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    Plan détaillé Texte intégral Les activités bancairesLe Couteulx et l ’EspagneLes Le Couteulx et les Etats-Unis d’AmériqueLes prises de contrôle des sociétés de commerceLes Le Couteulx manufacturiers Notes de bas de page

    Capitalisme et catholicisme dans la France moderne

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Chapitre VI. Naissance d’une banque d’affaires

    p. 161-224

    Texte intégral Les activités bancairesLe Couteulx et l ’EspagneLes Le Couteulx et les Etats-Unis d’AmériqueLes prises de contrôle des sociétés de commerceLes Le Couteulx manufacturiers Notes de bas de page

    Texte intégral

    J’ai pour maxime : quand un cochon est bien gras il faut le tuer et en prendre un maigre pour l’engraisser en place de celui qu ’on a mis dans le pot.
    Alexandre Marcet de Genève à Le Couteulx et Cie de Paris,
    29 septembre 1784.

    1Des dernières années de la décennie 1770 jusqu’aux premières de la Révolution française, une multitude d’événements tant politiques qu’économiques vont bouleverser les conditions dans lesquelles agissent les maisons de commerce et de banque françaises. Ce sont moins les difficultés de l’agriculture qu’on a d’ailleurs tendance à relativiser aujourd’hui pendant l’inter-cycle 1778-1792 qui ont eu des conséquences néfastes sur les milieux d’affaires que la guerre d’indépendance américaine. Cette dernière provoque des difficultés financières plus que sérieuses sur la France, mais d’ailleurs également sur les autres pays en lutte comme les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Espagne. Dans le royaume de Louis XVI, un banquier étranger d’origine genevoise, Jacques Necker devenu directeur général du Trésor en 1776 entreprit de financer le conflit par le biais de nombreux emprunts d’un montant supérieur à cinq cents millions de livres et parvint à les placer en grande partie chez ses compatriotes genevois. En Espagne, la monarchie alliée de la France fit aussi appel à un étranger, le Français François Cabarrus, qui choisit de s’appuyer sur l’émission de papier-monnaie, solution adoptée également par les Insurgents américains. Une fois la paix signée en 1783, le problème qui se posait à tous les ex-belligérants, consistait à réduire l’endettement considérable provoqué par le conflit, ce qui pouvait devenir un nouveau champ d’action pour les hommes d’affaires. Ces derniers devaient également s’apprêter à tenir compte des changements d’une grande importance de l’économie mondiale : naissance des États-Unis d’Amérique qui pouvaient devenir un partenaire commercial de choix pour la France, accentuation de la Révolution industrielle en Angleterre dans les années 1780, fin du monopole commercial de Cadix et arrivées massives de métaux précieux dans différents ports espagnols en provenance de l’Amérique espagnole, forte montée du commerce colonial français une fois la paix revenue et jusqu’au début de la décennie 1790.

    2Dans ce contexte nouveau, on peut s’interroger sur ce que fut le comportement de Le Couteulx et Cie, toujours considérée comme une des premières sociétés françaises. Plusieurs interprétations ont été avancées par des historiens. Pour Guy Richard, les Le Couteulx en tout cas la branche rouennaise, devenue une famille parlementaire, l’un d’entre eux Thomas-Barthélemy occupait depuis 1767 la fonction de Premier président de la Cour des Aides de Normandie, auraient quitté le commerce et seraient devenus des capitalistes nobles plaçant une partie de leurs avoirs dans des sociétés par actions1. Le point de vue de H. Lüthy est différent. Selon l’auteur de la Banque protestante en France, les grandes dynasties catholiques à l’instar des Laborde, des Magon ou des Le Couteulx étaient avant même l’arrivée de Necker à la direction du Trésor « bien plus proches de la finance que de la banque au sens ordinaire ». Cette orientation fut selon lui encore plus nette sous le ministère Calonne ou les Le Couteulx et les Magon organisèrent l’importation de quantités considérables de piastres en liaison avec la Banque Saint-Charles de Madrid. Et, pour H. Lüthy, cette démarche ne pouvait s’expliquer que par l’appartenance des Le Couteulx au catholicisme alors que les protestants demeuraient fidèles à leurs engagements dans le domaine bancaire avec comme principaux partenaires leurs homologues de l’Angleterre et des pays du Nord de l’Europe2.

    3Cette interprétation fut reprise en partie par Ch. Carrière même s’il ne mettait pas en avant la religion des Le Couteulx. Pendant longtemps les Le Couteulx avaient refusé de manier « l’argent public » et de s’associer à tous ceux qui traitaient avec le roi. Mais à partir du ministère Necker, Le Couteulx et Cie sous l’impulsion de ses nouveaux dirigeants Jacques-Jean et Barthélemy-Jean-Louis prit un virage où « la finance l’emporta vraiment ». Ses membres entrèrent dans la Caisse d’Escompte fondée en 1776, dirigèrent les affaires d’Espagne telles la spéculation sur les actions de la Banque Saint-Charles ou le trafic des piastres pour le compte du pouvoir royal. En conséquence, leurs opérations avec une maison de négoce Roux frères de Marseille diminuèrent considérablement3.

    4Cette interprétation n’était pas partagée, loin s’en faut, par une partie de la famille Le Couteulx. En effet, pendant la Terreur alors que plusieurs dirigeants de Le Couteulx et Cie étaient emprisonnés, deux de leurs épouses imprimèrent un opuscule signé « au nom des Lecouteulx leurs femmes » et qui d’après elles leur avait été « soufflé » par leurs maris4. Non seulement les Le Couteulx n’étaient pas des financiers mais loin de s’être occupés de banque, « ils étaient négociants et manufacturiers ». Pour étayer ces affirmations, les femmes Le Couteulx décrivaient les opérations des différentes branches de Le Couteulx et Cie. Celle de Paris conduisait plusieurs établissements utiles à l’industrie nationale tandis que celle de Rouen animée par Antoine Le Couteulx de Verclives avait pour principal objectif de pourvoir en matières premières ainsi qu’à leur procurer des débouchés aux manufactures de la « ci-devant » Normandie, l’établissement de Cadix avait pour but de « rivaliser avec le commerce anglais par l’écoulement des produits des manufactures nationales ». De plus, en 1785, Le Couteulx et Cie avait établi au Havre un établissement destiné à « étendre le commerce des colonies françaises en direction des manufactures ». Puis après avoir tenté de démontrer que les Le Couteulx étaient de vrais négociants, elles précisaient qu’ils étaient aussi des industriels puisqu’ils possédaient une manufacture d’huile de poisson à Saint-Sever faubourg de Rouen, une manufacture de tabac à Morlaix, une fonderie pour le laminage de cuivre à Romilly-sur-Andellc5.

    5Que les femmes Le Couteulx aient affirmé que la firme ait cessé de se mêler d’opérations de banque s’explique sans difficulté. A partir du mois de septembre 1793, moment où la Terreur fut mise à l’ordre du jour, tous les banquiers furent considérés comme des suspects et beaucoup furent emprisonnés. Le système de défense des Le Couteulx devenait aisé à comprendre. Affirmer avoir abandonné les activités bancaires pour se consacrer exclusivement au négoce et à l’industrie constituait une solide argumentation destinée à obtenir leur libération. En réalité, il n’en était rien mais tout ce qu’avaient affirmé les femmes Le Couteulx n’était pas faux. A partir de la Guerre d’indépendance américaine, Le Couteulx et Cie avait considérablement étendue ses opérations dans le domaine de la banque, de la finance, du négoce et de l’industrie en s’appuyant souvent sur des étrangers d’origine suisse, anglaise, espagnole et américaine.

    6 Vers 1778, la maison parisienne était dirigée par Jacques-Jean Le Couteulx du Molay qui avait fait ses premières armes à Cadix et par l’avocat Jean-Baptiste-Etienne Le Couteulx-Desmuttes venu de Rouen après la disparition d’un des principaux dirigeants de l’entreprise Jean-Jacques-Vincent. Celle de Rouen était prise en charge par Antoine IV Le Couteulx devenu seigneur de Verclives et par Antoine-Louis qui avait également passé ses premières années de négociant à Cadix. Ils avaient été au début des années 1770 appuyés par Jean-Barthélemy Le Couteulx fils de Thomas-Barthélemy Le Couteulx premier président de la Cour des Aides de la Normandie depuis 1767. Jean- Barthélemy avait lui aussi débuté sa carrière à Cadix mais il dut résister à son père qui aurait souhaité qu’il quittât le monde du commerce pour celui de la magistrature6. Demeurant fidèle à ses premiers engagements, Jean-Barthélemy Le Couteulx, lorsqu’il revint à Rouen au début des années 1770 devint un des associés de la branche rouennaise. Après son départ du port andalou, les principaux dirigeants de la firme furent les deux fils de Jean-Jacques-Vincent, Barthélemy-Jean-Louis, né en 1752, et Laurent-Vincent, né en 1754, appuyés par Pierre-Louis-Martin Desportes et Pierre Lenormand le neveu de l’un des fondateurs de la société gaditane. À la fin de la décennie 1770 et au début de celle de 1780, le renouvellement de la direction se fit sans difficulté. En 1779, Antoine-Louis qui était allé prendre les eaux dans les Pyrénées mourut à Nîmes tandis qu’en 1781 à cause de son âge Jean Baptiste Étienne (il avait plus de cinquante-cinq ans) quittait la société pour regagner Rouen. À cette date, Barthélemy-Jean Louis qui avait quitté Cadix en 1779 et s’était marié à Rouen était déjà un associé de Le Couteulx et Cie de Paris. Il fut rejoint en 1784 par son frère Laurent-Vincent qui après avoir épousé une fille du banquier parisien Louis Pourrat, prit également en mains la branche parisienne. Ils furent remplacés à Cadix ainsi que Pierre Lenormand qui avait été mis à la tête d’une société commanditée par François Cabarrus et Simon-Emmanuel-Julien Lenormand, ancien associé de la firme et revenu en France, par Antoine-Hilaire Brochant et Jean-Baptiste Lemoine, deux parents éloignés des Le Couteulx, Étienne Le Couteulx-Desmuttes, le fils de l’avocat et dirigeant de Le Couteulx et Cie tandis que Pierre-Louis-Martin Desportes demeurait en place et comme il était considéré comme le principal associé-gérant de la maison de commerce de Cadix, cette dernière changea de raison sociale et devint Le Couteulx Desportes et Cie.

    7Le dernier changement eut lieu à la veille de la Révolution. À la suite de dissensions entre Jacques-Jean Le Couteulx du Molay et Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx et leurs autres associés probablement dues aux avances considérables qu’ils avaient accordées à la manufacture d’indiennes de Beauvais, Garnier Danse et Thévard, Le Couteulx et Cie de Paris fut donc dissoute avant terme le 24 décembre 1788. Les deux susnommés la quittèrent tandis que Jean-Barthélemy venu de Rouen et installé rue Montorgueil depuis le début de l’année y entrait. En 1790, Jean-Barthélemy et Laurent- Vincent quittèrent la maison de la rue Montorgueil qui appartenait à Jacques-Jean et établirent leur siège place Vendôme dans l’Hôtel de Louis Pourrai, le beau-père de Laurent-Vincent, à proximité de Magon de la Balue et de Simon-Emmanuel-Julien Lenormand.

    8On manque de précisions sur la branche rouennaise dans les dernières années de l’Ancien Régime. Elle était toujours située rue aux Ours, maison comprenant deux corps de logis qui longtemps appartient aux associés de la société en indivis jusqu’à ce qu’en 1783 elle fut mise en vente aux enchères et rachetée par Antoine IV Le Couteulx de Verclives pour 105 000 1t.7. À la mort de Antoine-Louis, elle comprenait cinq commis parmi lesquels Etard l’aîné joua un rôle de plus en plus important surtout après le départ pour Paris de Jean-Barthélemy car Antoine IV Le Couteulx de Verclives né en 1720 était fort âgé et son fils Barthélemy-Pierre né en 1768 qui devait le remplacer était encore bien jeune.

    9Grâce au récit de Jean-Conrad Hottinguer, un jeune Suisse venu travailler à partir de 1784 chez Le Couteulx et Cie de Paris avant de se mettre à son compte et de devenir un des plus grands banquiers parisiens, la branche parisienne est un peu mieux connue même s’il faut parfois considérer avec précaution certaines de ses affirmations comme celle où il confond Jean-Barthélemy à cette date toujours présent à Rouen et Barthélemy-Jean-Louis revenu de Cadix à la fin de la décennie de 1770 et qui est sans doute celui qui entraîne la société dans de nouveaux chemins8.

    10Lorsqu’il pénètre au siège de la société Le Couteulx et Cie rue Montorgueil, Jean-Conrad Hottinguer est reçu dans le bureau de « Jean-Barthélemy Le Couteulx de Canteleu (sic) » un des chefs de la maison pour qui l’armement et le commerce des Indes sont primordiaux. Il le considère comme un « être superficiel » mais son premier contact avec lui est « bon » et il en va de même avec le frère de ce dernier, Laurent-Vincent. En revanche le troisième dirigeant Jacques-Jean Le Couteulx du Molay lui est peu sympathique parce qu’il n’apprécie pas « l’origine étrangère » du nouveau commis, de surcroît fils de négociant.

    11Les commis seraient fort nombreux dans la maison Le Couteulx et Cie puisque Jean-Conrad Hottinguer en recense vingt-cinq, soit cinq fois plus qu’à Rouen. Parmi eux figurent un chef de bureau d’origine hollandaise, un certain Le Comte, le caissier Philippe-Louis-Paul Gorlay qui jouera de plus en plus un rôle important dans la société et le teneur de livres Barthélemy Cabarrus, parent du fondateur de la Banque Saint-Charles.

    12Jean-Conrad Hottinguer qui ajoute bientôt à sa fonction de commis celle de secrétaire particulier est fréquemment convoqué dans le salon vert pâle du siège social où il s’entretient avec l’un ou l’autre des associés. Il y assiste parfois à des empoignades entre Barthélemy-Jean-Louis qui entend répondre à Mirabeau qui a attaqué la politique de soutien de Le Couteulx et Cie à la banque Saint-Charles en vendant ses actions ou qui met en cause les dépenses somptuaires de Calonnc et son frère (sic) Le Couteulx du Molay homme qualifié de rustre, mais d’un « solide bon sens » qui, en présence du personnel, lui fit alors « une algarade » pour l’empêcher d’écrire son opuscule9.

    13L’annulation du marché à terme des activités décidé par Calonne en 1785 qui provoqua beaucoup de travail pour les commis de Le Couteulx et Cie permit à Jean Conrad Hottinguer de mettre au jour le système considéré par lui comme dérisoire de la comptabilité de la maison et à installer un peu de clarté dans ses chiffres. Selon lui « les livres s’avèrent dans le plus grand désordre. Depuis de longues années, personne n’établissait de bilan. Cela paraissait même impossible à réaliser étant donné la manière dont les comptes étaient tenus ». Soi-disant établis en partie double, ils étaient toujours d’après Jean-Conrad Hottinguer « inscrits de manière très primitive, chacun des dirigeants faisant des opérations « par notes séparées » pour les reporter10.

    14Les trois associés demandèrent à leur commis de perfectionner leur comptabilité. En premier lieu, il établit un livre auxiliaire contenant l’ensemble des comptes-courants tandis qu’à l’instance de Jacques-Jean Le Couteulx du Molay il institue le bilan de la société tout en exigeant que chacun vienne pointer le Grand-Livre, ce que Jacques-Jean Le Couteulx fit scrupuleusement tous les matins. Grâce à cette modernisation, Le Couteulx et Cie put envoyer à leurs correspondants « au bout de quelques mois des comptes réguliers, clairs et véritables », ce qui d’après Jean-Conrad Hottinguer n’était pas le cas auparavant. Après cette première remise en ordre qui lui valut les félicitations des dirigeants de la Banque de Saint-Charles et de Guerlan et Scherer (sic) (il s’agit de la maison lyonnaise Finguerlin et Scherer, il passa à la confection du Grand-Livre et parvint enfin à établir « une comptabilité en véritable partie double ». Jean-Conrad Hottinguer déclare par ailleurs qu’il a été le seul des commis à agir avec efficacité. Cela aurait été la conséquence du choix de Jacques-Jean Le Couteulx du Molay qui, non seulement détestait les étrangers, mais estimait que les seuls valables devaient être les fils de ses domestiques à qui il demandait seulement de savoir lire, écrire et chiffrer. Il y en aurait d’autres toujours selon Jean-Conrad Hottinguer qui auraient considéré le mécanisme des affaires comme indignes d’eux et se seraient bornés « à écrire des vers ». Bref, sur les vingt-cinq commis « bien peu travaillent » d’après ce que dit le jeune Zurichois.

    15Il est possible que ce soit les conditions dans lesquels œuvraient les commis qui ont poussé Jean-Conrad Hottinguer à quitter Le Couteulx et Cie en 1786. Les dirigeants de la société auraient pourtant tenté de le conserver sinon en lui proposant de devenir associé car ils n’entendaient faire appel pour cette situation qu’à des membres de leur famille, mais en lui confiant un poste de « directeur ». Le jeune homme refusa tout en les remerciant. Pour lui « le désordre régnant dans la maison » et le caractère de chaque associé en faisait « un ensemble impossible à mener »11. Il est vrai qu’au même moment un consortium de maisons zurichoises lui confia la direction d’une maison de banque parisienne en association avec Denis de Rougemont sous la raison sociale de Rougemont Hottinguer et Cie12.

    16Dans son journal, Jean-Conrad Hottinguer énumérait une partie des activités de Le Couteulx et Cie. Depuis 1782, elle se serait orientée dans des affaires avec l’Amérique en devenant concessionnaire des tabacs de Virginie, financerait les fonderies de cuivre de Romilly-sur-Andelle, entendrait commanditer la fabrique d’indiennes de Garnier Danse Thévart et Cie de Beauvais, s’occuperait de placer dans le marché français les actions de la Banque Saint-Charles13.

    17Les opérations menées par Le Couteulx et Cie ne sont pas seulement celles qu’indique leur ancien commis. Ils n’ont en aucune façon abandonné le placement des titres de rentes émis par la monarchie et continuent à commercer les lettres de change. En outre, ils se sont lancés dans le commerce négrier et ont tenté de prendre le contrôle de plusieurs sociétés de commerce par actions.

    Les activités bancaires

    18Jusqu’à la Révolution et même au delà, les banquiers comme l’indiquent les Almanachs royaux puis nationaux continuent à faire « le commerce des traites et des remises de place en place ». C’est toujours une des principales opérations de Le Couteulx et Cie. Si on ne peut désormais retrouver dans les minutes notariales du xviiie siècle des listes de lettres de change ou des protêts qui ne sont plus dressés devant notaire, il n’en demeure pas moins que Le Couteulx et Cie, comme ses homologues, continue à s’y adonner avec Roux frères de Marseille, avec Étienne Drouilhet et Cie de Madrid ainsi qu’avec des correspondants d’Italie ou de Suisse. C’est ainsi qu’en janvier 1784, Alexandre Marcet, conseiller d’Etat à Genève lui fait savoir qu’il « a besoin de papier sur Gênes et Livourne ». Il la prie de lui remettre au cours 7 000 à 8000 lt. sur Gênes ou Livourne. « En les recevant, déclare-t-il, je vous ferais des traites sur Paris ». Le 25 janvier 1784, il lui remet « 15 000 lt. sur Rillet et Cie et 13 000 lt. sur Mallet père et fils » tandis qu’en avril 1784 il leur fait parvenir des traites sur Campi, Pache frères, Delessert et Cie, Laval et Wilfelsheim de Paris et Jacques Torras et Cie de Genève14.

    19Il arrive parfois que le montant des traites soit très réduit. C’est le cas quand Le Couteulx et Cie entre en correspondance avec des négociants ou des marchands de province. La maison Hardouin frères de Rouen lui envoie après qu’elle ait accepté sa proposition de faire la négociation de quelques effets que la maison rouennaise avait en portefeuille, huit effets d’un montant total de 2304 lt. soit deux effets sur Verneuil de 182 It. et 271 lt., 2 traites sur Illiers d’un montant de 700 lt., une sur Chatcllerault (300 lt.), une sur Montereau (114 lt.), une sur Fontainebleau (337 lt.), une sur la Ferté- Milon (400 lt.). Pourtant, il ne semble pas que Le Couteulx et Cie soit coutumier de ce genre d’opérations puisque Hardouin frères lui écrit le 2 octobre 1783 « Nous pensons bien que vous recevez le papier sur province que pour obliger »15.

    20Une autre activité de la banque consiste à accorder des prêts à des personnes privées ou à des sociétés. En ont bénéficié et cette liste n’est pas limitative, Jean-Alexandre Auger receveur de la Loterie royale de France au bureau de Magny en Vexin qui reçoit 12000 1t. remboursables en douze paiements, le fermier général Jean-Benjamin de Laborde qui obtient un prêt de 31 175 lt., ce qui doit lui permettre de prendre le contrôle d’une entreprise de vente d’un ouvrage intitulé Description générale et particulière de la France. Simon Louis Cazauraire de Saint Paul, codirecteur général de la Compagnie du Nord se voit délivrer 80000 lt. tandis que l’abbé de Barral, grand vicaire de l’archevêché de Lens, qui avait auparavant prêté de l’argent à l’abbé d’Espagnac se fait accorder 3 000 lt. Les prieurs et religieux de Saint-Martin-des-Champs de Paris sont mieux lotis : on leur octroie 30000 lt.16.

    21Un cas un peu particulier est celui du prêt accordé à Louise-Rosalie Dugazon, une actrice en vogue qui reçoit en 1790 12 000 lt. de la part de Jean-François Perrégaux et de Jacques-Jean Le Couteulx du Molay qui a quitté sa maison de banque dix-huit mois auparavant. Mais c’est sans doute à cause des liens intimes qui l’unissent à Madame Dugazon qu’il a accepté de l’aider. Quant au banquier originaire de Neufchâtel, il est depuis longtemps en rapport avec les artistes et les comédiens17.

    22Le crédit le plus élevé accordé par Le Couteulx et Cie eut pour bénéficiaire Pierre-Jacques Grandclos-Meslé, armateur et négociant de Saint-Malo, partenaire habituel de la maison Le Couteulx et qui fut chargé d’organiser de façon quasi officielle à partir des années 1773-1775 des expéditions en direction de la Chine. Par un arrêt du Conseil d’Etat daté du 2 février 1783, il fut autorisé à emprunter pour le compte de Sa Majesté trois millions, « soit à la grosse, soit de tout autre manière » pour être employé à organiser le départ de cinq bâtiments ancrés à Lorient, Saint-Malo et La Rochelle pour la Chine. Pour obtenir ces trois millions, Pierre Jacques Grandclos-Meslé fit appel à deux des plus grandes maisons de banque parisienne, celles de Tourton et Ravel et de Le Couteulx et Cie qui devaient lui fournir chacune 1 500000 lt.18. Il est possible que Le Couteulx et Cie ne se soit pas contenté de recueillir de la part de sous-traitants, en argent et en papier de commerce, la somme demandée par Grandclos-Meslé, mais qu’elle ait contribué personnellement, étant donné ses bonnes relations avec le négociant malouin à fournir une partie des 1 500000 lt.

    23Déjà habitués au cours du xviiie siècle au placement des titres de rentes, les Le Couteulx vont bénéficier de la politique financière de la monarchie française à partir des dernières années de la décennie 1770. Depuis 1770, date au cours de laquelle l’abbé Terray contrôleur général des Finances avait émis un emprunt, le gouvernement français, pendant plusieurs années, renonça à y faire recours. Sous le ministère Turgot, une politique budgétaire avait été menée visant à limiter les dépenses de l’Etat, ce qui devait lui permettre de ne plus emprunter. L’arrivée en 1776 à la tête de la direction des Finances de Jacques Necker modifia du tout au tout les orientations financières du pouvoir.

    24Une des raisons en fut l’implication directe à partir de 1778 de la France dans la guerre d’indépendance américaine. Plutôt que d’augmenter les impôts, Jacques Necker, pour financer le conflit, décida de lancer une série d’emprunts. Pendant son ministère de 1776 à 1781, il emprunta pour le compte du Trésor royal, d’après H. Lüthy, environ 530 millions de livres en rentes viagères19. Ceux qui, après son éviction, se chargèrent de la responsabilité des finances tels Joly de Fleury, Calonne ou Loménie de Brienne adoptèrent les mêmes préceptes. Pour le premier, il fallait continuer à financer la poursuite du conflit, pour ses successeurs, cela permettait de combler le déficit budgétaire fortement accru par le paiement du service de la dette. À la veille de la réunion des États Généraux en 1789, les arrérages des rentes perpétuelles et viagères s’élevaient à 162486000 lt., soit plus du tiers des revenus de l’État20.

    25La monarchie n’était pas la seule à émettre des emprunts. Des membres de la famille royale comme le comte d’Artois ou le duc d’Orléans, des banquiers tels Finguerlin et Schcrer de Lyon en firent de même pour des sommes plus modestes, mais non négligeables.

    26Les banquiers suisses ont constitué les principaux acquéreurs des titres de rentes viagères en mettant au point des mécanismes comme celui des trente têtes genevoises qui permettait de disposer des revenus sur une très longue durée ou de la constitution de sociétés solidaires, ce qui permettait au banquier qui avait acheté les titres de rentes et qui les avait vendus à crédit aux membres de la société solidaire dont il était à l’origine, de récupérer assez rapidement son capital assorti d’un profit élevé. Mais les banquiers de Genève ou de Zurich n’ont pas été les seuls à s’engager dans cette immense opération, plusieurs maisons de banque françaises, pas toujours protestantes et plusieurs riches particuliers ont également figuré parmi les acquéreurs des titres d’emprunts émis par la monarchie française et Le Couteulx et Cie y a pris une place considérable. Il est vrai qu’elle n’avait pas attendu l’arrivée au pouvoir de Necker pour faire le commerce des rentes. Encore en 1775, deux marchands bouchers de Rouen, Godefroy Paul Picard et Jean-Pierre Ledière lui avaient envoyé une procuration pour prendre possession de rentes viagères21. Mais au cours de la dernière décennie de l’Ancien Régime, le volume des rentes qu’elle acheta puis qu’elle plaça, explosa.

    27Il ne semble pas, du moins nous ne possédons aucune documentation sur ce point, que Le Couteulx et Cie ait souscrit aux premiers emprunts lancés par Jacques Necker. C’est avec l’emprunt lancé en 1780 et 1781 pour le compte du comte d’Artois que sa participation apparaît en pleine lumière. Elle s’associa pour l’occasion avec un courtier genevois Michel Audéoud qui fut un des promoteurs des sociétés solidaires. En sa compagnie, Le Couteulx et Cie acheta en 1780 pour 80 000 lt. de rentes viagères émises pour le comte d’Artois par l’intermédiaire de Radix de Sainte-Foy représentant un capital de 880 000 lt. sur trente têtes genevoises. De son côté, à titre privé, Barthélcmy-Jean-Louis Le Couteulx de la Noraye achetait les rentes émises pour le comte d’Artois pour un capital de 440 000 lt. Mais les rentes achetées par Le Couteulx et Cie et Michel Audéoud ne furent pas conservées d’une manière durable. En 1782, elles furent cédées en partie à un groupe de financiers et de négociants de Paris et de province composé de Jean-Louis Julien, Jean-Jacques Lafrète, Simon-Emmanuel-Julien Lenormand, tous trois receveurs généraux des finances, Jean-Henri Gaillard et Étienne Delessert « négociants » à Paris, Pierre-Jacques Grandclos-Meslé négociant à Saint Malo, Jean-Conrad Schalch négociant à Bordeaux et Charles-Antoine Lefebvre et Henry-Victor Lefebvre négociants à Rouen. Chacun d’eux recevait 8000 lt. de rentes viagères, tandis que Michel Audéoud, Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx de la Noraye et Jacques-Jean Le Couteulx du Molay en conservaient le même montant22. Au cours de la même année 1780, Le Couteulx et Cie fit l’acquisition de plusieurs titres de l’emprunt-loterie émis à l’automne 1780. Ils en envoyèrent à un Bruxellois, Urbain Teyniers, qui eut le bonheur de voir qu’après le tirage au sort son billet de loterie n° 113884 lui avait permis de gagner 80 000 lt., ce qui le conduisit à commander à la maison française des titres de rentes de l’emprunt émis en février 1781 d’un montant de 20000 lt.23.

    28En 1781, les deux associés de Le Couteulx et Cie, Barthélemy-Jean-Louis et Jacques-Jean entrèrent avec Michel Audéoud et Jean-François Lavit, les fondateurs, dans une société solidaire, la seconde qui ait vu le jour dans la capitale et qui acheta 30000 lt. de rentes souscrites par De Candolle Lavit et Cie dans l’emprunt de février 178124. On l’a constaté, une partie fut immédiatement replacée par la maison de la rue Montorgueil.

