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    Plan détaillé Texte intégral L’Action libérale populaire et les militaires : un lien privilégiéLa Fédération républicaine face aux militaires : une évolution ambiguë Notes de bas de page Auteur

    Militaires en République, 1870-1962

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    Table des matières

    Les militaires dans les partis conservateurs sous la Troisième République : Un engagement naturel ?

    Mathias Bernard

    p. 395-404

    Texte intégral L’Action libérale populaire et les militaires : un lien privilégiéLa Fédération républicaine face aux militaires : une évolution ambiguë Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Si les militaires ont été peu nombreux à s’engager dans la vie politique sous la Troisième République, ils ont davantage marqué les différents partis de droite que ceux du centre et de la gauche. Les deux-tiers des officiers généraux parlementaires appartiennent aux rangs modérés et conservateurs1. Cette proportion est plus élevée si l’on considère la place des militaires dans les appareils nationaux et surtout départementaux. Cet engagement prioritaire à droite répond apparemment à une volonté d’harmoniser vie professionnelle et action politique, autour de valeurs telles que l’ordre, la discipline, le patriotisme et le conservatisme. Il touche cependant de façon inégale les différents partis conservateurs : les militaires dominent les groupements nationalistes qui fleurissent au tournant du siècle, sont nombreux au sein de l’Action libérale populaire qui regroupe les ralliés, mais mettent du temps à pénétrer la Fédération républicaine, le parti des progressistes proches de Jules Méline. De plus, leur rôle au sein de ces différentes structures évolue selon la conjoncture politique, tout en obéissant à des impératifs particuliers : tout au long de la période, subsiste la spécificité de l’engagement politique des militaires. Il convient donc de s’interroger sur le sens de ces évolutions, en définissant notamment les fonctions que donnent ces différents partis à l’action politique des officiers.

    L’Action libérale populaire et les militaires : un lien privilégié

    2A la fin du xixe siècle, deux courants politiques drainent une majorité d’officiers démissionnaires ou en retraite. D’une part, les groupements nationalistes aiment mettre en avant, depuis la période boulangiste, des militaires célèbres. La carrière politique du général Mercier, élu sénateur de Loire-Inférieure grâce au soutien de toutes les fractions de l’opposition en janvier 1900, montre le renouveau de cette tendance dû à l’Affaire Dreyfus, dont témoigne également la forte présence des militaires dans la Ligue de la patrie française, fondée en 18992. D’autre part, les vieux réseaux monarchistes et conservateurs s’appuient traditionnellement, dans certaines régions (l’Ouest, et surtout la Bretagne), sur la noblesse d’épée : l’élection de l’amiral de la Jaille comme sénateur de Loire-Inférieure, en janvier 1901, suggère le maintien résiduel de cette influence.

    3Fondée en 1901 par Jacques Piou pour amener les forces conservatrices à la République, l’Action libérale populaire puise une partie de son personnel dans ces deux viviers et accorde d’emblée une place importante aux militaires. Le parcours de l’amiral de Cuverville (1834-1912) illustre la rapidité du ralliement des officiers conservateurs, conscients de l’impasse dans laquelle se trouve la droite monarchiste. Élu sénateur du Finistère en 1901, ce notable catholique participe, la même année, à la fondation du Comité électoral de l’Action libérale, dont il dirige les services financiers : grâce à son intégration dans la vieille noblesse française, il apparaît qualifié pour collecter les ressources financières nécessaires à la mise sur pied de ce grand parti ; sa femme, présidente en 1906 de la Ligue des femmes françaises à Paris, le seconde dans cette tâche. Les anciens nationalistes, initialement concurrents du groupe de Piou, mettent davantage de temps à rejoindre celui-ci : préfet maritime de Toulon mis en disponibilité par Camille Pelletan pour son activité politique, l’amiral Bienaimé (1843-1930) milite longtemps au sein des groupes nationalistes parisiens, dont il est l’élu au Palais-Bourbon à partir de 1905, avant de se rapprocher de F Action libérale, peu avant les élections de 19103. Au cours de cette période, les frontières restent d’ailleurs floues entre militaires conservateurs, nationalistes et libéraux, car tous se rejoignent dans une dénonciation virulente de l’évolution de l’Armée et dans une exaltation du patriotisme. Cette communauté est d’ailleurs affichée : en août 1902, l’amiral de la Jaille et le général Mercier s’associent au colonel de Saint-Laurent, président du comité A.L.P. de la Sarthe, pour patronner le premier meeting tenu par Piou au nom de l’A.L.P. à Nantes4.

    4Grâce à ce double recrutement, mais aussi à l’intégration d’hommes sans passé politique, le parti de Piou accorde aux militaires une place prépondérante, surtout au cours des premières années. Lors du premier comité directeur du parti, en octobre 1902, trois des quatorze délégués représentant les comités de province sont des officiers5. Entre juin 1902 et juin 1903, lors de la première vague d’organisation du parti, 15 % des comités cantonaux et départementaux alors créés comptent dans leur bureau un militaire, dont la présence, le plus souvent au poste de président, répond à la fois à un impératif symbolique (le militaire apparaît comme le combattant national par excellence et comme une caution sociale) et aux qualités requises pour l’organisation : discipline, hiérarchie et disponibilité.

    5Le militaire est d’abord représenté comme un organisateur : pour les conservateurs de l’A.L.P., lui confier les premiers pas d’un comité est une garantie. Ainsi, en janvier 1903, le bulletin du parti met en avant l’organisation modèle que l’amiral Barrera a mise sur pied, « avec une ponctualité toute militaire », dans le département du Var, en collaboration avec deux officiers : le colonel Dutheil de la Rochère à Toulon et l’amiral Bellanger dans les cantons ruraux. Cette structure, complexe et hiérarchisée, inspirée du fonctionnement de l’armée6, a permis de recruter deux mille cinq-cents adhérents en quelques mois. D’autres militaires mènent également une organisation exemplaire, comme le général Parison à la tête du comité de Pont-à-Mousson dont le rayonnement rejaillit sur l’ensemble de la Meurthe-et-Moselle, le colonel Fauvel à Amiens7 ou le général Jacquey, député des Landes, qui coordonne l’action des libéraux dans tout le Sud-Ouest en s’appuyant sur un réseau fourni d’anciens officiers de sensibilité bonapartiste.

