Clergés, communautés et famille des montagnes d’Europe
| ,Partie IV. Montagnes refuges, montagnes à christianiser ?
Y a-t-il eu un catharisme des montagnes ?
Texte intégral
- 1 Anne Brenon, « Le catharisme des montagnes. À la recherche d’un catharisme populaire », Heresis, n° (...)
- 2 Registre d’inquisition de Geoffroy d’Ablis (1308-1309), Annette Pales-Gobilliard (éd.), Paris, 1984 (...)
1L’expression « catharisme des montagnes » apparaît dans la recherche au cours des années 1980. Pour la première fois, à ma connaissance, fut développée l’hypothèse d’une spécificité montagnarde du catharisme, localisée en haute Ariège au début du xive siècle1. Cette proposition n’était pas fortuite, elle traduit l’impact qu’eurent au cours des années 1970-1980, l’édition et la traduction de deux des derniers registres d’Inquisition – celui de Geoffroy d’Ablis (1308-1309) et celui de Jacques Fournier (1318-1326)2. Au début du xive siècle, ces Inquisiteurs s’étaient investis dans la recherche des derniers foyers du catharisme parmi lesquels ceux des montagnes du haut comté de Foix.
- 3 Emmanuel Le Roy Ladurie, Montaillou, village occitan de 1294 à 1324, Paris, 1975, 1982.
- 4 L’ouvrage d’Emmanuel Le Roy Ladurie a été critiqué à l’étranger, voir : Mathias Benad, Domus und Re (...)
2Dans ce contexte paraît l’ouvrage du moderniste Emmanuel Le Roy Ladurie, Montaillou village occitan, best-seller dès la première édition en 19753. L’auteur est l’un des premiers à avoir appliqué les données du registre d’inquisition de Jacques Fournier à une étude de type ethnologique. En offrant à ses lecteurs un spectaculaire crépuscule, il a largement contribué à donner une image réductrice du dernier catharisme, en posant le village de Montaillou comme le cas représentatif du « catharisme des montagnes »4 : non seulement le grand public mais les spécialistes eux-mêmes en furent touchés, comme le montre l’historiographie des années 1980.
3En posant la question de savoir s’il y a eu un catharisme des montagnes, je voudrais attirer l’attention sur ce qui m’apparaît comme une simplification abusive. Vouloir réduire l’existence d’une éventuelle spécificité montagnarde du mouvement à la période finale du catharisme me semble être une erreur de perspective. Je proposerai plutôt de s’interroger sur la question de l’existence d’une spécificité du catharisme dans les zones languedociennes de montagne.
Un catharisme des montagnes ?
- 5 Anne Brenon, « Le catharisme des montagnes... », op. cit., p. 53.
- 6 Ibid., p. 72-74 et Ead., « Mort et effacement du catharisme. Les archives perdues de l’Inquisition (...)
4Le « catharisme des montagnes » serait donc circonscrit à la zone la plus élevée du comté de Foix, le Sabartès, d’où serait parti, dans les premières années du xive siècle, le petit groupe de parfaits réunis autour des frères Autier, représentant le dernier effort pour réhabiliter la foi cathare avant sa disparition définitive. C’est à cette période que la montagne constituerait un lieu de refuge à partir duquel pouvaient encore agir les derniers parfaits. Ce « catharisme des montagnes » serait du point de vue social un « catharisme populaire ». Car, par rapport à la période d’« avant les montagnes », où il recrute dans les classes plus élevées, le catharisme final devient un catharisme populaire en s’adressant à des paysans et bergers5. Ce public plus fruste aurait provoqué la « folklorisation » de certains thèmes doctrinaux, c’est-à-dire la transformation du « dualisme métaphysique du catharisme en dualisme pragmatique ». Populaire du point de vue de son auditoire, ce catharisme ne le serait pas du point de vue doctrinal, les derniers parfaits continuant d’enseigner « l’authentique catharisme », le catharisme « classique » de la période précédente6.
- 7 Supra note 2.
- 8 Anne Brenon, « Le catharisme des montagnes... », op. cit., p. 63 et supra note 6.
5Si ce sont, certes, les documents inquisitoriaux les plus tardifs7 qui « nous ouvrent les montagnes : comté de Foix, Sabartès, hautes Corbières »8, il serait pourtant plus précis de dire qu’ils nous ouvrent ces montagnes au début du xive siècle... Car s’il faut attendre les derniers registres d’inquisition pour pénétrer les montagnes du comté de Foix, celles-ci ne sont pas restées imperméables au catharisme dans la période précédente. Considérons en effet la zone d’expansion du catharisme dans le Midi de la France : dès la fin du xiie siècle et le début du xiiie siècle, le catharisme est attesté partout. On le rencontre au nord, dans l’Agenais et le Quercy ; à l’est, dans l’Albigeois et le Carcassés, région, notons-le, occupée par des reliefs (la Montagne Noire au nord, les Corbières au sud) ; à l’ouest, dans la plaine du Lauragais toulousain qui se prolonge vers le sud de part et d’autre des Pyrénées ariégeoises et catalanes (Sabartès, Pays de Sault, Donezan, Fenouillèdes, seigneurie de Castelbon, sierra de Cadi, de Ciurana, de Porreira-Tarragone). Cette vaste aire géographique voit alterner les zones de plaine avec les zones plus élevées, voire des montagnes qui semblent plus ou moins touchées par le catharisme. Il connaît un accueil favorable, autant de la part de la petite aristocratie militaire gouvernant les castra en milieu rural, que des élites urbaines des villes importantes comme Toulouse, mais aussi celles de l’Albigeois et du bas Quercy. Sans conteste, à l’époque d’implantation du catharisme dans le Midi, les pouvoirs politiques des régions les plus favorables à son accueil s’exercent autant dans les zones de plaine que dans les vallées plus élevées. La question qui demeure entière est de connaître la raison pour laquelle ces hauts lieux touchés par le catharisme depuis l’expansion du mouvement dans le Midi n’ont été inquiétés par l’Inquisition qu’au début du xive siècle. J’y reviendrai.