    291782 est une grande année pour les opérations sur les rentes de Le Couteulx et Cie. Au mois de janvier, Joly de Fleury alors contrôleur général des finances émet un emprunt qui intéresse fort la maison Le Couteulx qui aurait demandé quatre millions de livres de capital pour « la ville de Lyon », en réalité pour les maisons de banque lyonnaises Finguerlin et Scherer et Philippe Gaillard Grénus et Cie. En mars 1782, Barthélemy-Jean-Louis achète pour 300000 lt. de rentes viagères au nom des deux banques de la ville de Lyon25. Ensuite est fondée une société solidaire qui rachète la plus grande partie des rentes viagères. Elle comprend une majorité de Lyonnais comme Henri Scherer, Couderc père et fils et Passavant, Eymard frères Scherb et Cie, David Auriol et fils, Fulchcron frères, tous négociants dans la ville du Rhône, Louis-Joseph Baroud et Odile-Joseph Baroud avocat au Parlement et notaire, Jean-Baptiste Deguinin et Pierre Jouly, agents de change. Chacun d’entre eux a acquis une action de 24000 lt. ou de 12000 lt. et tandis que Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx est également détenteur d’une action de 24000 lt. Les membres de la société solidaire ont signé 52 billets au mois de mars et d’avril 1782 qui devaient être payés de 1782 à 1794 aux deux endosseurs, c’est-à-dire les deux maisons de banque Finguerlin et Scherer et Philippe Gaillard Grenus et Cie.

    30Les deux maisons avaient fourni au Trésor Royal le capital de 288000 lt. de rentes viagères. Mais comme elles ne disposaient pas de la somme, elles furent obligées d’emprunter à l’instar de la maison de banque genevoise Candolle Lavit et Cie, deux millions de florins à une maison hollandaise Wilhelm et Jan Willinck d’Amsterdam. Pour être assurées de l’obtenir, elles demandèrent d’être cautionnées par Le Couteulx et Cie de Paris et envoyèrent à cette dernière comme hypothèque trente grosses de contrats viagers que Le Couteulx et Cie déposa chez son notaire habituel Me Monnot en acceptant toutefois de les envoyer à Amsterdam si les prêteurs hollandais souhaitaient que ce nantissement soit confié à un de leurs notaires hollandais26.

    31Les sociétés solidaires ont fortement intéressé les associés de Le Couteulx et Cie qui ont participé à plusieurs d’entre elles. En 1781, Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx, Jean-François Lavit et Nicolas-Marie-Pierre-Toussaint Olive, caissier général des États de Bretagne, après avoir acquis 30000 lt. de rentes viagères de l’emprunt de février 1781 avaient formé une telle société en compagnie de Pierre-Marie Beaugeard, trésorier général des États de Bretagne, Joseph Duruey agent de change, Jean-François de Thellusson, membre du grand conseil de Genève, Louis Pourrai, banquier à Paris, Honoré Chaurand, négociant à Nantes, Jean Achard, citoyen de Genève et négociant à Rouen, Julien-Jean Millet, négociant à Saint Malo. 14 billets furent souscrits à l’ordre de Lavit et étaient payables chez Nicolas Olive. Ils furent effectivement payés en totalité en 178827. En novembre 1782 fut créée une autre société solidaire qui obtint de pouvoir acquérir 100000 1t. en rentes viagères acquises par Jean-François Lavit à qui Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx avait prêté son nom. Parmi les membres de la société outre Simon-Emmanuel-Julien Le Normand, Pierre Lalanne, Nicolas Olive, Claude-Martin de Saint Martin, négociant à Mannheim, Pallard et Cie de Marseille, Jean Lullin négociant à Rouen, Claude-Odile-Joseph Baroud très lié à Le Couteulx et Cie et qui avait ouvert un compte courant dans la banque, on trouvait Antoine IV Le Couteulx de Verclives, l’un des chefs de la branche rouennaise28.

    32La firme Le Couteulx fut également sur les rangs lorsque Calonne décida en 1783 d’émettre un emprunt de 100 M. de lt. en capital dégageant 10,5 millions de lt. de rentes viagères. Barthélemy-Jean-Louis en souscrivit au moins pour un capital de 145 000 1t., mais il est vraisemblable qu’il ne s’agit que d’une partie des acquisitions de Le Couteulx et Cie29. Cette même année, Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx s’engageait dans une nouvelle société solidaire en octobre 1783 en compagnie de Baudart de Saint James, un des plus importants financiers de la fin de l’Ancien Régime, du duc de Crillon, de Jean Payan, un des dirigeants de la maison Payan père et fils de Marseille qui avait été auparavant un des associés de Verduc Kerloguen, Payan et Cie de Cadix et un partenaire habituel de Le Couteulx et Cie, Nicolas Olive. La société solidaire achetait pour 72000 lt. de rentes viagères issues d’un emprunt lancé par Calonne en 1783. Ces rentes viagères avaient d’abord été acquises par un banquier parisien d’origine suisse Pierre-Antoine Lullin qui les avait transportées à un avocat parisien qui n’était que le prête nom de Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx30.

    33Après l’émission à un nouvel emprunt en décembre 1785, Le Couteulx et Cie entra dans une nouvelle société solidaire intitulée « Société pour l’échange des Bulletins ». Il s’agissait de billets de loterie assortis à chaque titre de 1 000 lt. Le capital de la société s’élevait à 12 millions de lt. divisé en 120 sols, chaque sol représentant 100000 lt. La société comprenait douze associés parmi lesquels on notait le marquis de Travanet qui disposait de 36 sols soit 3 600000 lt., Antoine Bourboulon, le trésorier général du comte d’Artois, qui en avait acquis 20. Le Couteulx et Cie en possédait 12 soit 1 200000 lt. mais elle pouvait s’appuyer sur un certain nombre de partenaires comme Louis Pourrat devenu le beau-père de Laurent-Vincent Le Couteulx la Noraye, le frère de Barthélemy-Jean-Louis, Nicolas Olive, Pierre Lalanne, le frère de Paulin Lalanne l’associé de François Cabarrus dans la société Cabarrus et Lalanne de Madrid.

    34D’après H. Lüthy, cette société réalisa des bénéfices importants, peut-être 2400000 lt. soit 20 % en une année mais à la suite des défaillances d’Antoine Bourboulon et de Nicolas Olive la société Le Couteulx et Cie dut racheter leurs sols, ce qui dut diminuer ses profits31.

    35Quel a été le montant total des achats de rentes viagères menés par Le Couteulx et Cie ? En 1791, la société transporte à Jacques-Gilles de la Flechelle, un homme d’affaires très lié à elle pour 649685 lt. 2 s. de rentes viagères moyennant la somme de 6442851 lt. que Le Couteulx et Cie reconnaît avoir reçu de la Flechelle en espèces ayant cours32. Toutefois, on ne saurait affirmer faute d’avoir pu consulter les grands livres et les journaux de Le Couteulx et Cie que cette somme représente la totalité des acquisitions de rentes de la maison de banque de la rue Montorgueil.

    36Que sont devenues les rentes rassemblées par Le Couteulx et Cie ? Une partie est demeurée volontairement ou involontairement entre les mains des associés comme le démontre Barthélemy-Jean-Louis qui déclare que sur 30000 lt. de rentes acquises le 30 août 1785 il en reste 26000 lt. et entre les mains de Le Couteulx et Cie et que sur 146000 lt. transportées à Le Couteulx et Cie en 1786, il en demeure 82 883 lt. 11 d33. Mais une grande partie des titres de rente a pu être placée entre les mains de clients français et étrangers de Le Couteulx et Cie comme le prouvent les centaines de procurations, de certificats de vie, de testaments, d’extraits mortuaires qui sont déposés chez Me Monnot, le principal notaire de Le Couteulx et Cie.

    37L’éventail de la clientèle française est très large. Parmi ceux qui ont acheté des titres de rente, on dénombre des Normands originaires de Rouen, mais également du Havre, de Louviers, de Honfleur, de Caen, de Coutances, des Bretons, les Malouins sont les plus nombreux mais on compte également des Rennais, des habitants de Morlaix, de Lannion, de Brest. D’autres provinciaux ont fait également appel à la maison de la rue Montorgueil, dans le Sud-Ouest, des Bordelais, des Bayonnais, un habitant de Saint-Jean-de-Luz, un autre de Ciboure, il existe également parmi la clientèle provinciale de Le Couteulx et Cie des Languedociens vivant à Toulouse, à Limoux, à Montrejean, des Marseillais, des Lyonnais qui ne sont pas seulement des banquiers puisque parmi eux on note une certaine Jacqueline Barbier « domestique », des habitants de la région de l’Île-de-France établis à Beauvais, à Choisy-le-Roy, des Lillois...34.

    38Nombreux ont été les étrangers qui ont voulu par l’intermédiaire de Le Couteulx et Cie acquérir des rentes françaises. Parmi eux figurent de nombreux habitants des Provinces-Unies originaires d’Amsterdam, de Rotterdam, d’Utrecht, de Deventer, d’Alkmaar, de Breda, de Gorinchen, de Meerssen. D’autres vivent dans les Pays-Bas autrichiens à Bruxelles, Gand, Anvers, Ostende, Herentals ou Namur. Quelques Anglais ont également été intéressés par les emprunts français, il s’agit d’un certain Hanson qui possède pour 12000 1t. en 12 billets sur l’emprunt Calonne de 125 millions de livres, de Milady King de Londres, propriétaire de 162 1t. 14 s. de rentes viagères, de Hannah Mendes Dacosta héritière de Jacob, appartenant à une famille depuis longtemps en rapport avec Le Couteulx et Cie qui détient 1 166 lt. de titres de rentes, de Sara Fernandez Nunez, de Frédéric Sector de Douvres qui possède pour 12000 1t. de l’emprunt-loterie de 1777.

    39La maison Le Couteulx ne pouvait se désintéresser de placer quelques titres en Espagne. Des hommes d’affaires français qui y travaillaient leur ont acheté plusieurs titres à l’instar de Jean Drouilhet, le chef de Drouilhet et Cie de Madrid, d’Antoine Granjean, de Bertrand Lafont, de Jean-Joseph Behic négociants à Cadix, de Pierre-Bernard Cabanon courtier de cette ville ainsi que d’un marchand-perruquier nommé François Coillard. Mais plusieurs Espagnols ne sont pas demeurés indifférents aux revenus que leur procureraient les rentes françaises. Plusieurs négociants en ont acquis comme Juan Vicente Michelena de Saint Sébastien, Josef Antonio de Barbachana de Bilbao ou Angel Vidarte de Pampelune, ces deux derniers étant des négociants en laines, mais on trouve également un conseiller municipal de Cadix, Francisco de Sierra ou un certain Lobo qui, d’après Pierre Bernard Cabanon « possède sous leur direction (celle de Le Couteulx et Cie) un Jolli (sic) capital de viagers sur la tête de sa femme et de ses enfants dont il jouit des rentes »35.

    40En revanche peu nombreux sont les habitants de l’Europe centrale et orientale qui ont fait appel à Le Couteulx et Cie pour obtenir des titres de rentes. Ce sont parfois des Français ou des Françaises qui s’y sont établis comme Elisabeth Guérand qui demeure chez la comtesse Saltikoff à Moscou (dans cette ville un Italien le comte de Maruzzi a également fait appel aux Le Couteulx). Il en est de même de Marie-Louis Mathy demeurant à Dantzig qualifiée de ville polonaise. Et quelques « Allemands » comme « Théodore Jean » de Heerman domicilié à Munster, « Joseph Louis Vincent » Heerman de Cologne, Marie et Gaspard Vogt de Hambourg ont voulu également profiter des émissions d’emprunts émis par la monarchie française ainsi que Charles-Auguste Struensee, premier directeur de la société de commerce maritime et conseiller privé de Sa Majesté le roi de Prusse. D’autres demeurent à Rome ou à Parme.

    41Jusqu’au début des années 1780, Le Couteulx et Cie n’avaient eu que peu de relations avec la Suisse. Leur rapprochement avec ce pays s’explique par les innovations dans le domaine des techniques de rentes mises au point par des Genevois. Ils se sont liés, on l’a vu, dans des sociétés solidaires à Michel Audéoud et Jean-François Lavit, les deux principaux protagonistes de la prise en charge des emprunts français, lesquels ont passé quelque temps à Paris, Garrigue et Salomon, banquiers à Genève, Charles Pictet conseiller d’Etat de la même ville, Rose Wittenbach de Berne ont fait appel aux Le Couteulx pour obtenir des rentes viagères. Mais c’est, semble-t-il, Alexandre Marcet conseiller d’Etat à Genève qui fut leur partenaire privilégié36. En 1784, il écrivait au moins une fois par semaine à Le Couteulx et Cie de Paris. Au début de l’année il leur réclame un montant important de rentes viagères et il ajoute :

    « Je prendrais aux conditions que vous me prescrivez et je m’y conformerai exactement. Je prendrais dis-je la portion de viager que vous voudrez et pourrez me céder. Si cela vous convient diminuez de moitié ou réduisez à 200 (200000 lt.) la partie de viager que je vous ai demandé et comptez que je me ferais un plaisir de vous devoir de devancer les termes que vous m’accorderez »37.

    42Quelques jours plus tard, le 14 janvier il réitère ses demandes réclamant 100000 1t. ou 200000 lt. du capital viager provenant de l’emprunt Calonne de décembre 1783. En fait dans une lettre du 17 janvier, les Le Couteulx lui font savoir qu’il allait être intéressé pour une valeur de 500 000 lt. de rentes viagères avec un paiement par neuvième de la fin janvier à la fin octobre 1784 ce qui le conduit à demander que son collègue et ami Michely de Crest, syndic de la République de Genève à qui il avait communiqué les conditions présentées par Le Couteulx et Cie devienne partie prenante et reçoive une partie du dernier emprunt viager38.

    43Le 10 mai 1784, Alexandre Marcet dans un courrier réclame de nouvelles rentes viagères pour un capital de 100 000 lt. Cet ordre est exécuté dans les jours qui suivent puisque dans une lettre du 17 mai 1784 à laquelle fait référence Alexandre Marcet, Le Couteulx et Cie lui annonce qu’elle a acheté des rentes viagères pour un capital de 100000 1t. à 4 ½ % de perte soit 96125 lt.39.

    44En juin 1784, Alexandre Marcet est informé de la hausse de la valeur des rentes viagères. Il a en dépôt chez Le Couteulx et Cie un capital de 300000 lt. Il attend que la banque lui transmette les rentes viagères. Mais, déclare-t-il comme il n’a pas encore désigné les têtes (qui ne peuvent être que des demoiselles de Genève) sur lesquelles il veut constituer ces 300 000 lt. de capital viager, il prie Le Couteulx et Cie de faire cette constitution de rentes sous le nom de Bontemps frère et fils Mallet banquiers de Genève qui feront tous les six mois le certificat de vie des trente têtes, ce qui pour lui est très difficile car résidant très souvent à la campagne il a du mal à établir ces certificats qui seuls lui permettront de toucher le montant des rentes.

    45En septembre 1784, il relance les Le Couteulx au cas où un nouvel emprunt viager serait émis en France en leur déclarant qu’ils n’auraient aucun mal à trouver de nombreux clients helvétiques décidés, comme lui, à en acheter une partie et d’ajouter :

    « Votre honnêteté et vos procédés, votre manière de réagir, les grandes ressources de votre maison sont connues à Genève. Chacun désire se lier d’affaires avec vous. Je vous promets que dans le prochain emprunt vous recevrez bien des commissions de Genève ».

    46Et il termine en leur recommandant la maison De Tournes Lullin Masbou et Cie de Genève, qui comme Le Couteulx et Cie, est connue pour « son honnêteté et ses ressources »40.

    47Alexandre Marcet ne s’intéressait pas seulement aux rentes viagères mais il entendait également spéculer sur les actions de quelques compagnies françaises et en particulier sur celles de la Caisse d’Escompte. Soixante ans après les débuts de l’expérience Law, la Caisse d’Escompte avec l’appui de Turgot et impulsée par un banquier anglo-suisse Isaac Panchand voit le jour. Avec un capital de 15 millions de livres qui fut ramené ensuite à 12 millions, elle devait escompter les lettres de change, faire le commerce des matières d’or et d’argent et recevoir les dépôts des particuliers. La Caisse d’Escompte autorisée par le Conseil d’Etat à ouvrir ses portes le 1er juin 1776 devait être dirigée par sept administrateurs et Isaac Panchaud aurait souhaité que Jacques-Jean Le Couteulx du Molay, le principal dirigeant de Le Couteulx et Cie de Paris à cette date en fisse partie.

    48Admirateur de Turgot, Jacques-Jean Le Couteulx du Molay n’était pas hostile à cet établissement bancaire. Il avait consulté les membres de sa famille et ceux-ci l’avaient encouragé à pénétrer dans la direction de la Caisse d’Escompte. Mais comme il écrivait à Jean-Barthélemy Le Couteulx, le dirigeant de la branche rouennaise, il trouvait cette charge fort lourde, mais aurait accepté de faire un sacrifice « pour le bien de notre maison »41. Mais, en fin de compte, il refusa de faire partie de l’administration de la Caisse d’Escompte au grand dam d’Isaac Panchaud qui écrivit à un banquier d’Amsterdam « Nous avons su tous les contretems que nous avons éprouvé au sujet de l’administration, que Mrs Le Couteulx et Diodati nous avaient manqué »42.

    49Une des motivations du refus de Jacques-Jean Le Couteulx peut s’expliquer par le fait qu’il n’éprouvait guère de sympathie pour Isaac Panchaud et surtout parce que Turgot fut disgracié le 12 mai 1776 une semaine après qu’il ait exprimé son point de vue à son cousin. Cela ne l’empêcha pas cependant, quelques semaines plus tard, de s’introduire dans une institution nouvelle, la Loterie royale de France autorisée à entrer en activité par un arrêt du Conseil d’Etat le 30 juin 1776. La Loterie royale de France qui absorbait plusieurs autres types de loteries qu’on accusait de laisser sortir de France des fonds vers plusieurs pays étrangers devait être dirigée sous l’autorité du contrôleur général des Finances par douze administrateurs devant déposer chacun une caution de 100000 lt. Lors d’une réunion tenue le 6 août 1776, le Conseil d’Administration décida de confier la fonction de receveur général aux deux associés de Le Couteulx et Cie de Paris Jean-Baptiste-Etienne Le Couteulx-Desmuttes et Jacques-Jean Le Couteulx du Molay43. En fait, ce fut ce dernier qui exerça pendant de nombreuses années cette fonction, ce qui ne l’empêcha pas en 1778 de devenir administrateur de la Caisse d’Escompte.

    50Arrivé à la tête de la Direction des Finances, Jacques Necker voulut relancer les activités de la Caisse d’Escompte, alors fort compromises. Il invita plusieurs banquiers parisiens à en prendre la direction en souscrivant 1 500 actions encore non placées et porta le nombre des administrateurs de sept à treize. Cette fois-ci, Jacques-Jean Le Couteulx du Molay accepta d’en faire partie tandis qu’Isaac Panchaud en était écarté. Il allait y demeurer plusieurs années, puis ce fut son cousin Laurent-Vincent Le Couteulx de la Noraye qui le remplaça. Il lui fallut investir un minimum de 150 000 lt. puisque les administrateurs devaient posséder au moins 50 actions de 3 000 lt. chacune en vertu du règlement de la Caisse d’Escompte44.

    51Comme il l’avait prévu, la Caisse d’Escompte fut favorable au bien de sa maison de banque. Les lettres de change des administrateurs étaient escomptées en priorité par leur établissement bancaire à un taux de 4 %, inférieur à celui en vigueur à cette époque dans la place de Paris et il pouvait leur accorder un crédit qualifié par H. Lüthy de « pratiquement illimité »45. Cela leur permettait avec une grande facilité d’acquérir des quantités considérables de rentes viagères. La présence d’un Le Couteulx dans la direction de la Caisse d’Escompte a abouti à ce que la maison Le Couteulx et Cie ait pu bénéficier de crédits considérables avec un taux d’intérêt réduit en juillet 1784 lorsqu’elle a été chargée par la Banque Saint-Charles d’importer très rapidement d’énormes quantités de piastres destinées à être remises aux Hôtels des monnaies du royaume de France.

    52Un autre avantage dont Le Couteulx et Cie a pu profiter résidait dans la vente des actions de la Caisse d’Escompte surtout après le mouvement de hausse qui a suivi la crise de la Caisse d’Escompte à la fin de 1783. Au début de l’année 1784, l’action atteignit 3 900 lt. alors que la valeur nominale était toujours de 3 000 lt., en mars 1784, elle monta à 4 200 lt., en mai 1784 à 5200 lt. L’agiotage sur les actions de l’établissement bancaire pouvait donc rapporter d’importants profits et Le Couteulx et Cie s’y employa. Au début de l’année 1784, la maison parisienne proposa à Alexandre Marcet d’acquérir des actions de la Caisse d’Escompte dont le prix était à ce moment de 3 900 lt.46. Quelques semaines plus tard, Alexandre Marcet annonçait à ses correspondants parisiens qu’il disposait chez lui « dans une petite boite » de 34 actions, mais plusieurs autres étaient en dépôt chez Le Couteulx et Cie. Celle-ci proposa au Genevois de les vendre lorsque leur cours atteindrait 5 275 lt. moyennant une commission. Le profit en juin 1784 s’élevait donc à I 375 lt. par action et avec ses trente-quatre actions, le profit brut d’Alexandre Marcet se montait à 46 750 lt.47. Nul doute que la maison parisienne avait également spéculé pour son propre compte et que ses bénéfices furent encore plus plantureux.

    Le Couteulx et l ’Espagne

    53La guerre d’indépendance américaine provoqua un élargissement des activités des maisons Le Couteulx de Paris et de Cadix. En effet, pour financer son effort de guerre, le principal ministre de Charles III, le comte de Floridablanca, adopta un projet présenté par François Cabarrus un négociant-banquier français de Madrid consistant à créer un papier-monnaie appelé vale real qui, moyennant un intérêt de 4 %, devait être placé auprès de sociétés espagnoles ou étrangères. Ce projet fut sur le point, à ses débuts, de devenir un désastre mais les Le Couteulx contribuèrent avec d’autres à en faire un succès, ce qui leur donna des atouts considérables pour pouvoir bénéficier de la politique financière de la monarchie espagnole après cette première initiative.

    54Jusqu’en 1780, le centre névralgique des affaires de Le Couteulx et Cie en direction de l’Espagne demeure Cadix. La fin du monopole colonial du port andalou au bénéfice de plusieurs autres ports espagnols décidé en 1778 n’a pas affaibli Cadix qui demeure et de loin le premier port, par le volume de son commerce, de l’Espagne avec l’Amérique coloniale. La firme française, commanditée toujours par plusieurs associés des branches de Rouen et de Paris, continue à négocier des denrées coloniales, comme la cochenille, venue de l’ Empire colonial espagnol, à importer des produits manufacturés essentiellement des toiles bretonnes et à continuer le commerce des piastres qu’elle réexporte dans différents ports européens. Elle poursuit également ses activités de prêt à la grosse aventure. Il lui arrive parfois d’acheter des navires vendus par la Compagnie des Indes Orientales hollandaises dont elle prend un intérêt. Elle a également bénéficié avec l’autre grande société française de Cadix Magon Le Fer frères de la création en 1785 de la Nouvelle Compagnie des Indes orientales françaises qui s’adresse à ces deux sociétés pour obtenir des piastres qui sont nécessaires pour l’achat des marchandises indiennes ou chinoises48. Mais la firme gaditane n’est pas la seule branche qui participe à des opérations commerciales avec l’Espagne. Celle de Rouen continue à acheter des laines en s’adressant à des négociants de Madrid ou au nord de l’Espagne, tandis que Le Couteulx et Cie de Paris possède plusieurs correspondants madrilènes comme Drouilhet et Cie ou Augustin Queneau avec qui elle organise la négociation des lettres de change. Toutefois c’est l’arrivée aux affaires dans la capitale espagnole de François Cabarrus qui va étendre prodigieusement les opérations commerciales en direction de l’Espagne de Le Couteulx et Cie.

    55Venu en Espagne en 1771, commis d’une maison française de Valence dirigée par Antoine Galabert dont il épousera la fille, le Bayonnais François Cabarrus arrive à Madrid en 1773 où pendant quelque temps il travaille dans une savonnerie, possédée par un oncle de son épouse, située à Carabanchel de Arriba, un faubourg de Madrid. En 1777, il parvient à fonder sa première maison de commerce en association avec « Juan » de Aguirre un compatriote né à Saint-Jean-Pied-de-Port et propriétaire d’un magasin de lainages à Carabanchel de Arriba49. Très rapidement, Cabarrus et Aguirre prend de l’importance et dès 1778 elle est déjà en relation avec J.L. et L. Le Couteulx et Cie de Cadix. Elle entend obtenir des piastres de la maison gaditane contre des traites sur Veuve Lalanne et Cie de Bayonne, une maison qui lui est très proche. Mais si la maison de Cadix n’est pas très enthousiaste, elle va y consentir moyennant quelques aménagements en déclarant qu’elle sort « en faveur de Cabarrus et Aguirre de principes dont les membres de la société ne se sont jamais écartés jusqu’à présent ». Mais il s’agit pour eux d’exprimer leur désir de « cultiver » avec Cabarrus et Aguirre une correspondance suivie50. La maison gaditane va donc envoyer à Madrid au cours des années 1778 et 1779 des quantités importantes de piastres, qui sont ensuite expédiées à des correspondants de Cabarrus et Aguirre dont le plus favorisé semble être Juan José Vicente de Michelena établi à Saint Sébastien qui leur fait traverser la frontière pour les remettre à un négociant bayonnais, spécialiste du commerce des piastres, Pierre Dufour.

    56En décembre 1778 et début janvier 1779, Cabarrus et Aguirre doit en compte courant à J.L. et L. Le Couteulx et Cie de Cadix 748 170 r.pta, soit environ 374 085 lt. La maison de Cadix envoie également à sa correspondante de Madrid des quadruples d’or pour une valeur dans les derniers mois de 1778 de 413 302 r.pta soit à peu près 206 000 lt. en y comprenant les frais de transport de Cadix à Madrid (11018 r.pta 33 maravedis) et sa commission d’un demi pour cent soit 2056 r.pta 8 maravedis51.

    57Pourtant, malgré ces liens commerciaux établis avec Cabarrus et Aguirre, les maisons Le Couteulx ne vont pas s’engager immédiatement dans la première des grandes opérations entreprises par François Cabarrus, celle de la création des vales reales. La monarchie espagnole entrée en 1779 dans la guerre d’indépendance américaine était, dès 1780, incapable de financer ses dépenses militaires considérables. C’est alors que François Cabarrus au nom des maisons Étienne Drouilhet et Cie de Madrid, de Veuve Lalanne et fils de Bayonne et de la sienne proposa au premier secrétaire d’Etat espagnol, le comte de Floridablanca, de lui prêter 9 millions de pesos, l’équivalent de 33 750000 lt. en lettres de change et en espèces métalliques en échange de papier monnaie, les vales reales d’un montant de 9900000 1t. et portant intérêt de 4 % qui lui seraient délivrés en septembre 1780. Il affirmait bénéficier de l’appui de nombreuses maisons françaises et espagnoles du royaume d’Espagne dont plusieurs étaient établies à Cadix comme Magon Le Fer frères, Cayla Solier Cabanes et Cie, Jean Laurent Lasserre et Cie et J.L. et L. Le Couteulx et Cie à Cadix52. François Cabarrus fit également appel à des maisons françaises du royaume de France avec lesquelles par l’intermédiaire de Pierre Lalanne venu à Paris pour l’occasion, il signa un contrat qui devait lui rapporter huit millions de livres, soit près du quart de ce qu’il devait fournir au secrétaire d’Etat des Finances espagnol, Miguel de Muzquiz. Il s’agissait de quatre maisons de banque parisiennes : Rilliet et Cie, Jean François Batbedat et Cie, Jean Louis Cottin fils et Jauge, Vendenyver frères53. Le Couteulx et Cie de Paris ne faisait donc pas partie à l’origine de ce consortium bancaire sans qu’on puisse deviner les raisons qui l’ont conduite à ne pas s’engager. En effet, non seulement Le Couteulx et Cie entretenait des relations d’affaires avec François Cabarrus, mais elle était également liée depuis plusieurs années à Étienne Drouilhet et Cie de Madrid, la première maison de banque française de Madrid et qui s’était associée à Cabarrus dans l’opération des vales reales54. Les conditions financières qu’on lui aurait offertes étaient-elles insuffisantes ? Il semble même que dans un premier temps la maison parisienne était plus que réticente puisque son partenaire et parent d’Amsterdam, Jean-Alexandre Botereau, refusa, au début du mois de septembre, d’accepter les traites que François Cabarrus avait tiré sur lui55. On le sait, à cause de l’opposition de Neckcr appuyé par plusieurs maisons de banque dont celle de Girardot Haller et Cie, l’opération menée par François Cabarrus faillit tourner au désastre d’autant plus que la Caisse d’Escompte dont Jacques-Jean le Couteulx du Molay était l’un des administrateurs refusa d’escompter les lettres de change que lui présentait Pierre Lalanne. Cependant, sous la pression de Floridablanca menaçant la France de signer une paix séparée avec l’Angleterre, Necker dut changer de comportement et soutenir ceux qu’ils avaient combattus. Mais le mal était fait et une des quatre banques qui s’étaient alliées à François Cabarrus, Rillict et Cie, abandonna le consortium bancaire. Heureusement pour François Cabarrus, Le Couteulx et Cie accepta de la remplacer. Désormais, la maison de banque parisienne allait mener un rôle de premier plan dans toutes les opérations menées par le banquier madrilène même s’il survenait des désaccords entre eux, ce qui arriva très rapidement. Dès le début de l’année 1781, la maison Veuve Lalanne et fils se faisait l’écho auprès de François Cabarrus du mécontentement de Le Couteulx et Cie.

