Des statuts bien pratiques
L’assemblée marseillaise et le maniement politique de la norme au xive siècle
p. 61-74
Résumés
Les statuts urbains sont bien connus et pratiqués par la société politique marseillaise sous domination angevine. Autour du conseil de ville et de ses délibérations enregistrées se dessine un usage de la norme statutaire qui diffère nettement du caractère monumental conféré ultérieurement aux différentes versions du Liber Statutorum. Ainsi les allégations de normes statutaires sont une pratique courante au cours des réunions de l’assemblée municipale. Elles permettent une instrumentalisation politique et parfois personnelle par des individus ou groupes éminents. Les normes se diffusent dans la ville depuis la tribune consulaire. Ainsi peut-on observer une certaine publicité donnée aux statuts auprès de l’assemblée du conseil – parfois nombreuse – et les effets qu’ils peuvent avoir en direction des Marseillais en général. L’étude entend montrer comment s’articulent avec souplesse les deux modes normatifs – ordonnances courantes de l’assemblée et statuts – pour former un régime de normativité cohérent et recomposer la domination comtale au profit du conseil de ville.
The urban statutes were familiar to the political society in Marseilles under the Angevine domination. Around the city council and the records of its deliberations, a usage of the statutory norm emerged that differed considerably from the monumental character conferred subsequently on the different versions of the Liber Statutorum. Hence the allegations to statutory norms were a common practice during the meetings of the municipal assembly. They allowed for political and sometimes personal manipulation, by individuals or by prominent groups. The norms of the city were delivered from the consular rostrum. One may observe a certain degree of public knowledge given to these statutes among the council assembly – at times plentiful – and to the effects they could have had concerning the people from Marseilles in general. This study intends to demonstrate how these two normative modes – current ordinances of the assembly and statutes – came together in a flexible manner to form a coherent regime normativity and recompose the seigniorial domination to the benefit of the city council.
Texte intégral
1La cité médiévale de Marseille a connu une distorsion historiographique qui intéresse tout particulièrement la thématique ici abordée : les statuts ont depuis le xiiie siècle occupé une place monumentale dans la représentation marseillaise des normes urbaines ; encore aujourd’hui, le volume le plus précieux conservé aux archives municipales de la ville est le Liber Statutorum composé à la fin du xive siècle, et la précieuse œuvre d’édition des statuts marseillais par Régine Pernoud a longtemps servi de référence universelle à la réflexion sur l’armature normative de la ville et, au-delà, des villes méridionales et méditerranéennes1. Mais précisément, il s’agit d’une représentation, que vient confirmer le caractère richement ornementé du Liber Statutorum. Par comparaison, l’abondance des registres de délibérations, continus à partir de 1318 au moins, a été négligée par la communauté historienne, qui en a essentiellement fait un usage opportuniste, afin de recouper des informations événementielles collectées dans d’autres matériaux documentaires.
2Pourtant, cette profusion d’ordonnances enregistrées, souvent criées dans la ville comme ayant valeur de loi, constitue une production normative sans doute d’intensité plus basse que les statuts officiels, mais bien réelle, ne serait-ce que par sa fréquence2. C’est ce contraste entre la très grande visibilité des statuts solennels du xiiie siècle et le caractère ordinaire des délibérations que j’interrogerai ici, en examinant la présence des normes « fondamentales » dans les registres courants du conseil. Il s’agira de décrypter l’usage quotidien des statuts au sein de l’assemblée de ville, une utilisation « pratique », au jour le jour et non monumentalisée de la norme fondamentale.
3Nous savons que le corpus statutaire marseillais faisait l’objet d’interprétations et d’amendements par l’assemblée de ville, dans le cadre de son affirmation en tant que pouvoir gouvernant face aux officiers de tutelle provençaux issus de la cour comtale d’Aix. Ce glissement vers un gouvernement de plus en plus autonome d’une ville qui se voulait terre adjacente à la Provence, n’admettant de se soumettre qu’au seul et lointain pouvoir des souverains angevins, se fit à la faveur des grandes crises politiques traversées par le royaume de Naples et la Provence à partir de la moitié du xive siècle3.
4Les actes de la pratique que j’examinerai sont les vingt registres de délibérations marseillais du xive siècle, couvrant une période de soixante-sept ans4. Le corpus statutaire, quant à lui, se compose de deux éléments :
- les chapitres de paix imposés à la ville lors de sa prise de contrôle par les Angevins au milieu du xiiie siècle.
- les six livres des statuts majoritairement composés durant les décennies précédentes.
5L’ensemble forme, un siècle plus tard, un patrimoine juridique revendiqué par les Marseillais, en tant que leurs « libertés et privilèges », expression souvent accolée pour former ce qu’ils appellent les « Statuts, Chapitres de Paix, libertés et privilèges ». Cette revendication est récurrente dans le langage politique municipal pour s’adresser aux pouvoirs extérieurs lors des séances de l’assemblée de ville, en particulier à l’occasion des serments des officiers de tutelle et durant certaines crises politiques. Ces mentions répétées des « Statuts, libertés et Chapitres de Paix » sont d’autant plus remarquables que les registres de délibérations consignent essentiellement les décisions adoptées, dans un style laconique qui laisse peu de place à l’argumentation5.
