Les Astor, une dynastie de collectionneurs au service de la IIIe République en Cornouaille
The Astor, a dynasty serving the IIIrd Republic in Cornouaille
p. 39-60
Résumés
Tout au long du xixe siècle, trois générations de politiciens ont constitué la collection de la famille Astor. Héritages successifs, volontés politiques, identité culturelle et volonté mémorielle ont guidé les hommes Astor à composer une collection autour de la Bretagne et des peintres bretons. Quels ont été les choix guidant l’établissement d’un tel ensemble devenu, en 1929, le socle des collections d’un musée ?
Throughout the 19th century, three generations of politicians formed the Astor family’s collection. Successive inheritances, political commitment, cultural identity and memories, guided the Astor men to compose a collection around Brittany an Breton painters. What were the choices that guided the composition of such an ensemble, which became, in 1929, the base of the collections of a new museum?
Entrées d’index
Mots-clés : manoir de Kerazan, Bretagne, républicain, collectionneur, collection, peintre breton, héritage
Keywords : Kerazan manor, Bretagne, republican, collector, collection, breton painter, inheritance
Texte intégral
1Le manoir de Kerazan, situé sur la commune de Loctudy dans le sud du Finistère, est devenu propriété de l’Institut de France en 1929. Ancien manoir de la noblesse bretonne des xvie et xviie siècles1, Kerazan s’est vu transformé en demeure bourgeoise durant les siècles suivants et accueille aujourd’hui une importante collection d’objets d’art.
2À son décès en décembre 1928, Joseph-Georges Astor (1859-1928), dernier propriétaire du domaine, désigne l’Institut de France comme légataire universel de tous ses biens. Conformément aux conditions testamentaires, le manoir de Kerazan devint à la fois une fondation, la fondation Astor, et un musée qui, à l’ouverture de ses portes, rendit publique une collection initialement familiale.
3Notre ambition est ici d’identifier les différentes étapes de la constitution de la collection présentée au public. Plusieurs vitesses et temporalités peuvent être identifiées dans l’établissement de cette collection, d’un premier abord hétéroclite. Ces étapes peuvent-elles être rapprochées de personnalités ou de goûts esthétiques ? Sont-elles liées à des actions ou à des volontés particulières ? D’autres raisons ou vecteurs peuvent-ils interférer dans les choix de la composition de cette collection ?
4Pour répondre au mieux à ces questions, il nous paraît indispensable de présenter, au travers de courtes biographies, les actions menées par les membres de la famille Astor, propriétaires du manoir durant plusieurs générations.
5Si le noyau originel de la collection paraît entièrement classique (comprenant des portraits familiaux comme des peintures issues des écoles flamande ou française des xvie et xviie siècles), il est issu d’héritages familiaux en lien avec Joseph Astor I (1778-1848). Nous identifions un développement de la collection dans les années 1880-1900 autour d’un thème breton, que nous attachons aux choix du fils Joseph Astor II (1824-1901). Puis nous constatons que la collection se développe en faveur d’un art moderne, sous les actions du petit-fils, Joseph-Georges Astor (1859-1928). Héritage familial, alors territorialement ancré, l’ensemble se complète de références nationales, changeant l’envergure et les ambitions premières de cette collection. Quels enjeux ces achats avaient-ils pour objectif de satisfaire ? Les œuvres d’art n’ont-elles qu’une seule valeur décorative ou peuvent-elles revêtir une signification particulière ?
6Nous nous attacherons à identifier les processus et étapes successives ayant mené à la création de la collection de Kerazan en répondant à notre interrogation majeure : une collection familiale constituée par étapes successives peut-elle refléter une filiation d’idées, transmettre une identité, que celle-ci soit mémorielle ou culturelle ? Caractères, carrières, opinions, intérêts personnels ou opérations réalisées sont autant de facteurs à prendre en compte dans cette étude.
Une dynastie d’hommes politiques (Fig. 1.)
Fig. 1 : Trois hommes, trois vies. Frise chronologiques des engagements politiques des trois collectionneurs du manoir de Kerazan (Bretagne)

Joseph Astor I (Fig. 2.)
Fig. 2 : Portrait de Joseph Astor I, Valentini Rossetti, huile sur toile, 1816, H : 60 cm, L : 47.5 cm, signature : « Valentini Rosseti / Venise 1816 » en partie inférieure gauche de la toile, Œuvre exposée, manoir de Kerazan (Bretagne)
Cliché Gwen Gayet.
7Joseph Astor (1778-1848), militaire de carrière, participa aux mouvements de la Révolution combattant contre la République, puis aux guerres de l’Empire. Nommé membre de la Légion d’honneur en 1809, puis chevalier de l’ordre militaire de Saint-Louis en 1814, il a pris part à l’ensemble des campagnes jusqu’en 1814, pour servir par la suite la Restauration ainsi que la monarchie de Juillet2.
8Il noue très tôt des attaches avec la Bretagne en épousant Pélagie-Marie-Gabrielle Férec, installée à Quimper. Après 41 années de service et une quinzaine de campagnes à son actif, le colonel Astor est identifié comme l’homme le plus fortuné de Quimper3 et grand propriétaire terrien4. Astor devint nécessairement actif dans la vie politique d’avant l’apparition du suffrage universel en tant que maire, à partir de septembre 18375. Sous son administration bonapartiste, la ville se modernise. Dès 1838, il organise l’aménagement de latrines, commande du nouveau mobilier pour l’ensemble de la préfecture et fait acquérir à la ville un terrain pour y installer un asile. Il entreprend la démolition des anciennes halles (entre 1839 et 1841) pour en édifier de nouvelles. À ces mêmes dates, il fait aligner le plan de la ville, construire un quai, une cale et installer deux fontaines publiques6.
9Mais, à la chute de Louis-Philippe en 1848 et à l’instauration de la IIe République, Joseph Astor se voit révoqué et destitué de ses fonctions après quatre mandats7 de maire. Dernier représentant de l’administration d’Ancien Régime à Quimper, il décède quelques mois plus tard, le 17 novembre 18488. Les témoignages retrouvés en premières pages des journaux, qu’ils soient républicains ou conservateurs, semblent s’entendre autour de cet homme populaire qui sut rassembler l’opinion publique autour de ses actions de modernisation de la ville. Il est décrit comme un homme actif, habile et astucieux. Ces traits de caractère se retrouvent chez son fils, qui fut lui aussi à la tête de l’administration quimpéroise, mais avec une tout autre orientation : celle d’un républicain modéré.
