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    Plan détaillé Texte intégral La divinité est au fond de l’espace Les dieux truqués Les chantres du cosmos Notes de bas de page Auteur

    Les Dieux cachés de la science fiction française et francophone (1950- 2010)

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Les mille morts de dieu dans la science-fiction française

    Simon Bréan

    p. 173-182

    Texte intégral La divinité est au fond de l’espace Les dieux truqués Les chantres du cosmos Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Dans leur première défense et illustration de la science fiction américaine, Stephen Spriel et Boris Vian en font une littérature ayant partie liée avec la mythologie et les aspirations de l’humanité à la transcendance : « La S.F., c’est une nouvelle mystique », clament-ils dans Les Temps modernes en 1951, « […] c’est la résurrection de la poésie épique : l’homme et son dépassement par lui-même, le héros et ses exploits, la lutte avec l’inconnu1 ». À leurs yeux, l’héroïsme de la science-fiction se déploie dans un cadre épique renouvelé, avec un personnel mythique incarnant des promesses de dépassement. L’extraterrestre le plus avancé maîtrise l’espace et le temps. L’ordinateur, machine pensante, alimente le fantasme d’une réponse absolue à toutes les questions. Le surhomme prend les attributs d’un dieu dont la volonté devient réalité.

    2Pourtant, ces perspectives grandioses ne prennent pas vraiment corps dans la science-fiction française. Loin de garantir des révélations touchant au divin, les mondes de la science-fiction demeurent des espaces-temps rationnels, où tout peut trouver une explication physique. En dépit des progrès techniques et des avancées scientifiques, la grande majorité des extraterrestres, machines et mutant conservent une nature profane.

    3Ainsi, les promesses d’élévation et de transcendance prennent trois formes majeures, la matérialisation triviale, l’erreur de perspective et la manipulation. Comme le constataient Vian et Spriel, une partie du sense of wonder de la science-fiction provient de la réactivation d’une imagerie mythique et religieuse. Néanmoins, ce processus d’assimilation se transforme en désacralisation. La part de mystère parfois entretenue dans le récit ne laisse aucun doute sur la nature profonde des créatures évoquées : en dépit de leurs moyens extraordinaires, tous ces êtres appartiennent à notre monde et ils en tirent leurs limites. Déjouant les pronostics initiaux, les écrivains français, loin de fonder une nouvelle mystique en s’appropriant la science fiction à l’américaine, ont fait de leur science-fiction une anti-mystique, qui ne joue avec un dieu que pour le mettre à mort, suivant une dialectique entre aspiration à une transcendance et rectification matérialiste.

    4Pour autant, le statut de ces figures et le traitement qui leur est réservé évoluent avec les thématiques mises à l’honneur. Entre 1950 et 1970, les écrivains mettent en scène des êtres plus qu’humains, étapes plus ou moins réussies vers une perfection qui ne se révèle ni accessible, ni même souhaitable. De 1970 à 1990, les figures divines sont des êtres tourmentés, mégalomanes et manipulateurs, qui entravent le développement de l’humanité. De 1990 à 2010, la référence à une transcendance s’intégre de manière plus pacifique aux thèmes de la science-fiction française, par le biais d’une rationalisation ou d’une réification qui fonde des univers harmonieux.

    La divinité est au fond de l’espace

    5Entre 1950 et 1970, les thèmes de la science-fiction sont liés à l’espace, qu’il s’agisse d’aventures spatiales ou d’explorations planétaires. Dans ce cadre, l’illusion de la transcendance est associée à des images d’expansion infinie, dans l’espace et dans l’avenir, auxquelles correspondrait une élévation progressive de l’humanité.

    6C’est avant tout au-delà de l’orbite terrestre que les héros de la science-fiction française rencontrent des êtres touchant au divin. Yves Dermèze, dans Le Titan de l’espace2 , met en scène des « êtres-force » faits d’énergie pure, capables au sommet de leur puissance de s’étendre à l’échelle d’un système solaire. Ils sont responsables de l’extinction de toute vie dans l’univers : incapables de contenir leur appétit d’énergie, ils ont dévoré les mondes peuplés d’êtres de matière. Le roman raconte la lutte contre une entité à la puissance écrasante, mais qui n’est en définitive qu’un parasite dangereux. Céder aux promesses ou aux menaces d’êtres plus qu’humains n’apporte qu’asservissement, et l’humanité se doit d’y résister3.

    7Les récits qui n’exécutent pas leurs dieux extraterrestres les tuent sur le plan symbolique. Cela peut se faire en douceur, par la révélation de leur faillibilité. Dans Ceux de nulle part4, les Hiss présentent leur conflit avec les Misliks, des créatures éteignant les soleils, comme une croisade mystique des « fils de la Lumière » contre les « fils du Froid éternel5 ». Néanmoins, ces êtres, décrits par Francis Carsac comme un sommet de l’évolution technique, soulignent les difficultés de leur parcours historique. Ils représentent un avenir possible pour l’humanité, non un aboutissement idéal6.

    8L’opposition la plus virulente à tout complexe sotériologique7 de l’extraterrestre se trouve dans La sortie est au fond de l’espce8, de Jacques Sternberg : des extraterrestres parfaits, tant au plan physique qu’intellectuel, font semblant de venir sauver les derniers humains des fléaux qui ont presque anéanti toute notre espèce ; ces prétendus surhommes sont en réalité les artisans de notre extermination. Dans un monde régi selon une perfection géométrique par des êtres dépassant notre compréhension, il n’y aurait aucune place pour les rêves et les excès de l’humanité.