6Mais ici, moins que le topos du discours communal marseillais, j’examinerai les allégations plus précises de la norme statutaire au cours des travaux du conseil de ville, c’est-à-dire les moments où, de façon précise, la référence aux statuts et Chapitres de Paix soulève un débat, est un élément soumis à discussion, qu’ils soient amendés, examinés, interprétés, voire même remis en cause. Ainsi, par allégation des statuts, j’entends le fait de s’en prévaloir non de façon indistincte mais en argumentant sur pièces.
7Dans cet ensemble documentaire, il s’agira tout d’abord de comprendre la fréquence puis la nature des allégations de normes statutaires ainsi que les variations et évolutions constatables au cours du xive siècle. Puis, dans un second temps, on se demandera au profit de qui et de quoi se font ces références appuyées et argumentées aux statuts de la ville. Enfin seront questionnées l’articulation entre les statuts et les délibérations, leur cohérence d’ensemble et leur hiérarchie interne, au travers de la diffusion des normes permise par les séances du conseil.
Fréquence des allégations de la norme statutaire
8Les Chapitres de Paix et statuts constituent une référence très présente dans le langage des enregistrements de délibérations. Elle atteint une fréquence moyenne de deux invocations par séance – c’est-à-dire supérieure à tout autre argument récurrent. Faute des minutes exactes des interventions orales, on ne peut déterminer la part de ces évocations du corpus statutaire de la ville dans le déroulement réel des assemblées. Toutefois, les formulations laissent entrevoir que l’usage le plus courant de cet élément du discours politique municipal tient surtout à une précaution oratoire, au plus à une clause juridique : ainsi pour la désignation d’une ambassade, le compte rendu de la prise de décision spécifie que des conseillers ont été désignés pour représenter la ville et pour défendre ses intérêts sans préjudice aux Statuts et Chapitres de Paix de Marseille6.
9A contrario, pour identifier les plus significatives de ces allégations de la norme statutaire dans l’ensemble des registres du xive siècle, il faut retenir les délibérations dans lesquelles est développée une argumentation véritable, nettement centrée sur le contenu de ce corpus statutaire marseillais. Ainsi se dégage un groupe de cent cinquante-deux délibérations que l’on peut qualifier, à un degré ou à un autre, de « statutaires ».
10Tout d’abord, la répartition quantitative de ces différentes délibérations de nature statutaire indique d’importantes variations temporelles : certaines périodes semblent particulièrement propices aux délibérations en rapport avec les statuts.
11Au début de la période considérée, dans les années 1318 à 1332, les pics d’allégations de normes correspondent aux moments d’affirmation du pouvoir du roi Robert de Naples (1309-1343), notamment lors de ses séjours dans la ville ou en Provence. Le poids du souverain et de sa cour est particulièrement important alors, par exemple autour des cérémonies de translation des restes de Louis d’Anjou à l’église des Mineurs de Marseille en 1319. Si l’attribution des reliques du saint à Marseille bénéficie au rayonnement de la ville, c’est aussi durant la même année qu’à cinq reprises le conseil doit rappeler le contenu des Chapitres de Paix aux officiers royaux, qui sont par exemple rétifs à assumer financièrement les charges d’entretien du port et des défenses de la ville7.
12On retrouve cette forte présence des statuts lors des séances de l’assemblée des années 1348-1365, qui ouvrent une série de crises politiques entre Marseille et le reste de la Provence. Marseille cherche à la fois à se soustraire à l’autorité de la cour comtale d’Aix et à la structuration politique en Provence à l’œuvre au sein des assemblées d’états8.
13Durant le conflit appelé guerre des sénéchaux par les historiens de la Provence, de 1348 à 1351, la cité portuaire soutient systématiquement l’administration des sénéchaux de Provence nommés depuis Naples par la reine Jeanne, contre le sénéchal Raymond d’Agout et ses officiers, et contre la majorité des barons et communautés du comté9. Par la suite, devant l’insécurité militaire et les incursions de routiers issus de la guerre de Cent Ans, Marseille se tient autant que possible à l’écart des demandes de subsides royaux dans le cadre des assemblées d’états, au nom de ses Chapitres de Paix. Pour résister à la hausse généralisée de la fiscalité, la ville s’arc-boute sur ses privilèges anciens.
14La fin de la période prise en compte (1318-1385) connaît un certain déclin de la fréquence des questions statutaires traitées en séance. La situation politique et sécuritaire n’est pas plus calme en Provence, mais les Marseillais se trouvent moins souvent en conflit avec leurs officiers locaux de tutelle. Notamment durant les années 1380, lors du conflit dynastique entre Louis d’Anjou et Charles de Duras, les lignes de fracture entre les deux camps sont suffisamment tracées pour qu’aucun officier hostile aux prises de position marseillaises n’entre en fonction, dans la ville. Malgré quelques tensions, dans l’ensemble l’assemblée fait bloc avec son viguier et les autres officiers contre les adversaires de Jeanne de Naples et de Louis d’Anjou.
