Au service du château
|Première partie. Programmes et fonctions
Chapitre 2. Les lieux de conservation
Texte intégral
Les orangeries : entre agrément et utilité
Un programme traditionnel
- 1 A.-N. Dézallier d’Argenville, Voyage pittoresque des environs de Paris, ou description des maisons (...)
1La fonction de conservation des bâtiments d’utilité s’étend aux activités d’entreposage et de conservation des produits, denrées et instruments nécessaires au service de la maison. À ce titre, les orangeries occupent une place particulière : si les arbustes qu’elles contiennent durant l’hiver se rapportent au monde des jardins, elles permettent au propriétaire de disposer d’une pièce suffisamment vaste pour recevoir un grand concours de personnes l’été venu. L’orangerie, comme lieu d’exposition, s’entend également des parterres destinés à présenter les orangers dans leurs bacs ou en pots durant la belle saison. Il faut donc faire la part des châteaux qui disposent d’un parterre pour les orangers de ceux où l’on trouve une orangerie bâtie, monumentale ou non. Dézallier d’Argenville, dans son Voyage pittoresque des environs de Paris1, s’il mentionne la présence d’orangeries dans presque tous les châteaux, évoque essentiellement les parterres à orangers qu’il distingue des serres à orangers, « improprement appelées orangeries, selon lui, parce que l’on ne doit donner ce nom qu’à l’endroit où l’on range les caisses pendant l’été ».
2L’apparition des orangeries en France paraît remonter, à en croire Quatremère de Quincy, à l’Antiquité, époque à laquelle s’opèrent les premières tentatives d’acclimatation des orangers :
- 2 A.-C. Quatremère de Quincy, Dictionnaire historique d’architecture, op. cit., t. III, p. 40.
Que ce soit les oranges ou les citrons que les Latins ont nommés mala aurantia, pommes d’or des Hespérides apportées en Grèce par Hercule, on n’en peut fixer exactement la transplantation dans ce pays, à une époque bien postérieure et indiquée par une comédie d’Aristophane, où un jeune homme présente des citrons à sa maîtresse en lui disant que l’espèce en a été apportée tout récemment des États du grand roi à Athènes.
Ils se répandirent bientôt dans toute la Grèce, mais il n’y en avait pas encore en Italie du temps de Pline. Il dit qu’on en avait apporté de la Grèce plusieurs fois, mais qu’ils n’avaient pu s’acclimater : ce ne fut qu’environ cinquante ans après et du temps d’Adrien qu’on trouva le moyen de les faire venir de semence, et depuis lors l’Italie en fut remplie. Enfin, ils ne tardèrent pas à pénétrer en Provence et en Languedoc2.
- 3 J.-B. de La Quintinie, Traité de la culture des orangers, Paris, 1690, p. 413-414.
3Cette approche historique, bien qu’un peu tardive au regard de notre champ d’étude, montre cependant la place singulière de l’orange dans l’imaginaire du xixe siècle. Quatremère souligne l’antiquité du fruit et lui donne ses lettres de noblesse par l’évocation d’auteurs fameux. La présentation volontairement érudite de l’oranger met en valeur le caractère exceptionnel de cet arbre et justifie la fascination qu’il exerce. Les mystères liés à sa culture, les soins que nécessite son entretien et la dépense occasionnée par sa conservation, tout concourt à faire de l’oranger une plante réservée à une élite. Dès 1640, de La Quintinie tente, dans son traité3, de démystifier la culture des orangers ; le chevalier de Jaucourt donne plus tard les moyens de cultiver les orangers et ajoute, lui aussi :
- 4 D. Diderot, Encyclopédie, Neuchâtel, 1779, t. XXIII, p. 863.
Tous les jardiniers y mettent beaucoup de mystère, supposent qu’il y a un grand art et prétendent que cet arbre exige une infinité de soins et de précautions4.
4L’irritation du jardinier La Quintinie et la volonté de « transparence » de l’essayiste Jaucourt donnent la mesure de la passion de leurs contemporains pour ce fruit auquel l’orangerie sert pour ainsi dire de temple. Jaucourt lui-même n’est pas insensible au charme des orangers qu’il décrit ainsi :
- 5 Ibid.
