Jean et Joseph Soupre, architectes entre Bayonne et Paris : naissance d’une dynastie encore à l’œuvre
Jean and Joseph Soupre, architects between Bayonne and Paris: birth of a dynasty still at work
p. 161-182
Résumés
L’étude de la dynastie Soupre – à travers l’exploitation d’entretiens et d’archives privées notamment – met en lumière les enjeux de la transmission filiale, au sein d’une famille d’architectes. Cette communication retrace, à l’image d’une chronique, le développement des trois générations d’architectes Soupre, depuis les jumeaux qui en sont à l’origine – Jean (1894-1961) et Joseph (1894-1960) à Bayonne et à Paris –, en passant par les fils Jean-Marie (1928-1976) et François (né en 1931), jusqu’au petit-fils Olivier (né en 1964), encore en activité près de Bayonne. Issus d’un héritage commun forgé par les patrimoines familiaux – tant immatériels que matériels – qui fondent le socle de l’histoire de cette dynastie, les différents architectes de la famille Soupre se construisent et s’expriment, entre continuité et ruptures.
The study of the Soupre dynasty – through the use of interviews and more specially through the use of private archives – brings out the filial passing on stakes among a family of architects. This article relates, like a chronic, the development of the three generations of Soupre architects since the twin creators Jean (1894-1961) and Joseph (1894-1960) in Bayonne and Paris, followed by their sons Jean-Marie (1928-1976) and François (born in 1931), until their grandson Olivier (born in 1964), who still works near Bayonne. Issued from a common heritage, thanks to a family material and immaterial patrimonies, which make this dynasty historical base, the Soupre family different architects develop and express themselves between permanence and ruptures.
Entrées d’index
Mots-clés : filiation, transmission, héritage, Bayonne, Soupre (famille)
Keywords : filiation, transmission, heritage, Bayonne, Soupre (family)
Texte intégral
1À l’origine de la dynastie d’architectes des Soupre, deux frères aux personnalités complémentaires fondent une agence répartie en deux cabinets aux situations géographiques stratégiques – à Bayonne et à Paris – et partagent une signature commune : J. & J. Soupre. Près de 100 ans plus tard, la troisième génération d’architectes Soupre est encore à l’œuvre près de Bayonne. À la tête de l’agence actuelle, Olivier Soupre (né en 1964) (Fig. 1 et 2) se sent aujourd’hui le « garant d’une institution1 » rattachée au nom Soupre. Riche d’un patrimoine familial matériel et immatériel ainsi que d’une certaine notoriété locale, la dynastie d’architectes a su transformer sa pratique et perdurer au Pays basque au fil des années.
Fig. 1 : Arbre généalogique de la dynastie d’architectes Soupre

Généalogie incomplète. Réalisation de l’auteur. Sources mobilisées, entretiens avec François Soupre, Olivier Soupre et Jean-Pierre Louchet, État civil des Archives municipales de Paris, Bayonne et Mauléon.
Fig. 2 : Les architectes de la famille Soupre, contextualisation, vies et carrières

Schéma synthétique superposant les vies/carrières des architectes Jean, Joseph, Jean-Marie, François et Olivier Soupre. Réalisation de l’auteur. Sources mobilisées, entretiens, archives personnelles de la famille Soupre, archives institutionnelles (État civil, etc.).
2Mais quelles sont les conséquences d’un tel héritage sur les créateurs et leur création ? La parenté conditionne-t-elle le développement et l’expression créatrice des différents artistes d’une même famille ?
[…] Il n’y a pas de transmission possible si l’on oublie d’où l’on vient et ce que l’on a soi-même fait de son héritage2.
3L’architecture, le « premier des arts », se lit à la croisée de la discipline artistique et de l’ingénierie. Par son statut singulier, l’architecte se définit aussi comme un créateur. L’histoire de l’art, en s’intéressant à la fois aux œuvres et à leurs auteurs, a su nourrir ses questionnements en allant plus loin dans l’étude du processus de création et l’analyse de la filiation esthétique. L’ambition est alors de comprendre, à travers l’étude du créateur à l’origine de la production, les mécanismes à l’œuvre – continuité, rupture ou hybridation – responsables de ses choix artistiques. Interroger ces procédés, au prisme de la dynastie, c’est se poser la question de la transmission – intrinsèque à la famille –, et explorer son importance et ses conséquences au regard du créateur et de la création. La notion de transmission est indissociable de la notion de temps. Transmettre, c’est faire passer, léguer, faire perdurer. Comme l’a exposé Alain Sarfati dans son discours à l’Académie d’architecture, Transmission – Rupture – Architecture, « la notion de transmission est belle, puisqu’il s’agit de passer le témoin, d’améliorer, de prolonger, d’enseigner3… ». Souvent théorisée sous l’angle de l’appartenance à une école de pensée, analysant les conséquences de l’enseignement entre le maître et son élève, la notion de transmission filiale interpelle ici l’héritage familial. La formation de l’architecte, bien qu’essentielle dans l’étude du processus créatif, n’est pas le seul révélateur d’un lien de filiation. Les legs familiaux – matériels et immatériels : intellectuels, affectifs, idéologiques… – forgent un héritage qui s’exprime dans la création et à travers la démarche de son créateur.
4Pour mesurer le poids de ces héritages, pour en apprécier l’incidence sur le développement de la pratique des différents architectes de la famille Soupre, nous proposons de mettre en perspective l’étude d’entretiens menés avec les protagonistes encore présents – notamment à travers des récits de vie –, au vu des traces de la création – documents d’archives, publications, édifices in situ.
De l’agence J. & J. Soupre Architectes à l’institution
5Jean (1894-1961) et Joseph Soupre (1894-1960), frères jumeaux nés le 27 mars 1894 à Bayonne dans les Pyrénées-Atlantiques, sont les fils cadets d’un pharmacien bayonnais4. Les frères se forment aux disciplines artistiques qu’ils pratiquent à l’École de dessin et de peinture de Bayonne, dans l’atelier de l’artiste Eugène Pascau (1875-1944)5, élève de l’artiste bayonnais Léon Bonnat (1833-1922). En 1913, lauréats de l’École des beaux-arts de Paris, les jumeaux embrassent ensemble des études en section architecture. Soutenus financièrement dans leur enseignement, ils sont tous deux subventionnés en 1914 et 1919 par leur ville natale6. Si les frères s’émancipent de l’influence de la profession paternelle, leur parcours montre qu’ils étaient soutenus dans leur choix de carrière : d’une part par leur famille, qui leur assure un enseignement à l’école de dessin et de peinture, d’autre part par la commune de Bayonne, qui leur alloue une bourse pour mener leurs études à l’École des beaux-arts de Paris.