15Confirmant l’importance des rapports de force entre Marseille et les échelons supérieurs dont la ville subit la pression, ce sont les Chapitres de Paix qui, dans le corpus statutaire, occupent la plus grande part des allégations. Ces soixante-dix Chapitres avaient été conclus au milieu du xiiie siècle avec Charles Ier d’Anjou lors de la mise au pas des ambitions marseillaises de self-goverment10. Un siècle plus tard, ils permettent à Marseille de conserver une large part d’autonomie et protègent notamment le privilège de non extrahendo, d’être jugé dans la ville – qui impose la présence de tribunaux d’appel sur place –, ou encore le droit de la ville de ne pas être soumise aux mêmes impositions royales, taxes et péages que le reste de la Provence. Ainsi le statut de terre adjacente à la Provence définit un rapport à la couronne napolitaine plus individualisé, auquel tient Marseille.
Nature et contenu des allégations statutaires
16L’examen précis des allégations confirme la même tendance : la présence des normes statutaires dans les actes de la pratique des assemblées marseillaises permet au conseil de se prévaloir de ces normes pour sauvegarder les droits de la ville contre une autorité extérieure. Ainsi, la tutelle comtale et royale suscite la plus grande fréquence des allégations, avec 72 occurrences et près de 44 % du total, comme le 14 avril 1323, lorsque le conseil de ville signale au viguier les articles précis des Chapitres qui exonèrent la municipalité des dépenses de défense, au détriment des finances royales, que l’officier renâclait à mettre à contribution11.
17On peut y ajouter les allégations de normes statutaires qui sont faites pour protéger les prérogatives marseillaises contre une autre puissance extérieure à la ville (15,8 %), par exemple au cours du long conflit avec Arles, qui prétend, en 1360 puis 1365, soumettre les marchands marseillais à des péages ; dans un pareil cas, le conseil de ville se prévaut de ses privilèges auprès du souverain ou de la cour comtale d’Aix, qu’elle sollicite comme arbitre par courrier ou ambassade, texte statutaire à l’appui12. Cela peut valoir aussi contre des puissances non provençales, telles que Venise : en septembre 1323, le conseil de Marseille défend, au nom de ses Chapitres de Paix, le bon droit pour ses marchands de confisquer des marchandises sur un navire vénitien, affaire dont le doge avait saisi le roi Robert13. Le conseil brandit également ses normes statutaires face aux pouvoirs ecclésiastiques, pour des questions de fiscalité, des conflits de juridiction avec l’évêque ou de bans fonciers avec l’abbaye Saint-Victor, par exemple.
18Pour près du quart (23,6 %), les allégations de normes s’appuient davantage sur les six Livres des Statuts que sur les Chapitres de Paix. Ces allégations-là concernent moins des jeux de pouvoir avec une autorité de tutelle ou un pouvoir concurrent que le quotidien de l’usage statutaire. Les Chapitres de Paix étant formellement intangibles, c’est autour des six Livres des Statuts que l’on trouve notamment les questions de l’élaboration, de la validation, de la discussion de nouvelles normes. Ainsi, lors de deux séances d’août et de septembre 1319, sont discutés de nouveaux statuts, portant sur le pâturage des troupeaux et les consuls de Marseille à l’étranger. Une copie écrite du nouveau statut sur les troupeaux est d’abord remise à chacun des conseillers. Cela représente un effort scripturaire considérable, les conseillers présents étant fréquemment au nombre de plusieurs dizaines, dépassant parfois le maximum théorique de 8314. Le texte discuté, probablement dû à la commission des six statutarii dédiée à ce travail, est remis aux membres de l’assemblée pour lecture et réflexion lors d’une séance ultérieure, qui entérine ce statut dix-sept jours plus tard. Le rôle du conseil est moteur dans le processus d’élaboration des statuts, avec une discussion effective du contenu des normes, pièces à l’appui. Cette procédure est confirmée dans le vie Livre des Statuts lui-même, par une mention du même jour de septembre 1319 où les articles 65 et 66 sont adoptés par l’assemblée15.
19Il est aussi, plus rarement (1,8 %), question de la conservation des textes statutaires. Ainsi, en mars 1340, le Livre des Statuts, qui existe déjà à cette époque sous forme de codex relié, est entre les mains d’un conseiller éminent, mais l’assemblée ordonne qu’il le remette rapidement aux syndics afin qu’il soit déposé dans la « caisse des privilèges », ailleurs appelée l’arca comunis, dans laquelle les syndics conservent les droits, libertés et privilèges de la cité16. Cette délibération, au demeurant assez discrète par sa taille et l’absence d’énoncé de ses tenants et aboutissants, est instructive quant à la maîtrise par l’assemblée elle-même de son patrimoine juridique le plus précieux.
20Le « travail » des statuts n’est pas qu’une tâche technique d’adaptation à des nécessités nouvelles. L’assemblée peut aller jusqu’à la suspension temporaire ou à la remise en cause de normes anciennes. Ainsi, en août 1350, en raison de la pénurie de juristes, le statut imposant un séjour continu de cinq ans dans la ville avant de pouvoir être élu juge municipal est suspendu17. Ce type de remise en cause est rare, avec 1,2 % des occurrences, mais son existence démontre que les Statuts ne sont pas intangibles.
