Voter entre ennemis pour choisir le régime ?
Élections à conflictualité forte et défense illibérale de l’espace public libéral sous le Directoire
p. 155-167
Texte intégral
1Interroger le Directoire au prisme du rapport entre conflit et libéralisme permet d’éclairer cette période sous un jour nouveau. En effet, il faut rappeler la mauvaise réputation de ce régime. Dans une formule qui a fait date, Woronoff le qualifie d’« interrègne sans éclat » qui voit s’éteindre l’« épopée » révolutionnaire pour céder la place à un personnel politique subalterne et médiocre1. Ce serait ainsi une séquence intermédiaire de reniement et de corruption2. À l’inverse, sans chercher pour autant à le réhabiliter, des auteurs comme Gainot, Gueniffey ou Serna livrent des pistes de réflexion quant à son apport non négligeable dans des domaines tels que l’apprentissage des divisions partisanes, la prise en compte de l’opinion publique ou la gestion de l’incertitude propre aux élections. Autrement dit, le Directoire serait une sorte de laboratoire de la démocratie libérale3. Ce faisant, ces historiens nous indiquent comment décaler notre point de vue de manière à reconsidérer la valeur du Directoire. C’est la piste que nous suivrons ici.
2Précisons tout de suite que cette valeur n’est pas celle du bilan économique ou social de la période concernée. Rien n’interdit de discuter ces aspects, mais ce n’est pas ce qui nous intéressera. Peu importe, par exemple, que ce régime ait été ou non une régression par rapport à des avancées sociales de l’an II ou qu’il instaure ou non une liberté économique plus ample. Notre objectif n’est nullement d’émettre un jugement évaluatif sur le contenu des politiques publiques directoriales et leur caractère éventuellement « progressiste » ou « réactionnaire ». Ce qui nous intéresse est plutôt de nous prononcer sur la forme : la valeur du Directoire vient de ce qu’il semble caractéristique d’un espace public structuré par des antagonismes marqués. Or, en plus d’être pertinente à observer en tant que telle, cette situation est porteuse d’interrogations stimulantes sur le rapport entre conflit, pluralisme et libéralisme, tant sur le plan de la réflexion politico-institutionnelle que sur celui de la théorie politique.
3Le Directoire, en effet, a pour spécificité de voir s’affronter lors des élections législatives successives non pas des « adversaires », mais bien des « ennemis » au sens de Mouffe. En d’autres termes, le système électoral met en compétition les tenants d’options politico-morales incompatibles et exclusives les unes des autres, fruit d’un désaccord sur le régime lui-même4. Ce sont, comme nous le verrons, trois camps constitués par les défenseurs d’un royalisme plus ou moins intransigeant, par les partisans d’un retour à la politique de la Convention jacobine ou du Comité de salut public, et enfin par les directoriaux, dont la conception de la république s’adosse aux intérêts et aux idéaux d’une bourgeoisie élitiste et libérale. C’est la fécondité et les ambiguïtés intrinsèques de cette situation que nous souhaitons examiner.
4Nous proposerons pour cela quatre étapes. La première visera, à un niveau d’abord théorique, à définir plusieurs notions et à spécifier le champ conceptuel dans lequel nous allons évoluer. La seconde sera consacrée de façon plus empirique à la présentation du contexte politique post-thermidorien et directorial sous l’angle des élections annuelles et des coups d’État qui ont marqué la période. Puis nous reviendrons sur ce qui donne au Directoire sa valeur sur le plan de l’histoire des idées politiques : il s’agira tout autant d’étudier l’énonciation par plusieurs auteurs de l’époque de ce que nous nommerons un libéralisme « défensif » et post-révolutionnaire que de réfléchir pour terminer à ce que celui-ci nous dit des relations complexes entre la pensée libérale et ses ennemis.
L’espace public à haute intensité : modus vivendi et conflictualité politique
5Il convient tout d’abord de définir les notions que nous utiliserons ici. Les travaux de Mouffe sur la démocratie agonistique, où le conflit n’est pas décrit comme un élément indésirable, mais comme un aspect valorisable et nécessaire du débat public, constituent notre point de départ. Toutefois, ce point de départ est lié selon nous à une certaine insatisfaction. En effet, l’idée d’une transformation de l’ennemi en adversaire sous l’égide d’une règle du jeu commune – lorsque des partisans d’options antagonistes acceptent une relation de compétition normée –, mais aussi et surtout de valeurs communes, nous paraît relever d’une approche classiquement consensualiste : la position mouffienne ne débouche finalement que sur un affrontement certes tranché, mais parfaitement ritualisé et institutionnalisé, entre des acteurs qui partagent l’essentiel, à savoir l’acceptation d’un même régime5.
