Chapitre III. Les structures et les moyens
p. 49-94
Texte intégral
I – L’ORGANISATION ET LES STRUCTURES
1Le P.D.P. apparaît en 1924 avec une organisation et des structures déjà assez précises, qui avaient été élaborées par le B.A.C. en particulier. Il veut se doter de structures calquées sur celles des partis existants et en fait largement sur le modèle des partis de Gauche qui avaient les cadres les plus solides comme la S.F.I.O.A Droite la Fédération Républicaine commence aussi à s’organiser de façon plus structurée à partir de 1924. Mais à Droite et au Centre on avait affaire essentiellement à des "partis de cadres", plutôt que de "masses". Le P.D.P. nait en 1924 sur un modèle plus proche d’un parti comme la S.F.I.O. que des Partis de la Droite modérée et de la Gauche radicale. Ses statuts seront ainsi partiellement inspirés de ceux de la S.F.I.O. elle-même. Ils témoignent de sa volonté de créer face à celle-ci une force politique s’inspirant en partie du type d’organisation qui avait fait son succès conjointement avec la forme originale d’un certain "Fédéralisme". Le P.D.P. sera donc un des premiers partis chez les "républicains modérés" à adopter l’organisation d’un parti de type moderne, et même d’un "parti de masses". Il considèrera toujours sur ce plan les autres partis modérés comme des forces plus ou moins archaïques.
2Pour les structures du P.D.P. de 1924, un certain nombre de principes se mêlent et se juxtaposent, dans une fusion assez difficile entre un certain centralisme et un certain fédéralisme. On voudra toujours insister sur la "base fédérative" du Parti, constitué en théorie par l’ensemble des Fédérations locales et des groupes locaux jouissant d’une certaine autonomie. Mais à côté de ce principe, on a néanmoins une forte organisation centralisée au sommet avec le Congrès National, le Conseil National et la Commission Exécutive s’emboîtant de façon pyramidale. Cependant ce sera une organisation moins centralisée qu’à la Jeune République par exemple, le principe fédératif pouvant s’expliquer par le mode de formation du Parti, sa préhistoire récente autour des "Fédérations de Républicains-Démocrates", en même temps que par un refus idéologique d’un centralisme excessif. Le modèle de la S.F.I.O. et des partis de Gauche n’est pas totalement accepté du fait des caractères largement "intermédiaires" du Parti. Ces principes se retrouvent dans le chapitre premier des statuts qui en comprennent huit, et trente quatre articles. Après l’article 2 qui déclare que "le Parti poursuit une action républicaine et sociale et une œuvre d’éducation démocratique", l’article 3 affirme qu’il "est constitué par l’ensemble des Fédérations" qui sont en sommes des "personnes" adhérentes au Parti.
3Une Fédération pour se constituer doit avoir au moins 100 membres adhérents. Des discussions avaient eu lieu pour faire admettre la possibilité de constituer des "Fédérations Régionales" regroupant plusieurs départements (article 6) : on pourra soit se rattacher à un département voisin, soit fonder une Association Interdépartementale, mais les limites de l’autonomie sont aussi précisées. Si le montant de la cotisation annuelle est fixé chaque année par le Congrès, chaque Fédération est libre de déterminer le montant de sa propre cotisation, une partie pouvant lui rester, l’autre allant au P.D.P. (cotisation fixée au début à 1 franc). Il est précisé de même que pour être membre du Parti, il faut donner son adhésion à une Fédération et n’appartenir à aucun autre Parti national. Mais provisoirement les membres pourront adhérer à des organisations régionales autonomes, à la condition que leurs programmes ne soient pas en désaccord avec celui du Parti. L’importance du rôle des Fédérations est marquée par le fait que tout le chapitre III des statuts lui est consacré : autonomie électorale de ces dernières qui donnent seules l’investiture officielle, interdiction de l’organisation de réunions ou manifestations dans la limite d’une Fédération sans son autorisation.
Congrès National, Conseil National, Commission Exécutive
4D’autres éléments tendent cependant à contrebalancer ces structures fédératives pour les institutions centrales et leur rôle. Le "Congrès National" a en théorie "la direction du Parti". Il se réunit chaque année et décide souverainement de toutes les questions intérieures. C’est donc en principe l’instance suprême. Les délégués au Congrès sont élus par les Fédérations qui ont droit à un délégué par vingt membres cotisants, avec toutefois un maximum fixé à vingt-cinq délégués. Il est également indiqué que les "minorités", si elles existent dans chaque Fédération ont droit à une représentation proportionnelle. Mais comme dans tous les partis politiques modernes, il est clair dès le début que le Congrès délègue plus ou moins son pouvoir effectif à d’autres instances plus permanentes et d’abord au "Conseil National" (chapitre V) qui est chargé "dans l’intervalle du Congrès" de "l’administration". Il choisit en son sein une "Commission Exécutive" dont le nombre de membres est fixé chaque année par le Congrès. Ses attributions sont précisées par l’article 22 qui indique que le "Conseil National représente le Parti”. On a ici autour du bureau de la Commission Exécutive et du groupe parlementaire le noyau dirigeant du Parti. Les statuts s’attachent également à déterminer d’autres points comme "le contrôle de la Presse" (chapitre VIII). Il est affirmé que si la liberté de discussion est entière pour les questions de doctrine et de méthode, les membres du Parti et ses publications doivent se conformer aux décisions du Congrès et du Conseil. En tout cas se vérifie l’importance que le P.D.P. accordera toujours à la presse et à la propagande par la presse.
5Les statuts de 1924 vont dominer la vie du Parti et son fonctionnement, en faisant une force bien organisée et structurée, malgré quelques problèmes internes qui ne tarderont pas à se poser. On en viendra à des révisions assez importantes des statuts en 1932 et en 19361. Le rôle du Secrétariat Général et de son titulaire Raymond-Laurent va se révéler déterminant pour assurer un fonctionnement efficace à tous les niveaux : instances supérieures, relations avec les Fédérations, "organismes du siège". Le développement pourra se faire dans la période 1924-1932, par un essor des Fédérations et de l’implantation, et aussi de la propagande et de la presse.
6La Commission Exécutive qui devient le principal organe d’animation et de coordination du Parti se réunit en principe chaque mois (sauf en été) et parfois en séance extraordinaire. Elle est en constant rapport avec le Conseil National qu’il tient informé de ses délibérations par une "circulaire confidentielle"2, et le groupe parlementaire par son Secrétaire. Au Congrès de 1925 il est décidé, sur proposition d’Henri Teitgen que la Commission serait renouvelée par tiers tous les ans3. Les membres "sortants” seront ainsi désignés par tirage au sort, après l’élection des nouveaux membres par le Conseil National : ce sont souvent des "anciens" réélus, mais on aboutit à partir de 1925 à un certain renouvellement. Au Conseil National au moment du Congrès de 1925 sont élus comme nouveaux membres Joseph Brunhes (Côte-d’Or), Franz Serrier (Orléans), Henri Teitgen (Nancy), Marcel Robert (Limoges), le nombre de ses membres étant fixé à 274. En 1926, tous les membres "sortants" sont réélus. Seul Bernard Monniot, démissionnaire est remplacé par Charles Flory qui fait son entrée dans les instances dirigeantes5. En 1928, c’est l’arrivée à la Commission de Maurice Berger, d’Auguste Durand, d’Ernest Pezet, de François Reille-Soult, de Jean Lerolle. Mais apparaissent aussi Louis-Alfred Pagès, Charles d’Hellencourt, André Arthus-Bertrand, Chatteleyn, Jules Perrin. Cet important remaniement renforce la position des "démocrates chrétiens modérés" proches des catholiques sociaux et assure une place aux nouveaux élus Démocrates de 19286.
7En 1929, Marcel Prelot est élu, ce qui renforce avec Flory les "Anciens de l’A.C.J.F.". Georges Thibout, Président depuis 1924 décide d’abandonner ses fonctions. Lors d’une réunion officieuse antérieure, la candidature à ce poste de Champetier de Ribes avait été évoquée. Il est élu à l’unanimité Président de la Commission Exécutive. Deux nouveaux vice-présidents sont élus : Alfred Bour et Henri Teitgen aux côtés de Philippe de Las Cases, Paul Simon, Emmanuel Desgrées du Lou, Léon Vieillefon (soit six vice-présidents au lieu de cinq, Walter disparaissant de la Commission). Raymond-Laurent reste Secrétaire-Général, Arthus-Bertrand Trésorier du Parti (il a remplacé Zamanski depuis 1927), Bastianelli "Délégué Général", Victor Balanant Secrétaire administratif après sa défaite en 1928. En 1930, Adéodat Boissard et Henri Descos du Colombier sont élus, ce qui renforce encore les tendances issues du Catholicisme Social. En 1931, Philippe Gerber et Henri Simondet font leur entrée. En 1931-1932, période importante et tournante pour le Parti, la Commission Exécutive présente des changements sensibles depuis 1924 (elle comporte alors 41 membres au total). La tendance à équilibrer les origines "catholique sociale" et "démocrate chrétienne" persiste toujours, mais on a assisté à l’émergence des députés du groupe (8 au total). Les Alsaciens-Lorrains ne sont plus représentés que par Joseph Brom et sont apparus d’autres "anciens de l’A.C.J.F." (Flory, Prelot...). En 1932 arrivent Pierre Demagny, Robert Schuman, Paul Goussu, Goubie et pour la première fois une représentante de la Fédération Féminine, Julia Tricaud. En 1933 c’est l’entrée du député de la Savoie Martel, d’André Cochinal et surtout de Georges Bidault qui surgit dès lors comme un des grands "tribuns" du P.D.P. et de Georges Hourdin. Un renouvellement assez profond se produit pendant ces années du fait de l’émergence d’une génération nouvelle où apparaissent des hommes comme Bidault, Hourdin, Cochinal, Demagny, même si l’on peut se demander s’il a été suffisant pour les équipes dirigeantes du Parti. A ce moment aussi Alphonse Juge devient Secrétaire Général-Adjoint. Mais le Parti avait connu et va connaître d’autres changements importants de ses statuts dans cette période des années 1930.
Les changements statutaires de 1932 et 1936
8De premières modifications des statuts sont apportées lors du Congrès de 1932, à la suite de ce que l’on peut appeler une première phase de "crise" dans la vie du Parti après les élections de 1932. Tout en admettant que les statuts ont fonctionné jusqu’ici de façon satisfaisante, il est reconnu que certaines dispositions pourraient être remaniées. Neuf articles sont modifiés dans plusieurs directions principales. Pour l’organisation on autorise l’existence de "sections départementales" pouvant grouper dans un département les adhérents insuffisamment nombreux pour former une Fédération. De plus, le Parti pourra désormais livrer des cartes d’adhérent à des isolés, ce qui remet partiellement en cause le principe fédératif initial. L’autonomie des Fédérations est touchée par un aspect des modifications portant sur la "coordination de l’activité politique des Fédérations". Si l’on reconnaît toujours la légitimité de l’autonomie, il est admis par ailleurs que "l’individualisme excessif d’une Fédération peut compromettre toute l’"action du Parti"7. En conséquence est stipulée l’obligation pour les Fédérations de fournir au Secrétariat Général un rapport annuel.
9Un autre ordre de transformations porte sur ce que l’on appelle "une représentation plus rationnelle aux Congrès et Conseils Nationaux". On revient sur la limitation à cinq membres d’une Fédération au Conseil National, ce qui donnait un privilège aux moyennes et pénalisait les grosses. De plus il est précisé que seront membres de droit aux Congrès et Conseils Nationaux les sénateurs, députés, conseillers municipaux de Paris, et les membres de la Commission Exécutive. Un dernier changement concerne cette dernière. Deux tendances s’étaient opposées dans les Fédérations. L’une estimait que la C.E. devait siéger en permanence et sortir de son rôle d’"agent d’exécution” et l’autre, plus forte, pensait qu’il serait sans profit de lui donner l’allure et les pouvoirs d’une "troisième Assemblée". Il est décidé de maintenir la distinction fondamentale entre le Conseil National et la C.E., mais on veut donner à celle-ci des moyens plus complets afin d’assurer une meilleure exécution des décisions des Congrès et des Conseils. Limitation de l’autonomie des Fédérations, nouveau mode de représentation au Conseil National plus favorable aux grosses Fédérations, rôle plus important de la C.E. sont les résultats des changements de 1932.
10Une deuxième étape plus importante s’affirme en 1936, à la suite d’un Congrès extraordinaire en mai. Les principes de cette révision étaient apparus assez tôt dans une "note" adressée le 27 mars aux Fédérations et qui reconnaissait que si le Conseil National et la Commission Exécutive étaient sortis de leur rôle, c’était pour le Parti une nécessité vitale8. On admet que les statuts ne donnaient pas les pouvoirs nécessaires de direction au C.N., ni à la C.E., que celle-ci n’était pas assez représentative des Fédérations, ce qui avait pu lui ôter de l’autorité nécessaire pour la direction politique qu’elle assurait de fait. En conséquence il est proposé d’attribuer au Conseil National dans l’intervalle des Congrès la direction effective et pour la Commission Exécutive d’en faire un organe aussi représentatif que possible. Il est encore proposé de regrouper les Fédérations en "Fédérations Régionales" qui deviendront une des nouvelles articulations du Parti. Dans l’intervalle des séances de la C.E., un "Bureau" permanent de sept membres serait de plus le véritable organe directeur.
11Au Congrès de mai Raymond-Laurent présente un rapport sur cette révision et son principe de base "pour une meilleure direction politique du Parti"9. Il reconnaît que le principe suivant lequel le Congrès assurait la direction du P.D.P. est dépassé : le Conseil National devra l’assurer entre les Congrès. Quant à la Commission Exécutive, elle voit d’abord son recrutement modifié : elle sera composée de membres désignés par le groupe parlementaire et de membres désignés par les Fédérations regroupées en "Conseils Régionaux" qui désigneront chacun un ou deux délégués. Ils seront constitués par les Présidents et Secrétaires Généraux de chaque Fédération, les députés et sénateurs de la région membres du Parti, les Présidents des Groupements Féminins et des "Jeunesses Démocrates Populaires". Les Fédérations désigneront un délégué au Conseil par trois cents membres cotisants. Quant à la nouvelle Commission Exécutive, elle comprendra aussi un nombre limité de membres élus par le Conseil National lui-même ainsi que la Présidente, la Secrétaire générale et trois délégués de la "Fédération Féminine", le Président, le Secrétaire Général et trois délégués des "Jeunesses Démocrates Populaires”. Mais on décide de créer un "Comité Directeur permanent" qui se réunirait hebdomadairement alors que la C.E. se réunit chaque mois, qui serait distinct du bureau de la C.E. et composé de neuf membres : le Président de la Commission Exécutive, le Président du groupe à la Chambre, un sénateur membre du Parti et six membres renouvelables tous les ans, désignés par la C.E. Cette révision adoptée par le Congrès va dans le sens d’une rationalisation, d’un nouveau raffermissement des organes directeurs, d’une réorganisation régionale limitant encore le rôle des Fédérations et de l’abandon inévitable du principe d’un Congrès centre de décision. Elle doit être resituée dans le contexte d’une crise générale interne que subit le P.D.P.10. On aboutit donc à une Commission Exécutive aux pouvoirs accrus sur le groupe parlementaire, mais qui doit laisser une partie de ses pouvoirs à un "Comité Directeur" qui devient le principal organe, à côté des "Conseils Régionaux" qui vont se mettre en place. Le P.D.P. avait comme tâtonné dans la recherche de ses statuts, après avoir essayé de concilier des principes peut-être un peu contradictoires et cette "crise organisationnelle" avait bien été un des éléments de sa crise générale.
Les Congrès, le Siège Central et le Secrétariat Général
12Le Congrès National demeure tout au moins jusqu’en 1936 en théorie le "principe" même de la décision du Parti. Il se réunit annuellement, le plus souvent en novembre et il constitue sa "grande fête annuelle". Il dure généralement trois jours, chaque fois en principe dans une ville différente où il est invité par la Fédération locale. Après les deux premiers Congrès qui ont lieu à Paris en 1925 et en 1926 (où il retourne d’ailleurs en 1928 et en 1930), il opère une sorte de "tour de France" des Fédérations les plus importantes et des zones de force : 1927 à Orléans, 1929 à Nancy, 1931 à Lille, 1932 à Grenoble, 1933 à Limoges, 1934 à Marseille, 1935 à Brest, 1936 à Arras, 1937 à Toulouse, 1938 à Saint-Etienne. Ces Congrès obéissent généralement dans leur déroulement à un rituel. Le traditionnel "rapport sur l’activité générale du Parti" est présenté par le Secrétaire Général et il est souvent fondamental pour l’étude de l’organisation et de l’implantation. A côté de cet aspect "bilan des forces", il y a un rapport sur la "politique générale du Parti", des rapports divers concernant la politique extérieure, la politique intérieure, la politique financière, la politique économique et sociale, tous suivis de discussions.
13Une séance du Congrès est consacrée aux "vœux et motions diverses" et une "déclaration" du Parti est publiée à l’issue des travaux indiquant ses positions générales. Chaque année de plus l’orientation des travaux se fait sur un point particulier. Un thème privilégié est préparé par le "Bureau d’Études" et bientôt des commissions spécialisées, aboutissant à des "Journées d’Études" consacrées à ce thème : "Journée Rurale" au Congrès d’Orléans en 1927, "Réforme de l’État" à Nancy en 1929, "Réforme de l’Enseignement" à Paris en 1930, "l’Organisation de la Paix" en 1931 à Lille. On adopte ainsi un programme précis du Parti sur les différents terrains. Lors des grands Congrès de la première phase de son histoire surtout se précise de cette façon la doctrine du P.D.P. dont l’élaboration est liée au rôle fondamental du "Bureau d’Études". D’autres manifestations et des réunions ont lieu de façon traditionnelle, comme le "Déjeuner de l’Association des Journalistes Démocrates" ou celui des "Élus Municipaux et Cantonaux" en dehors du grand banquet où les leaders prononcent des toasts. Une réunion du Conseil National se tient également pendant le Congrès pour le renouvellement de la Commission Exécutive. Ces Congrès ont donc joué un rôle important dans la vie du P.D.P., en ayant été surtout au début un des lieux privilégiés où s’est fixée la doctrine du Parti et en établissant une sorte de lien émotionnel entre les congressistes pour aboutir à ce qu’on appelait "le Parti de l’amitié française”11. Cornilleau voudra voir dans ces Congrès un des signes du caractère "essentiellement démocratique du P.D.P.". Cependant, on peut se demander si, malgré la participation active aux discussions et au vote des motions, les débats n’étaient pas partiellement dirigés en particulier par le "Bureau d’Études". Mais ces discussions révélaient l’existence de tendances et de clivages parfois profonds sur les principaux problèmes. Cette "amitié" se dégradera un peu à cause des difficultés, mais la faiblesse numérique du Parti assurait aussi une certaine cohésion et en faisait parfois surtout au début une sorte de "club" où se rencontraient de vieux amis pour une réflexion et une action communes.
14Le P.D.P., s’il a toujours été une petite force politique, plus importante en cadres qu’en troupes avait une armature théorique assez solide, pouvant convenir à une force politique moyenne, et des institutions centrales bien organisées. Au moment de la création du Parti en 1924, son siège est installé rue Pigalle de même que Le Petit Démocrate. Celui-ci avec sa direction se transporte en 1926 dans de nouveaux locaux, rue Palatine (quartier Saint-Sulpice) où le rejoint le P.D.P. lui-même en 1928. Ce sera toujours une installation assez modeste, où se trouvent les bureaux du directeur du Petit Démocrate, du Délégué Général, du Secrétariat Général, le tout comprenant seulement quelques employés. Le rouage essentiel est le Secrétariat Général, constamment occupé pendant toute la vie du Parti par Raymond-Laurent bientôt assisté par Alphonse Juge. Le Secrétaire Général a accompli une œuvre d’organisation considérable. Selon Alfred Bour "son activité tient du prodige" pour, avec de faibles moyens parvenir à faire tourner des rouages assez complexes. Il a déployé effectivement une activité omniprésente, à la fois pour mettre en place les institutions centrales et pour coordonner l’implantation locale. Il commence parallèlement une action politique directe sur le plan municipal en se faisant élire dès 1925 conseiller municipal dans le quartier Saint Germain-des-Prés. Il deviendra vice-président en 1930, puis Président en 1936 du Conseil Municipal de Paris, avant de se faire élire en 1938 à la Chambre dans la Loire. Raymond-Laurent a réussi à animer et à structurer un mouvement dont beaucoup des principaux leaders n’avaient pas au même degré le caractère porté à l’organisation méthodique. Mais ces structures reposaient en fait parfois sur une matière un peu vide. Le P.D.P. a été dirigé et conçu comme un parti moderne, sans en avoir toujours tous les moyens. De plus, en dehors du Secrétariat Général, il y eut encore ce que l’on appelait les "Organismes du Siège"...
