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Militaires en République, 1870-1962

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Olivier Forcade
, 
Éric Duhamel
, 
Philippe Vial

2. Les grandes crises nationales et l’appel de la politique

Les officiers en résistance et en politique

Jean Delmas

Texte intégral

1Cette question complexe mériterait à elle seule d’être l’objet d’un colloque. Nous l’aborderons à travers quatre textes qui, successivement, rappellent la neutralité politique de l’armée, engagent l’armée dans un processus de soutien au régime de Vichy et suggèrent une impossible neutralité dans les combats de la Résistance.

La neutralité politique rappelée (1938)

2Faut-il rappeler la condition civique de l’officier – et de tout soldat – à la veille de la Seconde Guerre mondiale ? C’est un exclu de la vie politique : ni électeur, ni éligible tant qu’il est en activité. Il ne peut adhérer ni à un parti politique, ni à un syndicat. C’est un citoyen de seconde zone, qui doit obéissance pleine et entière à ses chefs, sans hésitation, ni murmure.

3Ainsi réduit au silence, l’officier n’en est pas moins un homme qui pense, réagit, s’émeut, s’indigne quand la Patrie subit de graves convulsions, comme entre 1930 et 1939. Les restrictions budgétaires, la prolétarisation des cadres, l’arrivée du Front populaire provoquent une sourde grogne, mais aussi une participation discrète, par l’intermédiaire des associations d’officiers de réserve, à l’agitation nationaliste et antiparlementaire. Le corps des officiers, patriote, en majorité conservateur et catholique, ne peut avoir que répulsion pour le communisme internationaliste, révolutionnaire et athée.

4Dans l’affrontement idéologique qui déchire l’Espagne, l’armée peut-elle rester, dans une France divisée, un îlot protégé à l’abri de toute propagande et de toute tentation ? Daladier a dû placer en non-activité le commandant Loustaunau-Lacau après la découverte, dans l’armée, des réseaux anticommunistes « Corvignolles ». A l’opposé, la naissance d’associations d’officiers et sous-officiers républicains inquiète le haut commandement.

5En 1938, un article de la France militaire rappelle la consigne :

6« Muette les dents serrées, l’esprit et le cœur tendu vers le terrible rôle qu’elle peut devoir jouer demain, elle doit avoir les yeux tournés vers l’extérieur, non vers l’intérieur ; elle doit s’obliger à ne rien entendre des troubles néfastes qui agitent le pays. Gardienne et image de l’union sous les plis du drapeau tricolore, elle doit rester en dehors de toute querelle. »

L’engagement politique exigé (1940-1941)

725 octobre 1940. Sous le titre Conduite morale et pratique de l’Armée, le général Huntziger, ministre secrétaire d’état à la Guerre et commandant en chef des Forces terrestres, diffuse ses instructions à ses grands subordonnés.

8Il rappelle que le maintien de l’ordre est la seule mission de l’armée dont les Allemands ont autorisé l’existence en zone libre et ajoute : « La notion d’ordre est primordiale. L’ordre est indispensable au relèvement du pays, car on ne saurait construire l’avenir que sur le présent dont l’armée seule peut assurer la solidité. L’armée du maintien de l’ordre, nom donné à l’armée de l’armistice, a dès lors une signification. Ce qualificatif ne doit pas être considéré comme minimisant, mais au contraire comme exaltant […] ».

9Et il poursuit :

« Cet ordre que l’Armée entend maintenir et faire régner sur tout le territoire, elle se doit naturellement l’observer elle-même. ».

10Elle doit donc être disciplinée, obéissante et même plus qu’obéissante :

« Obéir aux ordres de ses chefs et à ceux du Chef de l’État ne veut pas dire exécuter avec plus ou moins de conviction des ordres qu’on ne peut éluder. L’époque en effet ne saurait se contenter de tiédeur ni tolérer des réticences de cœur et de l’esprit. Elle exige de la ferveur [...] ».

11Et Huntziger explicite le mot « ferveur » jusqu’alors ignoré du règlement de discipline générale :

  • 1 S.H.A.T., 1P31, I.M. n° 7381/CAB du 23 octobre 1940.