6Or, notre intérêt se porte sur les situations où la conflictualité est plus soutenue. Non pas bien sûr les situations de guerres civiles, mais plutôt celles où émerge, parfois très temporairement, un accord minimal sur un mode de régulation normée de l’antagonisme, sans pour autant que les camps en présence ne cèdent quoi que soit sur ce qui les oppose par ailleurs. À travers le cas du Directoire, nous étudions ainsi les situations où un désaccord fondamental sur le régime est momentanément arbitré par une compétition politique relativement stable, donc à l’occasion d’élections dont les règles sont à peu près partagées : des acteurs qui défendent des options incompatibles, parfois hautement agressives les unes envers les autres, acceptent un arbitrage ponctuel de leur différend.
7Ce qui nous intéresse dans le Directoire correspond globalement à ce que Rawls définit comme le stade du modus vivendi. Autrement dit, non pas le moment libéral, lorsque des citoyens soucieux de coopérer acceptent de restreindre leurs prétentions à la vérité et écartent du débat public ce qui les oppose, mais le moment où des ennemis, tenants de ce qu’il appelle des « doctrines compréhensives » à visée monopoliste, cohabitent partiellement sur un même territoire. Elles le font dans un équilibre fragile entre convergence des intérêts – avec élaboration d’une règle mutuelle (par exemple une loi électorale) – et recours à la violence à des fins de suppression des formes alternatives de définition de la vérité et du bien6.
8En ce sens, le modus vivendi prend place dans une arène où la compétition demeure le fait de conceptions irréconciliables de la société et de ses buts. Cela implique que le résultat des élections peut logiquement susciter la conquête des institutions par un camp peu respectueux des droits de l’opposition et entrant dès lors dans une logique d’intolérance hégémonique – ce que Rawls appelle le « fait de l’oppression7 ». C’est pour cette raison que nous localisons ce type de situations à un degré d’antagonisme plus marqué que le désaccord agonistique mouffien, articulé pour sa part autour d’une constitution et de valeurs communes, donc d’un régime au sens classique.
9Ces premiers éléments de définition nous permettent de dégager deux notions clés. La première est ce que nous qualifierons d’espace public à haute intensité. Si l’on considère que le concept d’espace public renvoie, sur un territoire donné, à l’ensemble des modalités d’argumentation et de compétition entre des options distinctes, et qu’il comporte donc à la fois une dimension d’affrontement et de consensus – les règles de la compétition et les valeurs qui vont éventuellement avec –, alors un espace public à haute intensité est celui où l’affrontement est maximal et le partage minimal, voire nul.
10À l’inverse, un espace public à faible intensité, que nous dirons métaphoriquement « tiédi » ou « refroidi », sera celui dont la part d’antagonisme est réduite, les organisations ou idées anti-régimes y étant marginalisées ou complètement absentes. Un tel espace public connaît la compétition politique, mais seulement entre adversaires, entre des acteurs qui partagent les mêmes valeurs fondamentales et s’entendent sur la plupart des grandes questions politico-morales. Celles-ci sont placées hors du débat public et ne dépendent pas du résultat des élections8. L’intensification de l’espace public résulte en conséquence de la présence d’alternatives plus ou moins soutenues dans la société civile et dans l’électorat, donc plus ou moins crédibles et aptes à entrer dans la compétition en contestant le régime.
11La seconde notion s’inscrit à l’intérieur d’un espace public à haute intensité. Il s’agit de ce que nous appellerons une élection à conflictualité forte. La définition en est très simple : une telle élection met en compétition des ennemis et non des adversaires, lorsque le choix des électeurs porte sur le régime et ses valeurs fondamentales, et pas seulement sur la palette des politiques publiques possibles à l’intérieur d’un même régime. À l’inverse, une élection à conflictualité faible sera celle où les citoyens seront invités à arbitrer par le vote des programmes certes distincts, et parfois source d’un débat public intense, mais dont la marge de différentiation sera en réalité limitée du fait de l’adhésion à un régime commun. Tout dépend de ce qui peut être légitimement mis en discussion, donc soumis à un processus de transformation. Plus la surface dévolue au débat est étendue, plus la conflictualité sera forte à l’occasion des élections : cela va des acquis législatifs importants (tels que l’abolition de la peine de mort) aux compétences et à la hiérarchie des institutions, voire au corpus de droits fondamentaux qui constitue le cœur du régime.
Les élections à conflictualité forte sous le directoire
12L’étude de la période post-thermidorienne et du Directoire apparaît singulièrement pertinente pour analyser les modalités et les effets d’un espace public à haute intensité. Ainsi, avant même la proclamation de la Constitution le 1er vendémiaire an IV (23 septembre 1795), le nouveau régime en cours de formation connaît un processus contradictoire entre deux directions, l’une consensualiste et l’autre antagoniste.
