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    Plan détaillé Texte intégral Le style Maury : un prédicateur pragmatique attaché à convaincre Les arguments du représentant Maury Notes de bas de page Auteur

    De la parole du prédicateur au discours politique

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Un prédicateur à l’assemblée : la parole de l’abbé Maury lors des débats de la Constituante

    Emmanuel Ravestein

    p. 199-218

    Résumés

    L’abbé Maury est une figure singulière de la Révolution française. D’origine modeste et provinciale, son talent oratoire l’amène jusqu’à Paris où il devient prédicateur du roi. S’il incite le monarque à la réforme, n’hésitant pas à utiliser des arguments issus de la « raison », c’est durant la Révolution que son talent le pousse plus que jamais dans l’arène politique. Élu représentant du clergé par le bailliage de Péronne, il met son art oratoire au service de la défense des institutions qui l’ont élevé à sa dignité lors de la Constituante. Chef de file des Noirs, son argumentation repose en large partie sur des considérations pratiques et juridiques plutôt que sur des justifications religieuses, en faisant un député audible auprès des autres représentants. C’est là le cœur de cette étude : apprécier dans ses discours devant l’Assemblée constituante, les différentes catégories d’arguments qu’il emploie pour convaincre. Pour ce faire, nous avons exploité une grande quantité d’archives grâce au logiciel Iramuteq afin de définir les mondes lexicaux qui peuplent son art oratoire.

    Father Maury is a singular figure in the French Revolution. The son of a modest artisan, his oratorical talent brought him to Paris where he became the king’s preacher. If he incited the monarch to reform, not hesitating to use arguments stemming from “reason,” it was during the Revolution that his talent pushed him more than ever into the political arena. Elected representative of the clergy by the bailiwick of Péronne, he used his talent to defend the institutions of the former regime. Leader of the Noirs Party, his argument remained for the most part based on practical and legal considerations rather than religious justifications, making him an audible deputy in a reformist assembly. At the heart of this paper: define in his speeches the different categories of arguments he used to convince. To do this, we exploit a large amount of archival sources using Iramuteq software to define the lexical fields he used.

    Entrées d’index

    Mots-clés : discours politique, Assemblée nationale constituante, Maury (Jean-Sifrein ), France, Paris, Révolution française, xviiie siècle

    Keywords : political discourse, National Constituent Assembly, Maury (Jean-Sifrein ), France, Paris, French Revolution, 18th century

    Texte intégral Le style Maury : un prédicateur pragmatique attaché à convaincre Les arguments du représentant Maury L’abbé Maury et les arguments profanes La place de la religion dans les discours de l’abbé Maury Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Parler d’un prédicateur en politique n’est jamais chose aisée. Une telle démarche semble même être un « oxymore » quand on lit l’évangile de Luc qui pose la séparation du pouvoir temporel et spirituel1 comme l’un des dogmes fondateurs de l’Église chrétienne. Pourtant il est des cas où la force des événements amène le prédicateur de sa chaire ecclésiale à celle du politicien et, sans nul doute, la Révolution est de celle-ci. Le serment du jeu de Paume et la constitution de l’Assemblée nationale inscrivaient mécaniquement les représentants ecclésiastiques dans le jeu politique qui présiderait au destin de la France dans une assemblée politique nationale. Au milieu de ses 1200 députés, dont 291 membres du Clergé, un prédicateur usa et abusa de sa verve pour défendre la cause de l’Église et de la monarchie : l’abbé Maury.

    2Adversaire féroce de Mirabeau, il s’impose par un style épuré de toutes diatribes religieuses, jouant pour partie le jeu de la Révolution, afin de tenter de réduire l’ambition de la réforme et préserver le trône. Les arguments du représentant du bailliage de Péronne sont ceux de la raison, du droit, de l’histoire. Ce n’est qu’acculé par la résistance opiniâtre d’une assemblée prête à tout pour transformer le royaume en nation, qu’au détour d’une opinion l’abbé se dévoile sous l’orateur et tente, par la morale religieuse, d’infléchir les autres députés de l’Assemblée nationale. Ces quelques mots d’introduction auront aisément éclairé sur l’ambition de cette étude : comprendre dans l’activité politique de l’abbé Maury la place du prédicateur, aussi bien dans la teneur de ses discours que dans la construction de ses opinions.

    3Pour ce faire, il est important de comprendre qui est l’abbé Maury et comment il se place par rapport aux idées de la Révolution avant la constitution de l’Assemblée nationale constituante. De fait, l’accroissement de son rôle au sein du parti des Noirs au fil de la législature l’oblige à flatter une aile droite de plus en plus hostile à toute réforme. Pour autant, son style éprouvé par la prédication se concentre, contrairement à celui de ses partisans, sur des arguments tirés de la raison et d’une grande culture, lui permettant de structurer une pensée cohérente avec les enjeux de la Révolution durant les débats.

    4Afin d’analyser au mieux sa pensée et ses discours, nous nous sommes employés à dépouiller les centaines de pages de discours de l’abbé durant les séances parlementaires pour les mettre en perspective avec son approche de la prédication2. Dans cette optique, nous avons transformé ces discours en données exploitables par des algorithmes d’analyse lexicométrique (comme la méthode de classification décrite par Max Reinert) grâce au logiciel IramuteQ3.

    5Mais avant de nous pencher sur les mots, il nous semble important de nous attarder sur l’homme qui les portera face à la représentation nationale.

    6Il n’est nullement question de faire ici sa biographie complète. D’autres auteurs ont eu le loisir de s’en charger. Il s’agit plutôt de comprendre quelles sont la place et la personnalité de l’abbé à l’aube de la Révolution et quels sont les sentiments qui l’animent pour défendre le côté droit de l’Assemblée.

    7Né le 28 juin 1746, Jean Siffrein Maury est originaire de Valréas, dans le Comtat Venaissin qui formera plus tard l’essentiel du département du Vaucluse contre lequel le futur abbé s’élèvera avec passion. D’origine modeste, fils de savatier, il fréquente le petit séminaire à Avignon puis s’expatrie à Paris après la fin de son cours de théologie en 1765 afin d’y chercher fortune. Ordonné prêtre à Sens en 1769, il fait connaître son talent oratoire à l’occasion du concours de l’Académie française pour l’éloge de Fénelon en 1771. Bien qu’il n’eût qu’un accessit, sa prestation fut remarquée et l’évêque de Lombez, petit-neveu de Fénelon, le prend sous sa protection. En 1775 son panégyrique sur saint Augustin installe définitivement sa réputation et il est fait prédicateur du roi en 1777. Son ambition le mène à vouloir revendiquer la mitre d’évêque en 1781 avec l’appui du souverain, sans succès : ses origines modestes ne lui permettent pas de prétendre à un tel honneur4. En 1785 il rentre à l’Académie française dont il avait repoussé le fauteuil pour tenter d’obtenir l’évêché. Mais en 1786, ses maladresses lors de l’éloge funèbre pour le duc d’Orléans, où il rudoya le fils du défunt, mettent un frein subit à son ascension de prédicateur jusqu’à la Révolution5.

    8Pour autant, son talent n’est pas oublié, et c’est dans les interstices de la politique qu’il va se plonger pour conforter son ascension. Lamoignon devenant garde des Sceaux en 1787, l’abbé est invité à participer à l’action du ministère, notamment pour lutter contre le Parlement de Paris qui se met en travers des tentatives de réforme royales. La volonté d’étendre l’imposition à l’ensemble des ordres, clergé et monarque compris, pour renflouer les caisses de l’État, est son cheval de bataille, qu’il retrouvera à l’Assemblée lorsqu’il s’agira de combattre l’accaparement des biens de l’Église6. Mais la réforme ne prend pas, et les États généraux sont convoqués. Il est élu représentant du bailliage de Péronne, Roye et Montdidier pour porter la voix du Clergé aux États généraux.