    9En dépit de cette logique de désacralisation, les écrivains français trouvent avantage à reprendre les images associées à l’idée de divin. L’intention peut être parodique, comme lorsque André Ruellan fait d’un fœtus géant un prophète cosmique dans Aux armes d’Ortog9. Néanmoins, lier l’idée de dieu à des notions scientifiques permet de susciter un sentiment d’émerveillement précieux. Les surhommes de Charles et Nathalie Henneberg offrent ainsi l’image d’un potentiel de création illimité. Dans La Naissance des dieux10, des voyageurs dimensionnels échoués sur une planète encore vierge y acquièrent la faculté de donner forme à leurs désirs. Responsables des créatures proto-humaines nées de leurs esprits, ils se trouvent pris dans une guerre qui aboutit à un Götterdämmerung : les « dieux » eux-mêmes préfèrent supprimer le divin pour qu’une humanité puisse se développer. De même, l’élimination du mal métaphysique qui fonde La Plaie11 correspond à un retour à la normalité : un mutant détruit à la source ce mal moral par un extraordinaire acte de volonté, mais il est d’une telle naïveté qu’il ne concevrait pas d’employer ses facultés pour modifier la réalité à son avantage. Par une inversion symbolique, la divinité devient une sorte de « médiocrité dorée », comme dans Niourk12 de Stefan Wul, lorsque le petit Alf, devenu un surhomme capable de déplacer des planètes à travers la galaxie, rejoint les chasseurs de sa tribu préhistorique pour « la seule vie qui vaille la peine d’être vécue13 ».

    10Jouer des références divines pour en faire des éléments rationnels du monde, cela pourrait permettre de décrire plusieurs romans de Gérard Klein. Dans Le Gambit des étoiles14, le héros disqualifie les prétentions d’une poignée d’immortels à gouverner les destinées de l’univers. Il découvre dans les étoiles les êtres qui ont suscité l’apparition de l’humanité. En dépit de leur puissance, ces êtres dépendent de l’élévation des êtres humains. Les êtres les plus puissants des romans de Gérard Klein sont le résultat d’une évolution qui les rattache à une humanité immanente15. Dans Les Seigneurs de la guerre16, les maîtres d’Aergistal, qui créent des artefacts à l’échelle d’une galaxie et dominent l’espace et le temps, se savent les héritiers de milliers de générations progressant peu à peu. Gérard Klein emploie le concept de « créode » pour désigner le processus qui, par raffinements successifs, aboutit à créer une forme nécessaire : il n’existe pas de transcendance, mais une longue chaîne multicausale tendue vers un infini qui n’est, par définition, jamais atteint17.

    11Ainsi, même s’ils emploient volontiers certaines images ou idées liées à une aspiration transcendante, les écrivains français le font surtout pour recentrer l’enthousiasme et l’émerveillement de la science-fiction dans un cadre rationnel : les dieux ou leurs substituts offrent une facilité eschatologique qui jure avec l’idée d’une science bâtie de manière progressive. La chasse aux faux dieux fait partie de l’entreprise de fondation et de consolidation de la science-fiction française, qui promet alors de placer l’univers à la portée de l’humanité.

    Les dieux truqués

    12Pendant les années soixante-dix et quatre-vingt, les explorations spatiales et planétaires laissent la place à des spéculations sur des sociétés toujours plus écrasantes, sombres et violentes. Dans ces récits parfois apocalyptiques, où les structures de la réalité sont souvent trompeuses, les notions de divin et de transcendance sont associées à des manipulations. L’apparition de ces dieux truqués correspond à une forme de trahison ou d’échec de la science. Leur élimination devient une question de survie pour l’humanité.

    13À partir de 1970, en partie sous l’influence de Philip K. Dick et de son roman Ubik18, les écrivains français jouent avec des figures d’apprenties divinités, toxiques pour les sociétés qui les accueillent, à l’instar du Dieu truqué19, de Pierre Pelot. Ce faux dieu est un Français, d’une rare mesquinerie, qui a été téléporté par erreur sur une planète paradisiaque. Celle-ci est peuplée de surhommes dotés de pouvoirs mentaux et d’une longévité exceptionnelle. Leur société est un modèle d’équilibre, mais ils n’ont aucune mémoire historique. La perfection même de leur société les rend vulnérables au mensonge. En introduisant les concepts de péché et de culpabilité, de travail et d’exploitation, le dieu truqué rejoue dans cette société édénique le drame de la Genèse.

    14Pierre Pelot aime à reprendre ce thème de l’escroquerie à la divinité, parfois l’un des rouages d’une dystopie. Dans Les Barreaux de l’Éden20, on entretient le mythe d’une vie après la mort à l’aide de fausses séances de spiritisme, dans le cadre d’un système d’exécutions organisées. Pelot montre aussi des misérables qui croient trouver dans la manipulation des foules une solution à leurs problèmes. Le plus emblématique est Kid Jésus21, un prospecteur retrouvant une Bible dans un terrain dévasté et décidant de s’inspirer de cette religion oubliée. Promettant un salut venu d’autres planètes à des malheureux, cette figure religieuse d’un cynisme achevé se voit finalement contrainte d’accepter la mise en scène de son assassinat, avant de se cacher dans des taudis et de finir, épave rongée par la paranoïa, par croire à ses propres mensonges, rêvant de vaisseaux spatiaux qui viendraient l’emporter loin de sa misère22.