13La première, timide et éphémère, correspond à la tentative de formation d’un espace public stable, à intensité réduite, où les conflits se dérouleraient dans les limites d’un régime républicain offrant des garanties de sécurité juridique et économique et seraient arbitrés par des élections. Le retour de la liberté de la presse après la fin de la Terreur9, la reconnaissance de la liberté de culte le 3 ventôse an III (21 février 1795), le référendum organisé et gagné sur la Constitution le 20 fructidor an III (6 septembre 1795), la réforme du système électoral encourageant l’émergence d’une compétition politique10 et surtout l’amnistie générale du 4 brumaire an IV (26 octobre 1795), qui concerne tous les « faits purement relatifs à la révolution11 », vont dans le sens d’un processus de réconciliation et marquent la volonté de susciter le ralliement au nouvel ordre constitutionnel.
14Mais le Directoire naît dans un contexte qui ne se prête pas à ce processus. La guerre, la crise économique et le ressentiment persistant entre les divers camps politiques empêchent la pacification de l’espace public et exacerbent les clivages12. L’opposition au régime demeure forte dans la population tandis que les libertés politiques sont utilisées contre lui par les partisans de la contre-révolution. Perceptible dès l’an III à travers des insurrections populaires puis royalistes, cette tendance antagoniste révèle que les ennemis sont irréconciliables. Elle pousse les conventionnels à une position de méfiance envers les mécanismes démocratiques et libéraux qu’ils instaurent eux-mêmes. La régularité des élections, dont le but est d’assurer le renouvellement progressif du personnel politique et d’éviter les bouleversements, devient dès lors la source d’une conflictualité qui s’y trouve paradoxalement à la fois normée et amplifiée.
15De l’an IV à l’an VII, en effet, des élections sont organisées à un rythme annuel. À quatre reprises, les protagonistes ont donc l’occasion d’exprimer leur désaccord sur le régime avec plus ou moins d’ampleur selon le contexte. Chaque fois, le principe électif est formellement respecté, mais le résultat produit systématiquement une crise politique.
16En vendémiaire an IV (octobre 1795) ont lieu les premières élections législatives. Elles marquent une percée royaliste dans une période de reflux de l’extrême gauche appelée par la suite néo-jacobine. En germinal an V (mars 1797), une nouvelle victoire des partisans de la monarchie leur confère la majorité au Corps législatif13. Pichegru, Imbert-Colomés ou Jordan incarnent cette évolution conservatrice. Mais, en septembre, les partisans du Directoire, regroupés autour de Barras, arrêtent et déportent une soixantaine de députés royalistes et invalident la quasi-totalité des autres. C’est le coup d’État républicain du 18 fructidor an V (4 septembre 1797). L’année suivante, les élections de germinal an VI (avril 1798) voient s’accentuer la représentation néo-jacobine. Cela pousse les directoriaux à annuler ce résultat le 22 floréal an VI (11 mai 1798). Une centaine de députés, dont l’ancien babouviste Antonelle, ne peuvent exercer leur mandat. Cependant, en germinal an VII (avril 1799), les néo-jacobins remportent à nouveau les élections et prennent la tête d’un bloc majoritaire. Leur domination éphémère sur le Directoire dure le temps d’un été, avant que le coup d’État du 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799) ne mette un terme à ce régime et ouvre la voie au Consulat.
17Ces élections voient donc à chaque fois trois camps s’affronter et les partisans du Directoire perdre deux fois la majorité, d’abord au profit de l’extrême droite puis d’une coalition dominée par l’extrême gauche14. Pour quelle raison ces opposants participent-ils aux élections organisées par les directoriaux ? Il importe de comprendre comment des ennemis qui, en principe, se promettent mutuellement la guillotine en viennent étrangement à reporter tout ou partie du conflit qui les oppose dans un cadre normé. On pourrait imaginer une sorte d’éthos démocratique minimal qui verrait l’élection s’imposer comme le mode de légitimation dominant pour les protagonistes. Ce serait le signe que l’intensité dans l’espace public directorial est à la baisse, du moins pendant les phases électorales, et qu’un consensus politico-moral se dessine déjà.
18Cela ne fait aucun doute dans le cas des jacobins et des néo-jacobins : leur registre de légitimation passe par l’exaltation des procédures démocratiques. Malgré une certaine défiance envers le principe représentatif et une fascination pour les insurrections, l’élection est pour cette famille le vecteur privilégié de l’expression populaire. Sans compter que l’échec de Babeuf en l’an IV disqualifie temporairement les méthodes du complot, qui ne resurgiront qu’au xixe siècle. À l’inverse, c’est plus douteux concernant les royalistes. Dès l’an III, les stratégies utilisées par ce camp sont multiples. Elles sont parfois violentes, avec le débarquement militaire à Quiberon au cours de l’été 1795, la guerre en Vendée et l’insurrection à Paris le 13 vendémiaire an IV (5 octobre 1795). Mais elles passent aussi par l’utilisation des canaux d’expression autorisés par le régime : journaux (notamment L’accusateur public de Richer-Sérizy), pièces de théâtre, clubs politiques (tel le club de Clichy) et bien sûr participation aux élections. L’accord sur les règles du jeu ne se fait donc pas sur la base d’une culture démocratique partagée, mais dénote l’instrumentalisation du système électif.