Joseph Astor II (Fig. 3.)
Fig. 3 : Portrait de Joseph Astor II, Adolphe Déchenaud, huile sur toile, 1914, H : 64 cm, L : 55 cm, signature : « A. Déchenaud / 1914 » dans l’angle inférieur droit de la peinture, Œuvre exposée, manoir de Kerazan (Bretagne)
Cliché Gwen Gayet.
10Unique fils du précédent, Joseph Astor, second du nom (1824-1901), poursuit une scolarité au « maudit collège de la Flèche9 » avant de commencer sa carrière militaire en 1843. Il participe à l’expédition de Crimée (1854-1855) et reçoit la Victoria Cross10 en 1857. Dès son retour de Crimée, Joseph Astor II démissionne de ses fonctions de capitaine pour épouser une des propriétaires du manoir de Kerazan, Noémie Arnoult, en 185511. De leur union naissent trois enfants : deux filles qui décèdent en bas âge et Joseph-Georges Astor, en 1859.
11L’apparition du scrutin universel masculin – impliquant la destitution de son père Joseph Astor I comme maire de la ville de Quimper – et la chute du Second Empire s’accompagnent d’un début de politisation du peuple, même si celle-ci est encore figée dans un régime autoritaire. Les premiers débats pluriels se font jour, négligeant volontairement l’ancienne existence du suffrage censitaire. Cette opinion publique naissante doit notamment prendre en compte le critère de la fidélité religieuse bretonne12. L’action de Joseph Astor I en tant que personnalité républicaine fut de guider les électeurs vers une autonomisation et un apprentissage politique, usant pour cela de plusieurs manœuvres.
12L’assouplissement politique du xixe siècle conduisit la liste républicaine à triompher dès 1851 dans la commune de Quimper. Ce changement s’explique, d’une part par l’augmentation du nombre de votants et, d’autre part, par l’ouverture des dialogues et des débats incités par la presse. Joseph Astor I eut comme principal objectif d’arriver à ce que la population rurale ne vote plus pour une personne mais pour une idée. Gagner dans les urnes impliquait de rendre intelligible le débat. Pour le parti républicain, il s’agissait de trouver un candidat ayant suffisamment d’influence, car « la force morale de l’opposition venait se briser contre le vote massif des électeurs ruraux13 ». Réveiller l’apathie de ces électeurs, les guider dans la maîtrise d’un libre arbitre, voilà l’enjeu des élections. Le Phare de la Loire insiste d’ailleurs sur le regard que les républicains portent sur les paysans, c’est-à-dire « des hommes obtus et grossiers qui par le nombre décidaient de l’élection14 ».
13La fin des années 1880 marque une large défaite des droites, comme l’envol des partis socialistes et républicains, après avoir induit une politisation des masses rurales. La presse joua un rôle croissant dans la divulgation des idées, comme des écrits en général (tracts, professions de foi, etc.) ; les hommes politiques furent portés sur le devant de la scène, devenant des personnalités publiques. Joseph Astor I fit partie de cette aventure nouvelle, dont chroniqueurs et journalistes attisèrent les enjeux. La nouvelle course fut, dès cet instant, celle de trouver de nouveaux moyens de communication pour séduire l’électorat… Joseph Astor I y arriva-t-il en usant de ses collections d’objets d’art ?
14Dès 1870, Joseph Astor II se lance dans la politique républicaine libérale. Il est élu maire le 15 septembre 187015. Constamment réélu jusqu’en 1896, date de sa démission pour des raisons de santé, il détient aujourd’hui encore le plus long mandat pour l’administration de Quimper. Datée de la veille de son élection, une lettre intitulée « Quatre rêves artistiques sur les embellissements à faire en la ville de Quimper (Finistère)16 » recense la plupart des réalisations qu’il rendit effectives sous son mandat. L’inauguration du premier musée de la ville, en 1872, marque son premier contact avec des œuvres d’art. Il s’entoura ensuite de conseillers et de connaisseurs, qui, par leur amitié et leur instruction, le poussèrent à s’investir rapidement dans les affaires culturelles lui tenant à cœur17. En 1890, déjouant les pronostics de l’administration, Astor l’emporte face à Jean-Charles Chevillotte, avec 53,87 % des voix. Il devient alors le premier sénateur républicain du Finistère. Ce chiffre marque le passage du département à gauche, à la majorité des grands électeurs. Sénateur jusqu’à son décès en 1901, Astor est également conseiller général du département du Finistère de 1877 à 189518.
15À l’instar de son père décédé quelques mois à peine après avoir vu la chute de l’Empire, Joseph Astor II décède en 1901, peu de temps après avoir vu chuter le parti pour lequel il s’était si longuement battu.
Une collection familiale : une dynastie de collectionneurs ?
Un socle « classique », un héritage familial
16Aucun élément d’archive ne permet de connaître l’état des possessions familiales des Astor avant Joseph I, qui constitue ainsi le point de départ de notre analyse dans la constitution de la collection. De l’héritage du couple Astor-Férec, des assiettes de faïence et une dizaine de portraits sont les seuls éléments identifiés19. Calixte de Montgaurin, née Astor et décédée en 1880, eut pour unique héritier Gaston de Montgaurin, fils avec lequel les relations distendues étaient source de conflits20. Une partie de sa succession revint directement à son frère, Joseph Astor II, sous la forme d’objets d’art. Grâce à une liste établie au début des années 189021, nous identifions effectivement plusieurs toiles et portraits issus de la succession Montgaurin22. Une trentaine de portraits familiaux compose désormais le socle de la collection étudiée. Pourtant, ils ne représentent qu’une part de cette collection « classique » : tout un ensemble pictural et du mobilier viennent compléter ce premier noyau, genèse de collection.
17L’héritage de la famille de Montgaurin s’est fait en deux temps : le décès de Calixte fournit Kerazan en portraits familiaux dès 1880, et, plus d’une trentaine d’années après, en 1913, il est complété au décès du fils de Calixte, Gaston. Ce dernier avait institué Joseph-Georges Astor légataire universel de sa succession. Si nous ne connaissons pas le contenu exact de cette dernière, de nombreux papiers renseignent sur le goût de Gaston pour les objets d’art. Tapis, tableaux et faïences réalisées entre 1850 et 191123 intègrent le manoir de Kerazan et la collection Astor.
