L’achèvement des cathédrales françaises au xixe siècle, un passé fait présent
The Completion of French Cathedrals in the Nineteenth Century, a Past Made Present
p. 313-329
Résumés
Au xixe siècle, un certain nombre de cathédrales françaises ont été « achevées », c’est-à-dire que les édifices restés incomplets depuis la fin du Moyen Âge ont été portés à leur terme. D’autres, devant assumer ce rôle dans la nouvelle géographie des diocèses et des départements, ont été agrandis, complétés ou développés en suivant plus ou moins le modèle emblématique de la « cathédrale française », gothique, mis en avant par Viollet-le-Duc.
In the nineteenth century, a number of French cathedrals were ‘completed’ that is to say that the buildings that have remained incomplete since the end of the Middle Ages were brought to their end. Others, having to assume this role in the new geography of dioceses and departments, were enlarged, completed or developed following more or less the emblematic model of the ‘French cathedral’, Gothic, put forward by Viollet-le-Duc.
Entrées d’index
Mots-clés : histoire de l’architecture, histoire de la restauration des édifices, architecture gothique, cathédrales, Viollet-le-Duc (Eugène), France, départements français, XIXe siècle
Keywords : history of architecture, history of buildings restoration, gothic architecture, cathedrals, Viollet-le-Duc (Eugène), France, french departments, 19th century
Texte intégral
1À propos de la restauration des monuments au xixe siècle et en particulier à propos de l’œuvre d’Eugène Viollet-le-Duc, il existe sans doute un malentendu fondamental. Selon une confusion que l’on peut qualifier d’anachronisme, cette restauration voudrait dire pour nous seulement conservation. Viollet-le-Duc nous a pourtant mis en garde dans son Dictionnaire1, parlant bien sûr à ses contemporains, mais, au fond, notre époque continue à faire la confusion contre laquelle il prévient, en s’offusquant, d’ailleurs, de la définition proposée. Or pour les acteurs de ce siècle, la conservation de l’édifice ancien dans ses dispositions originales et sa substance peut être éventuellement une conséquence du processus de restauration, mais elle n’en est pas le but. Ce qui sépare en effet nos pratiques contemporaines de la restauration des pratiques du xixe siècle n’est pas seulement une question de moyens techniques, de capacité opérative ou même de sensibilité historico-artistique. Le but est différent. Pour nos devanciers, il s’agit de produire une architecture pour leur temps, dans cet exercice particulier qui doit rendre présent le passé, qui doit lui donner une capacité expressive et démonstrative tant sur le plan de l’art et de l’histoire – puisque la forme, le style de l’ouvrage ancien est ce qui qualifie sa valeur de témoignage du passé national – que sur le plan de la fonction, sociale, symbolique, politique même qu’assure l’usage de l’édifice restauré2. Il faudrait plus souvent s’intéresser, à propos des chantiers de restauration menés sur les monuments historiques au xixe siècle, à leur programme fonctionnel, soit direct, soit indirect, la restauration cherchant souvent à définir un modèle, à offrir une source d’inspiration. Par exemple, la salle synodale de Sens, dont la restauration par Viollet-le-Duc est l’une des plus critiquées sous l’angle de la conservation, révèle son sens dans le programme spécifique d’une salle pouvant « réunir la foule » pour des usages sociaux qui sont ceux du siècle du restaurateur et pour lesquels il était fondamental que des modèles puissent être fournis par l’architecture du passé3.
2Cette actualisation de l’architecture du passé par le xixe siècle et en particulier par Viollet-le-Duc a pour but de démontrer la valeur de l’architecture nationale, d’en légitimer la capacité à être la source des nouveaux développements destinés à répondre aux besoins de son temps. Elle doit, dès lors, être démonstrative, lisible, expérimentale. Elle doit révéler à lui-même l’héritage du passé, accordant son témoignage matériel, présent dans l’espace commun, à ses intentions, formelles comme techniques, telles du moins que le restaurateur peut les supposer ou les déterminer par son travail. Il ne s’agit pas, dès lors, de respecter en tant que tel le résultat de l’histoire, qui a pu accumuler dans un édifice des strates d’intentions diverses, d’évolutions d’usage, voire de contradictions de goût. Cela, qui à nos yeux à nous est une richesse, une épaisseur artistique et humaine qui qualifie le « patrimoine », est plutôt, pour le xixe siècle, une gangue sans valeur de laquelle doit être extraite la leçon pure du passé, dans le but de restaurer son actualité et sa force.