    9Ces quelques éléments de l’histoire personnelle de l’abbé Maury nous renseignent sur sa personnalité et nous font noter qu’il n’est pas un prédicateur comme les autres. C’est avant tout un orateur professionnel qui voit dans son office à la chaire un moyen de satisfaire ses ambitions. Si l’on ne peut contester sa vocation sacerdotale, celle d’orateur l’emporte sur toute autre considération : son entrée au service du ministre en atteste. Il cherche du côté du pouvoir temporel le moyen de s’élever à quelques dignités grâce à son talent. Dès lors, sa position de défenseur de la monarchie et de l’aristocratie, malgré sa basse extraction, pourrait s’expliquer aisément : il espère trouver dans la bataille qui s’annonce les moyens d’assouvir son désir de reconnaissance et peut être d’obtenir quelques gratifications.

    10Certains auteurs lui prêtent des velléités plus égoïstes et moins ambitieuses comme la défense de ses rentes et de ses titres qu’il tire de ses charges7. Mais la réunion des États généraux ne présage en rien de la Révolution qui surviendra et il n’est pas fondamentalement opposé à une imposition du clergé comme son passage au ministère de Lamoignon le rappelle. D’autres lui déterminent l’ambition du cardinalat comme principal intérêt à se livrer à l’arène politique. N’aurait-il pas dit : « Je périrai dans la Révolution ou en la combattant, je gagnerai le chapeau de Cardinal8 » ? Sa défense du Comtat Venaissin durant la Révolution puis son ralliement à Napoléon en 1806 qui lui offrit l’archevêché de Paris en 1810, malgré l’opposition du pape Pie VII, accrédite cette thèse. Mais ce serait là un jugement qu’il ne nous appartient pas de faire ici.

    11Assurément, l’abbé Maury souhaite obtenir quelque chose de cette Révolution. Pour autant, son action à la Constituante ne doit pas être appréciée uniquement comme de l’opportunisme ou l’ultime résistance d’un monde qui pressent sa propre disparition. Il faut distinguer l’homme et ses motivations bassement matérielles du député qui se lance à la tribune pour défendre des idées.

    12Car si l’abbé Maury est un prédicateur prêt à tout pour convaincre dans la poursuite de cet objectif, il préfère employer des arguments issus de la raison plus à même de convaincre son auditoire, résolument hostile à l’Église et à son discours.

    Le style Maury : un prédicateur pragmatique attaché à convaincre

    13Lorsque l’on s’attache au style de l’abbé Maury à l’Assemblée constituante, on constate que le prédicateur ne semble guère éloigné de l’orateur politique. Pourtant, les deux exercices ne pourraient pas être plus éloignés. Le premier prêche au nom de Dieu quand le second plaide pour un parti. Le sermon est longuement préparé et réfléchi, le discours est prompt et improvisé, le prédicateur n’a pas de contradicteur, le représentant de la nation en a des centaines. Pour comprendre son raisonnement atypique qui fait de sa formation ecclésiale un véritable atout dans l’hémicycle, il faut envisager l’abbé Maury comme un prédicateur « mercenaire », au service d’un but et non d’une cause. Cette caractérisation quelque peu cavalière transparaît dans sa perception du rôle du prédicateur qu’il définira en 1777 dans son ouvrage Principes d’éloquence pour la chaire et le barreau9, et détermine en partie la perception qu’il a du peuple et du rôle qu’il lui dévolue.

    14Pour l’abbé Maury, prédicateur et orateur se confondent : ils pratiquent tous deux l’art de convaincre, même s’il affirme la supériorité du premier sur le second. C’est pour cette raison que la morale chrétienne, la religion et les Écritures saintes ne sont présentées que comme des moyens pour aboutir à un objectif final : convaincre et être entendu. La cause s’efface devant le but10.

    15Cette approche quelque peu cynique de son devoir entre en résonnance avec sa définition du modèle à suivre par les « orateurs chrétiens » qui s’éloigne de celui véhiculé par des auteurs comme Bossuet qui, suivant saint Paul, considérait que ce n’était point la parole du prédicateur que l’on devait entendre dans la chaire, mais celle de Jésus-Christ11. Il dépeint son modèle comme un homme compatissant qui doit s’attendrir pour émouvoir afin de convaincre son auditoire, pour le détromper de ses mauvais choix12.

    16Cette dimension paternaliste du devoir du prédicateur et de l’éloquence, du berger cherchant à ramener la brebis égarée auprès du troupeau dont il serait le gardien, explique en partie son activité à la Constituante qui s’inscrit en contrepoint des réformes. Il s’exprime ainsi avec la suffisance du sachant, qu’il formule en rappelant la simplicité du débat (sous-entendant qu’avant son intervention, les orateurs l’on rendu complexe) et en énonçant les questions auxquelles il appartient de répondre13 pour que la « vérité » et la « justice14 » se manifestent à l’assemblée.

    17Cette approche a pu le caractériser comme un simple opposant à toutes velléités de réforme, et assurément il est un monarchiste conservateur, ce qui ne le destine pas à supporter une transformation radicale de la société d’Ancien Régime. Toutefois, s’il ne prend quasiment jamais l’initiative de promouvoir le changement, il n’y est pas opposé : tout dépend de l’objet du débat. Pour ceux où ses divergences d’opinions se limitent au périmètre ou aux modalités d’application, il soumet des contre-propositions ou des amendements au vote de l’Assemblée15. En revanche, aux projets de loi pour lesquels il entretient des désaccords de principe, en raison soit de leur radicalité, soit de l’impact sur son ordre, il ne présente à l’assemblée qu’une opposition sans concession. C’est le cas pour des débats emblématiques comme la saisie des biens du Clergé, sa constitution civile, les assignats ou encore l’annexion du Comtat Venaissin.

    18En dehors de ces cas précis, ses interventions en contrepoint des propositions des préopinants correspondent à son style oratoire16. Les auteurs qu’il cite à l’appui de son ouvrage confortent cette hypothèse. Si certains prédicateurs célèbres comme Bossuet ont son admiration, les orateurs antiques à l’image de Cicéron figurent parmi ses modèles. Il n’hésite pas ainsi à considérer que les prédicateurs se doivent d’établir le plan de leur discours suivant celui employé par Cicéron lorsqu’il défend Archias ou Milon :

    Voici comment vous devez raisonner : ou il faut nier le fait que l’on vous oppose, ou, si vous l’avouez il faut prouver qu’il n’en résulte point les conséquences que votre adversaire en déduit17.

    19Pour l’abbé Maury « plus on approche de la méthode de Cicéron, plus on approche de la perfection ». Cet intérêt pour la plaide de l’auteur antique explique la construction de sa rhétorique à la Constituante : elle se construit en partie sur les propos de ses contradicteurs, à l’image de l’avocat romain.

    20Le discours tenu à l’assemblée du 3 septembre 1789 où les Constituants débattent du droit de veto en est un bon exemple. Intervenant en dernier, dès les premiers instants de son discours, l’abbé Maury pose les enjeux du droit de veto : il s’agit d’octroyer au roi le pouvoir de « suspendre les actes » du pouvoir législatif. Poursuivant son propos, il précise « que ce n’est pas la cause du roi qu’il défend », mais c’est celle de l’assemblée et qu’il est dans l’intérêt de tous que « le veto absolu soit laissé au roi18 ». Cet aveu tranche avec les circonvolutions de certains députés comme Goupil de Prefein qui, peu auparavant, préfère parler de la « sanction royale » comme d’une simple confirmation de l’Assemblée nationale19. La question du veto n’est toutefois pas sérieusement contestée par l’assemblée, et Alexandre de Lameth de rappeler qu’elle est majoritairement demandée par les commettants : c’est son étendue qui fait l’objet de nombreuses discussions. La peur d’un veto absolu du roi qui paralyserait l’Assemblée nationale contrecarrant ainsi la volonté générale pousse les constituants à trouver des alternatives pour limiter la « sanction du roi » afin de permettre à la nation de l’outrepasser si elle s’avérait négative.

