Chapitre I. Un capital de relations
p. 19-38
Texte intégral
1Alors que son père lui proposait de reprendre sa charge de maire ou d’occuper celle de greffier, Guyenot révélait sa véritable ambition : « Ny l’une ny l’autre ne me tente. Je veux quelque chose de mieux et de plus solide1. » Il deviendra tour à tour commis de la monarchie, maître de forges et concessionnaire de canal. Guyenot doit sa réussite à ses qualités personnelles et à un subtil jeu d’influences et de protection, dans une société qui accordait une place considérable aux relations professionnelles, aux liens d’intérêt ou aux amitiés diverses. Il s’agit donc de délimiter la « surface sociale » de Guyenot, en prenant en compte la pluralité des individus qu’il a successivement ou simultanément agrégés autour de sa personne dans une configuration originale parce qu’elle lui est propre. L’ascension sociale de Guyenot fut en grande partie déterminée par la position qu’il occupa dans l’espace social et favorisée par la nature des liens qu’il sut y tisser. À travers sa correspondance, il est possible de cerner les contours des réseaux d’amitié et de pouvoir que Guyenot a constitués, entretenus et mobilisés le cas échéant, même si leur configuration a évolué au cours de sa vie. Ces différents cercles se placent dans des aires géographiques et des milieux sociaux divers. Loin d’être strictement étanches les unes aux autres, les différentes composantes de sa sociabilité s’entrecroisent et se chevauchent parfois. Relations bureaucratiques, patronages nobiliaires et affinités maçonniques ne sont pas des catégories définies a priori ; elles se sont imposées à travers les liens tissés par Guyenot.
Les connexions bureaucratiques
2Limités dans les premières années de sa vie à des liens de parenté et à une commune origine géographique, ses réseaux vont par la suite s’élargir et se diversifier. L’administration, de la gestion des affaires privées au service de l’Etat, apparaît comme un cadre et un heu particulièrement propices à la construction de liens interpersonnels.
3Alors que les liens de parenté constituent très souvent un solide support aux ascensions sociales, dans le cas de Guyenot sa famille n’a que faiblement servi sa promotion individuelle. Né le 21 mai 1745 à Orchamps-la-Dôle (dépt Jura), dans une famille de petits officiers (son père Jean-Baptiste Guyenot fut maire de la prévôté d’Orchamps et de La Barre de 1734 à 1771), il devint, à l’âge de treize ans, l’aide de camp de M. Garnier, capitaine de cavalerie au régiment d’Harcourt et fils d’une cousine paternelle. Alors que la France était engagée dans la guerre dite de Sept Ans, il fut chargé de conduire une cinquantaine de recrues de Dole au Hanovre, dont la conquête avait été confiée au maréchal d’Estrée, pour y rejoindre un détachement français. Après les défaites de Krefeld (1758), Guyenot, comme chargé du détail et avec le grade de sous-lieutenant, rallia Abbeville avec les survivants, avant de gagner Fontenoy-le-Comte2. Tenté un temps par la carrière militaire, il y renonça finalement, les réformes engagées par le secrétaire d’État à la Guerre, le duc de Choiseul le privant de perspectives intéressantes. Après la ruine de son père, lors du cantonnement de troupes à Orchamps en 1759-1760, le jeune Guyenot fut placé chez les jésuites par les soins du père Chaillot, le grand-oncle de sa mère, et y resta jusqu’à la suppression du collège de Dole en 1763. Pendant des années, il conserva une certaine amertume de cette fermeture qui l’avait privé selon lui d’une instruction suffisante. Placé alors comme clerc chez le procureur Devillers à Dole, il y acquit quelques rudiments de droit. En 1768, il quitta l’Anjou, où il travaillait comme feudiste depuis 1765, pour Paris où l’on s’était engagé à le placer dans une administration. Malheureusement pour lui, la disgrâce du duc de Choiseul et l’affaiblissement de sa coterie brisèrent net ses espoirs. C’est finalement pour le compte de Marie-Charles-Louis d’Albert, duc de Luynes et de Chevreuse, alors gouverneur de la ville, de la prévôté et de la vicomté de Paris, qu’il travailla d’abord comme secrétaire archiviste puis, à partir de janvier 1770, comme feudiste à la rénovation du terrier de la châtellenie de Coulommiers (dépt Seine-et-Marne) et du comté de Dunois mouvants du duché de Luynes3.
4Formé sur le tas aux arcanes du droit féodal, Guyenot demeura plusieurs années dans cette spécialité. Gradué ès lois à l’issue de sommaires études de droit à l’université de Valence, il joua de la confusion entre les titres d’avocat au Parlement et d’avocat en Parlement4, pour s’honorer du supplément de prestige attaché au premier. Or, pour se prévaloir du titre d’avocat, il fallait non seulement être licencié en droit d’une université du royaume, mais aussi s’engager par serment à respecter les décisions royales et les règlements de justice. Guyenot n’a sans doute jamais rempli cette seconde condition, ni reçu la matricule attestant de son inscription sur les registres du Parlement. Il ne semble pas non plus qu’il ait effectué le stage de deux ans en général requis pour exercer la profession d’avocat5. La plus grande incertitude demeure donc sur les conditions de son admission dans l’ordre des avocats. C’est sans doute grâce à la complaisance de ses relations qu’il put se prévaloir de ce titre. Dans les années 1776-1777, Guyenot s’était en effet chargé de défendre les intérêts de Claude-François Brochard, professeur de droit à l’université de Valence, condamné par le tribunal de la conservation de Lyon à une amende de 450 Lt, pour s’être porté caution de deux débiteurs coupables d’atermoiement. Guyenot obtint une ordonnance du parlement de Grenoble favorable à son client, ce qui lui valut de se voir confier la procédure d’un second procès opposant Brochard à un certain M. Gand6. Le fait de résider en 1780 rue Saint-Benoît, au cœur du quartier de prédilection des avocats au parlement de Paris, situé rive gauche à proximité de la Cité, ne fit qu’entretenir cette mystification professionnelle. Sa bibliothèque témoigne toutefois de solides références juridiques, où les recueils de droit féodal côtoient des ouvrages juridiques plus généraux7.
5Ces avocats constituent, semble-t-il, un puissant réseau aux ramifications étendues. On retrouvera plusieurs avocats au parlement – Jean-Joseph Giraudy et Louis-Antoine Béaunier – associés aux régies de péages que Guyenot rassembla dans les dernières décennies de l’Ancien Régime8. Certains, comme Pierre-Antoine Clérembourg et François-Valentin de Jouy, œuvrèrent avec lui à la création d’une nitrière artificielle dans la périphérie de la capitale9. Guyenot prêta par ailleurs, sous couvert d’un prête-nom, 54 000 Lt à Pierre-Germain Parisan, avocat au Parlement et directeur du spectacle des élèves de l’Opéra ; cette somme était destinée à couvrir la dépense des travaux de charpente réalisés par Laurent-Olivier Lepreux pour la salle des élèves de l’Opéra10. Un autre avocat au Parlement, Jean-Louis Magny de Maisonneuve, lui prêta une partie des fonds nécessaires à l’achat de la terre de Châteaubourg. Pierre-Gilles de Chaulaire s’occupera après la Révolution de ses affaires financières et contentieuses11.
6Les compétences que Guyenot acquit en matière de droit féodal lui valurent de glisser vers la carrière administrative. C’est sans doute sur la recommandation de la marquise de Saint-Jean12 qu’il entra en décembre 1772 à la commission des péages (une commission extraordinaire du Conseil, chargée depuis 1724 de vérifier les titres de propriété et de réformer les tarifs avant de s’engager dans une politique de suppression radicale) et en devint le premier commis l’année suivante avec un traitement annuel de 2 000 Lt. C’est lui qui devait superviser le travail des employés subalternes et s’occuper de la gestion quotidienne du bureau. Très vite, il se rendit indispensable au procureur général, Doublet de Persan, qui lui confia des tâches et des responsabilités dépassant le cadre normal de sa fonction13. Par ailleurs, il s’honorait à la fin de sa vie d’« avoir eu la confiance absolue du ministre M. l’abbé Terray, pour des opérations entre lui et le souverain, qui intéressoit Sa Majesté et l’honneur du ministre, ce qui, dès lors, le valut beaucoup14 ». Ses papiers personnels ne laissent cependant rien entrevoir de ce rôle officieux.