6Entre 1912 et 1913, les jumeaux entament leur cursus dans l’atelier préparatoire d’Eugène Chifflot (1872-1956)7. Interrompus dans leur parcours par la Grande Guerre et leur mobilisation au cours de ce conflit, ils se séparent et suspendent leurs études. Au sortir de la guerre, ils reprennent leur formation dans l’atelier de Pierre André (1860-1930)8. À l’issue de leurs études, leurs diplômes d’architectes du gouvernement obtenus – le 7 juin 19229 pour Jean et le 27 février 192310 pour Joseph – les jumeaux s’associent et créent l’agence d’architecture J. & J. Soupre Architectes, qu’ils divisent en deux cabinets. L’un, situé à Bayonne, est tenu par Jean, l’autre, installé à Paris, est dirigé par Joseph.
7La Seconde Guerre mondiale perturbe le fonctionnement de l’agence. Progressivement, les bouleversements qui ont jalonné la vie des deux architectes vont les orienter vers des chemins différents. Après une carrière de collaboration, les frères se séparent discrètement à l’aube de leur disparition11. Joseph s’éteint le 2 janvier 1960. Peu de temps après, Jean s’éteint à son tour, le 6 novembre 1961, quelques mois après l’incendie de l’immeuble des bureaux bayonnais12, dans lequel une grande partie des archives de l’agence J. & J. Soupre Architectes disparaît.
8Pour qualifier l’œuvre de leur agence J. & J. Soupre Architectes et comprendre l’impact de cet héritage sur le développement des générations suivantes de la dynastie, il convient de l’inscrire dans son contexte. Pour ce faire, il est nécessaire d’avoir un recul temporel suffisant pour appréhender l’ensemble des composantes de ce contexte et pouvoir apprécier la place occupée par Jean et Joseph Soupre au regard de l’histoire architecturale du xxe siècle. L’étude de l’œuvre signée « J. & J. Soupre13 » nous permet dès lors d’établir le profil de leur carrière et d’approfondir les traits et les influences de ces deux créateurs.
9Jean, « l’homme d’affaires14 », et Joseph, le « pondeur de projets15 », se complètent, tant dans leur vie privée que dans leur activité16. La double implantation de l’agence, couplée à ce double regard, a probablement permis à l’agence J. & J. Soupre Architectes de rayonner à l’échelle nationale17 et de se positionner plus aisément, tant sur des projets en province18 que sur des concours d’envergure19. La carrière de Jean et Joseph Soupre – qui s’étend des années 1920 aux années 1960 – est marquée par plusieurs ruptures importantes dans l’histoire de l’architecture. Après les bouleversements stylistiques de la fin du xixe siècle, les frères se forment à la croisée des courants de pensées qui caractérisent le début du xxe siècle. Lorsqu’ils créent leur cabinet d’architecture au début des années 1920, ils bénéficient de leur implantation au Pays basque et de la « percée significative d’une commande privée de luxe éclairée20 » qui marque cette période post-conflit. Ces années prolifiques s’accompagnent d’une liberté d’expérimentation architecturale due au statut particulier de la ville de Bayonne, dont la place forte déclassée en 1907 permet un essor salvateur de l’urbanisation21. Entre régionalisme et modernisme, les frères se forgent un lexique empreint d’influences académiques acquises lors de leur formation, d’aspirations locales – inspirées de l’architecture traditionnelle euskarienne22 notamment – et d’impulsions internationales des courants de pensée architecturaux de leur temps23.
L’œuvre que MM. J. et J. cit. “SOUPRÉ” ont réalisée jusqu’ici doit être considérée comme une des meilleures productions de la jeune école bayonnaise, car ces excellents et scrupuleux artistes unissent à l’amour de leur petite patrie et à la connaissance approfondie de son architecture traditionnelle la solide formation que donne l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts et la curiosité avisée des récents progrès réalisés par la science de la construction24.
10Très attachés à leur territoire et à leur ville natale, les frères Soupre cosignent dès 1921 – en collaboration avec les sculpteurs Dieupart et Soleau – le projet sous la devise « ? 25 », présenté pour le concours d’édification du monument aux morts de la ville de Bayonne. Les jeunes Bayonnais obtiennent finalement le deuxième prix, derrière le projet lauréat proposé par les architectes Charles Nicod (1878-1967), Émile Molinié, Albert Pouthier et le sculpteur Lucien Brasseur. Dans les années 1920-1930, Jean et Joseph participent également, avec leurs contemporains, à enrichir et à formaliser le langage néo-régionaliste au Pays basque. Les frères jumeaux publient ensemble deux recueils consacrés à l’architecture régionale du Pays basque26. Ces ouvrages illustrent les traits hérités des architectures traditionnelles des sept provinces du Pays basque et nourrissent le langage architectural des édifices néo-basques alors signés « J. & J. Soupre ». Architectes de leur temps, les jumeaux s’inscrivent « dans la tradition locale en adaptant aux exigences du confort moderne les particularités de la maison basque populaire qu’ils ont longuement étudiée dans les provinces espagnoles aussi bien que françaises de la vieille terre euskarienne ; et ce sont les belles villas toutes proches de l’art rural labourdin ou navarrais qu’ils ont construites à Bayonne, à Biarritz, à Anglet, à Cambo27 ». Ils intègrent ainsi le registre des architectes néo-basques et participent à la reconnaissance du langage régionaliste au Pays basque à travers la diffusion de leur œuvre dans diverses manifestations et publications de l’époque. La villa Arri Gorri (Fig. 3), édifiée en 1926 à Bayonne, exemple manifeste de l’architecture néo-basque signée « J. & J. Soupre », est plusieurs fois citée28. Entre régionalisme et modernisme, les frères Soupre« ont su résolument adapter au climat du Sud-Ouest les formes simples et les masses rectangulaires que les expositions récentes ont mises à la mode et que les techniques nouvelles ont rendues possibles29 », notamment dans l’architecture d’édifices publics. Leur polyvalence leur permet de présenter, parallèlement aux villas néo-basques, des édifices modernes comme le Canot Club de la Société nautique (1929 à Bayonne) aux lignes simples et à l’esthétique sobre, le groupe scolaire Jules-Ferry30 (1930 à Bayonne) ou encore l’imposant Hôtel des PTT31 (1930 à Bayonne) (Fig. 4), aux lignes Art déco.