    « Tenez pour certain que quoique MM Lecouteulx ne montrent pas de l’humeur dans leur correspondance ils en témoignent tous les jours beaucoup à Touton (Pierre Lalanne), ce qui ils ne cessent de répéter qu’il se conduit mal à leur égard »56.

    58Quelques jours plus tard la maison de Bayonne reprenait cette antienne.

    « Vous persistez à croire que notre Sieur Touton ou plutôt Messieurs Le Couteulx sont dans l’erreur sur la situation du compte social et nous voudrions bien que cela fut puisque un des motifs qui vous poussent à le croire était la modicité des billets qui vous restaient. Nous devons nous attendre à un résultat bien différent de celui dont nous nous étions flattés »57.

    59Les tensions existant entre Le Couteulx et Cie et Cabarrus et Aguirre semblent être liées à des estimations différentes sur la valeur des remboursements accordés aux banquiers parisiens qui avaient prêté huit millions de livres l’année précédente. Cependant, même si ces profits réalisés par les maisons qui avaient coopéré à la première émission des vales reales ont été inférieurs à ce qui avait été prévu par les initiateurs, ils furent certainement élevés au point de mettre fin à la « mauvaise humeur » de Le Couteulx et Cie. Dès lors la maison parisienne s’associa de plus en plus souvent aux opérations conduites par François Cabarrus.

    60En février 1781, ce dernier était à Paris après avoir traité avec la monarchie espagnole un prêt de trois millions de piastres en Europe qu’il recouvrerait à la Vera-Cruz au Mexique, en décembre 1781 et en janvier 1782. Cette avance, il comptait l’obtenir auprès de la monarchie française et de différents particuliers français. Or la négociation fut plus longue qu’il ne l’escomptait et comme il devait revenir à Madrid, il donna une procuration à Pierre Lalanne et à Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx de la Noraye pour suivre conjointement la négociation et de transiger s’il le fallait58.

    61Il ne semble pas que cette négociation ait réussi mais quelques mois plus tard en août 1781, François Cabarrus concluait un accord avec la Trésorerie espagnole. Un million de piastres serait prêté à la monarchie espagnole sous la direction de François Cabarrus et avec la participation de trois sociétés françaises de Cadix Magon Le Fer Frères, Jean François Lasserre et Cie et J.L. et L. Le Couteulx dont on déduirait une commission de 7,6 %. Et un bâtiment français gagnerait La Havane pour recueillir le million de piastres en espèces métalliques59.

    62Le 20 juin 1782, le gouvernement de Charles III lançait une troisième émission de vales reales, lesquels furent remis à Cabarrus et Lalanne (François Cabarrus avait dissous Cabarrus et Aguirre et s’était associé avec Paulin Lalanne) et moyennant une commission de 1 %. La société devait les convertir en espèces métalliques. Elle le fit grâce à l’appui de nombreuses maisons françaises établies en Espagne. Sur les 28 360 vales reales remis à Cabarrus et Lalanne, 3 336 furent transmis à J.L. et L. Le Couteulx et Cie qui reçurent une commission de 75 543 r. von soit l’équivalent de 18 885 lt. tandis que Magon Le Fer frères s’en virent accorder 2 178 avec une commission de 49815 r. von environ 12 450 lt.

    63Le Couteulx et Cie de Paris ne restait pas inactive. D’août à septembre 1782, la maison de la rue Montorgueil procura à la monarchie espagnole de l’or en provenance de la France et des Provinces-Unies afin d’augmenter la circulation métallique du royaume de Charles III. En janvier 1783, elle acceptait de prêter I 300000 lt. au Real Giro l’institution chargée de financer les dépenses ordinaires du gouvernement espagnol à l’étranger et en novembre elle autorisait le secrétaire d’Etat aux Finances espagnol à tirer sur elle 155 lettres de change d’une valeur totale de 1 500 000 lt. qui devaient être escomptées par Cabarrus et Lalanne60.

    64D’après Pedro Tedde de Lorca, les bénéfices obtenus par François Cabarrus et ses partenaires entre la première émission de vales reales en 1780 et la fin de la guerre d’indépendance américaine auraient atteint près de 40 millions de reales de vellon soit 10 millions de livres61. La part des deux maisons Le Couteulx de Paris et de Cadix fut sans doute importante sans qu’on puisse la préciser. Mais cela les conduisit à s’appuyer à nouveau sur François Cabarrus quand ce dernier mit sur pied la banque Saint-Charles de Madrid.

    65Naturalisé espagnol en 1781, François Cabarrus proposa la fondation d’une banque publique ayant pour objectif principal d’empêcher la baisse des cours des vales reales. Son projet fut retenu par Floridablanca et le 2 juin 1782 une cédule royale portait création de la Banque nationale de Saint-Charles d’un capital de 300000000 de reales de vellon divisé en 150000 actions de 2000 reales de vellon (500 lt.). Elle était autorisée à se livrer à trois activités, l’escompte des lettres de change, le paiement des dépenses de la monarchie à l’étranger et l’approvisionnement de l’armée et de la marine62.

    66La moitié des actions de la Banque Saint Charles devait être placée en Amérique espagnole, l’autre moitié en Espagne et dans le reste de l’Europe. Les autorités provisoires de la Banque (essentiellement François Cabarrus) désignèrent des commissionnaires chargés de les écouler. À Cadix et ce n’est pas étonnant, ce furent Magon Lefer frères, Jean Laurent Lasserre et Cie, J.L. et L. Le Couteulx et Cie, trois maisons qui avaient joué un rôle essentiel lors de la première émission des vales reales qui en furent chargés. À Paris, ce fut, bien entendu, Le Couteulx et Cie qui en reçut la mission. Pendant plusieurs mois les résultats, malgré l’intervention de grandes maisons furent modestes. En novembre 1782 seulement 8 428 actions avaient trouvé preneur. J.L. et L. Le Couteulx et Cie en avaient acquis 50. La maison gaditane aurait voulu en acheter en plus grand nombre, mais il lui aurait fallu obtenir l’aval de la maison de Paris qui avait barre sur elle comme l’écrivait Laurent-Vincent Le Couteulx alors à Cadix.

    « Nous étions d’accord pour prendre 100 actions mais notre maison ne peut avoir pris des intérêts sans que nos associés Don Diego (Jacques-Jean) et Don Luis (Barthélemy-Jean-Louis) en aient été prévenus. La connaissance que vous avez Messieurs des principes de nos établissements de famille vous fera excuser le petit détail dans lequel je viens d’entrer »63.

    67La maison parisienne semble avoir attendu que la première assemblée des actionnaires de la Banque Saint-Charles se soit tenue le 29 décembre 1782 pour acquérir 100 actions soit l’équivalent de 50000 1t. Nommée commissionnaire du Real Giro par la Banque Saint-Charles alors que J.L. et L. Le Couteulx et Cie avait été choisie comme fournisseur de la Marine royale espagnole à Cadix, elle ne pouvait agir autrement. Toutefois, pendant la plus grande partie de 1783 et même après la réunion d’une nouvelle assemblée des actionnaires en novembre 1783 alors que plus de 19 000 actions avaient été placées entre novembre 1782 et novembre 1783, elle s’en tint là.

    68C’est en 1784 qu’elle modifia son comportement sans doute parce que la Banque Saint-Charles avait distribué un dividende de 9,2 %, ce qui ne pouvait que donner confiance aux possesseurs d’actions et donc entraîner la hausse du prix des actions. Le Couteulx et Cie entreprit donc de s’engager dans une spéculation sur les actions de la Banque Saint-Charles. C’est ce qu’affirma Alexandre Marcel qui déclarait dans une lettre à Le Couteulx et Cie qu’il avait participé de façon modeste au plan qui devait permettre à la maison parisienne de s’emparer d’un très grand nombre d’actions.

    « Vous Messieurs la Noraye aîné et cadet et moi nous conçûmes ensemble (il est vrai qu’entre vous deux Messieurs vous eûtes les 19/20e des idées), nous conçûmes dis-je ensemble proposition contenue dans votre lettre du 9 juillet à Monsieur Cabarrus et le plan d’une association pour prendre le restant des actions »64.

    69Accaparer les actions, c’était le plus sûr moyen d’en faire hausser le prix. C’est pourquoi dans leur lettre du 9 juillet 1784 adressée à la Banque Saint-Charles, Le Couteulx et Cie passait un ordre d’achat de 7000 actions soit un prix nominal de 3 500000 lt. pour une société dans laquelle Alexandre Marcet s’engageait pour 1/16e et espérant que le compte en participation « soit entre des personnes choisies qui par leur position, leur crédit, leurs procédés en rendent l’exécution facile, profitable et agréable. Pour ce choix je m’en rapporte entièrement à vous pour me glisser dans cette société »65.

    70Mais ce projet fut contrecarré pendant un temps par François Cabarrus qui voulait de son côté, constituer une société pour acheter la totalité des actions de la Banque Saint-Charles non encore placées. Cette société aurait compris comme associés Baudart de Saint-James pour 1/7e, Megret de Sevilly, trésorier de l’extraordinaire des Guerres pour 2/7e, Pache frères et Cie banquiers à Paris pour 1/7e, Pierre Lalanne pour 1/7e, Cabarrus et Lalanne pour 1/7e, Le Couteulx et Cie de Parie pour 1/7e. Mr de Saint Martin de Mannheim pour 1/14e et Alexandre Marcet pour 1/ 14e66. Ce n’est donc qu’en septembre 1784 que la Banque Saint-Charles expédia à Le Couteulx et Cie 1 250 actions auxquelles s’ajoutèrent 200 autres destinées à Jacques-Jean Le Couteulx du Molay. Les achats d’actions s’accélérèrent entre le 1er janvier 1785 et le 9 mai 1785. La maison Le Couteulx put en recevoir 2 860 et Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx et son frère Laurent-Vincent en obtinrent chacun 250 tandis que Jacques-Jean Le Couteulx du Molay en acquérait 50 supplémentaires. De plus, des partenaires habituels de la maison Le Couteulx se virent également pourvus d’actions. Nicolas Olive en reçut 1 000, Simon-Emmanuel-Julien Lenormand 600 et Brillantais Marion de Saint-Malo 50067. À la suite de toutes ces séries d’achats, les Le Couteulx devinrent le premier actionnaire de la Banque Saint-Charles avec 6385 actions, auxquelles on peut ajouter les 350 acquises par Botereau et Cie d’Amsterdam. On n’était plus très loin des 7 000 actions qu’ils avaient voulu engranger en juillet 1784.

    71Il est certain que la maison Le Couteulx pour profiter de la hausse du cours de ces actions en a revendu un grand nombre. C’est ce qu’affirmait Mirabeau qui publia en juin 1785 un pamphlet intitulé « De la Banque d’Espagne dite de Saint-Charles » dans lequel il dénonçait la vague de spéculations qui avait orienté à la hausse plusieurs catégories d’actions alors que la valeur des rentes viagères était tournée à la baisse. Ceux qui avaient spéculé sur ces titres à l’instar de Clavière, Brissot ou Panchaud entreprirent par le biais de Mirabeau et avec le soutien du contrôleur général des Finances Calonne de faire retomber le cours des actions de la Banque Saint-Charles. Ils y parvinrent puisque dans les semaines qui suivirent la publication du brûlot de Mirabeau le cours de l’action de la Banque Saint-Charles tomba en France de 765 lt. à 670 lt.68. Pour stopper cette chute, Le Couteulx et Cie tenta de faire pression sur Calonne afin qu’il cesse de soutenir le groupe Clavière-Panchaud-Mirabeau. En même temps, la maison Le Couteulx obtenait de la Banque Saint-Charles un prêt de 20 millions de reales de vellon soit 5 millions de livres destinés à aider les acquéreurs français des actions de la Banque Saint-Charles à condition qu’ils déposent leurs titres au siège de la banque rue Montorgueil. Le 30 novembre 1785, cette dernière en avait 13175.

    72La crise surmontée Le Couteulx et Cie poussèrent la Banque Saint-Charles à en racheter la plus grande partie tout en en conservant pour elle-même un certain nombre69.

    73La spéculation sur les actions de la Banque Saint-Charles ne fut pas le seul moyen pour Le Couteulx et Cie de réaliser d’importants profits grâce à ses biens avec l’établissement financier madrilène. Ce dernier avait obtenu en 1783 le monopole de l’exportation des piastres provenant de l’Empire espagnol. Jusqu’en 1785 la Banque Saint-Charles fit appel aux services de son commissionnaire parisien pour vendre en France et dans le reste de l’Europe les piastres qu’elle lui faisait parvenir. C’est ainsi que pendant l’année 1784, Le Couteulx et Cie reçut 11 342 000 piastres qu’elle revendit, en s’appuyant sur la Caisse d’Escompte qui lui prêtait de l’argent à un taux d’intérêt très bas, aux Hôtels des monnaies français. Elle recevait une commission de 1/3 % ce qui lui rapporta un profit de 38000 piastres soit 190000 lt.70.

    74Le Couteulx et Cie bénéficiait d’autres sources de profits. En tant que commissionnaire du Giro Real, la firme parisienne aurait, grâce aux commissions reçues pour les paiements à l’étranger au nom de la monarchie espagnole et de la Banque Saint-Charles, obtenu 400000 reales de vellon soit 100000 lt. Commissionnaire de la compagnie des Cinco Gremios, c’est-à-dire des cinq corporations majeures de Madrid qui avaient fondé une compagnie de commerce agissant en Europe et en Amérique, commissionnaire de la Compagnie des Philippines fondée en 1785 première compagnie espagnole par actions orientée vers le commerce avec l’Asie et filiale de la Banque Saint-Charles qui achetait des marchandises en Europe pour les écouler dans le continent asiatique, Le Couteulx et Cie recevait des commissions importantes. Rien que pour les paiements de la monarchie espagnole en Europe qui auraient atteint 8 millions de pesos simples soit environ 120000000 reales de vellon, la maison parisienne aurait reçu moyennant une commission fixée à ½ % 300000 reales de vellon ou 75 000 lt.71.

    75À partir du second semestre de l’année 1785, Le Couteulx et Cie entra dans une période de difficultés. C’est moins le résultat de l’offensive mené par le groupe Panchaud Clavière et Brissot qui utilise la plume de Mirabeau qui, après avoir dénoncé la spéculation de Le Couteulx et Cie sur les actions de la Banque Saint-Charles, s’en prend dans un autre libelle à Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx de la Noraye qu’il dénonce comme « l’ami de Mr Cabarrus, ami de la Banque, simple négociant, capitaliste commissionnaire, banquier, joueur, prêteur sur dépôts aux services des joueurs »72 que des orientations de François Cabarrus. Celui-ci obtient que la Banque Saint-Charles signe un traité avec Simon-Emmanuel-Julien Lenormand, l’ancien associé de la maison Le Couteulx de Cadix qui lui assure le quasi-monopole des entrées en France des piastres exportées par la banque Saint-Charles. Simon-Emmanuel-Julien Lenormand avait accepté d’acheter les piastres à la Banque Saint-Charles alors que Le Couteulx et Cie entendait demeurer un simple commissionnaire. Mais une autre motivation intervenait : depuis 1783, François Cabarrus s’était associé avec Simon-Emmanuel-Julien Lenormand dans une société établie à Cadix sous la raison Simon Lenormand et Cie dont le principal dirigeant était Pierre Lenormand, un cousin de Simon-Emmanuel-Julien, et qui avait également été l’associé de la firme Le Couteulx de Cadix.

    76Le Couteulx et Cie, en 1786, décida de modifier sa stratégie en acceptant d’acheter les piastres espagnoles Elle fut alors mise en concurrence avec Simon-Emmanuel-Julien Lenormand lors d’une espèce de vente aux enchères qui se tint à Madrid en novembre 1786 où elle fut représentée par Augustin Queneau, un banquier madrilène d’origine française, et par Eugenio Izquierdo, récent directeur du Cabinet Royal d’Histoire Naturelle de Madrid, mais qui, lors de son séjour en France, avait aidé les Le Couteulx à prendre le contrôle de plusieurs manufactures. Cependant, la vente aux enchères se termina par la victoire de Simon-Emmanuel-Julien Lenormand qui accepta de payer un sol de plus que ce qui était proposé par les représentants de Le Couteulx et Cie73. Jusqu’en 1790, la maison parisienne fut donc privée du bénéfice considérable que devaient rapporter les ventes de piastres en France et dans le reste de l’Europe même si la maison Le Couteulx de Cadix en tant que commissionnaire avec Magon Lefer frères de la Nouvelle Compagnie Française des Indes Orientales pouvait fournir des piastres aux vaisseaux de la Compagnie qui faisaient escale dans le port andalou.

    77Les différends avec François Cabarrus n’aboutirent pas toutefois à une rupture entre les Le Couteulx et le directeur perpétuel de la Banque Saint-Charles. Celui-ci avait envoyé ses deux fils, Domingo et Francisco à Paris afin qu’ils reçoivent une éducation à la française. Le Couteulx et Cie accepta d’avancer l’argent destiné à payer leur précepteur, l’abbé Saintin ainsi que différentes dépenses. C’est ainsi qu’entre le 5 septembre 1785 et le 15 octobre 1786 ils versèrent 50972 reales de vellon (12743 1t.) pour les deux « Senõritos »74. François Cabarrus envoya ensuite sa fille Teresa, la future Madame Tallien, pour laquelle les Le Couteulx payèrent le 12 janvier 1786 une pension évaluée à 17787 reales de vellon75.

    78Le couronnement de ce rapprochement avec François Cabarrus fut le mariage de Teresa avec Jacques Devin de Fontenay. Ce fut Jacques-Jean Le Couteulx du Molay qui proposa cet époux, conseiller du Parlement de Paris et petit-fils d’un marchand-drapier et d’une Le Couteulx. François Cabarrus donna une procuration à son épouse et à Jacques-Jean Le Couteulx du Molay pour mettre en forme les capitulations matrimoniales76. Cette réconciliation entre le banquier de Madrid et les banquiers parisiens ne pouvait que renforcer les liens d’affaires entre François Cabarrus et Le Couteulx et Cie. En 1787, ils formèrent avec Pierre Lalanne et Simon Emmanuel Julien Lenormand la compagnie du Canal de Saint-Denis, société financée en fait par la Banque Saint-Charles qui acceptait de racheter dix mille de ses actions, d’en verser immédiatement le montant tout en acceptant de ne les récupérer que quatre ans plus tard. Dans cette compagnie d’un capital de 50 sols, François Cabarrus en possédait 23, Jacques-Jean Le Couteulx du Molay 10, Simon-Emmanuel-Julien Lenormand qui s’était également réconcilié avec les Le Couteulx 9 et Pierre Lalanne 877.

    79L’arrestation de François Cabarrus en juin 1790 n’entraîna pas des conséquences fâcheuses pour Le Couteulx et Cie d’autant plus que Simon-Emmanuel-Julien Lenormand avait perdu cette même année son monopole de fournitures de piastres. La maison parisienne recommença à recevoir des espèces métalliques quoiqu’on quantité modeste jusqu’à la fin de l’année 1792. C’est seulement la guerre entre la France révolutionnaire et l’Espagne débutant en mars 1793 qui aboutit à la rupture de ses relations commerciales et financières avec un pays qui avait tant contribué à son enrichissement.

    Les Le Couteulx et les Etats-Unis d’Amérique

    80L’intervention de la France puis de l’Espagne aux côtés des Insurgents des 13 Colonies de l’Amérique du Nord a eu des conséquences négatives sur les deux monarchies bourboniennes, davantage d’ailleurs sur celle de Louis XVI que sur celle de Charles III. Elle a accru le déficit budgétaire et a augmenté le service de la dette. Mais cette même intervention s’est révélée extrêmement profitable pour un certain nombre de sociétés dont Le Couteulx et Cie a fait partie. La guerre d’indépendance américaine lui a, en effet, ouvert un nouveau champ d’action.

    81Pour financer le conflit, le Congrès Continental comprenant les représentants des 13 Colonies décida en juin 1775 d’émettre du papier-monnaie appelé dollar représentant 4 1t. 6 d., émission qui fut suivie par plusieurs dizaines d’autres jusqu’en 1779 tandis que les 13 États émirent à leur tour une monnaie concurrente78. Mais ces nombreuses émissions ne parvinrent pas à satisfaire totalement les besoins de financement de l’effort de guerre. Aussi les Américains firent-ils appel à des soutiens étrangers, pour l’essentiel, de la France.

    82On sait que grâce à une contribution de trois millions de livres, Caron de Beaumarchais fonda la société Rodrigue Hortales et Cie qui fut pendant quelques années un fournisseur de munitions destinées aux années de Washington avant d’être relayé par Le Ray de Chaumont. Quant à la levée d’emprunts européens, les Américains, par l’intermédiaire surtout de Benjamin Franklin s’adressèrent aux banquiers Georges Grand d’Amsterdam et Ferdinand Grand, son frère, de Paris. Mais ces derniers ne furent pas les seuls à apporter un appui financier aux Insurgents, ce fut également le cas de John Holker et en association avec lui les Le Couteulx.

    83Jacobite anglais, John Holker avait quitté la Grande-Bretagne après la défaite du prétendant Stuart à la bataille de Culloden en 1746. Il s’était établi à Rouen et il avait fondé une manufacture de coton dans le faubourg de Saint-Sever. La réussite de cette entreprise lui avait valu d’être nommé par la monarchie Inspecteur général des Manufactures79. À la fin des années 1770, il résidait à Paris, son fils John Holker ayant pris sa suite. Ennemi de la monarchie hanovrienne, il ne pouvait que soutenir la révolte des colons américains et tenter de leur apporter une aide financière. Il conclut donc un accord avec Jean-Baptiste Buffault, un ancien courtier de change, homme d’affaires de Madame du Barry et devenu receveur général des domaines de la ville de Paris et Antoine Brulley de Sainte-Seine, directeur général des domaines et les trois partenaires sur la proposition de John Holker père décidèrent d’envoyer John Holker fils en Amérique pour que celui-ci négocie du papier-monnaie des États en échange de traites tirées sur Jean-Baptiste Buffault d’un montant de 300 000 lt. Le papier-monnaie des États aurait été ensuite converti en dollars émis par le Congrès Continental « pour en faire un prêt sans intérêt »80. John Holker fils qui avait obtenu l’appui de Vergennes s’embarqua à la fin de 1777 pour les États-Unis et devint, au cours de l’été 1778, agent de la Marine Française et consul à Philadelphie. Alors qu’il séjournait à Boston, il écrivit à son père qu’il ne parvenait pas à réaliser la négociation envisagée, ce qui conduisit Jean-Baptiste Buffault et Antoine Brulley de Sainte-Seine à abandonner leur participation. John Holker père ne se découragea pas et parvint à s’associer en décembre 1778 avec Ferdinand Grand et Le Couteulx et Cie de Paris. Cette dernière représentée par Jacques-Jean Le Couteulx du Molay accepta d’investir 100000 lt. pour l’acquisition du papier-monnaie du Congrès Continental contre 118000 1t. pour Ferdinand Grand et 82000 lt. pour John Holker père81. La maison de Paris ne fut pas la seule de la dynastie Le Couteulx à acquérir du papier-monnaie du Congrès Continental. Au moment de sa mort en 1779, Antoine-Louis Le Couteulx le dirigeant de la branche rouennaise était propriétaire de billets du Congrès Continental d’un montant de 25 000 lt.82.

    84Au cours de son séjour aux États-Unis, John Holker fils qui était chargé entre autres d’assurer des fournitures à la Marine royale française qui longeait les côtes de l’Amérique du Nord rencontra Robert Morris, un homme d’affaires américain, devenu un des dirigeants du Congrès Continental et qui fut nommé par le Congrès en février 1781 Surintendant des Finances avec pour tâche principale de redresser la situation financière des 13 colonies américaines83. Il parviendra à éviter l’émission de nouveaux billets ce qui en faisait abaisser la valeur en empruntant du numéraire et des lettres de change. Il s’associa avec John Holker fils pour mener un certain nombre d’opérations financières et commerciales avant de rompre avec lui, ce qui entraîna son ex-associé à lui réclamer devant les tribunaux américains l’équivalent de 1200000 lt.84. Pendant leur collaboration, John Holker fils avait du faire connaître au Surintendant des Finances américain les dirigeants de Le Couteulx et Cie, ce qui fit naître entre eux une coopération qui devait se poursuivre bien après le traité de Versailles.

    85Alors que jusqu’en 1781 Ferdinand Grand était le banquier du Congrès Continental, Robert Morris devenu Surintendant des Finances voulut le faire remplacer par Le Couteulx et Cie. C’est ce qu’il écrivait le 8 juin 1781 à Benjamin Franklin représentant les Insurgents à Paris depuis 1776 en lui déclarant qu’il avait choisi la maison de la rue Montorgueil comme banquier parisien des États-Unis d’Amérique85. Il demandait au représentant de la France à Philadelphie, le chevalier de La Luzerne, de solliciter que le gouvernement français dépose des fonds chez Le Couteulx et Cie de Paris afin qu’il puisse tirer des lettres de change sur elle. Dans un premier temps, il obtint satisfaction : 500 000 lt. furent placés chez Le Couteulx et Cie. Quelques mois plus tard, il réclamait au chevalier de La Luzerne que les avances accordées par la monarchie française soient portées à 2500000 lt. Mais le représentant français lui répondit qu’il était impossible de lui remettre une somme aussi importante mais il accepta en septembre 1781 de pouvoir tirer sur Le Couteulx et Cie 1 200000 lt.86. Les liens officiels entre le Surintendant des Finances américain et Le Couteulx et Cie durent s’interrompre provisoirement en raison de l’opposition entretenue par Benjamin Franklin. Le représentant des États-Unis en France n’acceptait pas que Ferdinand Grand soit évincé de sa fonction de banquier du Congrès américain. Dans une lettre datée de Passy le 26 juillet 1781, il écrivait à Robert Morris que s’il ne contestait pas la richesse et le crédit de Le Couteulx et Cie, il affirmait que Ferdinand Grand et son frère Georges avaient toujours été les amis zélés et fidèles des Américains, qu’ils avaient avancé 600000 à 700000 lt. aux Insurgents. En conséquence, il fallait continuer à tirer sur eux afin que les Américains ne perdent pas leur réputation et continuent à faire preuve de « gratitude, d’honnêteté et de justice »87. Y avait-il d’autres motivations expliquant le comportement de Benjamin Franklin ? Il n’est pas impossible que celui-ci ait bénéficié des faveurs de Ferdinand Grand, lequel aurait fait partie avec Jacques Donatien Le Ray de Chaumont qui fut l’hôte de Benjamin Franklin à Passy pendant les huit années que le représentant des 13 colonies américaines passa en France, Silas Deane, commissaire associé à Franklin et Jonathan Williams, agent des prises américaines à Nantes d’un consortium commercial formé en 177688. En tout cas, Robert Morris fut sensible à l’argumentation de Benjamin Franklin et Ferdinand Grand redevint le seul banquier français des États-Unis d’Amérique89.

    86De cette première opération avec les autorités américaines, Le Couteulx et Cie ne tira qu’un maigre bénéfice. En effet, leur commission avait été fixée à ½ %, ce qui pour les 1 200000 lt. leur rapporta 5 965 lt. mais il est vrai que les gains sur les changes pouvaient être plus importants90.

    87L’intervention de Benjamin Franklin ne mit pas un terme aux relations personnelles et d’affaires entre Robert Morris et le Le Couteulx. À la demande de l’Américain, Le Couteulx et Cie acheta des vêtements pour son épouse et lorsque Robert Morris envoya en Europe deux de ses enfants, Robert et Thomas, pour parfaire leur éducation, Le Couteulx et Cie accepta comme elle le fit pour les enfants de François Cabarrus de régler les frais de leur séjour en France avant qu’ils ne gagnent Genève91.

