1Henri Wallon, né à Valenciennes le 23 décembre 1812, appartient à une famille de la petite bourgeoisie. Son père, Alexandre Wallon, né en 1783, fut secrétaire du commissaire des guerres de la place de Valenciennes, puis directeur des messageries Laffite de Valenciennes ; son grand-père maternel, Étienne Caffiaux, perruquier ; son grand-père paternel, maître libre, tous deux à Valenciennes. Henri Wallon fait ses études au collège communal de Valenciennes puis au lycée de Douai où il eut pour professeur Louis Jannet qui épousa sa sœur Sophie. Il est reçu à l’École normale supérieure en 1831 et à l’agrégation d’histoire en 1834. Il est en outre licencié en droit et fut tenté par la profession d’avocat. En 1837, il obtient simultanément deux thèses de doctorat, l’une sur le droit d’asile, et une autre sur l’immortalité de l’âme. Maître de conférences d’histoire à l’École normale de 1838 à 1850, il est nommé professeur suppléant en 1846 à la Faculté des lettres de Paris, suppléant de Guizot pour la chaire d’Histoire moderne. Deux circonstances ont poussé sans doute Henri Wallon à descendre dans l’arène politique. Il avait publié en 1847 un ouvrage sur L’histoire de l’esclavage dans l’Antiquité qui attira l’attention de Schoelcher alors président de la commission pour l’abolition de l’esclavage. Henri Wallon devient secrétaire de cette commission et, en avril 1848, il est élu second suppléant en Guadeloupe à l’Assemblée constituante. Il est par ailleurs ulcéré par la suppression de la chaire de Guizot à la Sorbonne et réclame au ministre sa réinstallation le 12 juillet 1848. Aussi laisse-t-il poser sa candidature dans le Nord sur la liste du parti de l’Ordre aux élections de mai 1849. Cette première expérience politique est de courte durée. Hostile à la loi du 31 mai 1850 amputant le suffrage universel, Wallon préfère démissionner et se retirer de la vie politique. Il avait retrouvé l’année précédente son enseignement à la Sorbonne comme titulaire cette fois de la chaire d’Histoire moderne. Il est possible par ailleurs que la maladie et le décès, le 28 juin 1851, de sa première femme, Hortense Dupire, qu’il avait épousée le 20 août 1839 à Douai ait contribué à cet éloignement. Il est alors père de sept enfants en bas âge, cinq filles et deux fils. Son second fils Paul, architecte, est le père d’Henri Wallon universitaire communiste et co-auteur avec Langevin du plan de réforme de l’Éducation nationale. Sa fille Jeanne épousa le général Petit, commandant du génie militaire de Paris. Le 19 août 1852 à Valenciennes, Henri Wallon épouse en secondes noces Pauline Boulan, fille d’un juge de paix dont il eut trois autres enfants, une fille et deux fils qui furent professeurs dans les lycées parisiens. Il avait, lors de son décès, quarante-cinq petits-enfants.

2Habité par une grande foi chrétienne héritée d’une mère fervente et nourrie par son professeur de français, François Alexis Rara, qui se destina ensuite au sacerdoce, foi alliée à un esprit tolérant peut être redevable au voltairianisme et au républicanisme paternels, Wallon publie plusieurs ouvrages d’Histoire Sainte et d’apologétique dont une réfutation de la Vie de Jésus de Renan. Sa biographie de Jeanne d’Arc (1860) connut quinze éditions. Il est aussi l’auteur d’un Saint Louis en son temps (1875). Plus tard il fit d’importantes recherches sur le phénomène de la Terreur révolutionnaire à laquelle il consacra plusieurs ouvrages. La richesse de son oeuvre lui vaut d’être à partir de 1873 secrétaire perpétuel de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, dont il était membre depuis 1850.

3La véritable entrée d’Henri Wallon en politique date de son élection à l’Assemblée nationale le 8 février 1871 dans le département du Nord sur la liste conservatrice, retour à la Chambre dicté sans doute par les circonstances dramatiques de l’heure. Il y siège au Centre droit, vote l’abrogation des lois d’exil et pour le pouvoir constituant de l’Assemblée. Le 29 novembre 1872, il demeure fidèle à Thiers mais il prend part à sa chute le 24 mai 1873. Il soutient le ministère Broglie, vote le septennat mais amorce un rapprochement avec le Centre gauche en 1874. Il s’abstient sur la proposition Perier le 23 juillet 1874 après avoir déposé un amendement anticipant sur l’essentiel des lois constitutionnelles de 1875. Le 30 janvier 1875, il entre dans l’Histoire en faisant adopter à une voix de majorité le célèbre amendement qui établit un septennat impersonnel et fonde la République. Le 1er février, il fait adopter un autre amendement par 425 voix contre 243 stipulant que le droit de dissolution de la Chambre par le Président de la République s’exerce sur l’avis conforme du Sénat. Et, le 19 février, il est chargé de rédiger les dispositions sur la composition du Sénat résultant du compromis conclu entre le Centre droit et le Centre gauche. Henri Wallon apparaît donc comme le père de la Constitution de 1875. Il crée un nouveau groupe parlementaire à l’Assemblée dénommé "Wallon Lavergne" et, le 11 mars 1875, il est appelé au ministère de l’Instruction publique dans le cabinet Buffet. Il fait aboutir la loi sur la liberté de l’enseignement supérieur, s’attirant la rancune des défenseurs du monopole de l’Université. Victime aussi des rancœurs des monarchistes intransigeants, il ne recueille que peu de suffrages lors des premiers scrutins pour l’élection des sénateurs inamovibles et, le 12 décembre 1875, il annonce le retrait de sa candidature. Un revirement des députés lui permet d’être élu in-extremis le 18 décembre, au 9ème tour de scrutin, le 69ème.

4La carrière ministérielle de Wallon prend fin en mars 1876 avec la formation du ministère Dufaure. Il est élu cette même année doyen de la Faculté des lettres de Paris. Siégeant au groupe constitutionnel du Sénat, il ne prend pas part au vote approuvant la dissolution de la Chambre après le 16 mai, il s’oppose à la politique de laïcisation de Ferry, prend une part active à la discussion de la révision constitutionnelle en 1884 et des projets de loi sur le travail des femmes et des enfants (1892) et la liberté d’association qu’il approuve (1901). Il s’oppose à l’expulsion des Princes (1883), s’abstient lors du vote organisant la Haute Cour de Justice (1889), vote contre le ministère Bourgeois en 1896 quand le Sénat affirme son droit de renverser un ministère. Mais il s’abstient lors de la formation du ministère Waldeck-Rousseau afin de se démarquer de toute hostilité à la Défense républicaine.

5Henri Wallon est décédé à Paris le 13 novembre 1904. Il était commandeur de la Légion d’honneur et Officier de l’Instruction publique.