21Ceux-ci sont également examinés pour vérification (11,5 %), sur ordre du conseil qui cherche un avis fondé, documenté, afin de pouvoir ensuite rappeler la norme. Les conseillers alors désignés ne sont pas nécessairement les six membres de la commission des statutarii, les « statutaires ». Cet examen des statuts, place avec netteté le corpus statutaire au rang de norme supérieure dans la « hiérarchie des normes », pour reprendre la vision pyramidale de Hans Kelsen18, selon laquelle les Chapitres de Paix se trouveraient au sommet de la pyramide des normes, dominant les Statut communaux et reléguant les ordonnances du conseil à une normativité de troisième rang. La suite de cette étude amènera à relativiser l’idée d’un tel édifice strictement hiérarchisé.
22À une fréquence assez proche (12,7 % des occurrences) sont enregistrés des rappels à la norme au cours des séances de l’assemblée du conseil. Les références aux textes sont parfois très précises, avec mention des articles, prouvant que la délibération a été précédée d’une information prise à la source. Par exemple, en août 1365, le conseil engage une procédure d’enquête dans la ville et de plainte auprès des autorités comtales et papales contre le sous-viguier de la ville, officier en charge des tâches de police, en raison de plusieurs arrestations et condamnations abusives. Son supérieur, le viguier, est rappelé précisément au 36e article des Chapitres de Paix qu’il a juré de faire respecter, lui interdisant de protéger un offenseur des Marseillais19.
23Un autre épisode est assez significatif : en novembre 1378, le conseil ordonne au viguier de faire enlever les chaînes et le carcan qu’il a fait installer devant le palais comtal, anciennement palais communal. Par cette entrave au fonctionnement institutionnel, le viguier tente de reprendre le contrôle d’un lieu majeur du pouvoir, visiblement perdu. C’est au nom des « anciens statuts » de la ville que l’assemblée condamne cette « innovation » qui assimile le viguier aux « renégats de Dieu et de la Vierge sa mère ». Les statuts sont lus en séance publique devant l’intéressé, qui essaie d’alléguer lui-même un article en se réclamant du 201e, sans succès, avant d’annuler sa décision et d’accepter de retirer les chaînes. Les syndics du conseil font ensuite immédiatement instrumenter l’échange par le notaire de séance20. Ainsi les allégations de normes peuvent être le fait d’interlocuteurs ou d’adversaires du conseil, mais ce dernier en maîtrise l’interprétation. Les revendications d’ancienneté se réfèrent directement aux traditions communales du xiiie siècle, qui se matérialisent ici dans le bâtiment disputé.
Les bénéficiaires des statuts
24De tout ce qui précède se dégage un usage marseillais des statuts assez commode, ad hoc. C’est du moins l’impression produite par les enregistrements de séances, dont la rédaction incombe à des notaires élus par le conseil. Ainsi, le corpus statutaire joue le rôle de point d’appui pour l’autorité municipale. Mais qui est celle-ci, quelles sont les personnes en qui s’incarne l’institution ? Peut-on parler, puisqu’il s’agit de Marseille et à l’instar de l’historien américain Daniel Lord Smail, d’une consumption of statutes21 ?
25Certains épisodes laissent entrevoir une conception assez personnelle, individuelle, de l’usage des statuts par des individus de premier plan dans la ville. C’est le cas de Guillaume de Montolieu, jurisperitus et licencié en droit, par ailleurs grand propriétaire foncier, qui suite à des rapines sur ses propriétés en février 1350, requiert du viguier qu’il fasse appliquer le statut en vigueur sur les voleurs. Dans un même mouvement, il prie le conseil d’adopter un nouveau statut punissant plus sévèrement ce type d’actes, et qui s’appliquera avec effet rétroactif à un coupable qu’il désigne lui-même en séance. Le conseil approuve et ordonne qu’il en soit fait ainsi. En pleine période d’instabilité politique et d’insécurité militaire, dans le cadre du conflit des sénéchaux opposant Marseille à Aix et au reste de la Provence, ce membre éminent des élites marseillaises a les moyens de défendre ses intérêts en usant du conseil et des statuts de la ville22.
26Si l’on constate une telle utilisation du corpus statutaire, comme d’ailleurs de l’institution municipale en général, par un groupe social et politique dirigeant, c’est de façon collective qu’il faut envisager la défense des intérêts de ces élites. Une trentaine d’années plus tard, si puissante soit-elle, la même famille Montolieu se voit poser des limites par le conseil sur ce même terrain. En décembre 1381, des lettres de la reine Jeanne octroient au nommé Arnaud de Montolieu et à sa famille des droits, notamment de chasse, sur les îles de la rade de Marseille23. Le conseil décide alors d’examiner la conformité de ces lettres avec les normes statutaires, au moyen d’une commission dédiée à cette question, composée de quatre conseillers dont un jurisperitus24.