15Un des principaux rouages est ici resté le "Bureau d’Études" créé en 1925. Au Congrès de novembre Raymond-Laurent annonce qu’un "groupe d’amis" vient de prendre l’initiative de créer un Bureau d’Études. Ce sera un organe autonome, mais travaillant en liaison avec le groupe parlementaire et le Parti, et ayant pour rôle d’examiner à la lumière de ses principes et de son programme les solutions à apporter aux différents problèmes. Il aurait concrètement la triple fonction de collaborer avec le groupe parlementaire pour le dépôt de propositions de loi et d’amendements, de constituer au sein du Parti des "Commissions d’Etudes" et d’utiliser les informations recueillies pour des articles destinés aux journaux proches. Ce "groupe d’amis" est le "Groupe Pératé" qui sera un des soutiens matériels officieux autour du Parti. Les promoteurs du Bureau s’adressent à Auguste Bastianelli en 1924 qui est "pressenti pour créer un organisme de documentation au service du P.D.P. et de son groupe parlementaire"12. Raymond-Laurent essaiera cependant tout en acceptant l’outil nouveau dont va disposer le Parti de tracer des limites à son action. Mais le Bureau avait déjà préparé des propositions de loi et précisé le programme du Parti sur de nombreux points (questions agricoles, logement, école unique)13. Un rôle multiforme s’annonce. Bastianelli prend bientôt pour collaborateur Georges Hourdin et il commence à participer davantage au Petit Démocrate en assurant la rédaction de rubriques. Surtout il organise un certain nombre de "Commissions d’Études" pour l’examen avec le groupe parlementaire de questions spécifiques : commission des questions sociales, commission financière, commission de la réforme de l’État.
16On parle de la formation d’autres commissions sur des sujets aussi divers que la politique extérieure, la législation sociale, l’enseignement En 1929, cinq commissions existent et Teitgen demande la formation d’une autre sur les problèmes de la famille. Une des plus actives a été la "Commission financière" sous la présidence de Champetier de Ribes. Le Bureau prépare des "enquêtes" auprès des Fédérations avant les "Journées d’Études" des Congrès. Prelot, Bastianelli présentent des rapports sur la base des travaux du Bureau et des Commissions d’Études. Il entreprend de surcroît un "travail très important" en 1928 en vue des élections et participe à la rédaction de "fiches électorales". Avec Bastianelli devenu "Délégué Général" du Parti, il est aussi en liaison avec les Fédérations. Son rôle s’est un peu stabilisé ensuite dans les années 1930, ayant servi surtout à la coordination de certaines des "Commissions" du Parti.
17D’autres organes furent progressivement mis en place qui cherchèrent à élargir l’influence du Parti comme la "Fédération des Élus Municipaux et Cantonaux Démocrates", sous l’impulsion de Pierre Trémintin, maire de Plouescat. Dès octobre 1925, "répondant au désir exprimé par plusieurs militants et collègues adhérant au P.D.P.", il annonce son intention de réunir à Landerneau une assemblée pour la création de ce groupement. Au Congrès de novembre la formation de cette "Fédération" est annoncée. Elle a pour Président Pierre Trémintin, Paul Guillard et Raymond-Laurent étant vice-présidents. Un "Conseil d’Administration" de vingt membres la dirige et elle tient une Assemblée Générale annuelle14. Cette Fédération est un reflet de la "doctrine municipale" du Parti qui s’affirme, élément du programme civique, régionaliste et décentralisateur du P.D.P. Cependant, Raymond-Laurent reconnaît bientôt en 1929 que celle-ci a manqué jusqu’ici de moyens15, et il admet qu’un grand nombre ignorent même son existence. Il est ainsi question de la fortifier pour en faire une véritable organisation structurée. Mais l’on s’est heurté à de nombreuses difficultés, même si le nombre d’élus municipaux et cantonaux se réclamant du P.D.P. est devenu non négligeable au fil des consultations électorales.
L’Association des Journalistes Démocrates
18Cette Association, derrière son animateur Louis-Alfred Pagès fut plus importante pour la "démultiplication" de l’influence du Parti. Elle a témoigné de l’influence de "l’esprit" démocrate populaire dans une partie de la presse et a débordé le cadre de la presse du Parti proprement dite. L’AJ. D. fut un des instruments de l’influence diffuse et un des éléments de la "mouvance" du P.D.P. Pagès, directeur des services parisiens de L’Ouest Éclair joue un rôle assez multiforme durant ces années. Il est en tout cas au centre d’un vaste réseau de correspondance, en France et à Rome. A Paris, il est en relations constantes avec le monde parlementaire et journalistique, le monde religieux et dispose d’un réseau d’informations de premier ordre. Eugène Braquet avait lancé l’idée d’une Association des Journalistes Démocrates au Congrès constitutif et c’est en mars 1925 qu’il est décidé de créer une Association présidée par Pagès et qui compte au début une cinquantaine de membres16. Initialement, on pensait n’y accueillir que des journalistes adhérents au Parti, mais il est accepté sur proposition de Cornilleau qu’elle soit ouverte à tous les journalistes "Démocrates" même non adhérents qui accepteraient les idées maîtresses de son programme.
19Une Circulaire confidentielle de l’Association des Journalistes Démocrates est bientôt publiée à partir de mars 1926, comprenant des "notes politiques" rédigées par Pagès qui informe ses adhérents sur la situation politique et parlementaire, la situation politico-religieuse, celle du Parti. Des réunions régulières sont prévues entre la Commission Exécutive et l’AJ. D. Celle-ci compte en 1931 85 membres dont la répartition à travers les organes de presse et les régions donne une idée de l’influence diffuse du Parti. Pagès précise alors les buts et les caractères de l’Association : elle doit se livrer à un travail de diffusion du programme Démocrate parmi les rédacteurs politiques des grands journaux de Paris, à la Chambre et au Gouvernement, bien préciser la position centriste du Parti et démontrer qu’il ne s’agit pas d’un Parti confessionnel17. Elle doit, "au bénéfice du P.D.P.", perfectionner les journaux dévoués à ce dernier, tout en faisant "pénétrer nos idées dans le plus grand nombre possible de journaux”. Les buts généraux sont ainsi d’information et de pénétration dans la presse extérieure et toute une presse catholique et modérée en particulier, ce qui posera des problèmes18. L’AJ. D. travaille constamment en liaison avec les responsables de la propagande du Parti. Elle a été un des éléments des tentatives d’extension de son influence en dehors de sa sphère directe. Mais il s’agit pour elle de faire connaître les positions exactes du Parti. En 1932 Pagès se déclare satisfait des résultats obtenus : "il ne se passe pas de jour sans que trente quotidiens ne citent nos élus. Si certains déforment à plaisir nos actes et nos pensées... les autres commencent à nous classer là même où la justice le commande"19.
20Un autre organe des services centraux fut le Secrétariat du groupe parlementaire avec ses titulaires successifs Robert Cornilleau, Marcel Prelot, Georges Hourdin, A. Blanc, mais aux moyens toujours insuffisants.
Groupes Féminins et Fédération Féminine
21Il est question assez tôt de créer des groupes féminins à l’intérieur du P D.P. Dès le Congrès de 1925, Germaine Chapuis établit un bilan des groupes déjà existants qui essaient de remédier au problème de l’exclusion des femmes de l’activité civique20. Assez vite une doctrine et un mouvement "féministe" sont apparus, sous l’impulsion de quelques animatrices auxquelles Raymond-Laurent rend hommage dès le Conseil National de mars 192621. Le Parti avait en effet inscrit dans son programme le suffrage féminin et l’influence du "féminisme chrétien” s’y fait sentir. Le mouvement interne au Parti et l’action d’un groupe de femmes (Mme d’Hellencourt, Mme de Las Cases, Mme Peyrolles, Mlle Chapuis, Mme Archambault, Mme Tricaud) se développent jusqu’à la constitution de la "Fédération Féminine" du P.D.P. En 1927 un groupe féminin est formé à Paris autour d’un "Cercle d’Études" qui participe en 1929 aux "États Généraux du Féminisme". Cette action a pour premier débouché la "Journée féminine" du Congrès de 1933, Journée d’études pour l’organisation et la propagande féminine du Parti et les questions politiques concernant les femmes. On constate que des groupes féminins sont déjà constitués dans une vingtaine de départements. Mme Archambault présente un rapport sur "le recrutement et l’organisation des femmes". Mais la question est posée de la création au sein du Parti d’un "groupe féminin" autonome qui est "très discutée’" si elle a de "chauds partisans"22. Le problème est de savoir si les femmes qui s’inscrivent doivent assister aux réunions avec les hommes ou organiser des groupes et des réunions autonomes. D’autre part si Jean Lerolle estime que les aspirations politiques de la femme peuvent se retrouver dans le programme du P.D.P., Mme Tricaud expose des "revendications féminines" qui vont plus loin.
22La position traditionnelle au sujet du suffrage féminin est constamment réaffirmée par Germaine Chapuis notamment23. En 1934, Raymond-Laurent rend hommage à ce mouvement et on aboutit à une première reconnaissance des bases de la Fédération Féminine, après consultation des groupements déjà existants et des correspondantes désignées par les Fédérations Départementales24. La Fédération Féminine devra être constituée avec un Comité Directeur, un Secrétariat Central et elle commence à se mettre en place en 1935. Mais son existence ainsi que celle des "Jeunesses Démocrates" posait des problèmes non prévus par les statuts de 1924 et que la réforme de 1936 doit résoudre. La Fédération Nationale Féminine fonctionne sous le contrôle du Parti. Le Secrétaire Général, le plus ancien des Secrétaires adjoints et deux membres de la Commission Exécutive sont membres de droit de son Comité Directeur, les mêmes dispositions se retrouvant pour les Fédérations Départementales et les groupements locaux25. Inversement la Fédération Féminine obtient une représentation plus large dans les organes du Parti26, ce qui aboutit à des structures à la fois parallèles et croisées. Sur ces bases la Fédération se développe jusqu’à la fin de l’histoire du P.D.P. et tient des Assemblées Générales annuelles lors des Congrès. Mme D’Hellencourt, première Présidente laisse ses fonctions en 1937 à Mme de Las Cases, Mme Vieillefon étant vice-Présidente et Mme Peyrolles, Secrétaire Générale. On se réjouit de la création de nouveaux groupements, parfois importants. La Fédération participe à la rédaction d’une page féminine dans Le Petit Démocrate, "Notre Foyer". Elle a été écartelée par des contradictions, entre l’autonomie et la participation directe à la vie du Parti. Des difficultés surgiront parallèlement entre le "suffrage féminin" et le "suffrage familial"27. Mais une génération féminine avait été formée par un apprentissage à la vie civique qui pouvait déboucher sur le plan politique et avec des individualités qui émergeront par la suite.
Groupe de Jeunes et "Jeunesses Démocrates Populaires"
23Toute une génération aussi va être partiellement éduquée dans les cadres des groupes de jeunes du Parti, puis de la Fédération des Jeunesses Démocrates Populaires28. Dès le Congrès de 1925 le problème avait été évoqué de la "propagande parmi les jeunes", des groupes de Jeunes Démocrates s’étant déjà constitués. Deux méthodes en fait s’opposent : créer des groupes de Jeunes autonomes ou les intégrer aux organismes existants. Une prudence se manifeste dans ce domaine. Elle témoigne de la crainte semble-t-il surtout de difficultés et d’équivoques avec les groupes de la "Jeunesse Catholique", même si les "Jeunesses Démocrates" voudront toujours se situer sur un terrain spécifiquement politique. Le "Groupe des Étudiants" de Paris en particulier prend un certain essor derrière son Président Roland Alix et le "Club du Carrefour" qui fonctionne comme club de rencontres et de discussions au Quartier latin à partir de 1927 et dont Raymond-Laurent affirme qu’il est "un des plus vivants parmi les clubs du même genre dans la capitale"29. En même temps ces groupes obtiennent une page spéciale et périodique dans Le Petit Démocrate, "la Route des Jeunes". Mais des problèmes se posent assez vite pour ce développement La nécessité est montrée au Congrès de 1932, de ne pas rester en arrière sur les autres partis et il est proposé de créer un Secrétariat Général. Le principe est adopté d’accorder une certaine autonomie aux groupes de jeunes, tout en les instruisant dans la "pure doctrine" du P.D.P.30. Les groupes existants au sein des Fédérations sont invités à se mettre en contact avec le rapporteur au Congrès, Pierre Perroy et au Conseil National de mars 1933 est décidé le principe d’une "Journée des Jeunes" pour le Congrès de novembre.
24Elle a lieu au Congrès de Limoges et Pierre Perroy y présente un rapport sur l’activité du Secrétariat depuis 1932. Un nouveau mot d’ordre est lancé : doubler chaque Fédération d’une organisation de jeunes. Il est proposé, avant la formation d’une véritable Fédération Nationale, et étant donné la situation embryonnaire des groupes dans de nombreux départements de constituer tout d’abord un "Comité Directeur National" des J.D.P.31. Mais la "Fédération des Jeunesses Démocrates Populaires" va peu à peu se mettre en place, même si tout n’était pas réglé dans les relations avec le Parti. En janvier 1934, Raymond-Laurent offre le poste de Secrétaire Général à Robert Lecourt qui commence la mise en mouvement de la Fédération32. Un projet de statuts est élaboré prévoyant une organisation parallèle à celle du Parti. Le Comité Directeur partage la France en régions et désigne pour chacune un délégué. La Route des Jeunes devra désormais paraître chaque mois. Une première "Journée Nationale" des J.D.P. a lieu au Mans en avril 1934. Il y a déjà cinquante départements prospectés et vingt-cinq délégués régionaux33. Ce nouveau dynamisme est symbolisé par la parution depuis le 1er mai 1935 d’une Route des Jeunes indépendante du Petit Démocrate (on parle de 4 200 exemplaires). Au Congrès de 1935 sont présents deux cents délégués J.D.P. et la Fédération vote une motion autonome34. Elle organise une manifestation à Orléans en janvier 1936 : trois cents délégués y représentent vingt Fédérations35. Cependant le développement n’a pas toujours correspondu aux espérances. Ainsi Louis Bour s’inquiète auprès de Laudouze de l’absence de groupe dans le Puy-de-Dôme36. Mais la Fédération essaie d’intensifier sa propagande, en s’appuyant sur le "Club du Carrefour" et un "Foyer J.D.P.". Elle est aussi concernée par la révision des statuts de mai 1936 : participation de ses membres aux organes du Parti à tous les niveaux, et contrôle du Parti exercé sur la Fédération. Raymond-Laurent affirme à Robert Lecourt : "l’existence d’un mouvement J.D.P. me paraît indispensable au Parti"37. A la tête de la Fédération se trouve un Comité Directeur National qui élit chaque année un bureau.
25Le Président est toujours à la veille de la guerre, Robert Lecourt, Hubert Monmarché étant Secrétaire Général et Louis Bour Trésorier. L’organisation comprend des Fédérations départementales : vingt et une en 1937 et en plus des adhérents isolés. En 1939 on compte sept "délégués régionaux" et trente trois délégués départementaux pour une Fédération qui a été une "pépinière” de futurs parlementaires et dirigeants M.R.P. Une implantation a donc été réalisée par les J.D.P., parallèlement à celle du Parti lui-même. La Route des Jeunes aurait atteint le chiffre de 10 000 numéros vendus, et 3 000 abonnés en 1937. En juillet 1935 pour les abonnements, Paris (347) et la Seine (380) arrivent en tête, mais d’autres départements se signalent aussi : Finistère (205), Isère (217), Loiret (288), Meurthe-et-Moselle (166), Nord (238), Pas-de-Calais (130). Mais seules les Fédérations importantes pouvaient avoir une véritable organisation structurée, les J.D.P. ayant bénéficié dans le Parti tout comme la Fédération Féminine d’une "autonomie contrôlée".
II – LES MOYENS
26Comme toute force politique, le P.D.P. s’est consacré à une œuvre de propagande afin de renforcer ses moyens sur le terrain des effectifs et au niveau matériel et des finances. Mais on peut se demander à quels résultats il est effectivement parvenu. Il est toujours resté une petite force politique par ses moyens directs, et tout au plus une force moyenne par une influence diffuse.
Propagande et Militants
27Le P.D.P. a cependant essayé d’organiser une propagande sur le modèle des grands partis, avec une foi et une volonté incontestables chez des milliers de militants convaincus. Les grands principes de cette propagande furent fixés dès le début par Raymond-Laurent. Mais les premières années de son histoire offrent un assez bon exemple typologique des efforts et des difficultés d’une petite force politique tentant de faire sa place. Au Congrès de 1926 Raymond-Laurent expose clairement les principes de la propagande et de l’organisation du Parti. Il conseille au militant isolé de s’abonner au minimum au Petit Démocrate, et de le lire en public, de dresser une liste des sympathisants, de recruter des adhérents dans son milieu et d’être le correspondant local du Parti. Quant à la section locale, elle doit suivre un modèle de règlement intérieur et il lui conseille d’organiser des "Commissions de travail" diverses. Elle doit se réunir au moins une fois par mois et tenir des réunions d’étude et de propagande. Il recommande partout la "politique de la présence" auprès des œuvres et de la presse locales.
28Pour la Fédération Départementale, il est rappelé comment elle s’élabore souvent autour d’un noyau d’amis habitant au chef lieu qui forme un "Comité d’Initiative”, débouchant sur une "Section dite Départementale", première étape vers la Fédération. Le Secrétaire Fédéral doit envoyer trois fois par an au Secrétariat Général un rapport d’activité. Pour la propagande il est conseillé d’organiser des "Journées Démocratiques". La nécessité est évoquée aussi de relations personnelles avec les directeurs de journaux à cause de "l’intérêt primordial que cette action par la presse représente pour la pénétration de nos idées". Mais chaque Fédération doit avoir un "Bulletin Fédéral" qui peut être conçu comme un journal d’information local, un journal d’idées proche du Petit Démocrate, ou comme un bulletin périodique d’information et de propagande. Malgré tout la base du militantisme est bien entendu l’adhésion au Parti et au début de 1925 on fait établir une carte de membre du P.D.P.
29Sur ces bases l’action de propagande se développe avec davantage de moyens à partir de 1927. Chaque année ont lieu des "campagnes de réunion de propagande publiques ou privées", menées par les principaux orateurs du P.D.P. et dont Raymond-Laurent dégage en 1929 le triple caractère : éducation civique, moyen d’atteindre un vaste public dépassant celui du Parti, élément de l’effort de pénétration pour la formation des groupes38. Un autre moyen est la publication de brochures, d’affiches qui aboutit à une masse assez importante et diverse. En fait un des instruments les plus importants de la propagande du Parti va rester Le Petit Démocrate qui accentue cet aspect à partir de 1928. L’"Institut Démocrate Populaire" avait créé des "cours d’élèves-orateurs" et le "groupe d’action et de propagande". Des équipes sont formées qui partent régulièrement pour des "réunions contradictoires" ou des "tournées de masse" avec plusieurs orateurs dans une même région. C’est à l’intention des militants et propagandistes qu’est publié à partir de 1931 le Bulletin du Militant, sans périodicité régulière, "strictement réservé aux militants les plus actifs... et pas à tous les militants du Parti"39 (il en paraîtra 13 numéros). Ce "Bulletin" donne en particulier des indications sur les contradictions et objections à apporter aux adversaires de droite, socialistes et radicaux. Il devient un véritable "arsenal" de l’orateur Démocrate40.
30Des "Journées du Militant" sont organisées à Paris en 1931, à la fois pour la propagande du Petit Démocrate et la souscription du Parti41. Un aboutissement est bientôt la création de la "Commission d’Action et de Propagande" chargée de superviser ces questions et qui est placée sous la présidence de Raymond-Laurent. Mais au Congrès d’Arras en 1936, Alphonse Juge met en lumière "les difficultés auxquelles notre propagande s’est heurtée depuis le Congrès de l’an dernier"42. Il évoque la nécessité absolue de faire rentrer les cotisations. Juge à la fin de la vie du Parti supervise pratiquement toutes ces questions et il pose le problème en 1939 de la "propagande générale", de la constitution d’un "Centre" qui serait dirigé par Bastianelli43. La propagande extérieure a toujours été une dimension importante, même si elle n’a pas abouti aux résultats escomptés et à en faire un "Parti de masse", le P.D.P. étant resté plutôt un Parti de "cadres" et de "lieutenants", mais également de militants nombreux et dévoués par rapport aux effectifs réels.