    88Mais surtout, le Superintendant des Finances fit appel aux Le Couteulx pour d’autres opérations permettant de faciliter la lutte des Américains contre la Grande-Bretagne. C’est ainsi qu’en septembre 1782 pour augmenter les quantités d’espèces métalliques circulant aux États-Unis, il décida d’acheter des piastres à Cuba. Pour cela, il avait besoin d’utiliser les services d’une firme établie à Cadix sur laquelle on pouvait tirer des traites en échange de l’achat à La Havane des piastres. Ce fut évidemment la maison Le Couteulx qui fut choisie. Le mécanisme adopté par Robert Morris consista à envoyer à La Havane un certain John Brown qui, pour l’acquisition des piastres, tirait des traites sur J.J. et L. Le Couteulx et Cie de Cadix. Cette dernière après les avoir acceptées tirait à son tour des lettres de change sur Le Couteulx et Cie de Paris, laquelle recevait des fonds soit de Benjamin Franklin, soit des banquiers hollandais Wilhelm et Jan Willinck qui avaient contribué au placement d’un emprunt américain à Amsterdam. Les Le Couteulx reçurent ainsi de Hollande l’équivalent de 2 millions de lt., soit 386500 dollars, alors que le montant des piastres achetées par John Brown n’atteignait que 61411 dollars. Il demeurait entre les mains des Le Couteulx environ 1700000 lt. qu’ils durent sans doute restituer car cette opération était survenue quelques jours avant la conclusion de la paix entre les belligérants de la Guerre d’indépendance américaine92.

    89Après la signature du traité de Versailles, les Le Couteulx ont continué à orienter une partie de leurs activités en direction des États-Unis indépendants. Ils ont souhaité renforcer les liaisons maritimes entre la France et le nouvel état indépendant afin que cela constitue une base solide pour les rapports commerciaux entre les deux pays. C’est pourquoi, à la demande de l’administration française, les Le Couteulx ont pris en mains la régie d’un service de paquebots devant joindre les ports français avec ceux des États-Unis telle qu’elle fut établie par un arrêt du Conseil d’État daté du 28 juin 1783. Le service des paquebots devait instituer une communication régulière entre la France et les États-Unis. L’armement devait être dirigé par les sieurs Le Couteulx sous les ordres du Secrétaire d’État à la Marine et ce serait eux qui devraient payer les dépenses de l’armement des navires et percevoir les droits qui seraient fixés tant sur le transport de la correspondance que sur celui des passagers et des marchandises. La tête de pont des paquebots était fixée à Port-Louis, l’avant-port de Lorient d’où un « nombre suffisant » de bâtiments devait partir chaque mardi de la troisième semaine de chaque mois à partir de septembre 178393.

    90Ce fut Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx de la Noraye qui fut chargé par Le Couteulx et Cie de prendre la régie en mains. Il partit pour Lorient où il arriva au début du mois de septembre 1783. Il visita en compagnie de Thévenard, le directeur du port, les bâtiments qui devaient assurer le trafic entre la France et les États-Unis. L’administration française n’avait pas fixé le nombre des bâtiments qui devaient gagner New-York. Il semble que dans les premiers mois leur nombre fut limité à trois, puis porté quelque temps plus tard à six qui furent baptisés Courrier de l’Europe, Courrier de l’Amérique, Courrier de New-York, Courrier de l’Orient, la Martinique et le Sylphe94.

    91Quelques années plus tard, un arrêt du Conseil d’Etat en date du 16 décembre 1786 modifia le fonctionnement de la régie des paquebots. Désormais, il y eut deux têtes de pont, l’une à Bordeaux et l’autre au Havre. Le nombre des bâtiments fut porté à vingt-quatre et leur rayon d’action fut étendu aux Antilles françaises et aux Iles de France et Bourbon dans l’Océan Indien, ce qui suscita des protestations des armateurs de Nantes et de la province de Guyenne ainsi que des Parlements de Bordeaux et de Rennes. Enfin, ce n’était plus Le Couteulx et Cie qui était chargé de la régie mais le seul Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx, lequel confia à Ruellan et Cie du Havre le soin d’organiser le départ des bâtiments et de commander des paquebots à Benjamin Dubois, un constructeur de navires de Saint-Malo. Ce fut les Deux Frères un navire appartenant à J.L. Ruellan qui partit le premier du Havre pour New-York le 17 février 178795. Il fut pendant un temps question, à la demande d’un Américain, Daniel Parker, d’ouvrir une nouvelle ligne entre le Havre et Boston, ce qui permettrait de faire parvenir en France de façon régulière de l’huile de baleine destinée à une manufacture d’huile affectée à l’éclairage que Daniel Parker et Le Couteulx et Cie avaient décidé de fonder. Pourtant, en juillet 1788, la régie des paquebots fut dissoute. C’était moins dû aux protestations des armateurs qu’aux pertes subies par Le Couteulx et Cie. En moyenne, chaque expédition de paquebot revenait à 30000 lt. et ne rapportait que 5 500 1t. en y comprenant une contribution que la Poste avait accepté de fournir au Secrétariat d’Etat à la Marine. D’après Le Couteulx et Cie, l’excédent des dépenses sur les recettes aurait été entre le 1er septembre 1783 et décembre 1786 de 897207 lt. 14 s. 4 d.96. L’augmentation du nombre des directions décidée par l’édit du 16 décembre 1786 ne modifia pas la situation financière difficile de Le Couteulx et Cie. En 1787, les pertes atteignaient 217 841 lt. 10 s. 8 d.et il fallait y ajouter le coût de l’achat de dix paquebots s’élevant à 1467470 lt. Pour faire face à l’ensemble de ces dépenses Le Couteulx et Cie aurait au total avancé 2 703 218 lt. auquel il fallait ajouter des intérêts d’un montant de 96781 lt. 4 s 7 d. Or, les remboursements qui lui avaient été consentis depuis 1783, en y comprenant des subsistances conservées dans un magasin de Lorient n’atteignaient que 1 105 196 lt. En conséquence, Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx réclamait du Secrétaire d’État à la Marine 1 694802 lt., mais il n’obtint que 1 200000 lt. qu’il transporta, après qu’il ait quitté en décembre 1788 la maison parisienne, à Jean-Barthélemy Le Couteulx et Laurent-Vincent Le Couteulx qui dirigeaient depuis cette date Le Couteulx et Cie97.

    92Ce type de rapports avec les États-Unis a donc été peu rentable pour Le Couteulx et Cie. D’autres, au contraire, lui ont été plus profitables. C’est le cas des importations de tabac en provenance des États-Unis, en collaboration avec Robert Morris. Ce dernier avait abandonné après le traité de Versailles sa charge de Surintendant des Finances pour revenir aux affaires. Il s’était associé avec Gouverneur Morris, un de ses anciens assistants alors qu’il exerçait ses fonctions de responsable financier au Congrès, dans une firme new-yorkaise William Constable John Rucker and Co. L’objectif principal de Robert Morris qui détenait en compagnie de Gouverneur Morris 50 % du capital de cette société consistait à conquérir le monopole des exportations de tabac en direction de la France98.

    93Grands producteurs de tabac, les 13 colonies américaines avant la Guerre d’indépendance avaient comme unique débouché la Grande-Bretagne. Le tabac était ensuite réexporté vers d’autres pays européens dont la France où la Ferme générale possédait le monopole de fabrication et de vente. En 1775, peu de temps avant le début de la guerre avec la métropole britannique, le premier Congrès américain avait interdit le négoce du tabac avec la Grande-Bretagne, ce qui incita l’administration française à tenter de s’emparer de la totalité des exportations américaines de tabac99. Plusieurs contrats furent signés en 1776 et 1777 notamment entre le fermier général Paulze, président du comité du tabac de la Ferme générale et Benjamin Franklin qui représentait plusieurs négociants dont Robert Morris, mais en raison des menaces de la Royal Navy sur le transport maritime, aucun de ces contrats ne put être satisfait. Il fallut attendre le retour à la paix pour que de nouvelles négociations s’engagent entre la Ferme générale et Robert Morris. Ce dernier proposait, en novembre 1783, via Le Couteulx et Cie, de fournir du tabac au prix de 40 lt. le quintal, mais son offre fut refusée par la Ferme générale car celle-ci avait préféré s’entendre avec deux autres exportateurs de tabac américain, Jonathan William, un petit-neveu de Benjamin Franklin et William Alexander100. Mais cette transaction échoua également ce qui permit en 1784 à Robert Morris de revenir à la charge et de renégocier avec la Ferme générale. Il bénéficiait de l’appui de Simon-Emmanuel-Julien Lenormand, l’ancien associé de la maison Le Couteulx de Cadix rentré en France et devenu receveur général des Finances et qui était un ami de Michel Pignon un des responsables de la Ferme générale. Simon-Emmanuel-Julien Lenormand, après avoir pris contact avec Le Couteulx et Cie fut un des artisans du contrat qui fut signé en janvier 1785. Robert Morris s’engageait à livrer 60000 boucauts (1 boucaut représentant 9 à 10 quintaux) pendant une durée de trois ans au prix de 36 1t. le quintal, lequel équivalait à 100 livres-poids, ce qui représentait un total de 21 600000 lt. soit selon J.M. Price, le contrat le plus important de l’Ancien Régime. Un quart du tabac provenait de la rivière James, un autre quart du Maryland et le reste des rives du Potomac. Les tabacs devaient être débarqués à Bordeaux, Morlaix, Dieppe et au Havre. Dans cette dernière ville, ils seraient reçus par Ruellan et Cie une maison de commerce commanditée par les Le Couteulx. Simon-Emmanuel-Julien Lenormand devait au nom de la Ferme générale verser un mois après leur arrivée le montant du prix à Le Couteulx et Cie de Paris, laquelle avait déjà reçu de la part de Lenormand un million de livres d’avance et Robert Morris tirait des lettres de change sur eux101.

    94On ignore ce que Simon-Emmanuel-Julien Lenormand perçut, en revanche, on sait que Le Couteulx et Cie qui avait décliné d’entrer dans la société montée par Robert Morris obtint une commission s’élevant à 2 lt. le quintal soit 400000 lt. par an.

    95L’année 1785 fut donc pour Le Couteulx et Cie une année très faste. En effet, à cette date elle occupait un rôle central dans les importations de deux produits, le tabac et les piastres qui représentaient une part considérable dans les importations françaises. Mais le contrat entre Robert Morris et la Ferme générale fut rapidement contesté notamment par le Britannique Robert Herries et le Français Simon Bérard appuyé par Jefferson, l’ambassadeur des États-Unis en France, La Fayette, Dupont de Nemours qui firent pression sur le contrôleur général des Finances Calonne lequel dût réunir, en 1786, un certain nombre d’intéressés dans sa maison de Bemy. On reprochait à Robert Morris de ne pas, en échange de ses ventes de tabac, acheter des marchandises françaises alors qu’il en faisait l’acquisition en Grande-Bretagne102. Cela confirmait le fait qu’après la naissance des États-Unis, la Grande Bretagne était redevenue son premier partenaire commercial sans que la France puisse la supplanter. Pourtant, Calonne se refusa à mettre un terme au contrat de Robert Morris se contentant de promettre d’interdire son renouvellement lorsque les trois ans seraient écoulés.

    96La collaboration sur la vente du tabac ne fut pas la seule existant entre Robert Morris et Le Couteulx et Cie. C’est pour cela qu’en novembre 1785 Laurent-Vincent Le Couteulx donna une procuration tant en son nom qu’en celui de sa société à Robert Morris « écuyer à Philadelphie » pour « régir, administrer et gouverner toutes les affaires qu’ils ont dans le continent américain »103. Parmi celles-ci, figurent les achats de terre aux États-Unis que Robert Morris leur a proposé d’acquérir. Ce dernier s’est en effet lancé dans des spéculations foncières qui lui ont permis de s’emparer de plusieurs centaines de milliers d’acres en Pennsylvanie et dans la vallée de l’Ohio. Il a entrepris d’en vendre non seulement à des Américains mais également à des étrangers comme les Le Couteulx.

    97En 1785, Louis Le Couteulx de Caumont, fils d’un juriste rouennais, et qui avait pendant quelques années travaillé à Cadix prit la décision de s’établir aux Etats-Unis pour y devenir fermier et Le Couteulx et Cie intervint auprès de l’ambassadeur Jefferson pour qu’il lui fournisse des lettres de recommandation. Mais il avait également reçu une mission de la maison familiale : il devait régler avec Robert Morris les litiges qui les opposaient et il était chargé d’investir 30 à 40 000 lt. en terres, moitié pour lui, moitié pour Le Couteulx et Cie en vertu d’un contrat signé le 8 septembre 1786 avec ses parents104. Il partit à la fin de 1786 à bord d’un paquebot assurant les liaisons entre la France et les États-Unis. Arrivé aux États-Unis, Louis Le Couteulx de Caumont conformément à ce qu’il avait conclu avec les dirigeants de la firme parisienne acheta plusieurs dizaines de milliers d’acres. Quelques années plus tard, Laurent-Vincent Le Couteulx possédait 49 885 acres et Barthélemy-Jean-Louis 15 000 en Virginie évaluées à 45 000 lt.105.

    98L’établissement de Louis Le Couteulx de Caumont comme fermier ne pouvait satisfaire vraiment Le Couteulx et Cie. En effet après l’indépendance des États-Unis, elle désirait y fonder une filiale comme l’avaient fait plusieurs autres sociétés françaises. Ce qui l’intéressait, c’était le commerce des fourrures, une des grandes activités américaines en expansion. Elle s’adressa à Thomas Jefferson afin qu’il lui procure un partenaire américain et qu’il lui désigne une ville pour y installer une filiale. Les dirigeants de la firme étaient intéressés par Baltimore, Philadelphie ou New-York mais l’ambassadeur américain estimait que l’endroit le plus adéquat serait la ville d’Alexandria sur le Potomac et il entra en correspondance avec George Washington afin que celui-ci cherche un partenaire éventuel pour les Le Couteulx et qu’il montre à quel point Alexandria était le meilleur endroit des États-Unis pour participer au commerce des fourrures. Le futur premier président des États-Unis lui répondit en mai 1787 allant dans le même sens que Jefferson. Alexandria était la ville la plus propre pour le commerce des fourrures et il proposait comme associé des Le Couteulx le colonel John Fitzgerald106. En fin de compte, les Le Couteulx renoncèrent avant 1789 à établir un comptoir à Alexandria ou dans une autre ville américaine. Ils ne le firent qu’en 1793 alors que la France était en guerre contre la Première coalition et que les actifs de leur maison de Cadix étaient placés sous séquestre. Ils envoyèrent à New-York, Henri Chériot, un ancien commis de plusieurs maisons de Cadix afin qu’il dirige une maison de commerce dans laquelle Simon-Emmanuel-Julien Lenormand avait pris, comme eux, une participation107.

    99Tabac, fourrures ce n’étaient pas les seuls produits qui intéressaient les Le Couteulx. La branche rouennaise entra en communication avec le négociant Ralph Izard, un vendeur de riz, avec Nathaniel Barret qui exportait de l’huile de baleine que les Le Couteulx utilisaient dans une manufacture qu’ils avaient fondée à Saint-Sever et qui était destinée à fournir de l’huile pour l’éclairage des villes108. En 1790, Le Couteulx et Cie s’adressait à une autre maison américaine située à Boston, John et Richard Codman à laquelle elle passait de grosses commandes d’huile de baleine et de potasse qu’elle fut contrainte d’annuler quelques semaines plus tard en raison de la baisse du change français qui rendait les denrées américaines trop coûteuses109.

    100À partir de 1789, les questions financières revinrent au premier plan des relations franco-américaines, même si la mauvaise récolte française de 1788 permit aux Américains d’exporter vers la France des blés ainsi que de la farine. Depuis la fin de la guerre d’indépendance américaine, le gouvernement des États-Unis n’avait pas eu la possibilité de rembourser les avances françaises qui lui avaient permis de financer sa participation au conflit. La France aurait prêté aux Insurgents 43 millions de livres dont 9 accordés gratuitement. Les États-Unis devaient donc rembourser 34 millions en quinze ans, mais il fallait y ajouter des intérêts qui, selon Thomas Jefferson, s’élevaient à 6 850000 lt.110. Or, Robert Morris, qui devait désormais faire face à de graves difficultés financières, pensa pouvoir s’en sortir s’il rachetait au gouvernement français les créances américaines dues à la France qu’il écoulerait ensuite aux États-Unis. 11 décida d’envoyer en France Gouverneur Morris, un de ses associés, qui arriva au Havre en janvier 1789111. Il se rendit ensuite à Paris où il ne tarda pas à entrer en relations avec les Le Couteulx, les partenaires de Robert Morris, bien que désormais les relations entre eux soient tendues en raison des différends portant sur la liquidation du solde des livraisons opérées par Robert Morris112.

    101Gouverneur Morris et les dirigeants de Le Couteulx et Cie rencontrèrent Necker revenu au pouvoir et lui proposèrent le rachat de la dette américaine en la réglant en partie en argent, en partie en blés et farines américains. Combinaison que le ministre français pouvait accepter étant donné la disette qui menaçait la France113. Pourtant, à eux seuls, les Le Couteulx ne pouvaient disposer des fonds nécessaires au rachat partiel de la dette américaine. C’est pourquoi Gouverneur Morris décida de se rendre à Londres avec un autre Américain, Daniel Parker, un proche des Le Couteulx. Mais ce voyage qui eut lieu au cours de l’été 1789 se révéla infructueux, aucune banque britannique n’acceptant de fournir des sommes importantes à Gouverneur Morris. C’est alors que Daniel Parker, toujours en accord avec Le Couteulx et Cie, ayant pris contact avec Jacob Van Staphorst, un banquier hollandais, fit une nouvelle proposition à Necker. Il s’agissait d’émettre un emprunt en Hollande auprès de deux maisons de banque à Amsterdam, Wilhem et Jan Willinck et Nicolas et Jacob Van Staphorst, qui permettait le rachat de la créance due par les États-Unis à la France114. D’après Jefferson, il aurait fallu emprunter 21 millions de florins car désormais la dette se montait à 45 000000 lt.115. Peut-être à cause de cette importance, le projet échoua une nouvelle fois.

    102Ces échecs successifs ne décourageaient pas les hommes d’affaires américains qui trouvèrent l’appui d’Alexandre Hamilton devenu secrétaire au Trésor et qui estimait que la levée d’un emprunt de 3 millions de florins en Hollande permettrait de mettre fin aux différends existant entre la France et les États-Unis. Un négociant de Boston, James Swan, proche de Hamilton partit pour l’Europe. Il rencontra les Le Couteulx qui modifièrent son plan de règlement de la dette américaine étant « the soûl of amendment »116. James Swan reçut également l’appui d’une autre maison de banque parisienne d’origine suisse, Schweitzer, Jeanneret et Cie, mais il ne connut pas plus de réussite que ses prédécesseurs.

    103Si la maison Le Couteulx et Cie ne parvint pas en accord avec Gouverneur Morris ou James Swan à obtenir des profits qu’aurait engendré le transfert de la dette américaine à des citoyens des États-Unis qu’elle appuyait, elle prit sa revanche en important de grandes quantités de blé et de farine en participation avec Gouverneur Morris avec qui elle acheta aux États-Unis 30000 quintaux de farine117. James Swan lui avait proposé de son côté de se livrer à des achats de blé, de farine, de riz, de bois et de tabac pour un montant annuel de six millions de livres118.

    104Le commerce du tabac continuait à intéresser Le Couteulx et Cie. Elle s’engagea dans une transaction portant sur du tabac de Virginie qui devait être expédié à Amsterdam et qui serait ensuite vendu par « sa filiale » (sans doute Botereau et Cie). Le paiement des achats devait être effectué par une banque de Londres, Puller et Cie, qui tirerait ensuite des lettres de change sur Le Couteulx et Cie de Paris après avoir versé une commission à Gouverneur Morris sur un compte établi à Londres. La maison Le Couteulx ayant reçu de l’argent versé par les acheteurs hollandais de tabac rembourserait avec des intérêts les sommes payées par la maison londonienne119.

    105Cette opération entra-t-elle en vigueur ? On ne le sait mais il est certain que depuis la guerre d’indépendance américaine, Le Couteulx et Cie avait entrepris d’étendre ses liens financiers et commerciaux avec un pays qui à terme, selon elle, devait être pour la France un partenaire privilégié.

    Les prises de contrôle des sociétés de commerce

    106Le Couteulx et Cie qui a considérablement augmenté ses activités bancaires et financières au cours des dernières années de l’Ancien Régime n’en a pas pour autant abandonné les opérations commerciales. Pour l’essentiel, c’est toujours la branche rouennaise qui s’en charge comme l’indique encore en 1776 la maison de Paris à celle de Roux de Marseille :

    « Le genre de nos affaires icy n’étant point compatible avec la marchandise nous avons laissé cette branche aux Mrs de Rouen auxquels vous pourrez vous adresser »120.

    107Toutefois, dans les années qui précèdent la Révolution, la branche parisienne entend innover. Alors qu’au cours du xviie siècle et de la plus grande partie du xviie siècle, elle avait soigneusement évité de devenir actionnaire des grandes compagnies de commerce par actions, elle va désirer, grâce souvent aux prêts qu’elle leur a consentis, de prendre le contrôle d’entreprises qui ont vu le jour dans les décennies 1770 et 1780. Ses résultats ne seront pas à la mesure de ses espérances de sorte qu’elle se rabattra sur la commandite d’une maison de commerce plus classique, Ruellan et Cie du Havre.

    108À la fin de l’Ancien Régime et au cours des premières années de la Révolution, Rouen demeure un port importateur de matières premières même si elle doit souvent passer par l’intermédiaire du Havre pour les recevoir car les bâtiments de gros tonnage peuvent de moins en moins remonter la Seine121. Les marchandises qui parviennent dans la capitale de la Normandie sont pour l’essentiel des matières premières destinées aux industries textiles. De l’Espagne, viennent la laine, la soude et l’huile d’olive, des Antilles ou du Levant, le coton destiné à la fabrication des siamoises. La maison Le Couteulx et Cie de Rouen demeure toujours avec Quesnel frères, Jean Nicolas Ribard et Levieux, Veuve de Fontenay et fils et Midy frères, une des plus grandes importatrices des laines espagnoles122. Ces firmes s’adressent à des maisons de Bilbao ou de Pampelune mais il leur arrive de faire également appel à des maisons bayonnaises comme Veuve Lalanne et Cie. Ainsi, un des dirigeants de cette maison de commerce, Jean-Pierre Lalanne, parti en 1786 à Vinuesa, une des villes de la Vieille Castille où sont établis d’importants lavoirs destinés à purifier la laine écrit à Cabarrus et Lalanne de Madrid qu’il vient d’acheter à un marchand espagnol, Santiago Merino, des laines en compte à demi avec Mrs Le Couteulx et Cie de Rouen123. Mais l’Espagne, semble-t-il n’est pas le seul marché où les Le Couteulx achètent des laines. Ils se seraient tournés vers l’Angleterre si l’on en croit un noble du pays de Caux, le chevalier de Lamerville à qui la maison de Rouen a fourni des béliers espagnols et qui écrit dans un ouvrage intitulé Observations pratiques sur les bêtes à laine de la province de Berry publié en 1786 qu’« un homme d’un nom distingué dans le commerce de l’Europe M. Le Couteulx le jeune (il s’agit de Jean-Barthélemy), m’a attaché à cette idée que si la laine d’Angleterre n’est pas tout à fait égale en finesse à cette superbe laine espagnole elle est ce qui est préférable pour la consommation du peuple » et que le même Le Couteulx lui avait indiqué que la perfection de la draperie dépendait du mélange de ces deux types de laines124.

    109Ces laines sont revendues à des fabricants français mais également à des étrangers. Les manufacturiers normands occupent une place importante parmi les acquéreurs. À Elbeuf, il s’agit de Pierre Grandin l’aîné lequel fait également appel à plusieurs négociants de Rouen tels Ribard et Levieux, Midy et Cie, Léon Duvergier et Nicolas Le Boucher mais aussi à Veuve Lalanne et Cie de Bayonne et à Dabadie frères et Laurencin et Cie de Bilbao125.

    110La manufacture royale des Andelys fondée au 17e siècle et dirigée au début des années 1770 par Louis Joseph Flavigny et Jean-Charles Ribouleau fait également appel à Le Couteulx et Cie. Cette manufacture qui fabriquait à l’imitation des Anglais des draps appelés « double broche » c’est-à-dire épais et serrés était en rapport avec des négociants rouennais qui lui fournissaient des laines. Or, dans les années 1770, elle se trouva dans une situation difficile et fut incapable de payer ses fournisseurs. Deux d’entre eux, Duvergier et Antoine-Louis Le Couteulx, tentèrent d’éviter sa faillite en proposant de lui fournir pour 220 000 lt. de laines en acceptant de différer le paiement à condition que l’Etat prête de son côté 100000 lt. aux dirigeants de la manufacture126. Cette aide fut certainement efficace car la manufacture des Andelys évita la faillite et était encore en activité pendant le le Empire où elle employait 320 ouvriers127.

    111La Normandie n’était pas le seul débouché des laines stockées par Le Couteulx et Cie de Rouen. Les fabricants de Sedan à l’instar de Jean Abraham Poupart de Ncuflize, le grand manufacturier protestant de Sedan, faisaient partie de leur clientèle. En juin 1781, d’après son livre de manufacture, il possédait dans ses greniers des laines filées qui lui avaient été vendues par Le Couteulx et Cie soit 18 balles Paular et 8 balles Saint Jean128. Au cours des années 1780, Le Couteulx et Cie se vit ouvrir un nouveau débouché, celui des Pays-Bas autrichiens. Dans la région de Verviers, de nombreuses manufactures de laines avaient vu le jour. Les entrepreneurs utilisaient des laines espagnoles qu’ils faisaient venir soit directement soit en s’adressant à des intermédiaires d’Ostendc ou d’Amsterdam. Or, au début des années 1780 les manufacturiers de la région de Verviers s’adressèrent à des négociants français de Bayonne, d’Orlcans et de Rouen pour acheter des « laines améliorées »129. Parmi ceux qui s’y adonnèrent le plus, figurait la société Pitot Godart établie à Houdimont près de Verviers. Parmi les bénéficiaires de cette nouvelle orientation on trouvait Le Couteulx et Cie de Rouen, laquelle par l’intermédiaire de Jean Barthélemy Le Couteulx donnait en 1787 une procuration à Arnold Pitot fils « marchand à Haudimont » auquel il accordait pouvoir « de recevoir toutes les sommes légitimement dues à Le Couteulx et Cie par divers marchands, fabricants et autres débiteurs tant de Hodimont, Verviers, Eupen, Montjoye, Aix-la-Chapelle que d’autres lieux de la dépendance de Sa Majesté impériale et royale et Monseigneur le Prince évêque de Liège pour laines et marchandises vendues tant par Mrs Le Couteulx que par le ministère du sieur Pitot »130.

    112Les dernières décennies de l’Ancien Régime ont vu naître un grand nombre de compagnies de commerce par actions qui ont bénéficié fréquemment de l’appui du pouvoir royal. Le Couteulx et Cie de Paris adopta une stratégie qui devait espérait-elle lui permettre d’en prendre le contrôle. La Compagnie de la Guyane devenue ensuite Compagnie du Sénégal, la Compagnie des Eaux des frères Périer, la Nouvelle Compagnie des Indes orientales fondée à l’initiative de Calonne en 1785 furent l’objet de son intérêt et de sa participation sans que les résultats soient à la hauteur de son espérance.

    113C’est à partir de 1779 que la Compagnie de la Guyane retint l’attention des dirigeants de Le Couteulx et Cie131. Cette compagnie avait vu le jour en 1772 sous le nom de Compagnie d’Afrique occidentale. À cette date, elle disposait d’un capital de 400 000 lt. porté ensuite à 1 200000 lt. qui fut apporté par 12 associés. Elle avait pour objet la traite des Noirs et l’achat de la gomme sur les côtes et à l’intérieur de l’Afrique. Très rapidement, elle connut de graves difficultés à cause des erreurs commises par son directeur général en Afrique, l’abbé Desmarets, qui fut ramené en France et incarcéré dans une prison du Havre. Par un arrêt du Conseil d’Etat du 4 février 1774, il fut accordé à quatre des douze associés, Jacques Paulze, Jean-Baptiste Harenc de Borda et Charles Mazières, tous trois fermiers généraux et le comte de Jumilhac, gouverneur de la Bastille, pour une durée de trente ans, les comptoirs appartenant à la monarchie et disséminés entre le Cap Blanc et la rivière Casamance. Les quatre dirigeants obtinrent ensuite la concession de la Guyane, ce qui conduisit l’Assemblée générale des actionnaires du 9 mars 1776 à transformer le nom de la compagnie en Compagnie de la Guyane. Entre temps, elle était devenue une compagnie par actions en en émettant mille d’un montant unitaire de 500 lt. qui furent achetées par vingt-quatre actionnaires appartenant à la haute noblesse et à la Ferme générale. Parmi eux figuraient le duc de Duras, possesseur de 30 actions, le baron de Beaumanoir qui en avait acquis 121, Claude-Louis, marquis de Saisseval et Claude-Henri comte de Saisseval propriétaires de 30 actions chacun132. Comme le capital de la compagnie de la Guyane se révéla rapidement insuffisant une seconde émission fut organisée et c’est alors que Barthélemy-Jean-Louis devint avec 39 actions un actionnaire de la Compagnie en compagnie notamment de Théodore-Marion de Montjurion.