6Dorénavant, je préférerais parler de « catharisme en zone de montagne » afin de le distinguer de l’expression « catharisme des montagnes » qui laisse supposer l’existence d’une spécificité montagnarde uniquement à la fin du mouvement et dans la région de la haute Ariège. S’il est vrai que, comme nous l’avons vu, le catharisme s’installe indistinctement et dès le départ en zone de montagne et en zone de plaine, la question qui mérite d’être posée dans le cadre de ce colloque est celle de savoir si le catharisme en zone de montagne a généré des formes particulières, c’est-à-dire s’il a connu une spécificité propre dans ces hauts lieux. Si spécificité il y a, sur quoi reposait-elle : sur l’origine sociale de son clergé et/ou sur celle de ses fidèles, qui serait représentatif des populations de montagnes ? Sur une différente organisation de ses communautés par rapport à celle des communautés de plaine ? Sur une pratique particulière de ses rites et/ou sur une adaptation « populaire » des croyances ? Enfin, il faut se demander si les montagnes ont pu entretenir la dissidence ou si elles n’ont été qu’un lieu de refuge.
7Tout au long de l’histoire du catharisme, les montagnes ont été des lieux d’accueil, bien qu’à certains moments elles aient joué un rôle plus déterminant. À partir des sources, il est possible de distinguer trois périodes : la montagne avant et après la croisade albigeoise ; la montagne au temps du repli cathare et, enfin, la montagne au temps du dernier catharisme.
La montagne avant et après la croisade albigeoise
8À la fin du xiie et au début du xiiie siècle, la plaine comprise dans le triangle Toulouse, Albi et Carcassonne (l’Agenais, le Quercy, le Lauragais, le Lantarès) abrite, au même titre que ses bordures montagneuses (Carcassès, Corbières, Razès, Sabartès), des lieux attestés d’accès au catharisme. Est-il possible d’envisager avant le désastre l’existence d’une spécificité montagnarde ?
- 9 Dans le Midi, certains domaines restent peu réceptifs à l’implantation du catharisme comme le Narbo (...)
- 10 La Chronique de Guillaume de Puylaurens pour la période d’avant la croisade et la période suivante, (...)
- 11 Parmi ces premiers documents d’Inquisition, mentionnons le ms. 609 de la Bibl. mun. de Toulouse et (...)
9Les raisons permettant d’expliquer l’implantation du catharisme dans le Languedoc, ou plutôt dans certaines régions du Midi par rapport à d’autres ont déjà été abordées9, je n’y reviendrai pas ici. La documentation permettant de connaître les voies du recrutement social du catharisme pour la période d’avant la croisade est essentiellement narrative10. Ce sont les Cisterciens qui, lors des différentes missions ou légations comme représentants de l’Église dans sa lutte contre l’hérésie, font du Midi de la deuxième moitié du xiie siècle une terre gagnée à l’hérésie. Pour une évaluation plus précise du recrutement social du catharisme, les sources postérieures à la croisade sont plus éloquentes. Ainsi, les enquêtes de l’Inquisition datant de la période 1240-1250 permettent d’identifier le nom des familles et des lieux impliqués, bien que cette information provienne du souvenir des déposants qui remonte à quarante ans, voire cinquante et soixante ans auparavant, c’est-à-dire à la fin du xiie siècle et aux premières années du xiiie siècle11.
10Dans le Midi, et bien que le milieu urbain ait été réceptif à l’hérésie, c’est le milieu rural, et surtout celui de la petite noblesse militaire de la région du Lauragais, de l’Albigeois et du Carcassès qui se montre le plus favorable à l’implantation du catharisme. En accueillant les hérétiques, la noblesse castrale peut afficher son désaccord envers la situation de progressive détresse économique et sociale à laquelle elle est confrontée. Pour sa part, la haute aristocratie princière souffre aussi de la lente désintégration du pouvoir laïc. Elle affecte la plupart des cités où l’autorité comtale et surtout vicomtale est concurrencée par celle de l’évêque. L’hérésie, dans sa dimension politique, affaiblit donc également le pouvoir princier.
- 12 Sa sœur, Esclarmonde de Foix, et trois autres dames de la région, reçoivent le consolamentum en 120 (...)
11Dès la fin du xiie siècle et du début du xiiie siècle, nos rares sources témoignent de la présence de cathares résidant dans les castra, villages fortifiés dont les seigneurs étaient des vassaux du vicomte Trencavel et du comte de Toulouse, puis dans les territoires du comte de Foix. Les castra de la mouvance des Trencavel se trouvaient dans le Lauragais, le Carcassès, le Razès, le Termenès et le Minervois. Ceux du comte de Toulouse se situaient dans l’Agenais, le Quercy et le Toulousain. Dans les domaines du comté de Foix où Mirepoix et Pamiers sont principalement mentionnés, la noblesse se montre réceptive à l’accueil des hérétiques, une hospitalité que rendent même des membres de la famille du comte Raymond-Roger12.
- 13 Claudie Amado, « L’entourage des Trencavel au xiie siècle », dans Les voies de l’hérésie. Le groupe (...)
- 14 Marie-Élise Gardel, « La seigneurie de Cabaret d’après les sources écrites », dans Les voies de l’h (...)
- 15 Claudie Amado, l’aristocratie languedocienne du xe au xiie siècle, vol. 1 : Genèse des lignages mér (...)
- 16 Jean-Loup Abbé, « Au cœur de la Montagne Noire et de l’hérésie : les seigneurs d’Aragon », dans Les (...)
- 17 Gauthier Langlois, « Olivier de Termes et son entourage, de la Croisade albigeoise aux croisades en (...)
- 18 Jean Duvernoy, L’Histoire des cathares, vol. 1, p. 156 ; Claudine Pailhès, « Le jeu politique en co (...)