18Dans cette collection, deux panneaux du xvie siècle, attribués à Frans Floris et à Jacob de Backer24 nous interrogent. Sont-ils issus de la collection de Montgaurin (mère ou fils) ou relèvent-ils d’un autre héritage ? Ont-ils été achetés par des collectionneurs de Kerazan, bien que nous ne retrouvions aucune trace d’achat ?
19Sur un total de 213 peintures conservées au sein du manoir, 27 sont identifiées comme appartenant à l’école française du xviiie siècle. Deux huiles sur toile de Claude-Joseph Vernet se répondent : une Marine et Le Naufrage, étude pour la mort de Virginie ; deux gouaches et craies sur papier, représentant Le Repas du riche et Le Repas du pauvre, rappellent étrangement la précision du rendu des matières de Jean Siméon Chardin. Quelques autres toiles, scènes de bambochades ou scènes de genre, aux sujets si répandus au xviiie siècle, complètent l’ensemble. S’il est peu probable qu’il s’agisse d’achats réalisés par la famille Astor, il serait envisageable qu’un tel ensemble ait orné les salons des Montgaurin.
20Le xixe siècle s’illustre dans les collections par la présence de marines ou de sujets triviaux, à l’instar d’une œuvre de Jacques Schwebach Desfontaines représentant une Halte de Hussards.
21De ce premier état de collection, il ressort que, si l’ensemble est hétéroclite, un point commun peut être dégagé : les œuvres sont, pour la plupart, des toiles ou des panneaux de facture qualitative. Il ne s’agissait pas de collectionner selon un thème, mais d’obtenir un ensemble de caractère, dans lequel figuraient de grands noms ou d’anciennes écoles recherchées. Fruit de plusieurs successions, cette première collection marque la genèse d’une grande collection qui devint par la suite, pour Joseph Astor II et son fils, l’objet de toute une vie.
22Dès lors, deux temps peuvent être distingués dans la constitution de cette première étape de collection. Le premier s’illustre sous la forme d’un héritage familial multiple, dont les origines classiques ne cachent ni l’œil averti des acquéreurs, ni leurs faveurs financières aux arts. Fondement de la collection actuelle, ce noyau que nous qualifions de « classique » présente des réalisations d’écoles françaises, flamandes ou hollandaises, des xve, xvie et xviie siècles. Il est hétéroclite, multinational et, déjà, lors de son arrivée au manoir de Kerazan, multiséculaire.
Une collection politique : Joseph Astor II au service de la Cornouaille
23Les années 1892 et 1893 marquent le point de départ d’une collection personnelle, à l’initiative du propriétaire des lieux, Joseph Astor II. Source de relations et d’enrichissements, ses premiers héritages semblent avoir séduit le politicien qu’il est dans son programme de réception mondaine au sein du domaine de Kerazan. Plus encore, ils semblent avoir développé progressivement son attrait pour les œuvres d’art.
24À compter de ce second temps, la collection que rassembla Joseph Astor II se concentra autour d’un thème qui lui était particulièrement cher : la Bretagne et ses concitoyens. Appuyant sa légitimité de premier élu, cette thématique était-elle une reconnaissance ou un hommage à la population bretonne ?
25Le développement relativement tardif de ce type d’acquisitions nécessite par ailleurs un approfondissement : est-ce dû au simple développement de ses connaissances en matière d’art ou Joseph Astor a-t-il bénéficié d’avis et de conseils ?
26Président des commissions du nouveau musée de Quimper, le maire Joseph Astor II s’investit alors dans un milieu qu’il connaît peu25. Ses goûts peu sûrs, enclins aux doutes, le font s’entourer de membres connaisseurs. Pour ce faire, il nomme membres de la commission des artistes praticiens (Auguste Denis Goy, Jules Breton, Alfred Guillou ou Alfred Beau) et, en 1872, le député Louis Hémon tant pour ses connaissances en art que pour ses accointances. Leurs actions permirent au musée de Quimper d’obtenir de nombreuses œuvres26. Si l’objectif premier du maire était de mettre sa ville et son musée à l’honneur, il s’assurait une commission de conseillers reconnus, dans l’organisation interne d’une administration qu’il découvrait27. Fin stratège que Joseph Astor II, ou homme reconnaissant son seuil d’incompétence ?
27Coïncidence frappante, les noms des peintres siégeant à la commission du musée de Quimper sont tous présents dans la collection que Joseph Astor II constitue à Kerazan. Certaines amitiés ont-elles guidé la création de celle-ci ? Les registres de commissions du musée font état de la rencontre, en 1883, de Joseph Astor II avec le peintre Théophile Deyrolle, qui devint également membre honoraire de la commission. Ces archives communales révèlent aussi que le maire Astor était en contact avec les peintres Jules Noël28 et Théodore Gudin29. Les noms de ces artistes se retrouvent eux aussi au sein de la collection de Kerazan.
28« C’est un musée jeune que le musée de Quimper mais il est déjà élevé à un rang des plus honorables parmi les collections publiques […]. Le musée n’a cessé de grandir pendant ces dernières années ; il rivalise aujourd'hui d’importance avec les collections communales, et l’on peut dire qu’il ne contribue pas moins à attirer les visiteurs du Finistère aussi bien que ceux du dehors30. » En l’espace de peu de temps, Joseph Astor II se voit en charge d’un espace culturel admiré et complimenté, dont il doit la réussite à la commission qu’il sut former. Il se voit qualifié « d’homme de goût » à propos des œuvres qui intègrent le musée, alors qu’il n’en est pas le décisionnaire, mais l’acquéreur. Ce système d’acquisitions et de commandes témoigne en partie du rôle des relations de la commission. Jeux politiques et réseau de connaissances sont inhérents à la constitution de la collection du musée de Quimper comme à celle du manoir de Kerazan en cette fin de xixe siècle.
29Ces achats d’œuvres, qui s’adressent directement aux concitoyens et visiteurs curieux de la Bretagne, ont également un dessein politique, le projet d’une « ville rouge », dans ces années où le parti républicain triomphe en Cornouaille. Le choix d’une représentation du quotidien breton n’est pas une coïncidence, mais le résultat d’une approche réfléchie. Tout le génie de Joseph Astor II a probablement été d’avoir su se faire conseiller par des personnes avisées, pour ensuite constituer sa collection personnelle.