19Le Directoire nous offre donc l’exemple d’un espace public précaire, ponctuel, n’existant qu’en pointillé entre deux coups de force. Il illustre comment des partisans de régimes distincts en viennent à instaurer un modus vivendi suffisamment pérenne pour que soit rendue possible la tenue d’élections, mais trop peu solide pour que le résultat fasse l’objet d’un consensus et débouche sur un système d’alternance pacifié et normé. Cet espace public ponctuel, qui disparaît régulièrement au profit de l’affrontement armé ou de la répression étatique, possède une intensité haute au sens où nous l’avons définie15. Or, cette situation de forte conflictualité électorale, en plus d’être intéressante à observer, a généré un ensemble de réflexions particulièrement fécondes chez les intellectuels de l’époque.
Rejet de l’incertitude électorale et libéralisme post-révolutionnaire
20Sur le plan de la pensée politique, l’une des spécificités de la période étudiée, directement liée à la situation d’antagonisme que nous avons décrite, est l’émergence d’une réflexion sur les moyens de « terminer la révolution » et donc de placer la république à l’abri de la contestation et d’un nouveau changement de régime. Chez des intellectuels qui adoptent par ailleurs les principes du libéralisme politique et économique, on assiste à la recherche de mécanismes destinés à protéger et à défendre le Directoire. Ce libéralisme défensif, caractéristique d’un état d’esprit que nous qualifierons de post-révolutionnaire, pose alors la question de la façon dont l’État républicain doit gérer la conflictualité sur le territoire, notamment lorsqu’elle s’exprime à l’occasion des élections et que les partisans d’options anti-régime utilisent le registre démocratique pour promouvoir leurs propres idées.
21Avant de donner plus de détails, il convient de préciser que ce mouvement intellectuel s’inscrit dans une culture politique qui participe de la même préoccupation, à savoir assurer la transition entre la période révolutionnaire et des institutions républicaines stables alors même que l’espace public demeure traversé par des antagonismes marqués. Les mesures prises par les thermidoriens et les directoriaux illustrent la palette des réponses possibles : limitation à un tiers le renouvellement des députés lors de la première élection de vendémiaire an IV16, exclusion des fonctions publiques pour les nobles émigrés et les prêtres réfractaires avec le décret du 3 brumaire an IV (25 octobre 1795), peine de mort pour toute personne réclamant le retour à la monarchie ou à la Constitution de l’an I avec la loi du 27 germinal an IV (16 avril 1796) qui restreint de fait la liberté de la presse17, obligation de serment de haine à la royauté et à l’anarchie – c’est-à-dire au jacobinisme – avec la loi du 24 nivôse an V (13 janvier 1797)18 et fermeture des clubs incarnant la critique du régime. Sans oublier la loi du 19 fructidor (5 septembre 1797) qui organise les proscriptions au lendemain du coup d’État19. Ainsi la liberté d’expression est-elle peu à peu confinée dans les strictes limites des opinions favorables à la république directoriale.
22Les milieux intellectuels proches du Directoire se font l’écho de ces mesures sur le plan théorique. C’est le cas notamment chez Benjamin Constant, Germaine de Staël et Sieyès, dont les textes et discours expriment à l’époque la recherche de mécanismes défensifs visant à préserver le régime non seulement de ses ennemis, mais aussi des résultats à leurs yeux trop incertains des élections dans un contexte de conflictualité forte.
23Constant, tout d’abord, défend la politique directoriale en élaborant une justification théorique d’institutions imperméables aux variations politiques. Il énonce dans ses textes et discours de l’époque l’idée que l’État ne saurait être « pyrrhonien », donc relativiste ou indifférent20. Il ne doit pas être neutre au sens où il se laisserait conquérir au gré des fluctuations électorales ou des modes dominantes dans l’opinion majoritaire, que cet auteur qualifie d’« ondoyante et passagère21 ». La majorité issue des élections n’a pas la priorité sur les principes républicains, qui incarnent la seule vraie volonté des citoyens par-delà leur versatilité naturelle. Dès lors l’État doit prouver sa solidité, démontrer sa capacité à assurer la paix civile et inciter ses ennemis à le rallier afin qu’ils règlent leurs différends sous l’égide d’une loi commune22. Et dans le cas où cela ne suffirait pas, il peut user d’une arme qui demeure le dernier recours de la république, la Terreur23. En même temps qu’il dénonce l’usage de l’arbitraire, Constant décrit de façon ambiguë la violence politique comme un mode de protection des institutions.