    114L’arrivée au sein de cette compagnie d’un grand nombre de nobles titrés a-t-elle des conséquences positives sur les activités de la Compagnie de la Guyane comme la traite des Noirs depuis Gorée et la mise en valeur de la Guyane ? Ces actionnaires nobles appartenant à ce que Guy Chaussinand-Nogaret dénomme « le courant le plus novateur, le plus dynamique et le plus moderniste des affaires »133 sont-ils parvenus à faire de leur compagnie une entreprise prospère ? On doit répondre par la négative. Au début des années 1780, la Compagnie du Sénégal traversait déjà une crise très grave due en partie à l’intervention française dans la Guerre d’indépendance américaine. D’après un rapport daté du 25 février 1780 de Jacques Paulze, le véritable dirigeant de la Compagnie, comme le dirent les actionnaires en 1788, selon lesquels il avait eu le projet de la formation de la Compagnie et avait obtenu plus qu’un autre l’encouragement des ministres134, la Compagnie de la Guyane qui possédait 15 bâtiments avant le conflit en avait perdu 5 et elle continua à en voir disparaître. D’après une assemblée générale tenue le 10 mai 1780, le montant total des pertes de la Compagnie de la Guyane s’élevait à 742 836 lt. Pour pouvoir continuer ses activités il fallait disposer de fonds supplémentaires. Jacques Paulze proposa d’émettre de nouvelles actions pour augmenter le capital mais il ne recueillit que 48 000 lt. La Compagnie de la Guyane fut donc contrainte de faire appel à des prêteurs. Le Couteulx et Cie lui accorda un crédit de 600 000 lt. et 1200 000 lt. furent remises par une maison de commerce nantaise Charet et Ozenne, laquelle s’engagea en février 1781 de fournir cette somme jusqu’en 1784. Une partie des 1 200 000 lt. soit 900 000 lt. devait être fournie en lettres de change sur les banquiers parisiens Jean-François Batbedat, remplacé ensuite par Laval et Wilfelsheim et Rilliet et Cie tandis que Jean Cottin fils et Jauge et Le Couteulx et Cie s’engageaient pour le reste135.

    115Ces avances permirent à la Compagnie de la Guyane de survivre sans qu’elle puisse cependant retrouver son équilibre financier. Sa situation difficile conduisit certains de ses actionnaires en particulier Jacques Paulze et son gendre Antoine-Laurent Lavoisier à se retirer. Une nouvelle direction de la Compagnie fut mise en place comprenant le marquis de Saisseval et Jean-Baptiste Lemoine de Belle-Isle, chancelier du duc d’Orléans et parent des Le Couteulx. Ce dernier souhaita que Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx fût consulté sur les perspectives à venir de la Compagnie et il fut appuyé par les autres actionnaires qui estimaient qu’ils pouvaient bénéficier des « lumières d’un homme familiarisé avec les plus grandes spéculations ». A l’unanimité, les actionnaires autorisèrent Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx à assister à toutes les assemblées du conseil d’administration de la Compagnie de la Guyane avec voix délibérative, ce qui en faisait un des principaux dirigeants.

    116C’est à ce titre qu’il rencontra en 1783, en compagnie de Théodore Marion de Montjuizon, l’intendant du commerce Jean-François Tolozan afin d’éviter la faillite de la Compagnie de la Guyane. La situation de celle-ci s’était encore dégradée puisqu’on mai 1783 son passif dépassait son actif de 1 583 228 lt. Les trois participants à la conférence de 1783 s’entendirent pour établir un plan mettant sur pied la formation d’une nouvelle compagnie qui disposerait de bases plus solides et dont les opérations seraient moins compliquées que celle de l’ancienne136. Après que Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx eut corrigé le préambule du plan et que le duc d’Orléans l’ait fortement appuyé, le gouvernement l’accepta137. La Compagnie de la Guyane devait être dissoute et remplacée par une compagnie intitulée Compagnie du Sénégal. Celle-ci perdrait le privilège de la traite des Noirs dans une partie de l’Afrique occidentale et obtiendrait en contrepartie le monopole de la traite de la gomme pendant neuf années à partir de 1784. (Ce serait Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx qui « aurait contribué de tout son crédit à obtenir de Mr de Castries le privilège du commerce du Sénégal »138. Le capital de la nouvelle compagnie serait porté à trois millions de livres divisés en 3000 actions de 1 000 lt. et les actionnaires de la Compagnie de la Guyane pourraient faire partie de la nouvelle société en lui vendant une partie des biens et des terres situées à Oyapock en Guyane qui leur avaient été concédés par la monarchie. Un arrêt du Conseil d’Etat du 28 décembre 1783 reprit malgré les protestations de plusieurs chambres de commerce dont celle de Nantes le plan établi par Le Couteulx, Montjuizon et Tolozan.

    117Au cours de l’année 1784, le placement des actions commence à être effectué. Le duc de Duras proposait d’en retenir 90, le marquis de Saisseval 120, Lemoine de Belle-Isle 156, Mr de Saint Romain 216, M. Gougenot 100. Mais ce fut Le Couteulx et Cie représenté par Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx qui en serait devenu le principal actionnaire puisqu’il proposait d’en acquérir 300. De plus désiraient entrer dans la société des partenaires habituels de Le Couteulx et Cie comme Nicolas Olive, Robert Pitot et Louis-Marie Marion de la Brillantais, un négociant de Saint-Malo, lesquels l’année suivante allaient participer à la spéculation sur les actions de la Banque Saint-Charles139.

    118Pourtant la tentative de prise de contrôle de la Compagnie du Sénégal par Le Couteulx et Cie n’aboutit pas. En effet, avec le soutien du Maréchal de Castries, des négociants du Havre, Massieu de Clerval, Chauvel et fils, Veuve Feray et Massieu, Chevremont et Cie et de Rouen, Achard frères, Veuve de Fontenay et fils, Bournissien-Despreaux et fils, Samuel Joly et fils de Saint-Quentin et Jacques Fraisse entrepreneur de la manufacture d’indiennes d’Arcueil prirent le contrôle de la Compagnie du Sénégal et un nouvel acte de société en janvier 1785140 sanctionna le renversement de situation. Pour Le Couteulx et Cie qui avait proposé d’avancer un million de livres pour apaiser les poursuites des anciens créanciers de la Compagnie de la Guyane, l’irruption de ce grand nombre de négociants normands avec lesquels elle devait avoir des rapports difficiles l’affaiblissait et il n’était pas question d’y demeurer : le 30 janvier 1785, elle abandonna avec Nicolas Olive et Robert Pitot toute participation dans la Compagnie du Sénégal se contentant désormais d’obtenir le remboursement des avances consenties à la Compagnie de la Guyane et que les nouveaux dirigeants de la Compagnie de la Guyane s’étaient engagés en janvier 1785 à effectuer. Elle y parvint partiellement : le 18 août 1786, Jacques Fraisse au nom de la direction de la Compagnie du Sénégal lui remit 226896 lt. 6 s en espèces « en déduction de plus grande somme due à lui par l’ancienne Compagnie de la Guyane » dont le compte devait être fait incessamment sans qu’il soit davantage précisé141.

    119Une autre compagnie par actions dans laquelle Le Couteulx et Cie s’impliqua quoiqu’à un moindre degré fut la Compagnie des Eaux de Paris. Par un édit du 7 février 1777 que suivirent des lettres patentes enregistrées par le Parlement de Paris le 16 juillet 1778, le pouvoir royal accordait à Constantin-Jacques Périer « ingénieur-mécanicien » le privilège pour quinze ans d’élever l’eau de Seine grâce à des machines à vapeur et de la distribuer grâce à des conduits et des tuyaux dans les différents quartiers de Paris. Avec son frère Charles-Auguste Périer des Garennes, ingénieur-mécanicien comme lui, le bénéficiaire du privilège décida de constituer en 1778 une société par actions d’un capital de 1 440000 lt. divisé en 1 200 actions de 1 200 l. chacune142.

    120À cette date, aucun Le Couteulx ne figurait parmi les premiers actionnaires alors que plusieurs banquiers comme Isaac Panchaud, Jean Mallet, Frédéric-Pierre Komemann et Jean-Pierre-Louis Pache de Montguyon s’y étaient intéressés.

    121Dès ses premiers pas, la Compagnie des Eaux de Paris, tel était son intitulé, connut une existence difficile à cause du nombre limité des acheteurs de l’eau de Seine. Elle ne parvint à survivre que grâce à des prêts dont l’un fut consenti en 1784 par le contrôleur général des Finances et garanti par deux de ses actionnaires Baudart de Saint-James et Mégret de Sérilly.

    122Son existence difficile provoqua une série d’offensives contre les frères Périer. Parmi les principaux adversaires figuraient le marquis de Saisseval, Mirabeau qui publia en novembre 1785 un pamphlet dans lequel il dénonçait la spéculation sur les actions de la Compagnie qui, depuis août 1784, étaient portées à 4000, ce qui provoqua une réponse d’un des dirigeants de la Compagnie des Eaux, Caron de Beaumarchais.

    123À partir de 1785, le banquier Louis Pourrat qui avait commencé sa carrière à Lyon avant de s’établir à Paris décidait de s’emparer du plus grand nombre possible d’actions de la Compagnie des Eaux de Paris. Or, en janvier 1785, une de ses filles, Charlotte, avait épousé Laurent-Vincent Le Couteulx, un des dirigeants de Le Couteulx et Cie. Désormais le beau-père et le gendre allaient coopérer dans plusieurs domaines et notamment dans la tentative de prise de contrôle de la Compagnie des Eaux de Paris. À la fin de l’année 1787, Louis Pourrat possédait 600 actions de la Compagnie des Eaux d’une valeur nominale de 720 000 lt. Il était devenu un des plus gros actionnaires mais cela ne lui permettait pas de faire partie du conseil d’administration toujours tenu en mains par les frères Périer143.

    124En 1788, la Compagnie des Eaux fut fragilisée par la faillite d’un de ses principaux actionnaires, Baudart de Saint-James. Louis Pourrat en compagnie de Claude-Odile-Joseph Baroud qui avait également acquis de nombreuses actions proposa à la ville de Paris de prendre en mains la Compagnie des Eaux, ce qui lui permettrait de se tirer d’affaires144. En février 1788, les actionnaires acceptèrent un projet de traité avec la ville de Paris, les frères Périer en furent écartés et de nouveaux administrateurs de la société dont désormais l’Etat était le principal actionnaire et qui fut dénommée Administration Royale des Eaux de Paris furent désignés. Il s’agissait de Louis de Gouy, marquis d’Arcy qui avait occupé une telle fonction dans la compagnie Périer, Louis de la Fleurye, Louis Pourrat, Laurent-Vincent Le Couteulx et Guillaume-Louis d’Arthenay qui était un parent de Jean-Barthélemy Le Couteulx. Quant à Louis Pourrat, il dépendait très étroitement de Le Couteulx et Cie à qui il devait un million de livres que la maison parisienne lui avait fourni pour l’aider à rembourser d’énormes dettes qu’il devait au Trésor Royal145. Cela autorisa Laurent-Vincent Le Couteulx à impulser l’Administration Royale des Eaux de Paris jusqu’en août 1793.

    125La dernière grande compagnie de commerce par actions à laquelle les Le Couteulx s’intéressèrent fut la Nouvelle Compagnie des Indes Orientales fondée en 1785 à l’instigation de Calonne et du secrétaire d’Etat à la Marine le maréchal de Castries146. Toujours prudente, la maison Le Couteulx et Cie ne fit pas l’acquisition des actions en 1785 et aucun de ses membres ne fit donc partie de son conseil d’administration. Toutefois, une coopération entre les deux firmes allait rapidement s’imposer. En effet, pour pouvoir acheter des marchandises en Inde et en Chine, la Nouvelle Compagnie devait se procurer des piastres et Cadix était le seul port européen où elle pouvait en obtenir des quantités suffisantes. Elle ne tarda pas à prendre contact avec les Le Couteulx de Cadix qui, en 1785-1786, lui fournirent 800000 piastres moyennant une commission de ½ % soit l’équivalent de 20000 lt. Dans les années qui suivirent jusqu’en 1790, date où son monopole prit fin, la Nouvelle Compagnie des Indes Orientales continua à s’adresser à la maison Le Couteulx de Cadix, mais fit également appel à la maison Magon Lefer et Cie, autre maison gaditane d’origine française tout en ayant recours à celle de Le Couteulx pour se procurer des assurances maritimes147.

    126Cette coopération entre leur maison de Cadix et cette compagnie ne pouvait qu’inciter Le Couteulx et Cie de Paris à défendre cette dernière dont l’existence était contestée par un très grand nombre de négociants des ports français qui mettaient en cause son privilège exclusif et la fin de la liberté du commerce avec les espaces maritimes asiatiques. C’est cela qui explique que Jacques-Jean Le Couteulx accepta de faire partie d’une commission de neuf membres qui, avec les administrateurs, défendirent dans un mémoire intitulé Les Idées préliminaires sur le privilège exclusif de la Compagnie des Indes le monopole de celle-ci148.

    127Les Le Couteulx ne se contentèrent pas de s’entendre avec les dirigeants inamovibles de cette Compagnie des Indes. Ils appuyèrent un petit groupe de spéculateurs constitué par le comte de Seneffe, Pyron de Chaboulon et Claude Odile Joseph Baroud qui avaient formé, en liaison avec d’Espagnac une société destinée à faire monter la valeur des actions de la Nouvelle Compagnie des Indes. En 1787, d’Espagnac avait acquis 45 653 actions dont le prix tournait au début de l’année à 1 500 lt. Comme il ne disposait pas de fonds suffisants, ses partenaires demandèrent des avances à de nombreux banquiers. C’est ainsi que Le Couteulx et Cie leur fournit 1935 000 lt. tandis que Jacques-Jean Le Couteulx avançait 795 803 lt. 15 s.149. En échange, les actions étaient déposées en nantissement chez les prêteurs.

    128En mars 1787, le gouvernement, sous la pression de l’Assemblée des Notables qui dénonçait l’agiotage effréné mené par Baroud et d’Espagnac, décida d’exiler ce dernier et de procéder à la liquidation de la spéculation. Le 11 mars 1787, Calonne s’entendit avec deux des principaux banquiers parisiens, Emmanuel Haller de Girardot Haller et Cie et Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx de Le Couteulx et Cie et leur fournit une avance de 12000000 lt. pour y parvenir. Les deux hommes devaient récupérer les actions que les spéculateurs avaient déposées en nantissement et les remettre au notaire Duclos-Dufresnoy. Cependant, d’après Emmanuel Haller et Barthélemy-Jean-Louis, les 12 millions de lt. se révélèrent insuffisants pour y parvenir et ils auraient avancé 4705 000 lt. supplémentaires150. Somme immense qui allait susciter pendant les premières années de la Révolution des réclamations nombreuses de la part des représentants des deux maisons de banque sans qu’on sache s’ils ont obtenu gain de cause.

    129De toutes ces présentations, on constate que malgré leurs efforts, les Le Couteulx ne sont pas parvenus à prendre le contrôle ou même à jouer un rôle de premier plan dans ces compagnies de commerce par actions. Ils ont mieux réussi mais brièvement dans la prise en charge d’une maison de commerce classique, Ruellan et Cie du Havre.

    130Cette société commanditée par Le Couteulx et Cie, sans doute, depuis 1784151 fut mise en place alors que la branche rouennaise continuait ses activités. Peut-être est-ce dû aux difficultés que Le Couteulx et Cie de Rouen avait rencontrées lorsqu’elle avait voulu charger des toiles de coton en direction de la Guinée et de l’Angola en participation avec la maison havraise qui pratiquait la traite, Veuve Grégoire et fils. Or l’administration fiscale rouennaise voulait interdire aux négociants rouennais qui entreposaient leurs marchandises dans leur cité de les expédier au Havre et les faire embarquer pour l’Afrique152. Grâce à l’appui du contrôleur général des Finances, elle eut gain de cause. Il n’en demeurait pas moins que les sociétés de Rouen ne pouvaient se livrer pleinement à la traite négrière car comme l’écrivait Le Couteulx et Cie de Rouen « les armements pour la côte de Guinée exigent impérieusement des vaisseaux de 5 à 600 tonneaux. Les vaisseaux de ce port (Le Havre) ne peuvent remonter notre rivière et forcément les négociants de Rouen sont obligés de faire de pareils armements au Havre ou à Honfleur »153. Le Havre en effet encore plus que Honfleur était devenu un des premiers ports négriers français depuis le milieu du xviiie siècle et il arrivait au cours des années 1783-1793 en seconde position dans ce trafic juste derrière Nantes.

    131L’homme chargé de gérer la société de commerce commanditée par les Le Couteulx s’appelait Jean-Laurent Ruellan. Comme beaucoup de négociants du Havre, il n’était pas originaire de la ville mais venait de Saint-Malo où il était né et où il était devenu négociant, étant en relations avec la maison Bouffé père et fils de Paris, qui lors de sa faillite en 1780 lui devait 93 685 lt. et 2 s. 2 d.154. Peut-être ces pertes expliquent qu’il ait abandonné Saint-Malo pour le Havre où il s’installa rue Saint-Julien, paroisse Notre-Dame155. Dès la fin de 1784 il proposait à Alexandre Marcet de prendre une part dans une expédition en direction de la côte d’Angola en commun avec « Messieurs et Mesdames Le Couteulx »156.

    132Les opérations commerciales de Ruellan et Cie étaient très diversifiées. Elle envoyait des bâtiments en droiture vers les Antilles françaises dont certains étaient d’un fort tonnage. C’était le cas en 1787 où un de ses navires atteignait 800 tonneaux, ce qui en faisait un des plus élevés que l’on connaissait au Havre à cette date157.

    133Jean-Laurent Ruellan, on l’a vu, est devenu lorsque la tête de pont du service des paquebots en direction des États-Unis a été transférée au Havre, directeur de la régie comme il fut également le correspondant de Robert Morris lorsque celui-ci exporta du tabac en France pour la Ferme générale. De janvier 1786 au 3 septembre 1787 sur les 3 127 boucauts de tabac arrivés au Havre, il en reçut 824, soit plus du quart158. Et même après la dissolution de la régie des paquebots et la fin du contrat entre Robert Morris et la Ferme générale, il continua à être en relations avec les États-Unis. En juillet 1790 une annonce publiée par le Journal du Havre a indiqué que « le navire le Citoyen de Paris au port de 450 tx cloué en cuivre ayant trois ponts commandé par le capitaine Millet (c’est le beau-frère de Jean-Laurent Ruellan) partira pour Philadelphie dans les premiers jours d’août. S’adresser à Mrs Ruellan et Cie armateurs et propriétaires du dit navire »159. Ruellan et Cie était également en relations avec de nombreux négociants européens de Londres, de Hambourg, de Riga, de Gotebörg, de Saint-Petersbourg ou de Cadix160. Mais sa principale activité, ce fut la traite négrière. C’est en 1785 que, pour la première fois au Havre, le nom de Ruellan et Cie apparaît parmi les armateurs négriers. Cette année-là, il expédie en direction de la Guinée le navire les Cinq Cousines d’environ 300 tonneaux avec 50 hommes d’équipage et qui chargera 650 Noirs à Cabinda161. Entre 1785 et 1791 date de sa mort, il enverra 11 navires pour charger des Noirs dont deux, événement encore rare, pour le Mozambique162. Cela représente 6,8 % du total des bâtiments négriers qui sont partis du Havre entre 1785 et 1791, soit 145. La maison Ruellan et Cie durant ces six années est comparable aux sociétés négrières plus anciennes comme Foache père et fils, Bcgouen-Demeaux et Cie ou Louis Le Grand et Cie. Les capitaines des navires appartenant à Ruellan et Cie ont déchargé dans les Antilles françaises, surtout à Saint-Domingue, mais également en 1791 à La Havane plus de 2 500 esclaves.

    134Ses bons résultats ont permis à Ruellan et Cie, également grâce au soutien de Le Couteulx et Cie, d’acheter en 1791 à Louis Vinches « lieutenant à la suite des maréchaux de France » et son gendre Étienne-Joseph Billard avocat, une habitation établie en sucrerie située dans la plaine au fond de l’Ile aux Vaches dans le Sud de Saint-Domingue d’une surface de 207 carreaux avec maison principale, cases à nègres, sucreries « 309 têtes de nègres, négresses, négrillons et négrites », 60 mulets et 40 bêtes à corne pour le prix de 500 000 lt. dont Jean-Laurent Ruellan règle la moitié, soit 250 000 lt. en assignats163.

    135La percée de Jean-Laurent Ruellan ne s’explique pas seulement par l’appui que lui ont donné les Le Couteulx. En 1788, J.-P. Brissot, le fondateur de la société des Amis des Noirs adressait une lettre au Comité de Londres dans laquelle il indiquait qu’une des principales maisons engagées dans le commerce des Noirs est « celle des Lecouteu (sic) associé avec un marchand de nègres établi à Liverpool dont nous ignorons le nom »164. Il s’agissait de Miles Barber. C’est ce qu’indique Le Couteulx et Cie de Rouen chargé de la liquidation de la maison Ruellan et Cie et qui donne des procurations à plusieurs négociants pour les affaires concernant Miles Barber afin que les créanciers de ce dernier soient dédommagés165.

    136Miles Barber est un des plus grands négociants négriers britanniques. Depuis le milieu du xviiie, il s’est constitué un empire dans la région de la Sierra Leone et de la Guinée en prenant le contrôle des îles de Los où il a établi une maison pour ses agents, un magasin pour des marchandises, deux autres pour le vin et la poudre, des baraques pour les esclaves à vendre, un atelier de forgeron où des ouvriers fabriquent des harnais pour des chevaux et du bétail. Il a fait édifier un quai où un navire chargé de marchandises est ancré en permanence et plusieurs canots qui remontent les rivières. Miles Barber a également un grand nombre de factoreries sur la rivière Sierra Leone comme Porto, Loko ou Rokel et sur la rivière Sherbro comme Mesurado ou Bassa166. Or, Miles Barber avait été autorisé par Louis XVI à établir une maison d’armement négrier au Havre le 19 avril 1787 et sans doute s’associa-t-il d’une façon ou d’une autre à Ruellan et Cie. En tout cas, au moins un navire, Le Duc de Normandie appartenant à Ruellan et Cie, gagna les îles de Los pour charger 130 esclaves167.

    137Jean-Laurent Ruellan et les Le Couteulx ont donc utilisé les compétences d’un étranger pour rendre plus profitables leurs opérations commerciales. Pour les maisons Le Couteulx, la même stratégie fut adoptée pour le développement de leurs manufactures.

    Les Le Couteulx manufacturiers

    138Les différentes maisons Le Couteulx s’étaient bien gardé depuis leurs origines d’assurer une fonction d’entrepreneur. Il en va différemment sans qu’on puisse saisir leurs motivations au cours des dernières décennies du xviiie siècle, période où Le Couteulx et Cie va prendre le contrôle de plusieurs manufactures dont certaines sont d’une grande taille. Dans certains cas, cela s’explique par le fait qu’elle a prêté de l’argent à des propriétaires de manufactures qui se sont révélés incapables de rembourser leurs créances. Mais il lui arrive d’être à l’origine de la fondation d’une manufacture en s’appuyant sur des initiateurs dont certains sont étrangers comme l’Espagnol Eugenio Izquierdo ou l’Américain Daniel Parker.

    139Le soutien financier délivré à une entreprise permet de s’en emparer, parfois en partie. Il en a va ainsi de la manufacture Ribouleau et Cie d’Evreux. Associé de Louis-Joseph Flavigny dans la manufacture de draps des Andelys, Jean-Charles Ribouleau, sans doute à cause des embarras qu’elle subissait avait décidé de s’en séparer, mais il avait décidé d’en créer une autre à Evreux, une ville qui en manquait, en association avec un certain Louis Grangé. Très rapidement, il rencontra des difficultés qui le conduisirent, en 1787, à vouloir obtenir des avances de plusieurs maisons de commerce de Rouen, celles de Quesnel frères, Pierre Bourget et Le Couteulx et Cie qui sans doute lui fournissaient de la laine168. Celles-ci, considérant « le bien qui doit résulter pour la dite ville d’Evreux et même pour la province de conserver et d’étendre le travail d’une manufacture qui fournit une ressource assurée et journalière à un grand nombre d’ouvriers » consentirent à prêter 50000 1t. à Ribouleau et Cie soit 20000 lt. de la part de Le Couteulx et Cie, autant de Pierre Bourget et 10 000 lt. de Quesnel frères pour une durée de cinq ans. Mais en contrepartie, les prêteurs obtinrent un certain nombre de garanties. Un des créanciers, Pierre Bourget, se voyait assuré au nom des trois créanciers de la surveillance de tous les achats et les ventes de la manufacture et plus généralement de toutes ses affaires. Les dirigeants de Ribouleau et Cie étaient tenus d’envoyer à Rouen, tous les ans, un aperçu de leur situation ainsi que de fournir chaque premier janvier un inventaire que les créanciers auraient la possibilité de vérifier. Enfin, les trois prêteurs seraient libres de donner aux associés de la manufacture de draps d’Evreux « les avis et les conseils qu’ils jugeront les plus avantageux et ces derniers seront tenus de les suivre tant qu’ils seront débiteurs »169. Même s’ils n’étaient pas devenus les propriétaires de la manufacture, celle-ci dépendait des décisions des trois maisons de commerce rouennaises du moins jusqu’au remboursement des prêts.

    140Les Le Couteulx allèrent plus loin dans le contrôle de la manufacture de toiles peintes Garnier-Danse Thévart et Cie de Saint-Just, un faubourg de Beauvais. Fondée en 1776 avec un capital de 80 000 lt., elle comprenait trois associés dont l’un d’eux, le blanchisseur Claude Bureau, l’abandonna deux ans plus tard en ayant obtenu 70 000 lt. Dirigée désormais par Claude Antoine Garnier qui avait épousé une Danse et surtout Jean-Louis Thévart, elle était devenue à la fin de l’Ancien Régime une des premières manufactures d’indiennes de France170. Mais, elle avait traversé une série de difficultés qu’elle avait surmontées en empruntant des fonds, notamment à Le Couteulx et Cie de Paris. En 1783, l’inspecteur des manufactures Bruyard décrivait la manufacture d’indiennes Garnier Danse Thévart et Cie comme « immense » mais « demandant des fonds considérables pour être soutenue »171. Or, deux ans auparavant en 1781, les dirigeants de la manufacture d’indiennes avaient bénéficié d’un prêt considérable de Le Couteulx et Cie. Celle-ci leur avait avancé 250 000 lt. et peut-être parce qu’un fils Danse était employé dans la maison de banque Le Couteulx et Cie172. Ce ne fut qu’une première avance de Le Couteulx et Cie. En avril 1789, les entrepreneurs doivent faire appel à nouveau aux Le Couteulx. Jean-Louis Thévart souscrit une nouvelle obligation d’un montant de 38 000 lt. en faveur de Jacques-Jean Le Couteulx tandis que Barthélemy-Jean-Louis accordait une avance de 21 200 lt. à Claude-Antoine Garnier173. Comme Garnier et Thévart n’ont pu rembourser la totalité des sommes que leur avaient avancées les Le Couteulx, ils ont du leur céder « les maisons, bâtiments, cours, jardins et dépendances situés au village de Saint Just ainsi que les meubles, effets, ustensiles à Tusage et la manufacture », ces derniers étant évalués à 15 000 lt. Ils devront louer les bâtiments à Jacques-Jean Le Couteulx à raison de 2 400 lt. par an pendant douze ans et le matériel à Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx pour 1 600 lt. également par an pendant douze ans174.

    141Deux ans plus tard, Barthélemy-Jean-Louis estimera que sa part dans la moitié des bâtiments et des ustensiles de la manufacture s’élève peut-être à 70 000 lt. mais il semble bien que ni lui ni Jacques-Jean Le Couteulx n’aient pris une part dans le capital et qu’en conséquence ils ne sont pas entrés dans la direction de cette manufacture d’indiennes dont Jean-Louis Thévart demeurera encore quelques années le seul dirigeant.

    142Depuis les défaites de la marine française pendant la guerre de Sept ans, les gouvernements français ont accompli un grand effort pour pouvoir affronter la marine anglaise dans de meilleures conditions. Pourtant, cette dernière dispose à la veille de la guerre d’indépendance américaine de supériorités sur son adversaire potentiel. Parmi celles-ci, la technique du doublage en cuivre des bâtiments qui permet à ces derniers d’être protégés contre les coquillages et les tarets qui usent de façon très rapide les coques175. Les premiers essais de doublage en cuivre des vaisseaux de ligne britanniques ont eu lieu à partir de la décennie 1760. Les autres grandes puissances vont vouloir imiter la Grande-Bretagne et cela eut pour conséquence la naissance en France au début des années 1780 de la manufacture de doublage en cuivre de Romilly-sur-Andelle dont les Le Couteulx vont en prendre rapidement le contrôle.