30Le système d’acquisition des ensembles présentés à Kerazan s’apparente donc grandement à celui du musée de Quimper, tant dans le choix des artistes que celui des sujets. Sa position de maire a fait de Joseph Astor II le principal interlocuteur des artistes avec qui il a su nouer des attaches. Il pallie son manque de connaissance des arts par la connaissance des artistes eux-mêmes. En aucun cas Astor ne s’intéressait aux représentations romantiques de la Bretagne, telles que Chateaubriand31 peut les présenter. Il préfère montrer une Bretagne de labeur, une Bretagne de valeurs, dont les traditions sont ancrées, dont le caractère identitaire est fort : une Bretagne qu’il a comprise, se voyant légitimé par les votes répétés de ses concitoyens.
31Pour autant, Kerazan n’est-il qu’un miroir ou une copie miniature du musée de Quimper ? De sa vingtaine d’années d’apprentissage au contact des membres de la commission du musée, Joseph Astor II ressort avec des goûts plus affirmés. Il a beaucoup appris de ses découvertes et des amitiés liées entre 1870 et 1890, avant de rejoindre Paris et le Sénat. Fort de son expérience politique passée et de sa réussite dans la constitution des collections du musée de Quimper, il utilise désormais les arts comme une arme. Indispensable dans ses fonctions « sénatoriales », Kerazan devient l’écrin d’une collection aux reflets d’une carrière professionnelle : celle du premier sénateur de gauche du Finistère.
32Par les images, Astor tend à illustrer sa politique de proximité et de développement de la Cornouaille. Le choix du thème de sa collection est donc un objet réfléchi et stratégique issu d’une longue réflexion et dont le mécanisme a porté ses fruits avec les réussites du musée de Quimper. C’est dans cette optique qu’il s’agit d’interpréter les aménagements du manoir de Kerazan à compter des années 1890. Lieu de faste, de culture, de connaissances et de goût, la résidence illustre les actions et les engagements professionnels de son propriétaire d’alors. Il ne s’agit plus d’alimenter une ancienne collection « classique », mais d’en élaborer une nouvelle.
33En juillet 1893, les premiers achats pour Kerazan s’orientent vers du mobilier d’origine bretonne32. Trois ans plus tard, Astor commande au peintre breton Deyrolle la décoration intégrale de la salle à manger du manoir, qui se voit ornée de scènes de trophées de chasse et de pêche, avec lapins, perdrix et saumons. Six mois plus tard, le couple Astor-Arnoult commande la réalisation du décor du salon, avec des bouquets floraux.
34Plutôt que d’imaginer une collection créée de toutes pièces, il faut penser l’ensemble comme une succession d’occasions, rendues possibles grâce aux conseils et aux accointances, le tout conférant une véritable identité territoriale à la collection. Les sujets ne sont pas nécessairement représentatifs de la Bretagne, mais l’origine seule des peintres suffit à rendre l’œuvre intéressante aux yeux des commanditaires. Il s’agissait également de servir économiquement la région, en favorisant des peintres locaux ou des peintres de la Bretagne s’employant à la représenter. Parti de simples conseils, qu’il complète de perspicacité, et de sa sensibilité, Joseph Astor II commença donc une collection sur un thème nouveau. Sa carrière parisienne lui facilitant grandement ses achats, par ses fréquentations, sa proximité des galeries et des salles de vente, il semble que son nouvel objectif ne fut plus réellement de constituer une collection, mais davantage un spicilège.
D’une ambition politique au musée : les actions de Joseph-Georges Astor
Joseph-Georges Astor (Fig. 4)
Fig. 4 : Portrait de Joseph-Georges Astor, Adolphe Déchenaud, huile sur toile, 1920, H : 54,5 cm, L : 46 cm, signature : « A. Déchenaud-1920 » en partie inférieure droite de la toile, Œuvre exposée, manoir de Kerazan (Bretagne)
Cliché Gwen Gayet.
35Né en 1859, Joseph-Georges Astor33 intègre le collège de Quimper en 1870, année de l’entrée de ses père et oncle34 sur la scène politique. Il est décrit comme un élève « bon, égal, au caractère soumis, avec une très bonne tenue35 ». Dès 1871, il est noté sur son bulletin scolaire qu’il n’assiste plus aux enseignements religieux, une situation certainement approuvée par l’autorité familiale qui se bat pour une instruction laïque. La correspondance de Joseph-Georges Astor avec ses parents nous renseigne sur son amour du foyer maternel (Kerazan) et le plaisir qu’il a de s’y retrouver36.
36Seule ombre au tableau de cette enfance et de ce début de vie adulte, une surdité le frappe progressivement durant ses études. Ce handicap met un frein à toutes ses espérances et l’empêche de poursuivre ses projets, lui qui, à l’instar de ses aïeux, se destinait à une carrière politique. Par la suite, il n’en reste pas moins actif dans le secteur économique et politique. Il compense son handicap auditif par la vue, qu’il met au service de la collection familiale, en la complétant. Moyen d’être au service de ses concitoyens, moyen de faire l’impasse sur ses projets déchus, les objets d’art deviennent, à compter de cela, un palliatif à ces maux.
37Sa grande proximité avec les enfants vaut à Joseph-Georges Astor de recevoir plusieurs demandes de parrainage, qu’il ne se lassait pas d’accepter – gâtant ensuite ses filleuls –, comme en témoigne cette lettre d’une certaine Mme Benoit : « Les boîtes de baptême sont arrivées hier, nous vous en remercions encore ainsi que des autres cadeaux […]. Je suis très touchée de la délicate attention que vous avez eue en donnant à Jeanne le bracelet de votre chère mère, les souvenirs de famille n’en sont que plus précieux. Je vois avec plaisir d’autres broderies à la main, si appréciées autrefois et qui occupaient les jeunes filles autant et mieux que les sports actuels. Vous avez trop gâté votre filleul37 ! » Attaché au travail local traditionnel, au savoir-faire comme à la transmission de bijoux et autres biens familiaux, Joseph-Georges Astor montre son attachement aux héritages, bien plus moraux que physiques. La notion de mémoire (qu’elle soit collective ou familiale) apparaît comme une valeur précieuse aux yeux du donateur.