Fig. 3 : Villa Arri Gorri (Bayonne)

Fonds personnel de la famille Soupre.
Fig. 4 : Hôtel des PTT (Bayonne)

Fonds personnel de la famille Soupre.
11Les bouleversements politiques, économiques et sociaux entraînés par la Seconde Guerre mondiale impactent la construction sans épargner la carrière des frères Soupre. Dès la fin de la guerre, Jean et Joseph travaillent pour le ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme, aux plans d’aménagement de plusieurs villes françaises32. Pour s’adapter à la baisse dans la construction, l’agence J. & J. Soupre Architectes réinterprète les codes de l’architecture régionaliste tels qu’ils étaient pratiqués jusqu’alors, les délaissant progressivement pour un langage plus moderne, rationnel et fonctionnel. Au début des années 1950, elle se positionne sur de nombreux projets de groupes de HLM et d’équipements associés. L’agence travaille, par exemple, sur le quartier de la Citadelle à Bayonne, au projet de construction proposé par l’Office public de HLM de 246 logements et cinq boutiques, en collaboration avec André Remondet, Marcel Cazalis, Henri Duverdier, André Etchepare, Maurice Haulon, André Pavlovsky et Charles Nicod – contre qui elle était quelques décennies plus tôt en concurrence sur le concours du monument aux morts de Bayonne. Ces grands projets, en collaboration avec de nombreux architectes à la fois locaux et de la capitale, rythment la fin de la carrière des jumeaux Soupre.
12Jean et Joseph font de leur signature, « J. & J. Soupre », une marque qui a su laisser son empreinte dans le paysage architectural et artistique local du milieu du xxe siècle. La double implantation géographique de leur agence, combinée aux deux personnalités des frères, leur a permis de s’inscrire dans différents langages architecturaux et de diffuser leur savoir-faire dans les salons et les revues de l’époque. Si leurs archives ont été largement détruites au cours de l’incendie des combles de leurs bureaux, Jean et Joseph laissent derrière eux un œuvre bâti important, riche de projets multiples aux programmations diversifiées. Les édifices estampillés « J. & J. Soupre », encore largement visibles aujourd’hui, ont souvent subi des modifications au fil des années. Toutefois, ils ont en grande partie été préservés et adaptés aux attentes contemporaines, et ont su conserver leur place dans les villes du Pays basque aujourd’hui. Par ailleurs, ces dernières décennies ont marqué l’histoire de l’architecture, notamment dans le travail de reconnaissance et de prise en considération du patrimoine que composent les architectures du xxe siècle. L’émergence du label « Patrimoine du xxe siècle », puis son évolution, en 2017, en label « Architecture contemporaine remarquable » ont mis en lumière les architectures et les architectes ayant marqué le développement des villes au xxe siècle. En 2015, l’Hôtel des PTT de Bayonne, édifié par Godefroy et Soupre en 1930, recevait le label « Patrimoine du xxe siècle » et participait à la reconnaissance de l’œuvre bayonnaise des architectes Jean et Joseph Soupre.
13Les jumeaux laissent également derrière eux une œuvre théorique, leurs recueils illustrés sur l’architecture traditionnelle au Pays basque, ainsi que des publications sur leurs édifices et leur profond attachement à l’identité culturelle qui marque leur territoire natal. Par ailleurs, la diffusion de leur architecture, notamment à travers leurs édifices néo-régionalistes, ne se limite pas aux revues spécialisées de l’époque. Aujourd’hui encore, la villa Arri Gorri est reconnue comme « l’une des réalisations significatives des frères Jean et Joseph Soupre33 » au regard des belles demeures des années 1930 au Pays basque. À cette reconnaissance esthétique s’ajoute la considération de l’œuvre « J. & J. Soupre » à l’aune de l’histoire de l’architecture régionaliste. Dans son ouvrage L’Architecture régionaliste. France 1890-1950, le théoricien de l’architecture régionaliste française, Jean-Claude Vigato, cite brièvement le travail des jumeaux Soupre, à la croisée entre architectes « basques » et modernes34.
14Enfin, l’agence J. & J. Soupre Architectes, c’est également une équipe, une posture, des valeurs, un savoir-faire, une « institution ». Au cours de leur carrière, Jean et Joseph forgent des partenariats avec des collaborateurs, des entreprises, des architectes associés ou encore des commanditaires réguliers. Ils fondent un réseau, une clientèle, une signature. Ils s’investissent également pour la profession au sein de l’Ordre des architectes. La signature « J. & J. Soupre » revêt alors une image, la garantie d’une qualité, d’une posture, d’un savoir-faire. Cette notoriété – aussi localisée et modeste qu’elle soit – fait du nom « Soupre » une référence rattachée, notamment, au territoire du Pays basque.
15L’institution Soupre se manifeste à travers l’ensemble de ces héritages, physiques, idéologiques et intellectuels. Étendue de l’œuvre bâtie, reconnaissance architecturale et patrimoniale de la signature « J. & J. Soupre », postures, structures, partenariats et notoriété à l’origine d’un ancrage local fort de « l’institution » Soupre sont autant d’héritages légués par les deux frères. Une deuxième génération d’architectes Soupre se forme alors. Mais comment réussir à se construire en tant qu’architecte dans une famille de créateurs qui a déjà donné au nom « Soupre » une place dans le paysage architectural local ? Au regard de ces héritages multiples, dus à la filiation, comment se positionner au sein d’une dynastie d’architectes ? Comment réussir à trouver sa place dans une « institution » déjà formalisée, dont les valeurs et les codes semblent établis et inscrits ?
Entre continuité et rupture
16Les héritages transmis par Jean et Joseph à leurs descendants sont à la fois nombreux et imbriqués. D’ordre matériel et intellectuel, ces héritages sont également idéologiques et affectifs. À ce titre, ils ont certainement conditionné le développement et l’orientation des héritiers de la famille Soupre et influé sur la genèse de la dynastie d’architectes.
17En effet, Joseph, père de six enfants, a initié très tôt ses fils aux pratiques artistiques. Incités à dessiner tous les dimanches après l’office religieux35, les cadets de la fratrie, Jean-Marie (1928-1976) et François (né en 1931), se forment jeunes aux côtés de leur père à la pratique du dessin. Ils grandissent et s’épanouissent dans ce milieu créatif, et sont amenés à suivre leur père dans ses pratiques artistiques, tant à l’agence d’architecture parisienne qu’au cours de ses sorties souvent immortalisées d’une aquarelle ou de quelques croquis. Tout au long de leur vie, Jean et Joseph Soupre ont dessiné36, et ils ont transmis à leurs proches la sensibilité artistique et le goût pour la pratique.