    21L’abbé Maury va donc tenter à l’image de Cicéron de relativiser les conséquences d’un veto absolu énoncé par les préopinants, tout en égrenant les conséquences fâcheuses d’un simple veto suspensif. Ainsi, si le roi devait user de son veto, ce ne serait qu’aux cas extrêmes, car il est de son intérêt de se « confondre avec le peuple ». S’il devait en abuser, l’histoire rappelle que « toutes les fois que le roi a abusé de puissance il l’a perdue ». De même, il ne faut pas craindre les ministres, Richelieu lui-même eût étouffé son génie despotique devant une assemblée aussi solennelle. Si ses arguments et parfois ses illustrations par des exemples européens tels que la Hollande, la Suède ou l’Angleterre sont contestables, son raisonnement a contrario sur l’absence de veto est bien plus pertinent.

    22Reprenant à son compte l’idée de contre-pouvoir qui nourrit intrinsèquement la séparation des pouvoirs propre à la démocratie, le veto est présenté comme le moyen d’assurer une « émulation de concours » qui assure le « bonheur du peuple ». Le veto affirmerait ainsi l’effectivité du pouvoir royal face à l’assemblée, obligeant les deux institutions à se concerter pour trouver une solution si une divergence survenait ou que l’un ou l’autre des pouvoirs abusait de ses prérogatives. Ironie du discours, le roi est présenté comme le garant de la liberté des citoyens face au despotisme d’une assemblée.

    23Son discours se termine par une proposition d’articles constitutionnels pour établir le veto absolu du roi, sans motivation. L’abbé Maury n’aura pas gain de cause et la solution trouvée par l’Assemblée constituante est le reflet de ces tentatives de conciliation entre les différents bancs de l’assemblée : le veto sera suspensif durant deux législatures soit quatre années consécutives, mais ne pourra porter sur la loi de finances ou une loi constitutionnelle.

    24Cette méthode qui tend à reléguer son rôle de prédicateur au profit de celui d’orateur implique de délaisser une partie de la rhétorique chrétienne et de se fonder sur des arguments de la raison.

    Les arguments du représentant Maury

    25L’étude grâce à IramuteQ permet d’explorer les mondes lexicaux des discours du représentant Maury et le constat semble sans appel : le prédicateur a disparu au profit du représentant du bailliage de Péronne. Cependant, si les arguments religieux n’articulent pas sa pensée, ils se glissent dans le style du discours pour donner une connotation morale à ses idées ou pour donner de l’emphase à son discours.

    L’abbé Maury et les arguments profanes

    26L’abbé Maury est souvent dépeint durant la période révolutionnaire comme un représentant du parti de la monarchie absolue, le champion des Noirs, rétif à toute tentative de réforme, purement intéressé, voyant dans la tribune de l’assemblée une fin bien plus qu’un moyen : flatter ses talents d’orateurs20. On ne lui connaîtrait aucune véritable colonne vertébrale idéologique et ses idées politiques semblent à la fois floues et vagabondes. Le professeur Paul H. Beik a toutefois démontré qu’il y a chez Maury des « poncifs » en matière sociale avec la suppression des disparités de traitement fondées sur l’ordre social ou une réforme des lois fondamentales au profit d’une monarchie constitutionnelle21. Si le monarque est au centre de sa pensée, sa vision fédérale du royaume dépouillant le souverain d’une partie de son pouvoir au profit d’assemblées provinciales semble mal s’accommoder à sa réputation de monarchiste absolu. De même, son soutien au prêt à temps et à intérêt dénote avec la position de l’Église sur ce sujet22.

    27Plus sûrement, son statut de figure de proue de l’aile droite de l’assemblée l’oblige à progresser sur une fine ligne de crête entre les réformateurs timides et les plus virulents opposants à tout changement sociétal. Il adopte donc le parti d’une « révolution23 » tout en contestant les tentatives de transformation profonde en les caractérisant comme des excès de la Révolution ou des excès de pouvoir de l’Assemblée nationale. Ses discours sont soutenus par des arguments issus de la « raison », bien plus matériels que spirituels. Un point commun à de nombreux discours est l’usage des références historiques séculières, soit pour exalter un passé « idéal », soit pour justifier une position ou une possession. Lors des débats sur les assignats, il rappelle le système de Law qui n’eut pas les effets escomptés24, quand il parle des émigrés, il rappelle les travers des persécutions orchestrées par Louis XIV contre les protestants25. Ce rappel constant à l’histoire trouve sa racine dans le terme « régénération » qui envahit les discours des réformateurs. Pour ces derniers, la « régénération » du royaume n’est pas celle communément entendue par leurs contemporains à savoir un état idéal préexistant auquel on pourrait revenir, mais renvoie à l’idée même du sujet que l’on souhaite régénérer. C’est le cas en matière de justice où Thouret, en guise de « régénération », souhaite la suppression de l’ensemble des tribunaux26 pour refonder l’organisation juridictionnelle selon un « idéal de justice ». Elle s’oppose à celle des conservateurs à l’image de l’abbé Maury souhaitant un retour à un état qui a préexisté, souvent fantasmé et rarement vécu. Ainsi, à l’occasion des débats sur les jurys ou les pouvoirs du roi, il n’hésite pas à vanter l’Ancien Régime comme un modèle de paix et de prospérité qu’il fallait simplement régénérer pour aboutir à l’idéal27, dénonçant la volonté de régénération de Thouret, qui serait, selon lui, plutôt l’art de tout détruire28.

    28Cette différence de perception des objectifs de la Révolution qui transparaît par l’usage d’un même vocable que ses opposants est le reflet des arguments utilisés par l’abbé Maury. Ils sont pour la plupart profanes, issus de la « raison », car ils lui semblent plus efficaces pour convaincre un auditoire qui les utilise et qui est politiquement hostile à l’Église. Il faut alors parler un langage qu’il puisse entendre et comprendre.

    29Une première approche par nuage de mot grâce au logiciel IramuteQ des termes employés par l’abbé Maury lors de ses discours révèle son argument favori : le droit.


    Figure 1 : Nuage de mots des 100 mots les plus usités par l’abbé Maury

    Réalisation : Emmanuel Ravestein

    30Les mots « droit », « roi », « assemblée nationale », « nation », « peuple », « loi » sont les plus utilisés par l’abbé. On ne trouve presque aucune trace des expressions telles que « foi », « religion », « église » ou un vocable issu du lexique religieux. Au mieux trouve-t-on trace des mots « évêques » et « clergés » probablement liés aux discussions concernant la constitution civile du clergé. Le registre usuel des prédicateurs est totalement absent de son raisonnement. Toutefois, chaque mot relève d’un groupe lexical et d’un schéma de pensée propre.

    31Une analyse de similitude (ADS29) sur l’ensemble des discours de l’abbé Maury à la Constituante permet d’analyser les mondes lexicaux qu’emploie l’orateur et leurs liens de connexité.


