Propriété collective et identité communale
|Deuxième partie. L’offensive révolutionnaire contre la propriété communale 1789-1800
L’offensive révolutionnaire contre la propriété communale 1789-1800
Texte intégral
- 1 Adresse des sans-culottes, manouvriers, vignerons et autres cultivateurs, habitant les chaumières d (...)
- 2 Opinion de J.-F. Baraillon, député de la Creuse, 26 fructidor an IV, AD X 13, 47.
« Jour du 10 juin ?! Jour de gloire et de prospérité pour les campagnes ?! »1
« Ce décret du 10 juin est une véritable loi agraire… Loi délétère et spoliatrice. »2
1Dans les années 1780, le respect des droits féodaux bloquait la situation. Dès le début de l’année 1789, les données changent. Les paysans expriment leurs doléances contre ces droits, et même si celles-ci ne transparaissent pas toutes dans les cahiers de bailliage, ils espèrent bien obtenir rapidement satisfaction. Dès le printemps, les émotions nées de la crise frumentaire prennent une autre signification : les rancœurs contre les droits seigneuriaux s’exacerbent. Dans la plupart des cas, les communaux ne sont pas la principale préoccupation, mais occupent une place importante et les habitants se plaignent des usurpations.
2La décennie révolutionnaire est la période d’acuité maximale de la question des communaux car la conjoncture y est doublement propice : l’attaque contre les seigneurs encourage les habitants à revendiquer les terres qu’ils estiment leurs ; la crise économique incite à les mettre en culture et relance l’idée de partage. Si la question des droits féodaux se résout graduellement, celle du partage est débattue jusqu’en 1800 et c’est le Consulat qui y met un terme définitif ; il marque une rupture en écartant toute éventualité de partage (loi du 9 ventôse an 12). Entre temps, une solution avait pourtant été trouvée : la loi du 14 août 1792 décidait le partage, dont les modalités étaient fixées le 10 juin 1793. Très vite remise en cause, cette loi a marqué les esprits et déchaîné les passions. Qualifiée de loi agraire, de loi politique de circonstance..., elle symbolise l’acmé de l’attaque contre la propriété communale.
3Nous retracerons d’abord la genèse de ces lois, élaborées par les députés, sous l’influence de l’opinion des notables départementaux et sous la pression des paysans, par leurs manifestations et leurs pétitions. Avec cette perspective d’ensemble, nous pourrons réfléchir au sens de la loi de 1793, et nous interroger sur sa portée pratique, ses applications.
Notes
1 Adresse des sans-culottes, manouvriers, vignerons et autres cultivateurs, habitant les chaumières de Virelade, Arbanats et Portets (Bec d’Ambès), lue à la Convention le 4 Thermidor an II, citée dans F. Brunel et R. Monnier, Archives Parlementaires, Paris, 1990, t. XCVI, p. 415.
2 Opinion de J.-F. Baraillon, député de la Creuse, 26 fructidor an IV, AD X 13, 47.
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