    6Les militaires intéressent également les hommes d’appareil par leur rayonnement social et mondain : leur présence est alors plus symbolique, et beaucoup se contentent d’une présidence d’honneur, comme l’amiral Alquier en Vendée dont le seul patronage permet de rassembler cinq mille personnes à Pouzauges en août 1903, au son de « Vive l’Amiral ! »8. Les officiers cumulent souvent leur engagement politique au sein de l’Action libérale avec une présence plus ancienne dans le tissu associatif local ou national : l’amiral de Cuverville est président d’honneur de la Ligue maritime française, président de la Ligue antimaçonnique, et il dirige également des sociétés mutualistes et catholiques en Bretagne9. Remplissant un rôle de représentation, les militaires apparaissent ainsi de façon privilégiée dans les grandes manifestations publiques : ils fournissent jusqu’à 15 % de la table d’honneur des banquets de clôture du congrès national du parti (en 1908)10 ; ils dominent les dîners mensuels mondains, multipliés à partir de 1912 par le bureau parisien de l’A.L.P., alors présidé par le général Kessler, ancien membre du Conseil supérieur de la Guerre. Ce sont les officiers généraux qui jouent ce rôle symbolique, en nombre significatif : entre 1902 et 1913, une trentaine de généraux et plus de huit amiraux ont soutenu le parti libéral de façon régulière.

    7Très présents dans la vie partisane, les militaires se font plus discrets lors des joutes électorales. S’ils investissent progressivement les assemblées locales (notamment les conseils généraux), une douzaine seulement porte les couleurs de l’A.L.P. lors des élections législatives. Cette faible participation décline d’ailleurs, dans un contexte politique pourtant favorable, à l’approche de la Grande guerre : en 1914, l’A.L.P présente seulement sept officiers déclarés contre quatorze en 1910 et neuf en 1902 et 1906, alors que d’autres partis (le Parti républicain démocratique notamment, mais aussi des radicaux) commencent à faire appel à des officiers. De fait, peu de militaires représentent l’A.L.P. au Palais Bourbon : à côté de l’ancien nationaliste Bienaimé et du général Jacquey, anciennement implanté dans les Landes, seuls le commandant Driant, le gendre de Boulanger élu député de Nancy en 1910 après une candidature malheureuse en Seine-et-Oise en 1906, et le colonel de Puineuf, élu en juillet 1914, incarnent un renouvellement de ce personnel. Les causes de cette distance des militaires par rapport à l’action parlementaire ne sont pas propres au milieu conservateur : l’âge élevé au moment de l’entrée dans la vie publique, les faibles perspectives de carrière, une répugnance naturelle à se livrer aux « parlottes parlementaires » l’emportent sur le goût du combat électoral qui, chez une minorité d’entre eux seulement, relaie l’emploi des armes11.

    8Peu attirés par la carrière parlementaire, les militaires de l’A.L.P. forment donc un groupe politique particulier, que caractérisent également une géographie et un discours spécifiques. Dans quatre régions, l’appareil du parti est dominé par des officiers. Dans le Var et les Alpes Maritimes (le colonel de Coubertin préside le comité niçois), le rayonnement de l’arsenal de Toulon et l’implantation de nombreux retraités expliquent une surreprésentation évidente. En Aquitaine, l’action centrale de quelques personnalités (le général Jacquey et le général Mottas d’Hestreux, ami d’enfance de Jacques Piou) justifie l’engagement, comme correspondants départementaux, de nombreux officiers : le colonel Ferret dans le Tarn, le général Clément à Agen, le général de Lestapis dans les Hautes-Pyrénées, le général de Laitre dans les Hautes Pyrénées. L’Est de la France (la Meurthe-et-Moselle12 et la Meuse, dont l’actif général Maitrot dirige le comité à partir de 1912) apparaît, par son caractère symbolique, comme un lieu privilégié d’intégration politique des officiers. Dans la région parisienne, leur domination s’effectue progressivement ; elle commence dans le 7e arrondissement, dont le commandant Labouré et le général Chalendar dirigent le comité, pour s’étendre à l’ensemble du département de la Seine, à partir de 1912 : le général Kessler dirige alors une équipe de responsables, où les officiers (qui représentent 15 % de l’effectif) jouent un rôle déterminant. Ces régions ne coïncident pas forcément avec les bastions conservateurs : ainsi, les militaires ne sont pas particulièrement nombreux dans les comités libéraux de l’Ouest et de la Bretagne, à quelques exceptions locales près (Lorient, Saint-Malo).

    9Mis en avant pour leurs fonctions passées, les militaires sont avant tout considérés comme des spécialistes de l’Armée. On fait d’ailleurs massivement appel à eux lors des deux grandes crises des années 1904-1914 : l’affaire des fiches et les Trois ans. La première permet à l’A.L.P. de se faire le porte-drapeau de la Grande muette : ainsi, en janvier 1905, le colonel de Coubertin écrit au Ministre Maurice Berteaux pour protester, au nom de son parti et surtout de ses camarades, contre l’emprise de la franc-maçonnerie sur l’armée13. A cette époque, les militaires du parti, dont certains ont été touchés par la délation et ont rompu avec les obligations de réserve imposées à la « grande muette »14, se situent à la tête du combat antimaçonnique15 et appartiennent à la fraction extrémiste du parti libéral, y compris sur les questions constitutionnelles : Cuverville en appelle ainsi à l’abrogation du suffrage universel16. Huit ans plus tard, ils apparaissent davantage comme des spécialistes, qui traitent des questions de défense sans zèle polémique, à quelques incidents près : ainsi, en avril 1912, le général Maitrot reçoit un blâme du ministre de la Guerre pour avoir publié, dans le Correspondant, des renseignements secrets dont il avait eu connaissance comme chef d’état-major au sixième corps17. L’époque du nationalisme s’est éloignée, et la position des officiers au sein du parti s’est normalisée. Cette normalisation a été facilitée par la motivation de l’engagement politique des militaires, qui ne diffère guère de celle de leurs compagnons : c’est avant tout pour la défense des libertés religieuses qu’ils militent dans le parti de Jacques Piou.

