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Les immortels du Sénat, 1875-1918

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Alain Corbin
, 
Jean-Marie Mayeur

Les cent seize inamovibles de la Troisième République

La Rochette Ernest Poictevin de 1804-1876

François Naud

Texte intégral

1Ernest Poictevin de La Rochette naît le 9 janvier 1804 à Sainte-Pexine (Vendée) ; son père, Charles Poictevin de La Rochette, qui a émigré en Espagne, y est maire avant de devenir maire de Luçon en 1815 puis conseiller de préfecture à Bourbon-Vendée (La Roche-sur-Yon) de 1816 à sa révocation le 10 juin 1818. Sa mère, Esther de Regnon, est le cinquième enfant d’un ancien lieutenant des vaisseaux du Roi. Cette famille catholique s’installe à Nantes en 1819 où Charles de La Rochette ne tarde pas à assurer la présidence de la Chambre littéraire du Château puis le secrétariat de la Fabrique de la cathédrale.

2Après des études à la Faculté de droit de Poitiers, Ernest de La Rochette qui réside 4, rue d’Argentré à Nantes, adhère au Cercle légitimiste de son père en 1827. Sa fréquentation des milieux aristocratiques lui fait rencontrer Marie-Anne de Couëssin (5 août 1814- 26 juillet 1868), fille unique d’Athanase de Couëssin, propriétaire et maire d’Assérac, dans la presqu’île guérandaise où le sel marin constitue la principale activité économique. Magistrat municipal de 1815 à 1817 et de 1820 à 1830, Athanase de Couëssin siège au conseil de l’arrondissement à Savenay et représente le canton d’Herbignac au conseil général du 2 avril 1823 au 7 avril 1831.

3De leur mariage célébré le 13 juillet 1835 naîtront huit enfants : Marie-Anne (1836-1852), Antoine (1837-1879) député de Loire-Inférieure de 1876 à 1879, Caroline (1838-1889) épouse de Louis Le Beschu de Champsavin, Athanase (1841-1884), Ernestine (1845), Ernest (1847-1902), député de Loire-Inférieure de 1879 à 1889, époux de Mélanie de Chasteigner, Jeanne (1849-1855), Emerand (1851-1905).

4Le domaine du Quenet en Assérac (qui possède la meilleure bibliothèque de la région) assure de substantiels revenus à la famille et le couple ne cessera, sa vie durant, d’aider à l’éducation des jeunes gens de la commune. Imposée à 3102 francs en 1845, la fortune d’Ernest de La Rochette s’élève à 86 552 francs à sa mort en 1876.

5Gérant avec intelligence son patrimoine, il s’intéresse très tôt à la politique car il accède au conseil d’arrondissement le 15 octobre 1845, puis entre au conseil municipal d’Assérac le 30 juillet 1848. Élu conseiller général d’Herbignac le 25 août 1848, Ernest de La Rochette devient président de l’Assemblée départementale le 5 octobre 1848 pour un an. Lors de son allocution inaugurale, il rend hommage au suffrage universel : "Vous êtes la grande voix du Peuple qui fait connaître ses besoins, ses vœux, ses intérêts moraux et matériels…".

6Au printemps 1848, Ernest de La Rochette, soutenu par L’Étoile du Peuple, journal dirigé par son frère Charles-Emerand, avait été élu à l’Assemblée constituante. Reconduit le 13 mai 1849 avec 70 337 voix, il s’impose comme le représentant du parti légitimiste face à la fois aux constitutionnels et aux démocrates avancés. Membre de la majorité royaliste, il s’intéresse au commerce et à l’industrie tout en soutenant les pétitions favorables à l’Église et à la Papauté. Dans son département de Loire-Inférieure, il fait adopter par le conseil général, le 1er septembre 1851, un vœu demandant la révision de la constitution républicaine du 4 novembre 1848, afin que "la France puisse revenir à la monarchie traditionnelle et héréditaire".

7En décembre 1851, le parlementaire est arrêté à la mairie du Xème arrondissement où il proteste avec d’autres représentants contre le coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte qui a dissous l’Assemblée nationale. Sous l’Empire, il rédige plusieurs notes sur le sel et les marais salants de l’Ouest. Outre ses activités politiques liées au comte de Chambord, Ernest de La Rochette tente de lancer une compagnie d’assurances, La Bretagne. L’expérience s’achève devant les tribunaux et, après avoir perdu 25 000 francs, il revient à l’agriculture.

8Alors qu’il n’occupe plus aucun mandat depuis 1852 après son refus de prêter serment au Prince-Président, il est candidat le 8 février 1871 sur "une liste présentée sans profession de foi car établie sur la proposition de quelques-uns de nos amis", écrit L’Espérance du Peuple" (1er mars 1871). Avec 64 214 voix, Ernest de La Rochette redevient représentant de la Loire-Inférieure à l’Assemblée nationale.

9Les légitimistes vont le porter à la présidence du groupe des chevau-légers, pôle de résistance du parti monarchiste et de la contrerévolution. Mais La Rochette va passer un compromis avec la gauche pour établir la liste des parlementaires destinés à devenir sénateurs inamovibles. Il a expliqué son attitude par la haine provoquée chez lui par la révolution de Juillet et nourrie durant toute sa vie contre les orléanistes, adversaires du comte de Chambord.

10 Ernest de La Rochette est élu le 11 décembre 1875 par 357 voix sous les applaudissements de la gauche et les huées de la droite. Il meurt le 20 janvier 1876 à Nantes.

Bibliographie

Sources et bibliographie :

État-civil de Sainte-Pexine, Luçon, Assérac, Nantes ; minutes de Me Reliquet ADLA 4 E 41 ; A.D. Loire-Atlantique : mutations par décès 1876 1 Q 3335 ; conseil général de Loire-Inférieure 1 M 132 / 3 M 48 ; municipalité d’Assérac 1 M 228 ; A.D. Vendée : conseillers de la Préfecture de Vendée 2 M 24 ; recensement classe 1842 AMVN H1 173 ; L’Espérance du Peuple AMVN Presse 9 ; collection de faire-part B.M. Nantes ;

Vicomte de Meaux, Souvenirs Politiques, 1871-1877, Paris, Plon-Nourrit, 1905, 422 p ; Th. Le Gourièrec, Silhouettes de sénateurs et candidats sénateurs de Loire-Inférieure en 1876, Nantes, P. Plédran, 1876, 96 p.

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