    Figure 2 : Analyse de similitude, IramuteQ Alpha 0.7

    Réalisation : Emmanuel Ravestein

    32On constate à l’analyse l’existence de six groupes d’éléments à savoir « droit », « roi », « royaume », « assemblée nationale », et « public ». Le groupe d’items « droit » innerve la structure de son argumentation et est placé au cœur de son raisonnement. Le débat est donc pour lui essentiellement juridique, mais la notion reste intimement liée à des groupes d’éléments qui, du point de vue de l’aile gauche de l’Assemblée sont incompatibles. Ainsi, si le groupe « droit » est plus intensément lié au groupe « nation » qu’à celui d’« Assemblée nationale », il est aussi relié au groupe « roi ». En revanche, l’abbé distingue dans son discours les mots « nation » et « Français » qui appartiennent au même groupe lexical que ceux d’« assemblée » et de « citoyens ». Ce résultat peut signifier la volonté de séparer dans ses discours les notions qui relèvent de la « Révolution », de celles qui appartiendraient à ce que l’on qualifiera quelque temps plus tard d’Ancien Régime et qui ont sa préférence. Similairement, la « loi » est, pour l’abbé Maury liée à la nation quand les mots « exécutif » et « autorités » sont liés au mot « roi », révélant son approche fédéraliste de la constitution du Royaume. Le plus frappant reste l’absence de groupes liés au vocable religieux : le prédicateur semble s’effacer complètement. On note entre autres l’existence d’un registre économique isolé n’utilisant presque que des notions afférentes à la question des finances, ce qui illustre la capacité de l’abbé à mobiliser des connaissances spécifiques à ce domaine.

    33La question des biens du Clergé en donne une bonne mesure. Maury convoque pour défendre les possessions de l’Église à la fois des arguments juridiques comme le droit de propriété concédé antérieurement par les monarques successifs, la prescription acquisitive de quatorze siècles, ininterrompue, et des arguments utilitaristes. Ainsi, il évoque le remboursement des offices de judicatures qui coûterait bien plus cher que l’ensemble des biens du clergé, chiffre à l’appui bien que l’on ne puisse en mesurer l’exactitude30. Il faudrait selon lui peut-être envisager d’autres sources de revenus pour remplir les caisses de l’État. Il propose à cette occasion un impôt sur le luxe31, un débat qu’il reprendra dans le cadre des finances de l’État en promouvant l’usage d’impôts indirects qu’il qualifie de plus juste32.

    34Cette mobilisation d’un vocable économique est toutefois propre à certains débats et se mêle rarement à d’autres notions plus régaliennes comme la question de la justice, de la Constitution ou de la constitution civile du clergé. Lorsque l’on opère une classification par la méthode de Reinert des discours de l’abbé Maury on distingue cinq classes de formes sur les segments étudiés.


    Figure 3 : Classification selon la méthode de Reinert

    Réalisation : Emmanuel Ravestein

    35On constate que la classe 1 regroupant des formes actives du registre régalien comme « droit », « exécutif », « autorité », « législatif » et « roi », « gouvernement » et la classe 5 condensant des formes actives plus diverses mêlant « ennemi », « gloire », « peuple », « crime », « flatter » constituent à elles deux un monde lexical représentant près de 42,3 % de ses discours. Ce constat illustre l’art oratoire de l’abbé Maury mêlant habilement des notions très précises issues pour partie du domaine juridique, avec des termes plus abstraits comme « amour », « gloire », ou qualificatif comme « ennemi », « despotisme », « brigand », venant appuyer ses opinions ou pour leur donner une qualification morale.

    36La classe 4 et la classe 3 sont intimement liées au fonctionnement même de l’assemblée et de la joute à laquelle se livrent les représentants. La classe 4 fait ressortir un monde lexical autour de la mise en scène à la tribune de l’Assemblée qui occupe pas moins de 15 % de ses discours. L’abbé Maury a besoin de jouer des antagonismes qui animent les opinions de la Constituante, il provoque les interruptions et interpelle les autres orateurs dont Mirabeau qui deviendra sa Némésis.

    37Cette mise en scène du discours ne passe pas inaperçue auprès des partisans d’une Révolution plus ambitieuse à tel point que ces derniers en jouent comme le rappelle le marquis de Ferrières33. La classe 3 révèle l’importance de la procédure législative dans l’activité de l’abbé qui l’utilise et tentera d’en abuser. Son lien avec la classe 4 peut s’expliquer par les tentatives de mise en scène de son discours. L’abbé trouve dans la procédure législative des arguments pour justifier son attitude ou pour museler ses opposants. Ce fut le cas concernant le sort d’Avignon où il prit prétexte des décisions antérieures de l’Assemblée pour demander qu’on n’examinât pas les pétitions des Avignonnais souhaitant se rattacher à la France34.

    38La classe 2, isolée dans le dendrogramme, regroupe un monde lexical essentiellement économique qui innerve 25 % des segments étudiés, démontrant l’importance pour l’abbé Maury d’employer dans ce type de débat des développements issus presque exclusivement de sa culture économique. Elle démontre aussi son implication personnelle sur des sujets traditionnellement peu abordés par les ecclésiastiques, comme le commerce ou les assignats, mais qui s’expliquent aussi par les débats sur les biens du clergé occupant une place centrale dans sa mandature à la Constituante.


    Figure 4 : Analyse factorielle de correspondance (AFC) à partir d’une méthode Reinert

    Réalisation : Emmanuel Ravestein

    39Grâce à une analyse factorielle de correspondance, on peut constater à quel point les termes économiques se regroupent sous un monde lexical commun et la distance qui les sépare des autres mondes lexicaux, isolant le discours économique du discours régalien. Cependant, une analyse in extenso de ses interventions sur les finances fait état d’arguties qui prennent les traits de la diatribe religieuse que l’analyse par algorithme ne permet pas d’isoler, tant elle se fond dans le décor. L’exemple en est donné avec l’agiotage sur les biens du clergé.

    40Il anticipe et dénonce à raison les futures opérations financières en s’appuyant sur des règles économiques qui semblent parfois discutables. Le lien entre d’éventuels « agioteurs » et la confiscation des biens du clergé paraît crédible au regard de son instigateur, Talleyrand, et des conditions dans lesquels le projet de l’évêque d’Autun est présenté. Mais, en l’associant à un sombre complot35, organisé par les « juifs36 », communautés qui, d’après lui, ne devraient même pas se voir reconnaître la citoyenneté37, son discours prend une connotation morale et perd en crédibilité.

    41Ce que révèle toutefois l’analyse c’est l’absence totale d’un monde lexical dédié à la religion. Elle est entièrement absente du raisonnement et semble ne jamais fonder la trame de son argumentation. Inévitablement, la question fuse : quelle est donc la place de la religion chez le prédicateur Maury ?

    La place de la religion dans les discours de l’abbé Maury

    42Question étonnante lorsqu’on en vient à parler d’un homme d’Église censé prêcher la Parole sainte, mais elle est pourtant d’actualité à la fin du xviiie siècle. Le sermon de Bossuet « Sur la Parole de Dieu » de 1661 prônant aux prédicateurs de se limiter à l’Évangile sans en dévoiler les aspects les plus mystérieux trouve peu d’écho chez l’abbé Maury38. Dans les Principes d’éloquence pour la chaire et le barreau, ce dernier réserve une place secondaire à l’écriture sainte. Certes, il faut qu’elle soit présente dans le sermon, mais elle n’est qu’un appui qui se fond dans la composition du prédicateur pour répandre « tour à tour, […], des images touchantes, majestueuses, ou terribles […] La Bible est pour le style des prédicateurs ce qu’est la mythologie pour l’élocution des poètes39 ». Les textes sacrés ne constituent pas le socle de son discours, et bien qu’il maudisse les prédicateurs qui n’osent pas invoquer le nom de Jésus-Christ, lui-même utilise le substitut d’Être suprême au nom de Dieu dans son Panégyrique de saint Louis40. L’Écriture sainte n’est d’ailleurs utilisée dans cette œuvre que pour donner un caractère divin au monarque au support d’une longue description des compétences d’administrateur du souverain.