27Il ne s’agit probablement pas ici d’une manœuvre de rivaux des Montolieu. Cette famille, comme d’autres avant elle, joue un rôle majeur dans la vie municipale en raison des prêts importants qu’elle consent aux officiers comtaux pour le bon fonctionnement de leur administration en période de troubles : ainsi sont financés l’approvisionnement, la défense et l’armement, les ambassades, etc. De ce fait, en remboursement ou en compensation, les créanciers reçoivent à ferme des revenus royaux dans la ville, et ce depuis la fin des années 134025. Incombe au fermier la charge de percevoir les revenus en question et d’en prélever une partie au passage. La fiscalité revient de fait à des membres du conseil, donc indirectement à la commune, en contradiction avec la lettre et l’esprit des Chapitres de Paix imposés par les Angevins depuis les années 1257-1262.
28L’enjeu est donc, dans cette affaire des îles marseillaises, de savoir la façon dont ces revenus fiscaux réintègrent l’autorité municipale. Par une forme d’évergétisme politico-financier des élites, le conseil de ville tire profit de la faiblesse des officiers royaux, remettant de facto progressivement en cause le rapport de domination hiérarchique exercé de jure par l’autorité comtale. Si certains membres des élites municipales jouent un rôle moteur, c’est sous le contrôle du conseil et dans le cadre strict de l’interprétation que celui-ci tient à faire des normes statutaires, ici pour les subvertir.
29Le processus d’appropriation temporaire des revenus fiscaux de la couronne sur Marseille se poursuit d’ailleurs les années suivantes : en mai 1385, le même Arnaud de Montolieu devenu syndic de la ville reçoit au nom de l’universitas une liste de dix-sept revenus royaux pour huit années26. Ceci au moment même où se négocie la première entrée en Provence, par Marseille, du nouveau souverain Louis II et de sa mère la régente Marie de Blois. Au terme de ces négociations, la reine Marie octroie à la ville un nouveau règlement municipal plus favorable au gouvernement autonome des Marseillais27.
30S’il y a appropriation des normes statutaires, ce n’est donc pas principalement sur un mode individuel. Un groupe dirigeant obtient peu à peu, grâce aux pratiques délibératives du conseil, la possibilité de composer ou de recomposer les statuts de la ville, à plusieurs reprises. On peut également citer pour l’année 1364 l’inscription au Livre des Statuts de l’acte d’union entre les deux parties de la ville de Marseille, lequel acte avait été donné aux Marseillais en janvier 1348, seize ans auparavant. Cette ascension du document d’unification au sommet de l’édifice normatif solde les derniers litiges liés aux reliquats de bans et de droits seigneuriaux sur la ville, notamment les droits ecclésiastiques sur la Ville haute28.
Statuts, délibérations, cohérence normative
31Le conseil de ville produit des ordonnances, consignées dans les registres des délibérations et dont une bonne part est criée29. Ces ordonnances sont elles aussi des normes, certes plus circonstancielles et de durée d’effet plus limitée que les statuts. Des normes du quotidien, liées à la pratique courante de l’administration urbaine, par un milieu plus large que les seuls jurisperiti et spécialistes du droit.
32Le nombre des participants aux assemblées de ville est très variable selon les séances à Marseille, mais il est potentiellement très important, jusqu’à plusieurs centaines de personnes différentes prenant part à des degrés divers à ses travaux au cours d’une même année30. La présence de ces Marseillais aux réunions du conseil se fait souvent en fonction de leur intérêt personnel ou du caractère plus ou moins brûlant des points à l’ordre du jour. Les normes édictées durant les séances connaissent une diffusion potentiellement très large, d’autant que tout ou partie des ordonnances adoptées peuvent être criées en langue vulgaire dans la ville par le crieur municipal, en plusieurs « lieux accoutumés » de la ville.
33Lorsque le conseil recourt aux statuts pour étayer sa production normative, le corpus statutaire bénéficie de cette diffusion. La copie remise en 1319 à chaque conseiller du projet de nouveau statut sur les troupeaux a déjà été évoquée. En 1359, des statuts nouveaux sont criés dans la ville après leur adoption31. En 1381, des cahiers sont rédigés en langue provençale, rappelant l’obligation de se conformer aux Chapitres de Paix, pour être lus devant l’assemblée des états de Provence réunis à Aix32. En 1383, une criée est ordonnée par le conseil pour rappeler aux prostituées les dispositions les concernant dans le ve Livre des Statuts33.
34Le fait pour le conseil de recourir aux statuts, et non pas de prendre une simple ordonnance circonstancielle, un arrêté, dirions-nous aujourd’hui, indique certainement une solennité plus grande, un supplément de légitimité pour traiter une question plus complexe. Mais il est intéressant de constater qu’a contrario, dans bien des cas, les conseillers passent outre les Statuts ou les Chapitres, de façon plus ou moins discrète : ainsi, à deux reprises, le conseil élit une commission en son sein pour frapper monnaie tout en s’assurant que la ville restera en conformité avec les Chapitres de Paix34 ; or les textes imposés par les Angevins au xiiie siècle fixent précisément les monnaies et mettent le droit d’émission monétaire en bonne partie sous le contrôle du viguier – ce qui donne à l’expertise recherchée un certain caractère superfétatoire, sinon de simulacre35. Une normativité s’appuie sur l’autre, antérieure, monumentalisée ou tout au moins placée plus haut dans la hiérarchie des normes, mais susceptible d’aménagements, d’ajouts, de transgressions voire de subversion36.