    15Les figures divines de la science-fiction française présentent ainsi à cette époque une part de grotesque23. Dans Cette chère humanité24, de Philippe Curval, l’instrument menant à la divinité est la « cabine de temps ralenti », qui permet de dilater le temps et d’augmenter le temps de loisir des Européens. En reconfigurant cet appareil, Simon Cessieu, un personnage névrosé, parvient à superposer son appartement à la totalité de l’Europe. Malgré le pouvoir que cela lui donne sur les Européens, cette prouesse technique se révèle dérisoire, car Simon Cessieu est un « dieu triste et suicidaire », un « dieu provisoire du Marcom-appartement », qui ne sait quoi faire de sa puissance et qu’il faut sermonner pour qu’il se mette à réfléchir25.

    16Ce genre de faux dieu est l’une des incarnations des dangers de la science préoccupant alors les écrivains. Cette figure reste ambiguë, car elle dépend de l’humanité elle-même. À l’instar d’une technologie échappant au contrôle de ses créateurs, les faux dieux sont issus des êtres humains, mais ils s’affranchissent de cette origine pour s’imposer à eux26.

    17Ce schéma prend la forme originale de la projection inconsciente des désirs de l’humanité, dans les œuvres de Michel Jeury et de Roland C. Wagner. Dans Le Temps incertain27, du premier, HKH est une entité multiple se nourrissant des consciences humaines dans une dimension faite surtout de matière psychique. Elle essaie de dominer la réalité contemporaine en prenant le contrôle de cerveaux dans la réalité. Dans La mort marchait dans les rues28 du second, un avatar de la drogue, suscité par l’Orque, une entité extraterrestre manipulant l’humanité, cherche à provoquer l’anéantissement psychique des humains. Dans les deux cas, les aspirations humaines à la transcendance se révèlent empoisonnées.

    18À l’instar de l’Orque, les extraterrestres les plus évolués sont ici des monstres déchus, comme le Bulb, gigantesque créature réduite à un état pathétique par les humains, dans La Compagnie des glaces29 de G.-J. Arnaud, le mystérieux tueur traqué au travers de la Biographie comparée de Jorian Murgrave30, d’Antoine Volodine, ou l’être cauchemardesque qui hante les rêves d’un jeune homme, dans L’Homme aux yeux de napalm31, de Serge Brussolo.

    19Pour une science-fiction française qui s’emploie alors à mettre en scène des excès et des dangers de la science, les pseudo-dieux constituent certains des pires avatars de ce qu’une technologie mal régulée peut enfanter. Arrogants et pusillanimes, incapables de vraiment créer, parasitant une humanité sans avenir, ces êtres aux pouvoirs démesurés n’ont rien à apporter, et leur élimination est une condition préalable à tout progrès véritable.

    Les chantres du cosmos

    20Depuis les vingt dernières années, l’anti-mystique de la science-fiction française s’est révélée moins virulente, en raison de paradigmes dominants plus optimistes. L’influence du cyberpunk n’a pas donné lieu à des avatars supra-humains, alors que William Gibson ne s’est pas privé de peupler sa matrice de créatures pseudo-divines32. La mise à mort de dieu se résume à une simple neutralisation : les aspects mystiques sont justifiés à neuf, ce qui permet de les intégrer aux récits comme des éléments à part entière de l’émerveillement de la science-fiction.

    21Les années quatre-vingt-dix voient se produire un retour à l’espace, une forme de « nouveau space opéra » à la française. Le rapport à l’infini ne constitue plus un enjeu problématique. Dans plusieurs romans de Laurent Genefort, les extraterrestres surnommés les Vangks ont laissé de prodigieux artefacts, comme l’Axis, un tube de 120 000 kilomètres de long reliant deux planètes entre elles, dans Une porte sur l’éther33. La plus spectaculaire de ces créations est Omale34, un anneau de Dyson encerclant une étoile, où trois espèces concurrentes disposent d’un terrain d’extension démesuré. Les architectes extraordinaires qu’étaient les Vangks n’ont pas plié la réalité à leurs désirs. Ils se sont adaptés aux lois physiques. Ces êtres et leurs créations, même si elles touchent aux limites de l’imagination et de la compréhension humaines, restent commensurables avec la vie humaine : on peut les assimiler et les utiliser. Le divin périt de sa belle mort, en laissant des merveilles en héritage35.

    22Pierre Bordage, quant à lui, fonde de nombreux romans sur une lutte symbolique entre des principes fondamentaux, qui effleurent le domaine de la métaphysique, mais qui trouvent à s’incarner physiquement dans les protagonistes. Ces objets du monde ne semblent transcendants que parce que des humains sans mémoire ni clairvoyance les assimilent à des légendes, ou parce qu’ils se cachent délibérément pour mener leurs desseins à bien. Pourtant, dans Les Guerriers du silence ou La Fraternité du Panca36, la révélation de leur existence a des implications directes sur la compréhension de l’univers. Même si le néant radical qu’affrontent les héros prend les attributs d’un dieu, même si le souffle qui les anime excède les paramètres connus, ces éléments se révèlent être des composants physiques d’un monde rationnel fait de matière et d’énergie. Pierre Bordage fait de la mystique un processus presque scientifique, en proposant un équilibre subtil entre la fascination pour des phénomènes extraordinaires et la conviction que la perception de ces phénomènes ne fait que révéler des aspects intrinsèques de notre univers37.