7La mobilité géographique de Guyenot, couronnée par son installation dans la capitale à partir de 1766, contribua assurément à asseoir sa position sociale. Il y restera presque sans discontinuer jusqu’à sa mort en 1824. Dans les notes autobiographiques qu’il a laissées, on réalise ce que peut signifier la montée à Paris pour un jeune provincial sans grande instruction et sans fortune : « Ce jeune homme n’étoit pas content de son caractère d’écriture ; il vint à Paris pour s’y former la main15. » Il fait partie de ces jeunes nouveaux Parisiens étudiés par Daniel Roche, « attirés par la même fascination de la ville, l’espoir d’un travail assuré et l’ascension sociale que permet la compétition des talents urbains16 ». Paris, « ville promise », nourrit indéniablement un tropisme pour les ambitieux en quête d’identité sociale ; plus que toute autre ville, elle offre aux talents une pluralité d’expériences possibles. La réalité de l’itinéraire individuel de Guyenot rejoint ainsi le cliché littéraire, qui se développe précisément au xviiie siècle, de la montée à Paris comme moyen et marque d’ascension sociale. Siège des institutions centrales et capitale économique, Paris offre en effet à cette époque de multiples opportunités de carrière et de spéculation. L’économie d’agglomération y attirait des flux de capitaux, y suscitait des transferts d’informations et y stimulait les secteurs de l’innovation ; c’est à Paris également que se négociait le crédit et que résidait une population riche disposant de moyens financiers à investir.
Des patronages prestigieux
8Dans les premières années de son séjour parisien, Guyenot sut gagner la confiance de plusieurs grands noms de la noblesse. Dans les courriers qui lui sont adressés, il est qualifié indistinctement de « féodiste », de « chargé des affaires », d’« intendant des finances », d’« intendant de maison17 » ou de « maître d’hôtel18 ». En devenant l’agent d’affaires ou le conseiller juridique pour le compte de plusieurs aristocrates de la capitale, il agrégea autour de sa personne des patronages prestigieux qui constituèrent autant de recommandations pour étendre son réseau de mandataires.
9Tout en se flattant d’avoir « fait son état lui-même », il s’estimait redevable des protections diverses dont il avait pu jouir : la baronne de Saint-Germain (belle-mère du comte de Saint-Germain), propriétaire de la terre d’Orchamps, qui « [lui] donna pendant [son] enfance les premiers éléments d’éducation, qui [lui] donna des livres pour apprendre à lire et qui [lui] indiqua la manière de [se] comporter honnêtement19 ». C’est également par l’entremise de la marquise Brun de Préaux qu’il fit solliciter une pension pour son père auprès du comte de Saint-Germain, secrétaire d’État à la Guerre20.
10Ce sont assurément ses compétences juridiques qui valurent à Guyenot de devenir l’homme d’affaires de plusieurs aristocrates. Il n’est pas question d’étudier ici dans le détail le fonds des litiges que Guyenot fut amené à traiter dans le cadre de ce patronage nobiliaire, mais de comprendre dans quelle mesure son intervention dans la gestion des affaires ou dans les procédures judiciaires de ses clients lui ouvrit des possibilités d’ascension sociale et de crédit. Au même titre que sa connaissance du droit, c’est sa pratique des institutions monarchiques qui lui valut la confiance de ses commettants. Il leur fallait en effet s’adjoindre les services d’intermédiaires spécialisés, disposant à la fois de compétences juridiques et de l’expérience des tribunaux, pour suivre les procédures en cours et utiliser habilement les arcanes du droit. Ces mandataires étaient d’autant plus précieux qu’ils disposaient, outre ce savoir qui le plus souvent faisait défaut à leurs mandants, d’un réseau informel de relations au sein ou en marge des institutions judiciaires. Le succès d’un procès dépendait ainsi de la capacité de ces intermédiaires à mettre à profit la complexité des procédures, mais aussi à s’appuyer sur des relations susceptibles de les renseigner sur le cours des affaires ou, le cas échéant, d’intervenir dans ses différentes phases.
11C’est également pour ses qualités de juriste que Guyenot fut sollicité pour gérer la fortune de plusieurs de ses mandataires. Non seulement il touchait les arrérages des rentes et avait le pouvoir de négocier celles-ci au meilleur prix, mais il était encore tenu d’assister aux assemblées des créanciers où ses commettants avaient des intérêts, et plus généralement de s’occuper des procédures judiciaires en cas de défaut ou refus de paiement. À l’occasion, il lui arriva de consentir des prêts – au marquis de Panisse notamment –, grâce à l’argent qu’il gérait pour les comptes d’autres clients. En outre, Guyenot servit de prête-nom pour une noblesse qui investissait de plus en plus dans toutes sortes d’entreprises lucratives au cours du xviiie siècle.
12Avec ses différents mandataires, Guyenot entretenait une correspondance abondante et régulière. Celle-ci nous renseigne non seulement sur la construction de ses relations, mais aussi sur les règles qui les structuraient et le degré de confiance qui les sous-tendait. La fonction qu’occupait Guyenot au service de plusieurs grands noms de la noblesse avait nécessairement une incidence sur la forme de ses relations avec ses commettants. Celles-ci faisaient l’objet d’une codification qui encadrait les conduites attendues et dictait le ton approprié21.
13Dès novembre 1774, il travailla comme secrétaire de Marie-Catherine-Ferdinande de Maugiron, vicomtesse de Rouault. Il s’engagea alors à contracter pour elle un emprunt obligatoire à concurrence de 20000 Lt22. Dans une procuration de mai 1776, elle lui donna « de nouveau pouvoir pour elle et en son nom de régir et administrer tous les biens et affaires, recevoir tous les loyers et fermages, arrérages de rentes », etc. Il resta son fondé de pouvoir après le remariage de celle-ci en avril 1779 avec le comte Adolphe-Chrétien-Louis de Bosé, commandant du régiment Chamborand-Hussards et chambellan de l’Électeur de Saxe. C’est sans doute par l’entremise de Pierre Guerrier de Bezance, procureur de la commission des péages, ou d’un parent, chirurgien de madame de Rouault, que Guyenot entra au service de celle-ci après le remerciement de l’intendant précédent, un certain M. Ortion. Il eut notamment à s’occuper de la succession du père de la vicomtesse, décédé en 176723, du partage des biens avec sa sœur la marquise de Veynes et de la gestion des terres de La Marette (com. Gluiras, dépt Ardèche) et de Beauvoir-de-Marc (dépt Isère)24. Parallèlement, Guyenot s’occupait d’administrer leur fortune25 et de leur assurer des liquidités lors de leurs divers déplacements en province. Dans le même temps, sa femme, Catherine Guillaume, la fille d’un laboureur champenois de la Grange-aux-Bois (dépt Aisne), qu’il avait épousée en janvier 1769 sans dot et sans contrat de mariage, était employée au service de la comtesse26. En 1784, le comte de Bosé chargea Guyenot de trouver l’arrangement juridique le plus favorable pour recouvrer des sommes qui lui étaient dues en faisant l’économie d’un procès27. C’est d’ailleurs sans doute par l’entremise de celui-ci que Guyenot devint en 1780 l’agent en France de l’Électrice de Saxe28 et put ainsi prendre part à la société formée par le baron Charles de Beust, chambellan de l’Électeur de Saxe, pour exploiter des mines de cobalt dans les Pyrénées et fabriquer des colorants bleus29. De même, il conseilla ponctuellement la marquise de Sassenage, apparentée à la comtesse de Bosé, dans diverses procédures30.
14Sa correspondance nous renseigne peu, cependant, sur les recommandations qui lui valurent la confiance d’autres maisons. Gabrielle-Adélaïde Mignard de Villemore, baronne de Grainteville, lui confia la gestion de ses affaires de janvier 1777 à juin 177831. En septembre 1777, alors qu’elle était gravement malade, Anne-Madelaine Humery de La Mairie, marquise de Châteauneuf, le chargea, sur la recommandation d’un certain Alphonse Le Roy, docteur en médecine, d’assainir sa situation financière32. C’est après des sollicitations répétées et la promesse d’honoraires substantiels (1 500 Lt par an) que Guyenot accepta finalement de transiger avec les créanciers de la marquise et de poursuivre ses débiteurs. À sa mort, son mari, Élie-Joseph de Miomande, marquis de Châteauneuf, lui confia le soin de gérer la succession. Guyenot, avec qui il resta en relation d’affaires, fut ainsi présent à l’assemblée des créanciers convoquée le 24 février 1780 à la demande de M. de Préau, trésorier de France au bureau des finances d’Alençon et gendre de la défunte33, comme « fondé de la procuration générale et spéciale à l’effet des présentes de haut & puissant seigneur Élie-Joseph de Miomandre, marquis de Châteauneuf34 ». L’essentiel de sa tâche consista à classer les pièces à déposer pour le compte de tutelle et à s’occuper du recouvrement de sommes dues par plusieurs créanciers35. Par délibération du 5 avril 1785, Guyenot fut par ailleurs nommé syndic dans la direction36 de Châteauneuf, en remplacement de M. Laulaigne37.