24Madame de Staël réfléchit également à la meilleure façon d’assurer la pérennité de l’État en situation d’incertitude électorale. Elle incite les républicains à ne pas se dessaisir naïvement du pouvoir en organisant des élections hasardeuses : le contexte politique ne se prête pas à l’alternance et celle-ci serait néfaste aux acquis de la révolution24. Surtout, elle prône la formation d’une aristocratie républicaine, siégeant à vie dans un Corps conservateur dont les « auteurs de la révolution » seraient membres de droit. Ce serait selon elle un rempart contre les revirements de majorité électorale25. La Constitution mettrait ainsi en œuvre une dictature aussi légale qu’elle serait antidémocratique, le temps que s’épuisent ceux qui cherchent à renverser le Directoire et que le renouvellement des générations fortifie la légitimité de la république.
25Mais le principal penseur post-révolutionnaire de la période est Sieyès. S’il se montre très critique envers la Constitution du Directoire, sa détestation des nobles et des jacobins le rapproche du personnel politique du régime. Dès les débats constituants de l’an III, il propose la création d’un « jury constitutionnaire », un organe visant à protéger la Constitution, à contrôler son évolution et à la pérenniser en la sacralisant. L’objectif est de limiter les possibilités de révision, d’assurer la préservation des institutions contre les actes du Corps législatif et, à travers cette stabilisation, de susciter le retour à un esprit d’obéissance aux lois chez les citoyens26. Les principes fondateurs du système républicain incarnent une forme de supra-constitutionnalité dérivée du droit naturel : ils doivent être placés à l’abri des errements des représentants. Sieyès vise ainsi à assurer l’immuabilité du régime par-delà les aléas politiques. Point ultime de cette logique, les listes de notabilité qu’il propose en l’an VIII – par lesquelles les députés ne sont plus élus, mais choisis par les autorités en place – illustrent sa méfiance envers le caractère incertain des élections.
26C’est à l’occasion du coup d’État de fructidor an V, qu’il soutient activement, que cet auteur affiche sa proximité la plus frappante avec le Directoire, s’érigeant en énonciateur privilégié du registre défensif qui caractérise la période. Par l’intermédiaire de son allié Boulay de La Meurthe, il invite les députés à déchoir les nobles de leurs droits civiques et de leur nationalité, puis à les expulser hors de France, méthode jugée plus humaine que la simple « extermination ». Poussant à leur extrémité l’application des principes du contrat social et retrouvant les accents farouchement antinobiliaires de son livre de 1789, Qu’est-ce que le Tiers-état ?, il affirme que les ennemis de la république sont extérieurs à la nation et sont donc en état de guerre contre le peuple. Dès lors, ils ne peuvent être considérés comme de vrais citoyens27. Précurseur du « libéralisme des modernes », Sieyès n’en manifeste pas moins une violence indéniable contre ceux qui menacent à ses yeux la stabilité post-révolutionnaire.
L’invention de la défense illibérale de l’espace public libéral
27Les mesures prises par le Directoire autant que les réflexions de ces auteurs nous semblent particulièrement intéressantes dans la façon dont elles posent la question des mécanismes par lesquels un régime à vocation démocratique et libérale se défend contre ses ennemis28. Doit-on y voir la trahison par les directoriaux de leurs propres principes constitutionnels ? Faut-il en déduire qu’ils manquèrent la concrétisation des valeurs qu’ils prétendaient défendre ? C’est la thèse que l’on retrouve souvent dans les analyses de cette période29. L’échec du Directoire serait directement imputable à l’incapacité de ses élites à accepter la diversité des opinions, la compétition partisane et l’alternance politique, et surtout à respecter les résultats électoraux30.
28Nous proposons une autre hypothèse, selon laquelle l’ensemble des mécanismes et concepts défensifs évoqués sont au contraire une étape spécifique dans la construction, la délimitation et la protection d’un espace public libéral. Pour reprendre le vocabulaire rawlsien, toujours très policé, leur objectif est de « décourager » les options anti-régime, c’est-à-dire les doctrines compréhensives dites « déraisonnables ».
29Afin d’approfondir cette idée, nous devons préciser la distinction que nous établissons entre pluralisme et libéralisme. Le premier terme renvoie dans notre propos à une situation de multiplicité de positions politico-morales (visions du monde, idéologies politiques et religieuses, corpus de valeurs issus d’un système philosophique, etc.) incompatibles entre elles et qui luttent plus ou moins agressivement pour le monopole de la vérité et du bien. Ce sont autant de propositions de régime en concurrence pour l’organisation de la Cité. Chez Rawls, ce phénomène est traité comme un fait et il est qualifié de « pluralisme simple ». Le second terme, par contre, décrit chez cet auteur une limitation du pluralisme autorisant sur un territoire donné la compétition entre certaines positions dotées de qualités formelles précises (tolérance envers les options concurrentes, modération dans la prétention à détenir la vérité exclusive, reconnaissance de droits mutuels…) qui les rendent aptes à cohabiter au sein d’un même régime.