Oranger, (jardinage) arbre toujours vert qui vient naturellement dans les climats les plus chauds de l’Asie et de l’Europe, même dans l’Amérique méridionale. Mais cet arbre, outre l’utilité de son fruit, a tant d’agrément et de beauté qu’on le cultive encore bien avant dans les pays septentrionaux, où malgré qu’il soit trop délicat pour y passer les hivers en pleine terre, on a trouvé moyen de lui suppléer une température convenable, à force de soins et d’abris. C’est ce qui a donné lieu à la construction des orangeries qui sont à présent inséparables des maisons de campagne où règne l’aisance5.
5Il termine sa description en montrant bien le caractère indispensable de l’orangerie qui entre, à part entière, dans le programme des maisons de campagne, comme un élément de prestige lié à l’agrément d’une villégiature au xviiie siècle. Quatremère ajoute une réflexion précieuse sur l’origine du programme de l’orangerie :
- 6 A.-C. Quatremère de Quincy, Dictionnaire historique d’architecture, op. cit., t. III, p. 40.
On a converti à cet usage [d’orangerie] ce qu’en Italie on nomme grotte, c’est-à-dire les appartements du rez-de-chaussée voûtés qui supportent des terrasses, et que dans ce pays on habite pendant les grandes chaleurs6.
- 7 Mercure de France, Paris, 1686.
- 8 L. Hautecœur, Histoire de l’architecture classique, op. cit., t. II, p. 268.
- 9 Ch. Bourel-Le Guilloux, « Il castello e la grotta di Meudon », Francesco Primatice architecte, dan (...)
- 10 M.-T. Herlédan, « Peut-on dater l’orangerie de Meudon ? », Bulletin de la Société des amis de Meud (...)
- 11 P. Biver, Histoire du château de Meudon, op. cit., p. 210 et suivantes.
- 12 M.-T. Herlédan, « Peut-on dater l’orangerie de Meudon ? », op. cit., p. 776.
6L’auteur aborde ailleurs le modèle de l’orangerie de Versailles, achevée en 16867 par Jules Hardouin-Mansart, dont la situation s’inspire des appartements d’été des villas italiennes décrits plus haut. Il oublie cependant qu’Hardouin-Mansart ne fait que reprendre et agrandir ce bâtiment dont l’invention revient à Louis Le Vau dès 16638. Cette date rapproche la création de Versailles de celle des grottes en vogue au siècle précédent, dont les exemples les plus marquants sont réalisés par des artistes italiens, les Francine à Saint-Germain-en-Laye ou Primatice à Meudon9. Si la mode des grottes s’essouffle dès la fin du xviie siècle, l’image de bâtiments à demi enterrés demeure dans l’imaginaire des architectes et de leurs commanditaires en liaison avec un exotisme transalpin. Lors de la démolition de la grotte de Meudon — qui abritait déjà des « porches à remettre les orangers10 » — et la création du château neuf pour abriter la cour du dauphin, en 1705-170611, Hardouin-Mansart transforme le cryptoportique en orangerie. Ce dispositif, comblé à la fin du xviiie siècle pour des raisons de stabilité, complétait l’ensemble architectural de Le Vau sous la terrasse du château vieux12. Si l’orientation au sud des anciens bâtiments correspond aux impératifs du nouveau programme, la fonction des lieux reste relativement voisine. En effet, les grottes comme l’orangerie forment des buts de promenade privilégiés, comme le rappelle d’Aviler dans son Cours d’architecture :
- 13 A.-C. d’Aviler, Cours d’architecture, op. cit., p. 197.
Comme l’oranger est un des plus beaux ornements des jardins, à cause de sa fleur, de son fruit, de son odeur et de la verdeur de ses feuilles qui subsistent pendant l’hiver, on a recherché de conserver cet arbre avec beaucoup de soins, parce qu’il vient d’un climat plus chaud que le nôtre. On bâtit pour cet effet des serres chaudes appelées orangeries, où l’on peut se promener en hiver, comme dans une galerie13.

