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Une identité nouvelle pour l’Afrique du Sud

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William Bellamy

Première Partie. Le rejet de l’apartheid

1. Une société divisée

Texte intégral

1Dans ce chapitre nous chercherons à mieux comprendre l’essence de l’apartheid à travers l’interrogation suivante : est-ce que la catégorie « white » existe réellement ou bien n’est-elle qu’une catégorie chromatique fictive ? Sans cautionner les concepts racistes, il nous semble vital de s’interroger sur ce groupe de référence qui domine la vie sociale sud-africaine. D’abord, nous tracerons le projet de l’apartheid. Ensuite, nous examinerons la création de la catégorie « white ». Enfin nous examinerons deux tendances politiques opposées à l’apartheid ouvertes aux membres de cette catégorie.

Le projet de l’apartheid

2Pendant plus de quarante ans, l’Afrique du Sud évoqua un mot : l’apartheid. Or, l’apartheid n’existe plus, au moins sémantiquement. La lutte anti-apartheid a-t-elle pour autant pris fin ? L’apartheid signifie séparation dans la langue afrikaanse, voilà une définition simple. Nous faisons une séparation nette entre la société sud-africaine et un projet de société nommé l’apartheid. Les déclarations exaltant la fin de l’apartheid surtout avant même les élections démocratiques de 1994, montrent combien ce mot est symboliquement chargé. Il suffit, semble-t-il, d’éradiquer le terme pour que la société se transforme. Durant quarante ans, les mouvements sociaux ont exploité, sa charge symbolique en faisant l’amalgame : apartheid = racisme = Afrique du Sud. Cette confusion entre la société entière et un projet de société pose des problèmes épistémologiques aujourd’hui si l’on veut comprendre la mutation que vit ce pays.

3Notre définition de l’apartheid ne se réfère ni à une forme d’Etat ni au contraire d’économie capitaliste. Pour nous, le terme « apartheid » doit conserver une définition propre. L’exploitation capitaliste des ouvriers noirs existera pendant longtemps, est-ce pour autant qu’il faut toujours parler de l’apartheid ? Si l’Afrique du Sud veut tourner la page de l’apartheid, il faut s’attaquer à la représentation sociale qui le sous-tend. C’est pourquoi nous définissons l’apartheid comme un projet de société destiné à diviser la population dans l’espace réel et imaginaire.

  • 1 P. Coquerel, L’Afrique du Sud des Afrikaners, Bruxelles : Editions Complexe, 1992, p. 189.

4Le projet de l’apartheid prit forme durant les années 1930 parmi les intellectuels afrikaners, y compris le sociologue Dr Hendrik Verwoerd et l’anthropologue Werner Eiselin1. Selon cette conception très particulière de la société, Dieu a créé les races comme des divisions naturelles de l’humanité. Un nationalisme acharné associe des idées religieuses et biologiques. Les Afrikaners voyaient les races comme les pierres d’achoppement des nations, chacune ayant une identité culturelle à part et un destin spécifique. Or, la séparation totale était exclue car l’enracinement et l’enrichissement des colons européens dépendaient de l’exploitation de la main-d’œuvre africaine. Dès lors, il fallait envisager une solution novatrice pour partager l’espace tout en restant séparés.

5Il est difficile pour un observateur d’aujourd’hui d’imaginer l’impact de cette ségrégation. Cependant certaines séquelles demeurent comme reliques d’un passé révolu. Par exemple, l’architecture de la gare principale du Cap témoigne toujours de cette dualité entre les passagers de première classe qui sortent par la porte principale et les passagers de troisième classe obligés de sortir par la porte de derrière. La ségrégation métamorphosée en stratification économique est, certes, plus souple, mais demeure aussi efficace pour séparer les voyageurs. Les injustices de l’apartheid dépassent tellement l’imagination que trop souvent les critiques s’arrêtent à une description unidimensionnelle en acceptant les catégories sociales définies par l’apartheid. Alors que d’autres chercheurs proposent une dichotomie oppresseur – colon versus opprimé – Africain ou capitaliste blanc versus ouvrier noir.

6L’apartheid montre son originalité dans la division de la société en multiples « nations ». Dans une contorsion logique extraordinaire, les nationalistes ont pu montrer, en dépit des chiffres écrasants disant le contraire, que numériquement les Européens n’étaient pas la minorité ! Ils l’ont fait en découpant la population en catégories chromatiques construites. La construction des groupes est tellement truffée de contradictions que l’on ne peut penser qu’à une stratégie : diviser pour mieux régner.

