Six questions propédeutiques sur la notion de monde dans son rapport à l’œuvre d’art

Éric Benoit

p. 43-52


Extrait

Qu’est-ce qu’un monde ?

1On se souvient que le mot latin qui a donné « monde », mundus, signifie le monde mais d’abord la toilette, l’ornement. L’adjectif mundus veut dire : net, propre. Ces valeurs positives vont dans le sens d’un monde esthétisé. C’est le cas aussi pour le mot kosmos, qui en grec signifie le monde mais aussi l’ordre, le bon ordre, et peut s’employer dans le vocabulaire de la toilette (d’où le mot français « cosmétique »). Au premier sens, kosmos, c’est l’ordre, l’ordre de l’univers, d’où le monde (un monde supposé en ordre). À cela s’oppose le chaos, le désordre : la mythologie hésiodique (Théogonie) montre le passage du chaos au kosmos, la mise en ordre du monde. Cette valorisation de l’ordre et du kosmos est celle de l’esthétique classique. Dans l’esthétique moderne au contraire, il y a des mondes qui intègrent le chaos ; le monde de l’œuvre moderne peut (voire doit) intégrer le chaos. On trouve par exemple chez Victor Hugo cette réhabilitation esthétique de

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