1Le 10 octobre 2011, au cours d’une cérémonie amicale, l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et l’UFR d’études internationales européennes et comparatives ont rendu un premier hommage à Jean-Claude Masclet au moment où il faisait valoir ses droits à la retraite, selon la formule consacrée.

2Ces Mélanges, réalisés selon la meilleure tradition, élargissent cet hommage à l’ensemble de la communauté universitaire.

3Jean-Claude Masclet a été, en effet, un des acteurs majeurs de l’Université Paris 1, en y ayant occupé de nombreuses fonctions, à l’exception c’est un peu indélicat de ma part de le dire, de la présidence, à laquelle il était parfaitement préparé mais c’est l’effet du calendrier et de nos règles d’alternance. Pour le reste, il a donné beaucoup dans les trois facettes de notre métier : les trois facettes, car je pense qu’avec les fonctions d’enseignant et de chercheur il y a aussi celles d’administrateur… Malheureusement, nous ne sommes pas si nombreux à y porter de l’intérêt. Et, c’est bien dommage si nous voulons continuer à être dirigés par des universitaires. C’est une des garanties de notre indépendance. Il faudra bien que des volontaires se manifestent !

4Enseigner, c’est le fondement même de notre vocation : Jean-Claude a beaucoup enseigné et avec une large palette : le droit constitutionnel, national ou comparé, les libertés publiques, le droit international public ou les relations internationales, la science politique ou les grands problèmes politiques européens, le droit public économique et de manière significative le droit communautaire, devenu droit de l’Union européenne, qui était sa spécialité principale de ces dernières années.

5Bref, à l’exception du droit administratif pur, toutes les disciplines qui sont à la portée de l’agrégé de droit public qu’il est depuis 1983.

6Ces enseignements, ils ont été à Sceaux, première étape importante de sa carrière, puis naturellement à Paris 1 mais aussi à l’ENA, au Centre européen de Strasbourg, à l’IIAP qui a malheureusement disparu, à l’ENM et j’en oublie. C’est dire si sa collaboration a été recherchée !

7Suite logique de ces enseignements, il a été membre de nombreux jurys, l’ENA en 1996, le concours, aussi difficile, d’Administrateur de l’Assemblée nationale depuis 2000 et Directeur de projets de formation pour les magistrats de la République tchèque, pour les procureurs de la République de Hongrie, son intérêt pour nos nouveaux partenaires de l’Union européenne culminant avec sa fonction de conseil du gouvernement roumain pour l’adaptation de la Constitution roumaine à l’entrée dans l’Union européenne. Il me semble d’ailleurs qu’il reste encore un peu à faire dans ce pays auquel nous lie une longue tradition de coopération.

8Mais, l’autre facette classique de notre métier, c’est la recherche et, là, le talent de notre ami. est attesté par de nombreuses publications : neuf ouvrages en propre depuis une thèse remarquée sur le rôle du député et surtout, et nous nous retrouvons dans le même intérêt, un recueil de droit électoral ou un « que-sais-je ? » sur le droit des élections politiques, et puis bien sûr l’Europe : un « que-sais-je ? » encore, sur l’Union politique de l’Europe qui en est à sa neuvième édition et bien d’autres, qu’il faut compléter par une participation à plusieurs ouvrages collectifs. Il faut encore ajouter une bonne soixantaine, mais je suis en dessous de la réalité, d’articles dans des Mélanges ou des revues savantes où l’on retrouve ses deux inclinations principales, le droit électoral et politique et le droit européen. S’ajoutent à cela, suite naturelle de l’activité de recherche, la direction d’une collection juridique aux Éditions Foucher, l’appartenance aux comités de rédaction de la RFDC et de la RTDE, toujours cette dualité, ou sa participation au comité scientifique de l’Institut de la gestion déléguée. Tout cela témoigne d’une activité intense et montre qu’il n’est pas nécessaire de bénéficier d’importantes décharges de service pour trouver du temps pour écrire ! D’autant que s’ajoute à tout cela une intense activité administrative.

9Jean-Claude Masclet a montré très vite le goût qu’il avait pour cette partie, souvent peu considérée mais essentielle de notre mission : déjà à Sceaux où il a été Doyen de la Faculté Jean Monnet de 1988 à 1994, puis pendant plusieurs années vice-président de l’Université et aussi au niveau national en tant que membre du CNU de 1992 à 1995, ou comme expert auprès du Comité national d’évaluation.

10Mais, c’est surtout à Paris 1 où il est en poste depuis 1994 qu’il montre son intérêt pour les différentes missions de l’Université. Il a été ainsi président de la commission sociale d’établissement, président de la commission électorale, il y était destiné, mais surtout directeur d’UFR et vice-président du CEVU, dans les deux cas de 1999 à 2010, mandats d’une longueur particulière, ce qui témoigne de l’estime et de la confiance des membres des conseils !

11 Je veux souligner son rôle à la tête de l’UFR 07 Études internationales, européennes et comparatives pour laquelle j’ai une tendresse particulière puisqu’elle a été créée par mon père au tout début de Paris 1, avec l’ambition de dépasser les frontières disciplinaires. Il y avait des publicistes mais aussi des privatistes et des économistes, réunis par un intérêt pour le même objet. Cette UFR prend aujourd’hui sa place au sein de l’École de Droit de la Sorbonne. Nous avions sur sa création, son intérêt mais aussi les limites à ne pas dépasser Jean-Claude Masclet et moi, le même sentiment. Avec son prédécesseur Philippe Manin et son successeur Pierre-Michel Eisemann, cette UFR est restée et reste fidèle à sa mission d’origine. Elle s’inscrit pleinement dans l’offre des formations très diversifiées de l’École et est en particulier le support de bilicences avec de grands pays européens, bilicences dont nous sommes très fiers.