38Ses relations avec le monde politique et économique ne se sont pas éteintes avec ses proches. En 1910, Joseph-Georges Astor entretient une correspondance soutenue avec le député Hémon38. Les années d’entre-deux-guerres sont celles d’une prise de conscience du patrimoine, non seulement pour l’ensemble des Français, mais tout particulièrement pour lui. Les années 1918-1928 sont celles d’une correspondance soutenue avec des artistes, qu’ils soient peintres ou faïenciers.
39Pour lui qui fréquente assidûment les salons d’automne, les galeries d’art et les salles des ventes, la capitale devient son terrain de fouille favori, pour chercher à dénicher un tableau breton lui rappelant ses origines, ses terres ou le labeur de ses concitoyens. Dès 1919, Joseph-Georges est qualifié de « collectionneur39 ».
Pour une collection d’envergure nationale en Cornouaille
40« Je sais que vous avez trouvé à Kerazan un but à votre vie, que vous vous intéressez beaucoup à tout ce qui contribuera à la prospérité de ceux et de ce qui vous entoure ; vous devez être heureux de réaliser ce qui, j’en suis persuadée, était le vœu de Mr et de Mme Astor. Et vous apportez aussi votre part dans une œuvre bien précieuse au pays40. »
41Avec la surdité survenue à la fin des années 1880 et ses projets d’avenir contrariés, Joseph-Georges Astor vit en cette collection bretonne la promesse d’un service qu’il pouvait rendre à ses concitoyens. Si la scène politique ne lui laissait pas de place à cause de son infirmité, sa sensibilité et la vivacité de son esprit trouvèrent à s’épanouir par les arts. Présent en Bretagne comme à Paris, Joseph-Georges Astor a pu, très tôt, profiter des connaissances des proches de son père, comme des artistes venus à Kerazan. L’écrit et l’art étant alors ses principaux moyens de communication, il sut mettre un point d’honneur à communiquer avec un très large réseau, hérité du cercle de connaissances paternelles. Une part d’admiration l’a probablement conduit dans cette quête du « souvenir » breton et de la représentation de la Bretagne laborieuse, telle que la souhaitait son père. S’adonnant dès le commencement du xxe siècle au plaisir de collectionner, Joseph-Georges Astor incarne le troisième et dernier temps de la constitution de la collection de Kerazan.
42Produit par un peintre breton ou œuvre représentant la Bretagne, voilà la devise qui guide Joseph-Georges Astor dans ses achats. Ses achats ne s’éloignent pas de ce thème. Par amour de sa terre natale comme des collections rassemblées par son père, il chercha à compléter la collection familiale, jusqu’à son décès. Pour cela, il acquiert des œuvres issues des mêmes ateliers, produites par les mêmes artistes (Auguste-Denis Goy, Alfred Beau ou Théophile Deyrolle). Bien plus proche du caractère artistique que des qualités politiques ou administratives des individus que ne l’était son père, Joseph-Georges Astor engage le dialogue sous une forme nouvelle auprès de ceux, qui, déjà, avaient donné vie au second temps de la collection familiale. L’enjeu n’est désormais plus politique, mais esthétique, assorti d’une volonté de mémoire. Joseph-Georges Astor « compose » la collection, lui confère l’identité ébauchée par son père.
43Très tôt, il se rapproche des deux filles d’Auguste-Denis Goy pour acquérir des dessins et peintures41 de l’artiste décédé en 1875. Il demeure également proche de la famille d’Alfred Beau : avec sa veuve, il échange sur l’évolution des arts42 ; avec le fils, Émile , il entretient une amitié liée aux productions du père. En 1922, Émile Beau remercie le collectionneur de son action et de tous les soins avec lesquels il s’emploie à rassembler l’œuvre de son père43. C’est ainsi en entretenant un réseau familial que Joseph-Georges Astor permet à la collection paternelle de prendre de l’ampleur. Pourtant, compléter cette dernière avec les seuls mêmes artistes ne pouvait combler entièrement ce connaisseur.
44Ses sensibilités l’amènent à côtoyer des peintres comme Louis-Marie Désiré-Lucas (Fig. 5) et Lionel Floch, à s’attacher aux créations de Lucien Simon, Maurice Denis (Fig. 6), ou à dénicher, au sein de galeries, des productions de George Desvallières ou de Georges Hanna Sabbagh. Joseph-Georges Astor élargit la collection de Kerazan des peintres bretons aux peintres « de la Bretagne » et part à la recherche d’artistes nouveaux. Il déploie son énergie à compléter l’œuvre de toute sa vie : la collection familiale.
Fig 5 : Jeune ouessantine ou Profil de jeune paysanne, Louis-Marie Désiré-Lucas, huile sur toile, début xxe siècle, H : 40 cm, L : 32 cm, signature « DesireLucas » en partie inférieure gauche de l’œuvre, Œuvre exposée, manoir de Kerazan (Bretagne)

Cliché Gwen Gayet.
Fig. 6 : Pardon de Notre-Dame de la Clarté, Maurice Denis, huile sur toile, 1926, H : 60 cm, L : 103 cm, signature « Maurice Denis/1926 » en partie inférieure droite de l’œuvre, Œuvre exposée, manoir de Kerazan (Bretagne)

Cliché Gwen Gayet.
45Signalons que Charles Cottet, Lucien Simon, Fernand Cormon, Louis-Marie Désiré Lucas sont autant d’artistes exposés au musée de Quimper44. Le système d’acquisition des œuvres s’est donc déployé et épanoui, au travers d’une nouvelle génération Astor.
46Parmi ces artistes, Désiré-Lucas semble avoir eu une relation suivie avec Joseph-Georges Astor, dont la correspondance contient trois lettres, datées des années 1923-1924, l’une d’elles prévoyant un séjour de deux jours à Kerazan45. Il semble que Joseph-Georges Astor ait trouvé en Désiré-Lucas un compagnon avec qui parler d’art soit le centre de leurs préoccupations. De plus, il assure un rôle de soutien auprès de l’artiste, comme ce dernier l’exprime si facilement : « Je sais combien vous vous intéressez à mon art ; ce sont des amis comme vous qui renforcent notre courage dans les continuelles recherches et inquiétudes qui accompagnent le progrès […]. J’ai hâte d’avoir votre appréciation sur mes recherches de lumière46. » En fin connaisseur, Joseph-Georges acquiert quatre œuvres du peintre, toutes de sujets bretons.