18Éveillés aux disciplines artistiques et à la profession d’architecte par leur père, Jean-Marie et François héritent également d’une importante richesse, l’attachement affectif et esthétique à deux territoires éloignés, Paris et Bayonne. Natifs de Paris, les créateurs en devenir se construisent dans un environnement privilégié, où la culture foisonnante diffuse les grands courants de pensée qui marquent leur temps. Toutefois, grâce à la double implantation de l’agence J. & J. Soupre Architectes et aux nombreux déplacements vers Bayonne effectués par Joseph et sa famille au cours de la carrière de celui-ci, Jean-Marie et François développent probablement une sensibilité et un attachement particulier pour ce territoire de province, certainement à l’origine de la continuité de l’ancrage local associé au nom Soupre.
19Toutefois, se construire en tant que créateur, et plus spécifiquement en tant qu’architecte, lorsque l’on est issu d’une famille qui a déjà donné un statut au nom Soupre dans la profession n’est pas chose aisée. Si nous pouvons imaginer que les vocations de Jean-Marie et de François aient été induites par leur éducation et par les goûts et idéologies transmis par leur père, aujourd’hui, rien dans notre étude ne nous permet de l’affirmer – par ailleurs, le fils aîné de Joseph n’a pas suivi les traces de son père, tournant le dos à cet héritage et à la profession d’architecte. Avant d’entamer leurs études à l’École des beaux-arts de Paris, Jean-Marie et François se sont respectivement formés à l’École spéciale d’architecture37 et à l’École Camondo. À la recherche de leur propre identité créatrice, les frères ne se lancent pas aussi rapidement que leurs prédécesseurs dans l’étude de l’architecture. Ils entrent en section architecture à l’École des beaux-arts de Paris – respectivement en 1948 pour Jean-Marie38 et en 1952 pour François39 – et travaillent aux côtés de leur père en parallèle de leurs études40. La deuxième génération d’architectes Soupre est en cours de formation, la dynastie est née.
20Entrés tous deux en classe préparatoire dans l’atelier de Charles Nicod, Jean-Marie et François se forment sous la tutelle d’un ancien concurrent puis collaborateur de Jean et Joseph. Fils et neveux d’architectes en exercice, ils fréquentent inévitablement les ateliers d’architectes évoluant sur le même marché que leurs père et oncle. Si nos recherches ne nous permettent pas de catégoriser formellement les liens qui unissaient alors Jean et Joseph Soupre à Charles Nicod, nous pouvons penser que cette relation de travail aurait pu avoir des incidences entre le chef d’atelier et ses élèves Jean-Marie et François. Ces derniers rejoignent ensuite l’atelier de Georges-Henri Pingusson (1894-1978), architecte « moderniste », qui a notamment participé à l’élaboration du pavillon de l’UAM41, présenté lors de l’Exposition internationale des arts et techniques de Paris en 1937, alors que l’agence Soupre collaborait au projet du pavillon de la Belgique.
21Au cours de leur formation, Jean-Marie et François doivent faire face à la disparition de leur père et reprendre les rênes de l’agence parisienne alors qu’ils ne sont pas encore diplômés42. Un an plus tard, la disparition de Jean leur impose de choisir une orientation pour leur future carrière. En rachetant l’agence bayonnaise, les frères s’engagent à perpétuer, dans la lignée d’architectes de la famille, le nom et les valeurs rattachées à cette « institution » alors bâtie par leur père et leur oncle, et entérinent ainsi la dynastie Soupre. En parallèle de leurs études, ils gèrent le cabinet parisien et confient quelque temps le cabinet bayonnais au chef d’agence sur place43. Une fois diplômés – le 12 novembre 1964 pour Jean-Marie44 et le 7 janvier 1969 pour François45 –, ils divisent à leur tour la gestion des cabinets. Jean-Marie reste à Paris dans l’atelier anciennement dirigé par son père, et François prend la relève de son oncle à Bayonne. À l’instar de Jean et Joseph, ils travaillent ensemble et cosignent leurs projets « J.-M. & F. Soupre Architectes » (Fig. 5). Les legs familiaux, lourds de conséquences, ont certainement conditionné la pratique de cette nouvelle génération. Entre sentiments de fierté et d’entrave, l’héritage Soupre se pare tantôt de l’image d’un étendard vecteur de tremplin, tantôt de celle d’un carcan oppresseur bridant créativité et identité propre. Mais comment s’exprime le poids de l’héritage dans la pratique de cette nouvelle génération ?
Fig. 5 : Signature « J.M. & F. SOUPRE »

Cartouche d’un projet extrait des rouleaux de calques conservés dans les archives personnelles de la famille Soupre. Cliché Tiphaine Tauziat.
22Entre valeurs et posture familiales, influences et ouvertures dues à leur formation académique, courants de pensée et inspirations marquant leur époque, Jean-Marie et François composent pour perpétuer la structure Soupre, adapter le langage architectural qui lui est associé et affirmer leur identité de créateurs. Après la poursuite du travail entrepris par leurs prédécesseurs, ils développent leur propre vision de l’agence Soupre. Formés à partir d’un même héritage, les frères se distinguent à la fois de la génération précédente, mais également l’un de l’autre. Individualités aux personnalités, à la formation, à l’ancienneté et aux expériences différentes, Jean-Marie et François semblent adopter, à leur tour, des postures complémentaires au sein de l’agence. « Comme Jean et Joseph, il y avait une certaine complémentarité entre François, le créateur, et Jean-Marie, le gestionnaire46. » Rapidement, leurs orientations de carrière respectives évoluent. Jean-Marie spécialise le cabinet parisien en gérance immobilière47 en se détachant progressivement de François, qui poursuit la création architecturale depuis Bayonne.
23Si le poids de l’héritage familial a pu être une barrière dans l’épanouissement de Jean-Marie en tant qu’architecte bâtisseur, il semble avoir conforté François dans le développement de son activité. En effet, l’étude comparée de listes de références des frères Jean et Joseph (datée de 1958) et de François (datée de 1987)48 met en avant la récurrence de certains projets d’envergure ou significatifs de la première génération Soupre, tels que d’importants groupes de HLM, comme la Citadelle ou le groupe scolaire Jules-Ferry (surélévation 1965). La récurrence de ces références, dont l’élaboration et la réalisation se sont parfois étendues sur deux générations, est révélatrice d’une continuité assumée. De fait, la mise en perspective des listes de références démontre qu’environ 9 % des projets qui y sont présentés sont revendiqués successivement par les deux générations. Ces réalisations, essentiellement estampillées « J. & J. Soupre » et élaborées en collaboration avec d’autres architectes, soulèvent la question de la paternité au regard des différentes mains qui ont œuvré au processus de création et révèlent la volonté de François de valoriser, dans son parcours professionnel, ces projets entrepris par l’ancienne agence et achevés par la nouvelle.