3Ceci ne s’exprime pas mieux, nous semble-t-il, que dans le cas des cathédrales françaises, en particulier dans un cas spécifique, ou même limite, que cet exposé voudrait principalement présenter : celui des cathédrales qu’il fallait achever ou compléter pour que leur architecture corresponde au rôle social, symbolique et politique qu’elles étaient désormais amenées à remplir4. Évidemment, l’achèvement des cathédrales pourrait être vu de plusieurs manières et, en particulier, comme la reprise à une époque économiquement favorable de ces chantiers au long cours qui les avaient créées et qui, en de nombreux cas, avaient déjà duré des siècles avant de s’interrompre. D’autant plus que l’aspect spécifique de ces chantiers arrêtés – structures imposantes, mais incomplètes, juxtaposition forcée de parties d’édifices correspondant à des projets différents – pouvait, visuellement, spatialement, dans des contextes urbains que les conséquences de la Révolution avaient largement transformés, résonner comme un besoin, comme un appel. Ces achèvements pouvaient avoir encore, même au xixe siècle, ou retrouver, ce caractère de défi mobilisateur, lié parfois au gigantisme du projet, pouvant être réinvesti de nouvelles valeurs, en particulier nationales, voire nationalistes. C’est le cas typique et bien connu de la cathédrale de Cologne5, auprès duquel on pourrait citer également Milan6, Florence7, ou Barcelone8 en Catalogne et beaucoup d’autres. En ce qui concerne les cathédrales françaises, en fait quelques-unes seulement, Nantes, Clermont-Ferrand, Limoges [Fig. 1], peut-être Belley, peuvent être rangées dans cette catégorie des achèvements stricto sensu, c’est-à-dire la reprise du chantier paralysé depuis la fin du Moyen Âge pour compléter l’édifice dont le développement architectural était latent, inscrit et lisible dans le projet arrêté et, cette fois, mené à son terme. La plupart des autres cathédrales qui font l’objet des interventions majeures du xixe siècle en France sont plutôt des édifices qui ont été complétés, agrandis ou pour lesquels on a bâti des compromis architecturaux sensés résoudre des questions nées de l’ensablement des chantiers au long cours cités plus haut ou de l’accession des édifices à un nouveau statut. Mises bout à bout cependant, ces interventions importantes, qui ont demandé des financements considérables et ont occupé l’appareil d’État pendant trois quarts d’un siècle, révèlent l’ampleur d’un chantier global et sans précédent. On peut d’ailleurs se demander pourquoi ces édifices, qui n’étaient pas moins des cathédrales avant la Révolution, ont fait alors l’objet de ce vaste chantier. C’est là qu’il faut revenir à la question du programme, car les cathédrales du xixe siècle, si elles ont en apparence la même fonction cultuelle qu’auparavant, n’en ont pas moins un rôle nouveau. Situées, sauf exception, aux chefs-lieux des départements, elles ont aussi acquis une fonction représentative du territoire et de l’organisation rationnelle des pouvoirs dans la nouvelle France issue de la Révolution et de l’Empire, qui a aligné les structures religieuses sur les structures civiles. À côté des préfectures et des palais de justice et bientôt des gares ou des caisses d’épargne, les cathédrales concordataires expriment les nouvelles polarités urbaines du territoire et personnifient, pour une part, la nouvelle organisation politique du corps social. D’ailleurs, le souci sera, bien souvent, non seulement l’achèvement de la forme architecturale de la cathédrale, objet de ces pages, mais aussi sa mise en scène urbaine, par le dégagement ou l’isolement9. Dans cette expression, le religieux – devenu en 1789, mais surtout en 1802, une émanation de l’État – a, à cause de l’héritage monumental et patrimonial, une autre fonction tout aussi nécessaire ; celle de témoigner du passé, de la continuité de l’identité de la nation et, surtout, de rendre ce passé actuel, vivant, utile. En un mot, les cathédrales concordataires sont investies, bien que non exclusivement, du rôle de représentation du passé ; elles sont même considérées comme emblématiques de l’histoire nationale, mais avec une actualité qui oblige à leur donner une forme parfaite (ou la plus parfaite possible) qui soit non seulement un témoignage historique, mais l’expression monumentalisée d’un type architectural encore valide pour le présent. Ce type – la cathédrale gothique française –, érigé en modèle par excellence par la fascination qu’il a exercée sur les architectes et les hommes du xixe siècle (fascination qui est peut-être encore la nôtre), fut ainsi le principal vecteur de l’actualisation de la fonction de ces édifices, de la validation de leur présence et de leur forme dans l’espace public. Voulant rendre le passé présent et actuel, l’achèvement et la restauration des cathédrales étaient cependant, au-delà de l’enthousiasme compréhensible des architectes, une entreprise ambiguë qui servait d’abord l’Église et sa prééminence – les prélats seront des acteurs permanents et influents de ce chantier –, malgré les discours laïcisants d’un Viollet-le-Duc agnostique qui y voyait plutôt le témoignage d’une force morale de l’homme, le résultat séculaire d’un combat contre la barbarie10. Le but de ces quelques pages est de montrer comment, dans le cas des cathédrales que le xixe siècle a eues à achever ou à modifier de façon substantielle, se révèle le type architectural, le modèle mis en œuvre.
Fig. 1 : Limoges, la cathédrale inachevée (xixe s.). Cliché publié dans Thierry Soulard et al., L’achèvement de la cathédrale de Limoges au xixe siècle, catalogue d’exposition, Limoges, DRAC, 1988.

4Dès la naissance d’un service des Monuments historiques, la question de l’achèvement des édifices était entrée dans ses préoccupations et fut d’ailleurs traitée de façon contrastée. Dès 1840 est sur la table la construction de la façade de l’église Saint-Ouen de Rouen, dont la forme est longuement débattue par la Commission jusqu’en 184311. Ce n’était pas une cathédrale. En 1839, le tout premier projet du jeune Viollet-le-Duc concernait l’achèvement de l’ancienne cathédrale de Narbonne, qui avait perdu depuis 1802 son rang épiscopal et primatial12. Mérimée, on le sait, s’opposera à ce projet au titre des
5Monuments historiques, considérant que la restauration d’un monument ne pouvait être – justement – un achèvement contemporain, imposant sans doute cette doctrine à la Commission pour l’avenir13. Mais il ne faut pas oublier qu’avant la Séparation des églises et de l’État, les cathédrales proprement dites ne relevaient pas du service des Monuments historiques, mais de l’administration des Cultes, maître d’ouvrage des cathédrales. Ce n’est d’ailleurs qu’après les réformes de 1848 puis de 1853 que l’on vit s’exercer sur les édifices diocésains l’influence de Viollet-le-Duc et des architectes restaurateurs, auxquels on peut attribuer un rôle décisif dans ce « chantier des cathédrales » dont il est question ici. En effet, les auteurs (Lassus, Viollet-le-Duc, Abadie, Revoil, Bœswillwald, etc.) des interventions importantes sur les cathédrales françaises au xixe siècle sont souvent les mêmes que ceux des grandes restaurations : architectes diocésains ou architectes attachés à la Commission des Monuments historiques, ou les deux à la fois, leur polyvalence témoigne de la primauté donnée à l’architecture sur la conservation. Pour dresser rapidement l’inventaire des édifices qui seront l’objet de notre examen ici, les achèvements majeurs réalisés, déjà cités, sont ceux des cathédrales de Nantes et de Clermont-Ferrand, de Belley dans une moindre mesure ; on a aussi complété en la prolongeant la nef de la cathédrale de Limoges et construit une nef pour la cathédrale de Moulins ; un autre problème de nef, plutôt complexe, est celui de la cathédrale de Toulouse. À Montpellier, c’est un transept et un chœur qu’on a élevés. À Bayonne, on a largement complété la façade pour la rendre harmonique, à Quimper on a érigé les flèches sur les tours de la façade et ce travail sur la silhouette (avec les profils de comble, les pignons de transept, les flèches de croisée) et les façades se remarque encore à Montpellier, à Saint-Flour, à Mende, à Dijon14 – à Paris – et enfin, contrepoint à ce propos, d’une façon très spéciale à la cathédrale d’Albi et à celle de Périgueux, qui ne sont pas gothiques.
