Veiller au monde. In memoriam Michel Deguy
p. 253-260
Extrait
1Coincés dans une charnière temporelle qui peine à tourner et dont les résistances ne manquent pas de broyer ce qui tente de l’aider à se mouvoir, nous vivons de forts nombreux paradoxes. La question du monde en fournit un de plus.
2Toutes les sociétés et tous les individus ont désormais pleine conscience qu’il n’y a qu’un monde, un seul. Entre l’espace, le temps et la diversité culturelle, longtemps l’humanité a pu distinguer inconsciemment l’unité géographique du globe de la perception d’une séparation, sur la même sphère, d’entités sans liens ni contacts. « Notre monde vient d’en trouver un autre » : même la belle formule de Montaigne n’aurait plus cours ; elle ne correspond plus à rien de la représentation de tout être humain sur la planète. Valéry lui a répondu, à l’époque où « le temps du monde fini » ne faisait que commencer. L’accourcissement des durées de déplacement, puis leur évacuation par l’immédiateté d’une prise de contact numérique d’un point à l’autre de notre
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