1Né le 20 novembre 1803 à Paris, Édouard Roger appartient à la noblesse d’Empire. Son père, Daniel Roger, obtint le titre de baron le 10 janvier 1809 et, le 15 mars 1817, l’hérédité du titre. Édouard Roger reçut par lettre patente du 16 juin 1830 celui de comte et l’appellation "Roger du Nord". Daniel Roger, bourgeois de Genève, était venu s’établir en France sous l’Empire, de concert avec son frère en qualité de directeur d’un établissement financier spéculant sur les immeubles et les fournitures aux armées. Il possédait de riches propriétés dans la région parisienne et présidait le canton de Gonesse. Le grand-père paternel de Roger du Nord, Urbain Roger, avait obtenu le titre de bourgeois de Genève en 1756. Il était originaire de Nyon dans le pays de Vaud où ses ascendants protestants étaient venus se réfugier, quittant le pays de Gex, après la révocation de l’édit de Nantes, et où il exerçait la profession de négociant. Le grand-père maternel de Roger du Nord, André Vassal, était fermier général et parent de Cambacérès. Sa grand-mère maternelle, Anne Pas de Baulieu, appartenait à une grande famille du Languedoc qui compta des conseillers secrétaires du roi à Montpellier en 1704 et des conseillers à la cour des comptes en 1711 et 1745.

2Les parents de Roger du Nord divorcèrent en 1809. Sa mère, Albine Vassal, se remaria en 1812 avec Charles Christian de Montholon, comte de Semonville, chambellan et exécuteur testamentaire de Napoléon Ier. Elle eut deux fils et deux filles de ce second mariage, ces dernières nées à Saint-Hélène. Son fils, Charles François Frédéric, fut ministre plénipotentiaire et sénateur sous le Second Empire.

3Roger du Nord entre dans la carrière diplomatique sous la Restauration. Il est secrétaire d’ambassade à Constantinople lors de la première mission du général Guilleminot, comte d’Empire et pair de France en 1823. Il épouse sa fille Annie Henriette dont il eut deux enfants : Charles, lieutenant de chasseurs à pied, mort au siège de Sébastopol en 1855, et Marie qui épousa Huddelston et n’eut pas de descendance. Après la révolution de Juillet, Roger du Nord est nommé chargé d’affaires à Dresde. Il s’engage dans la politique en 1834 en devenant député de l’arrondissement de Dunkerque. Il apparaît assez vite lié à la Monarchie de Juillet. Son beau-frère, Jules Émile Humann, époux de la sœur jumelle de sa femme, est le fils du ministre des Finances de Louis-Philippe. Roger du Nord est conservateur du domaine royal. Il siège à la Chambre parmi les conservateurs doctrinaires. Mais, à partir de 1836, il se met au service de Thiers avec Léon de Maleville et Joseph de la Redorte et il devient ensuite son ami. En 1837, il est réélu sous l’étiquette du Tiers-Parti et il s’oppose ensuite à la politique guizotiste. Après la révolution de février 1848, il refuse de se rallier à la République, échoue à Paris lors des élections à l’Assemblée constituante mais est élu l’année suivante dans le Nord sur la liste du parti de l’Ordre. Il siège à l’Assemblée parmi la fraction orléaniste intransigeante et il est le seul élu du Nord de la liste conservatrice avec Corne à refuser la révision constitutionnelle. Il prend parti dans le journal L’Ordre pour la candidature du prince de Joinville aux élections présidentielles de 1852. Il condamne le coup d’État du 2 décembre, est interné quelque temps au fort de Ham. Il abandonne ensuite toute activité politique pendant le Second Empire. La guerre de 1870 le tire de sa retraite. A 67 ans, il est nommé lieutenant-colonel à l’état-major de la Garde nationale de la Seine et cité à l’ordre du jour de l’Armée pour sa conduite à Champigny. Il accompagne Thiers lors de la négociation de Versailles au début novembre. Pendant la Commune, il est chef d’état-major du général d’Aurelle de Paladines, commandant en chef des gardes nationales loyalistes de la Seine en remplacement du général Thomas. Le 8 février 1871, il avait été élu député du Nord sur la liste conservatrice, le sixième avec 82 % des suffrages.

4Fidèle de Thiers, il soutient la politique du Président de la République en toutes circonstances et, après sa chute, il passe du Centre droit au Centre gauche et vote les lois constitutionnelles de 1875. Ce protestant s’inquiète de la réaction cléricale et vote contre la loi de 1875 sur la liberté de l’enseignement supérieur et les jurys mixtes pour la collation des grades. Son opposition à l’Empire et au cléricalisme lui valent d’être inclu dans le pacte entre républicains et légitimistes pour l’élection des sénateurs inamovibles. Il est élu comme Corne le 10 décembre 1875 au second tour de scrutin par 355 suffrages, le douzième des 75. Roger du Nord siégea au Centre gauche et soutint la politique républicaine. Il vota le 9 mars 1880 l’article 7 du projet de loi Ferry interdisant l’enseignement aux congrégations non autorisées.

5Commandeur de la Légion d’honneur, le comte Roger du Nord a été l’un des fondateurs du Jockey-club. Il est mort à Paris le 11 juin 1881. Il laisse une immense fortune évaluée à 3 734 000 francs, composée essentiellement de rentes (933 437 francs), d’obligations françaises (368 804 francs), étrangères (1 463 426 francs), d’actions (248 187 francs) et d’actifs immobiliers (600 000 francs).