    43La Correspondance littéraire, philosophique et critique, chronique de la vie intellectuelle parisienne, ne dément pas ce peu d’appétence de l’abbé pour la chose religieuse dans ses discours. On peut y lire en avril 1781 à propos du discours du carême :

    Le plus grand reproche qu’on lui ait fait à Versailles est d’avoir mêlé dans ses sermons trop de choses étrangères à l’Évangile trop de discussions de politique de finance et d’administration, d’avoir prêché le roi plutôt que devant le roi. C’est dommage disait l’autre jour sa Majesté en sortant de l’église, si l’abbé Maury nous avait parlé un peu de religion il nous aurait parlé de tout41.

    44Mais il s’agit là d’une autre qualité que Maury développe dans son ouvrage sur l’éloquence et dans le Panégyrique de saint Augustin : adapter son discours à l’auditoire. S’interrogeant sur la meilleure manière de célébrer le génie de saint Augustin il énonce :

    Si j’avais à louer un bon Roi devant une assemblée de Rois, je ne discuterais point sans doute les principes de la politique, je peindrais la vertu le trône, et je croirais m’être acquitté de mon ministère qu’après avoir enflammé l’émulation de cet auditoire42.

    45Là encore, l’objectif est de persuader, il faut donc trouver ce qui touche le plus au cœur ceux qui l’écoute. Cette assertion rejoint celle faite par Poujoulat concernant la « décadence de la chaire » au xviiie siècle43. Le public est plus enclin à la philosophie qu’à la morale religieuse et il faut dès lors employer un langage qu’il puisse comprendre, qui le charme. Ainsi lorsqu’il parle du style et du dialogue, il indique que « toutes les fois qu’on parle à des hommes assemblés, il faut les intéresser, et qu’il n’y a que le langage des passions qui frappe la multitude44 ». Il faut convaincre et donc adapter son discours à son auditoire, peu importe si philosophie et morale religieuse s’entremêlent. L’éloge de Fénelon de 1771 en est un bon exemple : Maury y chante bien plus les qualités d’administrateur et culturelles de Fénelon que son amour de la religion.

    46Certains auteurs ont pu apprécier dans la réédition tardive et augmentée par l’abbé Maury de son ouvrage en 1810 un point de vue quelque peu différent. Il y énonce sans ambages dans un chapitre 23 consacré au « Petit Carême de Massillon » l’affaiblissement de la chaire par l’intégration de la philosophie et la « sécularisation » de la religion45. Une opinion nouvelle, qui va de pair avec la destruction à la fin de sa vie de l’ensemble de ses sermons écrits durant sa jeunesse pour être recomposés dans une sensibilité plus religieuse46. Opportunisme politique assurément quand on sait qu’il était alors à Rome auprès du Pape dans un état entre la disgrâce et l’indifférence. À l’orée de la tombe, il adaptait encore une fois son discours. Mais cette position n’est pas la sienne durant la période qui nous intéresse. En 1784 puis durant la Révolution, tous les moyens sont bons pour rallier à lui ceux qui l’écoutent. Cette position il la tient et la revendique à l’Assemblée constituante même lorsqu’il s’agit de la constitution civile du clergé :

    On nous place devant vous dans une situation bien désavantageuse ; on invoque les principes patriotiques et philosophiques, et on nous invite à y répondre par les moyens que nous fournit la théologie. Elle aurait dû toujours être étrangère à cette tribune, mais vous pardonnerez à la nécessité de parler ce langage pour éclairer votre religion47. 

    47Structurellement, ses discours n’emploient pas la religion, et la question divine n’y tient qu’une place limitée confirmant l’analyse lexicométrique précédente. L’argument religieux n’a-t-il donc aucune prise dans les discours de Maury ? Assurément pas dans tous les débats et pas de toutes les manières. Dans ceux qui touchent à la constitution civile du clergé ou à ses biens, les Écritures saintes sont discutées par l’abbé. Pour autant, la supériorité supposée de ces textes liée à leur caractère sacré, de même que celle de l’Église, ne sont pas mises en valeur autant que la traduction temporelle et l’utilité sociale qui en découlent48. La controverse à propos de l’autorité des évêques et des sièges épiscopaux qui l’oppose à Mirabeau en donne une bonne mesure. L’assemblée souhaite notamment redéfinir la circonscription des diocèses et le député d’Aix considère qu’au regard des principes de l’Église gallicane, cette délimitation appartient au pouvoir temporel et non spirituel. Maury lui oppose la supériorité du pape reconnue depuis l’Empire romain en cette matière, liant l’ordination divine nécessaire à l’évêque pour accomplir sa mission et la définition du « troupeau » dont il aura la charge49. L’autorité spirituelle du pontife entre alors dans le débat qui l’oppose aux réformateurs, mais il y mêle encore des arguments fondés sur la « raison ». De fait, en s’octroyant la possibilité d’établir ou de supprimer les diocèses et les ressorts des ecclésiastiques, les députés feraient preuve de despotisme, s’octroyant la liberté de supprimer les prédicateurs qui ne leur conviendraient pas.

    48De nouveau, l’argumentaire autour de la notion de « contre-pouvoir » développé à partir de celle de la séparation des pouvoirs est employé contre le projet en débat. Il critique alors l’assemblée pour s’être attribué en sus du pouvoir législatif, exécutif, et judiciaire celui de « pontife ». Sa contre-proposition est intéressante : il ne demande pas de laisser au seul pape la possibilité de réformer de manière arbitraire la limite des diocèses, mais d’instaurer des lois qui font agir de concert l’assemblée, représentante du pouvoir temporel, avec l’autorité pontificale, en lui laissant la possibilité de refuser les décrets de délimitation envisagés par les députés50.

    49Au cours de son discours à de rares occasions, le prédicateur perce à travers le représentant, invoquant des arguments purement religieux pour porter son propos51. Mais à les lire, il s’agit bien plus de tournure du discours pour lui donner de l’emphase qu’un quelconque argument d’autorité dont abuserait un prédicateur.

     

    50Au regard de ces développements, la réponse à l’hypothèse initiale semble au premier abord évidente : la robe du prédicateur a disparu sous le mandat du représentant. Pour autant, le style en garde l’empreinte : l’abbé Maury s’avance à la tribune de l’Assemblée constituante pour discourir sur « sa vérité » au même titre qu’il s’avançait à la chaire pour proclamer celle des Évangiles. La différence tient alors à sa position : alors que le prédicateur peut puiser dans les textes sacrés pour se contenter d’affirmer son propos, le représentant doit démontrer le bienfondé de son opinion pour convaincre. Mais réduire son activité durant la Constituante à une simple obstruction de style ne serait pas suffisant.

    51En dépit de son opposition qui porte sur presque tous les sujets, son emploi d’artifices oratoires pour soutenir son propos, certaines de ses interventions ne sont pas sans fondement. Sa critique des assignats et de l’agiotage est justifiée et accrédite ses connaissances dans le domaine économique. En effet, la nationalisation des biens du Clergé a accru la spéculation, l’assignat a été massivement contrefait, et restera comme un échec patent de la Révolution. Ses observations sur la réforme juridictionnelle et sur la retranscription des témoignages par écrits ne sont pas dénuées d’intérêt. Si ses arguments sont contestables, et les conséquences qu’il en tire parfois inutilement alarmistes, la réalité de la pratique mettra en exergue que le maintien d’une procédure entièrement orale en matière criminelle privait l’accusation de nombreux moyens pour démontrer la culpabilité des accusés. À ces insuffisances, s’ajoute la suppression du ministère public laissant à un juge de paix mal préparé à mener l’enquête le soin de poursuivre le crime.

    52IramuteQ nous a permis d’identifier les mondes lexicaux de l’abbé Maury et de relever une cohérence dans sa pensée comme dans l’exercice de son art oratoire au service de ses opinions. Dès lors, l’articulation de ses discours autour de notions profanes, de la démonstration historique et scientifique s’explique par la nécessité de convaincre un auditoire qui ne s’accommode pas des explications liturgiques. Son art oratoire se référant beaucoup plus à Cicéron qu’à Bossuet, il était alors naturel de plaider sa cause bien plus que de la déclamer.