La construction des catégories chromatiques

7L’ensemble des catégories sociales préconisé par le projet de l’apartheid s’élabora en référence à la catégorie dominante, « european », qui se métamorphosa sémantiquement en « white » quelque années plus tard. La Population Registration Act de 1949 stipulait qu’un « white » est celui qui semble être « white » et qui est accepté comme « white ». Mais qu’est-ce qu’un « white » ? Nulle part cette catégorie sociale dite « white » n’était définie précisément en tant que telle : par sa physionomie, sa langue, ses pratiques culturelles, ... Après trois générations, est-ce que ces anciens colons sont plutôt Africains, au même titre que sur un autre continent les Européens sont devenus Américains ?

8Des siècles de conflit inter-ethnique en Europe disparaissaient selon cette définition de « white ». Au sein de cette catégorie se trouvaient, par exemple, les Allemands et les Portugais qui n’ont ni la même physionomonie, ni la même langue ni les mêmes pratiques culturelles. En définitive, l’Etat sud-africain a établi une identité unificatrice d’une population fort hétérogène afin de consolider son pouvoir. La majorité des citoyens sud-africains ont subi un processus inverse.

  • 2 A. Beres, « L’archipel des bantoustans », Hérodote 41, 2e trimestre 1986, p. 14.
  • 3 Y. Lacoste « DU jeu des frontières à l’apartheid », Hérodote 41, 2e trimestre 1986, p. 9.

9A partir des travaux linguistiques des missionnaires, les anthropologes afrikaners décrivaient très scientifiquement les nouvelles ethnies. L’étude de ces groupes nécessite la taxinomie des langues et des coutumes sociales. La classification ethnique a été progressivement élaborée dans le cadre de programmes de recherche gouvernementaux à la fin des années quarante2. L’aboutissement de cette recherche survint en 1959 quand l’Etat (la loi Promotion of Bantu Self Government Act) divisa la population africaine en huit ethnies. Plus tard, elles seront dix, à savoir : Zoulou, Xhosa, Swazi, Ndebele du Sud, Sotho du Nord, Tswana, Sotho du Sud, Tsonga et Venda. Comme Yves Lacoste l’a souligné, « les stratégies de l’apartheid se fondent sur les différences ethniques, à tel point que (l’Etat) les surestime et les multiplie délibérément »3.

  • 4 A. Mabin, « Dispossession, exploitation and struggle: an historical overview of South African urban (...)

10L’essence de l’apartheid consistait à éliminer la majorité de la population en partant d’une séparation des groupes ethniques distincts. Mais à la différence des autres catégories, celle-ci, c’est-à-dire les Africains, fut déportée progressivement en dehors de « l’Afrique du Sud », vers les homelands. Dès 1913, l’Etat sud-africain scinda le pays en zones réservées aux Européens. Ce qui restait, c’est-à-dire moins de dix pour cent du pays, revenait à la majorité africaine. Si l’on survole l’Afrique du Sud, on constate qu’un aménagement urbain surprenant se manifeste autour des villes. De très loin, on distingue la forme et les couleurs caractéristiques des townships. La « ville apartheid », selon Mabin, s’appuie sur un noyau central entouré de quartiers réservés à la catégorie « white »4. Les autres catégories sont cantonnées dans les quartiers périphériques souvent séparés par des barrières physiques (rivières, chemin de fer, autoroutes, ...) ou par des zones désertiques, ces fameux ’No man’s lands’. La ségrégation forcée des villes sud-africaines déracina plus d’un million de personnes entre 1960 et 1983. Ce que nous retenons, c’est la division et le contrôle de l’espace urbain, qui s’avère être un terrain propice dans la lutte contre l’apartheid.

  • 5 Malan, op. cit., p. 55.

11L’exclusion des citadins dans les townships résulte d’une contradiction centrale de l’apartheid entre le besoin de main-d’œuvre et le désir de ségrégation. D’un côté il y a des quartiers dortoirs séparés en catégories chromatiques, de l’autre il y a la forteresse de la catégorie « white ». La création des zones résidentielles exclusives a permis l’intériorisation des rapports spatiaux à tel point que la catégorie « white » croyait vivre dans son propre monde. L’importation de la culture anglo-saxonne, ce que l’écrivain R. Malan a appelé « hand-me-downs from the great white mother culture » (les restes de la culture mondiale blanche)5, transforme la façon dont les individus interprètent leur environnement. La catégorie « white » s’atrophie par son ignorance et son isolement du reste de la population sud-africaine.

12L’élimination des points de contact en dehors du cadre structuré de travail empêche les Sud-Africains de s’unir. Chacun reste cantonné dans son quartier. Paradoxalement, les résidents du township sont les plus mobiles car ils doivent se rendre dans les usines, les commerces et les maisons forcément situés au sein des zones classifiées « white ». Le manque de mobilité géographique qu’impose la « ville apartheid » nous semble un élément essentiel. Rares sont ceux, même aujourd’hui [1993], qui osent défier « le bon sens commun » dominant pour se rendre dans les quartiers des autres, et encore moins dans les townships. Pendant des décennies, il fallait avoir une autorisation pour entrer dans les townships. Maintenant [1993] cet empêchement est d’ordre psychologique : la peur de ces zones inconnues. Cette peur du dialogue, voire même du contact, avec autrui, n’est malheureusement pas propre à l’Afrique du Sud.

