourd’hui la pièce maîtresse des collections du musée18 et qui avait été légué par Louise Read au musée. Il finit par intégrer en 1961 les collections, au terme d’une longue bataille juridique. Certains collectionneurs, comme Louis Yver, font don d’objets authentiques (photos de Barbey, pages autographes, lettres, etc.). D’autres lèguent au musée des objets qui, s’ils n’ont pas nécessairement appartenu à Barbey, matérialisent certains aspects de sa vie et de son œuvre et viennent pallier les manques dus aux destructions de la guerre : c’est par exemple le cas de la cloche en bronze provenant du château du Quesnoy, cadre du roman Un prêtre marié, de la limousine semblable à celle que portait l’écrivain, ou encore du buste de femme qui rappelle le fameux « buste jaune » disparu ;
- les achats, enfin, réalisés en partie ces dernières années grâce au soutien financier de la Société des Amis de Barbey d’Aurevilly : c’est ainsi qu’ont été acquis en 1963 le lot de soixante-seize lettres de Barbey à Hector de Saint-Maur – le commandant Lotte étant alors conservateur du musée –, ou en 1966, la copie du portrait de Barbey par Émile Lévy qui est aujourd’hui conservé au musée de Versailles. Joël Dupont, conservateur du musée de 1969 à 2001, acquiert pour le compte du musée des portraits de Barbey dont un très beau dessin à la plume de François Coppée, souvent reproduit ; il acquiert également la réduction de la statue en bronze du Marchand de masques par Astruc ainsi que divers manuscrits autographes parmi lesquels on compte celui de la préface de la seconde édition d’Une vieille maîtresse, écrit à l’encre brune, verte et violette, et remarquablement conservé.
13Les collections, enrichies, déménagent une dernière fois en 1989, au moment des célébrations du centenaire de la mort de Barbey. Ces manifestations donnent un nouvel élan à la mémoire aurevillienne qui, déjà considérablement renforcée par les travaux universitaires de Jacques Petit et de ses nombreux collaborateurs, s’exporte ainsi hors des frontières normandes. À cette occasion, la Société des Amis de Barbey renaît de ses cendres – elle prend ainsi la relève du Comité aurevillien de la Manche qui avait été formé en 1978 ; une grande exposition est organisée à la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris (c’est pour cette exposition qu’est confectionné le mannequin en cire de Barbey que l’on pouvait, jusqu’à il y a quelques mois, voir au musée) ; et le musée s’installe au premier étage de la maison familiale de l’écrivain à Saint-Sauveur-le-Vicomte – maison acquise par la mairie de Saint-Sauveur à la fin des années quatre-vingt. Désormais doté de trois salles, le musée continue d’agrandir ses collections. On note par exemple l’achat, à la fin des années quatre-vingt-dix, du fonds Read-Gosset. Ce fonds contient quantité de lettres adressées à Barbey par ses proches ou par des inconnus, ainsi que la correspondance et les carnets de notes de Louise Read. Ces documents constituent une riche source d’information pour qui s’intéresse à la petite histoire comme à la grande : les multiples lettres d’admirateurs, par exemple, qui n’ont pas encore fait l’objet d’études, fourniraient sans doute de précieux renseignements sur la réception de l’œuvre aurevillienne du vivant de Barbey.
14Ces collections recomposées ont fait en 2008 l’objet d’un classement, d’un reconditionnement et d’une numérisation partielle orchestrée par les Archives départementales de la Manche. À cette occasion, le musée Barbey d’Aurevilly, jusqu’alors cantonné au premier étage de la maison familiale de l’écrivain, s’est agrandi au rez-de-chaussée et a fait peau neuve. Ce réaménagement s’est cependant attaché à tenir compte de la vocation première du musée créé pour accueillir la chambre parisienne de Barbey, et à tirer parti de la singularité de la collection dont les atouts principaux sont les éléments textiles, la multitude de portraits de Barbey (qu’il s’agisse de portraits peints, de photographies, de caricatures ou de sculptures) et enfin la belle collection d’ouvrages illustrés que possède le musée. C’est sur ces deux bases – la vocation première du musée et la singularité de ses collections – que le parcours d’exposition a été repensé pour offrir un lieu apte à recueillir une mémoire qui s’est nourrie des aléas de l’histoire et qui, tout en s’étant développée avec les aspirations régionalistes normandes de la première moitié du XXe siècle, a su progressivement s’ouvrir aux « horsains ».
Notes de bas de page
1 Sur Louise Read, voir P. Leberruyer, « Louise Read », in Barbey d'Aurevilly 3, Les obsessions du romancier : l'amour, la révolte, la mort, J. Petit (dir.), Paris, Lettres Modernes Minard (La Revue des lettres modernes), 1968, p. 121-130.
2 Hermann Quéru (1889-1978), érudit normand, a notamment publié Le Dernier Grand Seigneur : Jules Barbey d’Aurevilly, Paris, Éditions de Flore, 1946.