35Le conseil cherche à renforcer la légitimité de la normativité délibérative, c’est-à-dire issue des travaux de l’assemblée, par une forme d’imprégnation statutaire : l’assemblée urbaine prend le caractère d’un lieu de diffusion, de retransmission auprès de la population des normes anciennes et supérieures, mais aussi d’un lieu où celles-ci peuvent être discutées. Et ce indépendamment des rapports de force ouverts avec d’autres pôles de pouvoir.
36Ce rang de lieu de travail et de discussion permet au conseil d’entretenir un flou dans la distinction entre ses ordonnances et les statuts éligibles au Liber statutorum. Car de nombre des « nouveaux statuts » discutés au conseil, on ne trouve aucune trace dans les versions conservées jusqu’à nos jours de ce fameux Livre des Statuts. L’exemple du recoupement que nous avons pu faire entre le Liber statutorum et les registres de délibérations sur la date d’adoption des statuts concernant les troupeaux et le consul marseillais à Naples est en fait assez rare. Il n’existe aucune trace dans l’actuel Livre des Statuts des « statuts nouveaux » adoptés en octobre-novembre 1359, déjà mentionnés pour avoir même été criés à la population37.
37Ce sont donc des statuts au statut bien incertain, qui peuvent être adoptés voire allégués, mais finalement non monumentalisés38. Ils relèvent d’une catégorie particulière de statuts, d’une teinte grisée propre aux instruments de travail juridiques et administratifs39.
Conclusion
38Comme l’écrit Pierre Chastang dans son étude sur Montpellier, « la pratique n’est jamais réductible à une mise en pratique40 ». En ce qui concerne Marseille au xive siècle, la présence des textes statutaires dans les actes de la pratique délibérative a un caractère nettement moins technique que politique, même si la part du processus d’élaboration, de validation et de révision occupe une place non négligeable.
39Alors « bien pratiques », ces statuts le sont en effet, dans les deux sens du terme, le sens scientifique et celui de l’expression commune : ils s’intègrent en cas de nécessité à l’activité courante du conseil de ville, servant de référence dans les cas les plus litigieux ; ils sont instrumentalisés de façon individuelle et collective par le groupe dirigeant du conseil qui entend gouverner la ville.
40Ainsi les modestes registres de délibérations tenus sur des cahiers de papier maniés durant des semaines avant d’être reliés, d’un soin correct mais sans apparat particulier, nous font accéder à un caractère insoupçonné a priori de la norme statutaire : une grande souplesse de maniement, bien loin de la rigidité intangible volontiers prêtée à ce type de textes, à cette « loi fondamentale » ou « constitution » supposée. S’articulant grâce à cette malléabilité, deux modes normatifs, les ordonnances du conseil d’une part et les livres, articles et chapitres statutaires de l’autre, participent d’un même régime de normativité urbaine.
41Tout l’intérêt est de confronter, pièce à pièce, les actes de la pratique du gouvernement urbain à ce sommet normatif monumentalisé. En particulier, les séances de délibérations communales entrent en résonnance avec le corpus statutaire au moins plusieurs fois par semaine. Alors, du haut de cette prétendue pyramide normative, les siècles passés qui contemplent les Marseillais du conseil de ville ne les impressionnent guère. Ils savent s’en servir, en user dans leur activité politique et les intégrer à leurs écritures pratiques, tout comme ils parviennent progressivement à recomposer à leur profit la domination comtale imposée autrefois par les souverains angevins.
Notes de bas de page
1 Archives municipales de Marseille (désormais AMM), Liber Statutorum AA2 ; le volume AA1, contemporain du précédent, est plus complet et témoigne de la stratification normative jusqu’au xve siècle. R. Pernoud, Les statuts municipaux de Marseille, Monaco/Paris, 1949. P. Chastang, F. Otchakovsky-Laurens, « Les statuts urbains de Marseille. Acteurs, rhétorique et mise par écrit de la norme », dans D. Lett (dir.), La confection des statuts dans les sociétés méditerranéennes de l’Occident (xiie-xve siècle), I, Statuts, écritures et pratiques sociales, Paris, Publications de la Sorbonne/Centro Europeo di Ricerche medievali, 2017, p. 15-40.
2 On compte en moyenne au xive siècle une séance du conseil tous les 6,5 jours, avec une moyenne de 5,1 délibérations adoptées par réunion de cette assemblée ; l’activité est plus importante durant les périodes de crise. F. Otchakovsky-Laurens, Gouverner Marseille en temps de crise. Écrits et pratiques du conseil de ville sous les Angevins, Rome, 2017, p. 218-220, 301.