6Ce type de la cathédrale qui sous-tend la plupart des interventions, on en reconnaît sans doute une expression dans le dessin aujourd’hui « surexposé » – et sans doute surestimé – de la cathédrale idéale du xiiie siècle que Viollet-le-Duc a produit dans son Dictionnaire raisonné15 (il vaudrait mieux, d’ailleurs, pour suivre l’expression même de l’architecte, parler de cathédrale française). Peut-on rapporter à cette image les interventions majeures des cathédrales du xixe siècle ? En partie, oui, sans doute. Sans être une source directe des projets, ce dessin traduit de façon synthétique l’idée de la cathédrale gothique, avec son développement complet, qui est présente à l’esprit de tous les acteurs. En considérant tous les chantiers importants, nous examinerons d’abord la question du plan, du développement général des édifices en tant qu’espace propre à accueillir la liturgie, en plan et en volume. Nous verrons ensuite la question des façades et de la silhouette, caractère incontournable de l’édifice ancien dans son « état complet », que Saint-Ouen de Rouen avait, si l’on peut dire, inaugurée.
7Nantes est un cas presque unique puisque cette entreprise s’engage comme la continuation de la reconstruction gothique de la cathédrale, commencée au xive siècle, dont la façade, la nef et le transept sud avaient été édifiés avant que le chantier ne s’interrompe au xvie siècle. Dès 1835, le parti d’achèvement s’impose16 et porte bien évidemment en germe dès cet instant le conflit avec la conservation des parties romanes encore debout : chœur, croisée couverte d’une coupole et sommée d’un clocher. On commence par le plus facile, l’édification du transept nord, à l’emplacement prévu et où des amorces du chantier médiéval subsistaient. Les choix déterminants viendront un peu plus tard, avec la construction du chœur à déambulatoire et chapelles rayonnantes, dont le projet est modifié puisqu’on découvre, en l’entreprenant, les fondations abandonnées au xvie siècle qui lui donnaient une travée de plus et que l’on suit dans ce nouveau développement. La fin du chantier, qui aura duré 50 ans et usé trois architectes, se termine effectivement par la destruction de la croisée romane et de la tour en 1876, non sans déchirements – la conservation reste un vrai sujet et a ses partisans –, mais la cohérence de l’édifice s’est imposée : à vrai dire, c’était inévitable depuis la reprise des travaux, sauf à renoncer à l’idée même d’achever l’édifice et donc d’en révéler le type.
8Cette question du développement de l’édifice selon le plan complet d’une cathédrale gothique se retrouve avec des variantes dans d’autres exemples également représentatifs : la cathédrale de Belley où Chenavard prolonge, à partir de 1835, le chœur du Moyen Âge (construit entre la fin du xve s. et 1520, avec cinq chapelles rayonnantes) pour reconstruire nef et façade selon l’idée d’une grande cathédrale, au détriment de l’édifice médiéval roman et, semble-t-il, en mauvais état, sans cependant s’aventurer à une façade à deux tours17. À Saint-Étienne de Limoges, la nef du Moyen Âge s’est arrêtée à la troisième travée ; vers l’ouest les amorces des travées inachevées du xvie siècle butent sur les restes de l’église romane et une haute tour qui fait obstacle à tout projet de façade. Poursuivre et compléter la nef gothique fait l’objet de projets dès les années 1840, mais la question de la tour empêche l’émergence d’un parti clair. En 1849, un rapport de Viollet-le-Duc propose un compromis avec les parties romanes, dont il conseille de restaurer une travée, de manière à juxtaposer de façon pédagogique les deux expressions historiques18. Cette proposition ne sera pas suivie lors des travaux lancés tardivement, en 1876, qui prendront le parti de raccorder la nef, prolongée de trois nouvelles travées, à la tour romane par une sorte de vestibule gothique, simple élément de liaison.
9Enfin, bien sûr, Clermont-Ferrand, chantier abandonné après 1350 et projet d’achèvement conçu par Viollet-le-Duc et réalisé de 1866 à 1884, où la nef reçoit trois nouvelles travées, avec également une façade avec ses tours et ses flèches, dont il sera question un peu plus loin.