12À ce moment, à côté de certaines villes et villages touchés par le catharisme comme Toulouse, Castres, Verfeil, Lombers, Saint-Paul-Cap-de-Joux, Saint-Félix, Lavaur, Castelnaudary, Fanjeaux, Laurac, Montréal, des zones de montagne situées dans les domaines des vicomtes Trencavel et du comte de Foix le sont également. Il n’est pas question de faire ici un inventaire des seigneuries situées dans les trois zones de montagne qui se montrent favorables à l’implantation du catharisme dès la fin du xiie siècle. Je renvoie aux monographies existantes. Il s’agit de la Montagne Noire (Saissac13, Cabaret14, Hautpoul15, Aragon16), des Corbières (Termes17, Durfort), et des Pyrénées (Sabartès, pays d’Alion, pays de Sault, Fenouillèdes, sierras de Ciurana et de Cadi dans le vicomté de Castelbon)18.
- 19 Claudie Amado, « L’entourage des Trencavel au xiie siècle », op. cit.
- 20 Ibid.
13Pour la période étudiée, et en l’état actuel des recherches sur les familles de ces seigneuries, il paraît difficile de se prononcer sur une spécificité du catharisme. Les modalités d’accueil et d’implantation se font ici, comme dans les seigneuries de plaine, par la voie de la noblesse castrale. Celle-ci entretient des solidarités vis-à-vis de parents et amis, croyants ou parfaits, assurant ainsi la stabilité des réseaux de lignages à l’intérieur desquels on peut trouver des branches familiales plus ou moins gagnées à l’hérésie face à d’autres qui sont moins réceptives19. Ces réseaux de solidarité aboutissent, par des liens de fidélité, aux Trencavel et s’appuient sur « un dispositif complexe de relations de réciprocité »20.
- 21 Ead., Genèse des lignages méridionaux, op. cit., p. 217.
14Pour sa part Claudie Amado, dans son étude des lignages aristocratiques languedociens, a formulé l’hypothèse selon laquelle, dans l’espace compris entre les vicomtés de Béziers et de Carcassonne, il serait possible d’envisager deux grands types de seigneurie féodale au xiie siècle : « Une seigneurie archaïque, conservatoire de formes anciennes de gestion domaniale, d’exercice de pouvoir et plus largement de pratiques économiques et sociales. Une seigneurie moderne usant du modèle urbain, intégrant les institutions féodo-vassaliques dans un projet de développement où les notions d’“utilité”, de “bien”, d’“amélioration” du rendement étaient particulièrement valorisées. Le premier modèle l’emporterait dans l’arrière-pays... dans les régions montagneuses... le second dans les plaines fluviales ou littorales adossées à des massifs. » La disparité de ces modèles de seigneurie aurait des répercussions sur la cohésion de cet ensemble lors des événements militaires de la croisade21. Malgré ce constat, il reste difficile d’évaluer la répercussion que le catharisme a pu avoir sur ces modèles.
- 22 Jean-Louis Biget, « Hérésie, politique et société en Languedoc... », op. cit., p. 28 et suiv.
15La croisade de 1209 porte un coup à la relative stabilité dans laquelle vivaient les communautés cathares protégées par l’aristocratie méridionale qui les accueillait. L’offensive vise les domaines du comte de Toulouse qui, en se réconciliant avec l’Église en 1209, parvient à détourner les contingents croisés sur les terres vicomtales, lesquels prennent pour cible les cités et les villes des seigneurs Trencavel – Béziers, Carcassonne, ralliement d’Albi et de Castres – pendant la première phase de la croisade, de l’été 1209 à la fin de l’année 121222. Le nouveau pouvoir représenté par Simon de Montfort dans les domaines Trencavel (après la mort du vicomte Raimond Roger à la fin de l’année 1209) a des répercussions tragiques sur l’organisation des communautés cathares. Les premiers bûchers – Minerve en 1210, Lavaur et Cassés en 1211 – atteignent les effectifs qui se voient dispersés. Le domaine comtal devient la cible des hostilités, dès 1211. En 1216, le nouveau comte de Toulouse, Raymond VII, se voit contraint de rendre hommage au roi Philippe Auguste. La reprise de Toulouse par Raymond VII, en 1217, ouvre une période de « reconquête méridionale » (1216-1226) pendant laquelle le catharisme languedocien parvient à nouveau à s’organiser. C’est alors qu’une nouvelle communauté cathare est érigée en Église, avec la création du diocèse du Razès, en 1226, à la tête duquel est placé Benoît de Termes. La reconstruction de l’État toulousain pendant ces années permet la réinstallation de la noblesse méridionale sur ses domaines. Cependant, la contre-offensive royale se produit en 1226 et s’achève, après de cruels affrontements, par le traité de Meaux-Paris, en 1229. Les conditions qu’il impose scellent le sort des Raimondins. Une série de clauses successorales rend inévitable la fin de la dynastie comtale. L’enfant unique de Raimond VII, Jeanne, est donnée en mariage à un frère du roi, Alphonse de Poitiers. Le traité stipule que le comté dont elle héritera reviendra à un mâle de la maison capétienne, que ce mariage ait ou non une descendance. Les domaines de Trencavel sont intégrés à la couronne. Le catharisme commence une longue agonie, car l’intégration a porté le coup de grâce à la base sociale du catharisme : la petite noblesse castrale et les élites urbaines.
- 23 Michel Roquebert, Histoire des cathares..., op. cit., p. 129-301.
- 24 Id., Les cathares..., 1998, p. 66-72.
16La lutte contre l’hérésie se renforce aussi avec les mesures ressortissant du concile de Toulouse en 1229 où sont réunis les évêques méridionaux, et se met en place l’Inquisition épiscopale, précisant les modalités de la recherche d’hérétiques dont le jugement revient à l’évêque. C’est, en 1231, à partir de Grégoire IX, que l’Inquisition devient une institution pontificale. Le pape la confie aux Frères prêcheurs, en 1233. L’organisation de la répression conduit au repli des cathares dans le castrum de montagne de Montségur, en 123223. Les conditions de vie des cathares et surtout l’observation des pratiques sacramentaires deviendront désormais très difficiles. La prédication et le consolamentum des mourants continuent d’être assurés chez des particuliers où de courts séjours s’imposent pour échapper aux Inquisiteurs24.