3 F. Otchakovsky-Laurens, « L’assemblée de ville, la tutelle du prince et les statuts à Marseille au milieu du xive siècle », dans D. Lett (dir.), Statuts communaux et circulations documentaires dans les sociétés méditerranéennes de l’Occident (xiie-xve siècle), II, Statuts, écritures et pratiques sociales, Paris, Éditions de la Sorbonne/Centro Europeo di Ricerche medievali, 2018, p. 55-67.
4 AMM, BB11 à BB20, contenant les enregistrements de vingt-quatre années discontinues pour un volume total de plus de 3300 feuillets relatant 1078 séances de l’assemblée municipale.
5 F. Otchakovsky-Laurens, « S’assembler, délibérer, enregistrer au xive siècle : quand Marseille se constitue en institution », Mélanges de l’École française de Rome/Moyen Âge, 127-1/2015.
6 Ainsi, le 6 janvier 1349, pro conservatione jurium capitulorum et libertatum civitatis pretacte […] ac dicte civitatis pace et capitulis ejusdem civitatis, in omnibus observatis et non aliter neque ultra ; AMM, BB20 fol. 82v.
7 AMM, BB11 p. 33-52, 53-58, 59, 63, 156-160, 185-188. On notera ainsi l’expression pacis capitula attendere et observare juxta suum posse, p. 63.
8 M. Hébert, Regeste des états de Provence, 1347-1480, Paris, 2007. Id., La cristallisation d’une identité : les États de Provence, 1347-1360, dans C. Dolan (dir.), Événement, identité, histoire, Québec, 1991, p. 151-164.
9 M. Aurell, J.-P. Boyer, N. Coulet, La Provence au Moyen Âge, Aix-en-Provence, 2005, p. 275-277.
10 Aux soixante-dix Chapitres datant de 1257 – AMM, AA1 fol. 120-137 –, il faut ajouter les vingt-trois points énumérés dans la Secunda Pax de 1262 – AMM, AA1 fol. 138-142.
11 Séance du 14 avril 1323, au cours de laquelle le conseil décide d’envoyer une ambassade vers le roi Robert pour faire valoir ses droits et l’obligation pour le viguier de payer les dépenses de défense et d’ambassade : [vicarius] solvat et solvi faciat juxta formam pacis capituli edita specialiter super isto – AMM, BB13 fol. 50-52.
12 Séance du 8 décembre 1360 – AMM, BB4 pièce 8. Le conseil obtient des lettres de la reine Jeanne et de hauts officiers angevins, confirmant l’immunité fiscale des Marseillais en Provence, pro observancia capitulorum pacis et libertatum Massilie jurata per reginalem Excellenciam et etiam per […] Provincie senescallos ; séance du 4 décembre 1366 – AMM, BB25 fol. 136-141.
13 Le roi Robert adresse aux Marseillais une lettre en faveur du marchant vénitien, ce que le conseil juge contra pacis capitula et libertates civitatis. Séance du 27 septembre 1323 – AMM, BB13 fol. 93-94.
14 Séances du 17 août 1319 – AMM, BB11 p. 181-184 – et du 4 septembre 1319 – BB11 p. 189- 190. La distribution d’une transcription du nouveau statut aux conseillers est conçue comme leur permettant de délibérer « plus pleinement », et nichilominus quibus habere volens pro pleniori habenda deliberatione eorum habere possit transcriptum, p. 182.
15 Livre VI, AMM, AA1 fol. 200v-201, édités dans Pernoud, Les statuts municipaux de Marseille, Monaco/Paris, 1949, p. 244-245.
16 Reponendus in captia privilegiorum inibi conservandus ; séance du 29 mars 1340, AMM, BB19 fol. 96v. La passation des clefs de la captia au moment du changement annuel des syndics est mentionnée lors de la séance du 2 septembre 1350 – AMM, BB21 fol. 36v-37r.
17 Item attento deffectu advocatorum civitatis Massilie, placuit consilio quod statutum factum quod nullus sit officius nisi prius habitaverit per quinque annos continuos in civitatis Massilie presentialiter suspendatur. Séance du 28 août 1350 – AMM, BB21 fol. 31r.
18 H. Kelsen, Théorie générale des normes, Paris, 1996.
19 Le conseil s’adresse ainsi au viguier, théoriquement officier de tutelle : quatenus attentat forma capituli pacis xxxvi per ipsum dominum vicarium jurati sub rubrica de guidagio non prestando ; séance du 5 août 1365 – AMM, BB24 fol. 216. Ce Chapitre de Paix apparaît sous le numéro 34 dans la version du Liber Statutorum conservé aux AMM, AA1 fol. 129v.
20 Cathenas cum collario […] formam statuti antiqui hujus civitatis editi contra renegantes de deo et virgine ejus matre nunc in presenciam dicti domini vicarii et consilii recitati. Séance du 8 novembre 1378 – AMM, BB27 fol. 253-255r. Le 201e statut évoqué – cette numérotation s’est perdue dans la version ultérieure qui nous est parvenue – est sans doute celui relatif aux conjurations et révoltes (Livre V, chap. 6, AMM, AA1 fol. 105v-106). Les références religieuses évoquent un affrontement relatif aux débuts du Grand Schisme d’Occident, l’élection de Robert de Genève à la papauté datant du 20 septembre précédent.