« Autant l’armée se devait jusqu’ici, par souci de sa dignité, de se tenir écartée de la mesquine politique que la rénovation nationale entreprise, sous le fouet de la défaite, ajustement répudiée avec dégoût ; autant elle se doit aujourd’hui de manifester son attachement au régime nouveau. Tous les cadres et les hommes de l’ Armée nouvelle ont l’obligation stricte de devenir des partisans, au sens le plus noble du terme qui ne signifie pas « des gens de parti » mais des serviteurs ardents d’un même idéal : celui de la France rénovée […]. Tout militaire de l’Armée nouvelle, quelque soit son grade, a désormais le droit et le devoir d’exprimer hautement son attachement total au régime instauré par le plus grand de ses chefs sous le signe de l’honneur et des vertus nationales, et sa volonté de ne laisser toucher en aucun cas à l’œuvre du Maréchal […].1 »

12Le texte est long, mais mérite citation, car il engage les officiers, et tous les militaires, dans une action politique de soutien et de défense du nouveau régime institué à Vichy.

  • 2 Acte constitutionnel du 1er août 1941.
  • 3 S.H.A.T., 2P3, note aux officiers 25 juin 1941.

13Quelques mois plus tard, la guerre fratricide de Syrie va déterminer le gouvernement de Vichy à exiger davantage des officiers : un serment de fidélité au chef de l’État2. Huntziger s’en était expliqué par une note à l’attention des officiers : « Aujourd’hui les apparences ne peuvent plus suffire […] toute réticence intérieure serait une sorte de complicité, une amorce de trahison. Si donc il demeure parmi vous un seul officier qui conserve un tel état d’esprit, qu’il abandonne immédiatement l’uniforme […]. Et s’il en était un qui n’ait pas compris, qu’il soit montré du doigt par ses pères […]. Suivez vos chefs avec foi, aveuglément.3 »

14Maintien de l’ordre prioritaire, attachement total au régime nouveau, obligation d’être des partisans, au besoin appel à la délation, obéissance fervente et aveugle, serment... les officiers en service dans l’armée d’armistice sont désormais engagés, qu’ils le veuillent ou non, dans un processus politique de soutien du régime. De ce fait, ils sont prisonniers de l’image qu’ils donnent d’eux-mêmes à l’opinion publique de la zone non-occupée. Celle-ci ne s’en choque pas initialement, partageant, dans sa grande majorité, l’attachement au Maréchal. Il n’en est pas de même de la minorité – faible mais active – déjà engagée dans une résistance alors beaucoup moins militaire que politique (anti-révolution nationale, comme anti-nazie) et qui considère l’armée comme le support le plus solide du régime qu’elle conteste.

La résistance politico-militaire d’un officier marginal

15En février 1941, le capitaine Henri Frenay, du 2e bureau de l’État-major de l’armée, demande à bénéficier du congé d’armistice. Il est intéressant de constater que, dans sa lettre au ministre, il fait référence longuement à l’instruction du général Huntziger que nous venons de citer ; il conclut :

  • 4 S.H.A.T., fonds privé Frenay.

« La confiance que j’avais naguère dans le Commandement a maintenant disparu. C’est sans conviction que j’exécute les ordres qui me sont donnés car je sais qu’ils sont éloignés du concret, de la réalité vivante. Je sais, au moment même où je travaille, que ce travail sera stérile.
De la ferveur je n’en ai que pour mon Pays, je n’en ai plus pour les hommes. Il est donc honnête de me retirer.4 »

16Ainsi quitte l’armée, parce qu’il n’a plus confiance en ses chefs, un officier qui est le fondateur de « Combat », un des plus célèbres mouvements de Résistance. Si Frenay, saint-cyrien breveté, aspire à être le chef militaire d’une Résistance unifiée, il est d’abord un chef de mouvement aux responsabilités politico-militaires. On connaît ses conflits, concernant la mise sur pied de l’armée secrète (A.S.), avec Jean Moulin et le général Delestraint. Selon les consignes du général de Gaulle, ceux-ci veulent séparer catégoriquement action politique et action militaire. En 1942, alors qu’il y avait encore peu de militants engagés dans la Résistance, Frenay répondait : impossible, ce sont les mêmes hommes qui agissent dans les deux domaines.