24Si une certaine continuité de l’agence Soupre fut assurée par ces projets, dont l’ampleur et la temporalité ont permis aux différentes générations d’intervenir, nous pouvons également observer, dans les édifices valorisés par François, différents indices révélateurs d’une rupture avec « l’institution » Soupre érigée par Jean et Joseph. Dans ses références, François présente de nombreuses réalisations aux lignes modernes, telles que la piscine de la ZUP de Bayonne49 (vers 1971 à Bayonne) ou l’immeuble de logements de grand standing Iriondo (vers 1973 à Bayonne), à l’écriture rationnelle et fonctionnelle (Fig. 6). Son fils Olivier témoigne aujourd’hui de cet héritage que François a su manifester dans son travail. Il souligne les qualités de dessin de ce dernier – probablement acquises par la pratique répétée encouragée par son père Joseph depuis son jeune âge – et mêlées à ses qualités de concepteur développées auprès de Pingusson50.
Fig. 6 : Immeuble Iriondo, Bayonne

Classeur de références. Fonds personnel de la famille Soupre.
François dessinait extrêmement bien. Mais ses qualités de dessin étaient à la fois un atout et un handicap. Car son crayon partait directement, ses dessins étaient beaux, et son expérience dans l’atelier de Pingusson générait des projets rapidement fonctionnels, mais négligeant l’image et le dessin des façades. La force de François, c’étaient les armes qu’il s’était faites aux côtés de Pingusson51.
25Enfin, l’observation des listes de références révèle qu’au cours de sa carrière, François s’est peu à peu détaché de la commune de Bayonne, avec laquelle travaillaient particulièrement Jean et Joseph. En effet, près de la moitié des références présentées dans le curriculum vitae de Jean et de Joseph en 1958 sont localisées à Bayonne. Deux décennies plus tard, la liste de références de François ne présente plus qu’un tiers de projets bayonnais. Si elle reste active localement et construit dans diverses communes du Pays basque et des Landes, l’agence Soupre de François s’éloigne progressivement de sa ville d’origine.
26Si nous ne pouvons, pour l’heure, formuler que des hypothèses basées sur des recoupements thématiques et temporels, nous pouvons envisager les difficultés de Jean-Marie et François à se positionner entre legs familiaux et enseignements reçus au cours de leurs études, au regard de leurs aspirations propres. En s’inscrivant dans la continuité Soupre, en voulant perpétuer un nom, une posture et une signature, Jean-Marie et François se sont certainement imposé une contrainte. Chargé de cet héritage, est-il réellement possible de prendre son indépendance face à « l’institution » Soupre ? Nous pouvons supposer que le changement de carrière opéré par Jean-Marie vers la gérance immobilière soit le résultat de cette volonté face à l’œuvre laissée par Jean et Joseph. La « pression » du poids de cet héritage familial aura peut-être encouragé Jean-Marie à se détourner de la conception architecturale. L’évolution des pratiques, des courants de pensée et la personnalité de François ont-ils détourné l’image rattachée à « l’institution » Soupre ? Par ailleurs, l’évolution des contextes économiques et politiques entre les différentes générations a nécessairement participé à l’évolution des postures des architectes Jean-Marie et François Soupre. De plus, la ville de Bayonne s’est peut-être volontairement détournée de cette nouvelle génération d’architectes Soupre. L’exploitation des sources recueillies jusqu’à présent ne nous permet pas encore de vérifier ces hypothèses, mais la poursuite des investigations apportera probablement des éclaircissements.
27Finalement, la branche parisienne de l’agence s’éteint en 1976, avec le décès de Jean-Marie52. La dynastie repose alors sur le seul cabinet de province, et le nom Soupre continue de résonner presque exclusivement à l’échelle du territoire local, entre Pays basque et Landes, notamment.
La dynastie Soupre aujourd’hui, entre transformation et devoir de mémoire
28La dynastie des architectes Soupre se perpétue sur trois générations. Olivier, dernier architecte de cette lignée, a dû se construire au regard des deux générations d’architectes précédentes. Mais comment trouver sa place dans une telle dynastie ?
29Après François, c’est son fils Olivier qui entame à son tour des études d’architecture, à l’École d’architecture de Bordeaux53. Si Olivier est aujourd’hui passionné par sa vocation d’architecte, il admet avoir, à l’origine, choisi cette profession sous l’influence de sa famille. Comme Jean-Marie et François avant lui, Olivier a baigné dans l’esprit de l’agence d’architecture Soupre dès le plus jeune âge et développé son sens artistique très tôt aux côtés de son père François. Il a donc bénéficié d’un environnement privilégié, propice pour faire naître chez lui le désir de continuité.
30Au cours de ses études à l’École d’architecture de Bordeaux, Olivier se révèle dans la pratique du projet. Pourtant, il n’est pas détaché de l’emprise paternelle et de l’influence de l’agence54. Cet ascendant le limite dans l’exploration et l’expérimentation – propres aux étudiants en architecture –, et l’amène à dessiner très tôt des projets « professionnels ». Rapidement, ses esquisses témoignent d’un savoir-faire et d’une expérience précoces, dues à l’accompagnement de François dans cet apprentissage de la profession. Olivier fait également siens les héritages transmis par ses aïeux, notamment l’ancrage et l’attachement local à la culture en Pays basque. Il « était en admiration de ce qu’il s’était passé à l’agence55 » du temps de Jean et Joseph et, à son tour, il s’est imprégné des inspirations que les jumeaux avaient explorées. Dans son diplôme de fin d’études, présenté le 6 mars 1989, « Bassussarry : le nouveau centre bourg56 », Olivier se plonge notamment dans l’analyse de l’architecture euskarienne et ses spécificités.
31Au sortir de ses études, il se détache de la tutelle paternelle et des legs Soupre, et part travailler en Égypte durant deux ans57. Il découvre le métier d’architecte sous un angle nouveau, dans un contexte différent de celui qu’il a toujours connu dans l’agence familiale. Lorsqu’il revient en France, l’agence Soupre est en souffrance. Réduite en nombre de collaborateurs, celle-ci n’est pas encore passée à l’informatique, prend du retard sur la concurrence et perd en visibilité. Les ennuis de santé de François finissent alors d’inciter Olivier à rejoindre la structure et à s’atteler à la relance de l’activité.
