1Hyacinthe Corne est né à Arras le 28 août 1802. Son père, François Michel Joseph, était jurisconsulte et avocat à Arras ; conseiller de préfecture, il fut député du Pas-de-Calais. Après avoir été l’élève des jésuites au collège de Saint-Acheul (Somme), il fit des études supérieures à la Faculté de droit de Paris. En 1825, il remporte le prix d’éloquence décerné par la Société d’émulation de Cambrai pour son ouvrage La littérature considérée dans ses rapports avec la constitution politique des différents peuples. Dès 1828 il est secrétaire de la Société d’agriculture, sciences et arts de Douai dont il fut président en 1867. En 1826, il est nommé conseiller-auditeur à la cour royale de Douai. Il épouse Adélaïde Desmoutiers, fille d’un riche cultivateur et raffineur de sucre du Douaisis. Par ce mariage, il devient le beau-frère de Charles Desmoutiers représentant républicain du Nord en 1848, député de Cambrai de 1876 à 1877 et de 1881 à 1885, mais aussi le cousin ou l’allié des Heddebaut, des Legrand, des des Rotours, les grandes dynasties parlementaires du Nord, républicaines sauf ces derniers. Il eut de ce mariage une fille. Par ailleurs son neveu, Paul Corne, fut conseiller général de l’Allier.

2En 1830, Corne est nommé président du tribunal de Lille puis, après la révolution de Juillet, président du tribunal de Douai. En 1837, il est élu député de la circonscription de Cambrai, élection préparée par sa participation au journal Le Libéral de Cambrai comme rédacteur et actionnaire depuis 1834. Il siège à la Chambre sur les bancs de la Gauche dynastique jusqu’en 1846, où il est victime du succès guizotiste aux élections. Après la révolution de février 1848, il est nommé procureur général pour le ressort de la Cour de Douai. Il se heurte au Commissaire de la République, Charles Delescluze qui veut épurer la magistrature. En avril 1848, il est élu représentant du Nord sur la liste des républicains modérés. En juin, Corne est nommé procureur général à Paris et il engage à ce titre des poursuites contre Louis Blanc et Caussidière. Il s’engage en faveur de Cavaignac lors de l’élection présidentielle du 10 décembre, ce qui lui vaut son remplacement par Baroche. En mai 1849, il est réélu représentant du Nord et siège à l’Assemblée législative sur les bancs de la gauche modérée, vote contre l’expédition de Rome et la loi Falloux. Protestataire après le coup d’État du 2 décembre, il est emprisonné quelque temps au Mont Valérien. Il sollicite en vain une présidence de chambre à la Cour de Douai en 1852 et se retire de la vie politique pour se consacrer aux lettres. Il publie divers ouvrages : des biographies (cardinaux Richelieu et Mazarin, 1853), des romans éducatifs (Adrien, lettre d’une mère à son fils, 1856), un recueil de souvenirs (Souvenirs d’un proscrit, 1861 – il s’agit du comte Luczynski, réfugié polonais), un essai (Des Beaux-Arts et de la littérature au point de vue de l’enseignement populaire, 1866). Corne donne à Douai de nombreuses conférences dont une sur la poétesse Desbordes-Valmore qu’il a connue. L’ancien parlementaire ne se laisse pas oublier. La libéralisation de l’Empire le ramène progressivement dans l’arène politique. Il tente d’utiliser la loi de 1868 pour lancer une série de conférences publiques et parait avoir participé à la reconstitution du parti républicain à Douai, jouant un rôle de mentor auprès de la jeune génération. En 1869, il est candidat dans la circonscription du Cambrésis oriental contre le député officiel Seydoux et obtient 38 % des suffrages après une campagne très modérée et une profession dynastique déguisée.

3En 1870, il prône le non au plébiscite du 8 mai par défense du régime parlementaire. Après la révolution du 4 septembre, il freine comme en 1848, la politique d’épuration, sauve le procureur général Morcrette. Son libéralisme lui vaut le privilège d’être le seul candidat de la liste républicaine accepté par les conservateurs lors des élections du 8 février 1871 et une élection de maréchal (93 % des suffrages). Il siège au Centre gauche, vote pour l’abrogation des lois d’exil, la validation de l’élection des princes et le pouvoir constituant de l’Assemblée, est nommé rapporteur du projet de loi sur le recrutement de la magistrature. Après la chute de Thiers, il vote contre le septennat, le gouvernement Broglie, la loi sur la liberté de l’enseignement supérieur. En décembre 1874, Corne est élu président du Centre gauche. On attend de lui qu’il fasse la synthèse entre les différents courants du groupe et qu’il réussisse une ouverture vers le Centre droit. Il prononce en cette occasion un important discours en faveur de l’établissement d’un gouvernement définitif et d’une politique de la main tendue aux monarchistes. Membre de la dernière commission des Trente, il prend une part importante à l’élaboration des lois constitutionnelles tout comme à la discussion de la loi électorale, proposant un amendement sur l’obligation de glisser les bulletins de vote dans des enveloppes, amendement retenu en seconde lecture mais repoussé in extremis en troisième. Corne n’est donc pas cet obscur membre du parti républicain évoqué par Chastenet dans son histoire de la Troisième République et c’est tout naturellement qu’il bénéficie dès le 10 décembre, le premier jour de l’application du pacte entre républicains et légitimistes, des suffrages de l’Assemblée qui l’élit sénateur inamovible au second tour de scrutin par 359 voix, le neuvième des 75. Continuant de siéger au Centre gauche il soutient les ministres républicains, mais vote contre l’article 7 du projet Ferry le 9 mars 1880 et contre le rétablissement du divorce, mais pour les grandes lois sur l’enseignement primaire. Il est un des plus hostiles au sein du Centre gauche au projet de loi sur l’expulsion des Princes en 1883.

4Corne est décédé à Douai le 15 février 1887