15On le retrouve encore au service d’Antoine-Joseph-Philippe de Walsh, comte de Serrant, le beau-frère du marquis de Choiseul38, pour assurer l’intendance de l’hôtel de la rue du Regard et administrer ses finances39. Avant son mariage, madame Guyenot avait semble-t-il été au service de la comtesse de Serrant40. Guyenot gérait par ailleurs les fonds nécessaires aux opérations de recrutement de soldats pour le régiment de Walsh41. Il était chargé de verser au sergent Laterre les sommes utiles aux opérations de recrutement de soldats du régiment de Walsh et de vérifier les comptes. Chaque semaine, il rendait compte de sa gestion à M. O’Connor, le capitaine chargé du détail du régiment Walsh42. En 1778, il s’associa à Jean-François Pilâtre de Rozier pour la fourniture d’ustensiles de cuisine et de toiles de tentes aux régiments de Bassigny et Walsh. Pour honorer une commande importante, Pilâtre de Rozier sollicita des fonds auprès de Guyenot ; il l’associa pour moitié à son affaire, en échange d’une avance de 4200 Lt. Guyenot, s’estimant doublé par son associé qui aurait demandé à être payé par les deux régiments sans l’en informer, exigea le remboursement de ses avances ainsi que la moitié des bénéfices qui lui revenaient (3000 Lt)43. Il semble surtout qu’il ait voulu se délier d’un associé qui n’avait pas donné entière satisfaction : non seulement des retards d’acheminement avaient été constatés, mais certains effets commandés n’avaient pas été livrés. Guyenot sut conserver la confiance de la famille Walsh, puisque en 1785 il devenait le fondé de procuration de Charles-Joseph-Augustin de Walsh, vicomte de Serrant, qui commandait le régiment de Dillon44.
16Attaché à la famille de Lordat depuis plusieurs années45, il exerça également les fonctions de tuteur de Marguerite-Louise-Marie-Charlotte-Joséphine, comtesse de Lordat. C’est une sentence du Châtelet en date du 19 mars 1779 qui lui confia cette tâche après le décès du comte Marie-Paul-Jacques de Lordat, victime de la petite vérole, alors que son épouse était enceinte. À la mort de celle-ci, survenue le 30 septembre 1787, la tutelle échut à M. Biothière Chassincourt de Tilly, le grand-père maternel de la jeune comtesse. Après avoir rendu ses comptes en avril 1788, Guyenot continua cependant à administrer la fortune de sa pupille jusqu’en 1794, date à laquelle elle fut émancipée avant ses seize ans pour épouser M. Bourbon-Busset : il contrôlait la gestion de ses terres en Languedoc (baronnie du Puy-Saint-Pierre, Villesplas et La Bastide ; seigneurie de Saint-Martin-le-Viel, Montconil, Carlipac...), en Berry (baronnie de Lignières) et en Normandie (baronnie de la Luthumière)46. Il supervisa encore l’aménagement de l’hôtel de la rue Saint-Dominique, encaissait les loyers des appartements ou des boutiques et veillait à l’intendance domestique. Plus généralement, il s’occupait des affaires financières de sa pupille et de quelques proches de celle-ci47. Il touchait pour cette tâche un appointement de 600 Lt, qui passa en 1787 à 3 000 Lt48. Il se chargea également de régler la succession de la comtesse de Lordat, la grand-mère de sa protégée, et de sa sœur, la comtesse de Jonsac, décédées toutes les deux dans le courant de l’année 178649.
17À travers sa correspondance, il est parfois possible de suivre les connexions qui ont permis à Guyenot de renforcer son introduction auprès de la noblesse parisienne. C’est sur la recommandation des Lordat que Guyenot entra au service de l’abbé Louis-Aimé de Bourbon50. À compter de décembre 1778, il s’employa à remettre de l’ordre dans ses comptes et ceux de sa mère, la marquise de Cavanac51. Parallèlement au classement des titres de l’abbaye royale de Signy (dépt Ardennes) et notamment des jugements de la gruerie, il suivit, comme intendant de l’abbé de Bourbon, les opérations de martelage dans les bois que ce dernier possédait à Lavergny. Fondé de procuration d’Henry Tripoly de Marck, marquis de Panisse, qui louait une maison appartenant à la comtesse de Bosé rue de Bagneux à Paris, il lui procura des fonds52, notamment pour l’établissement d’une nitrière artificielle à Paris53. Les circonstances qui le mirent en contact avec Louis-Henri Cornet, baron d’Écrammeville, paraissent en revanche plus obscures. Les deux hommes ont peut-être noué des relations de voisinage. Le baron louait en effet un appartement rue Saint-Benoît où résidait alors Guyenot54. Il n’en reste pas moins que ce dernier mit en forme plusieurs actes de procédure et de commerce pour le compte du baron. En 1777, Guyenot défendit notamment ses intérêts dans un procès qui l’opposait à la communauté d’Écrammeville à propos de la propriété de marais et de prés55. Le fait qu’il partageât le même notaire avec plusieurs de ses commettants a du également profiter à ses affaires.
18Si dans certains cas il a été possible de reconstituer les connexions et les recommandations qui ont présidé à la constitution de certains liens, il est difficile de savoir comment il fut amené à s’occuper de la succession de Noël-Jean Texier, décédé alors qu’il naviguait pour le compte de la Compagnie des Indes hollandaises56. Il représenta par ailleurs les intérêts d’un certain chevalier de Cullon de Clerfond pour lequel il obtint la levée d’une sentence rendue par une juridiction de Châteauroux57. Le marquis de Saint-Aignan autorisa également Guyenot à emprunter pour lui une somme allant jusqu’à 30 000 Lt58. Lun des créanciers du marquis, Pierre Jolly, avait en outre confié à Guyenot le soin de percevoir les arrérages de ses rentes ; il continuera à les verser à sa veuve jusqu’en 180759. Il figure encore parmi les créanciers du marquis de Fulvy, dont il gérait les finances60 ; c’est peut-être comme régisseur des péages du duc d’Orléans qu’il fut amené à rencontrer le gouverneur de Belleville. On le retrouve en affaires avec le chevalier de Gourville61, et avec le chevalier André Bardoulx de Forceville, auquel il prêta une somme de 1 200 Lt62. Guyenot percevait encore les arrérages des rentes viagères dues à Laurence-Marie-Josephe-Françoise-Xavier Samson, comtesse de Villebriant63.
19Guyenot sut par ailleurs mettre à profit sa position au sein de la commission des péages, pour étendre encore son capital social et se concilier la faveur de plusieurs propriétaires richement dotés en droits64. Il comprit qu’il y avait dans la politique de suppression et de liquidation, engagée par la commission depuis 1779, une occasion de s’imposer comme un médiateur obligé entre l’État et les propriétaires sommés de justifier la légitimité de leurs droits. Ces propriétaires, qui comptaient parmi les noms les plus illustres du royaume – le prince de Condé, les ducs de Villeroy, de Praslin, d’Orléans et de Croÿ, le marquis de Guerchy, etc. –, pouvaient compter sur l’appui indéfectible de Guyenot à la commission pour veiller au sort de leurs droits. À l’occasion, il rendit également « quelques services » au prince de Monaco, duc de Valentinois65.
20Ces multiples liens de dépendance et d’obligation inscrivent Guyenot au cœur de la société du privilège. Il fréquentait ainsi le bal de M. de Seine, secrétaire de la chancellerie du duc d’Orléans. Sa fille Émilie-Barbe-Bonaventure, née en août 1770, eut pour marraine la comtesse de Saint-Jean, intimement liée à la duchesse de Chevreuse. Parmi les personnes présentes lors du mariage de sa fille en 1788, figurent notamment l’évêque de Nancy A.-L.-H. de La Fare, le marquis de Saint-Vallier, le comte de La Touche (chancelier du duc d’Orléans), le duc de La Rochefoucault-La Roche-Guyon, Louis-Joseph, comte d’Ailly (maréchal des camps et armées du roi qui sous-louait son appartement de la rue Taranne à Guyenot) et le marquis Anne-Nicolas Doublet de Persan (procureur général de la commission des péages). Il est vrai que sa fille, richement dotée avec une rente annuelle de 5 000 Lt et une somme de 100 000 Lt à la mort d’un de ses deux parents, constituait un assez beau parti66. Celle-ci bénéficia encore par réversion de la majeure partie (500 Lt) d’une rente viagère constituée par Henri-Louis-Marie de Rohan, prince de Guéménée, à un certain François Laprun67.