Les frontières assignées

13Sans conteste, les catégories chromatiques dominent toujours la vie sociale en Afrique du Sud. Parmi la centaine de livres publiés sur ce pays chaque année, aucun n’échappe à l’utilisation des quatre groupes « white », « black », « colored » et « indian ». La ségrégation sociale existe toujours aussi bien dans l’espace que dans l’imaginaire. Les acteurs sociaux faisaient face quotidiennement à l’énigme suivante : comment changer en même temps le régime politique et sa représentation sociale sous-jacente ? Aujourd’hui [1993], tandis que le reste du monde se tourne vers les guerres inter-ethniques de l’Europe centrale, l’Afrique du Sud cherche à effacer deux siècles de ségrégation. La lutte contre les lois de l’Apartheid mobilisait la population car elle était très concrète. Les intellectuels anti-apartheid se chargeaient d’effacer des catégories chromatiques en montrant leur fonction idéologique.

  • 6 Voir par exemple l’article de G. Semin, « Prototypes et représentations sociales » in: D. Jodelet ( (...)

14Le concept même de société implique le besoin de décomposition en catégories distinctes du fait de son association avec un Etat-nation englobant des citoyens fort différents. A côté des représentations savantes, telles que l’ethnie et la communauté, il y a toujours les représentations populaires comme le lieu d’habitation ou les signes du Zodiaque6. A travers les stéréotypes associés à la représentation d’autrui, l’individu se situe lui même au sein d’un ensemble plus vaste qui est la société. Or, ce type de catégorie populaire est inutilisable à des fins politiques. Les termes de division (race, nation, communauté, ethnie, ...) ne sont jamais vides de signification politique. Les différences objectives entre les membres d’une collectivité existeront toujours : la couleur des cheveux, la date de naissance, la situation économique, les croyances, etc. Par contre, le fait que certaines caractéristiques deviennent signifiantes ne doit rien au hasard. Nous nous posons la question suivante : à quoi servent des catégories dans la société sud-africaine et plus généralement dans toute société ?

  • 7 E. M. Lipiansky, I. Taboada-Leonetti, A. Vasquez, « Introduction à la problématique de l’identité » (...)
  • 8 P. Salama, G. Mathias, L’Etat surdéveloppé : des métropoles au tiers monde, Paris : La Découverte, (...)

15L’apartheid assignait une identité selon la couleur de la peau. Ce serait une erreur, cependant, que de nier la capacité des Sud-Africains à refuser cette classification et à produire d’autres identités. En effet, il est plus exact de parler des stratégies identitaires utilisées dans une situation donnée. L’acteur, surtout en tant que membre d’un groupe, intériorise une certaine représentation sociale de sa place dans les rapports de pouvoir7. Nous nous intéressons à la façon dont les acteurs sociaux ordonnent leur monde. L’acteur se trouve confronté à un monde rempli d’objets divers : des événements, des personnes, des choses, des groupes. Comme disait Marx, « Les hommes font librement leur histoire, dans des conditions qui ne sont pas librement déterminées par eux »8. Nous démontrons que les mouvements sociaux sud-africains ont mis en cause la représentation dominante et ont produit une représentation nouvelle de la vie sociale sud-africaine.

16Nous définissons une représentation comme un modèle composé des catégories sociales (plus ou moins exclusives) qui rendent les diversités apparentes compréhensibles. Une catégorie dans cette définition est un ensemble d’individus susceptible de posséder une ou plusieurs caractéristiques communes mais qui ne se constitue pas librement. Voilà la différence fondamentale entre une catégorie et un groupe social qui s’organise librement.

La catégorie « white »

Les immigrés

17L’immigration des Européens commença en 1652 avec l’arrivée des Afrikaners puis s’amplifia en 1820 avec celle des Anglais. L’Afrique du Sud était d’abord une colonie de peuplement comme les Etats-Unis, l’Australie, l’Algérie ou Israël. Tandis que dans les deux premiers cas, la force de travail locale s’épuisa par un ethnocide lent et une immigration massive, dans les deux derniers cas comme en Afrique du Sud les autochtones devinrent une main-d’œuvre bon marché. Les immigrés économiques étaient venus d’Europe chercher de l’or et des diamants. Nous étudierons deux aspects de l’immigration : la stratégie de peuplement de l’Etat et l’arrivée des réfugiés économiques.