- 25 Le tribunal de l’Inquisition s’endurcit pour faire face aux révoltes politiques telles que celle de (...)
17L’établissement de l’Inquisition provoque des réactions. Des révoltes urbaines éclatent à Narbonne, en 1233, à Albi, en 1234, et à Toulouse, en 1235, elles sont dirigées par les oligarchies urbaines. Mais c’est à partir de 1241 que la procédure inquisitoriale se renforce25, agissant dans les régions de Castres et dans le Vaurais et le Lauragais, où sont assassinés à Avignonet les Inquisiteurs Guillaume Arnaud et Étienne de Saint-Thibéry. La réaction ne se fait pas attendre. Le castrum montagnard de Montségur sera la cible du sénéchal de Carcassonne, qui l’assaille en 1243.
La montagne au temps du repli cathare : Montségur
- 26 Gérard Pradalié, « Le pays d’Olmes et Montségur vers 1200 », dans Montségur. La mémoire et la rumeu (...)
- 27 Après la prise de Montségur, les rescapés témoignent devant l’inquisiteur Ferrer et leurs dépositio (...)
- 28 Voir Jean Duvernoy, « L’Église cathare à Montségur », op. cit., p. 46 et suiv.
- 29 Un bon aperçu d’Anne Brenon, « De Montségur à Montaillou : les cathares et les autres dans la socié (...)
18Dès le traité de Meaux-Paris, en 1229, le catharisme commence sa longue agonie. Pourtant, et depuis les événements de la croisade, un château de montagne, Montségur, va s’ériger en lieu de refuge des proscrits et des seigneurs faidits. Appartenant à la famille de Péreille, apparentée aux seigneurs de Mirepoix et de Fanjeaux, le château, construit à des fins défensives, est situé en pays d’Olmes, dans les domaines du comté de Foix. Il est restauré dans les premières années du xiiie siècle par Raimond de Pereille, seigneur de Pereille et de Montségur, à la demande des parfaits de Mirepoix et devient « village cathare » entre 1209 et 124426. Sa localisation géographique à l’intérieur des territoires du comté de Foix a pu le rendre stratégique à la suite de la création de la sénéchaussée royale à Carcassonne et de la remise des domaines de Mirepoix au croisé Gui de Lévis. C’est à l’intérieur que la hiérarchie cathare de Toulouse, celle d’Agen après la création de son évêché autour de 1229-1232, et du Razès, va trouver un refuge plus ou moins sûr27. L’évêque cathare de Toulouse, Guillabert de Castres, jouera un rôle important à Montségur28. Pendant ce temps de clandestinité, les réfugiés de Montségur assurent leur maintenance grâce à l’argent provenant de leurs églises. Les parfaits et les membres du clergé cathare y jouissent de la protection des seigneurs locaux, sans laquelle leur repli n’aurait pas pu durer aussi longtemps. Cette protection soulève la question des solidarités entre les membres des communautés cathares et leurs protecteurs. Membres pour la plupart de l’aristocratie locale et liés entre eux par des liens familiaux ou d’alliances, ils peuplent en grande partie le clergé et les parfaits29.
- 30 Cf. Jean-Louis Biget, « Hérésie, politique et société... », op. cit., p. 37-38 ; Id., « Origines et (...)
- 31 Voir l’étude détaillée de Michel Roquebert, Les cathares..., op. cit., p. 61 et suiv.
19Au sujet des solidarités, il est possible d’affirmer que, de manière générale, celles qui reliaient les individus et les familles à l’intérieur des réseaux lignagers ont été perturbées dès les années 1240 par les mécanismes policiers appliqués par l’Inquisition dans la recherche des hérétiques. La dénonciation d’un témoin devant l’Inquisition servait de preuve pour établir la culpabilité d’un individu. L’aveu constitue pour les inquisiteurs l’arme la plus puissante pour chasser les « hérétiques ». Ces menaces détruisent les solidarités, isolant les adhérents ou les protecteurs des hérétiques, toujours minoritaires, du reste de la population30. Le refuge des cathares sur Montségur et leur fin tragique avec la reddition des assiégés et la mort sur le bûcher, allumé le 16 mars 1244, d’environ deux cents personnes, met fin à une période du catharisme. Elle se solde par la désarticulation des communautés cathares, de sa hiérarchie et du réseau de solidarités constitué avec ses protecteurs. Pendant ce temps de repli montagnard, les modalités de prédication et d’entretien des pratiques sacramentaires cathares s’organisent, une partie de la hiérarchie cathare demeure à Montségur et l’autre continue de parcourir le territoire pour rester proche des fidèles31. Il serait nécessaire d’étudier plus précisément les modalités du recrutement et l’entretien des réseaux de solidarités entre les religieux cathares et leurs protecteurs pendant cette période de repli.
Les montagnes à la fin du catharisme languedocien
20Le passage du Languedoc toulousain à la monarchie capétienne se produit ensuite sans bouleversements, en 1271. Au cours du xiiie siècle, les élites qui avaient constitué le support social du mouvement dans le Midi, la chevalerie et le patriciat urbain, abandonnent progressivement la cause. La prédication des ordres mendiants apporte des réponses spirituelles adaptées (à propos de la pénitence et du salut) pour les anciens adeptes du catharisme. La répression et les transformations sociales et économiques provoquent la désertion progressive et, à terme, la disparition du catharisme.
- 32 Jean-Louis Biget, « Hérésie, société et politique... », op. cit.
21La hiérarchie cathare de Toulouse s’exile en Lombardie où elle réside dans les années 1270-1280. Les communautés languedociennes subsistantes sont dès lors dépourvues de clergé, ce qui explique le caractère résiduel du catharisme à partir du dernier tiers du xiiie siècle et ensuite. La prédication n’étant plus assurée par le clergé, les parfaits ayant pris la relève de prédicateurs itinérants assurent le consolamentum. Pour la fin du xiiie siècle et début du xive siècle, le catharisme touche entre 2 et 5 % de la population des villes (Albi, Carcassonne, Toulouse, Castres) et il puise dans les classes aisées : marchands ou juristes. Il a perdu 70 % des effectifs dans les castra de zone rurale dans le dernier tiers du xiiie siècle32.