10Montpellier est un cas où il est particulièrement clair que c’est le statut de l’édifice, sa nature de cathédrale, qui commande le type d’architecture que l’édifice doit présenter et représenter. En effet, cathédrale depuis le transfert à Montpellier du siège épiscopal de Maguelonne en 1536, l’église Saint-Pierre n’avait pas été construite pour cela et n’était, à l’origine que la chapelle du collège Saint-Benoît fondé par le pape Urbain V dans la ville universitaire. À la nef unique voûtée d’ogives, bordée de chapelles et terminée d’une simple abside, construite de 1364 à 1373 – édifice que l’on peut parfaitement qualifier de « gothique méridional » –, les chanoines du xviiie siècle avaient ajouté un chœur, sous la forme d’un simple volume carré destiné à accueillir leurs stalles derrière l’autel. Cet utilitarisme de l’époque moderne ne pouvait suffire, au xixe siècle, pour représenter la fonction, le programme d’une cathédrale, d’autant plus que la nef, avec sa façade à deux tours et son porche monumental, constituait, on peut le présumer, aux yeux des contemporains, les prémices d’un édifice autrement développé. Dès 1845, l’architecte départemental, Charles Abric, proposa un projet de développement gothique, qui n’aboutit pas. Après la création du service des édifices diocésains, Henry Revoil proposa en 1853 un nouveau projet : rajouter à la nef un transept et un chevet gothique, à déambulatoire et chapelles rayonnantes. Il est curieux de constater que ce fut Viollet-le-Duc, l’un des inspecteurs généraux des édifices diocésains, qui fit réduire le projet à un chevet plus modeste, à trois absides parallèles et communicant entre elles, sans déambulatoire. Il ne se montrait pas, dans ce cas, partisan de la « cathédrale française » qu’il avait présentée dans le Dictionnaire raisonné ! On pourrait y voir un certain pragmatisme chez celui qu’on qualifie souvent d’abusif dans les restaurations, même s’il s’agit dans ce cas, semble-t-il, d’un réalisme plutôt imaginatif dans le contexte de dépenses qui ne pouvaient pas être illimitées (travaux réalisés de 1855 à 187519).
11Moulins est le cas inverse, l’ancienne collégiale des Bourbons (1448-1550), inachevée et dépourvue de façade, devenue cathédrale d’un diocèse créé en 1788, se vit adjoindre une nef et une façade, l’ancien édifice constituant le chœur du nouveau. Le projet, dressé par Lassus en 1850 et financé par une loi spéciale, prévoyait la construction d’un transept cantonné de deux chapelles et une nef de cinq travées20. On projetait ainsi le développement complet d’une cathédrale dans son plan et ses dimensions, mais de grosses difficultés techniques et financières obligèrent, à la mort de Lassus (1857), à l’abandon du transept, au grand dam de l’évêque, Mgr de Dreux-Brézé : au final, les intentions de départ se trouvèrent réduites, les deux parties ne sont pas de plain-pied et se raccordent abruptement. En outre, le style en est différent, le xiiie siècle épuré cher à Lassus et Viollet-le-Duc utilisé pour la nef contrastant avec la collégiale du xve conservée.
12Le cas de Saint-Étienne de Toulouse est le cas le plus étrange, mais qui n’est finalement pas très ambigu. Toulouse, où le chœur gothique, interrompu, vient buter sur la nef plus ancienne qui ne se trouve pas sur le même axe, est, avec Beauvais ou Narbonne – ou encore Elne, et d’autres – un des cas les plus évidents visuellement de ces « chantiers arrêtés », où l’on peut lire ou pressentir les étapes du projet de cathédrale, paralysé en cours de réalisation. Nantes, en 1835, aux yeux des promoteurs de son achèvement, comme Limoges, devait présenter un faciès semblable. D’ailleurs, Toulouse faillit bien suivre le même chemin. Un projet d’achèvement, qui, partant du chœur à déambulatoire et chapelles rayonnantes construit de 1272 à 1609, le complétait par un transept, une nef et une façade harmonique – celle-ci plutôt inspirée par la cathédrale de Reims – fut proposé par Léopold Petit en 1864, comportant l’élimination des autres parties de l’édifice. L’idée patrimoniale, cependant, et le respect dû à la nef du xiiie siècle (dont la Commission des Monuments historiques n’aurait sûrement pas accepté la disparition) ont inspiré d’autres solutions, permettant, défi peut-être irréalisable, de concilier la nef raymondine, désaxée, avec le chœur gothique. Viollet-le-Duc est, semble-t-il, l’auteur de l’idée d’un doublement du vaisseau pour réussir à raccorder les deux parties disparates de la cathédrale, dont témoigne un croquis d’Anatole de Baudot [Fig. 2]. Ce projet-là n’eut pas de suite, mais fut converti plus tard en l’idée de créer un bas-côté nord à la nef raymondine qui aurait procuré une meilleure continuité entre nef et chœur. Finalement, au xxe siècle, de ce projet il ne resta que celui d’un « faux » pignon de transept, édifié par Saint-Anne Louzier aux dépens de deux chapelles du chœur en 1938, qui aurait dû permettre son articulation en volume avec le bas-côté en question, finalement non réalisé. Ces travaux sont à signaler, car ils interviennent, dans la première moitié du xxe siècle, sous le seul label des Monuments historiques et avec une évidente violence sur l’édifice ancien, alors que le critère de la conservation s’est généralement imposé par ailleurs.
Fig. 2 : Toulouse, croquis de Viollet-le-Duc (ou d’après Viollet-le-Duc) pour l’achèvement de la cathédrale, 1860, in Olivier Poisson, « L’achèvement et la restauration des cathédrales gothiques de Languedoc et de Catalogne au xixe siècle, de Viollet-le-Duc à Gaudí », in Autour des maîtres d’œuvre de la cathédrale de Narbonne, Myriam Demore, Jean Nougaret et Olivier Poisson (éds), Narbonne, Ville de Narbonne, 1994, p. 105-120.

