Espace et pouvoir du quaternaire
|Introduction à l’édition en langue française
Texte intégral
1Les années 90 ont donné le coup d’envoi à l’Âge Universel où l’Histoire se joue dans la simultanéité des communications. C’est ce que nous avions déjà prévu en 1973-1974 à Paris, lorsque nous avons écrit ce livre qui est paru à Brasilia en 1988.
2Dans la théorie du quaternaire, objet de la thèse en économie du développement à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, nous avons identifié les pouvoirs sous forme d’une trilogie de changements, conçus de la manière suivante : pouvoir politique, pouvoir économique et pouvoir de la connaissance. Ces trois pouvoirs, lorsqu’ils s’assemblent par ordre d’influence, conduisent à des âges différents. C’est ainsi que l’Âge Universel s’établit selon un ordre déterminé avec prédominance d’un pouvoir sur l’autre : le pouvoir de la connaissance détermine le savoir-faire de l’économie, le pouvoir économique pèse sur les décisions du pouvoir politique, ce dernier n’ayant plus qu’un simple pouvoir d’homologation au sein de la société. C’est dans cette combinaison de pouvoirs que réside l’Âge universel qui, sous la force de la mondialisation, est devenue aujourd’hui une réalité.
3Lester C. Thurow (1999) déclare dans Building wedth : « la clef de cette nouvelle ère était la connaissance et l’ordre réside, entre autres choses, dans l’éducation, condition vitale qui aujourd’hui définit les orientations ». Le type de pouvoir dominant est le pouvoir scientifique, le sous-type de pouvoir – technico-scientifique – ayant comme type de production les secteurs tertiaire et quaternaire.
4Il est cependant regrettable que cet ordre ne se soit pas encore totalement imposé car nous nous trouvons dans une phase de transition entre l’Âge contemporain et l’Âge Universel qui se manifeste à travers la mondialisation ; c’est de cette situation que procède la crise du monde actuel due au fait que nous sommes encore gouvernés par le pouvoir économique et non par le pouvoir scientifique, reléguant ainsi le pouvoir politique à un simple rôle d’homologation.
5L’État n’est plus le timonier de la société car il est entraîné par des événements qu’il se montre de plus en plus incapable d’assumer. L’établissement d’un nouvel ordre par l’Âge universel, au sein duquel le pouvoir de la connaissance identifiera les besoins et le pouvoir économique satisfera ces besoins, verra finalement un pouvoir politique qui, loin de se limiter à entériner des décisions déjà prises, sera en mesure d’organiser, grâce à son pouvoir législatif, les activités de l’État.
6Roger Sue (1997), dans son œuvre La Richesse des hommes, vers l’économie quaternaire, déclare : « le quaternaire est le symbole de l’entrée d’une nouvelle ère, où l’individu devient le centre et le point de départ d’un système productif économique et social enfin réconcilié... ».
7 La prépondérance d’un pouvoir sur l’autre, dans le temps, détermine une nouvelle phase dans la force du mouvement exécuté par les nations dans l’espace. À l’époque contemporaine, nous assistons à une prépondérance du pouvoir économique sur celui de la connaissance, ratifiée par le pouvoir politique. Aujourd’hui en plein Âge Universel, il nous faudra inverser l’ordre de la trilogie des changements lancé au cours des années 90, puisque le domaine de la connaissance commence une nouvelle étape au sein des relations internationales. Il est naturel que ce déséquilibre initial produise une crise dans le concert des nations mais il n’en reste pas moins que, peu à peu, les forces sociales s’achemineront vers un nouvel équilibre. Le pouvoir économique devra s’assujettir au pouvoir de la connaissance et le pouvoir politique devra consacrer cette option, ratifiée dans la rationalité de la nouvelle ère de la connaissance. Cet affrontement risque de se prolonger dans divers pays. Il fera cependant triompher le pouvoir de la science et de la technologie, tout d’abord parmi les pays organisateurs, ensuite parmi les pays organisés, laissant respectivement les pays désorganisés dépendants des influences de l’époque contemporaine pour un laps de temps beaucoup plus long.
© Éditions de la Sorbonne, 2002