J’étais un tout jeune architecte alors, avec peu d’expérience, et avec le poids du nom de l’agence Soupre58.
32François et son fils collaborent quelques années, jusqu’à ce que l’agence remporte, en 1995, un important concours local qui va permettre à Olivier de relancer celle-ci et d’affirmer son indépendance. Après quelques années difficiles, où « l’agence Soupre a été boudée, [car] Soupre c’était dépassé, trop vu, tant par les politiques que par les commanditaires privés59 », Olivier transforme progressivement son histoire et offre à l’agence une nouvelle visibilité. Si nous manquons de recul pour appréhender les héritages d’Olivier dans la lignée de ceux laissés par ses aïeux, nous pouvons imaginer – à travers le témoignage de celui-ci – le poids que l’héritage filial a fait peser sur ses choix de vie professionnelle et personnelle. En s’inscrivant dans la durabilité, en choisissant de faire perdurer un nom, en donnant un nouveau visage à l’architecture Soupre au Pays basque, alors délaissée, Olivier s’est construit entre rupture et transformation. À la tête de l’agence Olivier Soupre Architectes, qui est installée près de Bayonne, il a su composer « avec le poids du nom de l’agence Soupre, [évoluer et] ne plus se reposer sur les acquis, sur le nom de l’agence60 », pour restaurer son image et la rendre de nouveau compétitive et visible dans l’architecture d’aujourd’hui. Fort de ce passé, de la transmission d’une tradition et de valeurs, il compose, peut-être plus encore que la génération précédente, avec le poids de cet héritage. Olivier a su s’adapter au contexte et aux attentes de son temps, en continuant, « à travers trois générations, […] à finalement développer toujours un peu le même type d’activités, du dessin d’un portail aux dossiers passionnants, aux budgets un peu illimités61 ». Aujourd’hui « garant d’une institution, l’institution Soupre62 », il laisse entrevoir un nouveau dessein à la signature « Soupre » dans l’architecture contemporaine.
Conclusion
33Pour se construire, un architecte a besoin de développer une culture propre, parfois forgée sur le socle d’une histoire familiale, à la fois force et limite pour l’expression individuelle. L’héritage intrinsèque à la famille, presque inévitable, participe nécessairement à la construction des descendants. Enrichies de legs matériels – structures, mécènes, locaux, commanditaires, archives, etc. – les valeurs et les idéologies familiales influent sur l’orientation et inspirent le développement des créateurs en devenir. À travers l’exemple de la dynastie d’architectes Soupre, nous observons les résultats de la filiation dans le devenir et l’expression des différentes générations de créateurs. Qu’il soit souhaité ou subi, l’ensemble de ces héritages forme, pour les différentes générations, un préalable immuable dont l’interprétation façonne la création. Empreinte d’une forte identité, l’agence Soupre originelle, cofondée par les jumeaux Jean et Joseph, a fortement influencé la naissance d’une dynastie d’architectes Soupre et impacté l’évolution de la pratique de ces différents créateurs au cours des générations. À la fois héritiers et individus uniques, les architectes Jean-Marie, François puis Olivier ont dû composer avec cet existant, marqué par l’ambivalence de cet héritage. Issu d’une construction familiale commune, chacun des héritiers Soupre a adopté une posture personnelle, traduite dans des architectures différentes, léguant ainsi un patrimoine propre. De par son organisation originale, l’agence familiale Soupre interroge tout au long de son existence sur le processus créatif à l’œuvre entre jumeaux, entre frères ainsi qu’entre père et fils. La poursuite des recherches engagées, avec la reconstitution et l’exploration d’un fonds d’archives partiel de l’œuvre de la première génération d’architectes Soupre63, nous permettront certainement d’étudier plus précisément, au travers des figures fondatrices de la dynastie, le processus créatif à l’œuvre dans l’agence à l’origine de l’institution Soupre et d’approfondir notre perception des liens qui continuent de se tisser entre ses différentes générations.
Sources
Entretiens libres avec François et Olivier Soupre (2016 à 2020).
Archives personnelles de la famille Soupre (1912 à 1987).
Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques.
Dictionnaire des élèves architectes de l’École des beaux-arts de Paris (1800-1968), dictionnaire élaboré sur la base des dossiers individuels d’élèves (Archives nationales, cote AJ52).
Bibliographie
Leonardo Benevolo, Histoire de l’architecture moderne. 2 Avant-garde et mouvement moderne (1890-1930), Vera et Jacques Vicari (trad.), Paris, Dunod, 1979.
Leonardo Benevolo, Histoire de l’architecture moderne. 3 Les conflits de l’après-guerre, Vera et Jacques Vicari (trad.), Paris, Dunod, 1979.
Charles Bilas, Les Élégantes du Pays basque : architectures plurielles 1860-1930, Paris, Les Beaux Jours, 2012.
Gilbert Desport, Répertoire des peintres et sculpteurs du Pays basque : dessinateurs, illustrateurs, graveurs, peintres-verriers, architectes-peintres. Deuxième édition revue et mise à jour 2005, Bayonne, Atlantica, 2005.
Élie Lambert (préf.), Jean & Joseph Soupre, J. & J. Soupré, architectes diplômés du Gouvernement – S.A.D.G., 2 rue du 49e Bayonne – 118 boulevard Richard Lenoir Paris. Travaux d’Architecture, Strasbourg, Édari : Édition d’architecture, d’industrie et d’économie rurale, 1932.
David Peyceré, « La pratique de l’architecture en France au xxe siècle », La Gazette des archives, no 190-191, 2000, p-187-198.
Jean & Joseph Soupre, Maisons du Pays basque. Labourd. Basse-Navarre. Soule, Paris, Alexis Sinjon, 1928.
Jean & Joseph Soupre, Maisons du Pays basque. Navarre. Biscaye. Guipuzcoa. Alava, Paris, Alexis Sinjon, 1930.
Tiphaine Tauziat, Jean et Joseph Soupre architectes. Inventaire d’une production, exemple d’édifices publics de l’entre-deux-guerres vecteurs d’une qualification des marges de la ville de Bayonne ?, mémoire de fin d’études mention recherche sous la dir. de Mathilde Lavenu et Gwenn Gayet-Kerguiduff, 2 vol., 2017.