Les Effectifs
31Le chiffre réel des adhérents à un parti n’est jamais très aisé à déterminer et c’est toujours une des zones d’incertitude. Au sujet du P.D.P., on ne dispose que de données fragmentaires et incertaines qui ne se recoupent pas entièrement. Une "fourchette" laisse une large marge entre les 37 000 adhérents selon R. Biton et les 10 000 annoncés par P. Letamendia44. Un nombre couramment présenté pour les effectifs tourne autour de 20 000 adhérents aux plus beaux jours de la vie du Parti, mais une confusion est possible avec les abonnés au Petit Démocrate. Si les deux chiffres ont été souvent proches, il a pu se produire des distorsions, soit par excès, soit par défaut suivant les régions. Il convient aussi de rappeler la distinction classique entre les "adhérents" et les "sympathisants" qui peuvent être classés dans les fichiers par les propagandistes. Un fichier de 35 000 noms aurait existé dans les locaux du P.D.P.45. Il est cependant possible d’aller plus loin dans cette étude grâce aux indications données au moment des Congrès sur le nombre des cartes placées (à utiliser avec précaution) ou les revenus des cotisations (au début la cotisation pour le Parti était fixée à 1 franc). D’autres indications fragmentaires peuvent être trouvées ici ou là sur les Fédérations et les Sections. Dès le Congrès de 1925, des incertitudes apparaissent On parle d’une carte du Parti retirée à 6 700 exemplaires, mais Zamanski lors de son rapport sur le budget parle de 5 793 francs venant des Sections46. Les points de départ tourneraient donc autour de 6 000 adhérents. En 1926, de larges progrès seraient enregistrés, le rapport fait état de 10 749 francs de cotisations, soit un quasi doublement47. En 1927 on parle seulement de "chiffres qui se rapprochent de ceux de l’année précédente"48, en même temps que l’on porte la cotisation à 2 francs. Mais au Conseil National de mars 1929, si l’on rappelle que le budget du Parti prévoyait 20 000 cartes, il est admis que jusqu’alors vingt cinq Fédérations ont commandé un peu plus de dix mille cartes et des "retards" sont évoqués49.
32En 1929, Arthus-Bertrand souligne seulement "l’augmentation de la vente de cartes du Parti"50, et en 1930, il semble que l’on puisse parler de 12 200 adhérents, puis en 1931 de 13 200, l’accroissement restant lent. On continue à regretter "le grand nombre de cartes qui, n’ont pas été payées"51. Le Congrès de 1932 donne des indications plus précises : la vente des timbres a rapporté dans cette année 31 200 francs ce qui représenterait 15 600 timbres, soit une progression de 2 400 adhérents par rapport à l’année précédente, alors que le gain n’avait été que de 1 000 en 1930-193152. Le Parti serait donc passé d’un peu plus de 10 000 cotisants en 1929 à 12 200 en 1930, 13 200 en 1931, 15 600 en 1932. C’est l’entrée dans une phase assez dynamique et de progression qui va encore continuer quelque temps. Au Congrès de 1934 est évoquée une "augmentation très importante" de près de 50 % par rapport à l’année précédente, faisant atteindre "le chiffre de timbres le plus élevé que nous ayons enregistré"53. On aurait ainsi atteint le chiffre de 20 000 adhérents, et peut être même dépassé en 1935 avec une nouvelle progression revendiquée54. Mais ce qui semble prouver un gonflement des chiffres les années précédentes, on ne parle plus en 1936 que de 16 017 adhérents effectifs en 1935, pour relativiser la baisse des timbres en cette année à 13 55855. C’est bien l’entrée dans une phase descendante de la courbe et au Congrès de 1937 sont reconnues "des cotisations statutaires inférieures à celles de l’année précédente", un "fléchissement du nombre effectif des adhérents" et des "retards nombreux"56. C’est un des éléments de la crise du Parti qui retombe au niveau des 10 000 adhérents.
Éléments de sociologie
33Il est difficile de faire une étude précise de la sociologie des membres du P.D.P., une approche pouvant cependant être réalisée à partir des listes de souscription (indication partielle des professions). Étant donné l’impossibilité d’autres approches, les résultats obtenus doivent être donnés ici à titre tout à fait indicatif57. Dans l’échantillonnage servant de référence, le groupe des "agriculteurs" n’arrive qu’à 5 %, ce qui peut paraître relativement peu pour un parti qui avait fourni un gros effort dans cette direction. A côté le groupe des "artisans" représente 7 %, ce qui démontre l’importance des catégories sociales indépendantes. En effet les catégories diverses de "professions libérales" se trouvent être particulièrement bien fournies, aboutissant à un total de 17 % (médecins, pharmaciens, notaires, architectes, etc...). Celle des "industriels" représente environ 6 %, les "négociants", 5 %, et les commerçants, 4,5 %. Toutes ces catégories forment avec les agriculteurs et artisans 45 % du total, et sans eux 33 %, soit un tiers pour les groupes socio-professionnels des classes "supérieures" et "moyennes supérieures". Un groupe spécifique frappe par son importance sur les listes : celui des prêtres (8 % du total) dont on peut se demander ici s’il n’est pas sur-représenté. On doit signaler aussi la présence d’un fort contingent "d’étudiants" (4 %), à côté des "professeurs et hommes de lettres" (4 %) et d’un groupe comme celui des ingénieurs (4 % aussi).
34Cela conduit donc au problème de la représentation des classes salariées, de par le fait massif d’une sur-représentation des non-salariés. C’est ainsi que l’ensemble que l’on peut regrouper sous l’appellation d’"employés" : services publics, chemins de fer, postiers, comptables, clercs et employés divers parvient à un total de 22,5 %, ce qui en fait le groupe le plus important. Il y a donc eu une pénétration dans le "monde du travail” des "cols blancs" et les milieux ou a pu jouer en particulier l’implantation du Syndicalisme Chrétien, même si l’adhésion des syndiqués chrétiens n’a pas été massive. Mais le groupe des "ouvriers" reste minoritaire (environ 7,5 %), l’implantation dans le monde du travail apparaissant donc inégale entre les deux grandes catégories.
35Ces données rejoignent celles déjà établies sur la sociologie des cadres dirigeants. Les classes moyennes et indépendantes sont très représentées aussi au niveau des militants et des adhérents, à côté d’une implantation relativement forte dans les milieux d’employés et plus faible pour les milieux d’ouvriers. Professions libérales et indépendantes d’un côté, employés de l’autre constituent les noyaux sociologiques essentiels du P.D.P. Cette sociologie est peut être un peu différente de celle de l’électorat démocrate populaire, dont on peut se demander d’ailleurs s’il est vraiment spécifique. Les "classes dirigeantes" sont représentées par une bourgeoisie traditionnelle, mais dans le cadre d’une idéologie "inter-classiste” qui vise à intégrer des éléments de "classes moyennes inférieures" et populaires. Cette volonté idéologique a sa transcription partielle sur le plan sociologique, même si elle n’a pas abouti aux résultats espérés, du fait de la faiblesse de la représentation ouvrière et même paysanne. L’aspect "inter-classiste" est tronqué chez les salariés. Néanmoins le P.D.P. a toujours voulu s’intéresser à toutes les catégories sociales, et il a essayé d’élaborer un programme spécifique pour chacune, même s’il n’est pas parvenu aux résultats recherchés d’équilibre entre les classes sociales.
Les Finances
36Le problème des moyens financiers d’un parti est un des plus délicats de la politologie et le P.D.P. lui-même n’échappe pas totalement à cette question et à ses "zones d’ombre". Une première approche peut consister à aborder le problème au niveau du budget annuel. Elle laisse latent celui des éventuels soutiens et appuis indirects. Le P.D.P. s’est toujours présenté comme un "parti pauvre" et il l’a été en grande part, ne serait-ce que par la faiblesse du nombre de ses adhérents. Mais comme pour toutes les forces politiques, les campagnes électorales coûtent cher et il y avait un minimum de services à assurer au siège, les efforts de propagande... Le Trésorier (J. Zamanski puis Arthus-Bertrand) a la charge de ces problèmes et il les présente chaque année au Congrès. En 1925, J. Zamanski annonce un budget excédentaire : 69 249 francs de recettes et 62 297 francs de dépenses. Aux recettes, les cotisations ne fournissent que 5 793 francs aux côtés de 60 984 francs de "subventions personnelles". Aux dépenses, les "appointements" représentent 35 760 francs, soit près de 60 %. Il lance un appel pour trouver cent personnes capables de donner de 300 à 1 000 francs et il évoque le résultat obtenu "grâce à la générosité d’amis de la première heure".
37L’appel à des "amis privilégiés" pour subventionner le Parti est donc capital dès le début58. Au Congrès de 1926 est annoncé un budget en augmentation et toujours excédentaire, mais qui n’atteint pas les chiffres prévus : 76 523 francs aux recettes, 64 273 francs aux dépenses, les cotisations étant en accroissement (10 749 francs). Zamanski déclare que la trésorerie est suffisante, mais que les économies se traduisent dans les faits "par la pénurie des moyens et l’insuffisance de la propagande"59. En 1927, on indique seulement que les chiffres du bilan de l’exercice 1926-1927 se rapprochent sensiblement de ceux de l’exercice précédent. Arthus-Bertrand au nom du Comité Financier qui a "étudié les moyens de procurer au Parti les ressources dont il a besoin", notamment pour les élections de 1928 propose de porter à 2 francs la cotisation, d’augmenter le nombre des "souscriptions personnelles" et surtout de lancer une grande "souscription nationale" pour procurer des ressources aux candidats. C’est la première des grandes souscriptions du P.D.P.60. Au Congrès de 1928, le "Comité Financier" avec Armand Lille présente le budget et les résultats de la souscription. Il parle d’un "budget normal" de 160 000 francs et d’un "budget extraordinaire" de 90 000 francs61. En 1929, Arthus-Bertrand, nouveau trésorier, ne donne pas de chiffres plus précis. Le groupe parlementaire contribue maintenant aussi aux dépenses du Parti par un versement de 27 200 francs. Une nouvelle souscription est annoncée.
38Le Comité Financier évoque la nécessité de "doter le Parti des recettes régulières dont il a besoin", et il décide d’instituer des "parts" et des "demi-parts" de "subventions annuelles" désormais régulières, la part étant fixée à 1 000 francs par an62. En 1930 le budget s’élève à 250 000 francs et en 1931 sont avancés des chiffres du même ordre. En 1932, le total des versements à la deuxième souscription nationale s’ajoutant aux souscriptions personnelles s’élève à 395 000 francs, avec en plus 44 000 francs de versements du groupe parlementaire et 31 200 francs de timbres. Malgré les recettes, il ne reste en caisse que 131 000 francs. Finalement, Arthus-Bertrand estime avoir besoin de 275 000 francs pour boucler le budget63. En 1933 Raymond-Laurent affirme que l’on n’a pu s’en sortir que grâce au reliquat de la subvention précédente64. Le Conseil National de mars 1934 admet que les résultats de la dernière souscription n’ont pas atteint la somme nécessaire au budget du Parti. Le Comité Financier monte son "inquiétude” et lance un appel à "250 amis fortunés" pour 1 000 francs et à 10 000 militants65.
39Si en 1934 Raymond-Laurent assure qu’il n’y a ni déficit, ni dette, il reconnaît que le Parti n’a pas des ressources suffisantes et il lance un appel en faveur de ce qui devient le”1 % du P.D.P." pour 10 000 militants ou sympathisants. Le budget présenté est de 278 192 francs aux dépenses et de 293 197 francs aux recettes. La souscription nationale a produit 229 235 francs. Cependant la Commission Exécutive en 1935 indique toujours qu’elle "s’est émue de la situation budgétaire qui devient critique du Parti". On prévoit un manque de 50 000 francs pour l’exercice en cours. Les membres du "Comité Financier" décident donc de former un "petit consortium" qui fera les avances nécessaires pour éviter "l’éventualité de voir le Parti cesser d’exister"66. Le budget rapporté au Congrès de 1935 fait néanmoins état de 254 496 francs de dépenses et de 308 013 francs de recettes. Cette année, on ne pourra vivre à nouveau que par une "souscription nationale" sous la forme de "certificats de souscription", formule adoptée au Congrès de Marseille de 1934 : parts de 100, 500 et 1 000 francs souscrites soit à titre individuel, soit collectivement par les Fédérations67. En 1936 un budget excédentaire est présenté (255 354 francs de dépenses et 305 188 francs de recettes), la souscription à elle seule ayant rapporté 252 000 francs. On se félicite du succès des "certificats de souscription"68. En 1937, l’équilibre est plus difficile : 274 743 francs aux recettes et 270 797 francs aux dépenses, les recettes des souscriptions étant en diminution (217 000 francs). La situation financière est toujours décrite comme précaire, même si elle est la rançon de l’indépendance. Le Parti ne pourra vivre que grâce à la souscription et aux certificats69. En 1938, c’est à nouveau un budget en excédent (351 000 francs de recettes et 302 000 francs de dépenses), les souscriptions étant cette fois en augmentation de 75 000 francs70. Mais c’est le moment où Raymond-Laurent évoque une situation financière qui interdit toute aide aux Fédérations71.
40Le P.D.P. a toujours vécu au milieu des difficultés avec un budget de fonctionnement faible relativement, destiné à subvenir aux dépenses du siège, au traitement de quelques permanents et aux frais généraux. Il n’a que peu dépassé les 300 000 francs, du moins officiellement. La part des cotisations a toujours été très faible dans les recettes (de 10 à 15 %). L’essentiel a été fourni au début par les "subventions" bénévoles, puis par les "souscriptions" de plus en plus nombreuses et devenues quasiment permanentes à la fin. Ces modes de financement ont permis de maintenir l’équilibre du budget, ce qui n’a pas exclu de constantes difficultés de trésorerie. Sur le plan financier aussi, le P.D.P. a été une petite force politique. Mais des problèmes parallèles se posent, comme pour les ressources nécessaires aux campagnes électorales. Le Parti a été constamment obligé de faire appel à des "amis" même pour son budget de fonctionnement, autour d’un "Comité Financier" cherchant perpétuellement de nouvelles ressources, avec notamment des "souscriptions".
41Ce fut là en définitive une des institutions importantes pour la vie du Parti, aux confins de ses problèmes matériels et de celui de sa propagande. Très tôt, le P.D.P. s’est orienté vers ce mode de financement et a lancé pour la première fois au Congrès de 1927 une souscription, celle de 1928 aux assez bons résultats. Il organise ainsi des "semaines de la souscription" et il demande à chaque Fédération de désigner un délégué dans ce domaine72. La souscription de 1928 recueille les dons de 4 000 personnes, la seconde en 1930 de 7 000 et on compte pour celle de 1932 sur un minimum de 10 00073. Ces chiffres donnent une idée de l’emprise sympathisante du P.D.P. La souscription de 1928 avait rapporté 300 000 francs et en 1932 on escompte 700 000 francs de la troisième, chiffre qui est loin d’être atteint. Sur le plan géographique, Paris en 1928 était arrivé en tête avec 46 671 francs, suivi de la Seine (20 600 francs), du Nord (15 279 francs), des Bouches-du-Rhône (13 729 francs), de la Meurthe-et-Moselle (12 253 francs). Pour celle de 1932, Bastianelli parle très clairement de la nécessité de "constituer une caisse électorale" et demande aux Fédérations de rechercher les "gros" et les "moyens" souscripteurs74. Par la suite la formule évolue en raison des "certificats de souscription" qui deviennent un mode de financement régulier du Parti et une sorte d’institution quasipermanente. A la fin de son histoire le P.D.P. ouvre chaque année une souscription par le système des "certificats". Mais on commence aussi à se plaindre de l’absence de la masse des "petits souscripteurs" qui avait fait le succès des premières opérations. Désormais le Parti semble de plus en plus dépendre d’une catégorie de "souscripteurs institutionnels" qui renouvellent leurs certificats chaque année. En 1936 il est admis qu’il n’y a plus que 3 900 "petits versements" en dehors de souscripteurs de certificats (547 en 1935, dont 503 à 100 francs et les autres à 500 ou 1 000 francs). On note un essoufflement de la masse, l’essentiel des ressources étant désormais fourni par un petit nombre de "gros appuis".
42La question des soutiens directs ou indirects, exprimés ou occultes au P.D.P. peut et doit être posée. Le "Groupe Pératé" a été un de ces soutiens matériels directs officiellement reconnus comme tels par le Parti. L’Abbé Pératé (1867-1954) avait adhéré au mouvement sillonniste, mais surtout en tant qu’aumônier il avait réussi à grouper autour de lui un noyau de jeunes qui avaient décidé de mener une vie qui "tout en répondant pleinement aux exigences professionnelles et familiales de leur condition s’efforcerait de s’accorder aux prescriptions évangéliques"75. Le "Groupe Pératé" était un groupe amical et spirituel, qui disposait d’assez importants moyens matériels qu’il pouvait mettre au service d’initiatives à favoriser. Ses membres plus ou moins proches d’une "Démocratie Chrétienne modérée" avaient créé un certain nombre de "foyers" prenant des engagements divers76. Le groupe avait d’abord aidé au financement de L’Ame Française. En 1924, il s’oriente vers une autre forme de soutien pouvant aller vers le P.D.P. Au début il finance un organisme parallèle qui est le "Bureau d’Études". Des membres influents du Parti en étaient proches comme Bastianelli, Armand Lille en qui on a pu voir "le regard du Groupe Pératé sur le P.D.P."77. Ce groupe d’hommes souvent mêlés à la vie des affaires va jouer un rôle diffus mais important pour le soutien au P.D.P. : on y trouve l’industriel Daum, Jean des Cognets (de L’Ouest Éclair), Charvet de "L’Union des Mines".
43Au début on déclare que l’on ne veut pas s’engager directement dans une "affaire politique". Mais au moment de la souscription de 1928, D’Hellencourt fait état des 30 000 francs qu’il a réussi à faire souscrire "parmi d’anciens amis de L’Âme Française". Il a été également en contact avec "tout le groupe d’hommes d’affaires qui entourent le Parti"78, qui donne l’impression d’un petit milieu efficace et influent et qui a pu contribuer à le sortir de certaines difficultés en de nombreuses circonstances. Un homme comme Emilien Amaury, le futur fondateur du Parisien Libéré (1909-1977) semble avoir été au début soutenu par ce groupe. Ayant commencé rapidement une carrière de publiciste et de journaliste, administrateur de L’Éveil des Peuples de Marc Sangnier, il fonde en 1930 "l’Office de Publicité Générale" dont il restera le gérant jusqu’en 1945. A ce titre il devient le chef de la publicité de plusieurs journaux d’inspiration démocrate chrétienne dont La Jeune République et Le Petit Démocrate, pour celui-ci par l’intermédiaire de Hourdin, tout en étant en liaison avec le "Groupe Pératé" qui lui propose de soutenir les journaux de cette tendance79. Le soutien publicitaire de l’O.P.G. au Petit Démocrate n’a pas été négligeable. Amaury demande "la collaboration de tous nos amis dans ce domaine" et de désigner pour chaque Fédération un "délégué à la publicité"80. Par l’O.P.G. (né avec l’appui de Armand Lille, Arthus-Bertrand, Raymond-Laurent, Alfred Bour) constituée sous la forme d’une S.A.R.L. dont Le Petit Démocrate était au départ le plus fort actionnaire, Amaury réussit à fournir à ce journal des ressources importantes pour un équilibre financier toujours difficile à assurer81.