    23Les notions de divin, de surhumanité, d’aspiration à la transcendance, perdent leur charge conflictuelle, dans la mesure où les écrivains français font de dieu un objet de science-fiction comme un autre38. L’enjeu principal semble être le choix entre deux manières de neutraliser les références divines, soit en leur conservant une part de mystère et de poésie, comme le fait Serge Lehman, soit en leur donnant un sens pleinement rationnel, comme l’entreprend Roland C. Wagner39.

    24Dans Aucune étoile aussi lointaine40, Serge Lehman fait la chronique d’une désillusion : son héros, Arkadih, vient trop tard dans un monde trop vieux ; il ne reste presque rien de la lutte qui opposait le Peuple, composé par les mythiques premiers habitants de notre réalité, à l’Avatar, une entité d’ampleur cosmique, résidu fossile et vengeur d’un état antérieur de l’univers. Néanmoins, ce récit prend la forme d’une initiation douloureuse, faite de péripéties complexes et de réflexions métaphysiques, initiation qui permet à Arkadih et au lecteur d’observer l’évolution d’êtres pensants, les Mentors, vers des pouvoirs et un statut presque divins. Ce sont ces êtres qui, par un retour vers l’origine de l’univers, deviennent le Peuple mythique destiné à lutter contre l’Avatar. Si cette guerre reste pour toujours prise dans le nimbe de la légende, le roman témoigne de l’ancrage physique et concret de cette réalité41.

    25Même s’il joue lui aussi de l’effet d’incertitude associé à des phénomènes dépassant la compréhension humaine, Roland C. Wagner s’emploie dans son œuvre à les réduire à des objets concevables. Son postulat d’ensemble suppose une rétroaction de l’esprit humain sur la matière, à une échelle d’abord quantique. Au fur et à mesure que les êtres humains se multiplient, cette action atteint un seuil perceptible, créant une psychosphère où peuvent se matérialiser des Archétypes, des projections culturelles nées de l’ensemble des cerveaux humains. Les adversaires des héros de Wagner dans les Futurs Mystères de Paris ne sont pas des entités d’outre-monde. Même s’ils opèrent à partir d’une dimension encore mal connue, les Archétypes trouvent leur source dans la culture humaine et sont soumis à des lois physiques. Pour les vaincre ou atteindre un modus vivendi, il suffit de comprendre leurs fondements culturels, c’est-à-dire dissiper leur mystère. Dans L’Odyssée de l’espèce42, on affaiblit l’archétype primitif des peurs et de l’agressivité de l’humanité en retrouvant son nom originel, au moyen d’une vertigineuse modélisation mathématique des langues préhistoriques. Il n’y a donc rien à redouter, sinon la peur elle-même. C’est aussi le sens du Chant du cosmos43, dans lequel l’harmonie de l’univers n’est troublée par aucun principe métaphysique transcendant, mais par les instincts de violence de certains êtres vivants, qu’une évolution rationnelle concourt à éradiquer peu à peu.

    26Les récits de cette période intègrent les éléments divins de manière plus neutre qu’auparavant, en assurant une conciliation entre une perception rationnelle du monde et des objets pointant une illusion de transcendance. Dans Plaguers44, de Jeanne-A Debats, les surhommes s’efforcent simplement de trouver une place dans leur société. Dans Le Goût de l’immortalité45, de Catherine Dufour, l’espoir de devenir immortel transforme ceux qui y succombent en individus pathétiques et drogués. Les « Grands Galactiques » ont laissé la place à des extraterrestres qui, comme nous, ne font que passer dans cet univers, à l’instar des populations transhumantes de Points chauds46, de Laurent Genefort.

    27Le degré le plus abouti de neutralisation de l’enjeu divin est peut-être à chercher dans la pratique même de l’uchronie, qui a donné de nombreux romans récents, notamment La Reine des lumières de Xavier Mauméjean, Tancrède d’Ugo Bellagamba ou Rêves de Gloire de Roland Wagner47. En modelant à son gré la matière historique, le romancier ne fait rien d’autre, en effet, que de prendre la place de dieu, dont Leibniz assurait dans son Essai de théodicée que son entendement concevait l’infinité des mondes possibles.

    28Le corpus des romans de science-fiction français passe ainsi en soixante ans d’une fascination ambiguë à une sorte de sécularisation de la référence divine, après diverses dénonciations de figures prétendument transcendantes. Cette évolution semble indiquer que la notion de dépassement de la condition humaine a eu un potentiel fécond pour la science-fiction française. Néanmoins, cette fécondité n’est pas attachée par essence à la notion de divinité : ni les dieux, ni les caractéristiques qui leur sont attachées, ne deviennent tout à fait des objets de science-fiction. Il s’agit d’une simple coloration apportée à des thèmes déjà connus. Ce rapport à la transcendance est-il vraiment une source d’inspiration, ou est-ce un simple habillage conceptuel commode, permettant de donner un nom et une forme faciles à identifier ? C’est peut-être moins la divinité en soi qui se trouve sollicitée ici, que l’émerveillement devant l’infini, comme défi à relever, comme excès à réduire, comme mystère à résoudre.

    Notes de bas de page

    1 S. Spriel et B. Vian, « Un nouveau genre littéraire. La science fiction », Les Temps modernes, 72, octobre 1951, p. 626.