    143Le fondateur de cette entreprise située à l’Est de Rouen, dans la vallée de l’Andelle est un lovérien, Michel-Louis Le Camus de Limare, fils de Jean-Charles Le Camus, un fabricant de draps de Louviers. Le Camus de Limare avait été un actionnaire de la Compagnie de Guadalcanal créée en 1768 et il fut envoyé en Espagne pour diriger l’exploitation des mines d’argent. Pendant son séjour dans la péninsule ibérique, il avait fait l’acquisition d’une mine de plomb située à Constantina, non loin de Guadalcanal, puis l’avait revendue à sa compagnie176.

    144Revenu en France, qualifié d’intéressé dans les affaires du Roi, Michel-Louis Le Camus de Limare présenta en décembre 1780 au Secrétaire d’Etat de la Marine un projet de fourniture pour le service de Sa Majesté « des cuivres à doublage et autres tant moulés que battus et laminés »177. C’est sans doute quelque temps auparavant qu’il s’était rendu à Birmingham pour s’informer des techniques de fabrication des plaques de cuivre et qu’il avait recruté une dizaine d’ouvriers britanniques qui gagnèrent la France178. En 1781, il louait à Louis-Baptiste Lancelevée, un procureur de la maîtrise des Eaux et Forêts de Pont-de-l’Arche demeurant ordinairement à Romilly-sur-Andelle, une maison de maître, un jardin, plusieurs moulins à fouler et de nombreuses acres de terre situés à Romilly-sur-Andelle moyennant un loyer de 3 550 lt. par an179. C’est à cet endroit qu’il avait décidé d’édifier la manufacture de doublage de cuivre qui fut autorisée par l’arrêté du Conseil du 23 avril 1782180.

    145Pour mener cette entreprise à bien, Michel Louis Le Camus de Limare bénéficia de la collaboration d’Eugenio Izquierdo comme il est indiqué dans le contrat de société des Fonderies de Romilly :

    « Les intéressés reconnaissent que depuis trois ans que l’établissement a commencé à Romilly, MM. Le Camus de Limare et Izquierdo de Rivera ont donné tous leurs soins pour porter l’entreprise au degré de perfection où elle se trouve aujourd’hui »181.

    146Eugenio Izquierdo a joué un rôle de premier plan dans les relations politiques et économiques franco-espagnoles de la fin de l’Ancien Régime aux premières années de l’Empire napoléonien. Pourtant, on ne dispose pas d’une biographie étendue de ce personnage. Né à Saragosse, en Aragon, on en ignore la date, il est d’humble d’origine, mais grâce à la protection du comte de Fuentès qui fut ambassadeur d’Espagne à Paris dans les années 1770, il fit d’excellentes études182. En 1776, il était pensionnaire de Charles III dans la capitale française et se livrait à des activités pédagogiques, enseignant à deux jeunes Basques envoyés à Paris par la Société basque des Amis du Pays, l’histoire naturelle, la chimie et les sciences des métaux selon le compte rendu qu’il envoya à la Société183.

    147Cette même année, il est nommé Vice-Directeur du Cabinet Royal d’Histoire Naturelle de Madrid dirigé par Pedro Francisco Davila184. Il repart bientôt pour la France puis gagne l’Angleterre où d’après le comte d’Aranda ambassadeur d’Espagne à Paris au début des années 1780 « en compagnie de certaines personnes qui allaient y observer différentes machines et procédés industriels » et il aurait consulté l’ambassadeur pour savoir s’il devait profiter de l’occasion185. C’est sans doute son voyage en Angleterre qui le conduisit à s’associer avec Le Camus de Limare tout en négociant, en 1782, un traité de commerce avec la France qu’il ne parvint pas à concrétiser.

    148Les Fonderies de Romilly devaient importer du cuivre qui provenait de l’Angleterre et la Suède. Mais Eugenio Izquierdo essaya d’en faire venir de l’Espagne. C’est pour cette raison qu’il devint, en 1783, actionnaire d’une Compagnie des Mines d’Aragon, laquelle avait pour finalité d’exploiter les mines d’argent, de cuivre et de cobalt situées dans les Pyrénées du Haut-Aragon186.

    149Les dirigeants des Fonderies de Romilly ne se contentent pas de fabriquer des plaques de cuivre destinés à renforcer les coques des bâtiments de la Marine Royale. Ils sont parvenus à trouver des marchés civils. En janvier 1784, Le Camus de Limare et Eugenio Izquierdo se sont associés avec deux négociants établis à Bercy, près de Paris, Jonas et Antoine Boucherie pour envoyer à Saint-Domingue des chaudières destinées aux sucreries, des feuilles laminées, des clous et autres ustensiles « tant en cuivre qu’en autre métal ». C’est un docteur en médecine parisien, Jacques Dutrone La Couture qui fut chargé de partir pour Saint-Domingue afin d’y représenter la société, y vendre les produits métallurgiques et envoyer aux Boucherie des denrées coloniales187.

    150En avril 1785, alors que l’entreprise fonctionnait depuis trois ans, la manufacture de Romilly devenait une société de commandite par actions. Son capital était fixé à 800 000 lt. réparti en vingt-cinq actions de 32 000 lt. chacune dont 7 appartenaient à Le Camus de Limare, 4 à Eugenio Izquierdo et 14 à la maison rouennaise Élie Lefebvre frères qui avait participé à une société solidaire en compagnie des Le Couteulx188.

    151Le siège de la société était fixé à Rouen dans la maison Élie Lefebvre frères, rue des Charettes, laquelle se chargeait des écritures tandis que Le Camus de Limare la dirigeait à Romilly-sur-Andelle.

    152Associé aux Lefebvre et à Le Camus de Limare, Eugenio Izquierdo était également un proche des Le Couteulx. C’est du moins ce qui ressort d’une lettre d’Alexandre Marcet adressée à ses correspondants parisiens en septembre 1784.

    « Du moment que vous me parlates des actions de la Banque de Madrid j’en eus la plus grande opinion malgré l’avis et les bons raisonnements de Mr Izquierdo... Mes amitiés SVP à M. Izquierdo. C’est un charmant homme dont la conversation est intéressante et pleine de feu »189.

    153Ces liens avec les Le Couteulx lui permirent d’acquérir sur les quatre actions qu’il avait accepté de prendre, deux actions faisant fonds, soit 64 000 lt., somme que lui prêta Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx moyennant une constitution de rente viagère d’un montant de 3 200 lt.190.

    154En 1786, Eugenio Izquierdo, à la suite de la mort de Davila, fut nommé Directeur du Cabinet Royal d’Histoire naturelle de Madrid.

    155Avant son départ pour l’Espagne, il accorda une procuration à Louis-Michel Le Camus de Limare pour le représenter dans la maison Boucherie et une autre à Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx par laquelle il l’autorisait :

    « à régir, gouverner, administrer toutes ses affaires en France... le représenter dans toutes les assemblées qui se tiendront entre les intéressés des Fonderies de Romilly... donner les consentements et pouvoirs nécessaires pour l’établissement des nouveaux laminoirs, acquisitions de terrains relatifs à la manufacture pour l’agrandissement d’icelle... »191.

    156Revenu à Madrid, Eugenio Izquierdo représentera la maison Le Couteulx le 26 novembre 1786 lors de la vente aux enchères des piastres de la Banque Saint Charles et quelques années plus tard il sera à l’origine de la fondation d’une fondation de cuivre à Juvia près du port de guerre d’El Ferrol en Galice tout en continuant à suivre les activités de la manufacture de Romilly192.

    157Représentant Izquierdo lors des assemblées des Intéressés des Fonderies de Romilly, les Le Couteulx en deviennent les principaux dirigeants. Dès le 12 avril 1786, Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx signe avec Le Camus de Limare et Izquierdo tous trois « soussignés intéressés aux fonderies de Romilly » un acte de reconnaissance sur l’appartenance de plusieurs actions de la société193. En 1787, le capital de la société est porté à 1 760 000 lt. réparti en cinquante-cinq actions. Cette augmentation du capital s’explique par le fait que les dépenses faites pour l’établissement « ont monté beaucoup au delà de ce qui avait été prévu » et il reste encore une somme de 250 000 lt. à débourser pour l’acquisition d’un moulin et de prairies, de deux nouveaux fourneaux à la fonderie, d’établir une briqueterie pour ne plus en acheter en Angleterre, un atelier de deux laminoirs, une fonderie à mouler les clous, des logements d’ouvriers...194.

    158Si Le Camus de Limare demeure le principal actionnaire, les Le Couteulx sont désormais propriétaires de cinq actions et plusieurs de leurs proches en ont également acquis comme Pablo de Olavide « comte de Pilos », François Cabarrus, la Pérouse, représenté par Laurent-Vincent Le Couteulx. Les Lefebvre ne conservaient plus que 6 actions et surtout en janvier 1787 ils avaient déclaré que bien qu’ils percevaient 4 % des profits en tant qu’administrateurs « leur santé ne leur permettait de rester plus longtemps chargés de l’administration du comptoir de Rouen »195. Ce fut Le Couteulx et Cie de Rouen qui fut chargée de les remplacer.

    159Les Fonderies de Romilly sont devenues une des plus grandes manufactures françaises à la fin de l’Ancien Régime196. En 1785, au moment de la naissance de la société en commandite, ses actifs s’élevaient à 1 019 800 lt. Le coût des bâtiments, des machines et des ustensiles atteignait 322 697 lt. 1 s, les produits fabriqués conservés dans l’établissement ou envoyés à des acheteurs se montaient à 148 014 lt. 13 s et les créances sur les débiteurs à 148 478 lt. 15 s. Les équipements des Fonderies de Romilly-sur-Andelle sont décrits en 1787 par le Journal de Normandie. « Etablissement jusqu’à ce jour unique en France », il comprenait sept ateliers. Dans trois d’entre eux, l’on trouvait plusieurs laminoirs, des fourneaux à réverbère utilisant du charbon de terre. Dans un quatrième atelier, il existait un laminoir beaucoup plus « fort » que les précédents et qui servait à la fabrication des barres d’un fort diamètre destinées à la construction de navires de guerre où elles doivent remplacer les chevilles de fer. Il existe également de nombreux martinets dont certains frappent entre 90 et 160 coups à la minute et qui sont utilisés pour la fabrication de fonds de chaudières, des casseroles, de clous, des boutons. Il existe également un petit laminoir qui permet de fabriquer du cuivre pour les orfèvres ainsi que des « baguetes pour la Traite des Noirs » dont la maison Ruellan et Cie a pu être un des acheteurs. Toutes les machines – laminoirs, marteaux et martinets – étaient mues par plusieurs roues hydrauliques actionnées par les eaux de l’Andelle197.

    160En 1790, le siège des Fonderies de Romilly est transféré à Paris rue Chantereine et Laurent-Vincent Le Couteulx confie à Guillaume-Louis d’Arthenay, un de ses parents et également membre du conseil d’administration de la Régie de l’Administration royale des Eaux de Paris, de gérer les fonds de la Société198. A cette date, il semble que les Fonderies de Romilly soient à nouveau dans une situation difficile à cause de la concurrence anglaise rendue plus facile par le traité de commerce franco-anglais de 1786 qui a abaissé les droits de douane sur les cuivres. Les Le Couteulx vont parvenir à conquérir un nouveau marché grâce à leurs relations étroites avec l’Espagne199. En 1790, la manufacture de Romilly obtient de fournir des plaques de cuivre pour six navires de ligne et six frégates espagnoles pour une valeur de 1 547 287 reaux de vallon soit environ 386 321 lt.200.

    161Les Le Couteulx ainsi qu’Eugène Ezquierdo, celui-ci à la veille de son départ, se sont également impliqués dans l’établissement d’une manufacture de bonneterie de la Rocheguyon, dans le Vexin français. Le contrat de société fut établi devant notaire le 23 mars 1786. Disposant d’un capital de 120 000 lt. réparti en 20 actions de 6 000 lt. chacune, elle comprenait neuf actionnaires qui sont Louis Alexandre duc de la Rochefoucauld et de la Rocheguyon, membre de l’Académie des Sciences (2), Pablo de Olavide alias le comte de Pilos (1), Eugenio Izquierdo (9), Jacques-Jean Le Couteulx du Molay (2), Barthélemy-Jean-Louis (2), Laurent-Vincent (1), Guillaume Louis d’Arthenay (1), Jean-Baptiste Decrétot négociant à Louviers et un certain Monsieur Turc (1) « mécanicien » qui travaillait pour Izquierdo201.

    162Le rôle de ce dernier avait été primordial puisque les autres actionnaires pour « reconnaître sa peine le dispensaient de faire les fonds de quatre de ses actions ». Quand à Mr Turc qui avait travaillé de concert avec Izquierdo, il n’aurait pas à fournir les 6 000 lt. pour son action. En conséquence, les autres actionnaires s’engageaient à payer non 6 000 lt. mais 8 000 lt. pour chacune de leurs actions. Il s’agissait pour eux de récompenser Izquierdo parce qu’ils reconnaissaient que depuis 1781 il s’était :

    « occupé des moyens d’établir des métiers pour la fabrication des bas et autres marchandises de bonneterie, lesquels métiers réunissent deux avantages dont on peut tirer le plus grand parti : le premier de faire plus d’ouvrage qu’avec aucun autre métier connu en France jusqu’à présent et le second de le faire marcher sans effort et par un poids peu considérable puisqu’un enfant de huit ou dix ans peut le faire mouvoir sans peine et fabriquer deux, trois ou même quatre paires de bas dans un jour suivant la finesse de l’ouvrage. Que par ses soins une correspondance suivie depuis ce tems bien des recherches et des avances il est parvenu à avoir déjà plusieurs métiers de nature de ceux qu’il avait en vue et il est sur le point d’en avoir un plus grand nombre »202.

    163Ses associés avaient confié à Izquierdo le soin d’acheter des terrains, pour y établir la manufacture, à la duchesse d’Enville, la soeur du duc de la Rochefoucauld qui avait fait du château de la Rocheguyon sa résidence principale où elle accueillait des « philosophes » comme Turgot, Condorcet ou Mably203. C’était une philanthrope qui voulait résoudre la crise sociale en fournissant du travail aux enfants. Elle ne pouvait donc qu’accepter la demande d’Izquierdo qui entendait faire travailler dans sa manufacture de bonneterie un grand nombre d’enfants pour lesquels, d’après le plan de la manufacture joint au contrat de société, on allait édifier de grands dortoirs. Elle signa donc le 23 mars 1786 dans son hôtel parisien, rue de Seine, un contrat avec Eugenio Izquierdo par lequel elle lui vendait sous les terrains nécessaires pour construire les bâtiments de la manufacture, situés le long du grand chemin de la Rocheguyon à Vetheuil et elle autorisait la société à prendre de l’eau sur le canal qui apportait de l’eau de source au château de la Rocheguyon204.

    164Elle n’était pas la seule à vouloir procurer des terrains à Izquierdo. Souhaitant que la manufacture puisse s’étendre, Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx obtint qu’au cas où elle atteindrait le nombre de cent métiers, le dixième de ceux-ci serait transféré dans ses domaines de Hacqueville et Richeville dans le Vexin normand sous la condition qu’il verse 300 1t. pour chaque métier ainsi déplacé205.

    165La manufacture de bonneterie de la Rocheguyon a-t-elle vu le jour ? Aucun document ne l’atteste. Il est possible que le départ de Eugenio Izquierdo en Espagne (on lui avait accordé l’autorisation de transporter quatre métiers appartenant à la manufacture dans son pays moyennant 1 200 1t.) en a fait une œuvre mort-née206.

    166Cet échec s’il a eu lieu n’a pas pour autant découragé les Le Couteulx qui ont continué à s’intéresser à différentes manufactures. En raison de leurs relations commerciales avec les États-Unis, ils se sont orientés vers des entreprises pouvant utiliser des matières premières venues de la jeune république américaine. Ce fut le cas de la Manufacture de tabac de Morlaix. La Ferme générale qui disposait du monopole de la fabrication et de la vente du tabac avait décidé en 1736 de construire une manufacture à Morlaix, en Bretagne, qui fut achevée en 1740. En 1776, elle employait 750 ouvriers207. Au début de la Révolution, en 1791, la Ferme générale fut supprimée et l’Assemblée constituante décréta la liberté de culture, de fabrication et de débit du tabac sur toute l’étendue du royaume. L’ensemble des bâtiments de la manufacture fut vendu ou loué et une partie passa dans l’escarcelle d’un négociant de Morlaix Armand-Joseph Dubcmad moyennant 10 000 lt. par an208. Or, Armand-Joseph Dubemad, par ailleurs lié à une société française située à Séville, était le chargé de pouvoir d’un certain Monsieur Fairx fondé de pouvoirs des copropriétaires parisiens de l’entreprise. Parmi eux figuraient Laurent-Vincent qui en possédait 1/10e et Simon-Emmanuel-Julien Lenormand qui avait investi 100 000 lt.209.

    167Les Le Couteulx n’ont pas été à l’origine de la fondation de la manufacture de tabac de Morlaix. Ils se sont contentés d’en racheter une partie. En revanche, ils ont bien été les initiateurs de la manufacture d’huile de spermacete établie dans le faubourg rouennais de Saint-Sever, sur la rive gauche de la Seine. Cette manufacture devait fournir de l’huile destinée aux réverbères utilisés pour l’éclairage des villes. Depuis les années 1760 un nouveau procédé pour éclairer les rues avait été mis en avant par Dominique François Bourgeois. Il avait obtenu l’appui d’un financier originaire de Normandie Tourtille-Saugrain et grâce à Sartine, à partir de 1770, les lanternes à réverbère avaient été installées dans les rues de Paris210.

    168Tourtille-Saugrain ne se contenta pas de placer ces lampes à réverbère à Paris, mais il réussit à les aménager dans plusieurs villes de province, par exemple à Rouen lorsque fut expirée en 1788 une adjudication qui avait été accordée auparavant à deux entrepreneurs rouennais211.

    169Le combustible employé pour l’éclairage était constitué surtout par de l’huile d’olive de bonne qualité, mais il existait d’autres types d’huile qui donnaient un éclairage encore meilleur. C’était, en particulier, l’huile de spermacete de baleine provenant pour l’essentiel des États-Unis, notamment dans le Nord-Est, grâce aux pêcheurs de baleine du port de Nantucket. Tourtille-Saugrain essaya de s’en procurer et signa un contrat avec La Fayette, un des héros de l’indépendance américaine pour qu’il lui fournisse 800 000 livres-poids d’huile de baleine tout en concluant un autre traité avec des négociants de Boston qui devaient lui en livrer pour 400 000 livres-poids212.

    170La maison Le Couteulx et Cie comprit que s’engager dans ce type d’opérations pourrait être rentable. Elle décida donc de monter une manufacture à Saint-Sever qui, d’après Thomas Jefferson, était une entreprise franco-américaine. En effet, Laurent-Vincent Le Couteulx, le dirigeant de la maison de Paris, s’associa avec un négociant du Massachusetts et partenaire de Robert Morris, Daniel Parker. Les deux associés louèrent en 1789 à deux négociants Nathaniel Barret et Thomas Appleton, très probablement d’origine américaine, un petit bâtiment, deux maisons et deux hangars situés au bout du pont de bateaux, du côté de Saint-Sever. Ces deux hommes qui avaient délivré de l’huile de baleine aux agents de Tourtille-Saugrain avaient eux-mêmes loué cet ensemble de bâtiments en 1788 à un négociant rouennais Frédéric Jorre moyennant 3 000 lt. et avec la garantie de Le Couteulx et Cie de Rouen213. Laurent-Vincent Le Couteulx et Daniel Parker avaient sans aucun doute utilisé les services de Nathaniel Barret et de Thomas Appleton depuis 1788 au moins car ils avaient signé en novembre 1788 un contrat « en tant que propriétaires de l’entreprise de raffinement des huiles de la fabrication des fanons, spermacetes et de la chandelle de spermacete établies à Rouen dans des maisons louées par MM. Barret Appleton et Cie » avec Samuel Pugh, un Britannique, qui avait la connaissance particulière de l’art de raffiner les huiles et de convertir l’huile de spermacete ordinaire en spermaceti214. Samuel Pugh s’engageait à opérer l’art de raffiner les huiles de spermacete pendant une durée de quinze ans. En échange, Samuel Pugh devait, à condition qu’il ne révèle à personne d’autres que Laurent-Vincent Le Couteulx et Daniel Parker, son art de raffinage, recevoir un huitième des profits de la manufacture de Saint-Sever tandis que l’administration de celle-ci était confiée, car Laurent-Vincent Le Couteulx et Daniel Parker entendaient demeurer à Paris, à un négociant rouennais, Michel Horcholle, qui recevait le droit de vendre en gros et en détail les produits provenant de la manufacture215. Celle-ci achetait donc de l’huile de baleine ordinaire à des négociants américains tels John et Richard Codman de Boston qui, comme on l’a vu, recevaient de grosses commandes d’huile de baleine et de la potasse en novembre et décembre 1790216. Arrivée à Rouen, l’huile de baleine ordinaire était transformée en huile raffinée de spermacete qu’on vendait aux entrepreneurs des illuminations des rues des cités comme Tourtille-Saugrain et Cie de Paris217. La manufacture de Saint-Sever a sans doute rencontré pendant les premières années de la Révolution française de grosses difficultés, ce qui n’empêcha pas Laurent-Vincent Le Couteulx d’en être toujours propriétaire avec d’autres intéressés. En 1794 il en détenait 10/80° plus 1/6°218.

    171Au cours des dernières années de l’Ancien Régime et des débuts de la Révolution, les Le Couteulx se sont donc engagés dans une multitude d’opérations : participation dans des sociétés solidaires qui se consacraient à l’achat de rentes viagères, interventions dans l’émission des vales reales espagnols, spéculation sur les actions de la banque Saint-Charles, participation brève aux avances françaises accordées au Congrès Continental des États-Unis, tentatives de prises de contrôle de plusieurs compagnies par actions, intéressement pour des manufactures, traite des Noirs par l’intermédiaire de Ruellan et Cie, etc. Un certain nombre de leurs engagements leur ont permis, c’est le cas des ventes de piastres aux Hôtels des monnaies français de leur rapporter de beaux profits. Mais d’autres opérations ont dû être décevantes et il semble qu’à partir des années 1789-1790, Le Couteulx et Cie connaît une situation difficile. En effet, cette maison de banque qui prêtait des sommes considérables à des spéculateurs comme Baroud ou à des manufacturiers devient emprunteuse. C’est ainsi qu’elle profite du fait que la banque Saint-Charles accepte d’accorder aux propriétaires de ses actions, à partir de 1788, des prêts. Ainsi, entre mars 1788 et juillet 1790, la banque Saint-Charles accorda aux actionnaires qui le lui demandaient 14 800 000 reales de vellon, soit 3 700 000 lt. Le principal bénéficiaire en fut Augustin Queneau, un des agents de Le Couteulx et Cie à Madrid qui reçut pour les 2834 actions qu’il déposa 5 660 000 reales de vellon, soit 1 417 000 lt. Or 450 appartenaient à Le Couteulx et Cie : la banque parisienne reçut donc en 1789 un prêt s’élevant à 225 000 lt.219.

    172Cette avance ne suffit pas aux besoins de Le Couteulx et Cie puisqu’on 1790 Jean-Barthélemy Le Couteulx de Canteleu stipulant pour sa maison de banque parisienne s’adressait par l’intermédiaire de Jean-Michel Soehnée, un des associés de Pourtalès et Cie de Paris, cette dernière faisant partie de la constellation Pourtalès, la plus grande banque suisse, à celle-ci pour obtenir 624 000 lt. « pour employer à ses besoins d’affaires »220. Il donnait comme hypothèque 350 quittances de finance s’élevant à 830 000 lt. et s’engageait à rembourser sa créance en deux paiements égaux en février et mars 1791, ce qui semble avoir été accompli. Cette somme ne suffit pas entièrement à Le Couteulx et Cie puisqu’en juin 1790 elle signait une obligation de 240 000 lt. au profit de Jean-Frédéric Osterwald ancien négociant qu’elle devait restituer le 30 septembre suivant déposant comme nantissement 150 actions de la Nouvelle Compagnie des Indes orientales et 150 billets de l’emprunt de décembre 1784221. Pendant l’incarcération de Jean-Barthélemy et Laurent-Vincent Le Couteulx, les dirigeants de Le Couteulx et Cie depuis la fin de l’année 1788, leurs épouses déclarèrent que :

    « leurs nombreuses entreprises ne pouvaient être soutenues par leurs seuls capitaux et qu’ils y ont suppléé par leur crédit dans l’étranger pour un montant de quatre à cinq millions »222.

    173Ces difficultés financières étaient sans doute liées à la crise financière que la France connut pendant les dernières années de l’Ancien Régime à laquelle s’ajoute la crise économique qui débute en 1788 et que la Révolution ne parvient pas à faire disparaître. Pourtant, ce seront surtout les événements politiques qui mettront en cause la pérennité des différentes branches de Le Couteulx et Cie.

    Notes de bas de page

    1 G. Richard, La noblesse d’affaires au xviie siècle, Paris, 1974, p. 256.

    2 H. Lüthy, op. cit., t. II, pp. 775-776.

    3 Ch. Carrière, Banque et capitalisme commercial. La lettre de change au xviiie siècle, Marseille, 1976, p. 149.

    4 A.N. F/7/4774/10.

    5 A.N. F/7/4774/10.

    6 Archives Le Couteulx. Lettre de Jacques-Jean Le Couteulx du Molay à Thomas-Barthélemy le 11 janvier 1768.

    7 A.D.S.M. 2 E 2/124. 22 avril 1783. Elle avait été mise à prix pour 90 000 lt.

    8 M. Gérard, Messieurs Hottinguer, banquiers à Paris, Paris, 1968. L’auteur s’est appuyé sur le Journal de Jean-Conrad Hottinguer.

    9 M. Gérard, op. cit., p. 99.

    10 M. Gérard, op. cit., p. 100.

    11 M. Gérard, op. cit., p. 106.

    12 H. Lüthy, op. cit., p. 723.

    13 M. Gérard, op. cit., pp. 97-98.

    14 Archives Daridan. Correspondance Alexandre Marcet avec Lecouteulx et Cie de Paris. Lettres des 7 janvier, 25 janvier, 8 avril 1784.

    15 Archives Daridan. Correspondance Hardouin frères de Rouen avec Le Couteulx et Cie, 17 mai 1783.

    16 A.N.M.C. Et. XCVIII/666, 16 décembre 1786, XCV111/669, 28 juin 1787, 8 juillet 1787 , 670, 13 août 1787 , 682, 11 avril 1790.

    17 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 719.

    18 A.N.M.C. Et. XXX/478, 19 février 1783.

    19 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 467.

    20 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 559.

    21 A.N.M.C. Et. XCVIII/612, 27 septembre 1775.

    22 A.N.M.C. Et. XCVIII/643, 22 janvier 1782.

    23 Archives Daridan, Lettres d’Urbain Teyniers à Le Couteulx Cie, 23 janvier et 27 février 1781.

    24 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 513.

    25 A.N.M.C. Et. XCVIII/643, 30 mars 1782.

    26 A.N.M.C. Et. XCV111/647, 28 janvier 1783. Dépôt de 30 grosses par Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx.

    27 A.N.M.C. Et. LVI/277, 9 juillet 1782. Transport délégation de rentes viagères avec additif au 22 juillet 1788.

    28 A.N.M.C. Et. XCVIII/646, 12 novembre 1782. Sur les rapports étroits entre Baroud et Le Couteulx et Cie. Cf. A.N.M.C. Et. XCVIII/685, 20 janvier 1791, Baroud possédait un compte courant dont le débit s’élevait le 30 septembre 1789 à 587 685 lt.

    29 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 533.

    30 De. Ozanam, Claude Baudart de Saint-James, trésorier général de la Marine et brasseur d’affaires, Genève-Paris, 1966, pp. 128-129.

    31 Sur la société pour l’échange des Bulletins, cf. H. Lüthy, op. cit., t. II, pp. 550-554 qu’il définit comme « un cauchemar de joueur en bourse ».

    32 A.N.M.C. Et. XCVIII/685, 31 janvier 1791. Transport de 649 685 lt. 2 s. de rentes viagères sur l’État par Le Couteulx et Cie à Mr de la Flechelle. Le jour même, ce dernier les restitue à Le Couteulx et Cie.

    33 A.N.M.C. Et. XCV111/682, 1er mai 1790.

    34 A.N.M.C. Et. XCVIII, de 1780 à 1793.

    35 A.D.I et V. 4 Fg 45. Pierre-Bernard Cabanon de Cadix à Gil Apuril de Kerloguen de Saint-Malo, 3 juillet 1789.

    36 Sur Alexandre Marcet. Cf. H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 575.

    37 Archives Daridan. Alexandre Marcet de Genève à Le Couteulx et Cie de Paris, 12 janvier 1784.

    38 Archives Daridan. Alexandre Marcet de Genève à Le Couteulx et Cie de Paris., 24 et 29 janvier 1784.

    39 Idem. Lettre du 10 mai 1784.

    40 Archives Daridan. Lettre d’Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie 20 septembre 1784. Cette banque est considérée comme une des trois grandes banques genevoises spécialisée dans le placement des emprunts viagers.