47Il est un point que nous ne pouvons négliger dans la compréhension de la collection : une part importante de l’ensemble provient d’achats en salles des ventes ou en galeries, lieux que, nous l’avons évoqué, Joseph-Georges Astor aimait fréquenter, à Quimper comme à Paris. Il n’est donc plus question ici de proximité entre le collectionneur et l’artiste, mais bien d’un regard avisé, celui de l’acheteur.
48L’activité artistique du xixe siècle fut rythmée par l’organisation de salons et, dans sa seconde moitié, par l’organisation d’expositions universelles. Ce fut toujours le cas dans le premier quart du siècle suivant, mais, en parallèle, des galeries d’art s’installèrent dans les grandes villes. À Paris, leurs choix nouveaux, audacieux, font de certaines galeries les acteurs principaux du marché de l’art. Des factures de Joseph-Georges Astor attestent ses fréquentations régulières au sein des galeries Druet (Paris, VIIIe), Georges Petit (Paris, VIIIe), Lécuyer (Quimper) ainsi qu’à l’hôtel Drouot47.
49De la galerie Eugène Druet48, qui est celle dont subsistent le plus grand nombre de traces d’achats, proviennent plusieurs œuvres. En 1921, fut acheté Paysanne travaillant d’Emma Herland ; en 1924, il s’agit d’un tableau de George Desvallières, Notre-Dame des Naufragés, étude ; en 1928, est adressé à Joseph-Georges Astor l’accusé de réception d’un chèque, d’une valeur de 16 000 francs, relatif à l’acquisition d’une huile sur toile du peintre Maurice Denis : Daphnis et Chloé, achetée au mois de juillet précédent49. De la galerie J. Allard, provient une œuvre de Georges Hanna Sabbagh, Le Rocher du Mulet, acquise en décembre 192850. Probablement avertie des goûts de Joseph-Georges Astor et du thème autour duquel il constitue sa collection, cette galerie l’informe qu’il lui reste des tableaux de Cottet en vente, qui pourraient mettre en valeur « sa chère et belle Bretagne51 ». Cette toile est le dernier achat de Joseph-Georges Astor, qui décède le 30 décembre 1928.
50Ce dernier semble avoir beaucoup souffert de n’avoir pu, comme ses aïeux, servir les intérêts du pays auquel il était si profondément attaché, ce qui se ressent dans ses choix artistiques. C’est un éloge de la Bretagne et du peuple breton qu’il crée en développant la collection : particulièrement sensible à la misère et aux conditions de vie de certains de ses concitoyens52, il affectionne et collectionne les œuvres qui leur rendent hommage.
51Sans héritier et impressionné par la vie des familles à la campagne, par la dureté des travaux des champs et par la misère, il décide de léguer la totalité de sa propriété et de ses biens à l’Institut de France. Une brochure datée de 1923 et intitulée « Les donations ou legs faits à l’Institut » l’atteste. Joseph-Georges Astor y émet le souhait que le bénéficiaire aménage un musée dans le manoir et qu’il crée – afin d’améliorer le sort des jeunes filles du pays bigouden – un enseignement d’art appliqué53. Son souhait fut réalisé et, jusqu’en 1940, de nombreuses brodeuses originaires de Pont-l’Abbé et de Loctudy y furent formées, à raison d’une cinquantaine d’élèves chaque année54. Si, pour Joseph-Georges Astor, l’art était une priorité, l’art régional l’était encore davantage.
52Par le biais de ce legs et la volonté de créer un enseignement, Joseph-Georges Astor révèle une personnalité politique et un attachement aux conditions de vie de ses concitoyens ainsi qu’à son pays natal. Plus encore, il démontre sa sensibilité au travers d’une collection qui met en exergue un patrimoine local.
Conclusion
53Trois temps constituent donc cette collection présentée aux visiteurs du musée-manoir de Kerazan. Un premier noyau « classique » correspond aux héritages successifs de la famille Astor. Un deuxième temps se déploie avec Joseph Astor II qui s’investit dans la constitution de sa collection autour d’une thématique définie : la Bretagne. Son attirance se porte alors particulièrement sur les productions qui mettent en avant la vie paysanne et son labeur quotidien, dans une optique précise alliant esthétique et carrière politique. Enfin, dernier temps dans la constitution de l’ensemble, Joseph-Georges Astor se charge de compléter la collection que son aïeul lui laisse en héritage. Joseph-Georges Astor confère à l’ensemble une identité bretonne : les objets bretons ne sont plus seulement une composante de la collection, mais en deviennent l’essence même.
54Au regard de l’ensemble constitué et de l’ampleur que Joseph-Georges Astor donne à sa collection familiale, ses attentions continuelles à servir, d’une part, ses concitoyens et, d’autre part, la mémoire de ses aïeux, nous gageons que ce troisième temps dans la constitution de la collection fut un engagement moins financier que moral. Dès le début de ce travail de rassemblement, Joseph-Georges Astor l’a souhaité d’une ampleur nouvelle, revêtant l’envergure de services à rendre.
55Avec Joseph Astor II, l’art servait à illustrer des convictions, pour une politique territorialement ancrée ; l’art devenait une arme politique. Avec Joseph-Georges Astor, la collection héritée est augmentée pour rayonner à l’échelle régionale et nationale. La tradition, le savoir-faire local restent une priorité, par la transmission d’un enseignement de broderie au sein du manoir. La mémoire des aïeux, d’un patronyme et des actions menées par eux est assurée par la création de la fondation Astor, mais la dimension politique s’estompe clairement au profit d’un rôle éducatif, culturel et social. La collection de Kerazan peut être étudiée au travers de différents prismes et à différentes échelles.
Bibliographie
Julien Bouchet, Côme Simien, Les Passeurs d’idées politiques nouvelles « au village », Révolution-années 1930, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, coll. « Histoires croisées », février 2015.
Jean-François Chanet, L’école républicaine et les petites patries : enseignement primaire et sentiment d’appartenance en France sous la IIIe République (1879-1940), Thèse de doctorat sous la dir. de Maurice Agulhon, université Lille III, 1994.
Denise Delouche, Les peintres de la Bretagne avant Gauguin, Thèse de doctorat sous la dir. d’André Mussat, université Rennes 2, 1978.
Serge Duigou, Jean-Michel Le Boulanger, Histoire du pays bigouden, Plomelin, Palantines, 2002.