- 33 Jean Duvernoy, « Le catharisme en Languedoc au début du xive siècle », dans L’effacement du cathari (...)
- 34 Ibid. Une déposition du registre de Jacques Fournier (vol. 1, p. 452) mentionne vers 1300 la présen (...)
- 35 Ibid., p. 36-37.
22À l’aide des derniers registres d’Inquisition, celui de Bernard de Castanet et de Nicolas d’Abbeville (1299-1300), de Geoffroy d’Ablis (1308-1309), des Sentences de Bernard Gui (1308-1322), du registre de Jacques Fournier (1318-1325) et de la Practica Inquisitionis de Bernard Gui, Jean Duvernoy a dressé une carte du catharisme au début du xive siècle. Bien qu’il affirme la baisse évidente des effectifs, l’implantation du catharisme reste localisée dans les mêmes régions qu’à l’époque précédente : Toulouse, Agenais, Quercy, Albigeois, Lauragais, Sabartès, Cabardès, Minervois et Carcassès33. Pour la même période, on est mal renseigné sur le catharisme des Pyrénées catalanes, à Berga, Josa, dans la sierra de Ciurana34. En Sabartès et dans le pays d’Alion, il semble encore présent. Il aurait disparu à cette époque en Pays d’Olmes, sauf à Lavelanet, dans les terres de Mirepoix et dans le haut Razès, sans doute à cause des poursuites systématiques conduites dans la région par Jean XXII. L’implantation semble renforcée dans la région d’Arques (Coustaussa, Cassaignes, Cubières). Dans le Cabardès et le Minervois, la noblesse des castra connus dans la période plus reculée est encore citée dans les derniers registres de l’Inquisition de Carcassonne35.
- 36 Ibid., p. 35.
23Dans le comté de Foix, certaines familles occupant des postes importants restent impliquées : ainsi le sénéchal du comte, Pierre de Châteauverdun, son sénéchal en Lauragais, Arnaud Morlane, mort consolé, son juge de Sabartès, châtelain de Tarascon, Guillaume Bayard, ses châtelains pour Mérens et Ax, les Barrra, son bayle de Montaillou, Bernard Clergue, et celui d’Ornolac. Dans la noblesse compromise dans l’hérésie, les Lordat, les Châteauverdun, ainsi que les notaires et avocats du Sabartès, tels les Autier. Les classes populaires l’étaient aussi, à Prades, Mérens, Ax, Verdun, Tarascon, Junac et Caussou : Montaillou n’était pas exceptionnel36.
- 37 Jean-Louis Biget, « Hérésie, société et politique », op. cit., p. 50 .
- 38 Céline Vilandrau, « Inquisition et “sociabilité cathare” d’après le registre de l’inquisiteur Geoff (...)
24Mais à cette période le catharisme n’est pas exclusivement cantonné aux seigneuries montagnardes, il reste présent dans les zones de plaine – dans le Lauragais, le Toulousain, les bassins de la moyenne Garonne et du Tarn, où les adeptes sont des artisans ou des paysans, les élites bourgeoises ayant déserté37. En tout, le catharisme méridional ne doit compter autour de 1300 qu’une quinzaine de parfaits. Lorsque les Autier essayent de le raviver en partant de la région du haut comté de Foix, il est déjà moribond. C’est à l’éradication de ces réduits que se consacrent l’inquisiteur de Carcassonne, Geoffroy d’Ablis, puis l’évêque de Pamiers, Jacques Fournier, futur Benoît XII en 1334. Parmi les derniers îlots de catharisme, celui de la zone montagneuse du comté de Foix, Sabartès et hautes Corbières, retient leur attention. À la question de savoir pourquoi ces régions, dont les pouvoirs politiques avaient manifesté depuis longtemps leur appui à l’hérésie, n’ont pas attiré plus tôt l’attention des inquisiteurs, il faut noter le jeu d’alliances des comtes de Foix avec le roi de France, dans le but de se protéger de l’Inquisition jusqu’en 1305. Comme le souligne Céline Vilandrau, le contexte du début du xive siècle a certainement influencé la rédaction du registre de Geoffroy d’Ablis dont les procès de 1308-1309 représentent un enjeu politique majeur. Ils témoignent du tournant de l’attitude de la royauté française en faveur de l’Inquisition38. Les pouvoirs locaux de certaines villes du Midi (Albi, Toulouse, Carcassonne, Limoux) avaient dénoncé au roi les abus commis par les inquisiteurs, provoquant une crise et des procès contre certains d’entre eux. Ce n’est qu’avec l’élection de Benoît XI et surtout de Clément V que le pape et le roi retrouvent la paix. De cette nouvelle alliance témoignent les registres de Geoffroy d’Ablis et les Sentences de Bernard Gui, mais aussi celui de Jacques Fournier dans les décennies suivantes.
- 39 L’action de l’inquisiteur Geoffroy d’Ablis ne se réduit pas uniquement à la région de la haute Ariè (...)
25En réduisant l’expression des derniers temps du catharisme à la région du haut comté de Foix d’où étaient originaires les frères Autier et leur équipe de parfaits – représentant les derniers activistes du mouvement –, les historiens paraissent avoir donné trop d’importance à la zone de montagne du Sabartès. Au point de la présenter comme le lieu de refuge par excellence de la résistance cathare. Cette vision du dernier catharisme mérite d’être plus nuancée, car à la même époque les plaines comptent des parfaits aussi dévoués et militants que les Autier. C’est le cas de la région de Verdun dans l’Aude et du Born dans la Haute-Garonne, dont les effectifs étaient comparables à ceux de Montaillou39. Dans le Lauragais, dans la région de Saint-Félix, on relève aussi les exemples d’un parfait nommé Bernard Audouy de Montégut et de ses compagnons, Pierre Raimond de Saint-Papoul et Pons de Na Richa, dont les familles respectives avaient joué, comme celles des Autier et des Auterive dans le Sabartès, un rôle important au cours de la période précédente.