21Des fréquentations aussi prestigieuses ont indéniablement pesé sur le comportement de Guyenot. Au cœur d’une société d’Ancien Régime figée dans la hiérarchie de ses ordres, la noblesse constitue assurément pour lui la référence axiologique de l’estime sociale et de l’honneur individuel. C’est ainsi qu’il investit dans l’acquisition d’une terre seigneuriale : en 1778, à l’issue de la discussion des biens de Jean André68, il acheta un quart de la terre de Châteaubourg (dépt Ardèche)69, dont il partageait la propriété avec la vicomtesse de Rouault. C’est Nicolas Brenier, originaire d’Orchamps et marchand épicier à Paris, avec lequel il était en affaire pour une manufacture de savon, qui lui prêta une partie de la somme nécessaire à cette acquisition70. En 1782, Guyenot racheta à la vicomtesse devenue comtesse de Bosé, pour 12000 Lt, les trois quarts qu’elle possédait dans la terre de Châteaubourg71. Il réunit cette somme grâce à deux obligations : la première, d’un montant de 8000 Lt, contractée auprès de Jean-Louis Magny de Maisonneuve, avocat au Parlement72, fut complété par une autre créance de 4 000 Lt envers Jacques Masson, étudiant en droit et secrétaire de Guyenot73 ; seuls les trois quarts du péage par eau n’étaient pas compris dans cette vente. Les époux Bosé s’étaient toutefois engagés à lui reverser ces 12000 Lt si Guyenot parvenait à les rétablir dans la propriété de la seigneurie d’Ampuis74. Il dut s’acquitter des frais d’hommage auprès de la Chambre des comptes de Montpellier75, ainsi que des droits de lods et vente76. En 1786, un arrêt du parlement de Toulouse, qu’il avait sollicité, fixait le règlement des droits honorifiques attachés à la seigneurie de Châteaubourg77. Par cette acquisition, il investissait un modèle aristocratique de comportement et de légitimité sociale. Dès lors Guyenot prit l’habitude d’accoler à son nom la particule que lui donnait sa terre. Il se comporta comme un châtelain attentif à la mise au net du plan de sa propriété78 afin de déterminer les limites précises du mandement de Châteaubourg, et soucieux de la perception des redevances qui lui étaient dues79. Il engagea ainsi une procédure contre M. Coston, le propriétaire de la terre voisine de Cornas, à propos d’un moulin attaché sur les francs-bords du fonds de Châteaubourg80. De même, il contesta aux adjudicataires des travaux pour l’aménagement des quais de Valence le placement d’une traille et l’exploitation de carrières sur sa propriété81. Par un arrêt du Conseil du 29 août 1785, il se fit confirmer par la commission des péages la propriété des droits de pêche et d’attache de moulin qu’il avait acquise, en septembre 1784, en même temps que la propriété d’une île située dans le cours du Rhône82. Par l’intermédiaire de Louis de Baux, avocat au Parlement de Toulouse, il fit racheter les rentes que Charles-Claude de La Court d’Ambésieux possédait sur la terre de Châteaubourg83. En s’aidant d’un armorial, il composa même les armes de la maison Guyenot, « d’azur au chevron d’argent, accompagné de trois étoiles d’or, deux en chef, une en cœur et d’un croissant d’argent en pointe84 ». Par l’achat d’une terre noble et l’ennoblissement de son nom, Guyenot pouvait ainsi donner de lui-même une image sociale conforme à l’idéal aristocratique du temps.
22À défaut d’intégrer la noblesse, Guyenot se plut à reproduire les valeurs et les préjugés du second ordre. Il n’aura de cesse de proclamer l’ancienneté et la dignité de son nom : « Le nom de Guyenot et ses variations modernes Guyenot et le mot ancien celtique Guy-noch, guytnotch, guettenoch, witnoch ne signifie autre chose que le guy de la nuit, c’est-à-dire le préservatif, le défendeur, la garde de la nuit et delà le veilleur, la lumière de nuit85. » Parallèlement à ces spéculations onomastiques, Guyenot entreprit des recherches généalogiques autant pour défendre les droits de sa famille, dans un procès intenté contre les Minimes de Chalon-sur-Saône, que pour donner à son nom la consécration lignagère ; il demande ainsi en 1775 à son père de se renseigner sur une autre famille de la région portant le même nom que lui : « Les renseignements que je vous ai demandés sont pour voir à quel degré nous sommes parents et pour faire la généalogie de la famille ; il y en a plusieurs qui ont des lettres de noblesse anciennement, je veux voir si vous descendez d’eux86. » Et c’est en amalgamant faussetés et semi-vérités que Guyenot se construisit à son usage personnel une fable familiale qui faisait remonter la noblesse de son lignage au-delà de l’an mil et qui associait la fondation de la ville de Louhans (dépt Saône-et-Loire) à un de ses ancêtres87. La généalogie lui permet ainsi d’établir un véritable « roman familial » au service de son rêve d’ascension sociale. Comme pour masquer la modestie de l’origine sociale de sa femme, il prit d’ailleurs l’habitude de la faire figurer sous le nom de Catherine Guillaume « de La Neuville » dans les documents officiels. À une société d’Ancien Régime dominée par le préjugé nobiliaire, Guyenot emprunta les critères de distinction susceptibles de lui donner une identité sociale, quitte à recomposer les liens de son héritage familial.
23Cette référence à l’idéal nobiliaire du lignage ne va pas sans contradiction : Guyenot développe en effet dans le même temps une conception éminemment bourgeoise et individualiste de la respectabilité. C’est avec fierté qu’il revendique la position qu’il a acquise au sein de la société et qu’il ne doit qu’à la valeur de son mérite et de son travail. Il se vantait ainsi d’avoir « fait son état lui-même » et d’y être parvenu « seul, sans secours de personne88 ». Il trouve en lui-même les causes de son ascension sociale et de sa réussite personnelle. Ainsi apparaît-il, sur le théâtre social, comme un nouveau « bourgeois gentilhomme », partagé entre l’idéal aristocratique et la fierté bourgeoise. Après la Révolution, il reprocha par ailleurs à sa fille de signer « de Châteaubourg », ce qui revenait selon lui à renier le nom de Guyenot ; il considérait que la dignité attachée à son nom se suffisait à elle-même sans que la particule que lui valait sa terre de Châteaubourg y ajoutât un supplément d’honorabilité.
24Cette tension est patente au moment de la Révolution française, qui constitue assurément pour ses protections nobiliaires une discontinuité majeure. L’émigration de plusieurs de ses commettants, à commencer par le comte de Bosé et son épouse, mit de facto un terme à ses activités d’intendant. L’apurement des comptes donna lieu par ailleurs à plusieurs procédures engagées par Guyenot ou contre lui. Il réclamera au duc d’Orléans et au duc de Villeroy des sommes qu’il estimait lui être dues sur les recettes de péages89. Le procès intenté par les héritiers de la comtesse de Lordat, décédée le 18 prairial an VIII, ne fit que rompre ses dernières attaches avec la noblesse qu’il avait servie sous l’Ancien Régime. Déjà, le 2 thermidor an II, il avait été sommé de présenter les comptes de sa tutelle. Malgré son opposition, le premier jugement qui le sommait de s’exécuter fut confirmé le 2 ventôse an XII. Guillaume Leroi, tuteur du fils et héritier de la comtesse de Lordat, Louis-Antoine-Paul Bourbon Busset, accusait Guyenot de n’avoir pas porté en recettes toutes les sommes qu’il avait collectées, de ne pas avoir toujours produit les quittances justifiant ses dépenses et d’être finalement débiteur d’une somme de 70693 Lt. Guyenot quant à lui réclamait pour ses services plus de 150000 Lt. Il s’honorait d’avoir sauvé les biens et la vie de son pupille, notamment en faisant procéder à la levée des scellés apposés sur l’hôtel de la rue Verte et en brûlant la correspondance suspecte avec Coblentz qui s’y trouvait ; il estimait que la taxe révolutionnaire dont il s’acquitta pour le compte de la comtesse de Lordat et du marquis de Tilly suffisait à compenser les sommes dont il était redevable90. Parmi ses anciens commettants, il n’y a guère que le marquis de Guerchy avec lequel il resta en affaires : en l’an IX, il lui prêta 2962 francs91.