    41 Jacques-Jean Le Couteulx de Molay à Jean-Barthélemy Le Couteulx, 5 mai 1776 cité par G. Daridan, op. cit., p. 21.

    42 A.N. 61 A Q 15. Isaac Panchaud à Louis Greffulhe d’Amsterdam, 6 juin 1776.

    43 A.N.M.C. Et. XCVIII/617, 7 août 1776. Cautionnement de Le Couteulx et Cie pour la charge de receveur général de la Loterie royale de France.

    44 Arrêt du Conseil d’Etat portant création de la Caisse d’Escompte le 24 mars 1776 cité par F. Hincker, Expériences bancaires sous l’Ancien Régime, Paris, 1974, pp. 46-48.

    45 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 461.

    46 Archives Daridan. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie, 24 janvier 1784.

    47 Idem. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie, 12 juin 1784.

    48 A.N. 8 A Q 17. La Nouvelle Compagnie des Indes Orientales à J.L et L. Le Couteulx et Cie de Cadix, 17 décembre 1786.

    49 Sur la trajectoire de François Cabarrus. Cf. A. Ortega Costa et M. Garcia Osma, Noticias de Cabarrus y de su procesamiento, Madrid, 1974 , M. Zylberberg, Une si douce domination. Les milieux d’affaires français et l’Espagne : vers 1780-1808, Paris, 1993.

    50 A.H.N. Consejos leg 51186. J.L. et L. Le Couteulx et Cie de Cadix à Cabarrus et Aguirre de Madrid, 7 août 1778.

    51 A.H.N. Consejos leg 43622. Année 1778, la commission représente donc 1 025 1t.

    52 A.G.S., Hacienda leg 358 cité par P. Tedde de Lorca, El banco de San Carlos 1782-1829, Madrid, 1988. Jean Laurent Lasserre et Cie fournit 926 277 ps alors que J.Q.L. et L. Le Couteulx et Cie n’en avancèrent que si l’on peut dire 252 852 ps.

    53 M. Zylberberg, op. cit., p. 269.

    54 A.N.M.C. Et. XCVIII/603,23 mai 1773. Procuration Drouilhet et Cie à Le Couteulx et Cie.

    55 A.U.P.M. 20135. Procuration de François Cabarrus à Jean Pascal Lacoste et Courtiau d’Amsterdam pour obtenir ce paiement, 17 septembre 1780.

    56 A.H.N. Consejos leg 43622. Veuve Lalanne et fils de Bayonne à Cabarrus et Aguirre de Madrid le 21 janvier 1781.

    57 A.H.N. Consejos leg 43622. Veuve Lalanne et fils de Bayonne à Cabarrus et Aguirre de Madrid le 26 janvier 1781.

    58 A.N.M.C. et XCVIII/639, 13 février 1781. Procuration de François Cabarrus à Pierre Lalanne et Barthclcmy-Jean-Louis Le Couteulx. D’après Cabarrus, les Français auraient prêté 3 millions de pesos au prix de 40 lt. le marc pour recevoir les pesos à la Vera Cruz au prix de 49 1t. le marc. Cabarrus recevait 3 % de commission soit 90 000 piastres. Cf. B.N. Fonds Joly de Fleury n° 1148.

    59 P. Tedde de Lorca, op. cit., p. 46.

    60 P. Tedde de Lorca, op. cit., p. 51.

    61 P. Tedde de Lorca, op. cit., p. 52.

    62 E.S. Hamilton, « The Foundation of the Bank of Spain » dans Journal of Political economy, t. LVI (1945), pp. 97-117.

    63 A.H.B.E., Secrétariat leg 1095. Laurent-Vincent Le Couteulx de Cadix à la Banque Saint-Charles, 29 novembre 1782.

    64 Archives Daridan. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie, 20 septembre 1784.

    65 Idem.

    66 A.H.B.E. Secrétariat leg 554.

    67 A.H.N. Estado leg 3230 (2).

    68 M. Zylberberg, op. cit., p. 304-305.

    69 Sur cette opération, Cf. M. Zylberberg, op. cit., p. 309.

    70 Idem, p. 320. D’après Mirabeau, Le Couteulx et Cie pour obtenir des avances de la Caisse d’Escompte déposait non des écus mais les récépissés des directeurs des Hôtels de monnaie, ce qui était contraire aux statuts de la Caisse d’Escompte. Mais si elle avait accepté ce que Le Couteulx et Cie lui avait proposé c’était parce que Le Couteulx du Molay la gouvernait selon « son bon plaisir ». H.G. Mirabeau, Lettre à Mr Le Couteulx de la Noraye, Paris, 1785, p. 26.

    71 A.H.N. Estado leg 3202. Rapport anonyme pour la création à Paris d’une Factorie en la Banque Saint-Charles, 28 juin 1789.

    72 H.G. Mirabeau, Lettre à Mr de la Noraye, Paris, 1785.

    73 M. Zylberberg, op. cit., p. 327.

    74 A.H.N. Diverses. Fonde Cabarrus n° 26. Compte particulier de François Cabarrus.

    75 Idem.

    76 A.H.P.M. 20737, 10 janvier 1788. Le contrat de mariage fut signé le 21 février 1788. une dot de 500 000 lt. les Le Couteulx en avancèrent 368 000 lt.

    77 A.H.N. Hacienda leg 5637. Lettre de Cabarrus au 12 juin 1790.

    78 H.U. Faulkner, Histoire économique des Etats-Unis d’Amérique des origines à nos jours, Paris, 1958, p. 137.

    79 Sur John Holker. Cf. A. Rémond, John Holker, 1719-1786, Paris, 1946.

    80 A.N.M.C., Et. XCVIII/628. 22 décembre 1778.

    81 A.N.M.C. Et. XCVIII/628. 22 décembre 1778. John Holker rétrocéda une partie de ses engagements à des négociants de Rouen comme Antoine Garvey ou Pierre Nicolas et Alexandre de Fontenay.

    82 A.N.M.C. Et. XCVIII/682. 30 juillet 1790. Partage de la succession d’Antoine-Louis Le Couteulx. Avait-il pris une part des 100 000 lt.?

    83 Sur Robert Morris. Cf. W.G. Sumner, The Financier and the Finances of the American Révolution, New-York, 1968 (1ère édition 1891).

    84 A.N. F/12/744. Mr de Marbois au Comte de Vergennes, 16 août 1784.

    85 Papers Robert Morris, t. I, p. 123. Robert Morris de Philadelphie à Benjamin Franklin de Paris, le 8 juin 1781.

    86 Papers Robert Morris, t. 1, pp. 357-358. Chevalier de la Luzerne à Robert Morris, 26 septembre 1781.

    87 Papers Robert Morris, t. I, pp. 392-393. Benjamin Franklin à Robert Morris, Passy le 26 juillet 1781.

    88 J.L. Auclain, « Une dynastie franco-américaine d’hommes d’affaires à la fin de l’Ancien Régime : les Le Ray de Chaumont » dans Mémoires des Sciences et Lettres du Loir et Cher, 1980, n° 36, p. 143.

    89 Papers Robert Morris, t. II, p. 321. Robert Morris à Ferdinand Grand, le 3 décembre 1781.

    90 Papers Robert Morris, t. V, p. 222. Robert Morris à Le Couteulx et Cie, 18 mai 1782.

    91 Papers Robert Morris, t. III, pp. 54-55. Robert Morris à Matthew Ridley, 14 octobre 1783.

    92 Papers Robert Morris, t. VII, p. 403. J.L. et L. Le Couteulx et Cie de Cadix à Robert Morris, 4 février 1783. La maison de Cadix expédia des marchandises aux Insurgents comme de l’indigo. Cf. A.H.N. Estado leg 3884.

    93 A.N. Marine D1/35.

    94 Arrêt du Conseil d’Etat portant établissement de paquebots pour communiquer avec les Etats-Unis d’Amérique, 28 juin 1783, cité par O. Noël, Histoire du commerce du monde, Paris, 1892, t. 2, p. 418.

    95 Sur l’organisation de la ligne directe Le Havre-New-York, Cf. P. Derolin, « Le Havre tête de ligne de paquebots transatlantiques 1787-1789 » dans Cahiers havrais de recherche historique, 1992, n° 51, pp. 127-144.

    96 A.N. Marine D1/35. Compte rendu de Le Couteulx et Cie au Secrétaire d’Etat à la Marine, 30 mars 1789.

    97 A.N.M.C. Et. XCVIII/680. 15 septembre 1789.

    98 H.M.J. Kline, Gouverneur Morris and the new nation, New-York, 1978, p. 288.

    99 J.M. Price, France and the Chesapeake : A history of the French tobaco monopoly 1674- 1790, Ann Arbor, 1973 , M. et M. Vigie, L’herbe à Nicot, Paris, 1989.

    100 J.M. Price, op. cit., t. II, pp. 169-170.

    101 A.N.A.E. B/III/442.

    102 A.N.A.E. B/III/442.

    103 A.N.M.C. Et. XCVIII/661. 18 novembre 1785.

    104 Papers Jefferson, t. 10, p. 395. Thomas Jefferson à Charles Thompson, Paris, le 20 septembre 1786. Sur Louis Le Couteulx de Caumont en Amérique, cf. G. Daridan, op. cit., pp. 107-118.

    105 A.N.M.C. Et. CXVII/982. 19 pluviôse an V (6 février 1797). Décision de la mère de Laurent-Vincent de vendre ces 49 885 acres dont elle a hérité après la mort de son fils Laurent-Vincent, A.N.M.C. et CXVII/974. 28 thermidor an II (15 août 1794). Etat de la fortune de Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx.

    106 Papers Jefferson, t. 10. Thomas Jefferson à George Washington, Paris, novembre 1786. George Washington à Thomas Jefferson, le 30 mai 1787.

    107 M. Zylberberg, op. cit., p. 425.

    108 Papers Jefferson, t. XI, p. 660. Thomas Jefferson à Ralph Izard, Paris le 1er août 1787 , Le Couteulx et Cie à Thomas Jefferson, 3 janvier 1787.

    109 F. Crouzet, La grande inflation. La monnaie en France de Louis XVI à Napoléon, Paris, 1993, p. 157.

    110 Papers Jefferson, t. XV, p. 415. Thomas Jefferson à Henry Lee. Paris, le 30 novembre 1789.

    111 Sur Gouverneur Morris. Cf. JJ. Fiechter, Un diplomate américain sous la Terreur. Les années européennes de Gouverneur Morris, Paris, 1983.

    112 J.J. Fiechter, op. cit., p. 146.

    113 Déjà en 1788 Le Couteulx et Cie dans une lettre à Tarbé, le premier commis de Necker proposait que les achats de blé aux Etats-Unis permettent de réduire la dette due à la France. Cf. Papers Jefferson, t. XV, note 16, p. 247. Le Couteulx et Cie à Tarbé, 13 octobre 1788.

    114 Papers Jefferson, t. XV, p. 566. William Short à Thomas Jefferson, Paris, le 30 novembre 1789.

    115 Papers Jefferson, t. XV, p. 4 15. Thomas Jefferson à Henry Lee, Paris, 11 septembre 1789.

    116 Papers Jefferson, t. XVII, p. 529. William Short à Thomas Jefferson, Paris le 26 septembre 1790.

    117 J.J. Fiechter, « L’âme des modifications », op. cit., p. 151.

    118 Papers Jefferson, t. XVII, p. 503. James Swan à Thomas Jefferson, Paris, 3 octobre 1790. On ne sait si un accord fut conclu.

    119 J.J. Fiechter, op. cit., p. 152.

    120 A.C.C. M. LIX/484. Le Couteulx de Paris à la maison Roux de Marseille, 31 octobre 1776

    121 Ph. Dupré, « Les activités maritimes en Normandie à la veille de la Révolution », Mélanges Gabriel Désert, Cahiers des Annales de Normandie, Caen, 1992, p. 239.

    122 A. Dubuc, « Un Rouennais acheteur de laines en Espagne et dans le Berry en 1791 » dans Congrès National des Sociétés Savantes, Paris, 1969. Section d’Histoire moderne et contemporaine, Paris, 1971, t. I, pp. 165-190.

    123 A.H.N. Consejos leg 43653. Jean-Pierre Lalanne à Cabarrus et Lalanne, Vinuesa, 12 août 1786.

    124 Chevalier de Lamerville, Observations pratiques sur les bêtes à laine du Berry, Paris, 1787, p. 7.

    125 A.D.S.M. 15 J 49. Le 20 août 1779. La maison Grandin demande à la maison Le Couteulx de Cadix quel est le prix des laines de l’Andalousie.

    126 M. de Crosne, intendant de la généralité de Rouen à Trudaine de Montigny intendant de commerce, Rouen, 9 décembre 1772 cité par G. de Robillard de Beaurepaire, Notes sur la manufacture royale des Andelys, Caen, 1894, p. 23.

    127 G. Robillard de Beaurepaire, op. cit., p. 30.

    128 A.N.M.C. et VII/411. 24 juillet 1781. Contrat de mariage Jean-Abraham Poupart de Neuflize – Adélaïde Dumoustier de Watre. Parmi ses autres fournisseurs figurent Planter Quesnel et Cie, Duvergier, Ribard Le Vieux de Rouen, Veuve Lalanne et Cie de Bayonne, Michel d’Orléans, Rouzellet de Bilbao.

    129 P. Lebrun, L’industrie de la laine à Verviers pendant le xviiie siècle et le début du xixe siècle, Liège, 1948, p. 144.

    130 A.D.S.M. 2 E 2 /128. Procuration de Jean Barthélemy Le Couteulx à Arnold Pitot fils, 24 avril 1787.

    131 Sur cette compagnie cf. J. Tarrade, Le commerce colonial de la France à la fin de l’Ancien Régime, Paris, 1973, pp. 521-522 , G. Chaussinand-Nogaret, La noblesse au xviiie siècle, Paris, 1984 (1ère édition 1976), pp. 133-139 , A.O.M. (Archives d’Outre-Mer), Aix-en-Provence, C/6/18 Mémoire de Tolozan.

    132 La liste complète des actionnaires est indiquée par G. Chaussinand-Nogaret, op. cit., pp. 134-136.

    133 G. Chaussinand-Nogaret, op. cit., p. 123.

    134 A.N.M.C. Et. XXX/499. 22 février 1788.

    135 A.N.M.C. Et. XXX/471, 17 juillet 1781.

    136 A.O.M. (Aix-en-Provence) C/6/18. J.F. Tolosan au Maréchal de Castries, secrétaire d’Etat à la Marine, 20 mai 1783.

    137 J. Tarrade, op. cit., t. II, p. 521.

    138 A.N.M.C. Et. XXX/499. Assemblée des actionnaires du 3 février 1788

    139 A.N.M.C. Et. XXX/483. 24 mai 1784. Dissolution de la Compagnie de la Guyane et formation de la Compagnie du Sénégal. Parmi les autres participants éventuels Baudart de Saint-James, Megret de Serilly, la maison de banque Pache frères.

    140 A.O.M. (Aix-en-Provence) C/6/18.

    141 A.N.M.C. et XXX/492. 18 août 1786.

    142 Sur la Compagnie des Eaux, cf. J. Bouchary, L’eau à Paris à la fin du xviiie siècle, Paris, 1946. Sur la formation de la société. A.N.M.C. Et. XXX/459. 27 août 1778.

    143 A.N.M.C. Et. XCVIII/672. 14 janvier 1788.

    144 J. Bouchary, op. cit., p. 92.

    145 A.N.M. C. XCV111/673. 19 avril 1788.

    146 Sur cette compagnie, cf. J. Conan, La dernière compagnie des Indes, Paris, 1942.

    147 M. Zylberberg, op. cit., p. 322.

    148 H. Lüthy, op. cit., t. II, pp. 681-682.

    149 A.N. F/12/798.

    150 A. N. AA 33.

    151 A.N. 8 AQ 374. Le Couteulx et Cie de Rouen à la Nouvelle Compagnie des Indes Orientales, Rouen le 8 avril 1786.

    152 Le Couteulx et Cie de Rouen à Joly de Fleury, 6 février 1783 cité par P. Dardel, op. cit., pp. 353-354.

    153 P. Dardel, op. cit., p. 353.

    154 A.N. V/7/37. Bilan de la société Bouffé père et fils, Paris, le 24 novembre 1780.

    155 A.D.S.M. 2 E 70/665. Inventaire après décès de Jean-Laurent Ruellan, 3 août 1791 et jours suivants.

    156 Archives Daridan. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie de Paris, 10 décembre 1784.

    157 P. Dardel, Navires et marchandises dans les ports de Rouen et du Havre au xviiie siècle, Paris, 1963, note 1, p. 4 48.

    158 P. Dardel, op. cit., p. 82.

    159 Journal du Havre, 21 juillet 1790 cité par P. Dardel, op. cit., note 4, p. 441.

    160 A.D.S.M. 2 E 70/665. Inventaire après décès de Jean-Laurent Ruellan. Papiers.

    161 J. Mettas, Répertoire des expéditions négrières françaises au xviiie siècle, Paris, t. II, 1984, p. 495.

    162 J. Mettas. op. cit., t. II, p. 495 et suivantes. Un de ces bâtiments s’appelle La Laurette, prénom d’une fille de Jacques-Jean Le Couteulx. Le bâtiment sera perdu mais la cargaison sauvée.

    163 A.N.M.C. Et. XLVIII/686. 26 février 1791. La vente a lieu à Paris. Jean-Laurent Ruellan est logé chez Mrs Le Couteulx place Vendôme. L’acheteur ne pourra en prendre possession qu’en janvier 1795.

    164 Lettre du 19 mars 1788 citée par M. Dorigny, B. Gainot, La Société des Amis des Noirs, Paris, 1998, p. 108.

    165 A.D.S.M. 2 E2/133. 23 juillet 1792.

    166 B.-L. Mouser, « Iles de Los as bulking center in the slave trade 1750-1800 » dans Revue Française d’Histoire d’Outre-Mer, 1996, t. 83, 4e trimestre, pp. 77-90.

    167 Sur l’établissement au Havre de Miles Barber, cf. E. Delobette, « Négociants et traite des Noirs au Havre au xviiie siècle » dans Annales de Normandie, 1998, n° 3, p. 267 , sur le Duc de Normandie, cf. J. Mettas, op. cit., t. II, p. 495.

    168 A.D.S.M. 2 E 2/128. 7 novembre 1787.

    169 Idem.

    170 Sur cette manufacture, cf. S. Chassagne, Le coton et ses patrons 1760-1840, Paris, 1991, pp. 101, H8, 141.

    171 A.N. F/12/562. Mémoire de Bruyard (1783).

    172 A.N.M.C. Et. XCV111/639. 24 février 1781. Sur les liens entre les Le Couteulx et les Danse de Beauvais, cf. S. Chassagne, op. cit., p. 118.

    173 A.N.M.C. Et. XCVIII/693. 20 juillet 1792. Référence à un contrat du 26 avril 1789.

    174 A.M.C. Et. XCVIII/693. 20 juillet 1792.

    175 M. Acerra, A. Zysberg, L’essor des marines de guerre européennes 1680-1790, Paris, 1997, pp. 35-36.

    176 A.N.M.C. Et. XXV1/608. 15 janvier 1773.

    177 A.D. de l’Eure, 19. S.2. Liasse n° 1.

    178 M. Pichon, Recherches monographiques sur la Basse Vallée de l’Andelle pendant la Révolution française, Thèse, Université de Rouen, 1994, p. 54.

    179 A.N.M.C. Et. LXVIII/754. 4 septembre 1781.

    180 A.D. Eure. 19. S. 2. Liasse n° 1.

    181 A.N.M.C. Et. LXXX11/608. 16 avril 1785.

    182 A. Girard, « Une négociation commerciale entre la France et l’Espagne en 1782 » dans Revue Historique, 1912, t. 3, p. 292.

    183 J. Sarrailh, L’Espagne éclairée à la fin du xviiie siècle, Paris, 1964, note 2, p. 354.

    184 A.J. Barrera, El museo national de Sciencias naturales 1771-1935, Madrid, 1992, p. 64.

    185 Le comte d’Aranda à Floridablanca Paris, le 21 novembre 1781 cité par A. Girard, op. cit., p. 292.

    186 A.N.M.C. Et. LXXXII/596. 22 juin 1783. Le capital s’élève à 96 000 lt. et divisé en 36 sols dont 24 faisant fonds. Le principal actionnaire est le comte de Beust, chambellan de l’électeur de Saxe, tandis que Eugenio Izquierdo possède 4 actions soit 16 000 lt.

    187 A.N.M.C., Et. LXXXII/600. 16 janvier 1784.

    188 A.N.M.C. Et. LXXXII/608. 16 avril 1785. Contrat en société des intéressés aux Fonderies de Romilly, sur les Élie Lefebvre, cf. G. Richard, Noblesse d’affaires au xviiie siècle, Paris, 1974, pp. 221-224.

    189 Archives Daridan. Alexandre Marcet à le Couteulx et Cie de Paris, 20 septembre 1784. En réalité Eugenio Izquierdo acheta 400 actions de la Banque de Saint Charles comme le souhaitaient les Le Couteulx.

    190 A.N.M.C. Et. XLVII/665. 23 mars 1786.

    191 A.N.M. Et. LXXXII/614. 28 mars 1786.

    192 J.P. Merino Navarro, La Armada espanola en el siglo XVIII, Madrid, 1981, pp. 377-378.

    193 A.N.M.C. Et. VI/888. 5 prairial an II (24 mai 1794). Inventaire après décès de Michel-Louis Le Camus de Limare. Papiers.

    194 A.D. Eure 19 S 2. Liasse n° 1. Délibérations du 18 avril 1787.

    195 Idem. Sont-ils vraiment en mauvaise santé ?

    196 Cf. G. Richard, « Les Fonderies de Romilly sur Andelle : 1752-1853. Les débuts de la métallurgie non ferreuse en Haute-Normandie », Actes du 88e Congrès national des Sociétés Savantes, Clermont-Ferrand, 1962, pp. 451-467, M. Pichon, « Les Fonderies de cuivre de Romilly sur Andelle pendant la Révolution », Actes du 115-116e Congrès national des Sociétés Savantes, 1990-1991, pp. 65-75.

    197 Journal de Normandie. Supplément n° 97 bis (1787). Les machines semblent avoir été pour partie achetées à l’entreprise des frères Perier. Cf. J. Payen, Capital et machine à vapeur au xviiie siècle, Paris, 1969, p. 142.

    198 A.N.M.C. Et. XCVIII/682. 4 juin 1790.

    199 A.M.A.E. Mémoires et Documents, France 1413. Mémoire 19 frimaire an 3 (9 décembre 1794).

    200 A.H.N. Estado leg 6659. Contrat au 26 juillet 1790.

    201 A.N.M.C. Et. LXXXII/614. 23 mars 1786. Eugenio Izquierdo était associé depuis 1785 dans une manufacture mécanique de filature de coton et de laine où étaient utilisées de nombreuses jennies et machines continues d’Arkwrigth avec Jean-Baptiste Decrétot. Cf. G. Richard, Noblesse d’affaires..., p. 256.

    202 A.N.M.C. Et. LXXXII/614. 23 mars 1786. Izquierdo devait en être le directeur sauf s’il devait retourner en Espagne et d’Arthenay était chargé des écritures.

    203 J.D. de La Rochefoucauld, C. Wolikoff, G. Ikni, Le Duc de la Rochefoucauld-Liancourt, Paris, 1980, p. 59.

    204 A.N.M.C. Et. LXXXII/614. 23 mars 1786. Accensement duchesse d’Enville – Eugenio Izquierdo de Rivera.

    205 Idem, article 22 du contrat de société.

    206 Idem. En réalité, elle fut transférée à Paris, rue Popincourt, mais elle y échoua également. Cf. J. Harris, « Un espion industriel français : Le Turc », dans L’Économie française du xviiie au xxe siècle, Mélanges offerts à François Crouzet, Paris, 2000, p. 501-527.

    207 R. Pellen, Histoire de la manufacture de tabacs de Morlaix, Morlaix, 1986.

    208 A.D. Finistère. 13 L 159. Extrait du registre d’adjudication de Baux. Ferme des domaines nationaux du 3 octobre 1791.

    209 A.N.M.C. Et. XCVIII/705. 28 brumaire an III (18 novembre 1794). Inventaire après décès de Laurent-Vincent Le Couteulx. A.N.M.C. et LXXXVI/879. 27 mars 1792. Faillite de S.E.J. Lenormand.

    210 Commandant Herlant, L’éclairage des rues de Paris à la fin du xviie et au xviiie siècle, Paris, 1916, p. 121.

    211 P. Jubert, « L’illumination publique à Rouen. Notes sur l’éclairage de la ville de 1697 à 1789 » dans Bulletin de la Société libre d’Emulation du Commerce et de l’Industrie de la Seine-Inférieure, Rouen, 1933, p. 332.

    212 A.N.A.E./B/III/342.

    213 A.D.S.M. 2 E 2/129. 2 juin 1788. Contrat de location Frédéric Jorre à Nathaniel Barret et Thomas Appleton, A.D.S.M. 2 E 2/130. 2 mai 1789, Rétrocession Nathaniel Barret et Thomas Appleton à Laurent-Vincent Le Couteulx et Daniel Parker représentés par Michel Horcholle.

    214 A.N.M.C. Et. XCVIII/676. 10 novembre 1788.

    215 A.N.M.C. Et. XCVIII/676. 23 décembre 1788.

    216 F. Crouzet, op. cit., p. 157.

    217 A.N.M.C. Et. XCVIII/689. 29 novembre 1791. Main-levée de Laurent-Vincent Le Couteulx intéressé dans la manufacture de Saint-Sever sur la compagnie de l’illumination de Paris raison Tourtille-Saugrain et Cie. Sommes dues à la Manufacture.

    218 A.N.M.C. Et. CXVII/980. 18 nivôse an IV (8 janvier 1796). Inventaire après décès de Charlotte Pourrai, Veuve de Laurent-Vincent Le Couteulx. Papiers.

    219 P. Tedde de Lorca, El banco p. 217-218.

    220 A.N.M.C. Et. XLVIII/338. 5 mars 1790.

    221 A.N.M.C. Et. XCVIII/682. 15 juin 1790. Elle effectua le remboursement à la date prévue.

    222 A.N. F/7/4774/10. Mémoire des femmes de Le Couteulx (1794).

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    1 G. Richard, La noblesse d’affaires au xviie siècle, Paris, 1974, p. 256.

    2 H. Lüthy, op. cit., t. II, pp. 775-776.

    3 Ch. Carrière, Banque et capitalisme commercial. La lettre de change au xviiie siècle, Marseille, 1976, p. 149.

    4 A.N. F/7/4774/10.

    5 A.N. F/7/4774/10.

    6 Archives Le Couteulx. Lettre de Jacques-Jean Le Couteulx du Molay à Thomas-Barthélemy le 11 janvier 1768.

    7 A.D.S.M. 2 E 2/124. 22 avril 1783. Elle avait été mise à prix pour 90 000 lt.

    8 M. Gérard, Messieurs Hottinguer, banquiers à Paris, Paris, 1968. L’auteur s’est appuyé sur le Journal de Jean-Conrad Hottinguer.

    9 M. Gérard, op. cit., p. 99.

    10 M. Gérard, op. cit., p. 100.

    11 M. Gérard, op. cit., p. 106.

    12 H. Lüthy, op. cit., p. 723.

    13 M. Gérard, op. cit., pp. 97-98.

    14 Archives Daridan. Correspondance Alexandre Marcet avec Lecouteulx et Cie de Paris. Lettres des 7 janvier, 25 janvier, 8 avril 1784.

    15 Archives Daridan. Correspondance Hardouin frères de Rouen avec Le Couteulx et Cie, 17 mai 1783.

    16 A.N.M.C. Et. XCVIII/666, 16 décembre 1786, XCV111/669, 28 juin 1787, 8 juillet 1787 , 670, 13 août 1787 , 682, 11 avril 1790.

    17 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 719.

    18 A.N.M.C. Et. XXX/478, 19 février 1783.

    19 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 467.

    20 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 559.

    21 A.N.M.C. Et. XCVIII/612, 27 septembre 1775.

    22 A.N.M.C. Et. XCVIII/643, 22 janvier 1782.

    23 Archives Daridan, Lettres d’Urbain Teyniers à Le Couteulx Cie, 23 janvier et 27 février 1781.

    24 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 513.

    25 A.N.M.C. Et. XCVIII/643, 30 mars 1782.

    26 A.N.M.C. Et. XCV111/647, 28 janvier 1783. Dépôt de 30 grosses par Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx.

    27 A.N.M.C. Et. LVI/277, 9 juillet 1782. Transport délégation de rentes viagères avec additif au 22 juillet 1788.

    28 A.N.M.C. Et. XCVIII/646, 12 novembre 1782. Sur les rapports étroits entre Baroud et Le Couteulx et Cie. Cf. A.N.M.C. Et. XCVIII/685, 20 janvier 1791, Baroud possédait un compte courant dont le débit s’élevait le 30 septembre 1789 à 587 685 lt.