♦ La stratégie de peuplement

18L’arrivée des immigrés économiques venant d’Europe est un enjeu économique majeur. La réservation des emplois et le niveau dérisoire de l’éducation pour les Africains créèrent un déficit chronique de main-d’œuvre qualifiée. C’est aussi un enjeu politique, car les Afrikaners voulaient préserver leur avantage démographique au sein de la catégorie « white ». Après la deuxième guerre mondiale, le Premier Ministre Smuts encouragea ses compatriotes anglais à venir en Afrique du Sud. Lorsqu’il arriva au pouvoir, le Parti nationaliste, conscient de la fragilité de son avantage démographique, freina sérieusement l’immigration à l’exception des Néerlandais.

  • 9 Centre Europe-Tiers Monde, White Migration to Southern Africa, Geneva: Centre Europe-Tiers Monde, 1 (...)

19Une fois solidement au pouvoir, le Parti nationaliste s’est lancé activement dans la recherche d’immigrés européens par l’établissement du département d’immigration en 1961. Le profil type de l’immigrant était celui d’un Européen, de préférence protestant, exerçant un métier qui manquait en Afrique du Sud. Pour séduire les candidats attirés par les annonces les moyens ne manquaient pas : billet d’avion, logement, cours de langue, comité d’accueil9. Beaucoup de ces immigrés n’avaient même pas à se soucier de trouver un emploi. Ainsi la catégorie « white » s’est accrue. A ce mouvement important de population s’ajoutaient les travailleurs temporaires qui ne restaient que quelque mois.

  • 10 South Africa 1982, op. cit., p. 408.
  • 11 A. Metten, P. Goodison, Fighting for Apartheid: A Job for Life, Amsterdam: Anti-apartheid Movement (...)

20Pour les immigrés, trois facteurs ont influencé leur décision : la croissance économique garantissait un niveau de vie meilleur, l’absence d’opposition offrait une vie essentiellement apolitique, l’avion à réaction rendait toute décision migratoire facilement réversible. Rappelons qu’en 1960, le South African Airways (SAA) a introduit le premier avion long porteur à réacteur, le Boeing 707, dans les vols à destination de l’Europe10. Ces « Plane people » constituent une partie grandissante de la catégorie « white ». En 1986, on estime que sur les 4,8 millions classifiés « white », 2,1 millions avaient, ou pouvaient avoir, une nationalité européenne11.

21Beaucoup plus que la résolution 2396 des Nations Unies qui invitait dès 1968 toute nation à décourager l’immigration vers l’Afrique du Sud, la répression et la crise économique encouragèrent les « Plane people » à repartir. Après chaque événement important (1960, 1976, 1985), le solde migratoire redevint négatif à cause de l’émigration de ceux qui préfèrent prendre la fuite. Durant les années 1980, l’utilisation des appelés dans les townships et en Angola, motiva un nombre important de jeunes à quitter le pays au lieu de faire leur service militaire. L’autre facteur dans le ralentissement de l’immigration se trouve les actions des mouvements anti-apartheid qui projetaient une représentation répressive de la vie sociale sud-africaine. Enfin, seuls les Sud-Africains de souche, démunis de passeport étranger, n’ont pas de « position de repli » ni même l’intention de partir.

♦ Les réfugiés

  • 12 Un délégué au congrès de 1967 du Parti nationaliste au Transvaal a déclaré, « Les catholiques romai (...)

22L’Afrique du Sud, « le dernier bastion de pouvoir colonial », a accueilli les réactionnaires venus des états africains parvenus l’un après l’autre à l’indépendance : Kenya, Zambie, Angola, Mozambique, Zimbabwe, Namibie. La Révolution des œillets au Portugal et la victoire du FRELIMO (Front de libération du Mozambique) au Mozambique et du MPLA (Mouvement populaire de libération de l’Angola) en Angola provoquèrent la migration de réfugiés portugais vers l’Afrique du Sud et en particulier vers la ville de Johannesburg. Malgré une hostilité affichée envers les Portugais catholiques, les Afrikaners acceptèrent d’assimiler, souvent à l’extrême droite, ces anticommunistes confirmés12.

23L’indépendance du Zimbabwe en 1979 laissa l’Etat sud-africain seul et « encerclé ». Les « when we’s » (contraction de « quand nous étions en Rhodésie »), plus riches que leurs homologues portugais, s’intégrèrent mieux dans la catégorie « white ». A ces deux vagues majeures s’ajoutèrent les Polonais et les Russes recrutés par les chasseurs de têtes sud-africains après des événements survenus dans ces pays. Enfin, les mercenaires de tout genre s’installèrent afin de collaborer aux hécatombes au Mozambique et en Angola.

24L’immigration des occidentaux perpétua le système de l’apartheid en lui fournissant la main-d’œuvre qualifiée manquante. L’argument selon lequel chaque immigré crée des emplois pour les Africains doit être totalement rejeté. Par ailleurs, souvent conservateurs, les immigrés soutiennent massivement le régime minoritaire. Dans la crise actuelle que traversent les pays occidentaux, on imagine mal la répartition de ces « pieds-blancs ». Reste à savoir si ceux-ci accepteront un mode de vie moins oisif et une représentation sociale plus démocratique.