30Dès lors, nous dirons que l’espace public à haute intensité est pluraliste, tandis que l’espace public à intensité réduite est libéral. L’évolution de l’un à l’autre peut alors se faire de deux façons. Soit les tenants des options belliqueuses sont exclus ou « découragés », soit ils paient une sorte de « droit d’entrée » constitué de l’acceptation des qualités formelles évoquées ci-dessus31. En ce sens, pluralisme et libéralisme sont incompatibles. Le second est une atténuation et une réduction – nous pourrions dire un appauvrissement – du premier, quand des options hostiles au régime entrent dans un processus de ralliement et que leurs énonciateurs s’engagent à respecter durablement les règles du jeu électoral et l’alternance politique32. À l’inverse, lorsque les concessions impliquées par ce « droit d’entrée » sont considérées comme exorbitantes et sont rejetées se pose nécessairement, pour ceux qui ont un intérêt au maintien d’une conflictualité faible, la question de l’usage de méthodes illibérales, éventuellement violentes, pour préserver l’espace public libéral. Nous pensons que c’est précisément ce dont le Directoire nous donne une illustration très nette dans un contexte qui n’est pas celui d’un libéralisme étatique achevé, mais d’une transition post-révolutionnaire.
31S’en référer aux principes libéraux pour reprocher aux directoriaux leur réticence à laisser accéder au pouvoir des forces anti-régime, comme le font beaucoup d’historiens de la période, nous semble donc biaisé. Cela revient à reprocher aux partisans de la Constitution de l’an III d’avoir empêché non pas l’émergence d’un multipartisme pacifié – qui est le propre d’une relation entre des adversaires et non des ennemis –, mais le renversement du régime. Dès lors, la valeur du Directoire réside dans ce qu’il nous dit de la part de violence, de répression et d’exclusion qui accompagne la formation et la stabilisation d’un espace public à intensité réduite. En ce sens, il montre que le libéralisme ne se maintient qu’en luttant contre le pluralisme.
32Plutôt que de voir dans le Directoire une trahison du libéralisme, il importe donc d’en relever les tentatives pour affranchir l’espace public des options hostiles au régime. L’objectif est ainsi de diminuer la marge d’incertitude propre aux résultats des élections, ce qui est typique d’un système politique en cours de transition vers une démocratie représentative stable. Le rejet des royalistes et des jacobins n’est pas un rejet du libéralisme de la part des directoriaux : un régime libéral ne peut perdurer qu’avec un haut degré de consensus et la période étudiée – que l’on pourra qualifier d’inaugurale sur ce plan – montre à quel point ce consensus s’obtient et se préserve par des moyens possiblement illibéraux. Dans une situation d’antagonismes marqués entre ennemis, les modalités consensualistes et les critères de coopération entre simples adversaires ayant payé leur « droit d’entrée » ne peuvent tout simplement pas s’appliquer. Aussi ouvert soit-il à la diversité des opinions, le libéralisme ne promeut ici la liberté qu’à condition d’organiser en même temps la résistance parfois intransigeante, donc empreinte d’intolérance et de répression, envers le pluralisme.
Conclusion
33Dans ce qui précède, nous avons réfléchi à ce que le Directoire révèle des conditions de construction et de consolidation d’un espace public à basse intensité. L’intérêt de cette séquence historique réside donc dans ce qu’elle préfigure les questionnements ultérieurs sur la « démocratie militante », à savoir la palette des mécanismes défensifs qu’un régime démocratique et libéral s’autorise à mettre en œuvre pour éviter que les options anti-régime n’utilisent l’ensemble des droits, libertés et procédures propres au libéralisme pour le renverser. Plus largement, l’étude de la période concernée permet de mettre au jour la part préalable, et toujours réactivable, d’exclusion et de violence induite par la délimitation d’une arène de débat entre options dites « raisonnables ».
Notes de bas de page
1 Denis Woronoff, La République bourgeoise, Paris, Seuil, 2004, p. 7.
2 Sur le discrédit durable de cette période dans l’historiographie française, voir Pierre Serna, « Le Directoire… Un non-lieu de mémoire à revisiter », dans Philippe Bourdin, Bernard Gainot (dir.), La République directoriale, Clermont-Ferrand, Société des études robespierristes, 1998, vol. 1, p. 37-63.
3 Bernard Gainot, « Le contentieux électoral sous le Directoire », Revue historique, 642, 2007, p. 325-353 ; Patrice Gueniffey, Le nombre et la raison, Paris, Éditions de l’EHESS, 1993, p. 514 ; Pierre Serna, La République des girouettes, Seyssel, Champ Vallon, 2005, p. 415-416.