    Notes de bas de page

    1 « Eh bien, rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». Luc 20, 20-26.

    2 Nous avons utilisé pour cette analyse les discours issus des différents volumes des Archives parlementaires de 1787 à 1860, Paris, P. Dupont, 1875-1887 ».

    3 « IRaMuTeQ est un logiciel libre et ouvert d’analyse de données textuelles ou de statistique textuelle qui fonctionne en interface avec le langage R. Le logiciel IRaMuTeQ permet de faire des analyses statistiques sur des corpus de textes et sur des tableaux individus/caractères, en s’appuyant sur la méthode de classification de Max Reinert. » [En ligne : http://www.iramuteq.org/ ; consulté le 20 juin 2022].

    4 Xavier Raduget, « La carrière politique de l’abbé Maury de 1786 à 1791 », Revue d’histoire de l’Église de France, vol. 3, no 17, 1912, p. 508.

    5 Mémoires pour servir à l’histoire des chefs de la révolution et particulièrement de l’église constitutionnelle, ou lettres (de l’abbé Valméron) à Claude Fauchet, évêque du Calvados, Paris, F. Lemarié, 1793, p. 42.

    6 X. Raduget, « La carrière politique de l’abbé Maury […] », op. cit., p. 513.

    7 Vincent Lombard de Langres, Mémoires anecdotiques pour servir à l’histoire de la Révolution française, vol. 2, Paris, Ladvocat, 1823, p. 305.

    8 Alphonse Aulard, Les Orateurs de l’assemblée constituante, Paris, Hachette, 1882, p. 219.

    9 Jean-Sifrein Maury, Principes d’éloquence pour la chaire et le barreau, Paris, Guillot, 1784.

    10 Ibid., p. 16.

    11 Pierre Campion, « La légitimation de l’éloquence sacrée dans les sermons de Bossuet », Littératures, no 36, 1997, p. 33-47.

    12 Lorsqu’il parle de l’éloquence et du zèle religieux qui doit accompagner le prédicateur, il n’élude pas les motivations parfois purement profanes qui poussent à la prédication. De fait, « il est à désirer sans doute que l’on n’aspire qu’à se rendre utile à la Religion en se condamnant aux travaux effrayants que la prédication exige, & dont on ne saurait jamais être bien récompensé par la renommée ; mais si des motifs si purs n’agissent point assez puissamment sur votre âme, calculez du moins les intérêts de votre amour propre, & voyez combien ils sont inséparables de l’efficacité de votre ministère. Est-ce pour vous que vous prêchez ? Est-ce pour vous que la Religion rassemble ses enfants dans un temple ? Vous n’oseriez le penser : n’importe je veux bien ne considérer en vous qu’un orateur ». J.-S. maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 3 et 4.

    13 Par exemple sur les Parlements : « Je considérerai cette grande question sous trois rapports : relativement à la province de Bretagne […] ; relativement à la conduite des magistrats qui formaient la chambre des vacations de Rennes […] ; relativement enfin aux divers décrets qui vous sont proposés […]. » Archives parlementaires de 1787 à 1860, Paris, P. Dupont, 1875-1887, vol. 11, p.153.

    14 « Je n’ai l’honneur d’être ni breton, ni magistrat ; mais, revêtu du caractère de représentant de la nation, je dirai la vérité avec tout le courage du patriotisme. » Archives parlementaires […], op. cit., vol 11, p. 153. Ou encore : « Comme c’est ici le dernier moment où je peux encore vous faire entendre la voix de la vérité et les réclamations de la justice […]. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 26, p. 368.

    15 Par exemple sur la question du véto royal, de l’imposition des trois ordres, de l’égalité des citoyens, de la procédure criminelle.

    16 A. Aulard, Les Orateurs […], op. cit., p. 221.

    17Voir aussi la traduction de Désiré Nisard, Œuvres complètes de Cicéron, vol. 1, Paris, Dubochet et Cie, 1840, p. 526.

    18 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 8, p. 553.

    19 Ibid., vol. 8, p. 551.

    20 A. Aulard, Les Orateurs […], op. cit., p. 219-223.

    21 Paul H. Beik, « Abbé Maury and the National Assembly », Proceedings of the American Philosophical Society, vol. 95 / 5, 1951, p. 550.

    22 « Nulle puissance ne peut conserver son rang parmi les nations sans le commerce, et le commerce ne peut exister sans le prêt à temps et à intérêt. Cette question n’en est pas une de religion, mais de politique. » L’évêque d’Orléans en revanche se lève et déclare qu’il ne peut adhérer à un décret qu’il considère comme contraire aux lois de l’Église. Cette protestation n’a pas de suite, démontrant le peu d’influence de la question religieuse dans les discussions de l’Assemblée. Archives parlementaires […], op. cit., vol. 9, p. 337.

    23 Et non pas de la Révolution.

    24 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 13, p.64-65.

    25 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 11, p. 108.

    26 Jacques-Guillaume Thouret, Discours de M. Thouret à l’Assemblée nationale en ouvrant la discussion sur la nouvelle organisation du pouvoir judiciaire. Séance du 24 mars 1790, Paris, Baudoin, 1790.

    27 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 15, p. 401.

    28 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 9, p. 611.

    29 Pascal Marchand et Pierre Ratinaud définissent l’ADS comme « une technique, reposant sur la théorie des graphes, classiquement utilisée pour décrire des représentations sociales. […] Les analyses permettent de montrer, en un seul graphique, à la fois les éléments communs (généralement absents des recherches de spécificités, analyses des correspondances ou classifications lexicales), mais également les éléments différenciés en fonction de variables liées au corpus ». Pascal Marchand et Pierre Ratinaud, L’analyse de similitude appliquée aux corpus textuels : les primaires socialistes pour l’élection présidentielle française (septembre-octobre 2011). Actes des 11e Journées internationales d’Analyse statistique des Données Textuelles, JADT, vol. 2012, 2012, p. 687-699, p. 687.

    30 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 13, p. 426.

    31 Ibid., p. 427.

    32 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 20, p. 443 et s.

    33 « L’abbé Maury, impatient, colère, s’animant par la contradiction, était très propre à remplir le rôle dont on le chargeait. Alexandre Lameth occupait le fauteuil ; il maintint, pendant la discussion, le plus grand calme et le plus profond silence. En vain l’abbé Maury chercha-t-il à se faire interrompre, s’interrompit-il lui-même, se plaignit-il qu’on ne voulait pas l’entendre ; en vain, abandonnant et reprenant le sujet principal de son discours, se perdit-il dans les digressions les plus étrangères, interpella-t-il personnellement Mirabeau, et lui jeta-t-il vingt fois le gant de la parole ; au moindre mouvement d’impatience qui s’élevait dans l’Assemblée : Attendez, monsieur l’abbé, disait Alexandre Lameth, avec un sang-froid désespérant, je vous ai promis la parole, je vous la maintiendrai […]. » Berville et Barriere, Mémoires du marquis de Ferrières, vol. 2, Paris, Baudouin frères, 1822, p. 228.

    34 « Troisième fait qui n’est ni une conjecture ni une opinion : l’assemblée nationale de France délibérant le 24 mai 1791 sur la pétition de la ville d’Avignon, le 24 mai 1791, a rejeté par la voie de l’appel nominal la pétition des Avignonnais qui demandait la réunion. La puissance souveraine peut changer souvent d’avis ; mais il importe cependant, Messieurs, de régler une fois ses comptes et de savoir quelle a été la mobilité et la versatilité des opinions sur cette matière. » Archives parlementaires […], vol. 30, p. 584.