    2 Y. Dermèze, Le Titan de l’espace [1954], Paris, Librairie des Champs-Élysées, coll. « Le Masque Science-fiction », 1976.

    3 On retrouve cette logique dans Le Ressac de l’espace de P. Curval (Paris, Gallimard/ Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1962) et dans Les Dieux verts de N. Henneberg (Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », Paris, 1961), où les créatures qui croient devenir les maîtres de l’humanité sont combattues et chassées de la planète. Un écho de cette logique s’incarne à la fin de cette période dans le fascinant métamorphe de J.-P. Andrevon, dans Les Hommes-machines contre Gandahar (Paris, Denoël, coll. « Présence du Futur », 1969). Ce métamorphe est un cerveau géant développant sa conscience dans l’océan. Devenu sénile et mégalomane au fil des millénaires, il entreprend de lancer des troupes dans le passé pour devenir une sorte de maître du temps. C’est le métamorphe lui-même, dans une version plus jeune et plus lucide, qui s’occupe de l’éliminer.

    4 F. Carsac, Ceux de nulle Part, Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1954.

    5 Ibid., p. 87.

    6 Ibid., p. 81-83.

    7 Sotériologie : théologie chrétienne qui étudie les différentes doctrines du Salut.

    8 J. Sternberg, La sortie est au fond de l’espace, Paris, Denoêl, coll. « Présence du Futur », 1956.

    9 K Steiner [A. Ruellan], Aux armes d’Ortog [1960], dans Ortog, Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain Classiques », 1975. Cette intention semi-parodique se retrouve dans certains romans de B.R. Bruss (Une mouche nommée Dresa ; L’Énigme des Phtas, Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1963 et 1965) qui suivent une formule récurrente : des phénomènes dépassant la compréhension humaine affectent des planètes entières, si bien que les héros craignent une agression, avant de comprendre qu’il ne s’agit que d’effets secondaires d’expériences extraterrestres effectuées sans malice.

    10 C. Henneberg, La Naissance des dieux, Paris, Métal, coll. « Série 2000 », 1954. D’après Charles Moreau (« Le mystère Henneberg », Lunatique, 70,1er trimestre 2006, p. 85-133), tous les textes signés par Charles ont été écrits par Nathalie.

    11 N. Henneberg, La Plaie, Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1964.

    12 S. Wul, Niourk [1957], Paris, Denoêl, coll. « Présence du Futur », 1990.

    13 Ibid., p. 220.

    14 G. Klein, Le Gambit des étoiles [1958], Paris, Le Livre de Poche, coll. « SF », 2005.

    15 Voir également S. Bréan, « GK, SC, SF : Gérard Klein et Subjectivité collective de la Science-Fiction », Les Subjectivités collectives, dir. U. Bellagamba, É. Picholle et D. Tron, Villefranchesur-mer, Somnium, coll. « Sciences & Fictions à Peyresq », 3, 2012, p. 37-54. Quand Gérard Klein met en scène une machine presque omnisciente, dans Le Long Voyage (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1964) ou dans Le Sceptre du hasard (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1968), c’est pour rappeler qu’il ne s’agit que d’une étape, et à terme d’un obstacle dont il convient de se débarrasser. L’image du gigantesque cerveau électronique révélant ses limites ou ses dangers se retrouve notamment dans La Machine du pouvoir d’A. Higon/M. Jeury (Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1960) et dans La Guerre des machines du Lieutenant Kijé (Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1959).

    16 G. Klein, Les Seigneurs de la guerre [1970], Paris, Le Livre de Poche, coll. « SF », 2001.

    17 Ibid., p. 212-217.

    18 P.-K. Dick, Ubik, traduit de l’anglais (américain) par A. Dorémieux, Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1970.

    19 P. Pelot, Le Dieu truqué [1974], Paris, Fleuve noir, coll. « Lendemains retrouvés », 1984.

    20 P. Pelot, Les Barreaux de l’Éden [1977], Amiens, Encrage, coll. « Lettres SF », 1998.

    21 P. Pelot, Kid Jésus [1980], dans Orages mécaniques, Paris, Bragelonne, coll. « Trésors de la SF », 2008.

    22 On pourrait rattacher à ce type de récit les variantes de « magie miraculeuse » dissimulant en fait des capacités techniques, employées pour abuser les humains, comme dans À quoi songent les Psyborgs, de P. Barbet (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1971) ou dans La Croix des décastés de G. Thomas /J. Verlanger (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1977). Les mensonges permis par cette supériorité technique sont associés à une forme d’arrogance et de dégénérescence morale.

    23 On peut penser à l’extraterrestre à l’apparence diabolique qui établit un pacte avec les templiers dans L’Empire du Baphomet de P. Barbet (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1972), ou le vieillard mégalomane qui a transformé la Terre en désert pour que s’y jouent ses fantasmes d’heroic-fantasy dans L’Ange du désert de M. Pagel (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1985).

    24 P. Curval, Cette chère humanité, Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1976.

    25 Ibid., p. 276. Dans un autre roman de P. Curval, L’Homme à rebours (Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1974), au moment où il entreprend de créer un monde vraiment nouveau, le héros, un surhomme capable de franchir les dimensions et de créer des réalités nouvelles, avoue sa faiblesse en criant que l’imagination lui manque. On pourrait évoquer une variante significative, celle des rois de mondes virtuels, comme dans La Vie comme une course de chars à voiles de D. Douay (Paris, Calmann-Lévy, coll. « Dimensions SF », 1978), qui ne font guère que vivre un rêve égoïste.