Un sujet amorphe

  • 13 E. Williams, Where have ail the Children Gone ?, Johannesburg: Ernest Stanton, 1980.
  • 14 J. Andriola, The White South African: an endangered species, Cape Town: Howard Timmins, 1976, p. 16 (...)

25Les ouvrages dédiés à la catégorie « white » en Afrique du Sud représentent une infime minorité de la vaste bibliographie. Trois types d’analyse se dégagent : la catégorie « white » comme classe dominante, les Afrikaners comme groupe à part et les études anthropologiques. Nous ne traiterons pas ici des ouvrages qui posent des questions alarmistes telles que « Est-ce que la planification familiale met en danger les Blancs ? »13 ou « Quand est-ce que l’Homme blanc s’arrêtera de creuser sa propre tombe ? »14 Tous les ouvrages parlent de cette catégorie. Cependant, depuis quelques années, certains auteurs prennent leurs distances avec la terminologie de l’apartheid, en expliquant que son usage dans le contexte sud-africain est inévitable.

  • 15 Un exemple parmi tant d’autres, W. Limp, Anatomie de l’Apartheid, Bruxelles: Casterman, 1972, p. 11

26Notre critique vise les ouvrages qui affirment implicitement ou explicitement que la catégorie « white » et ses représentants sont les seuls véritables acteurs sociaux. Les chronologies présentes dans beaucoup d’ouvrages donnent une idée précise des événements et par extension des acteurs sociaux. Mais, à part quelques exceptions (Sharpeville, Soweto, ...), les Africains sont absents des trois cents ans présentés15. D’autre part, les analyses structuralistes en particulier, heureusement dépassées aujourd’hui [1993], écartaient tous les acteurs sociaux.

27Une seconde critique est formulée par le mouvement de la conscience noire, à savoir que la majorité des ouvrages sur l’Afrique du Sud ont été écrits par des occidentaux avec un parti pris. La ségrégation de l’espace – conséquence directe de l’apartheid – oriente déjà la recherche car elle favorise l’échange avec les membres de la même catégorie chromatique que l’analyste. Par exemple, l’analyste occidental rencontre très facilement les membres de la catégorie « white ». Cependant, ses contacts avec le reste de la population passent obligatoirement par quelqu’un en raison de la langue. La rigidité de l’apartheid a créé des obstacles dans la communication et encore plus dans la compréhension, qui ne sont pas négligeables. Les études sociologiques sur les mouvements sociaux dans les townships restent malheureusement à écrire.

28D’autres analystes s’intéressent uniquement aux architectes de l’apartheid, les Afrikaners. La responsabilité pour toutes les injustices d’un système se déplace vers les Sud-Africains de langue afrikaans. Souvent très marquées par une démarche historique, ces études n’évoquent ni la métropole britannique, qui enracine la ségrégation même avant la victoire nationaliste, ni le reste de la catégorie « white », qui bénéficie autant que les Afrikaners de l’apartheid. Ces analyses nous permettent de mieux comprendre une partie de la réalité sud-africaine tout en l’isolant du reste.

29Enfin, troisième démarche, les études monographiques, ayant la forme très simple d’un récit de témoignages. Dans la pure tradition de l’école de Chicago, l’anthropologue Vincent Crapanzano décrit les habitants « white » de la petite ville rurale de Wyndal. Mais son choix de n’interviewer que les personnes classifiées « white », nous prive de l’autre moitié de la ville. Il caractérise les catégories ainsi :

  • 16 V. Crapanzano, Waiting the Whites of South Africa, London: Paladin Grafton Books, 1986, p. xx.

« Pour la majorité des blancs, l’attente s’ajoute à la peur. Pour la majorité des noirs, au-delà de leur désespoir, l’attente s’illumine par l’espoir, par la croyance que le temps est avec eux »16.

  • 17 S. Gordon, Under the Harrow: Lives of White South Africans today, London: William Heinemann, 1988.
  • 18 R. Buis, Religions Beliefs and White Préjudice, Johannesburg: Ravan Press, 1975, p. 48.

30Un autre observateur, Suzanne Gordon, entreprend une étude sur l’ensemble des membres de la catégorie « white ». Comme dans le livre précédent, Gordon nous livre des histoires de vie, fort intéressantes mais sans cadre analytique17. Par ailleurs, le sociologue, Robert Buis a démontré que les croyances religieuses, surtout parmi les membres de l’Eglise réformée hollandaise, justifiaient les comportements et les attitudes hostiles aux Africains18. Au-delà des différences individuelles, nous n’avons pas de facteurs unifiants qui pourraient transformer cet agrégat en un groupe social cohérent.