Tiphaine Tauziat, Jean et Joseph Soupre tandem d’architectes bayonnais, Bayonne, Mission Ville d’art et d’histoire de Bayonne, coll. « Focus », 2018.
Jean-Claude Vigato, L’Architecture régionaliste. France 1890-1950, Paris, Norma, 1994.
Notes de bas de page
1Olivier Soupre, entretien du 07 mars 2020.
2Alain Sarfati, Transmission – Rupture – Architecture, exposé du 11 octobre 2012 à l’Académie d’architecture [en ligne] http://academie-architecture.fr/archive/transmission-rupture-architecture (consulté le 1er juillet 2020).
3Idem.
4A. D. des Pyrénées-Atlantiques (earchives.le64.fr). L’État civil – Registres paroissiaux et d’État civil – Bayonne État civil – 1892-1902 Naissances : extraits du registre des naissances de 1894 : no 122 et no 123, 28 mars 1894, actes de naissance des jumeaux Pascal Léon Pierre Jean Soupre et Pascal Gabriel Antoine Joseph Soupre, nés le 2 mars 1894 à Bayonne, http://earchives.le64.fr/archives-en-ligne/ark:/81221/r17821zdqnqzbk/f160 (consulté le 22 juin 2020).
5Gilbert Desport, Répertoire des peintres et sculpteurs du Pays basque : dessinateurs, illustrateurs, graveurs, peintres-verriers, architectes-peintres. Deuxième édition revue et mise à jour 2005, Bayonne, Atlantica, 2005, p. 508-509.
6Marie-Laure Crosnier-Leconte, Dictionnaire des élèves architectes de l’École des beaux-arts de Paris (1800-1968) [en ligne], Jean Soupre : https://agorha.inha.fr/inhaprod/ark:/54721/00284003 (consulté le 15 décembre 2019), dictionnaire élaboré sur la base des dossiers individuels d’élèves (A. N., cote AJ52).
7Idem.
8Idem.
9Idem.
10Marie-Laure Crosnier-Leconte, Dictionnaire des élèves […], op. cit. [en ligne], Joseph Soupre : https://agorha.inha.fr/inhaprod/ark:/54721/00284000 (consulté le 15 décembre 2019).
11François Soupre, entretien du 2 août 2016.
12Inconnu, « Un terrible incendie, activé par un violent orage, a ravagé cette nuit le 6e étage de l’immeuble du “Perroquet” », Le Courrier de Bayonne, 28 septembre 1961, p. 1.
13Étude rendue possible grâce à la reconstitution et à l’exploration d’un fonds d’archives Soupre permettant l’édification d’un inventaire de leur production.
14Olivier Soupre, entretien du 06 juillet 2016.
15Idem.
16Si les descendants François et Olivier Soupre qualifient aujourd’hui Joseph de « pondeur de projets » et Jean « d’homme d’affaires », nous ne pouvons pas affirmer que Jean et Joseph s’identifiaient comme tels. La répartition des tâches de chacun au sein de l’agence J. & J. Soupre Architectes est encore à l’étude. Toutefois, cette complémentarité des personnalités semble être un schéma récurrent dans les différentes générations de frères de la dynastie, comme nous l’exposerons plus loin.
17L’agence J. & J. Soupre Architectes rayonne à l’échelle nationale, tant en métropole qu’outre-mer. En effet, Joseph part quelques mois en mission à la Martinique en 1930. Les années suivantes, l’agence y édifie différentes villas et obtient plusieurs récompenses à la suite de concours publics (Trésorerie générale de Fort-de-France, Hôtel de tourisme à Fort-de-France, etc.).
18Dans le livret Travaux d’Architecture, Élie Lambert fait notamment mention, dans sa préface, de villas édifiées dans le Midi, l’Eure ou la Seine-Inférieure. Certaines d’entre elles sont d’ailleurs illustrées dans les pages qui suivent, affichant les traits régionalistes caractéristiques de leurs territoires respectifs.
19L’agence J. & J. Soupre Architectes participe, par exemple, au concours pour le « camouflage » du palais du Trocadéro en vue de l’Exposition internationale de 1937, où ils obtiennent, en collaboration avec Raymond Rousselot (1871-1954) et Roger Deperthes (1896-1939), une mention premier prix ex aequo pour leur proposition sous la devise « Tout au soleil ».
20David Peyceré, « La pratique de l’architecture en France au xxe siècle », La Gazette des archives, no 190-191, 2000, p. 187.
21Tiphaine Tauziat, Jean et Joseph Soupre architectes. Inventaire d’une production, exemple d’édifices publics de l’entre-deux-guerres vecteurs d’une qualification des marges de la ville de Bayonne ?, mémoire de fin d’études mention recherche sous la dir. de Mathilde Lavenu et Gwenn Gayet-Kerguiduff, 2017, vol. II.
22« Euskarien(ne) : qui se rapporte ou qui est propre au Pays basque » (CNRTL).
23Tiphaine Tauziat, Jean et Joseph Soupre […], op. cit.
24Élie Lambert (préf.), Jean & Joseph Soupre, J. & J. Soupré, architectes diplômés du Gouvernement – S.A.D.G., 2 rue du 49e Bayonne – 118 boulevard Richard Lenoir Paris. Travaux d’Architecture, Strasbourg, ÉDARI : Édition d’architecture, d’industrie et d’économie rurale, 1932, préface. Dans l’ensemble du livret promotionnel de l’agence, le nom de famille « Soupre » est orthographié « Soupré ». Pourtant, les extraits d’État civil de Jean et de Joseph ne font pas mention de l’existence d’un accent.
25A. D. des Pyrénées-Atlantiques, E DEPOT BAYONNE 1 M 17. En réalité, la devise du projet proposé par Jean et Joseph Soupre au concours du monument aux morts de Bayonne est une représentation graphique d’un point d’interrogation ailé, inscrit dans un cercle.
26Jean & Joseph Soupre, Maisons du Pays basque. Labourd. Basse-Navarre. Soule, Paris, Alexis Sinjon, 1928 et Maisons du Pays basque. Navarre. Biscaye. Guipuzcoa. Alava, Paris, Alexis Sinjon, 1930.
27Élie Lambert (préf.), Jean & Joseph Soupre, J. & J. Soupré […], op. cit.