Laurent Paubert, Formation de l’opinion publique, politisation et structuration des identités politiques en Bretagne au xixe siècle : l’exemple du Finistère et du Morbihan de 1898 à 1914, Thèse de doctorat sous la dir. de Christian Bougeart, université de Bretagne occidentale, 2003.
Patrick Pierre, Les bretons et la République : la vie politique en Bretagne sous la IIIe République, Thèse de doctorat sous la dir. de Michel Nicolas, université Rennes 2, 198
Dominique Poulot, Une histoire du patrimoine en occident, xviiie-xxie siècles, du monument aux valeurs, Paris, Presses universitaires de France, « Le Nœud Gordien », 2006.
Notes de bas de page
1Le domaine appartient à la famille de Kerfloux à compter du xve siècle, à la famille Drouallen au xviie siècle et à la famille Le Gentil de Rosmorduc au xviiie siècle. Il est enfin saisi comme bien révolutionnaire et revendu à la famille Arnoult-Astor.
2Gwenn Gayet, Le Manoir de Kerazan et ses propriétaires : architecture, décor intérieur et collections, thèse de doctorat, sous la dir. de Catherine Cardinal, université Blaise-Pascal, 2014, p. 98-101.
3A. D. du Finistère, 2 O 1633 ; 3 M 92 : « Colonel en retraite, commandeur de la Légion d’honneur / né en 1778 / Marié deux enfants / Fortune personnelle évaluée en revenus à 6 000 ».
4A. D. du Finistère, 3 P 136-3 (cadastre de Loctudy en 1834).
5A. de l’Institut de France, 2 J 1.
6A. D. du Finistère, 2 O 1510 ; 2 O 1615 ; 2 O 1623 ; 4 N 98.
7Nommé les années 1837, 1840, 1843 et 1846 ; A. D. du Finistère, 2 M 87.
8A. de l’Institut de France, 2 J 1, La Vigie, 21 novembre 1848.
9Selon ses écrits sur un cahier de recueil de chants daté de 1836. A. de l’Institut de France, 2 J 1.
10A. de l’Institut de France, 2 J 1 ; La Victoria Cross comme l’agrafe de Sébastopol sont aujourd’hui toujours visibles dans les vitrines du bureau-bibliothèque du manoir de Kerazan.
11A. de l’Institut de France, 2 J 1.
12Laurent Paubert, Formation de l’opinion publique, politisation et structuration des identités politiques en Bretagne au xixe siècle : l’exemple du Finistère et du Morbihan de 1898 à 1914, thèse de doctorat sous la dir. de Christian Bougeart, université de Bretagne occidentale, 2003.
13A. de l’Institut de France, 2 J 5, L’Électeur du Finistère, 26 avril 1869.
14A. D. du Finistère, 3 M 356, Le Phare de la Loire, 28 juin 1871.
15A. de l’Institut de France, 2 J 1 ; arrêté ministériel passé sous signature d’Adolphe Thiers le 12 mai 1871 : « Article 1er : sont nommés maire et adjoints de la ville de Quimper (Finistère) / Maire : M. Astor (Joseph) / Adjoints : M. Alavoine (Joseph) / M. de la Hubaudière (Félix) / Article 2 : Le Ministre de l’Intérieur est chargé de l’exécution du présent arrêté. »
16A. de l’Institut de France, 2 J 2 (JIIA346). Promesse faite à lui-même, cette lettre envisage l’ensemble des travaux à créer sous son mandat. Il évoque tout d’abord, dans un « premier rêve », la création d’un théâtre et d’un musée. Dans un « deuxième rêve », la réhabilitation du centre de Quimper, au travers de la place Saint-Mathieu, du chœur de l’église, des halles, du jardin des plantes, ainsi que la modification des axes de façades pour rendre les rues plus lumineuses. Son « troisième rêve » évoque la création de nouveaux boulevards, les modifications des promenades, l’assainissement des rues, une meilleure circulation de l’air et une aération de la ville auprès de l’Odet. Son dernier rêve serait de voir Quimper alimenté en eau.
17A. du musée de Quimper ; A. D. du Finistère, 2 O 1623.
18Gwenn Gayet, Le Manoir de Kerazan […], op. cit.
19Joseph Astor I (1778-1848), Portrait du colonel de Rossetti, Venise, 1816 ; Joseph Astor I en colonel de Briand, 1843 ; Mme Joseph Astor, Gabrielle née Férec (1787-1866) par une élève de Boilly…
20A. de l’Institut de France, 2 J 10, 2 J 11.
21Inventaire réalisé à l’occasion des travaux d’embellissement du manoir de Kerazan.
22A. D. du Finistère, 60 J 106, liste d’œuvres réalisée par Joseph-Georges Astor, vers 1890 : « Portrait de Jean de Montgaurin (1665-1740) ; Portrait de Magdeleine de Larquier, Dame de Montgaurin […] ».
23A. de l’Institut de France, 2 J 11.
24Vénus jouant avec les armes de Mars, de J. de Baecker, et La Courtisane (Suzanne) et le vieillard, de Frans Ier de Vriendt, dit Frans Floris. Ce peintre du xvie siècle était spécialisé dans les portraits et les représentations allégoriques et mythologiques. Voir Paul Mantz, École Flamande, sujets religieux, allégories, Frans Floris (François de Vriendt), Paris, Poitevin, s. d ; Georges Costa, Le Plafond d’Hercule de l’ancien Parlement de Toulouse, un cas d’emprunt à Frans Floris, Bulletin de la Société d’Histoire de l’Art français, 1993 ; Carl Van de Velde, A Roman Sketchbook of Frans Floris, Master Drawings, vol. VII, no 3, automne 1969, p. 255-308. Attributions proposées par Xavier Salmon, conservateur général du patrimoine et directeur du patrimoine et des collections du château de Fontainebleau.
25Il était chargé de l’accrochage des tableaux, de l’installation des galeries, des commandes du mobilier nécessaire à l’ameublement des salles, ou encore de la rédaction du règlement.
26A. du musée de Quimper, commissions du musée (1870-1896).
27A. du musée de Quimper, registre des commissions, 1880.
28A. du musée de Quimper, registre des commissions, 23 avril 1883 : « M. Théophile Deyrolle de Concarneau nous a fait un don de son tableau La Pêche aux maquereaux » ; « M. Gaston Roullé, gendre de Jules Noël, nous a donné 2 crayons originaux de son beau-père […] ».