4 Chantal Mouffe, Le politique et ses enjeux. Pour une démocratie plurielle, Paris, La Découverte, 1994, p. 14. Dans la suite de cet article, nous utiliserons les termes « ennemis » et « adversaires » selon cette définition, qui renvoie chez Chantal Mouffe à la distinction entre une relation « antagoniste » ou « agonistique ».
5 Mouffe parle volontiers de la nécessité d’un consensus sur des valeurs éthico-politiques, le conflit ne portant alors que sur leur interprétation. Voir, par exemple, Chantal Mouffe, « Deliberative Democracy or Agonistic Pluralism », Social Research, 3, 1999, p. 745-758. Sur cet écueil dans sa démarche, voir Stefan Rummens, « Democracy as a Non-Hegemonic Struggle ? Disambiguating Chantal Mouffe’s Agonistic Model of Politics », Constellations, 3, 2009, p. 377-391 ; Martin Beckstein, « The Dissociative and Polemical Political : Chantal Mouffe and the Intellectual Heritage of Carl Schmitt », Journal of Political Ideologies, 1, 2011, p. 33-51.
6 John Rawls, Libéralisme politique, Paris, PUF, 1995, p. 186-188.
7 John Rawls, Libéralisme politique, op. cit., p. 64.
8 John Rawls évoque des questions « éliminées de la discussion politique » et qui, dès lors, « n’ont plus à faire l’objet de décisions politiques à la majorité ou par d’autres formes de scrutin pluraliste » (ibid., p. 191, n. 1).
9 Cette liberté resurgit après la chute de Robespierre, mais suscite très vite la méfiance des conventionnels. Elle est toutefois consacrée dans la Constitution de l’an III (art. 353). Claude Bellanger, Jacques Godechot, Pierre Guiral, Fernand Terrou (dir.), Histoire générale de la presse française, Paris, PUF, 1969, vol. 1, p. 519-522.
10 Patrice Gueniffey, Le nombre et la raison, op. cit., p. 500-501.
11 Bronislaw Baczko, « Briser la guillotine. Une amnistie thermidorienne », Crime, histoire & sociétés, 2, 2004, p. 5-31.
12 Bronislaw Baczko, Comment sortir de la Terreur, Paris, Gallimard, 1989, p. 157.
13 Jean-René Suratteau, « Les élections de l’an IV », Annales historiques de la Révolution française, 124, 1951, p. 374-393, et 125, 1952, p. 32-62 ; Jean-René Suratteau, « Les élections de l’an V aux Conseils du Directoire », Annales historiques de la Révolution française, 5, 1958, p. 21-63.
14 Il n’est pas dans notre propos d’ouvrir le débat complexe sur la nature plus ou moins anti-régime de ces deux familles politiques. Sans méconnaître les nuances dans les positions des acteurs (parfois tentés de se rallier à la Constitution), nous retenons ici la thèse d’une menace réelle pesant sur le Directoire.
15 Contrairement à Emmanuel Picavet, nous ne pensons donc pas qu’une société stable puisse être fondée sur un modus vivendi, du moins si celui-ci concerne des options réellement antagonistes. C’est ce que semble admettre Neal, qui défend un modèle de modus vivendi hobbesien, mais reconnaît que celui-ci ne garantit pas la pérennité de la société concernée. Voir Emmanuel Picavet, « La doctrine de Rawls et le pluralisme comme modus vivendi », Revue internationale de philosophie, 237, 2006, p. 369-386 ; Patrick Neal, « Vulgar Liberalism », Political Theory, 4, 1993, p. 623-642.
16 Deux décrets assurent une majorité de deux tiers de thermidoriens dans le futur Corps législatif. Voir Mona Ozouf, « Les décrets des deux tiers ou les leçons de l’Histoire », dans Roger Dupuy, Marcel Morabito (dir.), 1795. Pour une République sans Révolution, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 1996, p. 193-209 ; Dmitri Bovykine, « Les décrets des “deux tiers” : l’ambition des pouvoirs ou une mesure indispensable ? », dans Michel Vovelle (dir.), Le tournant de l’an III, Réaction et Terreur blanche dans la France révolutionnaire, Paris, Éditions du CTHS, 1997, p. 43-53.
17 À la suite du coup d’État de fructidor, cette liberté est officiellement abolie par la loi du 19 fructidor an V. Alma Söderhjelm, Le régime de la presse pendant la Révolution française, Genève, Slatkine, 1971, vol. 1, p. 105-116.
18 Marc Deleplace, « La haine peut-elle être un sentiment républicain ? À propos du serment civique de l’an V », Annales historiques de la Révolution française, 358, 2009, p. 49-72.
19 Pour le détail de cette loi très répressive, voir Georges Lefebvre, La France sous le Directoire, Paris, Éditions sociales, 1984, p. 429-433.
20 Benjamin Constant, De la force du gouvernement actuel de la France et de la nécessité de s’y rallier, Paris, Flammarion, 2013, p. 47-48.