13Si l’on a parlé jusqu’ici du plan et du développement complet – ou tendant au complet – des cathédrales, il faut par ailleurs dire un mot des volumes et des silhouettes, en réservant les façades pour un dernier examen. Le projet pour Toulouse que l’on vient de citer est d’ailleurs autant un travail sur cette question de la silhouette de l’édifice (silhouette latérale en l’occurrence) que sur le plan. À celui-ci, dans la cathédrale gothique représentative de son type, correspond en effet un volume, qui s’articule avec des toitures à comble, des pignons, des tours secondaires : encore une fois il est possible de se reporter au fameux dessin de Viollet-le-Duc qui synthétise le type avec tous ses composants.
14Il ne fait pas de doute que le pignon du faux transept de la cathédrale de Toulouse s’inscrit dans cette logique. Revoil, à Saint-Pierre de Montpellier a tenu, lui, à articuler son chœur neuf à un transept, certes non saillant, mais dont le volume est clairement individualisé, muni au sud d’un pignon-façade comportant un portail orné de sculptures21, qui se compose avec les tours secondaires qui accompagnent l’articulation des volumes. Surtout, il projette sur le tout, y compris sur la nef gothique qui n’en avait jamais eu selon la tradition méridionale, une toiture à comble couverte en tuiles vernissées [Fig. 3]. Cette transformation de la silhouette est éclairante pour notre propos, en ce qu’elle s’écarte sans équivoque des caractères propres de l’architecture « gothique méridionale » de l’édifice de départ22. Cette attention portée au développement de la silhouette générale se retrouve également à Belley, à Moulins (au moins dans le projet, partiellement abandonné, de Lassus23), ainsi qu’à Limoges, où l’on a complété les pignons des transepts par des gâbles avant même que l’achèvement de la nef ne soit à l’ordre du jour. À la cathédrale de Clermont, bien après Viollet-le-Duc, on rêvera encore de compléter les façades des transepts et d’ériger des flèches sur les tours secondaires : un dessin de Rapine [Fig. 4] traduisant ces intentions24 est peut-être l’un de ceux qui se rapproche le plus de la vision idéale du Dictionnaire.
Fig. 3 : Henry Revoil, élévation latérale de la cathédrale de Montpellier (1853), in Olivier Poisson, « L’achèvement et la restauration des cathédrales […] », art. cit.

Fig. 4 : Henri Rapine, projet pour les flèches du transept de la cathédrale de Clermont.

© Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine, Charenton-le-Pont.
15Si le type de la cathédrale gothique française est le type par excellence de la cathédrale, il est aussi sans doute celui qui se prête le mieux à des variations ou à des déclinaisons, que l’on retrouve d’un chantier à l’autre. Mais il existe également quelques exemples concurrents, avec d’autres références de types majeurs, où l’on peut aussi toucher du doigt la nécessité pour la cathédrale, par son achèvement, de rendre présent le passé. C’est le cas d’Albi, « achevée » par César Daly et de Périgueux, « restaurée » par Abadie, qu’il est nécessaire de citer, au moins en passant, à côté des grandes nefs gothiques.
16La cathédrale d’Albi, réalisation majeure du gothique méridional, se trouvait au début du xixe siècle couverte d’une simple toiture à deux versants débordant sur les façades dont les supports étaient sommairement calés sur l’extrados des voûtes. Avec l’objectif de protéger les célèbres peintures murales de la voûte et de l’intérieur, César Daly fut chargé en 1844 d’un projet de réfection de cette couverture et il lui fut aussi demandé d’achever, en quelque sorte, les parties hautes de l’édifice jugées incomplètes25. Daly fit une analyse de la cathédrale selon laquelle il s’agissait d’un édifice fortifié, en raison de ses formes et du contexte historique de sa construction. À partir des observations faites au raccord de la nef et du clocher, il imagina qu’il aurait dû posséder une sorte de chemin de ronde de 6 m de haut, amorti par trente-deux tourelles qui prolongeaient chacun des contreforts semi-cylindriques du pourtour. Cette ceinture qui multipliait les accents verticaux cachait et protégeait un comble à deux versants couvrant les voûtes de la nef, nécessaire à la conservation du décor peint intérieur. Ce projet – qui reçut explicitement l’approbation de Viollet-le-Duc – fut en grande partie réalisé, à partir de 1850, notamment le comble et la surélévation des murs ; les tourelles furent bâties sur le chevet. Toutefois, l’étrangeté de ce parti et la silhouette qui en résultait fut combattue dès 1866 – à vrai dire, elle avait suscité réserves et craintes dès l’origine – et les travaux interrompus vers cette date. Daly démissionna en 1879. Après sa mort (1894), on abattit les huit tourelles déjà réalisées, sauf une, pour revenir à une image plus neutre, mais la surélévation est restée, donnant à l’édifice des proportions qu’il n’avait jamais eu jusque-là26.
17En ce qui concerne Périgueux, l’église Saint-Front (qui n’était pas la cathédrale sous l’Ancien Régime) se trouvait couverte, au début du xixe siècle, par un comble en ardoise de l’époque moderne27. Chargé de restaurer l’édifice, Paul Abadie le reconstruisit en quasi-totalité – c’est le cas d’école que tous ceux qui étudient la restauration connaissent – et adopta pour sa silhouette le parti d’exprimer en toiture chacune des cinq coupoles, en les sommant d’un lanternon dont la forme était dérivée de l’amortissement du grand clocher roman. En faisant cela, il ne faisait que revenir, semble-t-il, à l’état de la silhouette de l’édifice qui prévalait avant les travaux du xviiie siècle. Mais il multiplia ce principe de façon systématique en ajoutant des clochetons du même type sur les amortissements des massifs porteurs et des angles de l’édifice. Le type d’un édifice roman n’était évidemment pas aussi clairement défini par la théorie architecturale que celui d’un grand édifice gothique. C’est sans doute pour cela que ces deux propositions, à Albi comme à Périgueux, ont cherché dans l’analyse du monument lui-même de quoi en définir le « type », et qu’ils ont tous les deux choisi de proposer, pour le révéler en quelque sorte, que les superstructures dussent procéder des infrastructures, que la silhouette dût refléter « rationnellement » les composantes en volume ou les appuis de l’édifice. Principe que Viollet-le-Duc lui-même devait d’ailleurs suivre à Saint-Sernin de Toulouse et qui nécessiterait certainement une étude plus approfondie, mais celle-ci sort du cadre de notre propos ici.