25Guyenot sut relativement bien apprécier les situations, pour revendiquer ou au contraire taire ses relations nobiliaires. Ce n’est que sous l’Empire qu’il se vanta d’avoir été attaché à la fine fleur de la noblesse d’Ancien Régime : « J’avais, outre mes opérations pour le gouvernement, la confiance de M. frère du roi, celle de M. le prince de Condé, celle de MM. les ducs de Praslin, de Villeroi92. » Alors que l’Empereur restaurait une hiérarchie des titres et que la noblesse recouvrait son prestige, Guyenot escomptait-il ainsi tirer de ses anciennes recommandations une certaine respectabilité ? Pensait-il qu’elles seraient susceptibles d’influer sur ses futurs contacts ? Sous la Restauration, il entretint une correspondance occasionnelle avec quelques nobles, le comte de La Rochette de Rochegonde notamment, avec lequel il partageait des « intérêts communs relativement aux mouvances93 ».
Les affinités maçonniques
26Eappartenance de Guyenot à la franc-maçonnerie lui permit assurément de compléter son capital de relations, non seulement en nouant des liens avec des interlocuteurs particuliers, mais en lui ouvrant plus généralement les ressources de la sociabilité maçonnique.
27En 1778, il devint le représentant de la Loge des Amis de la Vertu au Grand Orient, avant de participer à la fondation de celle de Saint-Alphonse des Amis Parfaits de la Vertu94. Il en fut le premier surveillant – un des grades les plus élevés dans la hiérarchie maçonnique – pratiquement sans discontinuer de décembre 1780 jusqu’au début du mois d’août 1790, quand les activités de la loge furent suspendues95. Le fait que cette charge, comme les autres offices, soit élective et soumise au suffrage des frères permettait de s’affranchir des prérogatives de la naissance. Comme nombre d’hommes d’affaires affiliés à la franc-maçonnerie, Guyenot y trouva des grades susceptibles de lui tenir lieu de distinction sociale et en quelque sorte d’« aristocratie de rechange96 ». Même si le recrutement social apparaît assez hétérogène, on y compte nombre d’officiers de justice, des ingénieurs et des gens intéressés aux affaires militaires. On retrouve parmi ses membres des proches de Guyenot dont il avait recommandé l’affiliation : le marquis de Châteauneuf et Louis-Antoine Béaunier ; c’est le cas sans doute également de Baptiste Raux, maître de forges et régisseur général de l’abbaye de Signy (dépt Ardennes) pour le compte de l’abbé de Bourbon, ainsi que d’Étienne-Nicolas Lair, son notaire parisien. D’autres candidats proposés par Guyenot pour une affiliation à la loge semblent appartenir à des cercles plus lointains : deux ingénieurs géographes (Jacques Grignon et Lucien Debray), un inspecteur général des vivres (M. Narcis de Torette) et M. Pinel de Lavocé.
28Grâce à son appartenance maçonnique, Guyenot put non seulement renforcer d’autres liens mais aussi étendre ses réseaux d’affaires. Comme dans d’autres loges – la Respectable Loge des Amis Réunis notamment –, les frères se livraient séparément ou en groupe à des opérations financières ou à des spéculations diverses. Trois membres de la même loge, Mathias Joseph-Firmin Degand, négociant à Amiens, Pierre Pinet, ingénieur géographe et premier commis du bureau de la marine, et Pierre-Antoine Clérambourg, avocat au Parlement, figurent ainsi comme actionnaires de la société créée en 1781 pour établir une nitrière artificielle à Paris, et dont Guyenot était le comptable. C’est également avec un autre maçon, Joseph Guillemardet, négociant en vins à Chalon-sur-Saône, qu’il élabora, dans les années 1786-1787, un projet de défrichement des forêts de Langonge et de Saunière en Bourgogne97. Guyenot avait en effet été député par le Grand Orient pour être le fondé de procuration de la loge locale de l’Union parfaite à Chalon-sur-Saône98.
29Après 1773, les ateliers qui, dans les dernières décennies du xviiie siècle, s’implantèrent dans les centres urbains plus modestes étaient représentés auprès du Grand Orient par un ou plusieurs députés résidant à Paris. Ils agissaient comme intermédiaires pour faire obtenir emblèmes et constitutions nécessaires à l’érection de la loge locale, pour transmettre les directives des instances centrales et défendre les intérêts de leurs commettants locaux. Guyenot représenta également la Loge de la Parfaite Union à Tournon (dépt Ardèche) de 1778 jusqu’à la Révolution99.
30Après avoir mis en sommeil ses activités maçonniques pendant la Révolution, il ne les reprit véritablement qu’à partir du Consulat. Depuis 1802, il était le représentant de la Loge des Vrais Amis de l’Orient d’Annecy, et en 1809 on le trouve associé à un projet d’établissement d’une loge à Cosne-sur-Loire. Officier honoraire du Grand Orient100 qui s’était progressivement reconstitué depuis la réaction thermidorienne, il devint « doyen des officiers honoraires et en exercice » en 1814. Guyenot continua d’utiliser ses relations maçonniques dans l’armée et l’administration pour recommander des protégés et défendre ses intérêts101. En désaccord avec un commissaire de Joinville, il lui adressa l’injonction suivante : « J’invoque dans votre réponse l’obligation maçonnique. Vous savez que notre serment porte que nous écrirons et que nous dirons toujours la vérité102. » L’affiliation de Guyenot à la franc-maçonnerie parisienne lui permit non seulement d’étendre le cercle de ses relations mais aussi de conforter des amitiés existantes. Ainsi, nombre de ses relations au sein de l’administration appartenaient comme lui au Grand Orient. C’est le cas notamment de M. Angebault, chef au ministère des Finances, de M. Pajot, chef de division aux Finances, et de Pierre-Gabriel Chanlaire, chef de l’administration des Forêts103.
31Entre ses amitiés administratives, le patronage nobiliaire et ses liens maçonniques, Guyenot a donc tissé tout au long de son existence un écheveau de relations qui lui ont permis de se positionner dans l’espace social. Dans ce réseau qui se révèle socialement assez hétérogène, la part des relations « héritées », qu’il s’agisse d’attaches familiales ou de connaissances liées à une commune appartenance géographique, apparaît pour le moins modeste. Il s’agit pour l’essentiel de liens qu’il a construits personnellement et dans lesquels il s’est investi au travers d’une correspondance assidue. Ils se caractérisent par une relative stabilité jusqu’à la Révolution française, qui l’oblige à mettre en sommeil ses activités maçonniques et ébranle en profondeur les recommandations nobiliaires sur lesquelles il avait bâti sa fortune.
32Son ascension sociale dans les dernières décennies de l’Ancien Régime témoigne incontestablement de son aptitude à tisser un réseau de relations utiles et à profiter d’une chaîne de recommandations. Il est avéré que le capital social n’est pas strictement proportionnel au nombre des relations, dans la mesure où elles n’ont pas la même valeur. La noblesse occupe à cet égard une position éminente pour les ressources normativement valorisées sous l’Ancien Régime que sont le statut et la richesse. La valeur du réseau de Guyenot repose non seulement sur les dénivellations hiérarchiques, mais aussi sur l’étendue des ramifications sociales qu’il présente. Elle tient aussi à l’ampleur de son rayon d’action géographique.
33Ce capital social constitua pour Guyenot autant de ressources qu’il n’hésita pas, lorsque l’occasion se présentait, à solliciter pour emprunter les liquidités nécessaires à ses opérations ou pour obtenir une recommandation utile à la bonne marche de ses affaires. Loin de se limiter à ses seules relations directes, son capital social intégrait aussi les liens qui ont pu lui donner accès à d’autres réseaux que le sien propre. La rentabilité de son capital social tient en outre à son intégration au sein de plusieurs cercles distincts mais relativement articulés, entre lesquels il pouvait circuler ou faire circuler ses connaissances. Une telle multiplexité lui offrit des opportunités de se poser en intermédiaire pour mettre en relation plusieurs de ses connaissances.