  • 19 M. Weber, L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris : Plon, 1964, p. 132.
  • 20 P. Van Niekerk, « Whites Join the Chicken Run », New Statesman 110 (2843), 20 Sept 1985, p. 19.

31Les divergences historiques et idéologiques entre les Afrikaners et les Anglais ne doivent pas nous masquer la convergence de leurs intérêts sous-jacents. L’existence d’une masse de compatriotes pauvres gène peu de Sud-Africains classés « white », dans tous les cas, pas plus que la misère (lointaine dans le Tiers-Monde et proche dans les banlieues) ne gêne les occidentaux. C’est parce que tous les deux ont une représentation sociale rassurante. Sans nous attarder sur cette comparaison, nous cernons quelque aspects clés de leur représentation. Premièrement, elle associe la civilisation occidentale avec la « race blanche », c’est-à-dire « le stade le plus avancé de l’être humain ». Deuxièmement, s’appuyant sur le christianisme, elle affirme que « Dieu vient en aide à qui s’aide lui-même », autrement dit, si les autres sont pauvres c’est parce qu’ils ne travaillent pas assez19. Troisièmement, elle insiste sur le fait que les colons sont les héritiers de la terre de leurs ancêtres car ils ont construit l’Afrique du Sud. Enfin, elle renforce la croyance que l’appartenance aux catégories chromatiques est une vérité objective, voire divine. La partage de cette représentation confirme l’existence d’une identité sociale exclusive. Ceux qui ne supportent plus les contradictions de l’apartheid ou simplement souhaitent maintenir leur niveau de vie partent pour l’Australie, la Nouvelle-Zélande ou bien l’Amérique du nord20. Ceux qui ne partagent plus la représentation dominante luttent pour une société nouvelle, voilà notre objet de recherche.

Les luttes contre l’apartheid

32La lutte contre l’apartheid a pris des formes très diverses. Sur le plan démographique, l’apartheid n’arriva jamais à inverser le flux de migration. A peine le freina-t-il pendant quelques années, retardant l’échéance inévitable. Nous examinerons deux tendances politiques ouvertes aux dissidents dans la catégorie « white ».

Le libéralisme

33La quatrième tendance politique est encore plus restreinte. La tradition libérale importée par certains colons anglais se développe parmi les intellectuels et les hommes d’affaires anglophones. Pour les libéraux, le combat politique passait d’abord par les élections en dépit du suffrage restreint. Deux partis ont été formés : le Parti libéral – soutenu par les intellectuels, et le Parti progressiste – soutenu par les hommes d’affaires. Ce dernier change sans cesse son nom : il devient le Parti réformé progressif puis le Parti progressiste fédéral et ensuite le Parti démocrate. A partir de 1961 et pendant treize ans, les électeurs d’une des banlieues les plus bourgeoises de Johannesburg ont été les seuls à choisir une candidate du Parti progressiste – l’opiniâtre Helen Suzman. Par ailleurs, les instituts comme le South African Institute of Race Relations (SAIRR) ou l’Institute for a Democratic Alternative in South Africa (IDASA) dénoncent avec virulence l’apartheid. En fait, les libéraux s’inquiétaient de la façon d’assimiler les personnes « civilisées » dans le système socio-économique.

34L’abolition de l’esclavage constitue en quelque sorte l’emblème des libéraux sud-africains. A partir de cette victoire ancienne, les libéraux se bornent à réduire l’oppression sans jamais mettre en cause le système social lui-même. Leur critique morale rejoint celle formulée par les Eglises anglophones. Les universités de langue anglaise sont des lieux de radicalisation pour certains étudiants, comme en témoigne le syndicat étudiant (NUSAS), et des lieux de refuge pour les professeurs et chercheurs libéraux opposés à l’apartheid.

  • 21 P. B. Rich, White power and the liberal conscience: Racial segregation and South African liberalism(...)

35Avec l’aide financière des organisations philanthropiques américaines, le SAIRR a pris le relais des initiatives destinées à stabiliser la main-d’œuvre urbaine, notamment les Joint Councils. Son objectif, entre autres, était d’étudier les conditions des Africains et de proposer des solutions à la radicalisation de l’élite africaine21. Malgré son discours libéral, l’institut refusait de prendre une position politique explicite sur l’application de l’apartheid. Certains associent son manque d’engagement à un acquiescement. Effectivement, les réformes proposées par Botha au début des années 1980 reprennent les grands thèmes libéraux comme la stabilisation des citadins et la cooptation de la couche supérieure des Africains.