18Pour terminer, le dernier aspect que nous voudrions aborder de ce grand « chantier des cathédrales » est celui des façades. Dans le type de la cathédrale gothique, la façade dite harmonique à deux tours amorties de flèches est un élément nécessaire, déterminant. Elle est aussi un signal urbain, marqueur du territoire à une plus grande échelle et devient, en définitive, un des signes essentiels de l’identité de l’architecture des cathédrales françaises et, partant, de l’identité nationale elle-même : au-delà des significations théologiques qu’en donnaient certains penseurs du Moyen Âge, comme Vincent de Beauvais, connues sans doute des érudits, c’est, il nous semble, l’expérience sensible partagée dans la société, qui se renouvelle au début du xixe siècle en France par une production et une diffusion sans précédent des images, qui impose ce schéma comme prédominant. Aux yeux du xixe siècle, c’est un des marqueurs de la validité du témoignage que les cathédrales peuvent donner du passé dans le paysage du présent. En 1840, nous l’avons vu, la construction de la façade de Saint-Ouen de Rouen apparaissait comme un objectif patrimonial de premier plan, alors que l’achèvement très discret et réduit (sans véritable façade) de l’ancienne cathédrale de Narbonne, par le jeune Viollet-le-Duc, ne fut pas pris en considération. On pourrait citer, d’ailleurs, la liste n’est pas exhaustive, les cathédrales qui, sans être du type de la cathédrale gothique française, ont vu rétablir la symétrie de leur façade à deux tours : ainsi Montpellier, dès 1844 (avant donc le projet de Revoil) ou encore Saint-Flour28 (dès 1826-1830), il y en a peut-être d’autres29. Symétrie encore, la flèche sud de la cathédrale de Sées30, est reconstruite sur le modèle de celle du nord en 1848. Jean-Baptiste Lassus, chargé de développer, comme on l’a déjà vu, la nouvelle cathédrale de Moulins en lui construisant une nef, lui donna une façade harmonique à deux tours sommées de flèches, exercice qu’il conduisit aussi dans la construction ex nihilo d’une autre église de la même ville, le Sacré-Cœur (1851-1864)31 et que son successeur pour les travaux de la cathédrale conservera, malgré la réduction sensible du projet. Eugène Viollet-le-Duc, tenu en échec sur son projet de façade pour Saint-Denis (après la démolition contrainte de la tour nord) a eu, finalement, la satisfaction de pouvoir lui-même élever en partie une cathédrale et sa façade, en achevant Notre-Dame de Clermont, projet qui lui fut commandé en 1855, mais qui ne devait être entrepris que dix ans plus tard (1866) et achevé après sa mort par Anatole de Baudot (couronnement des flèches en 1884). À Clermont, la cathédrale gothique entreprise en 1248 avait prospéré pendant cent ans, mais s’était interrompue et les trois travées de nef seules construites butaient sur les restes de la façade romane – c’était encore une image d’un chantier médiéval paralysé –, abattus en 1851. Viollet-le-Duc a élevé à la suite deux autres travées de nef et un narthex, avec une façade harmonique élégante, rythmée, très archéologique dans son vocabulaire du xiiie siècle. Il n’y a qu’un seul portail, par raison d’économie et en partie à cause de la topographie du site, alors que la cathédrale française devrait en comporter trois : il est clair que l’enjeu majeur est ici la skyline, de l’édifice comme de la ville [Fig. 5], qui en sort transformée32. Il n’est pas fréquent pour un architecte de pouvoir ainsi marquer un large territoire d’un signe majeur, à l’instar, par exemple, de Petitgrand au Mont-Saint-Michel (189733). Un autre travail du même ordre sur une façade de cathédrale est le chantier entrepris à Bayonne par Émile Bœswillwald34 : ayant déjà remanié le bas-côté sud de la cathédrale des xiiie-xive siècles en le dotant de chapelles au détriment du cloître, l’architecte érigea une flèche sur la tour sud du xve siècle et construisit a fundamentis la tour nord, qu’il surmonta pareillement d’une flèche (1873). Des moyens considérables (legs d’un banquier bayonnais au diocèse) ont permis ces travaux. Dans la même veine, les flèches de la cathédrale de Quimper, pour compléter la silhouette de l’édifice, furent un projet de pur « achèvement » d’une image architecturale reconnaissable de loin. Le projet – précoce – de l’architecte Joseph Bigot fut dans ce cas aussi porté par le diocèse, sans financement de l’État. Les flèches de Quimper, cantonnées de gâbles et de clochetons, sont construites de 1854 à 185635. Elles seront saluées par les contemporains.
Fig. 5 : Clermont-Ferrand, cathédrale, vue actuelle.

© Cliché Olivier Poisson
19La façade occidentale, d’autre part, dans la cathédrale française type, est aussi l’accès majeur de l’édifice. Ce n’était pas toujours le cas au Moyen Âge, particulièrement dans le Midi : assez caractéristique est le cas de la cathédrale de Mende, qui ne comportait à l’origine que deux portails, au nord et au sud du transept. Le dégagement urbain de l’édifice au xixe siècle, mettant en valeur le beau développement du massif occidental muni de deux tours sommées de flèches (dues au mécénat de l’évêque Francesco Della Rovere et construites de 1508 à 1512), induisit alors la nécessité de transformer ce massif occidental en façade, ce qu’il n’avait jamais été, en perçant le mur occidental d’un portail et en réalisant un porche d’entrée, peu avant 190536. De semblables intentions ont existé, semble-t-il, pour Rodez37 dont la majestueuse façade occidentale n’a jamais été le cadre d’un accès.