44Un autre élément important des soutiens parallèles au Parti a été par ailleurs le journal L’Ouest Éclair, qui depuis 1923, imprimait gratuitement Le Petit Démocrate, l’Abbé Trochu parlant à ce sujet des "accords de Saint Servan". Ce soutien matériel fondamental s’est révélé d’autres manières jusqu’en 1933 et la mort de Desgrées du Lou, même après le départ de l’Abbé. En fait dans l’Ouest et en Bretagne une partie des structures du P.D.P. étaient financées par le quotidien de Rennes : les secrétaires du Parti dans le Finistère et les Côtes-du-Nord étaient ainsi rétribués par L’Ouest Éclair82. Le soutien au Petit Démocrate continue, même à partir du moment où il est imprimé à Arras. Le Conseil de surveillance lui alloue d’abord une subvention de 3 500 francs par mois qu’il réduit à 2 000 francs en 1932 du fait d’une "situation du journal qui semble s’améliorer". Le Petit Démocrate demande le maintien du montant initial et on transige à 35 000 francs par an. L’Ouest Éclair a contribué à aider financièrement des organes de presse proches du P.D.P. comme Politique (ainsi en 1929 est-il accordé 20 000 francs à cette revue)83, mais aussi Le Télégramme du Nord Est, Sud, des feuilles locales favorables à celui-ci en Vendée. Il s’est donc agi une aide multiforme qui a pu aller parfois jusqu’à combler discrètement le déficit du Parti, en dehors du soutien direct au Petit Démocrate, à une presse liée au Parti et du financement d’une partie des structures du P.D.P. Outre Desgrées du Lou et l’Abbé Trochu, un homme comme Jean Des Cognets a joué ici un rôle important, cela étant lié au problème général des relations entre L’Ouest Éclair et le Parti.
45D’autres soutiens se sont également révélés épisodiquement L’Abbé Renaud parle ainsi à Desgrées du Lou en février 1925 d’une "entrevue Lazard-Cornilleau", à la suite de laquelle Lazard aurait remis 5 000 francs pour le P.D.P. en déclarant : "le mouvement me plaît. Je ne demande pas mieux que de faire beaucoup plus"84. Des contacts sont maintenus avec Raymond-Laurent, Paul Simon, Pagès qui en 1926 fait état d’un "dîner chez André Lazard avec Cornilleau" où est évoquée la possibilité de créer des quotidiens du type "Ouest Éclair" à Tours, Toulouse...85. Un autre problème de soutien éventuel s’est posé du côté de la "Confédération Française des Professions" et de Joseph Zamanski qui fut le premier trésorier du P.D.P., ou du fait de "subventions par des industriels du Nord par exemple à l’occasion des souscriptions"86. D’autre part, la revue Politique a pu être considérée comme "le cadeau de l’A.C.J.F. au P.D.P."87. Elle est éditée par la maison "S.P.E.S." en relation avec les Jésuites de l’Action Populaire qui publie un grand nombre d’ouvrages et de brochures de leaders du Parti.
46Mais le problème pourrait être soulevé encore du soutien éventuel des grandes organisations politico-financières de l’entre-deux-guerres, au moment des élections. En 1928 Jean Jadé reçoit un versement de 10 000 francs du "Redressement français", à côté des 10 000 francs des services centraux du Parti88. Pour "l’Union des Intérêts Économiques", le problème est d’autant plus intéressant qu’Ernest Billiet avait été lié à la "seconde Démocratie Chrétienne". L’U.I.E. avait joué un rôle important aux élections de 1919 et son rôle aux élections de 1924 est mis en cause par le Cartel89. Si le P.D.P. également avec certains de ses candidats a pu être aidé partiellement et épisodiquement par ces groupements divers, il n’en reste pas moins que ses moyens financiers sont toujours restés très limités par rapport à ceux d’autres forces politiques. Il devait compter sur le soutien interne de certains de ses membres ou sympathisants fortunés, de tout un milieu bourgeois traditionnel lui permettant de survivre dans la pauvreté et l’honnêteté.
III – L’IMPLANTATION
47Le P.D.P. apparaît globalement comme ayant été tout d’abord un "parti de cadres". Il a eu un État Major assez nombreux à la fois au niveau national et au niveau régional, des Fédérations qui vont se créer avec une armature prête en 1924 de "lieutenants" et de "capitaines". Il a été aussi un parti de militants assez nombreux que l’on peut estimer à plusieurs milliers et ayant constitué le ressort de son dynamisme initial. S’il n’a jamais été un parti de masse, il a bénéficié de ces caractères pour son implantation progressive par les "Fédérations" créées dès 1924 ou par la suite. Il n’a jamais réussi à créer des Fédérations dans tous les départements, mais il est parvenu à s’implanter dans toutes les régions avec une vitalité d’ailleurs diverse. Les groupes existant dès 1924 parfois sous la forme de "Fédérations de Républicains-Démocrates" se transforment en autant de Fédérations du Parti en suivant les indications du Congrès constitutif. En mars 1925 Raymond-Laurent établit un premier bilan : le P.D.P. représente une force politique dans 28 départements. Il a de plus une "action directe" dans 30 autres90. Au Congrès de novembre, il parle d’une "force politique dans 40 départements"91 qui se répartit dans toutes les régions (il y inclut l’Alsace et la Moselle). Il existe aussi un "réseau de correspondants" pour 35 autres. Mais en fait on est loin d’avoir toujours affaire à des "Fédérations constituées" et parfois à des "Sections départementales".
48L’année 1925 est celle de la création de Fédérations là où il existait déjà des forces, par une sorte de légalisation et d’intégration dans le Parti. Après les Fédérations de Républicains-Démocrates déjà existantes (région parisienne, Finistère) se constituent dès décembre 1924 celles de la Sarthe, de la Haute-Vienne et du Puy-de-Dôme, puis dans le courant de 1925 celles de l’Ille-et-Vilaine, de la Côte d’Or, de la Seine Inférieure, du Loiret, du Nord, du Pas-de-Calais, de la Manche, de la Meurthe-et-Moselle (Fédération de l’Est de la France avec la Meuse et les Vosges), du Rhône (Comité régional des Démocrates Populaires du Sud Est), de l’Isère, de l’Ardèche, des Landes (Parti Républicain Démocrate Social des Landes affilié au P.D.P.), de la Haute-Garonne. Des "Sections" sont encore créées dans les Bouches-du-Rhône, les Côtes du Nord, la Nièvre, la Saône et Loire, la Gironde, à qui l’on demande d’entreprendre un travail méthodique de recrutement et de propagande. En mars 1926 Raymond-Laurent parle d’un "travail d’organisation" dans 47 départements ayant des Fédérations (22) ou des Sections (25), de "correspondants de première zone" pour 20 départements et d’une implantation dans 23 autres par Le Petit Démocrate. Mais en juin, il ne parle plus que de 41 départements ayant des Fédérations ou des Sections plus l’Alsace-Lorraine et les Ardennes. A la fin de 1926 il semble que l’on puisse établir le bilan suivant des Fédérations existantes : Seine, Seine-et-Oise, Finistère, Morbihan, Côtes-du-Nord, Loire-Inférieure, Ille-et-Vilaine, Manche, Seine-Inférieure, Sarthe, Nord, Pas-de-Calais, Meurthe-et-Moselle, Loiret, Haute-Vienne, Puy-de-Dôme, Rhône, Ardèche, Isère, Bouches-du-Rhône, Landes. Des Sections existent dans une vingtaine d’autres qui donneront pour la plupart naissance à des nouvelles Fédérations. Cette implantation après deux ans d’existence du Parti fait apparaître un certain nombre de "zones de force" dans la région parisienne, l’Ouest et en particulier la Bretagne, la région lyonnaise et quelques foyers isolés, correspondant largement à l’implantation déjà existante en 1919-1924. En 1927 de nouvelles Fédérations sont mises en place : Nièvre, Saône-et-Loire, Tarn, à un rythme déjà ralenti. Raymond-Laurent reconnaît qu’à côté de l’effort fourni par certaines Fédérations, d’autres n’avaient qu’une activité "réduite" ou "insuffisante"92. En 1928 sont créées les Fédérations de Paris, du Maine-et-Loire, de la Seine-et-Mame, en 1929 de la Haute Savoie, de la Gironde et de l’Eure. Au Congrès de 1929 Raymond-Laurent affirme que le P.D.P. représente désormais une force inégale mais non négligeable dans la moitié des départements. Il fait remarquer que la tâche devient de plus en plus difficile à mesure que le Parti aborde des zones moins défrichées... De nouvelles Fédérations sont cependant créées, essentiellement à partir des Sections existantes, ainsi en 1930 dans le Calvados, la Haute-Garonne, les Landes, les Alpes-Maritimes, en 1931 dans le Doubs, la Dordogne, l’Oise, l’Allier. Le Secrétaire Général évoque alors des Fédérations qui "s’étoffent" ou qui "essaiment"93. Au Congrès de 1932 il parle de 60 Fédérations ou Sections existantes (après apparition des Fédérations de la Vendée, de l’Ain, de la Savoie et des Pyrénées Orientales, suivie en 1933 de celles de l’Aisne, de la Mayenne et du Jura, en 1934 de la Corrèze et de la Vienne94). Dans son bilan général au Congrès de 1934 "un effort de dix années", il affirme la présence d’une force politique dans 79 départements, même s’il admet que "60 % environ" seulement de ces groupements font figure de force organisée. En 1935 sont encore mises en place de nouvelle Fédérations dans l’Indre-et-Loire, la Meuse, en 1936 dans la Somme, les Hautes-Alpes, le Lot-et-Garonne, en 1937 dans l’Yonne.
49Cette organisation des Fédérations, souvent réalisée en deux temps en raison de l’étape intermédiaire des "Sections" était parvenue à réaliser un réseau important, mais incomplet et inégal suivant les régions. De plus la vie de ces Fédérations et Sections n’a pas toujours été marquée par une grande activité. Dès 1936 est rappelée la "reconstitution" nécessaire de trois Fédérations : Indre, Oise, Somme95 et en 1939 est "reconstituée" celle de Loire-Inférieure. En fait, il y a toujours eu un certain "flou" dans la vie de beaucoup de ces groupements, parfois un peu fantomatiques, n’ayant eu qu’une activité précaire qu’il fallait de temps en temps ranimer. Les prescriptions théoriques sur l’organisation et l’activité ne pouvaient être suivies que par une partie d’entre eux, même si 58 Fédérations en 1932 et en 1936 ont réglé des timbres. Mais il est toujours resté un gros tiers des départements où l’activité était très faible, voire inexistante et quelques zones "en blanc" sur la carte de l’implantation. Cependant on constate qu’un certain nombre de départements sans groupe organisé ou avec une faible activité ont connu une action électorale liée au P.D.P.
50Les régions et départements touchés par l’activité démocrate ont fini par réaliser une implantation majoritaire, mais ténue dans l’ensemble. Des régions entières en 1939 sont couvertes de Fédérations et entièrement organisées : Bretagne, Normandie, Nord en particulier, et aussi Région Parisienne, Est, Franche-Comté. Dans la France méridionale, l’implantation est restée plus lacunaire mais elle a progressé dans les années 1930 à partir des noyaux initiaux. La Région Alpine et du Sud Est lyonnais s’est trouvée notamment rapidement organisée, alors que la Provence, partie vite s’est un peu essoufflée. Le Sud Ouest aquitain s’est organisé malgré quelques lacunes, le Midi toulousain autour de quelques noyaux de même que le Massif Central. Une implantation à des titres divers dans près de 80 départements (en comptant l’Alsace et la Moselle) a été réalisée, mais en 1939 uniquement pour 58 sous la forme de Fédérations (dont certaines reconstituées). On a en plus environ 17 Sections. Ces Fédérations étaient d’une importance numérique très inégale, avec beaucoup de petites et moyennes Fédérations de moins de deux cents adhérents à côté d’une dizaine plus importantes. Une autre approche est aussi réalisable par les abonnements au Petit Démocrate (chiffres pour 1927, 1929, 1930, 1931, 1932)96.
L’Implantation Régionale
51La région parisienne avait été un des berceaux de l’activité des Républicains-Démocrates, grâce aux Comités Républicains-Démocrates” qui "aboutissent à entourer Paris d’un réseau aux larges mailles sans doute, mais continu"97 : cinquante Comités en 1925. L’implantation en 1926 s’étend à tous les cantons de la banlieue, sauf quatre. Jusqu’en 1928, date de la création de la Fédération parisienne, cette action concerne également Paris. Mais Raymond-Laurent reconnaît en 1926 que beaucoup de Comités ne montrent pas une activité suffisante98. En 1926 est cependant créée une "Association des élus municipaux et cantonaux de la Seine" qui se propose un programme de réalisations sociales, l’action sociale municipale étant présentée comme fondamentale sur le modèle de celle d’Alfred Bour99. C’est alors que l’on transforme aussi peu à peu les "Comités" en "Sections" du P.D.P. que l’on tente de regrouper en "Comités Cantonaux". La Fédération de la banlieue continue une activité régulière mais avec un certain essoufflement. Elle est réduite à un rôle d’appoint chez les "républicains nationaux". Cependant elle reste une des plus fortes (821 cotisants en 1924, 980 abonnés au Petit Démocrate en 1929, 1 348 en 1932) autour de quelques uns des principaux leaders du Parti où elle a joué un rôle plus important que par sa force relative, ce qui a pu entraîner des réactions contre la domination parisienne et le contrôle du siège central.
52La Fédération de Paris devient autonome à partir de 1928. Le problème du "Groupe d’Action Démocratique de Paris" avait retardé sa naissance100. Celui-ci une fois expulsé, une nouvelle organisation devient possible sur la base de l’existence de sections dans huit arrondissements. La réunion constitutive se tient le 31 mars 1928. Il y a dans cette Fédération un certain nombre de leaders du Parti comme Georges Lebecq et André Toulemon dans le Ve, Marcel Basseville et Georges Piot dans le VIe, Edouard Jordan, Charles Flory, Marcel Lecoq, Jean Lerolle, Louis de Mijolla, Louis Alfred Pagès, Jean de Pange, J. Zamanski dans le VIIe, Philippe de Las Cases dans le VIIIe, Ernest Pezet et Besson dans XIVe. En 1931 Raymond-Laurent en devient Président. Elle est restée une des Fédérations importantes du Parti, tout en n’ayant pas eu un rôle électoral en proportion.
53En 1920 s’était constituée une Fédération de Seine-et-Oise des Républicains-Démocrates et c’est sur ces appuis que se forme une Fédération du P.D.P. en 1925 dont Emile Landé est le Secrétaire général. On parle d’une "propagande active dans 122 communes"101. Mais en fait c’est une Fédération d’importance moyenne (230 abonnés au Petit Démocrate en 1929, 390 en 1932). En Seine-et-Marne il s’était créé dès 1922 une Fédération des Républicains-Démocrates sans grande activité et ce n’est qu’en 1928 qu’on aboutit à la formation d’une Fédération rattachée au Parti. Elle veut maintenir des liens en particulier avec la Jeune République. Mais l’implantation est restée faible (55 abonnés au Petit Démocrate en 1932). En Région Parisienne les Fédérations n’ont été qu’une petite force de la vie politique générale.
54Le P.D.P. a réussi une assez bonne implantation en Normandie, à partir d’un des noyaux existants en 1924, la Fédération des Républicains-Démocrates de Normandie en Seine-Inférieure devenue "Union des Chrétiens Sociaux et des Républicains-Démocrates". En 1925 se tient l’Assemblée constitutive de la Fédération départementale. Elle a son journal Le Démocrate de Normandie qui peut expliquer par ses 1 200 abonnés la faiblesse du Petit Démocrate (112 abonnés en 1932). Pour le reste de la Normandie, c’est dans la Manche que les résultats apparaissent le plus vite, la Fédération étant constituée dès décembre, 1925 sur la base de sections en place, ainsi à Cherbourg. L’influence de L’Ouest Eclair a pu contribuer à cette naissance rapide. Le docteur Lempérière en est Président, Jean Colmant, vice-Président. Elle demeure d’importance moyenne (123 abonnés au Petit Démocrate en 1932). La Fédération du Calvados naît en mars 1930, mais elle restera sans grand rayonnement. Dans l’Eure il existait un groupe à Gisors dès 1926 et une propagande est menée dans l’ensemble du département grâce à René de Bueil qui aboutit en 1929 à la fondation de la Fédération (166 abonnés au Petit Démocrate en 1932). Dans l’Orne, le P.D.P. s’est toujours heurté à certains problèmes face à la Droite traditionnelle. Une activité s’y manifeste cependant dès 1927 et une Fédération y est créée en 1931 (150 abonnés au Petit Démocrate en 1932).
55La Bretagne avait été un des noyaux originels des "Républicains-Démocrates”. La Fédération du Finistère est restée une "Fédération modèle" par son organisation, son activité, ses Congrès, sa propagande, ses leaders. On parle en 1926 de 63 sections (1 200 adhérents) et de 43 autres en formation102 Le Petit Breton tirant à 20 000 exemplaires, avec seulement 217 abonnés au Petit Démocrate en 1932, date à laquelle le nombre officiel de cotisants est de 1 000 (700 seulement en 1935). L’Ouest Éclair soutient cette Fédération, de même que celles créées en Bretagne, des résultats rapides étant obtenus. Dans l’Ille-et-Vilaine, des sections sont rapidement installées et un Congrès en mars 1925 met en place la Fédération dont Emmanuel Desgrées du Lou est le Président. Elle compte sur le soutien de L’Ouest Éclair pour la diffusion de ses communiqués, mais elle a pu autant souffrir que bénéficier de ses relations avec lui dans les années 1930 (257 abonnés au Petit Démocrate en 1929, 192 en 1932). Dans le Morbihan, la Fédération s’organise très rapidement dès 1924-1925 et possède des sections actives dans l’arrondissement de Vannes, à Lorient, des noyaux à Ploermel et Pontivy. Elle tient des Congrès réguliers mais son importance électorale (Pezet et l’Abbé Desgranges) paraît sans rapport avec sa force réelle (121 abonnés au Petit Démocrate en 1932). Pour les Côtes-du-Nord c’est en février 1926 qu’a lieu la formation de la Fédération. A la fin de l’année, on évoque douze sections constituées et une dizaine en formation. La Fédération poursuit une activité régulière malgré une implantation moyenne (236 abonnés au Petit Démocrate en 1932). La "Fédération Nantaise" est fondée en Loire Inférieure en 1926 et maintient une certaine activité jusqu’en 1933. Mais il faut la reconstituer en 1939 où l’on reconnaît qu’elle a connu des "jours d’éclipse" (152 abonnés au Petit Démocrate en 1932).
56Le P.D.P. a réussi une implantation relative, souvent grâce à l’appui de L’Ouest Éclair et accompagnée de résultats électoraux importants dans la Sarthe, en Vendée... Dans le Maine-et-Loire, une Section est constituée en 1926 et la Fédération en juin 1928, sous la présidence de Charles Poisson, puis de Gaston Rosin. Alfred Bour, propriétaire dans la région y joue un rôle important. Mais elle ne parvient pas à un grand développement (110 abonnés au Petit Démocrate en 1929, 198 en 1932). En Vendée il existait au départ une "Fédération Vendéenne d’Union Nationale Républicaine" fondée en 1920 derrière Louis Bazire, décédé en 1923, de tendance républicaine catholique, proche de l’ancienne Action Libérale, et déjà en relation avec le B.A.C. Une action politique importante a lieu dès 1924-1928 qui débouche sur l’élection de deux "républicains catholiques" en 1928, Gallet et Durand qui s’inscrivent au groupe démocrate. Mais il faut attendre février 1932 pour voir se constituer officiellement une Fédération du P.D.P. en Vendée. Cette histoire paradoxale s’explique par des conditions spécifiques (il n’y a que 59 abonnés au Petit Démocrate en 1932). Le Maine est aussi travaillé assez tôt et en particulier la Sarthe, patrie de Cornilleau. La Fédération est mise en place dès décembre 1924 et revendique trois sections au Mans, vingt-quatre ailleurs et rien moins que neuf cents cotisants. Elle a une activité politique rapidement conduite par Goussu et Saudubray et elle conserve une importance moyenne (276 abonnés au Petit Démocrate en 1932, 500 cotisants en 1936). Dans la Mayenne, l’implantation est plus tardive et aboutit à des résultats plus faibles : Section à Laval en 1929, Fédération en 1933 (68 abonnés au Petit Démocrate en 1932).