  • 5 Colonel Passy, Missions secrètes en France, p. 394-96.

17En avril 1943, plus nuancé, et sous la pression de Jean Moulin, il admet, dans une lettre au général Delestraint, que la séparation de l’A.S. et des autres éléments est imparfaitement réalisée : « On doit constater que dans 50 % des cas, elle n’est pas faite en dessous de l’échelon département et dans 80 % des cas, pas faite à l’échelon militant ». Il en explique les raisons en faisant un historique de « Combat » : « Ces hommes ne peuvent en aucun cas, même s’ils appartiennent à l’A.S., être comparés à des soldats d’une armée régulière. La discipline, d’ailleurs relative, qu’ils observaient était beaucoup plus celle d’une armée révolutionnaire et cela était bien ainsi, puisque l’une des missions de l’A.S. était de participer à la prise du pouvoir […]. Les choses sont donc ainsi, c’est-à-dire que le plus souvent les mêmes cadres et les mêmes troupes obéissent à une double hiérarchie, la hiérarchie politique et la hiérarchie militaire.5 »

18Ainsi pour Frenay, la résistance armée a deux objectifs : libérer le territoire national et prendre le pouvoir. Se désintéresser du deuxième, c’est, soutiendra Frenay, laisser la place à ceux qui sont décidés à faire triompher, à la libération, leur credo politique, qui n’est pas le nôtre.

  • 6 Henri Frenay, La nuit finira, p. 42.

19Certes, Frenay n’est pas représentatif du corps des officiers, même s’il a appartenu, comme il l’écrit dans ses mémoires, « à cette droite française traditionaliste, pauvre, patriote et paternaliste6 », mais Berty Albrecht l’a attiré hors des sentiers battus par un officier de carrière, dans des milieux de Front populaire et d’exilés allemands. Il y a acquis une réflexion politique assez étrangère à celle de ses camarades de l’armée.

20Remarquons toutefois qu’elle ne l’a pas conduit, en juillet 1940, à choisir de Gaulle. Prisonnier rapidement évadé, c’est l’armée d’armistice qu’il rejoint pour reprendre le combat. Mais plus lucide que d’autres, il se persuade que ses chefs n’en donneront jamais l’ordre. C’est pourquoi il quitte l’uniforme pour reprendre le combat, mais en France, dans la clandestinité.

La négociation politique de l’O.M.A. (future O.R.A.)

21La dissolution de l’armée d’armistice donne raison à Frenay et dessille les yeux de nombreux officiers qui avaient cru que le Maréchal soutiendrait leur volonté de revanche. Ils se retrouvent seuls, sans ordres. Agir désormais pour eux, c’est choisir : ou s’évader de France pour rejoindre soit l’Afrique du Nord, soit l’Angleterre ; ou rester en métropole et s’engager dans la Résistance.

22Maintenir en clandestinité une structure militaire à partir des cadres de l’armée dissoute, telle est la volonté de quelques généraux et officiers. Ainsi se met progressivement en place une Organisation métropolitaine de l’armée (O.M.A., qui deviendra plus tard, O.R.A.). Elle considère qu’elle est le prolongement en métropole de l’armée d’Afrique du Nord qui a repris le combat sous les ordres du général Giraud, Commandant en chef dont se réclame l’O.M.A. C’est donc une structure clandestine, mais qui se veut strictement militaire et apolitique. Un seul but, la victoire, le titre d’un livre ultérieur du général Giraud symbolise bien la volonté des créateurs de l’O.M.A.

23Mais peut-on demeurer dans un superbe isolement, au milieu de ce monde clandestin et politisé de la Résistance française ? Peut-on développer l’Organisation métropolitaine de l’armée, en ignorant les structures militaires progressivement développées par les mouvements de Résistance, comme l’Armée secrète que de Gaulle, depuis Londres, tente de contrôler en nommant son chef ?

  • 7 A. de Dainville, L’O.R.A., annexe VI, p. 318.