20Au terme de cet examen, même si les opérations que l’on peut qualifier « d’achèvements » des cathédrales françaises au xixe siècle ou, s’il ne s’agissait pas stricto sensu d’achèvements, d’interventions d’ampleur sur la forme et le développement des édifices n’ont été ni particulièrement nombreuses (guère plus d’une dizaine, sur quatre-vingt-six édifices appartenant à l’État) ni toujours ambitieuses, on peut se rendre compte aisément, comme proposé au début de cet article, que toutes ces interventions, que la conservation ne justifiait presque jamais, eurent pour objet, en achevant, complétant ou modifiant significativement l’édifice, d’en révéler le type, cet idéal de « cathédrale française » gothique qui les résume tous, mais qu’aucun ne reflète complètement.
21Véritable inconscient architectural, il a la puissance de rendre manifeste la fonction de la cathédrale et sa place dans la hiérarchie des représentations de son époque, le xixe siècle, comme de l’enraciner dans un passé qui la définit et dont la persistance permet de restaurer, au sens propre, l’actualité et la valeur de son architecture dans le présent.
Notes de bas de page
1« Restauration : le mot et la chose sont modernes. Restaurer un édifice ce n’est pas l’entretenir, le réparer ou le refaire, c’est le rétablir dans un état complet qui peut n’avoir jamais existé à un moment donné ». Eugène Viollet-Le-Duc, Dictionnaire raisonné de l’architecture française du xie au xvie siècle, Paris, Éditions Bance-Morel, 1854-1868, t. 8, p. 14.
2Ici, il faut signaler une certaine divergence entre les intentions ou projets de la Commission des Monuments historiques sous l’impulsion de Mérimée, dont le but est certainement la conservation des monuments (avec toutes les limitations imposées par les moyens techniques de l’époque) et les ambitions des architectes restaurateurs, qui ne se limitent d’ailleurs pas à Viollet-le-Duc, avec d’ailleurs bien des nuances. Les orientations de Mérimée ou d’autres archéologues pour la conservation des monuments n’entrent pas dans le propos de cet article.
3Olivier Poisson, « Sens d’une restauration », in Viollet-le-Duc, [re]lectures d’un palais, catalogue d’exposition, Sens, Musées de Sens, 2014, p. 22-30.
4Une autre approche de ce sujet, avec quelques nuances : Olivier Poisson, « L’achèvement et la restauration des cathédrales gothiques de Languedoc et de Catalogne au xixe siècle, de Viollet-le-Duc à Gaudí », in Autour des maîtres d’œuvre de la cathédrale de Narbonne, Myriam Demore, Jean Nougaret et Olivier Poisson (éds), Narbonne, Ville de Narbonne, 1994, p. 105-120. Voir également Jean-Michel Leniaud, « L’achèvement des cathédrales ou la construction des lieux de mémoire », Monumental, no 1, 2010, p. 34-37. Olivier Poisson, « L’achèvement des édifices », Monumental, no 1, 2010, p. 30-33.
5Louis Réau, Cologne, Paris, Henri Laurens, 1908, p. 64-67 ; Arnold Wolff et Toni Diederich, Das Kölner Dom, Cologne, Verlag Kölner dom, 1990, p. 41-63.
6Giacomo-C. Bascapè et Paolo Mezzanotte, Il Duomo di Milano, Milan, Bramante, 1965, p. 46-52. Antonio Cassi Ramelli (éd.), Luca Beltrami e il duomo di Milano, scritti 1881-1914, Milan, Ceschina, 1964, 489 p.
7Carlo Cresti, Mauro Cozzi et Gabriella Carapelli, Il Duomo di Firenze, 1822-1887, L’Avventura della facciata, Firenze, Il Bossolo, 1987, 302 p. Francesco Gurrieri, Gianlucca Belli, et alii, La Cattedrale di Santa Maria del Fiore a Firenze, Florence, Giunti, 1994, p. 215-253.
8Olivier Poisson, « L’achèvement et la restauration […] », art. cit., p. 111-112.
9Jean-Charles Moreux, « Les places de cathédrales et leurs abords », L’Architecture française, no 21-22, juillet-août 1942, p. 1-50 [Reproduit dans Monumental, no 1, 2009, p. 32-82, dossier « La cathédrale dans la ville »].
10Rappelons que Viollet-le-Duc considérait les cathédrales comme des édifices « à la fois religieux et civils » : Dictionnaire raisonné, s.v. cathédrale, t. II, p. 280-281, p. 298 ; il termine l’article « Cathédrale » par une note en forme de postface, avec ces mots : « des monuments où tout est méthodique, raisonné, clair, ordonné et précis ; où tout a sa place marquée d’avance, et retrace l’histoire morale de l’homme, les efforts persévérants de son intelligence contre la force matérielle et la barbarie, ses épreuves, et son dernier refuge dans un monde meilleur. » ; voir aussi Histoire d’un hôtel de ville et d’une cathédrale, Paris, Hetzel, 1878.
11Françoise Bercé, Les premiers travaux de la Commission des Monuments historiques 1837-1848, Paris, Picard, 1979, p. 137. La solution retenue, au bout de cinq projets, fut en définitive celle qui s’écartait le plus de l’œuvre inachevé, dont les parties amorcées furent rasées.
12Élisabeth Williams, « Le premier projet de restauration de Viollet-le-Duc », Les Monuments historiques de la France, no 3, 1973, p. 48-61. Olivier Poisson, « L’achèvement et la restauration […] », art. cit., p. 111-112.