    26 C’est le schéma classique de la machine omnisciente se faisant dieu, mais cet objet n’est pas très employé à cette époque, même s’il apparaît dans Cette chère humanité et dans Le Disque rayé d’A. Ruellan (Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1970).

    27 M. Jeury, Le Temps incertain, Paris Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1973.

    28 R. -C. Wagner, La mort marchait dans les rues, Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1989.

    29 G. -J. Arnaud, La Chair des étoiles [1988], dans La Compagnie des glaces, Paris, Fleuve Noir, coll. « La Compagnie des Glaces », tome XI, 1999.

    30 A. Volodine, Biographie comparée de Jorian Murgrave, Paris, Denoël, coll. « Présence du Futur », 1985.

    31 S. Brussolo, L’Homme aux yeux de napalm, Paris, Denoël, coll. « Présence du Futur », 1990.

    32 Ainsi, dans Inner City (J’ai Lu, Paris, « Science-fiction », 1996), J.-M. Ligny fait intervenir un fantôme dans l’espace virtuel, mais ce n’est pas une entité suscitée par la matrice elle-même, contrairement aux divinités vaudou introduites par William Gibson dans Comte Zéro (1986).

    33 L. Genefort, Une porte sur l’éther [2000], Paris, J’ai Lu, coll. « Science-fiction », 2003.

    34 L. Genefort, Omale [2001], dans Omale, L’Aire humaine, Paris, Denoël, coll. « Lune d’Encre », t. 1, 2012.

    35 De la même manière, malgré leur taille qui leur permet d’accueillir en leur sein un peuplement humain, leur intellect et leurs perceptions dépassant les nôtres, ou leurs facultés de déplacement instantané d’un bout à l’autre de la galaxie, les Animaux Villes mis en scène par J.-C. Dunyach et Ayerdhal dans Étoiles mourantes (Paris, J’ai Lu, coll. « Millénaires », 1999) se révèlent de simples citoyens de l’univers physique. Ils ont leurs cycles de vie et de mort, ainsi qu’une sagesse relative, quoique appuyée sur une longévité et une expérience importantes.

    36 P. Bordage, Les Guerriers du silence [1993], Paris, J’ai Lu, coll. « Science-fiction », 1998. Id., Frère Ewen (La Fraternité du Panca, vol. 1), Nantes, L’Atalante, coll. « La Dentelle du Cygne », 2007.

    37 L’imaginaire de Pierre Bordage est aussi très informé par des références bibliques. Le divin et le sacré dissimulent souvent des manipulations scientifiques et des intentions malveillantes. Voir sur ce thème Les Derniers Hommes (Paris, J’ai Lu, coll. « Millénaires », 2002) et L’Évangile du serpent (Vauvert, Au diable vauvert, 2001).

    38 Dans Le Successeur de pierre (Paris, Denoël, 1999), J.-M. Truong fait de dieu un parasite de l’humanité, prêt à s’en débarrasser au profit des machines.

    39 Il est possible que cette divergence d’objectifs esthétiques ait joué dans le déclenchement d’une polémique entre ces deux écrivains, à partir de la préface à Retour sur l’horizon (Paris, Denoêl, coll. « Lunes d’encre », 2009) dans laquelle Serge Lehman liait le manque de légitimité de la science-fiction à ses rapports à la métaphysique. L’opposition de Roland Wagner à cette théorie a donné lieu à un fil de discussion nourri d’arguments solides : « Du Sense of Wonder à la SF métaphysique », [en ligne], Forum d’ActuSF, http://www.actusf.com/forum/viewtopic.php?t=8050&highlight=m%E9taphysique(06.02.2013).

    40 S. Lehman, Aucune étoile aussi lointaine [1998], Paris, J’ai Lu, coll. « Science-fiction », 2001.

    41 Par la suite, Serge Lehman a proposé, dans Le Livre des ombres (Nantes, L’Atalante, « La Dentelle du Cygne », 2005), une seconde lecture unissant ses nouvelles et romans dans un même ensemble mythique.

    42 R.-C. Wagner, L’Odyssée de l’espèce [1997], Paris, J’ai Lu, coll. « Science-fiction », 2009.

    43 R.-C. Wagner, Le Chant du Cosmos [1999] Paris, J’ai Lu, coll. « Science-fiction », 2006.

    44 J.-A. Debats, Plaguers, Nantes, L’Atalante, coll. « La Dentelle du Cygne », 2010.

    45 C. Dufour, Le Goût de l’immortalité [2005], Paris, Mnémos, coll. « Dédales », 2012.

    46 L. Genefort, Points chauds, Saint-Mammès, Le Bélial, 2012.

    47 X. Mauméjean, La Reine des lumières, Paris, Flammarion, coll. « Ukronie », 2009. U. Bellagamba, Tancrède [2009], Paris, Gallimard, coll. « Folio SF », 2012. R.C. Wagner, Rêves de Gloire, Nantes, L’Atalante, coll. « La Dentelle du Cygne », 2011.

    Auteur

    Simon Bréan

    Université Paris- Sorbonne (Paris IV)

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    1 S. Spriel et B. Vian, « Un nouveau genre littéraire. La science fiction », Les Temps modernes, 72, octobre 1951, p. 626.