21 D. Lord Smail, The Consumption of Justice. Emotions, Publicity and Legal Culture in Marseille, 1264- 1423, Ithaca/Londres, 2003.
22 Séance du 28 février 1351 – AMM, BB21 fol. 106v-107. Aucune suite n’est connue à cette affaire.
23 Îles aujourd’hui appelées îles du Frioul, toujours comprises dans le territoire communal.
24 Séance du 28 décembre 1381 – AMM, BB28 fol. 85-87r.
25 Le premier cas de mise à ferme des revenus royaux est celui de Guillaume Mercier, qui rachète pour 400 florins la table de la mer (taxe sur les entrées de marchandises au port, qui constitue la principale source fiscale de la ville) le 6 août 1349 – AMM, BB20 fol. 165-167, 168v.
26 Cette cession est faite en compensation des sommes dues par la cour des officiers royaux ; il s’agit notamment des revenus des marchés, de la draperie, de la poissonnerie, du poids des céréales, des tables du change. Les revenus sont ensuite remis contre 1025 florins à six conseillers. Séances du 11 mai et du 13 mai 1385 – AMM, BB30 fol. 160-162, 164.
27 Ce règlement retire aux officiers royaux tout rôle dans la composition et l’organisation du conseil marseillais. Daté du 20 août 1385, il est joint à une série d’octrois nouveaux et de confirmations de privilèges, par lettres royales du même jour – AMM, AA8 pièce 1 ; AA1 fol. 143-149 ; AA5 fol. [i-ii], 10, 18, 23 ; AA6 fol. 22, 53. Le règlement de 1385 est également conservé aux archives départementales des Bouches-du-Rhône, B 1408 fol. 6 ; 14E 856.
28 Séance du 3 mars 1364 – AMM, BB24 fol. 168-172.
29 Suivant les années de 1318 à 1385, entre 10 % et 18 % des délibérations adoptées sont criées, d’après l’enregistrement qui en est fait, pour une moyenne de deux criées toutes les trois séances – AMM, BB11-30.
30 Ainsi l’on observe la participation active de 165 conseillers lors de l’année civique 1348- 1349, et de 337 en 1350-1351.
31 Séance du 23 novembre 1359 – AMM, BB22 fol. 242-247.
32 Séance du 18 juillet 1381 – AMM, BB28 fol. 52-53.
33 Séance du 8 mai 1383 – AMM, BB29 fol. 28v-29. Il s’agit des 5e et 6e articles du Livre V, De meretricibus et De prohibitione facta Judeis et meretricibus ne sint in stupis diebus prohibitis – AMM, AA1 fol. 106v-107.
34 Séance du 28 juin 1351 – AMM, BB21 fol. 134v-136. Séance du 23 juin 1365 – AMM, BB24 fol. 207-209.
35 19e et 20e Chapitres de Paix de 1357 : De moneta facienda et per quos fieri debeat ; De custodia monetarum. C’est en particulier ce dernier article qui donne au viguier un contrôle de la qualité des alliages et du poids des monnaies – AMM, AA1 fol. 126v-127.
36 C’est le cas déjà évoqué de la table de la mer, revenue entre les mains du conseil en 1351, de façon suffisamment ferme pour que le conseil empêche le viguier d’en disposer par la suite, au nom ipso facto usurpé des Chapitres de Paix. Séance du 5 octobre 1363 – AMM, BB23 fol. 261.
37 Séances des 9 octobre et 23 novembre 1359 – AMM, BB22 fol. 227-230 et 242-247.
38 Pour une comparaison à l’échelle européenne sur la question de l’usage et de la pratique statutaire, M. Blattman, « Aderenza alla realtà, rilevanza pratica e impiego effettivo degli statuti tedeschi e italiani (secoli XII-XIV) », dans G. Rossetti (dir.), Legislazione e prassi istituzionale nell’Europa medievale (secoli XI-XV), Pise/Naples, GISEM/Liguori, 2001, p. 127-142.
39 Pour reprendre la notion développée dans A. Fossier, C. Revest, J. Petitjean (dir.), Écritures grises. Les instruments de travail des administrations (xiie-xviie siècle), Paris, École nationale des chartes, 2019.
40 P. Chastang, La ville, le gouvernement et l’écrit à Montpellier (xiiie-xive siècle). Essai d’histoire sociale, Paris, 2013, p. 35.
Auteur
Maître de conférences en histoire médiévale à l’université Paris Diderot (Paris 7/ICT). Ses travaux portent sur l’écrit de gouvernement, la normativité juridique, la vie politique et les pratiques urbaines de délibération à la fin du Moyen Âge. Il a notamment publié La vie politique à Marseille sous la domination angevine (1348-1385), Rome, Collection de l’École française de Rome (543), 2017 ; « S’assembler, délibérer, enregistrer au xive siècle : quand Marseille se constitue en institution », Mélanges de l’École française de Rome - Moyen Âge, 127-1/2015 et « Par l’écrit et par le droit : la construction du bien commun à Marseille au xive siècle », Le Moyen Âge, 2014/3-4, p. 657-672.
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