Notes de bas de page
1 AN T 1123/85. Lettre de M. Guyenot à son père (s. d.).
2 AN T 1123/39-40. Lettre de M. Guyenot à sa fille (5 février 1813) ; T 1123/10. Note.
3 AN T 1123/45. Brouillons de provisions d’offices pour Marie-Charles-Louis d’Albert, duc de Luynes et de Chevreuse pour le comté de Dunois, la baronnie de Château-du-Loir, la baronnie d’Houdan et le comté-pairie de Noyers (1770-1771).
4 Cf. L.-S. Mercier, Tableau de Paris (1782), éd. fac-similé, Genève, Slatkine Reprints, 1979, t. II, p. 153-154 : « Gens d’affaires » qui le plus souvent se « masquent » sous le « titre d’avocat en Parlement, qu’ils vont acheter à Reims moyennant cinq cents livres. Ce titre prouve que le particulier sait lire & écrire ; il apprend surtout à calculer ».
5 Lucien Karpik, Les Avocats. Entre l’État, le public et le marché xiiie-xxe siècles, Paris, Gallimard, 1995, p. 62. Cf. A.-A. Poirot, Le Milieu socio-professionnel des avocats au parlement de Paris à la veille de la Révolution (1760-1790), thèse de l’École des chartes, 1977.
6 AN T. 1123/71-72. Précis signifié pour le sieur Brochard, avocat au Parlement de Dauphiné & professeur en droit à l’Université de Valence contre le Sieur Vaginay habitant de Lyon. Griefs et moyens d’appel, pour Me Claude-François Brochard, Avocat en Parlement, tant en son nom qu’en qualité de père & légitime administrateur d’Étienne-Claude-François Brochard, son fils, appelant de sentence rendue en la sénéchaussée de Valence le 21 août 1772, contre Sieur Étienne Grand, gradué de la même ville, intimé.
7 AN T 1123/61a : « 30 volumes reliés, dont code des chasses, traité des fiefs et autres, 30 volumes reliés dont code des commerçans [...] État de la France, Traité du droit françois [Traité des maximes du droit français, Paris, Cellot, 1787], ordonnances des gabelles et autres ouvrages incomplets ; 6 volumes in quarto, Dictionnaire des domaines, et histoire des finances ; 8 volumes in quarto, Dissertation sur les domaines [Jean-Baptiste-Marie Desnos, Dissertation sur les usemens des domaines congéables dans les cantons de Cornouailles, Brouerec et Tréguier et Goello, Paris, impr. N.-H. Nyon, 1791] et autres ; [...] droits des seigneurs ; [...] 11 volumes in octavo et in quarto, code féodal [ou recueil chronologique de tous les décrets rendus par l’Assemblé nationale constituante, concernant les droits féodaux, la dîme, la chasse, la pêche [...] par un homme de loi, Paris, Prault, 1791], traité de la procédure [Robert-Joseph Pothier, Œuvres, Orléans, J.-J. Massot, 1776-1778 (chap. VII : traité de la procédure civile)] et autres ; [...] 4 volumes in quarto collection de jurisprudence de Jean-Baptiste Denisart [Collection des décisions nouvelles et de notes relatives à la jurisprudence actuelle, Paris, Savoye, 1757 (1re éd.), 2 vol.] [...) »
8 Voir chapitre III.
9 Voir chapitre II.
10 AN MC ét. LXVII/744. Déclaration par Jean-Michel-Auguste Billouard à M. Guyenot (15 novembre 1779). Obligation et délégation de M. Parisan à M. Billouard (15 octobre 1779). Déclaration de M. Billouard à M. Guyenot (10 décembre 1779). Transport de somme mobilière de M. Lepreux à M. Billouard (10 décembre 1779). MC ét. LXV11/767. Transports de créance de M. Guyenot à Me Achille-Michel Pinon (26 mars 1784).
11 AN T 1123/65. Lettres de M. Chaulaire à M. Guyenot (1791-1793) notamment pour lui communiquer les états de recettes du péage du canal de l’Ourcq.
12 AN T 1123/85. Lettre de M. Guyenot (22 février 1773) : « Je vous supplie de faire décider de mon sort, sans quoi je serai obligé de m’en aller dans le fond de la Guyenne sur les terres de M. le marquis de Rastignac pour y laire l’analyse de ses titres et d’y emmener ma femme ; car il ne m’est pas possible de rester icy davantage d’après le refus qu’on m’a fait faire. J’ay l’honneur d’offrir à M. de Besance, comme vous verrez, le temps qu’il jugera à propos pour m’initier dans ce qu’il me chargera. »
13 Voir chapitre III.
14 AN T 1123/76. Lettre de M. Guyenot à M. Larcher et M. Godefroy (3 août 1811).
15 AN T 1123/78-79.
16 Cf. Daniel Roche, « Nouveaux Parisiens au xviiie siècle », Cahiers d’histoire, 1979, 24, p. 1-20.
17 AN T 1123/43-44. Signification (26 janvier 1779).
18 AN T 1123/80-81. Lettres de M. de Préval (1787).
19 AN T/1123/85. Brouillon de lettre.
20 Plus tard, Guyenot eut à traiter de la succession de cette dame qui entre-temps s’était remariée avec le comte de Bermond d’Aurica (AN T 1123/80-81. Mémoire).
21 AN T 1123/87. Lettre (s. d.) de la comtesse de Bosé à M. Guyenot, pour se plaindre du ton qu’il avait employé dans un précédent courrier.
22 AN H4 3161.
23 AN MC ét. LXV11/741. Procuration des époux Bosé à M. Guyenot (5 mai 1779) ; MC ét. XI/722. Idem (21 mars 1783).
24 AN T 1123/37 et T 1123/38.
25 AN T* 1123/7. Journal de recette et dépense pour Mme la vicomtesse de Rouault (1776- 1791) ; T 1123/37. Mémoires de fournisseurs divers (1771-1783).
26 La sœur de Guyenot, Bonnaventure, était quant à elle cuisinière chez le comte de Poly (AN T 1123/85).
27 AN T 1123/37.
28 AN T 1123/88-89. Commission d’agent de S.A.R. l’Électrice douairière de Saxe accordée à Jean-Jacques Guyenot (27 février 1780).
29 Voir chapitre II.
30 AN T 1123/49. Précis pour la marquise de Sassenage contre le sieur [Jean-Joseph] Lorange son ancien fermier. Mémoire contre l’inféodation au sieur Vial de la plaine de Bièvres au préjudice de Madame de Sassenage engagiste des terres d’Izeaux, Saint-Geoirs et Saint-Étienne-[de-Saint-Geoirs] (dépt Isère). Il s’agissait de demander le remboursement des engagements de ces terres.
31 AN T 1123/71-72. MC ét. LXV11/727. Procuration (4 mars 1777).
32 AN MC ét. LXVII/731. Procuration de Mme la marquise de Châteauneuf à M. Guyenot (11 décembre 1777) ; T 1123/43-44. Depuis Valence, il se rendit notamment à Grenoble pour prendre des renseignements sur plusieurs de ses créanciers, le marquis de La Villette, M. Roche et M. Deisnard.
33 Il a épousé la fille que la marquise de Châteauneuf avait eue de son premier mariage avec André-Thomas de La Fournerye, ancien capitaine d’infanterie.
34 AN MC ét. LXVII/743. Procuration du marquis de Châteauneuf en faveur de Guyenot (25 septembre 1779).
35 AN T 1123/46. État des pièces remises par Mr. Guyenot à Mr. Desprez procureur au Châtelet suivant son récépissé du 4 juin 1780 et pour Mr. Desprez à Mr. Tramblin (1784).
36 J. B. Denisart, Collection de décisions nouvelles et de notion relatives à la jurisprudence actuelle, Paris, Veuve Desaint, 1777, t. 2, p. 105-106 : « On nomme [...] direction, un corps de créanciers unis, & dont les intérêts sont confiés à quelques-uns d’entr’eux, qu’on appelle directeurs, parce qu’ils sont chargés de veiller à l’intérêt commun. Les directions en général sont établies pour éviter les frais & pour accélérer le payement des créanciers [...]. »
37 AN T 1123/67.
38 Succédant à son père dans les fonctions de colonel du Royal Irlandais en 1760, il avait épousé en 1766 Renée de Choiseul-Beaupré. Cf. Célestin Port, Dictionnaire historique, géographique et biographique du Maine-et-Loire, Paris, J.-B. Dumoulin, 1878, t. 3 ; rééd., Angers, H. Siraudeau & Cie, t. IV, 1996, art. Serrant, p. 393-394.