    2 Y. Dermèze, Le Titan de l’espace [1954], Paris, Librairie des Champs-Élysées, coll. « Le Masque Science-fiction », 1976.

    3 On retrouve cette logique dans Le Ressac de l’espace de P. Curval (Paris, Gallimard/ Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1962) et dans Les Dieux verts de N. Henneberg (Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », Paris, 1961), où les créatures qui croient devenir les maîtres de l’humanité sont combattues et chassées de la planète. Un écho de cette logique s’incarne à la fin de cette période dans le fascinant métamorphe de J.-P. Andrevon, dans Les Hommes-machines contre Gandahar (Paris, Denoël, coll. « Présence du Futur », 1969). Ce métamorphe est un cerveau géant développant sa conscience dans l’océan. Devenu sénile et mégalomane au fil des millénaires, il entreprend de lancer des troupes dans le passé pour devenir une sorte de maître du temps. C’est le métamorphe lui-même, dans une version plus jeune et plus lucide, qui s’occupe de l’éliminer.

    4 F. Carsac, Ceux de nulle Part, Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1954.

    5 Ibid., p. 87.

    6 Ibid., p. 81-83.

    7 Sotériologie : théologie chrétienne qui étudie les différentes doctrines du Salut.

    8 J. Sternberg, La sortie est au fond de l’espace, Paris, Denoêl, coll. « Présence du Futur », 1956.

    9 K Steiner [A. Ruellan], Aux armes d’Ortog [1960], dans Ortog, Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain Classiques », 1975. Cette intention semi-parodique se retrouve dans certains romans de B.R. Bruss (Une mouche nommée Dresa ; L’Énigme des Phtas, Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1963 et 1965) qui suivent une formule récurrente : des phénomènes dépassant la compréhension humaine affectent des planètes entières, si bien que les héros craignent une agression, avant de comprendre qu’il ne s’agit que d’effets secondaires d’expériences extraterrestres effectuées sans malice.

    10 C. Henneberg, La Naissance des dieux, Paris, Métal, coll. « Série 2000 », 1954. D’après Charles Moreau (« Le mystère Henneberg », Lunatique, 70,1er trimestre 2006, p. 85-133), tous les textes signés par Charles ont été écrits par Nathalie.

    11 N. Henneberg, La Plaie, Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1964.

    12 S. Wul, Niourk [1957], Paris, Denoêl, coll. « Présence du Futur », 1990.

    13 Ibid., p. 220.

    14 G. Klein, Le Gambit des étoiles [1958], Paris, Le Livre de Poche, coll. « SF », 2005.

    15 Voir également S. Bréan, « GK, SC, SF : Gérard Klein et Subjectivité collective de la Science-Fiction », Les Subjectivités collectives, dir. U. Bellagamba, É. Picholle et D. Tron, Villefranchesur-mer, Somnium, coll. « Sciences & Fictions à Peyresq », 3, 2012, p. 37-54. Quand Gérard Klein met en scène une machine presque omnisciente, dans Le Long Voyage (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1964) ou dans Le Sceptre du hasard (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1968), c’est pour rappeler qu’il ne s’agit que d’une étape, et à terme d’un obstacle dont il convient de se débarrasser. L’image du gigantesque cerveau électronique révélant ses limites ou ses dangers se retrouve notamment dans La Machine du pouvoir d’A. Higon/M. Jeury (Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1960) et dans La Guerre des machines du Lieutenant Kijé (Paris, Gallimard/Hachette, coll. « Le Rayon Fantastique », 1959).

    16 G. Klein, Les Seigneurs de la guerre [1970], Paris, Le Livre de Poche, coll. « SF », 2001.

    17 Ibid., p. 212-217.

    18 P.-K. Dick, Ubik, traduit de l’anglais (américain) par A. Dorémieux, Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1970.

    19 P. Pelot, Le Dieu truqué [1974], Paris, Fleuve noir, coll. « Lendemains retrouvés », 1984.

    20 P. Pelot, Les Barreaux de l’Éden [1977], Amiens, Encrage, coll. « Lettres SF », 1998.

    21 P. Pelot, Kid Jésus [1980], dans Orages mécaniques, Paris, Bragelonne, coll. « Trésors de la SF », 2008.

    22 On pourrait rattacher à ce type de récit les variantes de « magie miraculeuse » dissimulant en fait des capacités techniques, employées pour abuser les humains, comme dans À quoi songent les Psyborgs, de P. Barbet (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1971) ou dans La Croix des décastés de G. Thomas /J. Verlanger (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1977). Les mensonges permis par cette supériorité technique sont associés à une forme d’arrogance et de dégénérescence morale.

    23 On peut penser à l’extraterrestre à l’apparence diabolique qui établit un pacte avec les templiers dans L’Empire du Baphomet de P. Barbet (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1972), ou le vieillard mégalomane qui a transformé la Terre en désert pour que s’y jouent ses fantasmes d’heroic-fantasy dans L’Ange du désert de M. Pagel (Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1985).

    24 P. Curval, Cette chère humanité, Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1976.

    25 Ibid., p. 276. Dans un autre roman de P. Curval, L’Homme à rebours (Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1974), au moment où il entreprend de créer un monde vraiment nouveau, le héros, un surhomme capable de franchir les dimensions et de créer des réalités nouvelles, avoue sa faiblesse en criant que l’imagination lui manque. On pourrait évoquer une variante significative, celle des rois de mondes virtuels, comme dans La Vie comme une course de chars à voiles de D. Douay (Paris, Calmann-Lévy, coll. « Dimensions SF », 1978), qui ne font guère que vivre un rêve égoïste.