12Concomitamment donc, il a été vice-président de l’Université en tant que premier vice-président du CEVU, conseil très passionnant puisque c’est celui où nos étudiants sont le plus représentés mais aussi, et de ce fait, parfois un peu difficile à gérer… Mais, son sens de l’écoute et du dialogue, une rondeur que j’ai entendu qualifier d’ecclésiastique, il faut bien qu’il y ait une taquinerie dans ce panégyrique, y ont fait merveille puisqu’il a donc été plusieurs fois réélu, sous quatre présidents différents avec lesquels l’entente a toujours été très bonne et je peux en témoigner.

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13Trois parties pour dire ce qu’a fait Jean-Claude Masclet, c’est déjà beaucoup par rapport à nos habitudes et je devrais m’arrêter là. Mais, il m’en faut une quatrième pour souligner son goût pour l’innovation et la part essentielle qu’il a pris dans des activités déjà importantes pour notre Université et prometteuses pour l’avenir : je veux parler de l’enseignement à distance.

14Il s’y est intéressé très tôt, il y a une trentaine d’années, à un moment où ce n’était pas vraiment à la mode… C’est ainsi qu’il a fortement participé à la création du CAVEJ, le Centre Audiovisuel d’Études Juridiques des Universités de Paris, qu’il a dirigé pendant trente ans. Structure assez originale, c’est un service commun à six universités de la région parisienne mais qui est rattaché à Paris 1 et donc dirigé par cette Université. Nous avons décidément un rôle pilote en la matière puisque c’est également notre Université qui est l’établissement porteur de l’Université Numérique d’Île-de-France fort active et en voie de se généraliser à l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur de la région, outil extrêmement prometteur et qui accompagne d’ores et déjà les évolutions que le numérique introduit dans notre enseignement et notre administration.

15Le CAVEJ prépare aux diplômes nationaux de droit (capacité, licence, maîtrise) avec des cours audio, des cours en ligne et un tutorat adapté. Il concerne chaque année entre 4 500 et 5 000 étudiants et dépasse son berceau parisien en ayant une audience nationale, ainsi son implantation à Mayotte, mais aussi internationale avec de nombreux étudiants étrangers et des projets en cours, dont celui qui s’organise aux Seychelles pour assurer une présence française dans la nouvelle Université, à la création de laquelle nous avons participé l’année dernière. Nous avons là aussi un instrument d’avenir qui nous permet et nous permettra plus encore d’assurer le rayonnement de la pensée juridique française dans les pays où nous nous épuiserions vite en nous restreignant aux méthodes plus classiques.

16Cette expérience – ajoutée à celle que Jean-Claude a pu avoir comme membre du conseil d’administration du Centre national d’enseignement à distance de 1994 à 2000 – a fait qu’il a été tout naturellement porté à la présidence de l’Université Numérique Juridique Francophone lorsque notre cher ami Yann Tanguy, ancien président de l’Université de Nantes à laquelle je suis heureux d’avoir appartenu, a souhaité passer la main. L’UNJF est un groupement d’intérêt public, constitué sous cette forme à la demande du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle réunit plus de trente universités françaises assurant des formations juridiques, qui regroupent les trois quarts des étudiants en droit ainsi que les écoles du Conseil national du barreau et du Conseil supérieur du notariat. Elle a d’ailleurs vocation à réunir tous les acteurs de la formation juridique et, comme son nom l’indique, elle est ouverte aux universités de l’espace francophone. On ne sait pas assez qu’elle met à la disposition de ses adhérents plus de 60 cours en ligne, actualisés chaque année et interactifs, ainsi que des guides méthodologiques. Les étudiants des universités membres ont un accès libre et gratuit aux ressources de l’UNJF. Ils devraient en profiter davantage. Là encore, il y a un instrument dont les possibilités de développement sont considérables.

17La proximité de ces structures au sein de Paris 1, qui se renforcera géographiquement avec le projet Lourcine, est un atout exceptionnel pour cette université : CAVEJ, UNJF et UNR Île-de-France. Décidément, nous sommes en pointe dans ces techniques d’avenir et c’est largement à Jean-Claude Masclet que nous le devons.

18Je n’ai pas tout dit mais rassurez-vous, je ne me laisserai pas aller à une cinquième partie ! Et pourtant il faudrait ajouter quelques mots sur le dévouement de notre ami comme élu local, maire-adjoint de Montmorency en particulier. C’est vrai qu’il avait un peu de temps libre quand il rentrait chez lui !

19 Et, il faut souligner que cette intense activité a été reconnue par la République puisque Jean-Claude Masclet est Officier de la Légion d’Honneur, de l’Ordre National du Mérite et Commandeur des Palmes Académiques. J’imagine que les nombreuses missions qu’il a remplies pour aider au bon déroulement des élections dans plusieurs pays africains, la République Démocratique du Congo en particulier, lui ont valu là aussi des marques de reconnaissance. Je sais en tout cas que les acteurs politiques de ce pays compliqué lui savent gré de son action discrète et efficace.

20Voilà, brièvement retracée, cette belle carrière et quelques aspects d’une personnalité que tous ceux qui ont contribué à ces Mélanges, organisateurs et auteurs, ont aimée.

21Le vieux titre traditionnel était Liber amicorum discipulorumque.

22Il me semble que les talents des Mélanges rassemblés montrent combien Jean-Claude Masclet est, en effet, apprécié de ses amis et de ses disciples.