57Dans le Nord des groupes étaient formés dès 1919, en relation avec la L.N.D. et la Jeune République, en décembre 1924 et "en raison des difficultés locales", la question se posait de savoir si l’on constituerait "un simple cercle de Démocrates" ou bien une Fédération du Parti103. Une Assemblée décide sous la direction de Victor Diligent de mettre en place une Fédération du P.D.P. dont l’Assemblée constitutive a lieu en mars 1925. Elle se consacre tout d’abord à un travail d’organisation, sur l’exemple de la section d’Hellemmes : les sections de Lille, Ascq, Wattrelos sont développées et elle devient, après un début difficile, une des plus importantes du Parti (en 1932 elle est en tête pour les effectifs avec 1 780 cartes et également pour les abonnés au Petit Démocrate : 1 840 en 1929, 2 642 en 1932). Elle entame une sérieuse campagne de propagande, tout en essayant de jouer un rôle politique local, ce qui se révèle plus difficile. Elle organise bientôt des "Fédérations d’arrondissement" ainsi dans l’Avesnois, le Cambrésis, la région de Valenciennes. Dans le Pas-de-Calais, c’est en décembre 1925 qu’est formée une Fédération qui envisage une action possible dans certains cas en entente avec celle du Nord. Une propagande vigoureuse est développée en 1926-1932, et des résultats d’ensemble sont obtenus : 1 050 adhérents en 1932 (pour les abonnés au Petit Démocrate 185 en 1929,449 en 1932).
58Une action avait commencé dès 1925 dans l’Oise mais la Fédération n’y est constituée qu’en février 1931. Elle affirme vouloir s’appuyer surtout sur des groupes de travailleurs syndiqués et parvient à une implantation moyenne (142 abonnés en 1932). Elle doit d’ailleurs être reconstituée en 1936. Dans l’Aisne une "Commission de propagande" avait été créée en 1925 pour la région de Saint Quentin, et une activité se manifeste dans la région de Tergnier. Mais il y eut ensuite une retombée et ce n’est qu’en 1933 qu’a lieu une "Journée d’organisation" où l’on envisage de créer des sections à la base de la Fédération alors mise en place. Mais très vite est évoqué un effort d’organisation qui est très lourd104, et qui aboutit d’ailleurs à des résultats modestes (86 abonnés en 1932, 84 en 1938). Dans la Somme, il existait des noyaux précoces comme à Amiens, mais l’apparition de la Fédération est lente. Des réunions de travail ont lieu dès 1926 avec Robert Caron. En 1928 on parle d’une nouvelle extension et de la constitution prochaine d’une Fédération. Mais celle-ci doit être "reconstituée" en 1936 et l’implantation n’avait été que moyenne (131 abonnés en 1929, 186 en 1932). En région champenoise, l’implantation du Parti fut toujours assez faible. S’il a dans les Ardennes en 1924 un de ses députés, l’activité y est presque nulle. Ce n’est qu’en 1931 qu’un "Cercle d’Études" est constitué à Charleville-Mézières. Dans la Marne aussi le développement est lent malgré le soutien du journal sympathisant Le Nord Est, un temps dirigé par Pezet. Une section est créée à Reims en 1926, mais le développement ne s’est guère étendu. Pour la Haute-Marne, il n’y a pas eu d’implantation structurée de même que dans l’Aube, des résultats très médiocres étant obtenus dans cette région (abonnés au Petit Démocrate en 1932 : 33 dans l’Aube, 41 dans les Ardennes, 108 dans la Marne, 101 dans la Haute-Marne).
59Dans l’Est, la Fédération motrice est celle de Meurthe-et-Moselle qui se constitue en février 1925 sous la présidence de Henri Teitgen. Elle connaît un développement rapide avec en 1926 six Sections à Nancy et dix sept pour le reste du département. Elle s’intitule au début "Fédération de l’Est de la France", et englobe la Meuse et les Vosges. Elle réalise un important effort de propagande, de réunions et débouche sur une action politique où elle se heurtera à de nombreux problèmes. C’est une des importantes Fédérations du Parti (1 180 adhérents en 1932, 241 abonnés en 1929, 263 en 1932). Sa propagande s’étend aux Vosges (création de la Section de Remiremont en 1925). Dans la Meuse, un Congrès départemental se tient en 1935 pour aboutir à la formation d’une Fédération, mais l’implantation dans les deux départements est toujours restée faible (44 abonnés dans les Vosges, 27 en Meuse). La Fédération de Meurthe-et-Moselle avait tenté de déborder par sa propagande sur la Moselle où le P.D.P. n’a jamais été organisé en tant que tel, si des élus mosellans figurent au groupe démocrate. En 1934 à Thionville, Teitgen regrette que le Parti y soit peu connu et qu’aucune organisation n’y existe (86 abonnés en 1932).
60La Franche-Comté est une région d’implantation satisfaisante du P.D.P., et de résultats obtenus non négligeables. Dans le Jura s’était créé un "Cercle d’Études des Démocrates" de Lons-le-Saulnier autour de Henri Bruchon en 1926, mais la Fédération n’est constituée qu’en 1933. Dans le Doubs un Comité Départemental est mis en place en 1930 et la Fédération constituée en 1931. La Haute Saône est organisée avec une Section en 1926. Mais si un Comité départemental s’installe en 1928, la Fédération n’est créée qu’en 1938. Le Territoire de Belfort connaît une certaine activité de propagande. En 1933 une des premières "Fédérations Régionales" du Parti est mise en place en Franche-Comté, dans une région qui devient active à la fin de la période (102 abonnés en 1932 dans le Doubs, 109 dans le Jura, 49 en Haute-Saône).
61En Bourgogne existait en particulier le "groupe dijonnais” derrière beaucoup d’anciens dissidents du Sillon. La Fédération de la Côte d’Or est formée en janvier 1925, mais elle reste d’importance moyenne (144 abonnés en 1932). La Saône-et-Loire va donner plus de satisfactions par une implantation exemplaire à la fois en milieu rural et en milieu ouvrier. Une Section est créée au Creusot en 1925 et la Fédération en 1927. Une forte activité de propagande est développée qui aboutit à certains résultats (600 adhérents en 1934, 135 abonnés en 1929, 355 en 1932). Dans la Nièvre, il existait depuis 1922 un "Groupe Républicain et Social d’Imphy" qui s’affilie en mars 1925 au P.D.P. Une section, puis une Fédération sont organisées. Quant à l’Yonne, une "Journée Départementale" ne s’y déroule qu’en 1937. La création de la Fédération a lieu en 1938, avec dans les deux départements une faible implantation (52 abonnés dans la Nièvre, 14 dans l’Yonne). La région de la Loire avait connu également un des premiers noyaux de Républicains-Démocrates dans le Loiret. Le petit groupe adhère au P.D.P. et y constitue en août 1925 la Fédération du Parti. L’arrondissement d’Orléans est le premier organisé, puis celui de Montargis. L’activité politique se traduit bientôt par l’élection de Maurice Berger en 1928, la Fédération maintenant une implantation moyenne (280 abonnés en 1929, 264 en 1932). L’Eure-et-Loir est en revanche un département peu travaillé, sans Fédération constituée (84 abonnés en 1932). Par contre, une relative activité s’est manifestée dans l’Indre, mais la Fédération doit être "reconstituée" en 1936, tandis que le Cher n’a eu que des "correspondants de première zone". L’implantation est tardive dans l’Indre-et-Loire (Fédération en 1935) et le Loir-et-Cher (en 1936). Dans toute la région les résultats sont assez faibles (abonnés au Petit Démocrate en 1932 : 47 dans le Cher, 48 dans l’Indre, 50 dans le Loir-et-Cher, 61 dans l’Indre-et-Loire).
62Les régions du Massif Central ont témoigné d’une activité et d’une implantation ponctuelles autour essentiellement des noyaux du Puy-de-Dôme et de la Haute-Vienne rayonnant comme centres d’impulsion. Dans le Puy-de-Dôme la Fédération des Républicains-Démocrates rallie le P.D.P. comme une de ses premières Fédérations organisées en décembre 1924. Dès 1926 on parle d’adhérents dans seize cantons sur cinquante, au nombre total de deux cents (130 abonnés au Petit Démocrate en 1929,124 en 1932). Cette Fédération se caractérise par une assez active propagande. La Haute-Vienne est le second centre de rayonnement sur la base du petit groupe existant déjà là aussi. La Fédération est fondée presqu’aussitôt après le Congrès constitutif du Parti et c’est dès juillet 1925 que Le Petit Démocrate de Limoges fusionne avec celui de Paris (310 abonnés en 1929, 331 en 1932). Maurice Guérin, issu de la Fédération, deviendra délégué à la propagande de la région du Centre et de l’Ouest. Elle tente en effet d’organiser les départements voisins avec en février 1933 un "Congrès national" à Limoges et des représentants de la Corrèze, de la Dordogne, de la Creuse et de la Vienne, premier d’une suite de "Congrès régionaux du Centre Ouest", une Fédération plus forte essayant d’animer des groupements plus faibles. Une Section Départementale est mise en place dans la Creuse en 1926. En Corrèze une Section est créée en 1933 et la Fédération tient son premier Congrès en 1934. La propagande atteint également un département non limousin, la Vienne. La Section de Poitiers est organisée en 1931-1932 et la Fédération en 1934, si les Deux-Sèvres sont restées sans organisation (abonnés au Petit Démocrate en 1932 : 59 en Corrèze, 60 dans la Creuse, 100 dans la Vienne). Dans le reste du Massif Central une section est organisée dans l’Allier en 1928 et la Fédération en 1932 (140 abonnés à cette date). Une Section est aussi constituée dans le Cantal en 1929 (53 abonnés). La Haute-Loire fournit un autre exemple assez complexe d’évolution : c’est après l’élection de Ernest Antier en 1928 que se constitue un "Comité de propagande" pour l’arrondissement est d’Yssingeaux. Puis une Section est fondée au Puy et la Fédération est constituée tout en restant faible (67 abonnés en 1932). La Lozère a connu une section dès 1926, si l’Aveyron n’a commencé à être travaillé que dans les années 1930.
63La région lyonnaise et alpine a été une autre région importante de l’implantation, mais elle a connu des résultats inégaux. Dans le Rhône la Fédération est constituée en mars 1925, Champetier de Ribes et Paul Simon se déplaçant en cette circonstance et marquant l’importance accordée au milieu lyonnais. Elle est placée sous la présidence de Jacques Tourret de la Chronique Sociale. Le problème allait se poser des relations avec un milieu et un groupe originaux et indépendants, même si du côté du P.D.P. on les place "parmi les précurseurs des Démocrates Populaires lyonnais"105. Il y avait ici nécessité d’évoluer avec une certaine prudence malgré l’appui de Tourret qui essaie de montrer que l’on poursuit surtout "une œuvre de formation civique, d’éducation populaire et d’évolution sociale". On déclare bientôt avoir trois cents membres et une implantation relativement satisfaisante (255 abonnés en 1929, 517 en 1932). La Fédération du Rhône prend la tête d’un "Comité Régional des Démocrates Populaires du Sud Est" qui veut rayonner sur une douzaine de départements : Loire, Haute-Loire, Ain, Isère, Ardèche, Saône-et-Loire, Drôme, Savoie et même Allier, Puy-de-Dôme, Côte d’Or, région couverte par le Bulletin des Démocrates Populaires de la Région du Sud Est. Des Congrès régionaux annuels ont lieu dès 1925. En 1927, huit départements envoient des délégués, la Fédération du Rhône ayant ainsi un rôle de coordination régionale. Dans la Loire, des sections sont fondées en 1928 à Roanne, Saint-Etienne. Mais il faut attendre 1938 pour que la Fédération soit créée au moment de la candidature de Raymond-Laurent A côté du rôle sympathisant du Mémorial de la Loire, le Petit Démocrate témoigne d’une implantation moyenne (195 abonnés en 1932). Dans l’Ain, une Section est constituée en 1927 et une Fédération en 1932 (201 abonnés).
64L’Isère assiste en revanche à la mise en place d’une des plus importantes Fédérations du Parti surtout dans les années 1930. Elle est créée dès décembre 1925. Après la région de Grenoble, celle de Saint Marcellin est en particulier travaillée. La Fédération tient des Congrès réguliers et devient peu à peu une des plus organisées et des plus dynamiques du Parti. C’est en 1934-1936 qu’elle arrive en tête pour le nombre des adhérents : 1 500 en 1934, 1 758 en 1935, 1 900 en 1936 (260 abonnés en 1929, 436 en 1932). En 1935 elle déclare compter 120 élus municipaux et cantonaux et Philippe Olmi au Congrès du Parti peut présenter "l’exemple d’une Fédération : l’Isère” sur le plan de l’organisation106. Elle devient effectivement alors une sorte de Fédération modèle. Les Savoies ont aussi connu une implantation démocrate populaire. La Section de Savoie est créée en 1929 et l’action de propagande débouche sur la naissance d’une Fédération en 1932. En Haute-Savoie un Comité Départemental est installé en 1927 et la Fédération est constituée en 1929. Elle va connaître un développement assez important (élection de Martel en 1932). L’implantation dans les deux Savoies a été assez bonne (140 abonnés en Savoie, 309 en Haute-Savoie en 1932). Pour le reste de la région alpine, une activité apparaît dans les Hautes-Alpes en 1927 avec une Section, puis une Fédération en 1936, si les Basses-Alpes ont été en revanche peu travaillées. Dans la région rhodanienne, l’Ardèche avait été une des premières Fédérations à s’organiser dès 1925. Elle connaît un temps une certaine activité avant une rapide éclipse. Dans la Drôme une Section est créée en 1927 en collaboration avec "l’Union Républicaine Drômoise” de Joseph Pouzin. En 1929 un Comité Départemental y est formé qui doit déboucher sur la création d’une Fédération. Mais une "Fédération Drôme-Ardèche" doit être créée en 1938 (120 abonnés en 1932 dans l’Ardèche, 67 dans la Drôme).
65En Provence des noyaux existaient ici avant 1924, ainsi dans le Vaucluse et les Bouches-du- Rhône et Henri Barral avait essayé de regrouper les "Démocrates du Sud Est". Si le Groupe vauclusien est resté moins dynamique qu’on aurait pu le supposer, par contre, les Bouches-du-Rhône connaissent un relatif développement. En janvier 1925 une "Fédération Provençale" est créée qui étend son action aux Bouches-du-Rhône, au Var, au Vaucluse, aux Basses-Alpes et aux Alpes-Maritimes. Le secrétariat régional reste fixé à Avignon pour "la liaison et les transmissions entre les Fédérations Départementales et les autres groupes de la Fédération provençale"107. Dans les Bouches-du-Rhône, on a de petits groupes tenant à une relative indépendance : sections de Marseille, Aix, Salon. Celle de Marseille parle à elle seule de 250 adhérents108. Le Groupe d’Aix (Coirard) se montre actif aux côtés du groupe marseillais et la Fédération essaie de maintenir son rôle malgré ses échecs politiques (369 abonnés au Petit Démocrate en 1932). Une Section varoise est créée à Toulon en 1925 et tente de se développer mais sans résultats concluants (65 abonnés). Dans les Alpes-Maritimes l’implantation est plus réussie (Section de Nice en 1925) et la Fédération est mise sur pied en 1932 (154 abonnés). Mais la Corse n’a pas connu le P.D.P. et il y a un autre désert dans le Bas-Languedoc (Gard, Hérault, Aude), si les Pyrénées Orientales ont vu la création d’une section en 1931.
66Dans le Midi toulousain et aquitain, l’activité s’est limitée à quelques noyaux. Dans la Haute-Garonne est fondée en 1925 "l’Action Sociale Républicaine", groupement républicain de formation, d’action et de propagande affilié au P.D.P. Des "Journées Régionales" sont organisées à Toulouse à partir de 1926, concernant le Tarn, les Basses-Pyrénées, le Gers, le Tarn et Garonne, les Basses-Pyrénées. La Fédération de la Haute-Garonne créée en 1934 joue elle aussi un rôle moteur d’organisation régionale. Toulouse reste le centre d’une région où apparaissent cependant d’autres Fédérations autonomes (255 abonnés en 1932). Si dans l’Ariège, il n’y a guère eu d’activité organisée, en revanche une action s’est révélée dans les Hautes Pyrénées, en 1930 avec la Section de Tarbes. Mais les Démocrates de ce département se fédèreront en 1938 avec ceux des Basses-Pyrénées, reconnaissant la faiblesse de l’implantation dans les deux départements. Pour les Basses-Pyrénées, malgré Champetier de Ribes, on admet en 1935 que le P.D.P. n’y existe pas en tant que formation réellement constituée, aucun effort méthodique de propagande n’ayant été entrepris109 (200 abonnés au Petit Démocrate en 1932, 42 dans les Hautes-Pyrénées).
67La Fédération de la Gironde tentera dans les années 1930 de ranimer les groupes aquitains, malgré des débuts assez difficiles. Une Section bordelaise est créée en 1924 mais en 1926 on reconnaît que, à cause de raisons locales elle n’a pas cru bon d’intensifier sa propagande110. C’est ici le problème essentiellement posé des relations avec le parti local de l’U.P.R. de l’Abbé Bergey. Ainsi "pour ne pas semer la division", elle se consacre surtout à la propagande du Petit Démocrate qui a 183 abonnés en 1932, soit comme on le reconnaît trois fois plus que d’adhérents. Mais la Fédération tente néanmoins la mise en place d’une organisation régionale du Sud Ouest à partir de 1935- 1936 dans le Gers, les Landes, les Hautes-Pyrénées qui donne lieu à des "Congrès Démocrates Populaires du Sud Ouest". Dans les Landes l’action avait commencé tôt pour le Parti des Républicains-Démocrates et Sociaux des Landes constitué en 1925 autour de Defos du Rau et affilié au P.D.P. En 1930 est fondée la Fédération landaise qui tente de se développer avec le soutien girondin (84 abonnés en 1932). Une activité est apparue dans le Gers autour de la Section d’Auch en 1928-1929 et la Fédération en 1931 qui se montre assez active à la fin des années 1930 et tente de jouer elle aussi un rôle régional par un appui aux éléments Démocrates du Lot-et-Garonne où une Fédération est formée en 1936. En revanche, le Tarn-et-Garonne, le Lot n’ont pas été organisés (109 abonnés dans le Gers en 1932, 72 dans le Lot-et-Garonne, 38 dans le Tam-et-Garonne). La Dordogne a connu une activité plus intense et tout d’abord la Section de Bergerac. Une Section Départementale y est créée en 1927 et la Fédération est mise sur pied en 1931. Elle tente de maintenir une activité régulière grâce au soutien d’Alfred Bour, (300 abonnés en 1932). Dans les Charentes par contre, l’implantation fut toujours plus faible. Une Section est fondée en Charente en 1928 et une certaine activité apparaît en Charente-Maritime à partir de 1935. Dans un dernier département du Sud Ouest s’est implantée une "Fédération exemplaire" : le Tarn où elle est créée en 1927 pour soutenir l’action électorale de François Reille-Soult. Un réseau de sections assez dense se constitue qui sont groupées en "sections cantonales". L’effort d’organisation y est sans doute un des plus poussés (comparable à celui de l’Isère), avec des résultats plutôt satisfaisants (510 abonnés en 1932).
68Une certaine activité démocrate populaire s’est enfin manifestée en Algérie, à la fois à Alger (Louis Pasquier Bronde) et à Oran (Batalda-Gambetta). Des sections sont créées dans les deux villes en 1933 (44 abonnés au Petit Démocrate en 1932). L’implantation du P.D.P. et de ses Fédérations de 1924 à 1939 a donc abouti à des résultats, mais dans l’ensemble assez modestes. Dans beaucoup de départements on n’a eu affaire qu’à des Fédérations ou Sections très faibles, n’atteignant qu’à peine les cent adhérents requis. Mais en fait seulement une quinzaine au plus ont disposé de moyens qui pouvaient autoriser une action autonome. Dans les autres cas on avait affaire à des Fédérations trop faibles ou à des élus dont on peut se demander s’ils l’étaient vraiment comme Démocrates Populaires. Cependant il y avait aussi à côté d’une implantation diffuse sur l’ensemble du territoire (davantage par les abonnements au Petit Démocrate que par les adhésions au Parti) révélation de zones d’assez forte implantation relative. (On avait ici souvent davantage d’adhérents au Parti que d’abonnés au Petit Démocrate). Ces zones réparties sur le territoire pourront servir de base de départ à une action politique future comme celle du M.R.P. Le P.D.P. a donc pu jouer un rôle de "relais" dans l’histoire générale de la Démocratie Chrétienne et de son implantation.
