Lalanne Léon Louis Chrétien 1811-1892
p. 368-370
Texte intégral
1Né à Paris le 3 juillet 1811, il est déclaré à l’état-civil sous le nom de Léon Louis Chrétien, fils de François Julien Louis Chrétien, docteur en médecine, et de Aurore Marie Damaris Langlois, son épouse. Ce n’est qu’en 1820 que le nom de Lalanne est ajouté à celui de Chrétien en vertu d’un jugement du tribunal civil de la Seine du 21 avril 1820. Durant toute sa vie, le sénateur a privilégié le nom de Lalanne, qui, en fait, est celui de la première épouse de son père, à celui de Chrétien qui est le véritable patronyme de ce dernier. En effet, tous ses écrits, qu’ils soient administratifs, techniques, scientifiques ou politiques, sont signés Léon Lalanne ; le nom de Chrétien, lorsqu’il est mentionné dans des documents est assimilé à un prénom, ou du moins figure entre parenthèses, avec ses prénoms Léon Louis et après ceux-ci, suivi parfois d’un trait d’union. Son frère Ludovic, ancien élève de l’École des Chartes, et ses fils, Paul, ingénieur des Mines, et Albert, architecte, sont connus sous le nom de Lalanne alors que c’est le patronyme Chrétien-Lalanne qui figure sur les actes d’état-civil les concernant.
2Admis à l’École polytechnique en 1829, puis à l’École des ponts et chaussées en 1831, Léon Lalanne est affecté successivement comme ingénieur des ponts et chaussées dans les départements des Ardennes, de la Manche, des Côtes-du-Nord et de Seine-et-Oise de 1832 à 1843. Au cours de cette période il consacre une partie de son temps à des recherches dans le domaine du calcul des terrasses et du mouvement des terres pour les projets routiers. Il conçoit ainsi et publie des tables pour abréger les calculs relatifs à la rédaction des projets de route ainsi que des graphiques des superficies de déblais et de remblai pour les routes et chemins. En 1839, il est autorisé, en plus de ses fonctions, à collaborer avec l’ingénieur Arnoux, ancien élève de l’École polytechnique, pour la réalisation du chemin de fer de Sceaux qui nécessite des solutions inédites du fait du relief particulier du site. Peu de temps après, le 18 février 1841, il épouse la fille de cet ingénieur. En novembre 1843, il est nommé secrétaire de la section chemins de fer du conseil général des ponts et chaussées. Il continue ses recherches sur les méthodes et appareils susceptibles de simplifier le travail des projeteurs et publie divers ouvrages ou rapports sur les tables graphiques, règles à calcul et machines à calcul.
3Sous la Seconde République, il participe à la vie politique. Au moment de la dissolution des Ateliers nationaux en 1848, il est chargé de remplacer leur directeur, Émile Thomas. L’insurrection de Juin ne l’empêche pas de remplir ses fonctions et, même à travers les barricades, les journées sont payées aux ayant droits. Chef de bataillon de la 11ème légion de la Garde nationale de Paris, il est inculpé, le 29 juin 1849, de complot contre le Gouvernement pour avoir pris part au mouvement du 13 juin consécutif à l’intervention de l’armée française à Rome. Après perquisition à son domicile, il est incarcéré au dépôt de la Préfecture de police puis à la Conciergerie. Placé en disponibilité, il reçoit deux tiers de son traitement. Mais le 5 août, la Chambre du conseil du tribunal de la Seine déclare qu’il n’y a pas lieu de poursuivre contre lui.
4En 1852, le gouvernement français ayant passé un accord avec la principauté de Valachie, il accepte de se rendre à Bucarest pour "prendre la direction de tous les travaux qui ressortissent, en France, du corps des ponts et chaussées". Il se heurte à d’énormes difficultés dans ses nouvelles fonctions, car le personnel technique a un très bas niveau de connaissances. Lors de l’invasion de la Valachie par les troupes russes le 2 juillet 1853, il refuse de céder aux ordres des autorités militaires russes et, les consulats de France et d’Angleterre ayant amené leur pavillon le 9 août, il quitte Bucarest le 14 août 1853. Il rapporte de son séjour en Valachie, et d’un voyage qu’il a effectué en Autriche, divers documents qui lui ont été demandés par l’administration française.
5A partir de 1853, à l’exception d’une autre mission dans les provinces danubiennes en 1855, il est chargé de l’étude et du contrôle des travaux de diverses lignes de chemin de fer. En 1856, il est autorisé à prendre la direction des travaux du chemin de fer de l’Ouest de la Suisse, et en 1859, celle du chemin de fer du Nord de l’Espagne et de Cordoue à Séville.
6En novembre 1871, les villes de Pest et de Buda, ayant ouvert un concours pour un projet de règlement et d’embellissement, le désignent comme l’un des deux membres étrangers de leur jury du fait de ses compétences techniques. Nommé inspecteur général en 1867, il devient directeur de l’École des ponts et chaussées en 1877 et, en 1879, fait partie d’une commission technique chargée de l’examen des questions relatives à la délimitation des frontières fixées par le traité de Berlin et notamment à la construction d’un pont à l’est de la Silistrie. Promu grand officier de la Légion d’honneur en janvier 1881, il prend sa retraite le 3 juillet 1881 à l’âge de 70 ans et devient président de la Compagnie des omnibus de Paris.
7Lors de l’élection organisée pour le remplacement du général Chanzy, décédé, il est élu sénateur inamovible le 8 mars 1883. Il siège dans cette assemblée à la Gauche républicaine, il vote pour le divorce et le Tonkin, contre l’expulsion des princes. En 1884, lors de la discussion en première lecture du projet de loi sur les syndicats professionnels, Léon Lalanne, dans son discours au Sénat, cite le rapport qu’il a rédigé le 18 juin 1848 comme secrétaire de la commission des Ateliers nationaux, et qui, remis par cette commission au ministre des Travaux publics de l’époque, ne fut pas distribué aux membres de l’Assemblée, le Gouvernement provisoire ayant trouvé son contenu trop socialiste. Lorsqu’on 1887 paraît l’Histoire de la Seconde République de Pierre de La Gorce, il estime que l’auteur porte un jugement erroné sur sa gestion de directeur des Ateliers nationaux et fait insérer dans le journal le Temps un article de protestation. Il publie également sur le même objet une plaquette intitulée Rectification historique sur les ateliers nationaux.
8A partir de 1889, la maladie contraignit Lalanne à réduire, puis à cesser sa participation aux travaux du Sénat. Cinq jours après le décès de son épouse, il meurt le 12 mars 1892, dans sa 81ème année, à son domicile, 116 rue de Rennes à Paris. Son éloge funèbre est prononcé par le président Le Royer.
Bibliographie
Sources et bibliographie :
A.D. Paris, acte de naissance (V 2E 1433), actes de naissance de son frère et de ses fils : Marie Ludovic Chrétien-Lalanne (V 2E1614), Paul Louis Chrétien-Lalanne (V 2E 4329), Albert Alexis Chrétien-Lalanne (V 2E 4686) ; A.N. F14 2254/1, dossier d’ingénieur des ponts et chaussées ; Bulletin des lois 1C/12, p. 284, ord n° 2982.– Carton BB 12-7, dossier B3-7912, changement de nom. Cartons W-580 & W-585, dossier 127, incarcération ; B.N. 4V Pièce 2460. Cie générale des omnibus. Note sur le Métropolitain, 1884, 32 p. ; Sénat, extrait du J.O. des 18 et 29 janvier et du 2 février 1884.
Auteur
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Roger Lévêque
Diplômé de l’E.P.H.E. IVe section
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