24Le général Revers, devenu chef de l’O.M.A.-O.R.A. après les arrestations successives des généraux Frère et Verneau, est conscient de la nécessité de briser l’isolement de son organisation. Des négociations ont été entreprises discrètement avec une autre organisation qui joue aussi les cavaliers seuls, les Francs-tireurs et Partisans (F.T.P.), organe armé du parti communiste. Un accord était intervenu le 29 décembre 1943 entre le chef de l’O.M.A. et le représentant des F.T.P. de la zone Sud. Il y était prévu que « l’O.M.A. et les formations des F.T.P. suivent les directives du C.F.L.N. sur les problèmes politiques et militaires de la lutte contre l’Allemagne pour la libération de la Patrie »... et que « les forces coordonnées se réclament de l’Armée nationale dont elles constituent dans la métropole, l’embryon. A ce titre et dans la mesure où les forces militaires sont appelées à servir l’action politique (constitution et maintien du front intérieur), elles sont à la disposition des autorités administratives officiellement désignées par le C.F.L.N. »7. Mais le parti communiste n’avait pas donné suite à l’accord, convaincu que l’O.M.A. s’était fondue dans l’Armée secrète (A.S.) et qu’il n’y avait plus lieu de négocier avec elle séparément.

25Quoiqu’il en fut, c’était bien une négociation politique qu’avait menée l’O.M.A. Revers le reconnaît dans une lettre du 25 janvier 1944 adressée au président du C.F.L.N., dans laquelle il fait l’historique de son organisation : « Depuis longtemps déjà, l’O.M.A. s’efforçait d’assurer auprès du P. C. les conditions politiques préalables à une étroite coopération avec les F.T.P. » et dans le revirement du P. C. il voit « l’expression d’une méfiance politique » à l’égard de l’O.M.A., dont il tient à faire définitivement justice en expliquant au président du C.F.L.N. :

  • 8 S.H.A.T., fonds privé Revers, lettre du 25 janvier 1944.

« Par son recrutement, l’O.M.A. se trouve naturellement constituer l’avant-garde de l’Armée française. Techniquement et organiquement, elle se réclame donc de cette armée, dans un vœu d’unité, étranger à toute intrigue... Malgré cette origine et cette filiation authentiquement militaires, une telle organisation représente politiquement, mieux et plus qu’un détachement avancé de l’armée régulière, en raison de l’option individuelle qui est à la base de son recrutement. Cet acte volontaire prolonge l’espérance qu’avaient nourrie, jusqu’à la dissolution, les meilleurs éléments de l’Armée d’armistice de reprendre au moment opportun le combat aux côtés des Forces françaises libres. Ces éléments se sont donc affranchis d’une tutelle qui les avait trahis, et cette émancipation constitue, au sens élevé du mot, un « fait politique » qui semble avoir été méconnu…8 »

26Pour avoir été le chef d’état-major de l’amiral Darlan, commandant en chef de toutes les forces de Vichy, le général Revers était bien placé pour mesurer combien l’armée d’armistice s’était – ou était – identifiée au régime de Vichy, comme l’avait ordonné le général Huntziger dans son instruction du 25 octobre 1940. S’affranchir de cette image pour poursuivre en clandestinité la préparation de la revanche, était bien un acte politique au sens élevé du mot. De même, une négociation politique était nécessaire pour faire admettre l’O.M.A. dans le processus d’unification des forces de l’Intérieur.

27Une objection classique est opposée à cette affirmation du poids de la politique dans la lutte armée de la Résistance : ce sont des problèmes qui se posent au niveau des chefs des mouvements, mais qui sont inconnus de la piétaille, c’est-à-dire du résistant de base, dont l’objectif est de s’armer et de lutter contre l’occupant. Il se mobilise pour reprendre le combat, soldat pour chasser l’occupant et poursuivre la lutte jusqu’à la capitulation de l’Allemagne et se veut à l’écart de toutes les querelles politiques qui divisent. C’est vrai dans une certaine mesure, mais c’est aussi moins simple.