3 H. Quéru, « Visite à mademoiselle Read », in Barbey d'Aurevilly 3, p. 135-136.
4 J. de Beaulieu, « Historique de la Société Barbey d’Aurevilly », Les cahiers aurevilliens. Bulletin de la Société Barbey d’Aurevilly, n° 1, mai 1935, p. 71.
5 Georges Lecomte (1867-1958), romancier et auteur dramatique, président de la Société des gens de lettres en 1908, est élu à l’Académie française en 1924 au fauteuil de Frédéric Masson, autre admirateur de Barbey.
6 Frédéric Masson (1847-1923), historien de la période napoléonienne, est élu à l’Académie française en 1903. Dans les années 1880, il dirige la Revue des Lettres et des Arts où Barbey publie en 1886 le poème intitulé « La haine du soleil ». Il est ainsi fait plusieurs fois mention de Frédéric Masson dans la correspondance de Barbey au cours des années 1886 et 1887.
7 Henry Bordeaux (1870-1963), avocat et romancier, est élu à l’Académie française en 1919. Il a publié sur Barbey plusieurs articles (« La dernière amitié de Barbey d’Aurevilly », Revue universelle, 15 août 1925 ; « Barbey d’Aurevilly est revenu chez lui », Revue de Paris, 1er juillet 1925) ainsi qu’un ouvrage (Barbey d’Aurevilly, le Walter Scott normand, Paris, Plon, 1925).
8 Gaston Rageot (1871-1942), un temps président de la Société des gens de lettres, s’est attaché dans plusieurs articles à célébrer « l’esprit normand » dont Barbey était, à ses yeux, un bel exemple.
9 « La fête en l’honneur de Barbey d’Aurevilly à Saint-Sauveur-le-Vicomte le dimanche 1er août 1937 », Les cahiers aurevilliens. Bulletin de la Société Barbey d’Aurevilly, n° 6, décembre 1937, p. 45-49.
10 Léon Gosset était l’exécuteur testamentaire de Louise Read ; il a par la suite préfacé plusieurs rééditions d’ouvrages de Barbey.
11 Lettre de Louise Read à Pierre Le Marinel datée de 1921 ; cette lettre a été recopiée de la main de Louise Read dans un carnet conservé au musée Barbey d’Aurevilly.
12 Lucien Descaves (1861-1949), journaliste et homme de lettres, fait partie des membres fondateurs de l’académie Goncourt. Il a notamment écrit une préface à l’édition de la première série du Théâtre contemporain de Barbey (Paris, Stock, 1908).
13 Jules Bertaut (1877-1959), critique littéraire et dramatique, a publié de nombreux ouvrages sur la période romantique. Il est l’un des membres fondateurs de la Société Barbey d’Aurevilly.
14 J. Bertaut, « Une visite au musée Barbey d’Aurevilly », Les cahiers aurevilliens. Bulletin de la Société Barbey d’Aurevilly, n° 1, mai 1935, p. 17-18.
15 J. de Lacretelle, Inauguration du nouveau musée Barbey d’Aurevilly à Saint-Sauveur-le-Vicomte, discours prononcé le 22 avril 1956, Paris, Firmin-Didot, 1956.
16 Le poète Louis Beuve (1869-1949) est originaire de la région de Lessay. S’il n’a pas connu Barbey d’Aurevilly, il lui rend hommage dans un poème en patois cotentinais intitulé « Maîte Tainnebouy, de Raôville-la-Pièche, à moussieu Jeules Barbey d’Aurevilly ». Voir ses Poésies et chansons normandes (Saint-Lô, Imprimerie Jacqueline, 1902), ses Œuvres choisies précédées d’une présentation par J. de Saint-Jorre et F. Lenchanteur (Saint-Lô, Imprimerie Jacqueline, 1950) et ses Lettres à des amis aurevilliens, choisies, présentées et annotées par P. Leberruyer, J. Mauvoisin et O. Beuve (Saint-Lô, Les Cahiers culturels de la Manche, s. d.) ; voir également, à son sujet, J.-L. Vaneille, Les Patoisants bas-normands, Saint-Lô, Éditions Scripta, 1957.
17 J. Toussaint, Carteret dans la vie et l’œuvre de Jules Barbey d’Aurevilly, Coutances, Éditions Notre-Dame, 1956 ; P. Leberruyer, Au pays de Jules Barbey d’Aurevilly, Coutances, Imprimerie Bellée, 1960 (préface de H. Bordeaux).
18 Entièrement numérisé, ce manuscrit est aujourd’hui consultable, dans son intégralité, sur une borne numérique présentée au musée Barbey d’Aurevilly.
Auteur
Bibliothèque nationale de France
Mélanie Leroy-Terquem, agrégée de lettres modernes, a consacré sa thèse de doctorat aux petits romantiques français. Elle a assuré, en 2008, le commissariat de l’exposition « Barbey d’Aurevilly contre son temps » présentée au musée de Saint-Sauveur-le-Vicomte puis aux Archives départementales de la Manche. Elle est aujourd’hui chargée de mission à la Bibliothèque nationale de France.
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