    10En 1914, l’Action libérale a déjà largement commencé son déclin, qui se précipite au cours de la législature du Bloc national : si elle ne meurt officiellement qu’avec son fondateur, en 1932, elle a pratiquement cessé d’exister en 1924. Elle apparaît ainsi comme moins attractive, notamment pour les militaires dont la présence reflue avant même la Grande guerre. Des militaires qui, tout en conservant une sympathie affichée pour le vieux parti libéral18, rejoignent ses rivaux du Centre droit et surtout de la droite progressiste.

    La Fédération républicaine face aux militaires : une évolution ambiguë

    11Contrairement aux libéraux de Jacques Piou, les progressistes qui se rassemblent en novembre 1903 autour d’Eugène Motte pour fonder la Fédération républicaine refusent tout appel aux militaires. Aucun officier ne figure parmi les soixante-trois fondateurs du parti. Seul le général Langlois figure parmi les parlementaires progressistes avant la Grande guerre ; mais cet académicien, directeur de l’École supérieure de Guerre, reste à l’écart de la vie de parti, et tient d’ailleurs sur l’armée des propos aussi virulents que ceux de ses camarades de l’A.L.P. : n’affirme-t-il pas que, depuis 1902, « nous sommes sous le régime de l’arbitraire le plus éhonté »19 ? Cette quasi-absence constitue une rupture avec la période antérieure, tant les progressistes, au pouvoir au début des années 1890 ou dans l’opposition à partir de 1898-1899 ont tissé avec F Armée des relations privilégiées. Au cours des élections législatives de 1898 et de 1902, d’éminents officiers ont porté les couleurs progressistes : le vice-amiral Rieunier, ancien ministre de la Marine, député de Rochefort à partir de 189820, les généraux Zédé et Voisin, anciens gouverneurs militaires de Lyon, dans le Sud-Est, le colonel Bougon, membre du Conseil supérieur de guerre qui a acquitté Esterhazy, dans l’Oise... Leur mise à l’écart répond d’abord à un impératif politique. La Fédération républicaine affirme fermement son identité républicaine et entend camper au centre de la vie politique ; elle refuse publiquement tout antécédent antidreyfusard et tout contact avec les nationalistes. Dans cette perspective, les officiers apparaissent comme des personnes indésirables, d’autant qu’ils appartiennent aux réseaux tissés par les vieux patrons du parti progressiste (Renault-Morlière et surtout Jules Méline), que les nouveaux dirigeants du parti entendent mettre à l’écart. Jusqu’à la Grande guerre, la Fédération ne fait donc qu’exceptionnellement appel à eux : même lors du débat sur la loi de trois ans, ce sont des parlementaires (le sénateur Reymond et le député Lannes de Montebello) qui se proclament spécialistes des affaires militaires.

    12La Fédération républicaine s’ouvre aux militaires, dès le lendemain de la Grande guerre. Les consultations électorales des années 1919-1924, au cours desquelles le Bloc national présente un certain nombre d’anciens combattants et de militaires de carrière, permettent l’élection de nombreux officiers, qui rejoignent ensuite le vieux parti progressiste : les généraux Hirschauer, Stuhl et Bourgeois, sénateurs des départements de l’Est, le général de Saint Just, député du Pas-de-Calais et héritier d’une famille de soldats légitimistes, Alexis Callies (député de la Haute-Savoie) et Pierre de Haut (député du Jura), tous deux polytechniciens et anciens officiers d’artillerie, incarnent cette modification du recrutement parlementaire du parti, qui s’atténue par la suite : aux élections de 1936, sur cent cinquante-quatre candidats revendiqués par la F.R., cinq seulement sont d’anciens militaires. Le changement apparaît plus nettement dans les instances dirigeantes du parti, qui laissent une place croissante aux officiers : en 1935, treize d’entre eux siégent au Conseil national de la F.R., contre six en 1929 et onze en 1933.

    13Ce mouvement de fond tient d’abord à la conjoncture politique. La Fédération s’est d’abord réorganisée au sein du Bloc national, qui entend poursuivre l’Union sacrée en temps de paix en faisant notamment appel à un nouveau personnel politique, issu de la « génération du feu », et en donnant aux officiers de la grande guerre leur place dans la nation21 : l’héroïsme des poilus efface le souvenir des luttes dreyfusardes, et l’engagement politique du soldat est valorisé à un tel point que bon nombre de civils, simples combattants de guerre, mettent désormais en avant leurs titres acquis au front22. Surtout, le vieux parti progressiste est présidé à partir de 1925 par Louis Marin, qui entend faire de la fermeté face à l’Allemagne son thème identitaire, et des questions de politique étrangère et de défense une priorité : c’est d’ailleurs en 1925 qu’un militaire, le général Hirschauer, accède pour la première fois à la vice-présidence du parti. De fait, l’hebdomadaire du parti, La Nation, consacre une large place aux chroniques militaires, rédigées par des collaborateurs qualifiés : le général Pouydraguin, le colonel Tisseyre, le commandant Émile Marin (oncle du président du parti), et, tout au long des années 1930, le commandant Sorb, pseudonyme utilisé par le colonel Jules-Auguste Cornier, qui gravite depuis l’affaire des fiches dans l’orbite progressiste23 et qui défend des thèses très proches de celles de Louis Marin. Les thèmes développés dans ces chroniques sont repris chaque année dans le rapport sur la défense, présenté au congrès de la Fédération républicaine par un militaire, parlementaire (Guy de Montjou, Hirschauer, des Isnards) ou non (les amiraux Fatou et de Faramond, les généraux Tilho, Peting de Vaulgrenant et Niessel). C’est donc comme spécialistes de questions jugées prioritaires que les officiers sont d’abord sollicités.

    14La promotion des militaires au sein de l’appareil de la F.R. a été rendue possible par les modifications du jeu politique à droite, au lendemain de la guerre. Le parti progressiste achève alors un glissement à droite entamé dès sa fondation et occupe désormais l’espace politique laissé vacant par la disparition de l’A.L.P. ; dans de nombreuses régions, il se pose même en héritier de celle-ci. Ainsi, il intègre et promeut d’anciens officiers qui ont commencé leur engagement plus à droite. L’itinéraire de Maurice Hervey, un temps pressenti pour succéder à Auguste Isaac au poste de président en 1925, est exemplaire : ce polytechnicien, élève de l’École de Guerre, capitaine démissionnaire de l’armée en 1890 après douze années de service dans l’artillerie24, a milité d’abord à la Ligue de la Patrie Française, puis à l’A.L.P. dans l’Eure, avant de rejoindre la F.R. dont il devient vice-président après la guerre.