    29 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 533.

    30 De. Ozanam, Claude Baudart de Saint-James, trésorier général de la Marine et brasseur d’affaires, Genève-Paris, 1966, pp. 128-129.

    31 Sur la société pour l’échange des Bulletins, cf. H. Lüthy, op. cit., t. II, pp. 550-554 qu’il définit comme « un cauchemar de joueur en bourse ».

    32 A.N.M.C. Et. XCVIII/685, 31 janvier 1791. Transport de 649 685 lt. 2 s. de rentes viagères sur l’État par Le Couteulx et Cie à Mr de la Flechelle. Le jour même, ce dernier les restitue à Le Couteulx et Cie.

    33 A.N.M.C. Et. XCV111/682, 1er mai 1790.

    34 A.N.M.C. Et. XCVIII, de 1780 à 1793.

    35 A.D.I et V. 4 Fg 45. Pierre-Bernard Cabanon de Cadix à Gil Apuril de Kerloguen de Saint-Malo, 3 juillet 1789.

    36 Sur Alexandre Marcet. Cf. H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 575.

    37 Archives Daridan. Alexandre Marcet de Genève à Le Couteulx et Cie de Paris, 12 janvier 1784.

    38 Archives Daridan. Alexandre Marcet de Genève à Le Couteulx et Cie de Paris., 24 et 29 janvier 1784.

    39 Idem. Lettre du 10 mai 1784.

    40 Archives Daridan. Lettre d’Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie 20 septembre 1784. Cette banque est considérée comme une des trois grandes banques genevoises spécialisée dans le placement des emprunts viagers.

    41 Jacques-Jean Le Couteulx de Molay à Jean-Barthélemy Le Couteulx, 5 mai 1776 cité par G. Daridan, op. cit., p. 21.

    42 A.N. 61 A Q 15. Isaac Panchaud à Louis Greffulhe d’Amsterdam, 6 juin 1776.

    43 A.N.M.C. Et. XCVIII/617, 7 août 1776. Cautionnement de Le Couteulx et Cie pour la charge de receveur général de la Loterie royale de France.

    44 Arrêt du Conseil d’Etat portant création de la Caisse d’Escompte le 24 mars 1776 cité par F. Hincker, Expériences bancaires sous l’Ancien Régime, Paris, 1974, pp. 46-48.

    45 H. Lüthy, op. cit., t. II, p. 461.

    46 Archives Daridan. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie, 24 janvier 1784.

    47 Idem. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie, 12 juin 1784.

    48 A.N. 8 A Q 17. La Nouvelle Compagnie des Indes Orientales à J.L et L. Le Couteulx et Cie de Cadix, 17 décembre 1786.

    49 Sur la trajectoire de François Cabarrus. Cf. A. Ortega Costa et M. Garcia Osma, Noticias de Cabarrus y de su procesamiento, Madrid, 1974 , M. Zylberberg, Une si douce domination. Les milieux d’affaires français et l’Espagne : vers 1780-1808, Paris, 1993.

    50 A.H.N. Consejos leg 51186. J.L. et L. Le Couteulx et Cie de Cadix à Cabarrus et Aguirre de Madrid, 7 août 1778.

    51 A.H.N. Consejos leg 43622. Année 1778, la commission représente donc 1 025 1t.

    52 A.G.S., Hacienda leg 358 cité par P. Tedde de Lorca, El banco de San Carlos 1782-1829, Madrid, 1988. Jean Laurent Lasserre et Cie fournit 926 277 ps alors que J.Q.L. et L. Le Couteulx et Cie n’en avancèrent que si l’on peut dire 252 852 ps.

    53 M. Zylberberg, op. cit., p. 269.

    54 A.N.M.C. Et. XCVIII/603,23 mai 1773. Procuration Drouilhet et Cie à Le Couteulx et Cie.

    55 A.U.P.M. 20135. Procuration de François Cabarrus à Jean Pascal Lacoste et Courtiau d’Amsterdam pour obtenir ce paiement, 17 septembre 1780.

    56 A.H.N. Consejos leg 43622. Veuve Lalanne et fils de Bayonne à Cabarrus et Aguirre de Madrid le 21 janvier 1781.

    57 A.H.N. Consejos leg 43622. Veuve Lalanne et fils de Bayonne à Cabarrus et Aguirre de Madrid le 26 janvier 1781.

    58 A.N.M.C. et XCVIII/639, 13 février 1781. Procuration de François Cabarrus à Pierre Lalanne et Barthclcmy-Jean-Louis Le Couteulx. D’après Cabarrus, les Français auraient prêté 3 millions de pesos au prix de 40 lt. le marc pour recevoir les pesos à la Vera Cruz au prix de 49 1t. le marc. Cabarrus recevait 3 % de commission soit 90 000 piastres. Cf. B.N. Fonds Joly de Fleury n° 1148.

    59 P. Tedde de Lorca, op. cit., p. 46.

    60 P. Tedde de Lorca, op. cit., p. 51.

    61 P. Tedde de Lorca, op. cit., p. 52.

    62 E.S. Hamilton, « The Foundation of the Bank of Spain » dans Journal of Political economy, t. LVI (1945), pp. 97-117.

    63 A.H.B.E., Secrétariat leg 1095. Laurent-Vincent Le Couteulx de Cadix à la Banque Saint-Charles, 29 novembre 1782.

    64 Archives Daridan. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie, 20 septembre 1784.

    65 Idem.

    66 A.H.B.E. Secrétariat leg 554.

    67 A.H.N. Estado leg 3230 (2).

    68 M. Zylberberg, op. cit., p. 304-305.

    69 Sur cette opération, Cf. M. Zylberberg, op. cit., p. 309.

    70 Idem, p. 320. D’après Mirabeau, Le Couteulx et Cie pour obtenir des avances de la Caisse d’Escompte déposait non des écus mais les récépissés des directeurs des Hôtels de monnaie, ce qui était contraire aux statuts de la Caisse d’Escompte. Mais si elle avait accepté ce que Le Couteulx et Cie lui avait proposé c’était parce que Le Couteulx du Molay la gouvernait selon « son bon plaisir ». H.G. Mirabeau, Lettre à Mr Le Couteulx de la Noraye, Paris, 1785, p. 26.

    71 A.H.N. Estado leg 3202. Rapport anonyme pour la création à Paris d’une Factorie en la Banque Saint-Charles, 28 juin 1789.

    72 H.G. Mirabeau, Lettre à Mr de la Noraye, Paris, 1785.

    73 M. Zylberberg, op. cit., p. 327.

    74 A.H.N. Diverses. Fonde Cabarrus n° 26. Compte particulier de François Cabarrus.

    75 Idem.

    76 A.H.P.M. 20737, 10 janvier 1788. Le contrat de mariage fut signé le 21 février 1788. une dot de 500 000 lt. les Le Couteulx en avancèrent 368 000 lt.

    77 A.H.N. Hacienda leg 5637. Lettre de Cabarrus au 12 juin 1790.

    78 H.U. Faulkner, Histoire économique des Etats-Unis d’Amérique des origines à nos jours, Paris, 1958, p. 137.

    79 Sur John Holker. Cf. A. Rémond, John Holker, 1719-1786, Paris, 1946.

    80 A.N.M.C., Et. XCVIII/628. 22 décembre 1778.

    81 A.N.M.C. Et. XCVIII/628. 22 décembre 1778. John Holker rétrocéda une partie de ses engagements à des négociants de Rouen comme Antoine Garvey ou Pierre Nicolas et Alexandre de Fontenay.

    82 A.N.M.C. Et. XCVIII/682. 30 juillet 1790. Partage de la succession d’Antoine-Louis Le Couteulx. Avait-il pris une part des 100 000 lt.?

    83 Sur Robert Morris. Cf. W.G. Sumner, The Financier and the Finances of the American Révolution, New-York, 1968 (1ère édition 1891).

    84 A.N. F/12/744. Mr de Marbois au Comte de Vergennes, 16 août 1784.

    85 Papers Robert Morris, t. I, p. 123. Robert Morris de Philadelphie à Benjamin Franklin de Paris, le 8 juin 1781.

    86 Papers Robert Morris, t. 1, pp. 357-358. Chevalier de la Luzerne à Robert Morris, 26 septembre 1781.

    87 Papers Robert Morris, t. I, pp. 392-393. Benjamin Franklin à Robert Morris, Passy le 26 juillet 1781.

    88 J.L. Auclain, « Une dynastie franco-américaine d’hommes d’affaires à la fin de l’Ancien Régime : les Le Ray de Chaumont » dans Mémoires des Sciences et Lettres du Loir et Cher, 1980, n° 36, p. 143.

    89 Papers Robert Morris, t. II, p. 321. Robert Morris à Ferdinand Grand, le 3 décembre 1781.

    90 Papers Robert Morris, t. V, p. 222. Robert Morris à Le Couteulx et Cie, 18 mai 1782.

    91 Papers Robert Morris, t. III, pp. 54-55. Robert Morris à Matthew Ridley, 14 octobre 1783.

    92 Papers Robert Morris, t. VII, p. 403. J.L. et L. Le Couteulx et Cie de Cadix à Robert Morris, 4 février 1783. La maison de Cadix expédia des marchandises aux Insurgents comme de l’indigo. Cf. A.H.N. Estado leg 3884.

    93 A.N. Marine D1/35.

    94 Arrêt du Conseil d’Etat portant établissement de paquebots pour communiquer avec les Etats-Unis d’Amérique, 28 juin 1783, cité par O. Noël, Histoire du commerce du monde, Paris, 1892, t. 2, p. 418.

    95 Sur l’organisation de la ligne directe Le Havre-New-York, Cf. P. Derolin, « Le Havre tête de ligne de paquebots transatlantiques 1787-1789 » dans Cahiers havrais de recherche historique, 1992, n° 51, pp. 127-144.

    96 A.N. Marine D1/35. Compte rendu de Le Couteulx et Cie au Secrétaire d’Etat à la Marine, 30 mars 1789.

    97 A.N.M.C. Et. XCVIII/680. 15 septembre 1789.

    98 H.M.J. Kline, Gouverneur Morris and the new nation, New-York, 1978, p. 288.

    99 J.M. Price, France and the Chesapeake : A history of the French tobaco monopoly 1674- 1790, Ann Arbor, 1973 , M. et M. Vigie, L’herbe à Nicot, Paris, 1989.

    100 J.M. Price, op. cit., t. II, pp. 169-170.

    101 A.N.A.E. B/III/442.

    102 A.N.A.E. B/III/442.

    103 A.N.M.C. Et. XCVIII/661. 18 novembre 1785.

    104 Papers Jefferson, t. 10, p. 395. Thomas Jefferson à Charles Thompson, Paris, le 20 septembre 1786. Sur Louis Le Couteulx de Caumont en Amérique, cf. G. Daridan, op. cit., pp. 107-118.

    105 A.N.M.C. Et. CXVII/982. 19 pluviôse an V (6 février 1797). Décision de la mère de Laurent-Vincent de vendre ces 49 885 acres dont elle a hérité après la mort de son fils Laurent-Vincent, A.N.M.C. et CXVII/974. 28 thermidor an II (15 août 1794). Etat de la fortune de Barthélemy-Jean-Louis Le Couteulx.

    106 Papers Jefferson, t. 10. Thomas Jefferson à George Washington, Paris, novembre 1786. George Washington à Thomas Jefferson, le 30 mai 1787.

    107 M. Zylberberg, op. cit., p. 425.

    108 Papers Jefferson, t. XI, p. 660. Thomas Jefferson à Ralph Izard, Paris le 1er août 1787 , Le Couteulx et Cie à Thomas Jefferson, 3 janvier 1787.

    109 F. Crouzet, La grande inflation. La monnaie en France de Louis XVI à Napoléon, Paris, 1993, p. 157.

    110 Papers Jefferson, t. XV, p. 415. Thomas Jefferson à Henry Lee. Paris, le 30 novembre 1789.

    111 Sur Gouverneur Morris. Cf. JJ. Fiechter, Un diplomate américain sous la Terreur. Les années européennes de Gouverneur Morris, Paris, 1983.

    112 J.J. Fiechter, op. cit., p. 146.

    113 Déjà en 1788 Le Couteulx et Cie dans une lettre à Tarbé, le premier commis de Necker proposait que les achats de blé aux Etats-Unis permettent de réduire la dette due à la France. Cf. Papers Jefferson, t. XV, note 16, p. 247. Le Couteulx et Cie à Tarbé, 13 octobre 1788.

    114 Papers Jefferson, t. XV, p. 566. William Short à Thomas Jefferson, Paris, le 30 novembre 1789.

    115 Papers Jefferson, t. XV, p. 4 15. Thomas Jefferson à Henry Lee, Paris, 11 septembre 1789.

    116 Papers Jefferson, t. XVII, p. 529. William Short à Thomas Jefferson, Paris le 26 septembre 1790.

    117 J.J. Fiechter, « L’âme des modifications », op. cit., p. 151.

    118 Papers Jefferson, t. XVII, p. 503. James Swan à Thomas Jefferson, Paris, 3 octobre 1790. On ne sait si un accord fut conclu.

    119 J.J. Fiechter, op. cit., p. 152.

    120 A.C.C. M. LIX/484. Le Couteulx de Paris à la maison Roux de Marseille, 31 octobre 1776

    121 Ph. Dupré, « Les activités maritimes en Normandie à la veille de la Révolution », Mélanges Gabriel Désert, Cahiers des Annales de Normandie, Caen, 1992, p. 239.

    122 A. Dubuc, « Un Rouennais acheteur de laines en Espagne et dans le Berry en 1791 » dans Congrès National des Sociétés Savantes, Paris, 1969. Section d’Histoire moderne et contemporaine, Paris, 1971, t. I, pp. 165-190.

    123 A.H.N. Consejos leg 43653. Jean-Pierre Lalanne à Cabarrus et Lalanne, Vinuesa, 12 août 1786.

    124 Chevalier de Lamerville, Observations pratiques sur les bêtes à laine du Berry, Paris, 1787, p. 7.

    125 A.D.S.M. 15 J 49. Le 20 août 1779. La maison Grandin demande à la maison Le Couteulx de Cadix quel est le prix des laines de l’Andalousie.

    126 M. de Crosne, intendant de la généralité de Rouen à Trudaine de Montigny intendant de commerce, Rouen, 9 décembre 1772 cité par G. de Robillard de Beaurepaire, Notes sur la manufacture royale des Andelys, Caen, 1894, p. 23.

    127 G. Robillard de Beaurepaire, op. cit., p. 30.

    128 A.N.M.C. et VII/411. 24 juillet 1781. Contrat de mariage Jean-Abraham Poupart de Neuflize – Adélaïde Dumoustier de Watre. Parmi ses autres fournisseurs figurent Planter Quesnel et Cie, Duvergier, Ribard Le Vieux de Rouen, Veuve Lalanne et Cie de Bayonne, Michel d’Orléans, Rouzellet de Bilbao.

    129 P. Lebrun, L’industrie de la laine à Verviers pendant le xviiie siècle et le début du xixe siècle, Liège, 1948, p. 144.

    130 A.D.S.M. 2 E 2 /128. Procuration de Jean Barthélemy Le Couteulx à Arnold Pitot fils, 24 avril 1787.

    131 Sur cette compagnie cf. J. Tarrade, Le commerce colonial de la France à la fin de l’Ancien Régime, Paris, 1973, pp. 521-522 , G. Chaussinand-Nogaret, La noblesse au xviiie siècle, Paris, 1984 (1ère édition 1976), pp. 133-139 , A.O.M. (Archives d’Outre-Mer), Aix-en-Provence, C/6/18 Mémoire de Tolozan.

    132 La liste complète des actionnaires est indiquée par G. Chaussinand-Nogaret, op. cit., pp. 134-136.

    133 G. Chaussinand-Nogaret, op. cit., p. 123.

    134 A.N.M.C. Et. XXX/499. 22 février 1788.

    135 A.N.M.C. Et. XXX/471, 17 juillet 1781.

    136 A.O.M. (Aix-en-Provence) C/6/18. J.F. Tolosan au Maréchal de Castries, secrétaire d’Etat à la Marine, 20 mai 1783.

    137 J. Tarrade, op. cit., t. II, p. 521.

    138 A.N.M.C. Et. XXX/499. Assemblée des actionnaires du 3 février 1788

    139 A.N.M.C. Et. XXX/483. 24 mai 1784. Dissolution de la Compagnie de la Guyane et formation de la Compagnie du Sénégal. Parmi les autres participants éventuels Baudart de Saint-James, Megret de Serilly, la maison de banque Pache frères.

    140 A.O.M. (Aix-en-Provence) C/6/18.

    141 A.N.M.C. et XXX/492. 18 août 1786.

    142 Sur la Compagnie des Eaux, cf. J. Bouchary, L’eau à Paris à la fin du xviiie siècle, Paris, 1946. Sur la formation de la société. A.N.M.C. Et. XXX/459. 27 août 1778.

    143 A.N.M.C. Et. XCVIII/672. 14 janvier 1788.

    144 J. Bouchary, op. cit., p. 92.

    145 A.N.M. C. XCV111/673. 19 avril 1788.

    146 Sur cette compagnie, cf. J. Conan, La dernière compagnie des Indes, Paris, 1942.

    147 M. Zylberberg, op. cit., p. 322.

    148 H. Lüthy, op. cit., t. II, pp. 681-682.

    149 A.N. F/12/798.

    150 A. N. AA 33.

    151 A.N. 8 AQ 374. Le Couteulx et Cie de Rouen à la Nouvelle Compagnie des Indes Orientales, Rouen le 8 avril 1786.

    152 Le Couteulx et Cie de Rouen à Joly de Fleury, 6 février 1783 cité par P. Dardel, op. cit., pp. 353-354.

    153 P. Dardel, op. cit., p. 353.

    154 A.N. V/7/37. Bilan de la société Bouffé père et fils, Paris, le 24 novembre 1780.

    155 A.D.S.M. 2 E 70/665. Inventaire après décès de Jean-Laurent Ruellan, 3 août 1791 et jours suivants.

    156 Archives Daridan. Alexandre Marcet à Le Couteulx et Cie de Paris, 10 décembre 1784.

    157 P. Dardel, Navires et marchandises dans les ports de Rouen et du Havre au xviiie siècle, Paris, 1963, note 1, p. 4 48.

    158 P. Dardel, op. cit., p. 82.

    159 Journal du Havre, 21 juillet 1790 cité par P. Dardel, op. cit., note 4, p. 441.

    160 A.D.S.M. 2 E 70/665. Inventaire après décès de Jean-Laurent Ruellan. Papiers.

    161 J. Mettas, Répertoire des expéditions négrières françaises au xviiie siècle, Paris, t. II, 1984, p. 495.

    162 J. Mettas. op. cit., t. II, p. 495 et suivantes. Un de ces bâtiments s’appelle La Laurette, prénom d’une fille de Jacques-Jean Le Couteulx. Le bâtiment sera perdu mais la cargaison sauvée.

    163 A.N.M.C. Et. XLVIII/686. 26 février 1791. La vente a lieu à Paris. Jean-Laurent Ruellan est logé chez Mrs Le Couteulx place Vendôme. L’acheteur ne pourra en prendre possession qu’en janvier 1795.

    164 Lettre du 19 mars 1788 citée par M. Dorigny, B. Gainot, La Société des Amis des Noirs, Paris, 1998, p. 108.

    165 A.D.S.M. 2 E2/133. 23 juillet 1792.

    166 B.-L. Mouser, « Iles de Los as bulking center in the slave trade 1750-1800 » dans Revue Française d’Histoire d’Outre-Mer, 1996, t. 83, 4e trimestre, pp. 77-90.

    167 Sur l’établissement au Havre de Miles Barber, cf. E. Delobette, « Négociants et traite des Noirs au Havre au xviiie siècle » dans Annales de Normandie, 1998, n° 3, p. 267 , sur le Duc de Normandie, cf. J. Mettas, op. cit., t. II, p. 495.

    168 A.D.S.M. 2 E 2/128. 7 novembre 1787.

    169 Idem.

    170 Sur cette manufacture, cf. S. Chassagne, Le coton et ses patrons 1760-1840, Paris, 1991, pp. 101, H8, 141.

    171 A.N. F/12/562. Mémoire de Bruyard (1783).

    172 A.N.M.C. Et. XCV111/639. 24 février 1781. Sur les liens entre les Le Couteulx et les Danse de Beauvais, cf. S. Chassagne, op. cit., p. 118.

    173 A.N.M.C. Et. XCVIII/693. 20 juillet 1792. Référence à un contrat du 26 avril 1789.

    174 A.M.C. Et. XCVIII/693. 20 juillet 1792.

    175 M. Acerra, A. Zysberg, L’essor des marines de guerre européennes 1680-1790, Paris, 1997, pp. 35-36.

    176 A.N.M.C. Et. XXV1/608. 15 janvier 1773.

    177 A.D. de l’Eure, 19. S.2. Liasse n° 1.

    178 M. Pichon, Recherches monographiques sur la Basse Vallée de l’Andelle pendant la Révolution française, Thèse, Université de Rouen, 1994, p. 54.

    179 A.N.M.C. Et. LXVIII/754. 4 septembre 1781.

    180 A.D. Eure. 19. S. 2. Liasse n° 1.

    181 A.N.M.C. Et. LXXX11/608. 16 avril 1785.

    182 A. Girard, « Une négociation commerciale entre la France et l’Espagne en 1782 » dans Revue Historique, 1912, t. 3, p. 292.

    183 J. Sarrailh, L’Espagne éclairée à la fin du xviiie siècle, Paris, 1964, note 2, p. 354.

    184 A.J. Barrera, El museo national de Sciencias naturales 1771-1935, Madrid, 1992, p. 64.

    185 Le comte d’Aranda à Floridablanca Paris, le 21 novembre 1781 cité par A. Girard, op. cit., p. 292.

    186 A.N.M.C. Et. LXXXII/596. 22 juin 1783. Le capital s’élève à 96 000 lt. et divisé en 36 sols dont 24 faisant fonds. Le principal actionnaire est le comte de Beust, chambellan de l’électeur de Saxe, tandis que Eugenio Izquierdo possède 4 actions soit 16 000 lt.

    187 A.N.M.C., Et. LXXXII/600. 16 janvier 1784.

    188 A.N.M.C. Et. LXXXII/608. 16 avril 1785. Contrat en société des intéressés aux Fonderies de Romilly, sur les Élie Lefebvre, cf. G. Richard, Noblesse d’affaires au xviiie siècle, Paris, 1974, pp. 221-224.

    189 Archives Daridan. Alexandre Marcet à le Couteulx et Cie de Paris, 20 septembre 1784. En réalité Eugenio Izquierdo acheta 400 actions de la Banque de Saint Charles comme le souhaitaient les Le Couteulx.

    190 A.N.M.C. Et. XLVII/665. 23 mars 1786.

    191 A.N.M. Et. LXXXII/614. 28 mars 1786.

    192 J.P. Merino Navarro, La Armada espanola en el siglo XVIII, Madrid, 1981, pp. 377-378.

    193 A.N.M.C. Et. VI/888. 5 prairial an II (24 mai 1794). Inventaire après décès de Michel-Louis Le Camus de Limare. Papiers.

    194 A.D. Eure 19 S 2. Liasse n° 1. Délibérations du 18 avril 1787.

    195 Idem. Sont-ils vraiment en mauvaise santé ?

    196 Cf. G. Richard, « Les Fonderies de Romilly sur Andelle : 1752-1853. Les débuts de la métallurgie non ferreuse en Haute-Normandie », Actes du 88e Congrès national des Sociétés Savantes, Clermont-Ferrand, 1962, pp. 451-467, M. Pichon, « Les Fonderies de cuivre de Romilly sur Andelle pendant la Révolution », Actes du 115-116e Congrès national des Sociétés Savantes, 1990-1991, pp. 65-75.

    197 Journal de Normandie. Supplément n° 97 bis (1787). Les machines semblent avoir été pour partie achetées à l’entreprise des frères Perier. Cf. J. Payen, Capital et machine à vapeur au xviiie siècle, Paris, 1969, p. 142.

    198 A.N.M.C. Et. XCVIII/682. 4 juin 1790.

    199 A.M.A.E. Mémoires et Documents, France 1413. Mémoire 19 frimaire an 3 (9 décembre 1794).

    200 A.H.N. Estado leg 6659. Contrat au 26 juillet 1790.

    201 A.N.M.C. Et. LXXXII/614. 23 mars 1786. Eugenio Izquierdo était associé depuis 1785 dans une manufacture mécanique de filature de coton et de laine où étaient utilisées de nombreuses jennies et machines continues d’Arkwrigth avec Jean-Baptiste Decrétot. Cf. G. Richard, Noblesse d’affaires..., p. 256.

    202 A.N.M.C. Et. LXXXII/614. 23 mars 1786. Izquierdo devait en être le directeur sauf s’il devait retourner en Espagne et d’Arthenay était chargé des écritures.

    203 J.D. de La Rochefoucauld, C. Wolikoff, G. Ikni, Le Duc de la Rochefoucauld-Liancourt, Paris, 1980, p. 59.

    204 A.N.M.C. Et. LXXXII/614. 23 mars 1786. Accensement duchesse d’Enville – Eugenio Izquierdo de Rivera.

    205 Idem, article 22 du contrat de société.

    206 Idem. En réalité, elle fut transférée à Paris, rue Popincourt, mais elle y échoua également. Cf. J. Harris, « Un espion industriel français : Le Turc », dans L’Économie française du xviiie au xxe siècle, Mélanges offerts à François Crouzet, Paris, 2000, p. 501-527.

    207 R. Pellen, Histoire de la manufacture de tabacs de Morlaix, Morlaix, 1986.

    208 A.D. Finistère. 13 L 159. Extrait du registre d’adjudication de Baux. Ferme des domaines nationaux du 3 octobre 1791.

    209 A.N.M.C. Et. XCVIII/705. 28 brumaire an III (18 novembre 1794). Inventaire après décès de Laurent-Vincent Le Couteulx. A.N.M.C. et LXXXVI/879. 27 mars 1792. Faillite de S.E.J. Lenormand.

    210 Commandant Herlant, L’éclairage des rues de Paris à la fin du xviie et au xviiie siècle, Paris, 1916, p. 121.

    211 P. Jubert, « L’illumination publique à Rouen. Notes sur l’éclairage de la ville de 1697 à 1789 » dans Bulletin de la Société libre d’Emulation du Commerce et de l’Industrie de la Seine-Inférieure, Rouen, 1933, p. 332.

    212 A.N.A.E./B/III/342.

    213 A.D.S.M. 2 E 2/129. 2 juin 1788. Contrat de location Frédéric Jorre à Nathaniel Barret et Thomas Appleton, A.D.S.M. 2 E 2/130. 2 mai 1789, Rétrocession Nathaniel Barret et Thomas Appleton à Laurent-Vincent Le Couteulx et Daniel Parker représentés par Michel Horcholle.

    214 A.N.M.C. Et. XCVIII/676. 10 novembre 1788.

    215 A.N.M.C. Et. XCVIII/676. 23 décembre 1788.

    216 F. Crouzet, op. cit., p. 157.

    217 A.N.M.C. Et. XCVIII/689. 29 novembre 1791. Main-levée de Laurent-Vincent Le Couteulx intéressé dans la manufacture de Saint-Sever sur la compagnie de l’illumination de Paris raison Tourtille-Saugrain et Cie. Sommes dues à la Manufacture.

    218 A.N.M.C. Et. CXVII/980. 18 nivôse an IV (8 janvier 1796). Inventaire après décès de Charlotte Pourrai, Veuve de Laurent-Vincent Le Couteulx. Papiers.

    219 P. Tedde de Lorca, El banco p. 217-218.

    220 A.N.M.C. Et. XLVIII/338. 5 mars 1790.

    221 A.N.M.C. Et. XCVIII/682. 15 juin 1790. Elle effectua le remboursement à la date prévue.

    222 A.N. F/7/4774/10. Mémoire des femmes de Le Couteulx (1794).

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    • Becchia, Alain. (2012) Modernités de l’Ancien Régime. DOI: 10.4000/books.pur.116490
    • Biard, Michel. Dupuy, Pascal. (2008) La Révolution française. DOI: 10.3917/arco.biard.2008.01.0333
    • Martin, Alexander M.. (2010) Gender, War and Politics. DOI: 10.1057/9780230283046_8
    • (2015) Publications d'histoire économique et sociale internationale Bordeaux et les Etats-Unis, 1776-1815. DOI: 10.3917/droz.marza.2015.01.0439
    • (2009) La coexistence confessionnelle à l’épreuve. DOI: 10.4000/books.larhra.1725
    • (2016) La Révolution française. DOI: 10.3917/arco.biard.2016.01.0333
    • (2013) Les bourgeoisies en France. DOI: 10.3917/arco.coste.2013.01.0237
    • Howell, Martha. (2021) Merchant Masculinity in Early Modern Northern Europe. Cultural and Social History, 18. DOI: 10.1080/14780038.2020.1815459

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