IV – LA PRESSE
69Parmi les moyens dont peut disposer une force politique, la presse est l’un des plus importants pour sa propagande, son implantation et l’expression de ses idées. Le P.D.P. dès sa naissance par ses leaders a manifesté l’intérêt qu’il accordait à ce domaine d’action. Il y a développé son activité de diverses façons en essayant d’accroître le rayonnement du Petit Démocrate avec le désir toujours déçu de créer un quotidien, en promouvant la presse locale et des Fédérations, et aussi par une action plus vaste visant à conquérir des positions dans l’ensemble de la presse "catholique" et de la presse "modérée". A chaque Conseil National et à chaque Congrès Raymond-Laurent établit un bilan de "notre action par la presse". A côté du Petit Démocrate qui n’est pas, au début, l’organe du Parti, il place régulièrement tout d’abord "les journaux publiés par nos Fédérations, mensuels ou bimensuels”, puis les "quotidiens et hebdomadaires avec lesquels nous entretenons des relations amicales". Parmi ceux-ci il établit une distinction entre "les journaux de première zone" qui sont "entièrement acquis à notre cause" comme L’Ouest Eclair et "les autres" qui rendent simplement compte en termes favorables de l’activité des Démocrates.
"Le Petit Démocrate"
70Le principal problème était dans l’immédiat que le P.D.P. n’avait pas d’organe officiel central, Le Petit Démocrate restant jusqu’en 1926 le journal de la Fédération de la Seine. Mais dès juin 1926 Raymond-Laurent doit admettre qu’il est sinon l’organe officiel du Parti, du moins son "émanation directe". Des équivoques apparaissent pour un journal qui devient l’organe de propagande du Parti tout entier et qui se transforme en décembre 1925 en "journal Démocrate Populaire". L’élargissement s’était déjà manifesté par la fusion de L’Âme Française et la succession partielle de la Nouvelle Journée. Puis il y eut une troisième fusion en août 1925, celle du Petit Démocrate de Limoges. Mais le problème continuait à se poser des relations entre Le Petit Démocrate et le Parti, Cornilleau ayant admis que le journal était devenu celui du Parti. La question est posée nettement par Armand Lille au Conseil National de juin 1926 où il parle de la transformation du journal en Société anonyme. Le Petit Démocrate étant devenu un instrument de propagande, cette situation nécessite un contact étroit entre la Société éditrice et le Parti qui est rendu difficile par le fait que le journal est la propriété d’une Fédération111. C’est en même temps que l’on transfère les locaux rue Palatine, avant le Parti lui-même. Il s’agirait ainsi de créer une société au capital de 50 000 francs. La moitié serait fournie par la Fédération de la Seine. En fin de compte la Fédération cède à la "Société du Petit Démocrate" le titre et la propriété du journal. La société sera administrée par un Conseil de trois ou quatre membres, une "Association des porteurs de parts de fondateurs" étant créée. Au Congrès de novembre Armand Lille établit un bilan général des transformations avec un système de "subventions mensuelles" destiné à couvrir les dépenses administratives. Mais en juin 1927 il insiste sur le fait que le journal ne deviendra jamais un "journal de grande information" et qu’il devra rester un "journal d’élite" au sens large du terme.
71Sur ces bases nouvelles Le Petit Démocrate devenu organe central de propagande et d’information va pouvoir se développer derrière son directeur Cornilleau. Une action de propagande en faveur du journal est organisée et Armand Lille annonce en juin 1927 un gain de 5 000 lecteurs réguliers112. Dès lors les propagandes pour le journal et pour le Parti sont largement confondues. Raymond-Laurent montre comment le développement du Parti est étroitement lié à celui du journal et qu’à défaut d’un quotidien le Parti doit avoir au moins un grand hebdomadaire113. En 1927 est lancée la rubrique "le coin du propagandiste". Mais cette progression ne suffit pas à résoudre les problèmes financiers face à un déficit admis qui ne peut être comblé que grâce aux "ristournes spéciales que nous consentent sur le prix d’impression nos amis de L’Ouest Éclair’"114. Le capital de la société est augmentée en 1928115 et des résultats incontestables sont obtenus dans la diffusion, une "magnifique progression" ayant été constatée en 1937-1928. Celle-ci se ralentit ensuite en 1928-1929 (où l’on passe seulement de 11 000 à 11 725 abonnés). En 1929 on parle d’une trésorerie du journal "trop à l’étroit pour lui permettre de faire chaque mois au Parti des avances de plusieurs milliers de francs"116. En effet un autre problème constant a été celui d’une certaine imbrication des comptes du Parti et du journal.
72A partir de 1930 cependant la progression des abonnements reprend et Raymond-Laurent estime qu’elle est revenue à un rythme satisfaisant. On atteint alors 14 014 abonnés et une diffusion de 18 127. En 1931 la campagne est lancée "pour les 20 000 abonnements". Le chiffre de ceux-ci atteint 15 640 en juin 1931, 16 006 en septembre. Un "championnat interdépartemental" est lancé. Au Conseil National de juin, est montrée une progression de 5 000 abonnements en deux ans. En 1931 l’impression est transférée de Rennes à Arras, à la "Nouvelle Société Anonyme du Pas-de-Calais" et cela affirme-t-on "pour des motifs uniquement d’ordre matériel". Des transformations techniques sont apportées au journal, mais il est admis que sur ce plan il présente toujours des imperfections117. Le thème du "projet de journal quotidien" avait été relancé au Congrès de 1930 et Bastianelli présente un rapport à ce sujet en mars 1931, en utilisant les travaux d’une commission d’études qui avait envisagé deux formules : le grand quotidien d’information "largement inspiré par le Parti" ou le quotidien politique qui ne serait pas pour cela une émanation directe du Parti. Mais Bastianelli met bien en valeur "le point de vue financier" et les difficultés dans ce domaine. S’il aurait été souhaitable de lancer le quotidien à la veille des élections, il n’est plus possible de trouver d’ici là le capital nécessaire. La création éventuelle d’un quotidien est repoussée à 1933118. La campagne pour Le Petit Démocrate continue en 1932 et en 1933. Mais on admet en janvier 1934 que la diffusion du journal subit quelque gêne, le mouvement des abonnements faisant apparaître de faibles progressions. Ainsi "l’échéance du 20 000e abonnement menace d’être retardée par la crise économique". Le Congrès de 1933 reconnaît que l’on en est au même nombre d’abonnés sensiblement que deux ans plus tôt, malgré l’action de 1 500 propagandistes119. Le chiffre des 20 000 abonnés ne sera jamais atteint, ayant approché 18 000.
73Après ce tassement on commence à entrer dans une phase de déclin à la fois pour les adhérents au Parti et les abonnés au Petit Démocrate. Les difficultés sont reconnues à partir de 1936 et ce qui est alors qualifié de "régression". Un mouvement de "désabonnements" commence sous la forme d’une "hémorragie lente, mais continue". En juin 1936, Cornilleau établit le diagnostic et il admet que le journal à moins de 13 000 abonnés. Il demande s’il ne vaudrait pas mieux rendre au Petit Démocrate son indépendance par rapport au Parti, tant morale que financière et en faire à nouveau ce qu’il était au début, c’est-à-dire "un moniteur politique, social et intellectuel" soutenant le Parti120. Il avait toujours été le défenseur de cette indépendance. Les relations entre Cornilleau, Le Petit Démocrate et le Parti n’avaient pas été très faciles. Mais ce sont ces difficultés qui sont bientôt l’occasion d’une crise qui s’intègre dans la crise générale du P.D.P. Le docteur Besson admet en 1937 que Le Petit Démocrate est tombé à 12 000 abonnés121. La Commission Exécutive de la Fédération de Paris déclare qu’il ne correspond plus aux besoins pour lesquels il avait été créé. Il faudrait en changer la formule, en faire un journal plus nerveux et polémique122. Cornilleau reconnaît lui-même "le caractère surtout intellectuel et politique et pas assez populaire du Petit Démocrate’’123. La chute des abonnements se poursuit jusqu’en 1939. Du 15 mars 1938 au 15 mars 1939, on tombe de 9 563 abonnement à 9 118, chute de près de moitié par rapport au maximum atteint : c’est un des symboles les plus nets de l’affaiblissement du P.D.P.
74Si Le Petit Démocrate a assez largement échoué sur le plan de l’entreprise de presse, et a reflété la faiblesse du Parti, l’histoire du journal est aussi celle de son évolution intérieure. En 1925 le journal paraît sur quatre pages, avec en première page, l’éditorial de Cornilleau ou d’autres leaders. A partir de 1926 sur six pages, la part des nouvelles et de l’information politiques s’accroît. Cette armature générale sera assez longtemps conservée, en dépit de l’apparition de nouvelles rubriques comme en 1927 le "Chemin Faisant" de l’équipe du Bureau d’Études, ou la page spéciale "la Revue des Jeunes". Dans la rubrique "la vie intellectuelle, artistique et littéraire", on voit naître des sous-rubriques consacrées au cinéma, au sport. "Le coin du propagandiste" s’introduit également en 1927-1928 et le journal commence à paraître de plus en plus souvent sur huit pages. Une nouvelle diversification des rubriques se révèle : page "mon village" de la Commission Rurale. De plus, une large place est faite aux comptes rendus des Congrès et des Conseils Nationaux. Des rubriques bien organisées, spécialisées et régulières étaient apparues, correspondant aux différents champs d’activité et d’intérêt du Parti. Quant aux rédacteurs du Petit Démocrate, en dehors de Cornilleau, c’était à peu près tout le P.D.P. lui-même, malgré des nuances : y ont collaboré périodiquement presque tous les grands leaders du Parti. Dans les années 1930 surgiront Georges Bidault, Georges Hourdin, Letourneau...
75Robert Cornilleau a tenu la place la plus importante dans ce qui fut toujours son journal et où il écrivait de nombreux articles sous des pseudonymes comme Jean Courtarvel ainsi que les feuilletons du Petit Démocrate. Mais on a pu dire toutefois, qu’il assurait davantage "l’animation" que la "direction" du journal, qu’"il appartenait à cette race de directeurs qui laissent à d’autres le soin de fabriquer le journal"124. G. Hourdin a pu mettre en cause la façon dont il écrivait ses éditoriaux "sans rien demander à personne et selon son humeur, ce qui donnait parfois des résultats étonnants"125. En tout cas il laissait une liberté totale à ses collaborateurs et cette direction très souple n’est pas allée sans doute sans inconvénients pratiques. Un certain désordre s’est exprimé dans ce journal qui est toujours resté marqué d’imperfections matérielles. La personnalité de Cornilleau a donc eu des conséquences sur les caractères d’un journal qui a essayé d’être à la fois un organe doctrinal et de propagande, mais cela non sans difficultés parfois auprès de ses lecteurs mettant en cause son aspect trop intellectuel. Au Congrès de 1928 Goussu parle d’une rédaction trop abstraite qui "a beaucoup nui à sa diffusion dans les milieux populaires et ruraux"126. En fait il y avait une équivoque de départ pour un journal ambitieux et un caractère hybride entre l’organe doctrinal et l’organe de propagande, ce qui peut expliquer partiellement son échec final.
Un double réseau de presse régionale et le rôle de l’A.J.D.
76En dehors du Petit Démocrate, le P.D.P. s’est appuyé sur un réseau de presse dans les départements et les régions réalisant un effort de pénétration qui ne fut pas négligeable et qui tendait à le mettre sur un pied d’égalité avec les autres forces politiques. En fait il y avait ici un double réseau comme Raymond-Laurent l’avait admis. Pour le premier, le réseau de journaux des Fédérations du Parti, il estime qu’ils peuvent être conçus de trois manières : journaux d’idées se rapprochant du Petit Démocrate, simples bulletins d’action et de propagande, journaux d’information devenant de véritables affaires commerciales qui publient les communiqués du Parti ou même des articles de certains de ses membres. Ainsi a pu commencer à partir d’un réseau sympathisant existant dès 1924 une entreprise de "conquête" démocrate populaire dans la presse "catholique" ou "modérée". Au Congrès de 1925 Raymond-Laurent dresse une première liste des journaux de Fédérations et des journaux "sympathiques" au Parti. Pour la presse et les journaux de Fédérations, on a abouti peu à peu à un réseau non négligeable mais fragmentaire et divers dans sa signification et son impact. Il distingue en 1929 les "organes d’information générale" qui atteignent le grand public comme Le Petit Breton, Le Petit Régional, Le Journal du Tarn (ces deux derniers n’étant d’ailleurs pas spécifiquement des journaux de Fédérations), et ceux destinés plus précisément aux militants et sympathisants comme Le Démocrate de l’Est, Le Démocrate de Normandie, Le Cri du Puy-de-Dôme. En fait la diversité est grande de ces feuilles et périodiques (hebdomadaires, mensuels) du point de vue de la présentation, du style et même du contenu idéologique. Ce sont souvent des feuilles éphémères, à la vie et à la parution irrégulières. Cependant ces journaux publient souvent des articles des leaders du Parti ou reproduisent des articles du Petit Démocrate que l’on retrouve diffusés dans ces organes eux-mêmes.
77Une étude des inscrits à "l’Association des Journalistes Démocrates" fournit déjà une première approche de cette influence. A côté de journalistes au Petit Démocrate et de rédacteurs à Politique on y trouve en 1931 des représentants de L’Ouest Éclair et surtout d’un certain nombre de journaux de province, des représentants divers de la "presse catholique" comme A. Michelin de La Croix, Robert Pigelet de L’Ame Populaire, Jean des Cognets du Petit Écho de la Mode, Charles Gravey du Bulletin International, l’Abbé Bordron, Gaston Tessier. C’est d’une implantation diffuse et complexe dans la presse dont témoignent les adhérents à l’A.J.D. La présence d’un rédacteur d’un journal ne signifie pas bien sûr que celui-ci soit "Démocrate Populaire", mais que le Parti y jouit de certaines sympathies. Mais, dans cette volonté de développement par la presse et dans la presse, le P.D.P. s’est heurté tout d’abord à un échec pour ce qui était un de ses projets initiaux, la création d’un quotidien. Dès le début il y avait eu un certain scepticisme dans le Parti et les milieux le soutenant sur cette question. Ce projet, s’il a été périodiquement repris et évoqué au moment des Congrès est toujours resté à l’état latent, en dehors du problème spécifique de L’Aube, même s’il y a eu des tentatives discrètes qui furent faites. En effet après la mort de Loucheur en 1931, un effort a été tenté du côté du P.D.P. et aussi d’autres éléments de la mouvance démocrate chrétienne en direction du Petit Journal, Ernest Pezet et Francisque Gay ayant joué ici un certain rôle127. En mars 1932 Pagès note qu’à son sens Le Petit Journal favorable à la "concentration" sera désormais "bien orienté à l’égard du Parti" grâce à Simone Loucheur qu’il décrit comme "une catholique sociale intelligente et agissante"128. Mais du fait de la nouvelle société formée en septembre 1932 et de l’arrivée de Raymond Patenôtre, c’est sans doute la fin des espoirs de "contrôle" de ce quotidien par les milieux catholiques sociaux. Cependant en 1937 lors de la prise de contrôle du journal par le Parti Social Français Patenôtre déclarera qu’il avait d’abord cru accepter l’offre d’une banque (de Neuflize) se disant mandatée par les Démocrates Populaires129. En tout cas c’est à un échec qu’aboutira le P.D.P. dans ce domaine, même s’il y a eu le relatif succès de L’Aube.
"La Presse Régionale" – Une tentative de prise en mains ?
78Ici se pose le problème d’une éventuelle prise de contrôle partiel et de conflit avec une autre tendance de la Droite catholique, celle de la Fédération Républicaine. "La Presse Régionale" était un groupe de presse fondé en 1904, en relation avec "La Bonne Presse" par Paul Féron-Vrau, grâce à l’appui d’industriels catholiques du Nord, assez proche alors de l’Action Libérale, et en concurrence sur le plan idéologique avec celui du Nouvelliste plus à droite. Des Journaux importants y étaient rattachés comme Le Télégramme de Toulouse, L’Éclair de l’Est de Nancy, La République du Sud Est de Grenoble, Le Courrier du Pas-de-Calais, Le Journal d’Amiens, L’Éclair Comtois, L’Écho de la Loire, La Liberté du Sud Ouest 130. Jules Dassonville avait été l’adjoint de Feron-Vrau pour la mise en place de ce groupe dont les quotidiens selon Pagès "ne tardèrent pas à faire de nombreuses concessions à droite"131. Un journal comme Le Nouvelliste de Bretagne avait connu une orientation qui n’était pas celle de ses débuts. De plus une lutte d’influence avait commencé assez tôt à l’intérieur du groupe avec bientôt un rôle des Démocrates Populaires. Dans une "Note sur la Presse Régionale vis-à-vis du Parti Démocrate Populaire", Auguste Cavalier, un des principaux adversaires du P.D.P. voudra démontrer l’existence d’un plan visant à la prise de contrôle de ce réseau par le P.D.P. C’est tout d’abord l’affaire du Nouvelliste de Bretagne en 1928 qui fut "brutalement soustrait à l’influence de Baudry d’Asson et de Delahaye"132. Cavalier met aussi en avant "l’affaire d’Arras", du Courrier du Pas-de-Calais”, de son imprimerie récemment transformée et contrôlée par une participation majoritaire de M. Dassonville et qui imprime Le Petit Démocrate, Le Courrier du Pas-de-Calais étant devenu dans la région l’organe officiel du P.D.P., et "la Presse Régionale" ayant succédé à l’Abbé Trochu dans le rôle d’éditeur de l’organe officiel du Parti. Il y aurait eu l’"affaire de Nantes" et de L’Écho de la Loire, où un "coup d’état" analogue à celui de Rennes aurait été tenté et en partie réussi.
79On parviendrait donc à dépouiller les catholiques de la presse qu’ils ont financée, à un "camouflage audacieux", à une "tentative de noyautage systématique" tandis que "la Presse Régionale" affirme toujours être indépendante du P.D.P. Cavalier montre à Louis Marin, Président de la Fédération Républicaine que "les principaux bailleurs de fonds de la "Presse Régionale" seraient bien surpris si on leur disait à qui servent les ressources qu’ils prodiguent à M. Dassonville133. Le National d’Artois et des Flandres en janvier 1932 commence à attaquer sur l’affaire des "nouvelles imprimeries du Petit Démocrate" et du nouveau Conseil d’Administration de la "Société anonyme du Pas-de-Calais" qui comprend des membres notoires du P.D.P. comme Marc Scaillerez. On accuse Dassonville d’être "l’agent des hautes œuvres de l’Abbé Trochu" et le "financier et le protecteur du P.D.P."134, le tout étant manipulé par l’Abbé et par Aristide Briand. L’action du P.D.P. est aussi mise en cause à propos de L’Éclair de l’Est de Nancy. En juin 1925 le Président de "l’Union Républicaine de l’Est" écrit à Pagès au sujet des "pourparlers engagés entre la Presse Régionale et un certain nombre de nos amis"135, et cela en concertation avec l’Abbé Trochu. L’opération n’aurait pu aboutir qui par l’appui technique et financier de L’Ouest Éclair mais l’initiative n’a guère de suites. Cependant en 1932 à propos de L’Éclair de l’Est De Warren déclare à Marin qu’il est "important que l’argent que François (De Wendel)" donne à L’Éclair de l’Est soit transformé en actions", afin de conserver l’autorité sur ce journal et alors qu’on ne sait pas sous quelles directives pourrait tomber "la Presse Régionale"136. Une action de L’Ouest Éclair liée plus ou moins au P.D.P. est apparue derrière ces affaires dont l’ampleur a cependant été exagérée par la Droite hostile aux démocrates chrétiens (même si on est arrivé de fait à un certain partage d’influence). En revanche on peut estimer qu’un des vastes projets du Parti aurait été de doter chaque grande région d’un quotidien analogue à L’Ouest Éclair et pouvant se créer au départ en utilisant son appui.
Du "Sud" à Lyon
80En 1928 Pagès affirme que l’on aurait grand besoin dans la région toulousaine d’un journal "sainement républicain, d’inspiration chrétienne, mais non confessionnel" pouvant se rattacher à une organisation existante comme celle de L’Ouest Éclair, le problème étant lié à celui du Télégramme de Toulouse137. Le Père Merklen de La Croix s’étant enquis de ces projets, Pagès avait indiqué que l’on pouvait concevoir une intervention parallèle de La Croix et de L’Ouest Éclair138. Le nouveau journal se réclamerait d’une politique intérieure autour des thèmes "Justice, Liberté et Droit Commun", d’une politique extérieure de paix telle que la défend Briand et d’une politique sociale "aussi à gauche que possible". Le Sud sera ainsi lancé non à Toulouse, mais à Montpellier en se servant d’un certain appui de L’Ouest Éclair et de l’Abbé Trochu139. Le journal est fondé "par des hommes soucieux de défendre... les idées d’union républicaine et de concorde sociale dans le respect des forces morales et dans l’apaisement des vieilles querelles périmées", tout en ne confinant pas son activité aux frontières d’un parti140. Parmi les principaux rédacteurs se trouvent L.A. Pagès, Octave Aubert, L. Romier, F. Deldon, W. D’Ormesson, D. Deltheil. Le Sud prétend prendre une place entre L’Éclair royaliste et Le Petit Méridional socialisant. Mais Champetier de Ribes lui-même au nom de la Commission d’Organisation du Parti évoque avec satisfaction les résultats obtenus par le journal et il reconnaît que s’il est accueillant à tous les partis républicains nationaux, il n’en est pas moins par ses origines et la présence de certains amis au Conseil d’Administration "particulièrement favorable aux idées défendues par le P.D.P.". Lors d’une augmentation de capital en janvier 1931, il montre la possibilité d’acheter une partie des actions et pour le Parti d’"établir définitivement son influence sur la direction politique du journal"141.