    15De fait, les militaires occupent la même place dans le parti de Marin que dans celui de Piou avant-guerre. Ils exercent d’abord des fonctions d’organisation, dans l’appareil central notamment : de 1925 à 1929, la direction du secrétariat administratif de la F.R. de France est confiée au commandant Fournier ; en juin 1937, le lieutenant-colonel Rey, ancien conseiller technique à la Haute commission interalliée dans les territoires rhénans, accède au secrétariat général de la fédération de la Seine dont il doit relancer l’activité. Ils dirigent également certains comités locaux, dont l’action est jugée exemplaire : dans les Alpes Maritimes, le colonel Thierry parvient, entre 1934 et 1937, à faire de la F.R. un parti de militants et de combat, en s’inspirant ouvertement des méthodes des Croix-de-feu. Cependant, les militaires sont moins présents au sein de la F.R. que dans l’A.L.P. avant guerre ; ils ne peuvent constituer un réseau influent à l’intérieur du parti. Ils ne dominent pas des régions entières, et la géographie de leur implantation s’est rétrécie par rapport à celle d’avant 1914 au sein du parti de Piou. Certes, ils continuent à dominer le comité du Var, présidé par le commandant Guyon, et les Alpes Maritimes, où ils dirigent les comités locaux les plus importants (Antibes notamment), sous la présidence d’honneur du général Bourgeois ; de même, ils renforcent progressivement leur influence dans le département de la Seine, en restant en contact avec leurs camarades ligueurs, à l’instar du colonel des Isnards, vice-président du Conseil municipal de Paris en 1933 puis député de la Seine en 1936. Mais ils ne sont plus présents que dans trois départements du Sud-Ouest aquitain (la Dordogne, la Haute-Garonne et les Basses-Pyrénées) ; de plus, leur absence paradoxale dans les comités de la France de l’Est n’est qu’imparfaitement compensée par l’influence des députés militaires Callies et Bartholoni sur les comités savoyards et par la présence d’officiers à la tête de certains comités normands, dans l’Eure et en Seine-Inférieure. Tout en ayant largement ouvert ses comités aux militaires, la F.R. n’a pas réussi à en intégrer autant que son ancien rival libéral.

    16Deux facteurs expliquent ce demi-échec. D’une part, une partie des dirigeants modérés ne souhaite pas confier à des militaires des responsabilités locales importantes : vivant en cercle fermé, ils ne jouissent pas de relation avec l’ensemble de la société et ne peuvent attirer de nouveaux adhérents25 ; insuffisamment rompus à la diplomatie politique26, il tiennent un discours radical qui reste longtemps marginal au sein du vieux parti modéré. Témoin en est l’attitude des dirigeants militaires du comité de la Dordogne : en 1926, le commandant Comte fait voter au bureau départemental une motion invitant les parlementaires du parti à « se désolidariser d’avec le grand homme incomplet qu’est M. Poincaré »27 ; en janvier 1934, le colonel Labrue, président du comité, quitte la F.R. qu’il juge trop compromise avec un système politique corrompu : « Pour remédier à une situation que je considère comme très grave, il faudrait d’autres méthodes et peut-être d’autres hommes », écrit-il28. L’antiparlementarisme, l’éloge d’un régime fondé sur la discipline et l’autorité, le nationalisme, défendus par ces hommes, ne gagnent en profondeur le parti de Marin qu’après février 1934 : c’est d’ailleurs à partir de cette date que celui-ci met davantage en avant ses adhérents militaires au cours des manifestations publiques. D’autre part, comme l’A.L.P. avant guerre, la F.R. doit compter avec la concurrence de groupements politiques dont la doctrine et le mode d’action attirent davantage certains officiers : le dynamisme des ligues, puis du Parti social français, gêne son rayonnement sur ce milieu. Ainsi, en 1937, le colonel de Prémare, qui dirigeait le comité d’Eu (en Seine-Inférieure) depuis l’époque du Cartel, rejoint le mouvement de La Rocque, plus apte selon lui à lutter contre la République maçonnique et parlementaire29. Dans le Var, le colonel Thierry adopte la même attitude.

    17Le parcours des généraux Hirschauer et Niessel souligne la complexité des liens entre les militaires et le vieux parti modéré. Au lendemain de la guerre, Hirschauer (1857-1943) semble promis à une carrière politique rapide. Ce grand commandant de guerre, ami d’enfance de Maurice Hervey, a été élu sénateur dès janvier 1920, jouit d’une notoriété nationale remarquable, due notamment à ses nombreux articles de presse, et entretient de bonnes relations avec l’A.L.P. et les ligues : il préside fréquemment les réunions parisiennes de la Ligue des patriotes. De plus, en dépit d’une appréciation pessimiste de l’évolution politique30, il tient un discours modéré, fidèle aux positions traditionnelles de la F.R. : il refusera, en juillet 1940, de voter les pleins pouvoirs à Pétain. Cependant, après avoir été constamment mis en avant au cours des années 1920, notamment dans l’hebdomadaire La Nation, il semble peu à peu marginalisé par ses amis et il ne déploie plus une activité à la mesure de son rôle de vice-président : Marin le juge probablement trop indépendant et rebelle à la discipline de parti qu’il souhaite instaurer après les élections de 1928. Le malaise latent entre l’homme et son parti éclate à l’été 1932, lorsque la création du groupe parlementaire Pernot entraîne une crise parmi les modérés. Dans un premier temps, Hirschauer démissionne de ses responsabilités partisanes, pour protester contre la direction intransigeante de Louis Marin et pour œuvrer en faveur « d’une politique d’union des partis d’ordre »31. Puis, il revient sur sa décision, à la demande des dirigeants du parti, inquiets de voir partir un « gardien de la frontière de l’Est » qui reste une vraie caution morale32 ; mais il reste désormais très discret dans les manifestations du parti.

