Avant-propos
p. 21-22
Texte intégral
1Il est indéniable que durant la guerre, une grande partie des Résistances européennes fit de l’unité européenne, voire de la Fédération européenne, un objectif pour l’après-guerre. Il fallait lutter contre l’Europe nouvelle allemande, l’Europe exploitée économiquement, l’Europe où 12 millions de travailleurs étaient déportés dans les usines allemandes, dirigée de Berlin au profit exclusif du IIIe Reich. Si les résistances avaient reconnu l’existence du génocide, leur énergie en eût été décuplée. Démocratiques, antiracistes, elles aspiraient à la paix dans les rapports intereuropéens, mais elles étaient partagées sur la place future de l’Allemagne en l’Europe. Sur un fond idéologique mouvant et riche, mais imprécis, les responsables politiques français durent décider quelle serait leur réponse à l’attente teintée de messianisme des héros de la résistance européenne.
2Il est trop commode de faire commencer l’histoire de l’Europe après le 8 mai 1945. Du côté français, à l’été 1943, le CFLN est aux mains de De Gaulle. Il peut donc penser l’avenir de l’Europe et de la France. Nous sommes déjà, alors que la guerre n’est pas finie, sur la pente de la victoire, tellement la puissance américaine est manifeste. Il met à l’étude des projets de politique européenne pour l’après-guerre dont on trouve trace dans les Archives du Quai d’Orsay. Ces projets tiennent compte des études élaborées dans les bureaux parisiens du Quai d’Orsay contrôlés par Vichy, les bureaux d’Etudes Chauvel1. Ils s’inspirent aussi de l’ambiance générale, dont le tempo est donné par les États-Unis et la Grande-Bretagne. Quant à la date finale de cette première partie, avril 1949, elle marque la transformation de la politique allemande de la France et donc de ses conceptions de l’équilibre européen. Une Europe sans l’Allemagne est désormais impossible. Des espoirs viennent de s’éteindre. Il n’y aura pas d’Europe occidentale sous direction française, ni d’union douanière avec le Bénélux, pourtant si ardemment désirée, ni de condominium franco-britannique sur l’Europe.
Notes de bas de page
1 Rémi Boyer, Le ministère des Affaires étrangères pendant la seconde guerre mondiale, le cas des bureaux d’études, mémoire fondamental de DEA, sous la direction du professeur René Girault, septembre 1991, Université de Paris-1 Panthéon-Sorbonne.
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