28L’engagement en Résistance est un acte personnel. N’y a-t-il pas dans cette décision, un acte politique ? Le général Revers le remarque avec justesse : quand un officier de l’armée d’armistice décide, après la dissolution, de continuer le combat, il fait un choix politique dans sa détermination patriotique. Entrer en Résistance c’est, pour lui, considérer le serment invalidé par les circonstances, c’est se désolidariser du Maréchal, à moins de continuer à croire, contre toute vraisemblance, que le Maréchal est d’accord dans ses silences. Il y a rupture politique à laquelle d’ailleurs certains ne se résoudront pas, ce qui les entraînera dans l’inaction à un moment où le sort de la Patrie est en jeu. Ainsi rester fidèle au Maréchal – option politique – amène certains soldats de carrière à ne pas faire leur métier au pire moment de l’histoire de leur pays. Sans parler de ceux, rares, qui choisissent, par idéologie, de faire leur métier en participant à la croisade anti-bolchévique. S’engager dans la division Charlemagne comme s’engager dans la Résistance, ou rester l’arme aux pieds en attendant les ordres du Maréchal, sont trois choix personnels et politiques.

29En résistance, même le soldat de base rencontre d’autres soldats de base qui se disent, eux, partisans. La cohabitation dans une même région avec des maquis F.T.P. – et quelquefois la confrontation – ne peut laisser indifférents les membre de l’O.M.A., tant sont grandes les différences de style de commandement et de modes d’action. Y a-t-il coordination des efforts ou méfiance ? A qui distribue-t-on les armes ? En de bonnes mains ! Qualifier les « bonnes » mains, n’est-ce pas un choix politique ? Le fait que l’U.R.S.S. soit devenue l’adversaire de l’Allemagne n’était certainement pas suffisant pour dissoudre le classique anticommunisme du corps des officiers et interdire toute réticence des forces de l’O.M.A. vis-à-vis des F.T.P., la réciproque étant vraie.

30Et l’inattendue – car improbable initialement – négociation entre F.T.P. et O.M.A., n’était-elle pas le fruit d’une égale réticence politique des autres Mouvements vis-à-vis de ces deux organisations ? Ne sont-ils pas inquiets soit de la redoutable efficacité d’une organisation communiste, soit de la coloration vichyste d’anciens de l’armée d’armistice ?

31Enfin le combattant de l’ombre, même ne se voulant qu’un soldat, peut-il totalement se désintéresser de ce que sera la France libérée ? Certes il aura chassé l’Allemand du territoire, mais qui s’installera à Paris ? Quel régime adoptera la France ? Ce ne pourra plus être l’État français, ce que pourront regretter certains officiers attachés à la devise « Travail, Famille, Patrie ». Ce ne pourra plus être la Troisième République ; en France tout désastre militaire secrète un changement de régime : Waterloo et Sedan en témoignent. Alors quoi ? Certes le soldat reste encore juridiquement le citoyen de deuxième zone qu’évoque le premier paragraphe de cet exposé, même si Vichy a voulu en faire un partisan du régime. Mais les traumatismes de ces années terribles, les choix personnels qu’il a dû faire, soit en 1940 après l’appel d’un soldat qui s’affranchit du sacro-saint principe de l’obéissance, soit après novembre 1942 dans la solitude de F après-dissolution, ne l’ont-ils pas transformé en citoyen plus actif, incapable de se désintéresser de l’avenir politique du pays ? La Résistance, plus particulièrement, est pour un officier une expérience dont il ne peut sortir neutre.

Notes

1 S.H.A.T., 1P31, I.M. n° 7381/CAB du 23 octobre 1940.

2 Acte constitutionnel du 1er août 1941.

3 S.H.A.T., 2P3, note aux officiers 25 juin 1941.

4 S.H.A.T., fonds privé Frenay.

5 Colonel Passy, Missions secrètes en France, p. 394-96.

6 Henri Frenay, La nuit finira, p. 42.

7 A. de Dainville, L’O.R.A., annexe VI, p. 318.

8 S.H.A.T., fonds privé Revers, lettre du 25 janvier 1944.

Auteur

Est officier général (C.R.), docteur habilité en histoire de l’université Paul-Valéry-Montpellier-III et diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris. Ancien chef du Service historique de l’armée de Terre (1980-1986), il est président de la Commission française d’Histoire militaire et vice-président de la Commission internationale d’Histoire militaire. Il a publié avec P. Lesouef, Napoléon chef de guerre (3 tomes) in « Napoléon Bonaparte, l’œuvre et l’histoire », collection dirigée par J. Massin, Club français du Livre, Paris, 1970. Il a dirigé le tome II de l’ Histoire militaire de la France (1715-1871), PUF, Paris, 1992.

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