36La victoire du Parti nationaliste a mis à mal le Parti uni, arrêtant cinquante ans de domination de la politique anglophone. Etablis par les déçus du Parti uni, les partis libéraux sont très minoritaires. D’une part, le Parti libéral résulte d’un réflexe défensif chez des intellectuels qui se rassemblent autour de l’écrivain célèbre, Alain Paton. Sans succès électoral, ce parti préféra se dissoudre plutôt que d’accepter l’interdiction des associations multiraciales. D’autre part, le Parti progressiste fédéral (PFP) bénéficia du soutien actif de Harry Oppenheimer, PDG du tout puissant conglomérat minier Anglo-Américain et De Beers. Le Parti uni fut dissous après la crise de Soweto. Le PFP est devenu pendant quelque années l’opposition officielle avant de laisser la place au Parti conservateur. Ayant encore changé de nom après la perte de son chef, Frederik Van Zyl Slabbert, le Parti démocratique se ressaisit mais perdit de plus en plus d’adhérents au profit du Parti nationaliste comme de l’ANC.

L’émancipation des catégories chromatiques

  • 22 Pour l’histoire de l’organisation voir : African National Congress,Unity in Action: A History of t (...)

37L’instauration progressive des pratiques ségrégationnistes au début du XXe siècle a donné naissance à plusieurs associations : ANC, NIC, APO. L’application du projet de l’apartheid radicalisa une jeunesse de deuxième génération africaine urbaine, qui organisa en 1943 le Congress Youth League au sein de l’ANC. Des organisateurs exceptionnels, comme Nelson Mandela, Walter Sisulu et Oliver Tambo, marqueront plusieurs générations de militants sud-africains. L’ANC s’affirma comme un mouvement de masse avec un nombre d’adhérents qui atteint un sommet de cent mille, à la suite de la campagne contre les lois de l’apartheid, la Defiance Campaign22. Avec ses alliés, l’ANC dessina une alternative libre des catégories chromatiques dans la Charte de la Liberté.

38La coalition des associations formée autour de l’ANC, le Congress Movement, provoqua une scission avec ceux qui n’admettaient pas un rôle pour les non-Africains dans la lutte. La répression s’accéléra. Le procès grandiose de trahison engagé en 1956 se termina cinq ans plus tard par l’acquittement de tous les cent cinquante-six accusés. A la suite du massacre de Sharpeville en 1960, l’ANC a été interdit et ses principaux dirigeants pourchassés. La lutte armée ne modifia en rien le rapport de force car l’Etat avait un avantage accablant en termes de force militaire. Umkhonto we Sizwe (MK), l’aile armée de l’ANC, refusa d’attaquer les cibles civiles comme le F.L.N. le faisait au même moment en Algérie. L’éducation chrétienne des dirigeants de l’ANC, renforcée par une idéologie matérialiste, leur donnait la forte conviction qu’un jour l’Afrique du Sud serait à eux.

39Emprisonné ou exilé, le mouvement multiracial sembla s’épuiser entre 1964 et 1977 en faveur du Mouvement de la conscience Noire (BCM). L’ANC se replia sur la lutte diplomatique, où il obtint des victoires non négligeables au sein des Nations Unies et dans les pays Scandinaves. L’insurrection de Soweto fut exploitée à fond par l’ANC, avec l’aide de ses « comrades » soviétiques, afin de s’imposer comme « Le » mouvement de libération sud-africain. Enfin, il profita de ses relations fraternelles avec les mouvements victorieux en Zambie, en Angola et au Mozambique pour recruter la vague d’exilés fuyant la répression en 1977.

  • 23 « L’UDF : Mythe et réalité », La Revue Sud-Africaine : Panorama 168, Novembre 1986, p. 17.

40L’ouverture de nouveaux lieux de lutte au début des années 1980 offrit à l’ANC une possibilité de développer ses idées à l’intérieur de l’Afrique du Sud, au niveau politique dans le Front Démocratique Uni (UDF) et au niveau économique dans la coalition syndicale devenue le Congress of South African Trade Unions (COSATU). L’Etat a condamné et réprimé ces « organisations de façade » sans se rendre compte que l’ANC ne télécommandait pas ces coalitions23. La stratégie de l’ANC était de faire accepter la Charte de la liberté comme dénominateur commun à toutes les associations populaires.

41Des luttes intenses se produisirent entre les partisans du BCM et ceux qui brandissaient ce manifeste vieux de trente ans. Il faut noter que jusqu’en 1985, la publication et la distribution de la Charte étaient très restreintes à cause de la censure. Est-ce que l’explosion des associations populaires et syndicales résulta de la capacité mobilisatrice des idées démocratiques soutenues par l’ANC ? Le contexte politique et la grande marge de manœuvre des associations de base y ont probablement contribué autant sinon plus que l’idéologie égalitaire.

  • 24 Par exemple le Secrétaire général du COSATU a utilisé le terme MDM (tout en majuscule) en mai. « Co (...)

