1Issu d’un milieu modeste, Jean Didier Baze est né à Agen le 8 janvier 1800. Seul fils de Clément Baze, ouvrier graveur sur bois, et de Radegonde Dorothée Godoffre, il a une sœur aînée et deux sœurs cadettes. Après des études de droit à Paris, il revient dans sa ville natale où il se fait inscrire au barreau en 1821. Très vite, sa remarquable éloquence le fait remarquer. Il devient un des meilleurs avocats de la ville et il est à deux reprises bâtonnier de l’Ordre.

2Il mène une opposition discrète à Charles X et passe pour un champion des idées libérales. Après les Trois Glorieuses, sa nomination comme adjoint au maire d’Agen en 1830 marque le début d’une très longue carrière politique. Mais il démissionne très vite. Cependant, il exerce longtemps sous la Monarchie de Juillet les fonctions de commandant de la Garde nationale d’Agen. Un temps revenu à l’opposition, Baze se rapproche du régime de Louis-Philippe après le passage du duc d’Orléans à Agen en 1839. En 1842, le bâtonnier Baze, conseiller municipal d’Agen, consolide sa position sociale en épousant Adélaïde Dowling, fille d’un riche négociant de Bordeaux et nièce du préfet de Lot-et-Garonne, Jean-Adrien Brun.

3Cependant, en 1848, il accueille favorablement la révolution de Février. Baze s’agite dans la perspective des élections : sa place à la tête de la Garde nationale le pousse au premier rang. En avril, son intense activité est récompensée : les électeurs de l’arrondissement d’Agen le désignent comme membre de l’Assemblée constituante. Élu en quatrième position sur neuf, avec 48,1 % des suffrages, il consolide son implantation locale en se faisant élire conseiller général en août 1848. A Paris, Baze constitue une des personnalités du comité de la rue de Poitiers dont il est vice-président. Bien qu’il ait souhaité que le comité n’ait pas de candidat officiel pour l’élection présidentielle de décembre, Baze soutient Louis-Napoléon Bonaparte. En 1849, Baze préside le comité central départemental de Lot-et-Garonne fondé le 24 mars par le parti de l’Ordre et soutenu par le Journal du Lot-et-Garonne : il y est un des chefs royalistes orléanistes. Le 13 mai, il est réélu mais au cinquième rang seulement (sur sept). En Lot-et-Garonne, sa position apparaît de plus en plus forte et il préside désormais le conseil général. A Paris, il est élu questeur par ses collègues et se fait le défenseur acharné des pouvoirs de l’Assemblée, surtout quand il sent l’imminence d’un coup d’État du Président. Baze est un des auteurs de la proposition des questeurs présentée le 6 novembre 1851 et destinée à empêcher les menaces napoléoniennes. C’est pourquoi il est arrêté dans la nuit du 2 décembre : la force utilisée dans l’enceinte du Palais Bourbon où il loge constitue un des premiers actes illégaux contre l’Assemblée.

4Aussitôt, le député de Lot-et-Garonne est conduit à Mazas puis à Ham. Il est expulsé finalement de France et reste en exil en Belgique, à Liège, durant presque huit années. Baze refusa en effet la grâce obtenue par son compatriote le poète Jasmin et attendit l’amnistie générale d’août 1859 pour rentrer en France.

5Il s’inscrit au barreau de Paris, reprenant une profession jamais abandonnée, même en exil. Mais le retour s’accompagne rapidement d’une reprise des activités politiques dans le Lot-et-Garonne où il n’habite pourtant plus, mais où il a gardé beaucoup d’amis et de relations grâce à sa longue carrière d’avocat à Agen.

6Aux élections générales de 1863, il se présente dans la première circonscription d’Agen contre le député sortant et maire d’Agen, le bonapartiste Noubel qu’il ne parvient pas à battre. Mais, aux élections cantonales de juin 1864, il prend sa revanche, bat dans le deuxième canton d’Agen, son adversaire de la veille, Noubel, conseiller sortant. Rentré au conseil général il y est désormais le seul opposant. Il affronte à nouveau Noubel lors des élections législatives de 1869, sans succès.

7La chute de l’Empire lui permet un nouveau succès électoral : en février 1871, il figure sur la liste conservatrice de Lot-et-Garonne aux côtés de royalistes et de bonapartistes. Cela lui permet d’être élu, troisième sur six, comme représentant à l’Assemblée nationale. Aussitôt, il retrouve la questure abandonnée de force vingt ans avant. Ses fonctions lui créent bien des démêlés avec les journalistes. L’un d’entre eux en a laissé un portrait très vif décrivant Baze comme "le plus grincheux de tous les questeurs présents et à venir" et comme "l’homme le plus grincheux comme le plus irascible de France, de Navarre… et d’Agen !".

8Baze oscille désormais entre le Centre droit et la droite orléaniste. Ainsi, il s’abstient lors du vote sur la démission de Thiers en 1873, vote contre l’amendement Wallon puis pour l’ensemble des lois constitutionnelles.

9Élu sénateur inamovible le 11 décembre 1875 par 345 voix sur 690 votants, il est constamment réélu questeur jusqu’en 1880 et siège au Centre droit. Son activité politique a été fort réduite durant les cinq années passées au Sénat pour cause de maladie. Baze fit, selon la presse républicaine du Lot-et-Garonne, "vers la fin de sa vie un retour vers les idées libérales de sa jeunesse".

10Quand Baze meurt, âgé de quatre-vingt ans, le 15 avril 1881 à Paris, il laisse peu de biens à sa veuve et à ses deux filles. Après des obsèques religieuses, l’inhumation eut lieu au cimetière Montparnasse. La presse voulut oublier les accusations de "girouette” qu’elle avait souvent proférées contre Baze. L’Indépendant du Lot-et-Garonne écrivit : " Il sera beaucoup pardonné à M. Baze à cause de sa résistance au Deux décembre et des idées libérales qu’il soutint au commencement et à la fin de sa vie". Quant aux sénateurs, il leur est rappelé "les services que M. Baze a rendu au régime parlementaire. Son nom est synonyme de la défense des prérogatives des Chambres. Il les a toujours défendues avec le plus grand courage".