29A. du musée de Quimper, registre des commissions, 12 mars 1896.
30A. du musée de Quimper, registre des commissions, 17 novembre 1887.
31Dans René ou Les Martyrs, Chateaubriand évoque un paysage breton fait de bruyères et de grèves désertes. En pleine période romantique, cette image de solitude, de rudesse et d’hostilité attise la mélancolie et la poésie du lecteur qui voudra bientôt venir découvrir ce pays si bien décrit. Les Martyrs lui permettent d’évoquer les dolmens et les menhirs, auxquels il attribue des cortèges druidiques ou des sacrifices sanglants.
32A. de l’Institut de France, 2 J 3, (JIIA763) ; du notaire Gabriel Charrier (Paris), à Mme Astor, le 08 juillet 1893 : « Madame, j’ai l’honneur de vous informer que j’ai pris bonne note de votre lettre dans laquelle vous exprimez le désir d’être informée du jour de la vente du mobilier dépendant de la succession du général de Locmaria. »
33Il porte à la fois le prénom de son père (Joseph), sénateur, et celui de son oncle (Georges), député.
34Georges Arnoult (1832-1887), frère de Noémie Arnoult, propriétaire de Kerazan et député républicain du Finistère entre 1876 et 1885. Voir Gwenn Gayet, « Georges Arnoult (1876-1885) : député et collectionneur », in Julien Bouchet et Côme Simien (dir.), Les Passeurs d’idées politiques nouvelles « au village », Révolution-années 1930, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise-Pascal, coll. « Histoires croisées », février 2015, p. 283-299.
35A. de l’Institut de France, 2 J 3, carnet de réception.
36A. de l’Institut de France, 2 J 1 (JIIA9), (NA17).
37A. de l’Institut de France, 2 J 5, (JGA260).
38A. de l’Institut de France, 2 J 5, (JGA85).
39A. de l’Institut de France, 2 J 5, (JGA176), lettre de M. Robert le 6 août 1919 : « Mais il se trouve que vous êtes aussi collectionneur, et que dès lors, vous avez des trésors d’indulgence pour un “confrère” encore que nous ne recherchions pas les mêmes objets. »
40A. de l’Institut de France, 2 J 5 (JGA6), lettre d’Avah Beau à Joseph-Georges Astor, le 10 janvier 1918.
41A. de l’Institut de France, 2 J 5 (JGA36 à JGA38 ; JGA41). Joseph-Georges Astor acquiert, par exemple, Le Vieux Quimpérois, une huile sur toile toujours exposée au manoir de Kerazan.
42A. de l’Institut de France, 2 J 5, (JGA7), extrait de la lettre d’Avah Beau à Joseph-Georges Astor, en date du 11 janvier 1922. « [Vous appréciez] les œuvres sorties des mains de mon mari ; j’en suis touchée et partage vos goûts en art, incompréhensive et même révoltée par les aberrations de quelques nouvelles écoles qui n’ont pas elles-mêmes la conviction et qui dépriment le goût français ; je ne crois nullement qu’elles voient un passage vers le progrès, elles ne sont qu’une erreur. »
43A. de l’Institut de France, 2 J 5, (JGA10), extraits de la lettre d’Émile Beau à Joseph-Georges Astor, en date du 15 octobre 1922 : « Il est encore une chose dont il faut que je te remercie, c’est le soin pieux avec lequel tu rassembles toutes les œuvres de mon père. Il m’est doux de penser que ces faïences, produit de son labeur incessant et de son génie inventif, ne sont pas dispersées entre des mains indifférentes et sont contemplées par quelqu’un qui voit en elles comme un reflet de celui qui les a créées. J’en possède aussi quelques-unes, mais les plus belles, c’est toi qui les as. »
44A. du musée de Quimper, registre des commissions, 1900-1910.
45A. de l’Institut de France, 2 J 5, (JGA44) : « Kerazan est resté dans mon souvenir malgré les années passées depuis ma dernière visite. Je me fais une fête de le revoir. »
46A. de l’Institut de France, 2 J 5, (JGA45).
47A. D. du Finistère, 60 J 106.
48En activité de 1903 à 1938.
49A. D. du Finistère, 60 J 106.
50Idem.
51Idem.
52Rappelons la période difficile que fut la crise côtière pour le pays bigouden. La disparition des bancs de sardines toucha de nombreuses familles de pêcheurs en 1902. Les femmes, à la recherche d’un revenu, se mettent à la dentelle ou à la broderie.
53A. D. du Finistère, 34 J 29.
54A. de l’Institut de France, 2 J 16.
Auteur
-
Gwenn Gayet-Kerguiduff
Responsable du musée Sahut et des sites patrimoniaux de Volvic
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Pour une histoire de la restauration monumentale (xixe-début xxe siècle)
Un manifeste pour le temps présent
Bruno Phalip et Fabienne Chevallier (dir.)
2021
Aristocratie révolutionnaire en Espagne
La concession de nouveaux titres de Castille (1808-1854)
Arnaud Pierre
2024
Les nouveaux territoires diocésains
De l’époque médiévale à nos jours
Vincent Flauraud et Stéphane Gomis (dir.)
2021
De la parole du prédicateur au discours politique
Jalons pour une histoire de la critique religieuse du politique (du Moyen Âge à l’époque contemporaine)
Vincent Flauraud et Ludovic Viallet (dir.)
2022
Les mises à l'écart politiques
Des périphéricités paradoxales
Laurent Lamoine et Julien Bouchet (dir.)
2022
Les espaces du spectacle vivant dans la ville
Permanences, mutations, hybridité (xviiie-xxie siècles)
Pauline Beaucé, Sandrine Dubouilh et Cyril Triolaire (dir.)
2021
La modernisation de l’Espagne
Entre réformes et conflits (xixe-xxe siècles)
Jean-Claude Caron et Anne Dubet (dir.)
2023
Prendre la plume des Lumières au Romantisme
Pratiques de l’écrit dans l’Europe de la fin de l’époque moderne
Matthieu Magne (dir.)
2019
Joconde ou madone ? La Tête de cire de Lille, énigme de la collection Wicar
Fortune et réception (1834-2021)
Laurence Riviale
2022
Statuts personnels et main-d’œuvre en Méditerranée hellénistique
Stéphanie Maillot et Julien Zurbach (dir.)
2021