    18Albert Niessel (1866-1955) a suivi un autre itinéraire. Ce général brillant, disciple de Lyautey qu’il a servi au Maroc entre 1912 et 1914, chargé de mission en Russie en 191733, inspecteur général de l’aéronautique, membre du Conseil supérieur de la guerre, a d’abord constitué un important réseau de sociabilité militaire, comme fondateur (en 1931) et président de la Fédération nationale des amicales de sous-officiers de réserve. Militant anticommuniste, membre en 1934 de l’Entente internationale contre la IIIe Internationale, il a tissé des relations amicales avec des dirigeants des ligues. C’est donc formé par plusieurs années de militantisme qu’il rejoint la F.R. en 1935, au moment où celle-ci recherche un officier politique, et non plus seulement spécialiste, pour contrer les initiatives de La Rocque. Mais Niessel apparaît davantage comme un homme de relations que comme un militant d’appareil. Peu présent dans les réunions du parti, il est chargé, en octobre 1938, d’un combat symbolique : il se présente à une élection législative partielle à Paris contre Charles Vallin, secrétaire général du P.S.F. ; il mène ce combat sans véritable conviction ni dynamisme militant, en n’évoquant que des questions militaires34 – et il est logiquement battu. Cet échec sonne le glas de son éphémère carrière politique35 ; Niessel continue à œuvrer pour une Révolution conservatrice, que Vichy incarnera à ses yeux36, comme dirigeant d’association et comme journaliste. Il préfère ces fonctions à celle d’homme politique, même s’il propose ses services à Marin, en 1945, pour reconstruire le vieux parti modéré – une proposition sans suites37. Les ascensions inachevées d’Hirschauer et de Niessel montrent bien que la F.R. n’a pas su trouver l’officier idéal, qui lui serve à la fois d’intermédiaire auprès du monde militaire et de symbole auprès de l’opinion.

    19Si l’engagement des militaires dans les partis conservateurs paraît naturel sous la Troisième République, la définition de leur fonction a toujours posé problème. Les anciens officiers ne sont pas des militants ordinaires, et ils ne peuvent pas suivre une carrière politique comparable à celle des civils. De fait, ils ont souvent joué un rôle peu décisif – celui de spécialiste des questions militaires ou de l’organisation partisane. Leur progression dans les appareils a également été gênée par une méfiance réciproque, des militaires envers des parlementaires à l’action trop stérile, des hommes politiques envers des militaires toujours suspectés de césarisme, d’antidreyfusisme ou d’antiparlementarisme. Ce dernier point, peu décisif en ce qui concerne l’ Action libérale populaire de Jacques Piou, a reporté l’intégration des officiers dans la Fédération républicaine au lendemain de la Première Guerre mondiale et a ensuite freiné leurs ambitions. Ainsi, les partis conservateurs n’ont jamais réussi à apparaître comme les porte-parole de l’armée, et ont laissé ce rôle à des groupements, politiques et associatifs, souvent situés à leur droite.

    Notes de bas de page

    1 Cf. Gilles Le Béguec, « Amiraux et généraux au Parlement, 1899-1940 ».

    2 Dans ses statuts, la Ligue met en avant ses liens privilégiés avec l’armée. Elle se donne pour but de « fortifier (…) le respect de l’armée nationale », et prévoit qu’en cas de dissolution, l’actif de l’association sera versé à des œuvres militaires (article 16).

    3 C’est à partir de 1907 que l’amiral Bienaimé prend ses distances avec les députés nationalistes : cf. rapport de police du 5 octobre 1907, A.N., F7 12719.

    4 Cf. L’Action libérale, 27 août 1902

    5 Cf. rapport de la sûreté générale, octobre 1902, dossier A.L.P., f. 9, A.N., F7 12878.

    6 Cf. Action libérale, 21 janvier 1903. Le département est divisé en deux circonscriptions. Dans celle de Toulon, le parti comprend un bureau directeur de sept membres, un Comité directeur de vint-quatre membres, qui délègue ses pouvoirs à quatre chefs de canton ; ceux-ci coordonnent l’action des délégués de section (la section correspondant à un bureau de vote), lesquels dirigent les « dizainiers » (chefs d’un groupe de dix adhérents). Dans la circonscription des cantons ruraux, se met en place une hiérarchie plus classique de délégués de commune, de canton et de région. Cette organisation révèle l’ambition de l’Action libérale : être un parti de masse et de combat.

    7 Cf. nécrologie de Fauvel, dans L’Action libérale, 15 février 1913.

    8 Selon le compte rendu qui en est donné par L’Action libérale, 3 septembre 1903.

    9 Il préside notamment la Ligue des libertés bretonnes.

    10 Cf. rapport du 10 décembre 1908 (A.N., F7 12719) : sur trente personnalités citées, figurent l’amiral de Cuverville, les généraux Jacquey et de Chalendar, les colonels de la Rochère et de Saint-Laurent.

    11 Cette idée est exprimée par un conseiller général de la Somme, le commandant Delasalle (cf. L’Action libérale, 15 novembre 1913) : « Si je vaux quelque chose, c’est parce que j’ai tenu à conserver en moi les qualités du soldat, la fidélité au drapeau, la passion de l’offensive, la volonté de ne jamais reculer et de ne jamais désespérer ».

    12 Dans ce département, la participation des militaires à la vie de parti est circonscrite à l’arrondissement de Nancy, dans lequel cinq comités sur seize comprennent au moins un militaire (dont quatre au poste de président) : cf. C. Dubas, L’A.L.P. en Meurthe-et-Moselle de 1902 à 1914, mémoire de maîtrise dirigé par G. Le Béguec, Université Nancy-II, 1995, 124 p.

    13 Publiée par L’Action libérale, 12 janvier 1905 : « Si aucun officier présent dans le rang ne peut élever la voix pour dire à M. Berteaux ce que l’armée pense, qu’il soit permis à l’un de ceux à qui de tristes circonstances ont rendu la liberté de parole de protester pour ceux que la discipline rend muets ». Exemplaire de cette argumentation : l’ouvrage du commandant Driant, Vers un nouveau Sedan, Paris, Juven, 1906, 158 p (cf. p. 6-8).