Ill. 24. — Château de Chantilly, Jules Hardouin-Mansart, élévation de la galerie des cerfs et coupe de l’orangerie, 1er janvier 1683, dessin (BNF Est. Va 60, t. 12 R. de Cotte 198).
- 14 J. Guillaume, « La galerie dans le château français… », op. cit., p. 32-42.
- 15 J.-P. Babelon, Chantilly, op. cit., p. 32-35.
- 16 K. Krause, Die Maison de Plaisance, op. cit., p. 153.
- 17 Musée national de Stockholm, fonds Tessin, CC2175.
- 18 J. Guillaume, « La galerie dans le château français… », op. cit., p. 32-42.
7L’auteur montre ici que la fonction de promenade attachée à la galerie, bien connue grâce aux travaux de Jean Guillaume14, s’étend à l’orangerie dont la destination utilitaire s’estompe au profit de l’agrément. Ce rapprochement prend corps à Chantilly dans un système esthétique transitoire où l’orangerie établie par Jules Hardouin-Mansart en 1683 forme un angle droit avec l’ancienne galerie des cerfs construite par Anne de Montmorency entre 1524 et 153015 (ill. 24). La proximité de fonction entre galerie et orangerie semble plus marquée encore à Sceaux (Hauts-de-Seine), où l’assimilation d’un programme à l’autre conduit l’architecte de Colbert (vers 167016) à installer l’orangerie dans l’aile sud du corps de logis, face à l’aile des offices. Son extrémité est d’ailleurs occupée par la chapelle, visible sur un plan conservé à Stockholm17 (ill. 25), selon le modèle de la distribution des châteaux au xvie siècle18. Sur ce document, seules les ouvertures, orientées uniquement au sud, permettent de voir l’orangerie. D’ailleurs, une communication directe depuis le corps de logis montre la recherche de commodité et l’usage de l’orangerie comme une pièce à part entière du château. Elle fait l’objet de décorations importantes et devient un lieu d’exposition des richesses de la maison. La construction de la nouvelle orangerie par Jules Hardouin-Mansart perpétue cette ambiguïté et la princesse Palatine ne voit dans ce bâtiment qu’une galerie :

Ill. 25. — Château de Sceaux, projet de plan du rez-de-chaussée, à l’extrémité de l’aile gauche : la chapelle, dessin (Stockholm, musée national, coll. Tessin CC 1275).
- 19 Lettres de la princesse Palatine (1672-1722), Paris, 1985, p. 195, 5 décembre 1700.
Devant la maison, il y a un grand parterre avec berceau ; du berceau, l’on entre dans une belle galerie pleine de tableaux et de bustes en marbre ; du milieu de cette galerie, on retourne au jardin et l’on trouve une allée à perte de vue19 (ill. 26).
8J.-F. Blondel entretient encore l’équivoque dans De la distribution des maisons de plaisance :
- 20 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 14.
Le plus souvent, pour embellir ces bâtiments, on les orne intérieurement de peintures, ainsi qu’on peut le voir à celle de Saint-Cloud, et l’on doit autant qu’on peut les approcher du château, soit afin de n’avoir pas beaucoup de chemin à faire à découvert pendant la grande chaleur du jour, soit afin que leurs beautés ne soient pas éloignées des appartements de parade20.
9À l’occasion de la description de l’orangerie projetée pour le château de Saint-Remi, il affirme encore :

Ill. 26. — Château de Sceaux, Jacques Rigaud, vue de l’orangerie, gravure (BNF Est., Va 17 pet. f° pl. 78).

Ill. 27. — Château de Saint-Cloud, orangerie et façade à l’ouest du château, [avant 1861], photographie (BNF Est., Va 92b f°, t. 2).
- 21 Ibid., t. I, p. 139.
La serre en été devient une galerie que l’on peut décorer de peintures et de meubles faciles à enlever pour faire place en hiver aux orangers21.