- 40 Outre les trois membres de la famille Autier (Pierre, son fils Jacques et Guillaume, frère de Pierr (...)
26Il est donc réducteur d’attribuer une spécificité montagnarde au dernier catharisme. À cette période, comme on l’a signalé, le catharisme a déserté les élites castrales et il atteint des milieux plus populaires. Si la montagne est bien le lieu d’origine de la petite équipe des parfaits organisés autour des Autier, ceux-ci ne sont pas tous vraiment représentatifs de la société de montagne (ne sont-ils pas issus d’une famille de notaires du Sabartès ?)40, par ailleurs les zones sillonnées par cette équipe sont, au-delà du haut comté de Foix, le Razès et la haute vallée de l’Aude, la plaine du Lauragais, le Toulousain et, au-delà encore, le bas Quercy.
- 41 Cf. Kathrin Utz Tremp, « Montaillou n’est pas une île... », op. cit., p. 153.
27L’image d’un catharisme montagnard et populaire, prêtée au dernier catharisme, est fortement tributaire de celle qu’ont donnée les registres d’Inquisition tardifs. Ainsi, celui de Geoffroy d’Ablis s’intéresse-t-il majoritairement aux croyants du Sabartès entre 1308 et 1309 tandis que Jacques Fournier reprend l’enquête entre 1317 et 1325. Au cours des 418 interrogatoires qu’il conduit, 114 personnes sont inculpées et appartiennent à des classes très modestes, dont 92 sont originaires de la zone montagneuse du comté de Foix, lieu d’action par excellence de l’évêque inquisiteur41.
- 42 Supra note 6.
- 43 Rainier Sacconi, Summa de catharis et pauperibus de Lugduno, éd. Franjo Sanjek, Archivum Fratrum Pr (...)
28De même, et du point de vue doctrinal, le catharisme des derniers temps a été souvent identifié à celui que prêchaient les frères Autier, dont l’enseignement a été assimilé en tous points à celui de la période « classique »42. La plupart des historiens sont d’accord pour affirmer que la croyance majoritaire des cathares languedociens est centrée sur l’existence de deux principes des choses, croyance qu’ils partageaient avec les cathares italiens de Desenzano. Cette opinion s’appuie sur l’information du polémiste italien Rainier Sacconi qui élabore son traité vers 1250, date à laquelle la hiérarchie cathare languedocienne subissait déjà l’exil en Lombardie43.
- 44 À ce sujet, je me permets de renvoyer à ma thèse : L’évolution doctrinale du catharisme, xiie-xiiie(...)
29Voir s’opposer dans ces derniers temps du mouvement un « catharisme authentique » – rapporté à celui du début du xiiie siècle et qui serait encore à l’œuvre dans la prédication des Autier –, et un « catharisme populaire » – ce catharisme fruste que décrivent les croyants non instruits plusieurs années après la disparition des derniers parfaits –, ne prend pas, à mon avis, suffisamment en compte la complexité du phénomène cathare, tant dans son évolution sociopolitique que doctrinale44. Il faut rappeler que pour s’instruire dans la foi cathare et se faire ordonner, les Autier partent en Lombardie où la hiérarchie cathare languedocienne était en exil. Ce voyage explique l’influence des croyances des cathares italiens de l’école de Desenzano dans le Sabartès par le biais des Autier plutôt qu’une supposée continuité, au début du xive siècle, du catharisme de la période « classique ». La diversité des croyances cathares dont une étude attentive des derniers registres d’Inquisition témoigne pour la haute Ariège permet d’affirmer, plutôt qu’une homogénéité doctrinale du catharisme méridional, une pluralité de croyances qui, en matière de catharisme, peut être décelée dès son apparition dans des aires géographiques comme le Languedoc ou l’Italie, où le mouvement réussit à s’installer plus durablement. Les différentes tendances enseignent, du point de vue doctrinal, un catharisme radical et simplifié par les derniers parfaits pour le besoin de la cause. Cette simplification n’est pas seulement provoquée par le bas niveau de l’auditoire auquel les derniers parfaits s’adressent mais aussi par le niveau inférieur des connaissances théologiques dont disposent ces parfaits autant que par l’urgence à laquelle ils sont confrontés. Il leur faut en effet tenter de réhabiliter le flambeau d’une opposition à l’Église romaine dans un temps de très forte crise. Il n’est donc pas étonnant de trouver au premier plan des croyances, tout d’abord l’expression du traditionnel anticléricalisme catholique, avec la critique de l’Église et de sa hiérarchie qualifiée d’indigne ; la croyance dans une dualité des mondes et/ou, dans le cas des Autier, d’un dualisme des principes opposés dont l’enseignement est illustré de fables et de mythes. Loin d’être seulement montagnard, le dernier catharisme est au contraire représentatif de l’ensemble des « catharismes », c’est-à-dire des variantes évoquées plus haut et attestées dans le Languedoc depuis son implantation.
30L’expression « catharisme des montagnes », qui voit le dernier catharisme comme une spécificité montagnarde, me paraît donc difficilement soutenable, une telle spécificité supposant symétriquement celle du catharisme de plaine. Contestable aussi dans l’état actuel des recherches sur les seigneuries féodales languedociennes et sur leur comportement face au catharisme.
31Il est en revanche possible d’établir une distinction entre catharisme urbain et catharisme rural. Dans les deux cas, le catharisme pénètre principalement les milieux sociaux les plus aisés. En milieu urbain, il atteint la bourgeoisie, l’artisanat et certains membres de l’oligarchie urbaine ; en milieu rural (qu’il s’agisse de la zone de plaine ou de montagne), le catharisme s’introduit par le biais de l’aristocratie – les membres des lignages de la noblesse castrale adhérent souvent en groupe de parents. Ce recrutement social du catharisme persiste jusqu’au milieu du xiiie siècle. C’est surtout à l’occasion de la création de l’Inquisition et avec les mécanismes qu’elle déploie dans la chasse aux hérétiques que le recrutement social du catharisme connaîtra dans certaines régions des inversions. De manière générale, le catharisme semble pénétrer des couches sociales moins instruites, les couches dominantes l’abandonnent progressivement, ne restent que quelques îlots de résistance comme les familles de la noblesse proche du comté de Foix, raison qui permet, entre autres, d’expliquer l’intérêt soudain d’inquisiteurs comme Geoffroy d’Ablis et Jacques Fournier pour les territoires du haut comté de Foix.
