La belle tyrannie

Contrainte de la rime et libertinage du sens dans la poésie médiévale1

Manfred Kern

p. 49-57


Extrait

I. Le Moyen Âge et la tyrannie de formes

1Moult aurais-je à cunter... – Il y aurait beaucoup à rapporter au sujet de la forme et de la contrainte formelle au Moyen Âge. De manière générale, on peut constater que c’est précisément le côté formel, l’esthétique formelle, qui représente une condition essentielle dans la formation d’une littérature latine originale du Moyen Âge, voire une condition importante dans l’avènement d’une écriture littéraire dans les langues vulgaires. Cet acte entièrement nouveau, acte de violence, si je puis dire, de forcer une langue orale à l’écriture, n’est pas imaginable sans la protection et l’appui de la contrainte formelle : la contrainte est, en effet, la condition permettant la création d’une écriture poétique neuve.

2Ce n’est donc pas un hasard si la poésie médiévale opère avec un maximum de formes, qu’elle est, du point de vue de l’esthétique formelle, surcodée de formes esthétiques, et qu’elle excelle dans l’hypertrophie de formes. À ce propos,

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