81Le Télégramme avait survécu un certain temps au lancement du Sud et son maintien avait été conseillé par Pagès "à la condition de lui donner le ton démocrate d’inspiration chrétienne"142. Quand il disparaît en 1932, on estime que ses lecteurs doivent naturellement venir au Sud143. Au sujet de ce dernier, la question peut être posée d’un certain appui de l’Évêque de Montpellier qui demande une collaboration à certains prêtres de son diocèse à un journal dont il pense qu’il réussirait mieux en accentuant sa note catholique144. Mais les difficultés surgissent rapidement à la suite de la publication le 10 avril 1930 de l’article "Fiat lux" sur l’École Unique. L’histoire du journal sera assez courte et aboutira à un échec final et à sa disparition en décembre 1933. Le Sud prétendait rayonner sur dix départements, dans une région où le P.D.P. était souvent presque inconnu et où il espérait se développer par son intermédiaire.
82Dans la région lyonnaise, Le Nouveau Journal et Le Salut Public sont déclarés dès le début "sympathisants" du P.D.P. Le Nouveau Journal est fondé à Lyon en mars 1925 et sa création a pu s’inscrire au milieu d’un plan d’ensemble où le rôle du groupe de La Chronique n’a pas été absent. En décembre 1924 Marius Gonin parle à Urbain Falaize du "projet de création d’un grand journal à Lyon" pour prendre la place de L’Express et du Sud Est avec le concours en fait de "la Presse Régionale". En 1925 Gonin qui dirigeait déjà Le Salut Public et L’Express devient administrateur délégué du "Nouveau Journal" qui résulte de la fusion de L’Express et du Sud Est. Il veut donner cette devise à son journal : "ni à Droite, ni à Gauche, ni au Centre, en Avant". Mais il se heurte à des difficultés dans tous les domaines. Il sera toujours aussi indépendant du P.D.P., dans le cadre général des liens entre la Chronique et le Parti. Malgré une vente dépassant 25 000 exemplaires en 1931 on aboutit en 1932 à une cession du Nouveau Journal au journal Le Nouvelliste. Urbain Falaize regrette alors que les nouveaux patrons ne soient "ni démocrates, ni sociaux".145. On demande s’il ne serait pas possible au Salut Public de lancer un autre journal qui pourrait être l’organe des "catholiques sociaux"146. Gonin et Tourret cherchent "la formule la plus adéquate" qui semble-t-il ne fut pas trouvée.
83Pour les grands organes régionaux, le problème de La Croix du Nord attaquée à plusieurs reprises à cause de ses sympathies supposées pour le P.D.P. pourrait être évoqué, quoique son gérant déclare en 1927 que son journal n’est pas celui du P.D.P. Mais il admet que dans de nombreux domaines "nous sommes avec eux autant qu’ils sont nôtres"147, et ceci pose le problème plus précis des relations avec la presse spécifiquement "catholique" et religieuse.
84Le P.D.P. avait tenté par ailleurs de mettre en place des "Éditions du Parti" pas toujours avec un plein succès : Cahiers de la Démocratie Populaire, édités au départ par "SPES" qui publia aussi les ouvrages de Cornilleau et Raymond Laurent, Éditions du Petit Démocrate qui publièrent diverses brochures. Cet effort ne fut jamais entièrement cohérent et manqua de moyens. Il fut à l’image de cette action multiforme et à double rayonnement comportant à côté des organes et de la presse du Parti lui-même (auxquels il faudrait adjoindre Politique et Les Cahiers de la Nouvelle Journée) une zone incontestable, diffuse et mal définie d’influence, une "mouvance" sur laquelle comptait le Parti pour agrandir sa place dans les milieux catholiques et modérés.
"L’Ouest Éclair" : un problème spécifique
85A côté du soutien matériel apporté par le quotidien de Rennes au P.D.P., le problème doit être posé d’une façon plus large des relations entre celui-ci et L’Ouest Éclair qualifié de "haut parleur" du Parti dans l’Ouest. Cette question a été très rapidement l’occasion d’attaques venant en particulier de la Droite et de l’extrême-Droite, mettant en cause les liens avec l’Abbé Trochu et faisant à la limite du P.D.P. sa "créature". En fait ce n’est pas seulement par celui-ci que s’est posé le problème. Emmanuel Desgrées du Lou en particulier a été à la fois directeur politique de L’Ouest Éclair et vice-Président du P.D.P. Louis Alfred Pagès a été Directeur des services parisiens du journal et membre de la Commission Exécutive du Parti. Après la mort de Desgrées du Lou en 1933, Paul Simon deviendra directeur politique de L’Ouest Éclair. Les relations personnelles ont donc été incontestables pour certains des principaux leaders du Parti. En dehors du soutien matériel apporté au P.D.P., le grand journal de la Démocratie Chrétienne de l’Ouest a mené le plus souvent les mêmes combats que le Parti Démocrate, surtout avant 1933 et a soutenu malgré des nuances à peu près les mêmes positions que celui-ci. Par ailleurs de nombreux membres du P.D.P. et collaborateurs du Petit Démocrate ont signé alors des articles (Cornilleau, Pagès, Simon), beaucoup d’articles paraissant dans les deux journaux.
86En dépit de ces liaisons indiscutables, l’histoire des relations entre L’Ouest Éclair et le P.D.P. va être en fait assez complexe, tout comme d’ailleurs celle du journal du fait notamment du départ de l’Abbé Trochu en 1930, de la mort de Desgrées du Lou qui feront entrer peu à peu dans une nouvelle phase de ces rapports. L’Abbé dans son ouvrage publié sous le pseudonyme de P. Delourme a évoqué les liaisons initiales avec Le Petit Démocrate et le P.D.P., par les "accords de Saint-Servan", de 1923 qui auraient scellé une union étroite148. Il a revendiqué le soutien au Parti lui-même avec "un Abbé Trochu qui voulait augmenter le nombre des élus du P.D.P." et qui résolut de se consacrer à sa propagande, aidé en cela par Charles Fredouet. Des sections furent créées dans le Finistère et le Morbihan dont les secrétaires étaient rétribués par L’Ouest Éclair149. L’Abbé exprime d’ailleurs au début de 1925 à Mgr Vanneufville sa satisfaction devant les développements du P.D.P. dans l’Ouest, parallèles à l’activité du groupe parlementaire et parle de "notre groupe... qui prend corps". Il estime que "nous sommes en train de conquérir le pouvoir"150. Selon lui le P.D.P. était un Parti qui "s’efforçait en dehors de toute question confessionnelle de rassembler des hommes sincèrement républicains avec l’espoir de former un parti socialisant", ce qui n’était sans doute pas l’optique de tout le Parti. Il revendique les succès électoraux de 1928 comme étant aussi bien ceux de L’Ouest Éclair que du P.D.P. Mais il met bientôt en cause les "Parlementaires" du Parti auxquels son activité aurait déplu. C’est dans ces conditions qu’il aurait été invité à cesser sa propagande et qu’ainsi il ne fut plus créé de section dans l’Ouest. En fait il allait surtout essayer de chercher les raisons de son départ forcé du journal en 1930 en incriminant un P.D.P. qui n’avait pas su briser définitivement toute attache avec la Droite.
87Malgré tout dans les premières années surtout L’Ouest Éclair et l’Abbé Trochu soutiennent l’activité du Parti dans l’Ouest, et font écho à ses réunions, à la création des nouvelles sections. On parle d’une "politique jeune, éprise d’idéal" et des "doctrines constructives" de celui-ci151. Desgrées du Lou lors de la création d’une section à Saint Quai Portrieux et l’Abbé Trochu à la même occasion à Saint Brieuc exposent eux-mêmes le programme et la doctrine du P.D.P.152. Desgrées du Lou devient Président de la Fédération d’Ille-et-Vilaine et Charles Fredouet, Secrétaire Général. En fait en dehors de la Fédération du Finistère, la plupart des Fédération bretonnes furent mises en place grâce au soutien direct de L’Ouest Éclair. Le journal affirme d’ailleurs que seul le P.D.P. en Bretagne peut créer une organisation de masse ayant des racines profondes face aux partis de Gauche153. Sur le plan national ses Congrès sont suivis avec attention et sympathie et le lancement de Politique en 1927 est salué comme un événement important154. Desgrées du Lou en tant que vice-Président du Parti précise ses positions à plusieurs reprises dans L’Ouest Éclair contre les attaques qui le harcèlent et développe ses thèmes en les axant surtout sur la lutte nécessaire contre les monarchistes dans l’Ouest.
88Au cours de ces années le journal est engagé dans des luttes politiques contre l’Action Française et rencontre un adversaire dans le Nouvelliste de Eugène Delahaye qui en était devenu le Directeur en 1919. Il avait été fondé en 1901, en liaison avec "La Presse Régionale" mais Pagès montre qu’il a échappé à son contrôle à cause d’actionnaires en majorité nobles monarchistes bretons155. Il avait pris une orientation de droite très marquée, axée sur la "Défense Catholique" en liaison avec un homme comme Baudry d’Asson. L’Abbé Trochu accusera le Nouvelliste d’avoir été un "ersatz" de l’Action Française156 par ses attaques de plus en plus violentes contre L’Ouest Éclair, le P.D.P. et l’Abbé Trochu qualifié de "mauvais prêtre" et d’"être vil". Delahaye mettra en cause par la suite une "collusion honteuse” entre l’Abbé et le Parti157. L’Ouest aurait été choisi comme première étape de cette offensive générale. Par ailleurs le Nouvelliste apparaissait comme le journal officieux de l’Archevêché, ayant un appui du Cardinal Charost face à L’Ouest Éclair. Dans ce conflit latent un certain clivage était cependant apparu sur la tactique à adopter entre l’Abbé et Desgrées du Lou. Celui-ci essaie de modérer un homme comme Francisque Gay au sujet d’un projet de brochure suggéré par Trochu contre le Nouvelliste en 1927, et il pense qu’il ne faut pas donner l’impression d’une campagne orchestrée pouvant indisposer le Vatican158. Ce sont bien les élections de 1928 et leur déroulement qui conduisent à un changement d’orientation imposé au Nouvelliste par le départ de Delahaye, le journal ayant soutenu les candidatures monarchistes et violemment combattu les Démocrates. La Nonciature est-elle elle-même intervenue pour aboutir en juin 1928 à une démission imposée de Delahaye ? L’Abbé Jallier lui succède à la tête du journal qui ne tarde pas à prendre une autre orientation, tandis que Delahaye lance avec l’appui de Baudry d’Asson La Province. L’Abbé Trochu estimera que le Nouvelliste avait pêché par imprudence, car Baudry aurait exigé qu’il s’engage dans une lutte sans merci contre les Démocrates et L’Ouest Éclair. Il avait déposé une plainte devant l’Officialité du diocèse de Rennes contre les accusations du Nouvelliste le visant personnellement. De son côté Delahaye avait déclaré au Cardinal Charost qu’il voulait laisser ce dernier indépendant du P.D.P. considéré comme un danger pour le pays159. Desgrées du Lou exprime sa satisfaction du dénouement qui a évité de faire apparaître le journal comme l’auteur véritable de la retraite de Delahaye. Cette affaire de 1928 avait donc tourné au bénéfice de L’Ouest Éclair et des Démocrates dans l’Ouest. Mais l’Abbé Trochu va vouloir aller plus loin dans une certaine évolution vers la Gauche où il souhaitait entraîner le journal et le Parti. Il ne sera soutenu ni par l’un ni par l’autre, ce qui va entraîner la crise de 1930 et son départ.
89On assiste tout d’abord en 1928-1929 à ce que l’Abbé a appelé lui-même les "préliminaires" de son conflit avec Desgrées du Lou. L’Ouest Éclair continue à soutenir le P.D.P., mais c’est Trochu lui-même qui commence à s’en détacher. Dans son mémoire Pourquoi et dans quelles conditions l’Abbé Trochu a quitté l’Ouest Éclair, Desgrées du Lou affirme qu’une entente à peu près complète a régné avec l’Abbé Trochu jusqu’aux élections de 1928160. Mais ensuite des relations plus étroites ont continué à s’établir entre l’Abbé, Bellanger et Guy La Chambre, Trochu désirant orienter la politique du journal de plus en plus ver la Gauche. Dès lors Desgrées aurait jugé cette orientation dangereuse. En fait c’est après l’entrée de Bellanger dans le Ministère Chautemps en février 1930 que la crise avait commencé à éclater, concurremment à l’affaire du procès contre le Chanoine Boué devant l’Officialité du diocèse de Rennes. Celui-ci, curé doyen de Bain de Bretagne avait recommandé à ses paroissiens de ne pas lire L’Ouest Éclair, source de divisions entre catholiques, en le qualifiant de "mauvais journal". Desgrées du Lou avait adressé une plainte contre le Chanoine. Au procès en février 1929, l’Abbé Magnin pour L’Ouest Éclair défend le principe des libertés reconnues par l’Église à tous les catholiques. Le Chanoine Boué accuse à nouveau le journal de préférer les intérêts de Parti aux exigences supérieures de la religion. La sentence rendue en janvier 1930 déboute L’Ouest Éclair de sa plainte en des termes qui sont une véritable condamnation : le Chanoine s’est contenté de paroles très anodines amplement justifiées par les dangers d’une direction très sujette à caution au point de vue politique et au point de vue syndical. Le soutien aux syndicats de "cultivateurs cultivants" avait joué ici un rôle161, mais au niveau politique et électoral l’activité de L’Ouest Éclair est déclarée se faire dans un sens opposé à l’Action Catholique hiérarchique et aux intérêts religieux. On parle même du "scandale des élections de 1928"162.
90L’Abbé Trochu mettra ici en cause directement le cardinal Charost, l’Épiscopat breton et une revanche contre un journal exécré163. Dans ces conditions, L’Ouest Éclair était en position défensive. Desgrées du Lou rencontre le cardinal Charost et il désavoue la participation de Bellanger au Ministère164 : dès lors le désaccord avec l’Abbé Trochu devient un véritable conflit. La question de l’acceptation de la "concentration” dans un gouvernement dirigé par les radicaux est posée en arrière plan en raison du refus des Démocrates Populaires toujours exprimé, de ce type de formule politique165. Trochu déclare comprendre pourquoi "la Jeune République” dénonce le P.D.P. comme un Parti de droite166. Il mettra en cause la Nonciature et Mgr Maglione qui lui aurait déclaré qu’il y avait deux tendances au sein du P.D.P. dont la sienne qui n’était pas la bonne, mais aussi le rôle de l’Abbé Renaud et surtout de Pagès qui aurait conspiré contre lui auprès de Des Cognets, et de Paul Simon à la tête des parlementaires démocrates qui se serait plaint à la Nonciature de ses orientations trop à gauche167. Après des événements assez confus, La Semaine Religieuse du diocèse de Rennes du 12 juillet annonce que l’Abbé Trochu avait abandonné la direction de L’Ouest Éclair. Desgrées du Lou affirmera que celui-ci n’avait apporté aucun fait prouvant que l’intervention de l’autorité religieuse aurait été provoquée par le directeur politique du journal et son Conseil de surveillance. Ce fut pour lui un acte spontané du Nonce, l’Abbé dépendant étroitement sur le plan hiérarchique de ses chefs religieux. L’Ouest Éclair avait bénéficié d’une bienveillance de la Nonciature jusqu’en 1929 qui fut compromise quand on eut l’impression que l’Abbé orientait le journal trop à gauche. De plus ce dernier était mêlé à des affaires financières pouvant donner lieu à certaines critiques. Mais le conflit entre deux lignes politiques était devenu de plus en plus évident. Celle de Desgrées reflétait la ligne de la majorité du P.D.P. et de son groupe et l’Abbé Trochu avait été lâché à la fois par le Parti et par les autorités ecclésiastiques. Pagès dira avoir voulu essayer de jouer un rôle de conciliateur entre Desgrées et Trochu168 mais s’être éloigné des conceptions politiques de ce dernier, qui s’orientait vers une Gauche individualiste, capitaliste, vers ce qu’il appelait "un affairisme politique radicalisant". Quant à Des Cognets il dira qu’il avait essayé jusqu’en 1930 d’éviter ce heurt entre les deux hommes, par un rôle d’arbitre au Conseil de surveillance169.
91L’Abbé Trochu reste en contact avec Mgr Vanneufville à qui il déclare que ce sont "les hommes de Tardieu" qui ont demandé sa tête au Nonce. Il parle du "misérable cardinal Charost" et de Desgrées du Lou comme d’un "idéologue" et d’un "rêveur". Mgr Vanneufville ne refuse pas de contribuer à une éventuelle conciliation devant un "tribunal arbitral". Mais les "éléments proches du P.D.P." sont récusés car ils ne présentent pas toutes les garanties d’indépendance face à un journal continuant à subventionner le Parti170. De ce côté une volonté de l’Abbé de le noyauter pour le mettre au service de ses ambitions politiques a pu être mise en cause. Elle s’est heurtée notamment sur le plan parlementaire à la résistance de Paul Simon qui refusait sa tactique. Ce départ ne règle cependant pas tous les problèmes de L’Ouest Éclair qui se trouve un temps en situation financière difficile, avec un nouveau gérant Pierre Artur, et l’arrivée d’hommes nouveaux comme Paul Hutin. Mais des difficultés se précisent à nouveau du côté de l’Abbé Trochu en 1931, qui tente des manœuvres pour reprendre le contrôle du journal (affaire du rachat des titres). Il recherche au moins une majorité relative des actions, grâce à l’appui de Loucheur. Mais la mort de celui-ci en novembre 1931 ruine le projet171. Trochu joue également un rôle pour le lancement du Sud et il mettra en cause dans sa mise à l’écart Pagès qui aurait fait comprendre à son Directeur que si l’Abbé venait à Montpellier, le journal ne pourrait plus compter sur le soutien de Tardieu. Dans ces conditions Trochu justifie la création par le "parti républicain" d’un concurrent de L’Ouest Éclair qui sera L’Ouest Journal lancé en 1931 avec l’appui de Dupuy du Petit Parisien, de Loucheur, et le soutien de Bellanger172. La direction politique est confiée de 1931 à 1934 à Charles Fredouet. C’est un journal qui se veut "grand quotidien républicain d’informations" en se situant sur le terrain laïc et au Centre-Gauche. Mais l’exploitation du journal se révèle assez difficile (entre 80 000 et 100 000 exemplaires) et il disparaît en 1936.
92On peut se demander si les caractères de L’Ouest Éclair n’ont pas été transformés par cette crise dont le dénouement a accentué ses caractères de journal modéré traditionnel. En effet, L’Ouest Éclair selon Des Cognets lui-même appartenait essentiellement à un groupe de familles bourgeoises rennaises et régionales "orientées vers une droite cléricale qui n’avait jamais dépassé l’étape du Ralliement", la majorité de fait des actionnaires étant anti-démocrate. Ainsi il n’a jamais été l’organe du P.D.P. et ne pouvait l’être : "Avec le P.D.P. cela n’alla jamais jusqu’au mariage. L’Ouest Éclair et Desgrées gardaient leur entière liberté d’action"173. L’avenir allait le prouver. Concernant le problème général des relations Parti-Journal il faut distinguer avant 1933 les niveaux des relations entre le journal lui-même, Desgrées et Trochu. Celui-ci a témoigné semble-t-il d’une certaine maladresse à l’égard d’un parti qu’il considérait un peu comme sa création. Les préventions contre un prêtre un peu affairiste de surcroît n’ont pu que grandir. Le bon niveau des relations se situait à celui de Desgrées du Lou qui y a accentué la note "démocrate modérée" en y représentant le mieux la ligne du P.D.P. aux côtés de Pagès et Simon. Avec Desgrées si L’Ouest Éclair n’a jamais été un organe officiel du P.D.P., il en était un organe "officieux" et jouait un rôle de démultiplicateur d’influence. Mais des tendances plus modérées y existaient qui se vérifieront à la fin de l’entre-deux-guerres dans le sens d’une transformation des relation entre le Parti et le Journal.