39 AN MC ét. LXVII/730. Procuration d’A.-J.-Ph. de Walsh, comte deSerrant (12 oct. 1777) ; MC ét. LXVII/792. Quittance et décharge (28 novembre 1787) par Charles-Pierre-Paul Savalette Delanges, séquestre des biens et de la direction de feu M. Baudard de Sainte-James, ancien trésorier général de la marine, qui reconnaît avoir reçu d’A.-J.-Ph. Walsh, comte de Serrant, 30000 Lt, des mains de M. Guyenot, son fondé de procuration.
40 AN T 1123/85. Lettre deJean-Baptiste Guyenot, père dej.-J.-Guyenot, à Mlle Guillaume (12 mai 1768).
41 AN H4 3116. Mémoires des fournisseurs du comte de Serrant (1767-1780) ; T 1123/82- 84. Certificat du vicomte de Walsh-Serrant que Guyenot « a travaillé de l’année 1764 à celle de 1768 aux archives du comte de Serrant » (1784) ; T 1123/39 ; MC ét. LXVII/730. Procuration (12 octobre 1777). T 1123/36. Procuration d’Antoine-Joseph Philippe de Walsh, comte de Serrant, à Guyenot (14 juin 1786).
42 AN T 1123/39. Bordereaux des comptes (janvier 1779-février 1782) ; T* 1123/8. Registre contenant copie des lettres écrites par Guyenot à M. O’Connor (1778-1781).
43 AN T 1123/39. Précis pour le Sieur Guyenot contre le Sieur Desrosiers courtier.
44 AN T 1123/36. Procuration (8 juillet 1785).
45 AN T 1123/64 ; T/ 1123/61b. Mémoire à consulter pour le Sr Guyenot de Châteaubourg en qualité d’ancien tuteur onéraire de Mlle de Lordat contre le Sr Leroy... Il se vantait d’avoir fait aboutir un procès qui opposait depuis près d’un siècle la maison de Montmorency et celle de Colbert-Seigneîay : « En effet le 8 juillet 1779 après bien des recherches, des soins et des travaux considérables, le S. Guyenot fut assez heureux pour déterminer la transaction qui fut rédigée par MM. Doutremont, Sauvron, Boys et Ferrey avocats, conseils de ces maisons, et ce résultat fit rentrer à Mlle de Lordat un capital de 1 500 francs, et à Mme de Jonsac sa sœur plus de 1100 francs. »
46 Il effectua deux voyages en Berry en 1786 et octobre 1787, en Languedoc et en Normandie en 1787, notamment pour superviser la rénovation du terrier de la terre de Lignières (T 1123/59. Journal des opérations faites par M. Guyenot pour Mlle de Lordat, pendant son voyage pour le Berri et le Languedoc. État des différentes opérations ordonnées par M. Guyenot, tuteur de Mlle de Lordat, pendant son séjour à Linières au mois d’octobre 1787 ; T 1123/58. Journal en forme de procès-verbal tenu par M. Guyenot de Châteaubourg lors de son voyage de Normandie pour Mlle de Lordat (août 1787)). Guyenot se rendit à nouveau dans le Berry à la fin du mois de juin 1788 et au début d’octobre 1789 (T 1123/61b).
47 AN T 1123/75. Soumission du marquis de Tilly (28 oct. 1788) qui se proposait de « cautionner le prêt de 600 000 livres que M. Jary [Witerheim] et Cie s’obligent de [lui] faire par des Fênois, de la quelle somme, (il] fournirai[t] 400 000 livres, en qualité de sociétaire sous le nom de Guyenot, dans l’entreprise des lits militaires aussitôt que lad. somme de 600 000 livres sera versée entre les mains de M. Doillot notaire ».
48 AN T 1123/51. Compte des recettes et dépenses faites de confiance par M. Guyenot pour Mme la comtesse de Lordat depuis le 20 septembre 1781 jusqu’au 10 septembre 1783. Bordereaux des recettes et dépenses faites par M. Guyenot pour et au nom de Mme la comtesse de Lordat (3 octobre 1777-19 septembre 1781). Bordereau des sommes payées et reçues pour et au nom de Mme la comtesse de Lordat pendant son voyage de Flandre (1777).
49 AN T 1123/61a. Nettes récapitulant une partie des services rendus à la maison de Lordat dans le tems calme, par M. Guyenot, ex-tuteur de Mlle de Lordat, qui n’ont rien de commun à l’administration de la tutelle. T. 1123/68.
50 AN T 1123/61a. MC ét. LXVII/740. Procuration à Guyenot (1er avril 1779).
51 AN T 1123/45. État des déboursés extraordinaires de M. Guyenot relativement aux affaires de Monseigneur l’abbé de Bourbon et de Madame la marquise de Cavanac : « Les titres et papiers étaient dans le plus grand désordre, et il était de toute impossibilité de s’y reconnaître. Il a fallu que M. Guyenot fit débrouiller exactement tous les reçus et quittances des ouvriers, fournisseurs et autres de plusieurs années qui étaient dans la plus grande confusion, rassembler celles qui avaient rapport les uns avec les autres, les mettre par ordre chronologique, les enliasser, les enregistrer, faire des répertoires, etc. pour savoir toutes les sommes qui avaient été payées, savoir par Mme la marquise de Cavanac depuis 1771 et par Monseigneur l’abbé de Bourbon depuis le mois d’octobre 1774. Et cela était indispensable à Mme la marquise et à Monseigneur l’abbé de Bourbon, tant pour connaître leur position respective que pour parer à des demandes illégitimes de la part des ouvriers, marchands et fournisseurs qui auraient pu se faire payer deux fois le même objet. Il a fallu aussi distinguer les mémoires soldés d’avec ceux sur lesquels il n’avait été payé que des acomptes, et par conséquent faire plusieurs états. On a aussi mis par ordre et fait l’extrait des pièces relatives aux abbayes de St-Vincent et de Signy. Cette opération a exigé le plus grand soin. M. Guyenot a employé pendant plus de trois mois deux personnes qu’il a presque toujours fait travailler sous ses yeux conjointement avec lui, et qui n’ont fait aucune autre chose pendant tout ce temps. Ses déboursés à ce sujet sont considérables. Il a fait l’achat de huit cartons pour renfermer tous les papiers, de sept registres, dont deux ont servi à enregistrer les sommes payées antérieurement à la gestion de M. Guyenot, deux servans de journaux, deux de répertoires, et un autre pour la copie des lettres. »
52 AN MC ét. XI/727. Obligation du marquis de Panisse à Guyenot (22 janvier 1784) ; MC ét. XI/732. Idem (2 juillet 1785).
53 AN H4 3146/1.
54 AN T 1123/14. État des sommes reçues et payées par M. Guyenot pour et au nom de M. le baron d’Écrammeville depuis le 14 mars 1779 jusqu’au 1er avril 1781 ; T 1123/86. Marché avec un charron pour l’entretien d’une diligence.
55 AN T 1123/39-40. Mémoire.
56 AN T 1123/47.
57 AN T 1123/80-81. Lettres (1787-1788).
58 AN MC ét. LXVII/728. Procuration (14 avril 1777).
59 AN MC ét. 1/611. Procuration de Pierre Jolly à M. Guyenot (12 avril 1787).
60 AN MC ét. LXV11/748. Procuration à M. Guyenot (6 août 1780) ; MC ét. LXVII/756. Délégation de M. Philibert-Louis Orry, marquis de Fulvy (23 avril 1782).
61 AN MC ét. LXVII/755. Quittance de M. Babret à Guyenot (18 janvier 1782).
62 AN H4 3152. Obligation du chevalier André Bardoulx de Forceville au profit de Guyenot (3 avril 1781).
63 AN T 1123/82-84.
64 Voir chapitre III.
65 AN T 1123/36-37. Lettre de M. Brochard (8 décembre 1782).
66 AN MC ét. 1615. Contrat de mariage entre M. Charles Leblanc Duchâtelier et Mlle Guyenot de Châteaubourg (28 avril 1788).
67 AN MC ét. LXVII/745. Constitution de rente viagère par Henry-Louis-Marie de Rohan, prince de Guéménée, au profit d’Émilie Guyenot (28 janvier 1780).