- 22 Elle fut démolie sous le Second Empire.
- 23 Quarante toises sur cinq.
- 24 L. Hautecœur, Histoire de l’architecture classique, op. cit., t. II, p. 359.
- 25 Le coup d’État du 18 brumaire a lieu entre la galerie qui reçoit les délibérations du Conseil des (...)
- 26 Nous devons ce néologisme à Monique Mosser.
- 27 Cette salle de spectacle est mentionnée dans l’inventaire après décès du Régent, AN, X1A9162, 16 m (...)
10L’orangerie du château de Saint-Cloud constitue un autre maillon important du processus d’individualisation du programme22. Elle n’est plus, comme à Meudon, creusée dans la colline, mais séparée de celle-ci par une étroite venelle qui crée une circulation latérale discrète entre les communs et le jardin. Par son plan allongé23, l’orangerie sert, pour ainsi dire, de fond de scène au jardin, masquant l’irrégularité du terrain. Elle présente à l’extérieur une élévation régulière, ponctuée de hautes baies rectangulaires, surmontées d’un demi-étage (ill. 27) ; son comble brisé, la présence de chambres de service dans l’attique sont autant de références au vocabulaire de l’habitat et de la galerie. L’intérieur de l’orangerie, orné sur le mur nord du trompe-l’œil de Jacques Rousseau (ill. 28)24, ajoute au luxe de la construction et son implantation dans l’axe de l’aile sud du corps de logis fait écho à la grande galerie disposée au premier étage sur cour. La déclivité du terrain fait correspondre approximativement les deux espaces mis en relation occasionnellement pour d’importantes cérémonies25, et forme ainsi une transition entre l’intérieur des appartements et le jardin. Moins guindée que la galerie, l’orangerie offre, l’été venu, un vaste espace disponible, sans l’apparat des appartements officiels, plus tournée vers les plaisirs « orthésiques26 ». C’est en tout cas la lecture qu’en font les architectes au milieu du xviiie siècle. Si, à Sceaux, la première orangerie débouche sur la chapelle, à Saint-Cloud, en 1687, Jules Hardouin-Mansart implante, à l’extrémité ouest du bâtiment, un temple d’un genre nouveau, révélateur de l’évolution des mœurs : le théâtre27, pendant de la chapelle, installée à l’extrémité de la galerie, sur la cour d’honneur (ill. 29).

Ill. 28. — Château de Saint-Cloud, décor en trompe-l’œil de l’orangerie, dessin d’après Rousseau [?], (Londres, Victoria & Albert museum).
- 28 Légende portée sur la coupe de l’orangerie BNF Est. Va60, t. 12. ; J.-P. BaBelon, Album du comte d (...)
- 29 J.-P. Babelon, Chantilly, op. cit., p. 138-139.
- 30 Ibid., p. 42-44.
11L’année suivante, l’architecte reprend cette nouvelle conception de l’orangerie pour le Grand Condé et aménage une petite salle de spectacle dans le « pavillon joignant la galerie des cerfs et l’orangerie28 », pour faire jouer Oronthée, opéra de Lorenzani. Ce théâtre, réaménagé par Claude Billard de Bélisard en 1767-176829, offre un luxe en rapport avec la grande nef de l’orangerie, longue de soixante-huit toises sur vingt-sept pieds de largeur et vingt-huit pieds sous plafond. En 1786, le complexe est transformé par la suppression de la galerie des cerfs, remplacée par une terrasse joignant un pavillon construit à son extrémité30. Ce choix revient à isoler l’orangerie et le théâtre, à modifier l’échelle de cette partie du parc, désormais ouverte sur l’allée des soupirs, la petite cascade et le bosquet de la tenaille, mais permet surtout de souligner le rapport d’échelle monumental de l’orangerie et des écuries qui dominent le site.
Construction et utilisation
- 31 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. I, p. 412.
- 32 Ibid., t. I, p. 215.