    14 Si l’on se réfère aux listes de Guyot de Villeneuve (in Les dossiers du Grand Orient. La délation maçonnique dans l’armée, Paris, Ligue de Défense nationale contre la Franc-maçonnerie, s.d., 48 p.), quatre futurs dirigeants de l’A.L.P. figurent dans ces fiches : le général Roget, le commandant Driant, les colonels Hugot-Derville et Maitrot. Notons également que le général de Chalendar, à la veille de sa mise en retraite, a prononcé devant ses officiers un discours antigouvernemental, qu’il a ensuite communiqué à la presse (cf. note du général de la 7e D.I. au ministre de la Guerre, dossier personnel général Chalendar, S.H.A.T., GB/3/730).

    15 L’A.L.P. délègue ainsi deux de ses membres militaires (le général Jeannerod et le commandant Driant), pour assister Copin-Albancelli lors d’une « conférence antimaçonnique » en 1906 (L’Action libérale, 22 mars 1906).

    16 Dans L’Action libérale, 26 février 1902.

    17 Cf. dossier personnel Maitrot, S.H.A.T., GB/3/1115.

    18 Ainsi, lorsque Piou entend, en 1929, relancer l’A.L.P. en la transformant en une Ligue des droits de la nation, il peut compter, à Paris, sur le soutien des généraux Hirschauer et Poilloüe de Saint Mars, du colonel de Puineuf et du commandant de la Baume (cf. Action libérale populaire, 15 mars 1929) et, en province, sur celui de quelques militants qui sont souvent d’anciens officiers (le commandant Monge dans le Rhône).

    19 Dans un article paru dans La Revue bleue, 25 mars 1905, et repris d’ailleurs dans un ouvrage, préfacé par le général Mercier, du commandant Munier, La Nation, l’Armée et la guerre, Paris, Nouvelle librairie nationale, 1907, 144 p.

    20 Sur l’intéressante figure du vice-amiral Rieunier, cf. la brochure Le Vice amiral Rieunier, éditée par L’Avenir républicain, janvier 1902, 7 p.

    21 Cf. l’article caractéristique, paru dans La Nation, 23 janvier 1926, p. 63 : « Militaires et civils – L’officier dans la nation », qui se conclut par la phrase : « Les officiers de la grande guerre ne supporteront pas l’ostracisme qui trop souvent fit plier leurs anciens. »

    22 Un seul exemple : le parlementaire de l’Eure, Prosper Josse, associé d’agent de change, se fait appeler « lieutenant-colonel » durant tout l’entre-deux-guerres – alors qu’il a commencé sa carrière politique en 1912.

    23 Voir notamment son premier ouvrage, Entre l’Allemagne et l’Angleterre, Paris, Chapelot, 1906, 371 p, dont le ton contraste avec celui, contemporain, du commandant Driant : Sorb fait l’éloge de l’œuvre extérieure et coloniale accomplie par la République. Le dernier ouvrage de ce publiciste (Hitler, caporal stratège, Éditions de la Nouvelle France, Paris, 1945, 257 p.) souligne son non-conformisme, puisqu’il prône, pour des raisons tactiques, l’alliance de la France avec l’U.R.S.S.

    24 Un portrait de Maurice Hervey, paru dans La Nation le 28 mai 1927, insiste beaucoup sur ce passé militaire, qui revêt une valeur symbolique tout comme celui du ministre François-Marsal (La Nation, 13 août 1927).

    25 Symptomatique de ce sentiment est la lettre d’Alicot à J. Guiter (17 mars 1937, A.N., 317 AP 72). Envoyé dans les Alpes Maritimes pour y étudier la situation de la F.R., Alicot estime que, pour réorganiser le parti, « quelque haut fonctionnaire retraité conviendrait mieux encore qu’un militaire, parfois difficile à adapter ».

    26 Un seul exemple de cette attitude propre aux militaires : les débuts parlementaires du général Victor de Saint-Just qui, le 9 juillet 1924 au moment du débat sur l’amnistie, fait mine de mettre Malvy en joue et est, par conséquent, censuré.

    27 La motion est communiquée à J. Guiter par le commandant Comte, 17 août 1926, A.N., 317 AP 93.

    28 Dans une lettre à J. Guiter, 2 janvier 1934, A.N., 317 AP 79.

    29 Cf. lettre de Prémare à Marin, 11 mars 1937, A.N., 317 AP 80.

    30 Dont témoigne une lettre à Lyautey, 29 janvier 1926, A.N., 475 AP 284 : « Le manque d’autorité, l’instabilité ministérielle, la crise de confiance avec ses conséquences financières, la folle agitation d’un Parlement qui parle, parle, au lieu d’agir », tous ces éléments donnent « un bouillon de culture, préparé à souhait pour le développement des plus fâcheux microbes ».

    31 Selon sa lettre à Jean Guiter, secrétaire général de la F.R., 22 octobre 1932, A.N., 317 AP 86.

    32 Cf. lettre de Louis Marin au général Hirschauer, 2 août 1932, A.N., 317 AP 93.

    33 Il a tiré de chacune de ces expériences un ouvrage : Deux ans au Maroc avec Lyautey, (392 pages manuscrites, fonds Niessel, S.H.A.T., 1K118-5) ; Le triomphe des Bolcheviks et la paix de Brest-Litovsk. Souvenirs 1917-1918, Paris, Plon, 1940, 382 p.

    34 Voir notamment l’ultime article consacré à sa candidature par Le jour. L’Écho de Paris, 30 octobre 1938.

    35 L’élection de novembre 1938 a été une parenthèse. Ainsi, en janvier 1939, Niessel refuse de présider une conférence organisée pour le P.R.N.S., estimant que ses responsabilités associatives lui interdisent toute action politique (cf. lettre de Paul Wirth à Niessel, 6 janvier 1939, S.H.A.T., papiers Niessel. 1K118-12).

    36 En 1940, Niessel apparaît comme un maréchaliste et collaborationniste convaincu : cf. notes pour des discours, 1940, papiers Niessel, S.H.A.T., 1K118-12.

    37 Cf. lettre de Niessel à Marin, 20 avril 1945, A.N., 317 AP 82.

    Auteur

    • Mathias Bernard

      Ancien élève de l’École Normale Supérieure, maître de conférences à l’université Blaise Pascal – Clermont-Ferrand-II. Ses travaux portent sur les partis modérés et le personnel politique sous la Troisième République. Il a publié récemment La dérive des modérés. La fédération républicaine du Rhône sous la troisième république, L’Harmattan, 1998.