68 Secrétaire du roi, Jean André avait acheté la terre de Châteaubourg en janvier 1720 à Joseph Guy de Maugiron. Les archives de cette discussion, suivie au Bureau des comptes en banque, sont conservées sous la cote V7. Une commission extraordinaire avait été créée par les arrêts du Conseil d’État des 26 octobre 1722 et Il mars 1725 pour connaître des contestations au sujet de la discussion des biens des particuliers compris au rôle de la capitation extraordinaire arrêté au Conseil le 15 septembre 1722, et nommément de celles concernant la discussion des biens de Jean André, et les juger en dernier ressort. Mailhard de Balosre était rapporteur de cette commission. Cf. aussi V7 3-6 ; le marquis de Maugiron s’était porté acquéreur de la seigneurie de Châteaubourg en 1734 pour une somme de 56000 Lt (H4 3139).
69 AN T 1123/88-89. Adjudication définitive de la terre de Châteaubourg, circonstances et dépendances, faite le 4 juin 1778 par MM. les commissaires généraux du Conseil au Bureau des comptes en banque, à M e Benoist, avocat aux Conseils qui en a fait sa déclaration le 19 du même mois au profit de la vicomtesse de Rouault pour les trois quarts et de Guyenot pour l’autre quart.
70 AN MC ét. LXVII/739. Obligation (11 janvier 1779). M. Brenier lui avait été recommandé par M. Girardot, le curé d’Orchamps.
71 AN MCét. I/563. Constitution de rente (11 janvier 1776) pour M. et Mme Guyenot d’un capital de 14000 Lt. « Ce contrat a été remboursé à M. Guyenot par les époux Bosé sur le prix de la vente de Mme d’Adhemar d’un contrat de 100 000 livres sur Mme de Sassenage, le 11 février 1780 devant Me Guereten ; remboursement opéré à cause de l’opposition formée par M. Guyenot à M. et Mme Bosé, savoir 11500 livres qui ont servi à rembourser pareille somme qui avoit été prêtée à Mme la comtesse de Bosé par M. Robert par obligation du 7 janvier 1779 pour payer les trois quarts du prix de la terre de Châteaubourg, au moyen duquel payement ledit S. Guyenot a été subrogé aux droits et privilèges dud. Robert sur la terre de Châteaubourg » (T 1123/38). AN T 1123/88-89. Contrat de vente devant Me Pinon (14 avril 1782). Acte de prise de possession chez Me Granjeon, notaire à Saint-Perray (31 mai 1782). T* 1123/7. Journal de recettes et dépenses pour Mme la vicomtesse de Rouault (1er janvier 1776-3 février 1791). À la date du 10 juin 1780 « à M. Robert la somme de 11 500 livres pour le remboursement de l’obligation du 7 janvier 1779 dont l’emploi avoit été fait pour l’acquisition des trois quarts de Châteaubourg ; laquelle somme a été remboursée au moyen de ladite quittance que moi Guyenot ay donnée à M. et Mme la comtesse de Bosé au contrat de constitution que Mme la comtesse avait souscrit à mon profit le 11 janvier 1776 ce qui a opéré subrogation en ma faveur au lieu dudit Robert au moyen du remboursement par moi fait de la somme de 11 500 livres montant de ladite obligation, et au moyen de ce que j’ai laissé ladite somme entre les mains de mesdits seigneurs et dame ».
72 AN MC ét. XI/722. Obligation de M. Guyenot à Jean-Louis Magny de Maisonneuve (23 janvier 1783). Cette somme fut versée le jour même à Jean Meurier, fondé de procuration des époux Bosé.
73 AN T 1123/88. Obligation (20 juin 1783).
74 AN MC ét. LXVII/756. Traité et convention entre les époux Bosé et M. Guyenot (14 avril 1782).
75 AN T 1123/67 et T 1123/88. Arrêt de la Chambre des comptes de Montpellier (19 février 1779).
76 AN T 1123/88. Quittance délivrée par le receveur commis des administrateurs généraux des Domaines (13 juillet 1782).
77 AN T 1123/88. Arrêt du parlement de Toulouse (8 mars 1786).
78 AN T 1123/88. Copie de la lettre de M. Guyenot à M. Bonnet, feudiste de Saint-Peray (17 mai 1788) : « Votre minute doit être numérotée afin de pouvoir énoncer le n° dudit plan à chaque article de reconnoissance. Plus et avant toutes choses, il faut fixer les chantiers, cantons ou terroirs sur ledit plan et y mettre le nom du terroir en gros caractères, afin que ce même nom puisse être relaté et énoncé aux articles qui seront enclavés dans ce même canton. Vous savez que c’est ainsi que se font les plans terriers. »
79 Cf. L.-S. Mercier, Tableau de Paris (1782), éd. fac-similé, Genève, Slatkine Reprints, 1979, t. Il, p. 67, « Entremetteurs d’affaires » : « Tel autre entremetteur, sans avoir un sol, achète une terre dont il paie une petite somme qu’il a empruntée. Il devient réellement propriétaire, jusqu’à ce qu’on le dépossède. [...] Pendant ce tems il jouit, fait des coupes de bois, dit, mes vassaux. »
80 AN T 1123/88. Mémoire à consulter. Pour M. Guyenot, seigneur haut justicier et direct de la terre et mandement de Châteaubourg en Vivarais, généralité de Languedoc.
81 AN T 1123/68. Lettre de M. Guyenot à M. Dodun, ingénieur des Ponts et Chaussées (9 juillet 1789) : « Il est certain, de vous à moi, que le prétexte de découverte utile et même l’utilité publique ne l’emportent jamais sur le droit de propriété. Je viens de le faire juger au Conseil en ma faveur. Il se fait un abordage à Valence en Dauphiné. Le Roy prenoit de la pierre de mes rochers de Châteaubourg. J’ai pu informer contre les ouvriers, l’administration est venue à moi, elle m’a fait des offres, j’ai obtenu 600 livres par an et 10 toises cubes de pierre aussi par an toute extraite pendant que dureront les travaux de Valence. Mes rochers étoient inutiles ; ils ne me produisaient rien » ; T 1123. Mémoire pour Jean-Jacques Machon, avocat au Parlement et juge de Châteaubourg.
82 AN T 1123/38.
83 AN T 1123/88. Cession (16 novembre 1785).
84 AN T 1123/88-89.
85 AN T 1123/88.
86 AN T 1123/85. On retrouve d’autres pièces remontant aux xive et xve siècles sous la cote T 1123/48.
87 AN T 1123/10. Lettre de M. Guyenot à sa fille (11 mars 1811).
88 AN T 1123/85. Mémoire.
89 Voir chapitre III.
90 AN T 1123/39-40.
91 AN T 1123/24b. Obligation (14 fructidor an IX).
92 AN T 1123/26. Lettre de M. Guyenot au substitut du procureur impérial (s. d.).
93 AN T 1123/51. Lettres du comte de La Rochette de Rochegonde (1814).
94 Cf. Alain Le Bihan, Francs-Maçons parisiens du Grand Orient de France (à la fin du xviiie siècle), Paris, Bibliothèque nationale, 1966, p. 243.
95 AN T* 1123/9.
96 Cf. Ran Halévi, Les Loges maçonniques dans la France d’Ancien Régime. Aux origines de la sociabilité démocratique, Paris, A. Colin, 1984, p. 100.
97 AN T 1123/17b.
98 AN T 1123/71-72. Cet atelier, fondé par la Grande Loge de France le 18 décembre 1765, fut reconstitué par le Grand Orient en 1774 et fonctionna jusqu’à la Révolution ; BNF Fonds maçonnique FM2206. Cf. Alain Le Bihan, Loges et chapitres de la Grande Loge et du Grand Orient de France, deuxième moitié du xviiie siècle, Paris, éd. CTHS, 1990, p. 63 ; Daniel Licou et abbé J.-C. Desbrosse, La Franc-Maçonnerie à Chalon-sur-Saône et à Mâcon au xviiie siècle, Paris, Lauzeray International, 1979, p. 20 ; Pierre Lamarque, « Sur les loges de Chalon-sur-Saône entre 1773 et 1789 », Annales historiques de la franc-maçonnerie, juin 1976, n° 15, p. 11-12.
99 Alain Le Bihan, op. rit., 1990, p. 243. Cet atelier, constitué en 1775, reprit ses travaux en 1788 après une interruption de quelques années.
100 AN H4 3152.
101 Denis Woronoff, L’Industrie sidérurgique en France pendant la Révolution et l’Empire, Paris, EHESS, 1984, p. 130.
102 AN T 1123/17b.
103 AN T 1123/82-84. Liste de nos f. du GO qui sont nommés notables communaux.
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