32Par ailleurs, je ne pense pas que les montagnes en général, les Pyrénées en particulier, aient permis au catharisme de conserver des formes archaïques. Les témoignages les plus tardifs des déposants auprès de Jacques Fournier permettraient même d’affirmer le contraire. On y verrait plutôt une sorte de « laboratoire » de doctrines où les croyances sont soumises au mixage, au syncrétisme résultant de l’application du « bons sens et de la logique populaire », au souvenir des prédications et à la lecture individuelle rendant compte des dogmes (qu’ils fussent cathares et/ou catholiques) par des individus ignorants en matière de théologie. Il n’y a donc pas eu, à mon sens, un « catharisme des montagnes », mais plusieurs catharismes, en zone de montagne et ailleurs.
Notes
1 Anne Brenon, « Le catharisme des montagnes. À la recherche d’un catharisme populaire », Heresis, n° 11, 1988, p. 53-74.
2 Registre d’inquisition de Geoffroy d’Ablis (1308-1309), Annette Pales-Gobilliard (éd.), Paris, 1984 ; Le Registre d’inquisition de Jacques Fournier, évêque de Pamiers (1318-1325), Jean Duvernoy (éd.), Toulouse, 1965, 3 vol. ; trad. lu., Paris-La Haye-New York, 1978, 3 vol. (Je le cite ci-dessous par RJF).
3 Emmanuel Le Roy Ladurie, Montaillou, village occitan de 1294 à 1324, Paris, 1975, 1982.
4 L’ouvrage d’Emmanuel Le Roy Ladurie a été critiqué à l’étranger, voir : Mathias Benad, Domus und Religion in Montaillou, Tübingen-Mohr, 1990 (Spätmittelalter und Reformation, Neue Reihe, 1) ; Kathrin Utz Tremp, « Montaillou n’est pas une île : les derniers cathares, Pierre Clergue et Pierre Maury, devant leur juge », Études de lettres, Revue de la faculté des lettres, Université de Lausanne, 1992/4, p. 143-167.
5 Anne Brenon, « Le catharisme des montagnes... », op. cit., p. 53.
6 Ibid., p. 72-74 et Ead., « Mort et effacement du catharisme. Les archives perdues de l’Inquisition de Carcassonne, xixe-xve siècle », Archipels cathares, 2000, p. 273.
7 Supra note 2.
8 Anne Brenon, « Le catharisme des montagnes... », op. cit., p. 63 et supra note 6.
9 Dans le Midi, certains domaines restent peu réceptifs à l’implantation du catharisme comme le Narbonnais et le Biterrois, ainsi que la seigneurie de Montpellier. Je renvoie aux travaux suivants : Claudie Amado, « Faible impact de l’hérésie dans le Languedoc central méditerranéen. Le paradoxe biterrois (1170-1209) », et celui de Monique Bourin, « Tensions sociales et diffusion du catharisme en Languedoc oriental au xiiie siècle », dans Europe et Occitanie. Les Pays cathares, 1992, p. 83-104 et 105-130, et Monique Zerner, « Questions sur la naissance de “l’affaire albigeoise” », dans Georges Duby. L’écriture de l’histoire, 1996, p. 427-444 ; une étude générale par Jean-Louis Biget, « Hérésie, politique et société en Languedoc (v. 1120-v. 1320) », dans Les Pays cathares, Jacques Berlioz (dir.), Paris, 2000.
10 La Chronique de Guillaume de Puylaurens pour la période d’avant la croisade et la période suivante, outre les premiers registres d’Inquisition, la Chronique de Guillaume de Pelhisson est fondamentale, Élie Griffe, L’aventure cathare (1140-1190), 1, Paris, 1968 ; 4 : Le Languedoc cathare et l’Inquisition, Paris, 1980.
11 Parmi ces premiers documents d’Inquisition, mentionnons le ms. 609 de la Bibl. mun. de Toulouse et les volumes 21 au 24 du fonds Doat.
12 Sa sœur, Esclarmonde de Foix, et trois autres dames de la région, reçoivent le consolamentum en 1204 à Fanjeaux. Esclarmonde ouvre ensuite une « maison cathare » à Pamiers. L’épouse du comte de Foix, Philippa, fait de même au village de Dun où elle vit, vers 1206, dans une maison avec d’autres parfaites : Élie Griffe, L’aventure cathare, op. cit. p. 159 ; Michel Roquebert, Histoire des Cathares. Hérésie, Croisade, Inquisition du xie au xive siècle, 1999, p. 73.
13 Claudie Amado, « L’entourage des Trencavel au xiie siècle », dans Les voies de l’hérésie. Le groupe aristocratique en Languedoc, xie-xiiie siècles, 2001, vol. 1, p. 31 et 42-43.
14 Marie-Élise Gardel, « La seigneurie de Cabaret d’après les sources écrites », dans Les voies de l’hérésie, op. cit., vol. 2, p. 37-53.
15 Claudie Amado, l’aristocratie languedocienne du xe au xiie siècle, vol. 1 : Genèse des lignages méridionaux, Toulouse, 2001, p. 213 ; Id., « L’entourage des Trencavel », op. cit., p. 34 ; Jean-Louis Biget, « Cathares des pays de l’Agout (1200-1300) », dans Europe et Occitanie. Les Pays cathares, p. 283 et suiv.
16 Jean-Loup Abbé, « Au cœur de la Montagne Noire et de l’hérésie : les seigneurs d’Aragon », dans Les voies de l’hérésie, op. cit., vol. 2, p. 55-87.
