Les socialistes, reconstructeurs de l’appareil d’État (1943-1946)
p. 252
Texte intégral
À la mémoire d’Hervé Bastien
1Auriol, Gouin, Moch, Philip, Tixier, Viénot, mais aussi Pierre Bloch, Georges Boris, Henry Hauck ou Charles Laurent – et combien d’autres – la liste est longue des membres, ou des proches, du Parti socialiste qui jouèrent un rôle, à Londres, à Alger puis à Paris, dans la re-création puis dans la reprise en main d’un État comme déserté, à l’été 1944, par le pouvoir vichyssois. Le titre de cet article, « Les socialistes, reconstructeurs de l’appareil d’État », semble donc aller de soi. Relativisons cette évidence. Bien entendu des socialistes, et non des moindres comme vient de le montrer l’énumération qui précède, se sont activement impliqués dans la construction du contre-État que s’est voulu dès l’origine la France Libre. Sont-ils pour autant les socialistes en tant que représentants d’un parti ?
2Répondre à la question impliquerait de pouvoir détailler, en quelques pages, l’histoire du contre-État gaulliste puis de l’État durant ces trois années – en vérité presque quatre, car ne peut-on considérer comme fondatrice du socle de l’État républicain à (re)venir la « Déclaration aux mouvements » que les syndicalistes Pineau, Hauck et Tixier, socialistes ou proches de la mouvance socialiste, obtiennent au printemps 1942 du général de Gaulle1 ? À cette tâche nous ne nous hasarderons pas, car elle impliquerait de traiter à la fois de sujets aussi vastes que la préparation de la Constitution, l’épuration ou le ravitaillement – pour prendre un ordre qui nous semble logique, mais qui est à l’opposé de celui ressenti à l’époque par l’opinion2.
Notes de bas de page
1 Voir Jean-Louis Crémieux-Brilhac, La France Libre, Paris, Gallimard, 1996, p. 335-338.
2 Comme l’écrit Pierre Mendès France quelques jours avant sa démission du gouvernement, en évoquant « l’esprit sceptique et négatif » de l’opinion :
« On aboutit toujours, en fin de compte, à accuser l’insuffisance du ravitaillement ; les gens qui ont faim n’écoutent pas la voix de la raison », note du 26 mars 1945,
Auteur
Chercheur à l’Institut d’histoire du Temps présent (CNRS, Cachan).
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