28Jean et Joseph Soupre présentent une maquette de la villa Arri Gorri – alors nommée « villa basque » – au Salon des artistes français de 1927. Il en est fait mention dans plusieurs articles, tels que l’article de Paul Normand, « L’architecture au Salon de 1927 », L’Architecture, vol. XL, no 6, 1927, p. 169, ou celui de G. Rémon, « La belle villa en Pays basque, J. J. SOUPRE, Architectes », Jardins et cottages, Paris, Edmond Honoré, no 4, juillet 1926, p. 97-103. Par ailleurs, la villa Arri Gorri est mentionnée dans des ouvrages tels que Choix de villas françaises, dirigé par Jean Virette en 1927, ou Villas basques, dont Jean Soupre est préfacier en 1961.
29Élie Lambert (préf.), Jean & Joseph Soupre, J. & J. Soupré […], op. cit.
30Concours remporté en 1923 par l’épigraphe « 2 timbres postes de 0,01 », proposé par les architectes Roland Martin (1876-1959) et Jean et Joseph Soupre.
31Réalisé en association avec Jules Godefroy (1863-1928), architecte des PTT.
32Ils interviennent notamment dans les Ardennes, les Landes, le Lot et les Pyrénées-Atlantiques (Basses-Pyrénées).
33Charles Bilas, Les Élégantes du Pays basque : architectures plurielles 1860-1930, Paris, Les Beaux Jours, 2012, p. 42.
34Jean-Claude Vigato, L’Architecture régionaliste. France 1890-1950, Paris, Norma, 1994, p. 177.
35François Soupre, entretien du 2 août 2016.
36Dans les archives personnelles de la famille Soupre se trouvent quelques dessins réalisés par Joseph lorsqu’il était observateur aérien au cours de la Première Guerre mondiale. Malgré ces temps difficiles, il n’a jamais laissé ses crayons.
37François Soupre, entretien du 13 janvier 2020. À l’heure actuelle, aucun document ne permet de corroborer cette affirmation. Nous ne pouvons donc affirmer que Jean-Marie est bel et bien passé par l’École spéciale d’architecture avant d’intégrer l’École des beaux-arts de Paris.
38Marie-Laure Crosnier-Leconte, Dictionnaire des élèves, op. cit. [en ligne], Jean-Marie Soupre : https://agorha.inha.fr/inhaprod/ark:/54721/002153904 (consulté le 17 mai 2019).
39Ibid., https://agorha.inha.fr/inhaprod/ark:/54721/002155156 (consulté le 17 mai 2019).
40Si Jean-Marie et François collaborent à la vie de l’agence parisienne, nous ne pouvons, pour l’heure, définir précisément la place qu’ils y occupaient. Toutefois, dans un entretien du 3 septembre 2018, François Soupre raconte qu’il réalisait les maquettes pour l’agence J. & J. Soupre Architectes.
41UAM : Union des artistes modernes.
42François Soupre, entretien du 13 janvier 2020. Lors de différents entretiens, François explique que l’Ordre des architectes a autorisé, à titre exceptionnel, la poursuite de l’activité de l’agence d’architecture Soupre alors que les repreneurs, Jean-Marie et François, étaient encore étudiants. Si, pour l’instant, nous n’avons pas retracé l’exacte chronologie de cette période trouble de passation, nous pouvons pour l’heure affirmer – en nous basant sur le dépouillement des archives personnelles de la famille Soupre – que quelques années après le décès de Jean et Joseph, les projets demeurent estampillés « J. & J. SOUPRE ». En 1963, des projets portent l’estampille « Cabinet SOUPRE Administrateur : Maurice HAULON Architecte D.P.L.G. ». Une fois Jean-Marie diplômé (1964), une double signature qui apparaît : « J.M. SOUPRE M. HAULON Architectes D.P.L.G. » (signature extraite d’un projet daté de 1965). Enfin, une fois François diplômé à son tour (1969), l’estampille devient « J.M. & F. SOUPRE Architectes D.P.L.G. » (signature extraite d’un projet daté de 1970).
43François Soupre, entretien du 13 janvier 2020.
44Marie-Laure Crosnier-Leconte, Dictionnaire des élèves, op. cit. [en ligne], Jean-Marie Soupre : https://agorha.inha.fr/inhaprod/ark:/54721/002153904 (consulté le 17 mai 2019).
45Ibid., https://agorha.inha.fr/inhaprod/ark:/54721/002155156 (consulté le 17 mai 2019).
46Olivier Soupre, entretien du 07 mars 2020.
47François Soupre, entretien du 13 janvier 2020.
48Cette étude comparée concerne, d’une part, un curriculum vitae agrémenté de références concernant Jean et Joseph Soupre, daté de juillet 1958 (trois ans avant la fin de la carrière de Jean et Joseph) et valorisant environ 42 projets (datés, situés, collaborations précisées et architectes cités) et, d’autre part, une liste de références concernant Soupre, allant de 1962 à 1987 (deux ans qu’Olivier obtienne son diplôme d’architecte et quatre ans avant qu’il rejoigne François), valorisant environ 134 projets (non datés, situés, collaborations non précisées, cosignatures Soupre non précisées). Notons que la liste de références « J. & J. Soupre » est plus sélective que la liste proposée par François. Mais ni l’une ni l’autre ne sont exhaustives de l’œuvre des deux générations traitées.
49Édifice aujourd’hui disparu.
50Olivier Soupre, entretien du 07 mars 2020.
51Idem.
52A. de Paris, État civil, 1976, Décès, 8e arrondissement, acte no 108.
53Olivier Soupre, entretien du 07 mars 2020.
54Idem.
55Idem.
56Olivier Soupre, « Bassussarry : le nouveau centre bourg », diplôme de fin d’études, présenté et soutenu publiquement le 6 mars 1989 à l’école d’architecture de Bordeaux, 246 p. (dont 5 planches de projet), disponible via ArchiRès [en ligne] https://omeka.archires.archi.fr/files/original/757a4ec1e0608832084abbc61d8d2ba5.pdf (consulté le 14 décembre 2019).
57Olivier Soupre, entretien du 07 mars 2020.
58Idem.
59Idem.
60Idem.
61Olivier Soupre, entretien du 06 juillet 2016.
62Olivier Soupre, entretien du 07 mars 2020.
63La reconstitution de ce fonds d’archives a pour origine les archives personnelles de la famille Soupre qui n’ont pas disparu au fil des années et après l’incendie de 1961. Ces archives lacunaires sont complétées par des archives institutionnelles, des sources bibliographiques, périodiques, etc.
Auteur
-
Tiphaine Tauziat
Architecte DE, doctorante en histoire de l’art – histoire de l’architecture, CHEC, UCA – Ressources, ENSACF
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