    35 « L’opération qu’on vous propose est le chef-d’œuvre de l’agiotage, et jamais les agioteurs n’ont formé de projets plus funestes. Je vais vous révéler leur secret. Les agioteurs de Paris sont en possession de gouverner le royaume et l’administration des finances. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 16, p. 455.

    36 « Les juifs venaient à leur suite, avec leurs trésors, pour les échanger contre des acquisitions territoriales. Ils achèvent de démasquer la conspiration, en vous demandant, Messieurs, dans ce moment même, un état civil, afin de conquérir à la fois le titre de citoyen et les propriétés de l’Église. […]. Ce grand complot a enfin éclaté, et je ne fais ici que vous en rappeler la marche ténébreuse. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 9, p. 428.

    37 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 92.

    38 Œuvres oratoires de Bossuet, 7 volumes, Lebarq éd., Paris, Desclée de Brouwer, 1890-1897, vol. III, p. 569 et suiv.

    39 J.-S. Maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 146.

    40 Jean-Joseph-François Poujoulat, Le Cardinal Maury, sa vie et ses œuvres, Paris, Charles Douniol, 1859, p. 36.

    41 Jules-Antoine Taschereau, Correspondance littéraire, philosophique et critique de Grimm et de Diderot, 1829, vol. 10, p. 418.

    42 J.-S. Maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 242.

    43 J.-J.-F. Poujoulat, Le Cardinal Maury […], op. cit., p. 60.

    44 J.-S. Maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 76.

    45 « Tout fut bientôt mêlé en ce genre et dès lors tout fut corrompu. […]. On s’efforça de traiter philosophiquement les sujets chrétiens et chrétiennement les sujets philosophiques en les ralliant ou en les suspendant le mieux qu’on put à l’étendard de la religion. » Jean-Sifrein Maury, Essai sur l’éloquence de la chaire : panégyriques, éloges et discours, Paris, G. Warée, 1810, p. 175.

    46 J.-J.-F. Poujoulat, Le Cardinal Maury […], op. cit., p. 390.

    47 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 75.

    48 Cette question est d’autant plus débattue dans le cadre du débat sur les biens du clergé. Maury rappelle l’utilité sociale de l’Église et les conséquences qu’impliquerait la perte de ses biens (et donc de ses revenus) sur ses actions dans la société.

    49 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 84.

    50 Ibid., p. 88. Pour la postérité, il faut noter que la République populaire de Chine et le Vatican appliquent depuis 2018 un système similaire. En Chine, deux premières consécrations d’évêques ont eu lieu depuis l’accord avec le Vatican. L’Obs, 28 août 2019.

    51 « Nous sommes Français, nous sommes citoyens, nous reconnaissons l’unité du pouvoir temporel ; mais quand la religion a été reçue dans l’État, elle avait des lois, des droits, un chef ; et quand on la dit dominante en France, cette religion ne sera pas votre esclave. Elle ne dépend que de Dieu seul ; elle n’a aucune autorité sur le temporel, mais aussi elle ne reconnaît pas la puissance des hommes. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 640.

    Auteur

    Emmanuel Ravestein

    Docteur en histoire du droit, CERHIIP – Aix-Marseille Université

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    1 « Eh bien, rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». Luc 20, 20-26.

    2 Nous avons utilisé pour cette analyse les discours issus des différents volumes des Archives parlementaires de 1787 à 1860, Paris, P. Dupont, 1875-1887 ».

    3 « IRaMuTeQ est un logiciel libre et ouvert d’analyse de données textuelles ou de statistique textuelle qui fonctionne en interface avec le langage R. Le logiciel IRaMuTeQ permet de faire des analyses statistiques sur des corpus de textes et sur des tableaux individus/caractères, en s’appuyant sur la méthode de classification de Max Reinert. » [En ligne : http://www.iramuteq.org/ ; consulté le 20 juin 2022].

    4 Xavier Raduget, « La carrière politique de l’abbé Maury de 1786 à 1791 », Revue d’histoire de l’Église de France, vol. 3, no 17, 1912, p. 508.

    5 Mémoires pour servir à l’histoire des chefs de la révolution et particulièrement de l’église constitutionnelle, ou lettres (de l’abbé Valméron) à Claude Fauchet, évêque du Calvados, Paris, F. Lemarié, 1793, p. 42.

    6 X. Raduget, « La carrière politique de l’abbé Maury […] », op. cit., p. 513.

    7 Vincent Lombard de Langres, Mémoires anecdotiques pour servir à l’histoire de la Révolution française, vol. 2, Paris, Ladvocat, 1823, p. 305.

    8 Alphonse Aulard, Les Orateurs de l’assemblée constituante, Paris, Hachette, 1882, p. 219.

    9 Jean-Sifrein Maury, Principes d’éloquence pour la chaire et le barreau, Paris, Guillot, 1784.

    10 Ibid., p. 16.

    11 Pierre Campion, « La légitimation de l’éloquence sacrée dans les sermons de Bossuet », Littératures, no 36, 1997, p. 33-47.

    12 Lorsqu’il parle de l’éloquence et du zèle religieux qui doit accompagner le prédicateur, il n’élude pas les motivations parfois purement profanes qui poussent à la prédication. De fait, « il est à désirer sans doute que l’on n’aspire qu’à se rendre utile à la Religion en se condamnant aux travaux effrayants que la prédication exige, & dont on ne saurait jamais être bien récompensé par la renommée ; mais si des motifs si purs n’agissent point assez puissamment sur votre âme, calculez du moins les intérêts de votre amour propre, & voyez combien ils sont inséparables de l’efficacité de votre ministère. Est-ce pour vous que vous prêchez ? Est-ce pour vous que la Religion rassemble ses enfants dans un temple ? Vous n’oseriez le penser : n’importe je veux bien ne considérer en vous qu’un orateur ». J.-S. maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 3 et 4.

    13 Par exemple sur les Parlements : « Je considérerai cette grande question sous trois rapports : relativement à la province de Bretagne […] ; relativement à la conduite des magistrats qui formaient la chambre des vacations de Rennes […] ; relativement enfin aux divers décrets qui vous sont proposés […]. » Archives parlementaires de 1787 à 1860, Paris, P. Dupont, 1875-1887, vol. 11, p.153.

    14 « Je n’ai l’honneur d’être ni breton, ni magistrat ; mais, revêtu du caractère de représentant de la nation, je dirai la vérité avec tout le courage du patriotisme. » Archives parlementaires […], op. cit., vol 11, p. 153. Ou encore : « Comme c’est ici le dernier moment où je peux encore vous faire entendre la voix de la vérité et les réclamations de la justice […]. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 26, p. 368.

    15 Par exemple sur la question du véto royal, de l’imposition des trois ordres, de l’égalité des citoyens, de la procédure criminelle.

    16 A. Aulard, Les Orateurs […], op. cit., p. 221.

    17Voir aussi la traduction de Désiré Nisard, Œuvres complètes de Cicéron, vol. 1, Paris, Dubochet et Cie, 1840, p. 526.

    18 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 8, p. 553.

    19 Ibid., vol. 8, p. 551.

    20 A. Aulard, Les Orateurs […], op. cit., p. 219-223.

    21 Paul H. Beik, « Abbé Maury and the National Assembly », Proceedings of the American Philosophical Society, vol. 95 / 5, 1951, p. 550.

    22 « Nulle puissance ne peut conserver son rang parmi les nations sans le commerce, et le commerce ne peut exister sans le prêt à temps et à intérêt. Cette question n’en est pas une de religion, mais de politique. » L’évêque d’Orléans en revanche se lève et déclare qu’il ne peut adhérer à un décret qu’il considère comme contraire aux lois de l’Église. Cette protestation n’a pas de suite, démontrant le peu d’influence de la question religieuse dans les discussions de l’Assemblée. Archives parlementaires […], op. cit., vol. 9, p. 337.