42Les états d’urgence répétés (1986-1990) ont frappé les mouvements regroupés dans l’UDF sans pour autant limiter l’organisation syndicale qui se développait à grande allure. La renaissance politique s’opéra en 1989 après les grèves de la faim des prisonniers politiques. Du jour au lendemain, une coalition axée sur l’UDF et le COSATU se proclama le Mouvement démocratique de masse (MDM)24. Pour certains, les majuscules dans ce terme ne sont nullement méritées. Ils comparent le MDM a un véritable « cheval de Troie » lancé par l’ANC pour imposer son hégémonie.

43Le MDM était très peu structuré, mais il a su mobiliser beaucoup plus que l’ensemble de ses composants initiaux. En choisissant des revendications largement acceptées, il a mobilisé des personnes diverses. Le MDM a lancé une campagne de désobéissance civile, la Defiance Campaign, pour faire tomber la ségrégation des lieux publics (hôpitaux, plages, transports, ...). L’ANC a attendu patiemment à Lusaka jusqu’à ce que le Président de Klerk octroie une immunité totale à ses cadres. Les manifestations ont été arrêtées dès février 1990, et l’ANC est devenu l’interlocuteur privilégié du chef de l’Etat. Dans la suite de cet ouvrage nous étudierons comment les personnes classées « white » ont contribué aux changements politiques qui se sont produits en Afrique du Sud entre 1980 et 1994.

Notes

1 P. Coquerel, L’Afrique du Sud des Afrikaners, Bruxelles : Editions Complexe, 1992, p. 189.

2 A. Beres, « L’archipel des bantoustans », Hérodote 41, 2e trimestre 1986, p. 14.

3 Y. Lacoste « DU jeu des frontières à l’apartheid », Hérodote 41, 2e trimestre 1986, p. 9.

4 A. Mabin, « Dispossession, exploitation and struggle: an historical overview of South African urbanization », in: D. Smith (ed.), The Apartheid city and beyond, London: Routledge, 1992, p. 14.

5 Malan, op. cit., p. 55.

6 Voir par exemple l’article de G. Semin, « Prototypes et représentations sociales » in: D. Jodelet (ed.), Les Représentations sociales, Paris : Presses Universitaires de France, 1989, pp 239–251.

7 E. M. Lipiansky, I. Taboada-Leonetti, A. Vasquez, « Introduction à la problématique de l’identité » in: C. Camilleri, J. Kastersztein, E. M. Lipiansky et al., Stratégies identitaires, Paris : Presses Universitaires de France, 1990, pp. 16-17.

8 P. Salama, G. Mathias, L’Etat surdéveloppé : des métropoles au tiers monde, Paris : La Découverte, 1983, p. 15.

9 Centre Europe-Tiers Monde, White Migration to Southern Africa, Geneva: Centre Europe-Tiers Monde, 1975, pp. 27-29.

10 South Africa 1982, op. cit., p. 408.

11 A. Metten, P. Goodison, Fighting for Apartheid: A Job for Life, Amsterdam: Anti-apartheid Movement Netherlands, 1988, pp 56-57.

12 Un délégué au congrès de 1967 du Parti nationaliste au Transvaal a déclaré, « Les catholiques romains sont encore plus dangereux que les communistes car au moins on peut mettre un communiste sous les verrous. Un Métis ne peut pas se marier avec ma fille, mais quand elle aura 21 ans, un Portugais pourra le faire. » Rand Daily Mail, 6/8 September 1967.

13 E. Williams, Where have ail the Children Gone ?, Johannesburg: Ernest Stanton, 1980.

14 J. Andriola, The White South African: an endangered species, Cape Town: Howard Timmins, 1976, p. 168.

15 Un exemple parmi tant d’autres, W. Limp, Anatomie de l’Apartheid, Bruxelles: Casterman, 1972, p. 11.

16 V. Crapanzano, Waiting the Whites of South Africa, London: Paladin Grafton Books, 1986, p. xx.

17 S. Gordon, Under the Harrow: Lives of White South Africans today, London: William Heinemann, 1988.

18 R. Buis, Religions Beliefs and White Préjudice, Johannesburg: Ravan Press, 1975, p. 48.

19 M. Weber, L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris : Plon, 1964, p. 132.

20 P. Van Niekerk, « Whites Join the Chicken Run », New Statesman 110 (2843), 20 Sept 1985, p. 19.

21 P. B. Rich, White power and the liberal conscience: Racial segregation and South African liberalism, 1921-60, Manchester: Manchester University Press, 1984, p. 27.

22 Pour l’histoire de l’organisation voir : African National Congress,Unity in Action: A History of the African National Congress 1912-1983, London: ANC, 1982.

23 « L’UDF : Mythe et réalité », La Revue Sud-Africaine : Panorama 168, Novembre 1986, p. 17.

24 Par exemple le Secrétaire général du COSATU a utilisé le terme MDM (tout en majuscule) en mai. « Cosatu’s Jay Naidoo speaks of making apartheid inoperable », Southscan 4 (20/21), 24 May 1989, pp. 158-159.

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