21 Id., Des réactions politiques, dans ibid., p. 112.
22 Ibid., p. 113.
23 Id., De la force du gouvernement actuel de la France et de la nécessité de s’y rallier, op. cit., p. 49-51. Sur ces aspects de la pensée de Benjamin Constant, voir Bernard Gainot, « Benjamin Constant et le Cercle constitutionnel de 1797 : la modération impossible », Annales historiques de la Révolution française, 3, 2009, p. 103-118.
24 Madame de Staël, Des circonstances actuelles et autres essais politiques sous la Révolution, Paris, Honoré Champion, 2009, p. 357-358.
25 Madame de Staël, Des circonstances actuelles, op. cit., p. 375-385.
26 Emmanuel-Joseph Sieyès, Opinion de Sieyès, sur plusieurs articles des titres IV et V du projet de constitution, prononcée à la Convention le 2 thermidor an III ; Opinion de Sieyès, sur les attributions et l’organisation du jury constitutionnaire, prononcée à la Convention nationale le 18 thermidor an III, dans Emmanuel-Joseph Sieyès, Œuvres, Paris, EDHIS, 1989, t. 3.
27 Antoine-Jacques-Claude-Joseph Boulay de La Meurthe, Rapport au Conseil des Cinq-Cents sur les ci-devant nobles et anoblis, Séance du 25 vendémiaire an VI (16 octobre 1797), dans Guillaume Lallement, Choix de rapports, opinions et discours, prononcés à la Tribune nationale, Paris, A. Eymery, 1821, t. XVI, p. 300-327. Quelques semaines après le coup d’État, ce rapport est fait au nom d’une commission dont Sieyès est le membre le plus influent. Le texte porte l’empreinte de son style et il l’a très certainement dicté ou rédigé.
28 Selon Patrice Gueniffey, « chez les mêmes acteurs coexistent la sincère aspiration à substituer le règne de la légalité à l’empire de la force et la justification du recours à la force et à l’illégalité lorsqu’ils estiment […] que la légitimité dont ils s’estiment les dépositaires est menacée par la légalité qu’ils ont établie » : Patrice Gueniffey, « La Révolution ambiguë de l’an III : la Convention, l’élection directe et le problème des candidatures », dans Roger Dupuy, Marcel Morabito (dir.), 1795. Pour une République sans Révolution, op. cit., p. 49-78, ici p. 78.
29 Bernard Gainot, « Le contentieux électoral sous le Directoire », art. cité ; Lynn Hunt, David Lansky, Paul Hanson, « The Failure of the Liberal Republic in France », The Journal of Modern History, 4, 1979, p. 734-759.
30 Commentant le coup d’État du 18 fructidor et ses suites, Woronoff en conclut que « le régime libéral venait de perdre toute crédibilité » (Denis Woronoff, La République bourgeoise, op. cit., p. 75).
31 Dans l’approche rawlsienne, l’un des éléments clés de ce « droit d’entrée » est l’abandon par les citoyens de leur prétention à utiliser l’appareil d’État pour soutenir les seuls intérêts de leur doctrine spécifique (John Rawls, Libéralisme politique, op. cit., p. 90-91). Comme l’a rappelé Neal, cette exigence existe chez tous les théoriciens libéraux, qu’il s’agisse de Rawls et Larmore ou des tenants d’un libéralisme plus perfectionniste (Patrick Neal, « Vulgar Liberalism », art. cité).
32 C’est le rôle, chez Rawls, du consensus par recoupement : à travers celui-ci, les doctrines « raisonnables » incorporent les principes du libéralisme politique et les justifient selon leur propre perspective. Celles qui en sont incapables disparaissent ou ne survivent que « dans des couches relativement limitées de la société ». L’auteur ne dit toutefois rien du processus concret de leur marginalisation ou de leur expulsion (John Rawls, Libéralisme politique, op. cit., p. 240-241).
Auteur
Docteur en science politique, spécialiste de la pensée politique latino-américaine et chargé de cours au CELSA (Paris IV) ainsi qu’à Sciences Po Paris. Il est également membre du CRHI (Centre de recherches en histoire des idées), plus particulièrement comme animateur du groupe d’études sieyèsiennes à l’université de Nice Sophia-Antipolis.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Spinoza au XIXe siècle
Actes des journées d’études organisées à la Sorbonne (9 et 16 mars, 23 et 30 novembre 1997)
André Tosel, Pierre-François Moreau et Jean Salem (dir.)
2008
Spinoza transalpin
Les interprétations actuelles en Italie
Chantal Jaquet et Pierre-François Moreau (dir.)
2012
Adam, la nature humaine, avant et après
Epistémologie de la Chute
Irène Rosier-Catach et Gianluca Briguglia (dir.)
2016
La pensée comme expérience
Esthétique et déconstruction
Marc Jimenez et Vangelis Athanassopoulos (dir.)
2016