12La genèse particulière de l’orangerie donne à celle-ci un statut à part parmi les bâtiments d’utilité. Malgré les tentatives de Blondel, elle s’assimile difficilement au programme des communs, en raison du luxe attaché à la culture des orangers, et cependant ne s’apparente pas non plus au logis. Architecture de fantaisie, l’orangerie appartient au monde du jardin sans pour autant figurer parmi les fabriques en raison de ses dimensions importantes. La question se pose alors de savoir quel décor lui appliquer. À cet égard, Hardouin-Mansart adopte un parti singulier et donne à l’orangerie de Versailles un décor intermédiaire entre les écuries, desquelles sont bannis les ordres d’architecture, et le château, rythmé de colonnes ioniques. Sa position en contrebas du logis permet à l’architecte d’orner l’orangerie de lignes de refend, comme le soubassement du château, auxquelles il ajoute un ordre toscan. La présence de ces colonnes distingue la façade de l’orangerie du soubassement du palais et donne au bâtiment le « caractère mâle » tant admiré par J.-F. Blondel31. Sur un plan théorique, le décor de l’orangerie soulève le problème de la convenance, et les architectes, à quelques rares exceptions près, renoncent à utiliser l’ordre dorique, pourtant censé exprimer la rusticité32, afin de répondre à ce critère. Cette rigueur que l’on ne retrouve pas à l’étranger (en Angleterre en particulier) a également pour objet de permettre une meilleure intégration du bâtiment dans un ensemble architectural. Pourtant, l’utilisation des ordres apparaît à certains trop ostentatoire et le cas d’Arnouville (Vald’Oise), où Contant d’Ivry édifie l’orangerie et le château de Jean-Baptiste de Machault, se distingue de ce critère de convenance. Celui-ci s’envisage, en effet, dans le rapport des différentes parties d’un ensemble architectural et l’orangerie de Versailles ne souffre les colonnes doriques de son avant-corps qu’en raison de la présence majestueuse du château. À Arnouville, au contraire, la façade de l’orangerie domine celle du château en simple rez-de-chaussée. C’est pour ainsi dire le château qui met en valeur l’orangerie.
- 33 C.-É. Briseux, L’Art de bâtir les maisons de campagne, op. cit., t. I., p. 5 ; J.-F. Blondel, De l (...)
13Néanmoins, l’architecture de l’orangerie varie relativement peu au cours de la période étudiée. L’essentiel consiste à offrir une vaste pièce, bien éclairée, afin de recevoir les pots et caisses d’orangers durant l’hiver. C’est pourquoi la façade sud de l’orangerie est largement ouverte par de grandes baies dont la principale doit être suffisamment haute pour permettre de faire entrer les plantes les plus importantes grâce à des talus, comme le recommande Briseux33. Les orangeries se caractérisent par un seul niveau en façade, bien qu’elles disposent parfois d’un entresol, comme à Saint-Cloud ou Herces, afin de loger une partie du personnel. Si le modèle de Jules Hardouin-Mansart, où de grandes arcades en plein cintre rythment de longues façades, reste présent à l’esprit des architectes du xviiie siècle, la forme des baies demeure largement influencée par les modes architecturales et apporte ainsi à l’historien des indications précieuses pour la datation de certains bâtiments. On peut, par exemple, dater la construction de l’orangerie du château de Balincourt à Arronville des années 1740, et cela malgré un environnement remanié au cours des différentes campagnes de 1780 et de 1910.

Ill. 30. — Château de Herces, Jacques-Denis Antoine, façade nord de l’orangerie avec sa modénature ancienne, vers 1772, cliché de l’auteur.
- 34 Cet esprit a marqué également la construction de l’orangerie de Bagatelle qui doit, pour sa façade (...)