13Plus exactement, contrairement à la position adoptée pour Saint-Ouen de Rouen, la Commission des Monuments historiques refusera de financer ce qui dans le projet concernait l’achèvement ; elle n’accorda qu’une petite somme pour l’entretien de la partie ancienne : Françoise Bercé, Les premiers travaux […], op. cit., p. 44, 64.
14Reconstruction de la flèche en 1894 : Jean-Pierre Roze, Saint-Bénigne de Dijon depuis la Révolution, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2015, p. 142-145.
15Viollet-Le-Duc, Dictionnaire raisonné […], op. cit., t. II, p. 323-324 : « une idée de ce que devait être une cathédrale du xiiie siècle, complète, achevée telle qu’elle avait été conçue ».
16Jean-Michel Leniaud, Les cathédrales au xixe siècle, Paris, CNMHS/Economica, 1993, p. 384-413 ; « L’achèvement de la cathédrale », in Nantes, Paris, La Nuée bleue, coll. « La Grâce d’une cathédrale », 2013, p. 87-110.
17Paul Cattin et Jacques Paul-Dubreuil, « La cathédrale Saint-Jean-Baptiste de Belley », in Cathédrales de Rhône-Alpes, Art et Archéologie en Rhône-Alpes / Cahiers René de Lucinge, no spécial 4, 1988, p. 25-31.
18Thierry Soulard et al., L’achèvement de la cathédrale de Limoges au xixe siècle, catalogue d’exposition, Limoges, DRAC, 1988, p. 45-46. Viollet-le-Duc a reproduit dans le Dictionnaire raisonné, t. II, p. 374, la solution qu’il avait préconisée.
19Jean Nougaret, Montpellier monumental, Paris, Éditions du Patrimoine, 2005, 2 vol., p. 334 et suiv.
20Jean-Michel Leniaud, Jean-Baptiste Lassus ou le temps retrouvé des cathédrales, Paris, Arts et Métiers graphiques, 1980, p. 140-144.
21Réalisées ou dirigées par Auguste Baussan : Jean Nougaret, Montpellier […], op. cit., 2005, p. 340.
22Revoil mentionne, en 1853, le modèle fourni par Saint-Ouen de Rouen pour son projet : Jean Nougaret, Montpellier […], op. cit., 2005, p. 338.
23Dans ce projet (reproduit dans Leniaud, 1980, pl. XLIX) les pignons du transept, affirmés, partagent également l’élévation latérale de l’édifice, dont la silhouette est unifiée, avec une flèche à la croisée. Le contraste est grand avec le projet de Millet finalement réalisé, où les deux parties de l’édifice, nef et chœur, n’ont ni la même altitude ni le même profil de comble.
24Charenton-le-Pont, Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine.
25Viollet-le-Duc, dans un rapport de 1843, postulait l’église inachevée pour ses parties hautes. Jean Laran, La cathédrale d’Albi, Paris, Henri Laurens, coll. « Petites monographies des grands édifices de la France », s.d. [1912], 116 p. Jean-Louis Biget, « La cathédrale Sainte-Cécile d’Albi, l’architecture », in Congrès archéologique de France, 140e session [1982] : L’Albigeois, Paris, Société française d’Archéologie, 1985, p. 20-62. Jean-Louis Biget, « Les ambitieuses transformations du xixe siècle », in Albi, joyau du Languedoc, Paris, La Nuée bleue, coll. « La Grâce d’une cathédrale », 2015, p. 120.
26La surélévation est d’environ un quart de l’élévation antérieure, comptée depuis la base des contreforts.
27Construit en 1760-1764 : Joseph Roux, La basilique Saint-Front de Périgueux, Périgueux, Cassard, 1920, p. 191.
28Siège épiscopal concordataire du Cantal, dont la préfecture est à Aurillac.
29L’ancienne cathédrale de Chalon-sur-Saône, qui n’est pas un siège concordataire, voit ses tours de façade entièrement reconstruites par Chenavard en « gothique flamboyant » avant 1850 (projet 1828).
30Siège épiscopal concordataire de l’Orne, dont la préfecture est à Alençon.
31Jean-Michel Leniaud, Jean-Baptiste Lassus […], op. cit., p. 137-140.
32Mentionnons aussi le projet (refusé) de Marmotte, pour Besançon, en 1844, de substituer l’abside du Saint-Suaire par une façade harmonique (Jean-Michel Leniaud, Les cathédrales au xixe siècle […], op. cit., p. 497), ainsi que celui, non réalisé, de doter d’une flèche la tour de la cathédrale de Limoges (Thierry Soulard et al., L’achèvement de la cathédrale […], op. cit., p. 60).
33Catalogue d’exposition : L’Archange, la flèche, abbaye du Mont-Saint-Michel mai-octobre 1987, Paris, Caisse nationale des Monuments historiques et des Sites, 1987, 160 p.
34Claude Labat, Bayonne la cathédrale au cœur de la cité, Bayonne, Lauburu, 1992, 68 p.
35Philippe Bonnet, Quimper, la cathédrale, Paris, Zodiaque, 2003, p. 60-64.
36Nelly Lafont et Samuel Drapeau (dir.), La cathédrale de Mende, commanditaires et bâtisseurs (colloque de Mende, 18-20 octobre 2012), Paris, Somogy-Éditions d’art, 2017, p. 174-185 (iconographie).
37Olivier Poisson, « L’achèvement et la restauration […] », art. cit., p. 116.
Auteur
Olivier Poisson est architecte et historien de l’art, ancien Inspecteur général des Monuments historiques. Historien des restaurations et des doctrines sur le patrimoine, il a publié de nombreux articles sur ce sujet, ainsi qu’une biographie de l’architecte Eugène Viollet-le-Duc (2014, en collaboration). Il a enseigné cette matière à diverses reprises dans des universités françaises et étrangères et est chargé de cours à l’École de Chaillot.
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