    26 C’est le schéma classique de la machine omnisciente se faisant dieu, mais cet objet n’est pas très employé à cette époque, même s’il apparaît dans Cette chère humanité et dans Le Disque rayé d’A. Ruellan (Paris, Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1970).

    27 M. Jeury, Le Temps incertain, Paris Robert Laffont, coll. « Ailleurs et Demain », 1973.

    28 R. -C. Wagner, La mort marchait dans les rues, Paris, Fleuve Noir, coll. « Anticipation », 1989.

    29 G. -J. Arnaud, La Chair des étoiles [1988], dans La Compagnie des glaces, Paris, Fleuve Noir, coll. « La Compagnie des Glaces », tome XI, 1999.

    30 A. Volodine, Biographie comparée de Jorian Murgrave, Paris, Denoël, coll. « Présence du Futur », 1985.

    31 S. Brussolo, L’Homme aux yeux de napalm, Paris, Denoël, coll. « Présence du Futur », 1990.

    32 Ainsi, dans Inner City (J’ai Lu, Paris, « Science-fiction », 1996), J.-M. Ligny fait intervenir un fantôme dans l’espace virtuel, mais ce n’est pas une entité suscitée par la matrice elle-même, contrairement aux divinités vaudou introduites par William Gibson dans Comte Zéro (1986).

    33 L. Genefort, Une porte sur l’éther [2000], Paris, J’ai Lu, coll. « Science-fiction », 2003.

    34 L. Genefort, Omale [2001], dans Omale, L’Aire humaine, Paris, Denoël, coll. « Lune d’Encre », t. 1, 2012.

    35 De la même manière, malgré leur taille qui leur permet d’accueillir en leur sein un peuplement humain, leur intellect et leurs perceptions dépassant les nôtres, ou leurs facultés de déplacement instantané d’un bout à l’autre de la galaxie, les Animaux Villes mis en scène par J.-C. Dunyach et Ayerdhal dans Étoiles mourantes (Paris, J’ai Lu, coll. « Millénaires », 1999) se révèlent de simples citoyens de l’univers physique. Ils ont leurs cycles de vie et de mort, ainsi qu’une sagesse relative, quoique appuyée sur une longévité et une expérience importantes.

    36 P. Bordage, Les Guerriers du silence [1993], Paris, J’ai Lu, coll. « Science-fiction », 1998. Id., Frère Ewen (La Fraternité du Panca, vol. 1), Nantes, L’Atalante, coll. « La Dentelle du Cygne », 2007.

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    38 Dans Le Successeur de pierre (Paris, Denoël, 1999), J.-M. Truong fait de dieu un parasite de l’humanité, prêt à s’en débarrasser au profit des machines.

    39 Il est possible que cette divergence d’objectifs esthétiques ait joué dans le déclenchement d’une polémique entre ces deux écrivains, à partir de la préface à Retour sur l’horizon (Paris, Denoêl, coll. « Lunes d’encre », 2009) dans laquelle Serge Lehman liait le manque de légitimité de la science-fiction à ses rapports à la métaphysique. L’opposition de Roland Wagner à cette théorie a donné lieu à un fil de discussion nourri d’arguments solides : « Du Sense of Wonder à la SF métaphysique », [en ligne], Forum d’ActuSF, http://www.actusf.com/forum/viewtopic.php?t=8050&highlight=m%E9taphysique(06.02.2013).

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    Bréan, S. (2014). Les mille morts de dieu dans la science-fiction française. In N. Vas-Deyres, P. Bergeron, P. Guay, F. Plet-Nicolas, & D. André (éds.), Les Dieux cachés de la science fiction française et francophone (1950- 2010) (1‑). Presses Universitaires de Bordeaux. https://doi.org/10.4000/books.pub.12381
    Bréan, Simon. « Les mille morts de dieu dans la science-fiction française ». In Les Dieux cachés de la science fiction française et francophone (1950- 2010), édité par Natacha Vas-Deyres, Patrick Bergeron, Patrick Guay, Florence Plet-Nicolas, et Danièle André. Pessac: Presses Universitaires de Bordeaux, 2014. https://doi.org/10.4000/books.pub.12381.
    Bréan, Simon. « Les mille morts de dieu dans la science-fiction française ». Les Dieux cachés de la science fiction française et francophone (1950- 2010), édité par Natacha Vas-Deyres et al., Presses Universitaires de Bordeaux, 2014, https://doi.org/10.4000/books.pub.12381.

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    Vas-Deyres, N., Bergeron, P., Guay, P., Plet-Nicolas, F., & André, D. (éds.). (2014). Les Dieux cachés de la science fiction française et francophone (1950- 2010) (1‑). Presses Universitaires de Bordeaux. https://doi.org/10.4000/books.pub.12131
    Vas-Deyres, Natacha, Patrick Bergeron, Patrick Guay, Florence Plet-Nicolas, et Danièle André, éd. Les Dieux cachés de la science fiction française et francophone (1950- 2010). Pessac: Presses Universitaires de Bordeaux, 2014. https://doi.org/10.4000/books.pub.12131.
    Vas-Deyres, Natacha, et al., éditeurs. Les Dieux cachés de la science fiction française et francophone (1950- 2010). Presses Universitaires de Bordeaux, 2014, https://doi.org/10.4000/books.pub.12131.
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