14Ces modes architecturales sont illustrées également par deux exemples d’orangerie « à la grecque ». Lors de la seconde campagne de travaux de Soufflot pour le marquis de Marigny au château de Ménars, en 1764, l’architecte utilise des baies rectangulaires et un toit-terrasse, conformes au nouveau goût. La façade de sept travées est marquée en son centre par un fronton triangulaire couronnant un simple avant-corps à lignes de refend. La construction du château et de l’orangerie de Herces, par Jacques-Denis Antoine, nous fournit un autre exemple. L’orangerie montre le cas intéressant d’un bâtiment à plusieurs fonctions : une salle pour les orangers dans la partie droite, une cuisine dans le tiers gauche et des logements pour les jardiniers en entresol. La façade principale a subi d’importantes transformations au début du xxe siècle afin qu’elle ressemble au modèle canonique de Jules Hardouin-Mansart, striée de refend et rythmée par de grandes arcades en plein cintre34. L’observation des murs intérieurs à l’entresol montre que les baies originales étaient rectangulaires, comme l’attestent par ailleurs les percements et l’enduit d’origine qui subsiste sur la façade nord du bâtiment (ill. 30).

Ill. 31. — Charles De Wailly, projet d’orangerie, élévation, Grand Prix de 1750, lavis et aquarelle, (ENSB-A PRA 33).
15À l’exception de l’orangerie de Versailles, entièrement appareillée, les murs intérieurs de ces bâtiments ainsi que leurs plafonds reçoivent un parement en plâtre privilégié en raison de ses qualités optiques qui permettent de réfléchir au maximum la lumière du jour. Le sol des orangeries est quant à lui couvert de sable damé destiné à dreiner le surplus d’humidité nuisible aux plantes.
- 35 J.-M. Pérouse de Montclos, Les Prix de Rome, op. cit., p. 52, 99-100, 154, 170. Les dessins des co (...)
16L’étude des projets d’orangeries livrés par les étudiants de l’Académie royale d’architecture fournit d’autres exemples d’adaptation du programme aux modes. Le sujet donné à cinq reprises entre 1750 et 178135 semble retenu en raison de sa relative simplicité. Les énoncés limitent le sujet aux plan, élévation, coupe et dessin du parterre ; ils ne font jamais référence à l’environnement paysager, ni au rapport que l’orangerie entretient avec le reste du domaine. Les projets restent donc tout à fait théoriques et leur analyse ne peut porter que sur des aspects purement architecturaux. Les plus anciens dessins conservés remontent au Grand Prix de 1750 auquel Charles De Wailly participa (ill. 31). Avec cet architecte, nous sommes aux avant-gardes du nouveau goût à la grecque, et son projet, à une date très précoce (le marquis de Marigny est à peine parti pour son « grand tour »), utilise déjà tout le vocabulaire ornemental caractéristique de la seconde moitié du xviiie siècle : toit aplati, lourdes guirlandes de laurier, consoles à triglyphe, corniches à doucine au-dessus des baies, lignes de refend, tables rectangulaires, etc. L’architecte organise sa composition autour d’un avant-corps central couronné d’un dôme de plan circulaire, autre motif largement répandu à cette époque. Les larges lésènes qui encadrent le portail central inscrit dans une table rentrante s’inspirent de l’avant-corps donné par Jules Hardouin-Mansart aux écuries de Versailles (ill. 32) avec un décor plus austère. Les fenêtres de la façade alternent avec des niches ornées de sculptures à l’antique et deux pavillons calent la composition aux extrémités du bâtiment. De Wailly, qui conçoit ici un projet au décor innovant, ne reçoit que le troisième prix.

Ill. 32. — Château de Versailles, portail des grandes écuries, [Jules Hardouin-Mansart], 1679, cliché de l’auteur.

Ill. 33. — Pierre Panseron, projet d’orangerie, élévations et coupe transversale, Prix d’émulation de mai 1769, dessin (ENSB-A Pj 22 c).
17En février 1769, l’Académie, dans un nouveau projet, propose aux étudiants de dessiner une « orangerie de trente toises de face avec élévation et profil ». Pierre Panseron reçoit le premier Prix d’émulation, avec son projet composé de huit travées rectangulaires autour d’un avant-corps central percé d’une grande arcade, flanquée de quatre colonnes doriques (ill. 33). Deux amortissements au droit des colonnes et une corniche à mutules composent le seul décor extérieur du bâtiment. La coupe du bâtiment révèle la source d’inspiration de ce projet. Panseron scande l’intérieur de l’orangerie de colonnes doriques entre les baies et de curieuses pénétrations ornées de coquilles rythment la voûte. Nous retrouvons ici les formes et la silhouette générale de l’orangerie de Saint-Cloud, dont Panseron a remplacé l’ordre corinthien par un ordre dorique.