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    1 Cf. Gilles Le Béguec, « Amiraux et généraux au Parlement, 1899-1940 ».

    2 Dans ses statuts, la Ligue met en avant ses liens privilégiés avec l’armée. Elle se donne pour but de « fortifier (…) le respect de l’armée nationale », et prévoit qu’en cas de dissolution, l’actif de l’association sera versé à des œuvres militaires (article 16).

    3 C’est à partir de 1907 que l’amiral Bienaimé prend ses distances avec les députés nationalistes : cf. rapport de police du 5 octobre 1907, A.N., F7 12719.

    4 Cf. L’Action libérale, 27 août 1902

    5 Cf. rapport de la sûreté générale, octobre 1902, dossier A.L.P., f. 9, A.N., F7 12878.

    6 Cf. Action libérale, 21 janvier 1903. Le département est divisé en deux circonscriptions. Dans celle de Toulon, le parti comprend un bureau directeur de sept membres, un Comité directeur de vint-quatre membres, qui délègue ses pouvoirs à quatre chefs de canton ; ceux-ci coordonnent l’action des délégués de section (la section correspondant à un bureau de vote), lesquels dirigent les « dizainiers » (chefs d’un groupe de dix adhérents). Dans la circonscription des cantons ruraux, se met en place une hiérarchie plus classique de délégués de commune, de canton et de région. Cette organisation révèle l’ambition de l’Action libérale : être un parti de masse et de combat.

    7 Cf. nécrologie de Fauvel, dans L’Action libérale, 15 février 1913.

    8 Selon le compte rendu qui en est donné par L’Action libérale, 3 septembre 1903.

    9 Il préside notamment la Ligue des libertés bretonnes.

    10 Cf. rapport du 10 décembre 1908 (A.N., F7 12719) : sur trente personnalités citées, figurent l’amiral de Cuverville, les généraux Jacquey et de Chalendar, les colonels de la Rochère et de Saint-Laurent.

    11 Cette idée est exprimée par un conseiller général de la Somme, le commandant Delasalle (cf. L’Action libérale, 15 novembre 1913) : « Si je vaux quelque chose, c’est parce que j’ai tenu à conserver en moi les qualités du soldat, la fidélité au drapeau, la passion de l’offensive, la volonté de ne jamais reculer et de ne jamais désespérer ».

    12 Dans ce département, la participation des militaires à la vie de parti est circonscrite à l’arrondissement de Nancy, dans lequel cinq comités sur seize comprennent au moins un militaire (dont quatre au poste de président) : cf. C. Dubas, L’A.L.P. en Meurthe-et-Moselle de 1902 à 1914, mémoire de maîtrise dirigé par G. Le Béguec, Université Nancy-II, 1995, 124 p.

    13 Publiée par L’Action libérale, 12 janvier 1905 : « Si aucun officier présent dans le rang ne peut élever la voix pour dire à M. Berteaux ce que l’armée pense, qu’il soit permis à l’un de ceux à qui de tristes circonstances ont rendu la liberté de parole de protester pour ceux que la discipline rend muets ». Exemplaire de cette argumentation : l’ouvrage du commandant Driant, Vers un nouveau Sedan, Paris, Juven, 1906, 158 p (cf. p. 6-8).

    14 Si l’on se réfère aux listes de Guyot de Villeneuve (in Les dossiers du Grand Orient. La délation maçonnique dans l’armée, Paris, Ligue de Défense nationale contre la Franc-maçonnerie, s.d., 48 p.), quatre futurs dirigeants de l’A.L.P. figurent dans ces fiches : le général Roget, le commandant Driant, les colonels Hugot-Derville et Maitrot. Notons également que le général de Chalendar, à la veille de sa mise en retraite, a prononcé devant ses officiers un discours antigouvernemental, qu’il a ensuite communiqué à la presse (cf. note du général de la 7e D.I. au ministre de la Guerre, dossier personnel général Chalendar, S.H.A.T., GB/3/730).

    15 L’A.L.P. délègue ainsi deux de ses membres militaires (le général Jeannerod et le commandant Driant), pour assister Copin-Albancelli lors d’une « conférence antimaçonnique » en 1906 (L’Action libérale, 22 mars 1906).

    16 Dans L’Action libérale, 26 février 1902.

    17 Cf. dossier personnel Maitrot, S.H.A.T., GB/3/1115.

    18 Ainsi, lorsque Piou entend, en 1929, relancer l’A.L.P. en la transformant en une Ligue des droits de la nation, il peut compter, à Paris, sur le soutien des généraux Hirschauer et Poilloüe de Saint Mars, du colonel de Puineuf et du commandant de la Baume (cf. Action libérale populaire, 15 mars 1929) et, en province, sur celui de quelques militants qui sont souvent d’anciens officiers (le commandant Monge dans le Rhône).

    19 Dans un article paru dans La Revue bleue, 25 mars 1905, et repris d’ailleurs dans un ouvrage, préfacé par le général Mercier, du commandant Munier, La Nation, l’Armée et la guerre, Paris, Nouvelle librairie nationale, 1907, 144 p.

    20 Sur l’intéressante figure du vice-amiral Rieunier, cf. la brochure Le Vice amiral Rieunier, éditée par L’Avenir républicain, janvier 1902, 7 p.

    21 Cf. l’article caractéristique, paru dans La Nation, 23 janvier 1926, p. 63 : « Militaires et civils – L’officier dans la nation », qui se conclut par la phrase : « Les officiers de la grande guerre ne supporteront pas l’ostracisme qui trop souvent fit plier leurs anciens. »

    22 Un seul exemple : le parlementaire de l’Eure, Prosper Josse, associé d’agent de change, se fait appeler « lieutenant-colonel » durant tout l’entre-deux-guerres – alors qu’il a commencé sa carrière politique en 1912.

    23 Voir notamment son premier ouvrage, Entre l’Allemagne et l’Angleterre, Paris, Chapelot, 1906, 371 p, dont le ton contraste avec celui, contemporain, du commandant Driant : Sorb fait l’éloge de l’œuvre extérieure et coloniale accomplie par la République. Le dernier ouvrage de ce publiciste (Hitler, caporal stratège, Éditions de la Nouvelle France, Paris, 1945, 257 p.) souligne son non-conformisme, puisqu’il prône, pour des raisons tactiques, l’alliance de la France avec l’U.R.S.S.