17 Gauthier Langlois, « Olivier de Termes et son entourage, de la Croisade albigeoise aux croisades en Terre Sainte », ibid., p. 215.
18 Jean Duvernoy, L’Histoire des cathares, vol. 1, p. 156 ; Claudine Pailhès, « Le jeu politique en comté de Foix pendant et après la croisade contre les Albigeois et ses conséquences à long terme », Société Ariégeoise, Sciences, Lettres et Arts, 1992, p. 113-158 ; Ead., « Le groupe aristocratique en comté de Foix, xie-xiiie siècles », dans Les voies de l’hérésie, op. cit., vol. 1, p. 121-177 ; Annie Cazenave, « Les cathares en Catalogne et Sabartès, d’après les registres d’Inquisition. La hiérarchie cathare en Sabartès après Montségur », Bulletin philologique et historique, 1969, vol. I, p. 387-436, Paris, 1972.
19 Claudie Amado, « L’entourage des Trencavel au xiie siècle », op. cit.
20 Ibid.
21 Ead., Genèse des lignages méridionaux, op. cit., p. 217.
22 Jean-Louis Biget, « Hérésie, politique et société en Languedoc... », op. cit., p. 28 et suiv.
23 Michel Roquebert, Histoire des cathares..., op. cit., p. 129-301.
24 Id., Les cathares..., 1998, p. 66-72.
25 Le tribunal de l’Inquisition s’endurcit pour faire face aux révoltes politiques telles que celle de Raimond Trencavel qui, en 1240, avec l’aide des seigneurs méridionaux (faidits), met le siège à Carcassonne mais il échoue et doit se réfugier en Catalogne. De son côté, Raimond VII s’allie en 1240 contre le roi de France, Louis VIII. À ses côtés, le comte de Foix et Trencavel, parmi d’autres (J.-L. Biget, « Hérésie, politique et société... », op. cit., p. 35-38).
26 Gérard Pradalié, « Le pays d’Olmes et Montségur vers 1200 », dans Montségur. La mémoire et la rumeur, 1244-1994, s. d., Claudine Pailhès (éd.), Association des amis des archives de l’Ariège, 1995, p. 35-40.
27 Après la prise de Montségur, les rescapés témoignent devant l’inquisiteur Ferrer et leurs dépositions permettent de reconstituer, à l’aide d’autres témoignages recueillis par les successeurs de Ferrer, quelques étapes de l’histoire de ce lieu de refuge : Jean Duvernoy, « L’Église cathare à Montségur », dans Montségur. La Mémoire et la Rumeur, op. cit., p. 43 et suiv. Sur l’ensemble des témoignages recueillis par l’inquisiteur Ferrer : Le dossier de Montségur, éd. et trad. Jean Duvernoy, 1998.
28 Voir Jean Duvernoy, « L’Église cathare à Montségur », op. cit., p. 46 et suiv.
29 Un bon aperçu d’Anne Brenon, « De Montségur à Montaillou : les cathares et les autres dans la société pyrénéenne (xiie-xive siècles), dans Tolérance et solidarités dans les Pays Pyrénéens, 1999, p. 123-140.
30 Cf. Jean-Louis Biget, « Hérésie, politique et société... », op. cit., p. 37-38 ; Id., « Origines et développements de l’Inquisition en Languedoc... », op. cit.
31 Voir l’étude détaillée de Michel Roquebert, Les cathares..., op. cit., p. 61 et suiv.
32 Jean-Louis Biget, « Hérésie, société et politique... », op. cit.
33 Jean Duvernoy, « Le catharisme en Languedoc au début du xive siècle », dans L’effacement du catharisme, Cahiers de Fanjeaux, 20, 1985, p. 27-56.
34 Ibid. Une déposition du registre de Jacques Fournier (vol. 1, p. 452) mentionne vers 1300 la présence d’un parfait, Pierre de Berga, en haute Ariège avec un Bernard de Foix.
35 Ibid., p. 36-37.
36 Ibid., p. 35.
37 Jean-Louis Biget, « Hérésie, société et politique », op. cit., p. 50 .
38 Céline Vilandrau, « Inquisition et “sociabilité cathare” d’après le registre de l’inquisiteur Geoffroy d’Ablis », Heresis, n° 34, 2001, p. 5. Les croyants inculpés en 1308-1309 sont tous originaires des terres du comte de Foix, dont l’orthodoxie paraît douteuse. Les poursuites de l’Inquisition dans le Sabartès commencent à la même période, coïncidant avec la nouvelle alliance entre le roi et l’Inquisition. L’auteur se demande si l’Inquisition n’aurait pas cherché à profiter de circonstances favorables pour éloigner le roi de son allié le comte de Foix en faisant jouer l’argument de la recrudescence de l’hérésie cathare dans le comté.
39 L’action de l’inquisiteur Geoffroy d’Ablis ne se réduit pas uniquement à la région de la haute Ariège. Il avait aussi fait arrêter tous les habitants de Verdun-Lauragais à la même époque que ceux de Montaillou : Jean Duvernoy, « L’effacement... », op. cit., p. 31.
40 Outre les trois membres de la famille Autier (Pierre, son fils Jacques et Guillaume, frère de Pierre), parmi les parfaits de cette équipe se trouvent Prades Tavernier, Amiel de Perles, Philippe d’Alayrac, Pierre Sans et Guillaume Bélibaste.
41 Cf. Kathrin Utz Tremp, « Montaillou n’est pas une île... », op. cit., p. 153.
42 Supra note 6.
43 Rainier Sacconi, Summa de catharis et pauperibus de Lugduno, éd. Franjo Sanjek, Archivum Fratrum Praedicatorum, vol. XLIV, 1974, p. 42-60, ici p. 59.
44 À ce sujet, je me permets de renvoyer à ma thèse : L’évolution doctrinale du catharisme, xiie-xiiie siècle, Université de Toulouse-Le Mirail, 2000, 3 vol., ici vol. 2, chap. 7 et vol. annexes, tableau 4, édition en cours.
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