18Le projet de Charles Percier, daté par Jean-Marie Pérouse de Montclos de 1781, clôt cette série par une nouvelle référence à Jules Hardouin-Mansart, décidément « incontournable » pour ce programme (pl. IV). Le candidat s’inspire directement de l’orangerie de Versailles qu’il réinterprète sur un mode grandiose. Percier reprend la grande nef voûtée de Versailles, flanquée de deux grandes salles au rez-de-chaussée, et ajoute au nord un nymphée en hémicycle. À l’extérieur, l’architecte utilise les « cent marches » de Versailles, jointes par une succession de cascades.
19Ces observations portent plus sur un trait particulier de la formation des architectes au xviiie siècle que sur le programme à proprement parler, en raison du manque d’invention de ces projets. Tout au plus les architectes montrent-ils leur maîtrise du vocabulaire ornemental. En revanche, la citation toujours assez directe des grands modèles d’Hardouin-Mansart montre l’application des élèves à connaître et citer leur maître, suivant en cela les recommandations de J.-F. Blondel qui indique, dans son Cours d’architecture :
- 36 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. I, p. 392.
Lorsqu’on ne peut arriver au caractère vrai dont nous voulons parler : au moins faut-il, au défaut de cette variété si satisfaisante dans le décor des façades de nos bâtiments, [à] y substituer cette vraisemblance qui en approche, et qui seule peut dédommager du style vrai, la source des chefs-d’œuvre élevés par les maîtres qui nous ont précédés36.
20Après tout, ne s’agit-il pas des travaux des meilleurs élèves ?
Utilisation et fonctionnement des orangeries
21Le soin que prend J.-F. Blondel de décrire et commenter le dessin des plus prestigieuses orangeries du temps montre l’importance de ce programme à ses yeux :
- 37 Ibid., t. IV, p. 182-183.
Assez souvent l’intérieur de ces bâtiments est susceptible de quelques décorations selon qu’on les destine, l’été, à y donner des fêtes ou des festins. L’orangerie de Saint-Cloud et celle de Sceaux nous ont paru les plus propres à servir de modèles en ce genre à nos élèves ; celles de Versailles étant d’une étendue et d’une magnificence dont on a peu d’exemples en Europe37.

Ill. 34. — Jacques-François Blondel, plan et élévation de la façade de l’orangerie, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie 1re, pl. 10.
- 38 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. IV, p. 181-182.
- 39 D. Massounie, L’Architecture des bains privés, 1650-1810, maîtrise d’histoire de l’art sous la dir (...)
- 40 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 14 et 75, pl. 10 [8 (...)
- 41 C.-É. Briseux, L’Art de bâtir les maisons de campagne, op. cit., t. I, p. 7.