    24 Un portrait de Maurice Hervey, paru dans La Nation le 28 mai 1927, insiste beaucoup sur ce passé militaire, qui revêt une valeur symbolique tout comme celui du ministre François-Marsal (La Nation, 13 août 1927).

    25 Symptomatique de ce sentiment est la lettre d’Alicot à J. Guiter (17 mars 1937, A.N., 317 AP 72). Envoyé dans les Alpes Maritimes pour y étudier la situation de la F.R., Alicot estime que, pour réorganiser le parti, « quelque haut fonctionnaire retraité conviendrait mieux encore qu’un militaire, parfois difficile à adapter ».

    26 Un seul exemple de cette attitude propre aux militaires : les débuts parlementaires du général Victor de Saint-Just qui, le 9 juillet 1924 au moment du débat sur l’amnistie, fait mine de mettre Malvy en joue et est, par conséquent, censuré.

    27 La motion est communiquée à J. Guiter par le commandant Comte, 17 août 1926, A.N., 317 AP 93.

    28 Dans une lettre à J. Guiter, 2 janvier 1934, A.N., 317 AP 79.

    29 Cf. lettre de Prémare à Marin, 11 mars 1937, A.N., 317 AP 80.

    30 Dont témoigne une lettre à Lyautey, 29 janvier 1926, A.N., 475 AP 284 : « Le manque d’autorité, l’instabilité ministérielle, la crise de confiance avec ses conséquences financières, la folle agitation d’un Parlement qui parle, parle, au lieu d’agir », tous ces éléments donnent « un bouillon de culture, préparé à souhait pour le développement des plus fâcheux microbes ».

    31 Selon sa lettre à Jean Guiter, secrétaire général de la F.R., 22 octobre 1932, A.N., 317 AP 86.

    32 Cf. lettre de Louis Marin au général Hirschauer, 2 août 1932, A.N., 317 AP 93.

    33 Il a tiré de chacune de ces expériences un ouvrage : Deux ans au Maroc avec Lyautey, (392 pages manuscrites, fonds Niessel, S.H.A.T., 1K118-5) ; Le triomphe des Bolcheviks et la paix de Brest-Litovsk. Souvenirs 1917-1918, Paris, Plon, 1940, 382 p.

    34 Voir notamment l’ultime article consacré à sa candidature par Le jour. L’Écho de Paris, 30 octobre 1938.

    35 L’élection de novembre 1938 a été une parenthèse. Ainsi, en janvier 1939, Niessel refuse de présider une conférence organisée pour le P.R.N.S., estimant que ses responsabilités associatives lui interdisent toute action politique (cf. lettre de Paul Wirth à Niessel, 6 janvier 1939, S.H.A.T., papiers Niessel. 1K118-12).

    36 En 1940, Niessel apparaît comme un maréchaliste et collaborationniste convaincu : cf. notes pour des discours, 1940, papiers Niessel, S.H.A.T., 1K118-12.

    37 Cf. lettre de Niessel à Marin, 20 avril 1945, A.N., 317 AP 82.

    Militaires en République, 1870-1962

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    Ce livre est cité par

    • (2021) Le putsch d’Alger. DOI: 10.3917/oj.vaiss.2021.01.0309
    • (2018) Histoire militaire de la France. DOI: 10.3917/perri.drevi.2018.01.0699
    • (2022) Le général Gouraud. DOI: 10.3917/perri.andur.2022.01.0465
    • (2017) Les Français en guerres. DOI: 10.3917/perri.coche.2017.01.0497
    • (2016) Joffre. DOI: 10.3917/perri.porte.2016.01.0355
    • (2003) De l'Indochine à l'Algérie. DOI: 10.3917/dec.bance.2003.01.0329
    • (2018) Pétain. DOI: 10.3917/perri.verge.2018.01.1245
    • Hautreux, François-Xavier. (2013) La guerre d'Algérie des Harkis. DOI: 10.3917/perri.hautr.2013.01.0445
    • Jackson, Peter. (2000) Naval policy and national strategy in France, 1933–1937. Journal of Strategic Studies, 23. DOI: 10.1080/01402390008437815
    • Boulègue, Jean. (2003) L'officier dans la société française : l'héritage de la Troisième République. Revue française de sociologie, Vol. 44. DOI: 10.3917/rfs.444.0695

    Ce chapitre est cité par

    • (2013) Beyond the Balance of Power. DOI: 10.1017/CBO9781139626842.007
    • (2013) Beyond the Balance of Power. DOI: 10.1017/CBO9781139626842.023
    • Jackson, Peter. (2012) The Challenge of Grand Strategy. DOI: 10.1017/CBO9781139136808.002

    Militaires en République, 1870-1962

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    Bernard, M. (1999). Les militaires dans les partis conservateurs sous la Troisième République : Un engagement naturel ?. In O. Forcade, Éric Duhamel, & P. Vial (éds.), Militaires en République, 1870-1962 (1‑). Éditions de la Sorbonne. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.61882
    Bernard, Mathias. « Les militaires dans les partis conservateurs sous la Troisième République : Un engagement naturel ? ». In Militaires en République, 1870-1962, édité par Olivier Forcade, Éric Duhamel, et Philippe Vial. Paris: Éditions de la Sorbonne, 1999. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.61882.
    Bernard, Mathias. « Les militaires dans les partis conservateurs sous la Troisième République : Un engagement naturel ? ». Militaires en République, 1870-1962, édité par Olivier Forcade et al., Éditions de la Sorbonne, 1999, https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.61882.

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    Forcade, O., Duhamel, Éric, & Vial, P. (éds.). (1999). Militaires en République, 1870-1962 (1‑). Éditions de la Sorbonne. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.61562
    Forcade, Olivier, Éric Duhamel, et Philippe Vial, éd. Militaires en République, 1870-1962. Paris: Éditions de la Sorbonne, 1999. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.61562.
    Forcade, Olivier, et al., éditeurs. Militaires en République, 1870-1962. Éditions de la Sorbonne, 1999, https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.61562.
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