    23 Et non pas de la Révolution.

    24 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 13, p.64-65.

    25 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 11, p. 108.

    26 Jacques-Guillaume Thouret, Discours de M. Thouret à l’Assemblée nationale en ouvrant la discussion sur la nouvelle organisation du pouvoir judiciaire. Séance du 24 mars 1790, Paris, Baudoin, 1790.

    27 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 15, p. 401.

    28 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 9, p. 611.

    29 Pascal Marchand et Pierre Ratinaud définissent l’ADS comme « une technique, reposant sur la théorie des graphes, classiquement utilisée pour décrire des représentations sociales. […] Les analyses permettent de montrer, en un seul graphique, à la fois les éléments communs (généralement absents des recherches de spécificités, analyses des correspondances ou classifications lexicales), mais également les éléments différenciés en fonction de variables liées au corpus ». Pascal Marchand et Pierre Ratinaud, L’analyse de similitude appliquée aux corpus textuels : les primaires socialistes pour l’élection présidentielle française (septembre-octobre 2011). Actes des 11e Journées internationales d’Analyse statistique des Données Textuelles, JADT, vol. 2012, 2012, p. 687-699, p. 687.

    30 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 13, p. 426.

    31 Ibid., p. 427.

    32 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 20, p. 443 et s.

    33 « L’abbé Maury, impatient, colère, s’animant par la contradiction, était très propre à remplir le rôle dont on le chargeait. Alexandre Lameth occupait le fauteuil ; il maintint, pendant la discussion, le plus grand calme et le plus profond silence. En vain l’abbé Maury chercha-t-il à se faire interrompre, s’interrompit-il lui-même, se plaignit-il qu’on ne voulait pas l’entendre ; en vain, abandonnant et reprenant le sujet principal de son discours, se perdit-il dans les digressions les plus étrangères, interpella-t-il personnellement Mirabeau, et lui jeta-t-il vingt fois le gant de la parole ; au moindre mouvement d’impatience qui s’élevait dans l’Assemblée : Attendez, monsieur l’abbé, disait Alexandre Lameth, avec un sang-froid désespérant, je vous ai promis la parole, je vous la maintiendrai […]. » Berville et Barriere, Mémoires du marquis de Ferrières, vol. 2, Paris, Baudouin frères, 1822, p. 228.

    34 « Troisième fait qui n’est ni une conjecture ni une opinion : l’assemblée nationale de France délibérant le 24 mai 1791 sur la pétition de la ville d’Avignon, le 24 mai 1791, a rejeté par la voie de l’appel nominal la pétition des Avignonnais qui demandait la réunion. La puissance souveraine peut changer souvent d’avis ; mais il importe cependant, Messieurs, de régler une fois ses comptes et de savoir quelle a été la mobilité et la versatilité des opinions sur cette matière. » Archives parlementaires […], vol. 30, p. 584.

    35 « L’opération qu’on vous propose est le chef-d’œuvre de l’agiotage, et jamais les agioteurs n’ont formé de projets plus funestes. Je vais vous révéler leur secret. Les agioteurs de Paris sont en possession de gouverner le royaume et l’administration des finances. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 16, p. 455.

    36 « Les juifs venaient à leur suite, avec leurs trésors, pour les échanger contre des acquisitions territoriales. Ils achèvent de démasquer la conspiration, en vous demandant, Messieurs, dans ce moment même, un état civil, afin de conquérir à la fois le titre de citoyen et les propriétés de l’Église. […]. Ce grand complot a enfin éclaté, et je ne fais ici que vous en rappeler la marche ténébreuse. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 9, p. 428.

    37 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 92.

    38 Œuvres oratoires de Bossuet, 7 volumes, Lebarq éd., Paris, Desclée de Brouwer, 1890-1897, vol. III, p. 569 et suiv.

    39 J.-S. Maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 146.

    40 Jean-Joseph-François Poujoulat, Le Cardinal Maury, sa vie et ses œuvres, Paris, Charles Douniol, 1859, p. 36.

    41 Jules-Antoine Taschereau, Correspondance littéraire, philosophique et critique de Grimm et de Diderot, 1829, vol. 10, p. 418.

    42 J.-S. Maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 242.

    43 J.-J.-F. Poujoulat, Le Cardinal Maury […], op. cit., p. 60.

    44 J.-S. Maury, Principes d’éloquence […], op. cit., p. 76.

    45 « Tout fut bientôt mêlé en ce genre et dès lors tout fut corrompu. […]. On s’efforça de traiter philosophiquement les sujets chrétiens et chrétiennement les sujets philosophiques en les ralliant ou en les suspendant le mieux qu’on put à l’étendard de la religion. » Jean-Sifrein Maury, Essai sur l’éloquence de la chaire : panégyriques, éloges et discours, Paris, G. Warée, 1810, p. 175.

    46 J.-J.-F. Poujoulat, Le Cardinal Maury […], op. cit., p. 390.

    47 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 75.

    48 Cette question est d’autant plus débattue dans le cadre du débat sur les biens du clergé. Maury rappelle l’utilité sociale de l’Église et les conséquences qu’impliquerait la perte de ses biens (et donc de ses revenus) sur ses actions dans la société.

    49 Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 84.

    50 Ibid., p. 88. Pour la postérité, il faut noter que la République populaire de Chine et le Vatican appliquent depuis 2018 un système similaire. En Chine, deux premières consécrations d’évêques ont eu lieu depuis l’accord avec le Vatican. L’Obs, 28 août 2019.

    51 « Nous sommes Français, nous sommes citoyens, nous reconnaissons l’unité du pouvoir temporel ; mais quand la religion a été reçue dans l’État, elle avait des lois, des droits, un chef ; et quand on la dit dominante en France, cette religion ne sera pas votre esclave. Elle ne dépend que de Dieu seul ; elle n’a aucune autorité sur le temporel, mais aussi elle ne reconnaît pas la puissance des hommes. » Archives parlementaires […], op. cit., vol. 21, p. 640.

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    Ravestein, E. (2022). Un prédicateur à l’assemblée : la parole de l’abbé Maury lors des débats de la Constituante. In V. Flauraud & L. Viallet (éds.), De la parole du prédicateur au discours politique (1‑). Presses universitaires Blaise-Pascal. https://doi.org/10.4000/13i1m
    Ravestein, Emmanuel. « Un prédicateur à l’assemblée : la parole de l’abbé Maury lors des débats de la Constituante ». In De la parole du prédicateur au discours politique, édité par Vincent Flauraud et Ludovic Viallet. Clermont-Ferrand: Presses universitaires Blaise-Pascal, 2022. https://doi.org/10.4000/13i1m.
    Ravestein, Emmanuel. « Un prédicateur à l’assemblée : la parole de l’abbé Maury lors des débats de la Constituante ». De la parole du prédicateur au discours politique, édité par Vincent Flauraud et Ludovic Viallet, Presses universitaires Blaise-Pascal, 2022, https://doi.org/10.4000/13i1m.

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    Flauraud, V., & Viallet, L. (éds.). (2022). De la parole du prédicateur au discours politique (1‑). Presses universitaires Blaise-Pascal. https://doi.org/10.4000/13i4j
    Flauraud, Vincent, et Ludovic Viallet, éd. De la parole du prédicateur au discours politique. Clermont-Ferrand: Presses universitaires Blaise-Pascal, 2022. https://doi.org/10.4000/13i4j.
    Flauraud, Vincent, et Ludovic Viallet, éditeurs. De la parole du prédicateur au discours politique. Presses universitaires Blaise-Pascal, 2022, https://doi.org/10.4000/13i4j.
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