93L’infléchissement apparu après le départ de l’Abbé Trochu s’accentue après la mort de Desgrées du Lou en février 1933. Cornilleau lui rend alors un vibrant hommage et rappelle son rôle politique et journalistique174. Desgrées avait pris des dispositions pour sa succession, en particulier la présence de Paul Simon pour la direction politique du journal, conformément à une lettre rendue publique et qui le désignait comme son successeur politique175. Pierre Artur devient le gérant responsable de la société de L’Ouest Éclair. Paul Simon avait d’abord refusé cette direction qu’il craignait de ne pouvoir exercer en toute indépendance et l’avait finalement acceptée "non sans répugnance". Il avait fallu concilier la tendance d’un Des Cognets qui "ne pouvait pas prendre la responsabilité d’un Journal de droite imprégné d’Action Française" et celle du gérant Artur qui "ne pouvait accepter la responsabilité d’un journal d’inspiration sillonniste"176. La présence de Paul Simon avait été plus ou moins imposée comme un rempart contre d’autres tendances. C’est dès lors un journal divisé et dont les relations avec la "Démocratie Chrétienne" et le P.D.P. vont être plus complexes que dans la période précédente. Le rôle de soutien aux Démocrates Populaires sera moins net en 1933-1939. Dès la fin de 1933 Pierre Artur parle d’un "malaise dans notre direction politique"177. Quant à Pagès, il se plaint bientôt en 1934 de coupures faites dans les comptes rendus des conseils du P.D.P. ; Paul Desgrées du Lou lui répond en parlant de son "dévouement passionné au P.D.P.", mais montre le peu d’intérêt des lecteurs pour l’activité des partis178. A ce moment des différences de tonalité apparaissent sur les événements de février 1934. C’est une tendance "modérée" du P.D.P. qui continue à collaborer à L’Ouest Éclair malgré des nuances différentes de Pagès à Simon. L’aile gauche prend plutôt L’Aube comme tribune et les divergences internes du Parti s’expriment plus nettement. Paul Simon estime ainsi que Pagès témoigne trop de sympathie pour les "Croix de Feu"179. Mais des difficultés surgissent aussi à propos des articles de l’Italien Russo jugés "ininsérables" dans le journal180, pendant que Pagès réclame qu’une plus grande place soit donnée aux articles de doctrine pour "la formation du peuple en matière économique et sociale"181.
94Un certain soutien continue à se manifester en fait au Parti et à ses Fédérations comme dans les Côtes du Nord ou l’Orne par le lancement du Journal L’Orne qui bénéficie d’un contrat d’impression et d’expédition avec le journal de Rennes. Celui-ci atteint en 1936 un tirage de 380 000 exemplaires et joue à nouveau un rôle aux élections généralement en faveur du P.D.P. Néanmoins c’est une attitude assez nettement anti-Front Populaire qui est adoptée et qui est justifiée comme découlant d’un devoir naturel, même si elle peut faire perdre des lecteurs à gauche182. Les positions sont plus proches de celles de la Droite traditionnelle tant en politique intérieure qu’en politique extérieure au moment de Munich. En dépit de la présence de Paul Simon, l’orientation générale s’est quelque peu modifiée dans le sens modéré traditionnel. Dès septembre 1933 Delahaye parle d’un Ouest Éclair qui s’est heureusement assagi183. Cet "assagissement" est d’ailleurs perçu par certains membres du P.D.P. comme un éloignement à l’égard des thèses du Parti. Trochu avait parlé à propos de son départ d’un "triomphe de l’Action Française". Paul Simon fera part en 1940 de ses difficultés à son poste à Champetier de Ribes, et de sa déception devant l’attitude de certains dirigeants du journal184. Des évolutions accélérées commencent à se produire. Tout s’est passé comme si de 1933 à 1940 la tendance sympathisante du P.D.P. avait dû coexister avec d’autres.
95Cependant celui-ci a alors trouvé un autre appui, Le Nouvelliste repris en mains depuis 1928 par l’Abbé Jallier. Un conflit va apparaître d’ailleurs en 1934 face à La Province, journal de son ancien directeur Delahaye qui met en cause à nouveau le Parti devant une juridiction ecclésiastique185. Il avait adressé en décembre 1933 une plainte en diffamation contre l’Abbé Jallier qui l’avait accusé de complicité avec l’Action Française. Il parlait d’un Nouvelliste devenu le journal d’un parti, un journal démocrate populaire allant jusqu’à Francisque Gay186. Une polémique s’était développée par étapes successives entre les deux hommes et les deux journaux, rebondissant violemment en 1933. La Province évoque une polémique qui dépasse le cadre des deux journaux. Delahaye met en cause l’alliance de l’Abbé Jallier et des Démocrates et dénonce l’équivoque d’un journal voulant se faire passer pour un journal catholique officiel187. L’Abbé réplique sur le thème des collusions avec l’Action Française et "l’Action Nationale de l’Ouest", de l’appui donné aux manifestations monarchistes contre les enseignements de l’Église188 en particulier sur la politique internationale et des rumeurs au sujet des relations avec Briand189. Mgr Mignen devant la plainte de Delahaye institue un "Tribunal Collégial" qui déboute ce dernier et donne raison à l’Abbé Jallier. La sentence affirme qu’il a seulement exercé son droit de critique contre les idées et l’action publique du directeur de La Province, et rappelle que c’était pour rendre au Nouvelliste son caractère de journal catholique que l’Abbé avait été appelé à sa tête en 1928190. Cette affaire de 1934, succès pour Le Nouvelliste et l’Abbé Jallier peut aussi être considérée comme un succès pour la tendance du P.D.P. sous l’Épiscopat de Mgr Mignen et une revanche sur celle de 1930. Mgr Maglione déclare être très heureux de l’issue de l’affaire qui écarte toutes les équivoques191, tandis que Delahaye se plaint des conditions dans lesquelles le jugement a été rendu. Il avait adressé une "supplique" aux évêques de l’Ouest192 et l’épisode avait traduit les divisions de l’Épiscopat. Cependant il finit par demander "les conditions de sa soumission". Pinault, le député Démocrate de Rennes semble s’être entremis pour aboutir à ce résultat et l’Archevêque de Rennes enregistre avec satisfaction la soumission de Delahaye qui s’engage désormais à "ne fournir aucun appui à l’Action Française"193.
96Le Nouvelliste était donc justifié et La Province condamnée. Les sympathies du Nouvelliste pour les Démocrates se révèlent dans cette période plus nettes qu’à L’Ouest Éclair mais pour le P.D.P. on avait affaire à une situation complexe dans l’Ouest car Le Nouvelliste ne pouvait prétendre à la même audience que L’Ouest Éclair.
Notes de bas de page
1 Voir plus bas, p. 52.
2 Nous n’avons pu retrouver que la Circulaire n° 1.
3 Petit Démocrate, 29 novembre 1925.
4 ibid.
5 ibid., 19 décembre 1927.
6 Petit Démocrate, 17 novembre 1929.
7 Petit Démocrate, 11 décembre 1932.
8 Archives Pierre FRÉDEFON – Bordeaux – Note sur la révision des statuts. 27 mars 1936.
9 Petit Démocrate, 31 mai 1936.
10 Voir plus bas, 3e partie.
11 Petit Démocrate, 28 novembre 1926.
12 R. CORNILLEAU, Souvenirs et Témoignages, op. cit., p. 171.
13 Petit Démocrate, 10 mars 1929.
14 ibid., 29 novembre 1925.
15 ibid., 17 novembre 1929.
16 Petit Démocrate, 29 novembre 1925.
17 Archives L. A. PAGÈS – Note – Activité en 1931.
18 Voir plus bas, p. 84.
19 Petit Démocrate, 6 mars 1932.
20 Petit Démocrate, 29 novembre 1925.
21 ibid., 4 avril 1926.
22 Petit Démocrate, 10 décembre 1933.
23 Cf : La femme dans la vie civique. Pourquoi nous sommes partisans du Suffrage féminin.
24 Petit Démocrate, 25 novembre 1934.
25 Article 14 des nouveaux statuts.
26 Voir plus haut, p. 53.
27 Voir plus bas, p. 135.
28 Sur le rôle politique des J.D.P., voir plus bas p. 309.
29 Petit Démocrate, 17 novembre 1929.
30 ibid., 11 décembre 1932.
31 Petit Démocrate, 10 décembre 1933.
32 Archives Robert LECOURT – Notes – 1934-1937.
33 Route des Jeunes, 13 mai 1934.
34 ibid., novembre 1935.
35 ibid., février 1936.
36 A.D. Puy-de-Dôme – Archives LAUDOUZE, 8 mai 1936.
37 Archives Alfred BOUR – Lettre R.-LAURENT à R. LECOURT, 30 décembre 1938.
38 Petit Démocrate, 17 novembre 1929.
39 Archives Raymond-LAURENT, Bulletin du Militant, n° 1.
40 Bulletin du Militant, n° 1, 2.
41 Petit Démocrate, 7 juin, 26 juillet, 16 août 1931.
42 ibid., 29 novembre 1936.
43 Petit Démocrate, 9 avril 1939.
44 R. BITON, op. cit., p. 59. P. LETAMENDIA, op. cit., p. 34.
45 Témoignage. Librairie Sorlot, rue Palatine : Fichier dans les locaux du P.D.P. en 1943 quand ils furent achetés à Raymond-LAURENT.
46 Petit Démocrate, 29 novembre 1925.
47 ibid., 28 novembre 1926.
48 ibid., 27 novembre 1927.
49 ibid., 10 mars 1929.
50 ibid. 27 novembre 1929.
51 Petit Démocrate, 22 novembre 1931.
52 ibid., 11 décembre 1932.
53 ibid., 2 décembre 1934.
54 ibid., 24 novembre 1935.
55 ibid., 13 décembre 1936.
56 ibid., 26 décembre 1937.
57 Listes de souscription. 1928. Petit Démocrate. Sur un total d’indications de 1378. Pourcentages arrondis.
58 Petit Démocrate, 29 novembre 1925.
59 Petit Démocrate, 28 novembre 1926.
60 ibid., 27 novembre 1927.
61 ibid., 25 novembre 1928.
62 Archives L. A. PAGÈS. Dossier "politique intérieure".
63 Petit Démocrate, 11 décembre 1932.
64 ibid., 10 décembre 1933.
65 ibid., 11 mars 1934.
66 A.D. Puy-de-Dôme. Archives LAUDOUZE. n° 11. 1935. Note confidentielle C.E.
67 Petit Démocrate, 24 novembre 1935.
68 ibid., 6 décembre 1936.
69 ibid., 26 décembre 1937.
70 ibid., 4 décembre 1938.
71 Archives Pierre FRÉDEFON. Lettre Raymond-LAURENT. 1938.
72 A.D. Puy-de-Dôme. Archives LAUDOUZE, n° 1.
73 Archives Raymond-LAURENT. 66. Circulaire BASTIANELLI. 26.9.1931.
74 Archives Raymond-LAURENT. 66.
75 L’Abbé Pératé. in memoriam. Brochure s.d ;
76 On a pu y voir une forme d’"Opus Dei". Témoignage Charles FLORY.
77 Témoignage A. Arthus-BERTRAND.
78 Témoignage Georges HOURDIN.
79 ibid.
80 Archives P. FRÉDEFON. Lettre E. AMAURY. 22 octobre 1931.
81 Louis BOUR. Alfred BOUR, une vie, une époque, op. cit., p. 141.
82 Archives DESGRÉES DU LOU.
83 ibid., 14 décembre 1929.
84 Archives DESGRÉES DU LOU. Lettre Abbé RENAUD à DESGRÉES, 4 février 1925.
85 Archives L. A. PAGÈS. Dossier "Politique".
86 Témoignage Yves CORNILLEAU.
87 Témoignage G. HOURDIN.
88 A.D. Finistère. Archives TRÉMINTIN. 104 J. 26. Élections de 1928. Dépenses JADÉ.
89 A ce sujet : Michel SOULIÉ, Le Cartel des Gauches et la Crise Présidentielle.
90 Petit Démocrate, 29 mars 1925.
91 Petit Démocrate, 29 novembre 1925.
92 Petit Démocrate, 27 novembre 1927.
93 Petit Démocrate, mars 1931.
94 De nouvelles Sections sont ainsi créées en 1930 dans le Doubs, les Hautes-Pyrénées, en 1931 dans les Pyrénées Orientales, en 1933 dans l’Aveyron et la Corrèze.
95 Petit Démocrate, 13 décembre 1936.
96 Archives Raymond-LAURENT. 90. Abonnements au Petit Démocrate.
97 Petit Démocrate, 22 mars 1925.
98 Petit Démocrate, 2 mai 1926.
99 ibid.
100 Voir plus bas, p. 162.
101 Petit Démocrate, 30 octobre 1926.
102 Petit Démocrate, 5 septembre 1926.
103 Petit Démocrate, 21 décembre 1924.
104 Les Cahiers d’une équipe, octobre 1935.
105 Petit Démocrate, 22 mars 1925.
106 Petit Démocrate, 29 décembre 1935.
107 Petit Démocrate, 28 mars 1926.
108 ibid., 6 février 1927.
109 Cri Girondin, février 1935.
110 Petit Démocrate, 21 mars 1926.
111 ibid., 4 juillet 1926.
112 Petit Démocrate, 26 juin 1927.
113 Archives P. FRÉDEFON. Lettre R.-LAURENT. 17 janvier 1927.
114 Petit Démocrate, 27 novembre 1927.
115 Archives Raymond-LAURENT. 90.
116 Au compte des profits et pertes pour l’exercice 1928-1929, le total des produits atteint 217 130 F. et les charges 218 542 F. Aux "Produits" la vente au numéro atteint 34 390F. Le service des abonnements 138 835 F.... les subventions 16 247 F. Archives Raymond-LAURENT – 92.
117 Petit Démocrate, mars 1931.
118 Petit Démocrate, mars 1931.
119 ibid., 27 novembre 1933.
120 Archives Alfred BOUR. Lettre CORNILLEAU à la Commission d’administration et de propagande, 25 juin 1936.
121 Archives Alfred BOUR. Lettre COCHINAL à BOUR, 4 juin 1937.
122 ibid.
123 Archives Alfred BOUR. Lettre CORNILLEAU, 16 juillet 1936.
124 G. HOURDIN, in R. Cornilleau. Souvenirs et témoignages, p. 66.
125 G. HOURDIN, Dieu en liberté, op. cit., pp. 93-94.
126 Petit Démocrate, 25 novembre 1928.
127 Fred KUPFERMAN – Philippe MACHEFER, Le Petit Journal dans les années 1930, R.H.M.C., janvier 1975, p. 12.
128 Archives L. A. PAGÈS. Circulaire n° 41, 23 mars 1932.
129 F. KUPFERMAN – P. MACHEFER, op. cit.
130 A ce sujet, Histoire Générale de la Presse Française, p. 338.
131 Archives, L. A. PAGÈS. Note sur "La Presse Régionale", s.d.
132 Archives Nationales. Archives Louis MARIN, n° 232. "Note sur la Presse Régionale vis-à-vis du P.D.P.", 1932.
133 Archives Louis MARIN. Lettre CAVALIER à MARIN, 1er mars 1932.
134 Le National d’Artois et des Flandres, 15 janvier 1932.
135 Archives L. A. PAGÈS. Dossier "Politique intérieure". Lettre à PAGÈS, 8 juin 1925.
136 Archives Louis MARIN, n° 232. Lettre de WARREN à MARIN, 2 mars 1932.
137 Archives L. A. PAGÈS. Lettre PAGÈS, 31 décembre 1928.
138 ibid., 31 décembre 1929.
139 Archives L. A. PAGÈS. Lettre 22 décembre 1930.
140 Archives L. A. PAGÈS. Prospectus de propagande pour "Le Sud".
141 Archives L. A. PAGÈS. Circulaire CHAMPETIER, 9 janvier 1931.
142 ibid., Lettre PAGÈS, 16 juin 1931.
143 ibid., Lettre du "Sud", 1932.
144 ibid., Lettre de l’évêque de Montpellier, 30 septembre 1930.
145 Archives S.S. de France. Note sur la cession du "Nouveau Journal", janvier 1932.
146 ibid., note sur la Presse à Lyon, 28 janvier 1932.
147 Archives Diocèse de Lille. Note confidentielle "La Croix du Nord", 12 décembre 1927.
148 P. DELOURME, op. cit.
149 P. DELOURME, op. cit
150 Archives Evêché de Lille. 36-12. Lettres Abbé TROCHU à Mgr VANNEUFVILLE, 19 février, 24 avril 1925.
151 Ouest Éclair, 12 février 1925.
152 Ouest Éclair, 24 février, 17 mars 1825.
153 ibid., 29 janvier 1926.
154 ibid., 27 novembre, 7 décembre 1927.
155 Archives L. A. PAGÈS. Notes "Presse Régionale", s.d.
156 P. DELOURME, op. cit., p. 351.
157 Eugène DELAHAYE, 40 ans de journalisme, 1946, p. 154.
158 Archives F. GAY. Lettre DESGRÉES DU LOU à Fr. GAY, 11 juillet 1927.
159 Archives diocésaines Rennes. Lettre DELAHAYE au Cardinal CHAROST publiée par "le Nouvelliste", 20 juin 1928.
160 Archives Desgrées du Lou, mémoire, 27 p.
161 Voir plus bas, p. 244.
162 Archives du Diocèse de Rennes, sous dossier "Ouest Éclair – Chanoine Boué".
163 P. DELOURME, op. cit.
164 Ouest Éclair, 23 février 1926.
165 Voir plus bas, p. 163 et suivantes
166 Lettre TROCHU à DESGRÉES DU LOU, 27 février 1930, in P. DELOURME, op. cit., p. 396.
167 Archives DESGRÉES DU LOU, mémoire.
168 Archives Alfred BOUR. Notes L. A. PAGÈS, 30 novembre 1936.
169 Lettre J. DES COGNETS à Fr. GAY, 28 avril 1953.
170 Archives évêché de Lille. Archives VANNEUFVILLE, correspondance Abbé TROCHU-VANNEUFVILLE, 10 janvier, 20 février, 17 mars 1931.
171 Archives DESGRÉES DU LOU, 1931 et P. DELOURME, op. cit., p. 445.
172 P. DELOURME, op. cit., et F. AMAURY, Le Petit Parisien, p. 322.
173 Lettre DES COGNETS à Fr. GAY, 28 avril 1953.
174 Petit Démocrate, 26 février-5 mars 1933.
175 Petit Démocrate, 5 mars 1933.
176 Lettre DES COGNETS à Fr. GAY, 28 avril 1953.
177 Archives J. DES COGNETS. Lettre ARTUR à DES COGNETS, 11 septembre 1933.
178 ibid. Lettre Paul DESGRÉES à DES COGNETS, 7 mars 1934.
179 Archives J. DES COGNETS. Lettre P. SIMON à DES COGNETS, 13 juillet 1934.
180 ibid. Lettre MOREUX à DES COGNETS, 4 janvier 1935.
181 ibid. Lettre PAGÈS.
182 Archives J. DES COGNETS. Lettre MOREUX à DES COGNETS, 19 juin 1936.
183 La Province, septembre 1933.
184 Archives CHAMPETIER DE RIBES. Carnets, 31 mai 1940.
185 Archives Archevêché de Rennes. Dossier "La Province".
186 La Province, 10 mai 1933.
187 La Province, 27, 30 septembre 1933.
188 Nouvelliste, 21, 24, 29 septembre, 3, 19 octobre 1933.
189 Archives Archevêché de Rennes.
190 Archives Archevêché de Rennes. Officialité diocésaine de Rennes. Cause en diffamation et injures DELAHAYE-JALLIER. Sentence du Tribunal Collégial, 1934.
191 Archives Archevêché de Rennes. Mgr MAGLIONE à Mgr MIGNEN, 22 juillet 1934.
192 Archives Archevêché de Rennes. Nouvelliste du Morbihan, 27 septembre 1934.
193 Archives Archevêché de Rennes. Dossier "La Province", septembre-octobre 1934.
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