22Nous retrouvons ici le parti, traditionnel dans le Cours d’architecture de J.-F. Blondel, de citer les chefs-d’œuvre du passé. L’auteur qui forme plusieurs générations d’architectes ne montre guère, cependant, l’évolution pourtant importante de ce programme, entre les dernières décennies du xviie et la seconde moitié du xviiie siècle. Bien qu’il préconise d’aménager dans l’orangerie « une petite salle de spectacle, une salle de bal et de concert, leurs dépendances et quelques pièces pour les rafraîchissements38 », Blondel demeure dans la tradition du siècle précédent et rend mal compte des transformations de ce bâtiment au xviiie siècle. En effet, les orangeries s’éloignent progressivement du monde domestique pour rejoindre celui des jardins ; si elles demeurent des bâtiments d’agrément, ces architectures gagnent graduellement leur autonomie et se détachent du corps de logis. La relative confusion des programmes de la grotte et de l’orangerie évoquée par Quatremère conduit à associer à cette dernière l’appartement de bains, lieu privilégié du délassement au xviiie siècle, comme l’a montré Dominique Massounie39. Blondel lui-même intègre un tel appartement dans le projet de la première partie De la distribution des maisons de plaisance40 (ill. 34). Il réserve un tiers du bâtiment à l’appartement des bains dont l’enfilade principale ouvre directement sur l’orangerie et procure ainsi un dégagement sur les arbres qu’elle renferme. Outre l’agrément d’une telle vue, cette combinaison trouve son origine dans la nécessité d’un équipement lourd tant pour les salles de bains que pour l’orangerie. L’étuve indispensable au bain procure un chauffage d’appoint à l’orangerie durant les hivers rigoureux. Briseux affirme, en 1761, qu’« on place d’ordinaire l’appartement des bains dans le bâtiment de l’orangerie41 » et précise que le poêle de l’étuve peut facilement chauffer l’orangerie. Cette commodité reste cependant toute théorique dans la mesure où l’utilisation des salles de bains semble essentiellement estivale ; faute de témoignage, on peut imaginer que l’existence d’un système de chauffage permet malgré tout d’étendre l’usage des bains à la période hivernale, bien que l’agrément des jardins soit alors assez réduit.
23L’orangerie, envisagée comme lieu de conservation, nécessite, dans les régions septentrionales aux hivers rigoureux, des aménagements coûteux, particulièrement si l’on suit les recommandations des théoriciens. La bonne conservation des orangers impose une atmosphère sèche, hors gel, et donc une isolation efficace. Briseux définit une norme constructive dispendieuse et préconise la construction de véritables hypocaustes, sur le modèle des thermes romains, dans lesquels l’air chaud produit par un foyer souterrain passe dans un réseau de petites galeries sous l’aire des pièces.
- 42 C.-É. Briseux, ibid., t. I, p. 5-7, voir annexe I-9.
Cet air frappant contre la voûte ou le plafond se joindra continuellement à celui qui sera déjà contenu dans la serre et ne cessera point d’y entretenir une douce chaleur qui ne pourra causer aucun dommage aux arbres ; au lieu que le brasier et les poêles sont très nuisibles à ceux dont ils sont voisins42.
- 43 R. Edouard-André, « Documents inédits… », op. cit., p. 6.
24L’auteur ajoute, visionnaire, que ce perfectionnement pourrait être adapté au chauffage de toutes les chambres d’une maison à partir de la cheminée de la cuisine… Celle-ci, toujours allumée pour les besoins du service de la bouche, procure une ressource calorifique peu utilisée semble-t-il au xviiie siècle. Un exemple vient cependant nuancer cette affirmation. Robert de Cotte, dont les travaux au château de Chanteloup débutent vers 171143, installe l’orangerie contre le mur de la cuisine. Elle bénéficie donc de la chaleur de la cheminée de cette dernière (ill. 21). Si les plans ne montrent pas de conduites de chaleur allant de l’un à l’autre bâtiment, il est aisé d’imaginer une telle installation. Cette disposition ingénieuse cumule plusieurs avantages : la cuisine fournit une chaleur constante, elle permet de masquer, depuis l’entrée du domaine, une partie de la basse-cour des communs (ill. 35) par une façade monumentale et surtout isole la serre au nord.

Ill. 35. — Château de Chanteloup, P. Lenfant, vue cavalière du château de Chanteloup et de la ville d’Amboise, vers 1770, gouache, musée des Beaux-Arts de Tours.
25Le chauffage des orangeries est loin d’être systématique et le mode constructif permet souvent d’éviter cette dépense. J.-F. Blondel suggère que ces bâtiments
- 44 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. IV, p. 182-183.
[…] soient voûtés, que les murs en soient solidement bâtis, et que les croisées soient garnies de doubles châssis, pour préserver ces pièces du froid pendant l’hiver44.
- 45 G. Joudiou, « Pierre Contant d’Ivry », dans J.-L. Baritou et D. foussart (dir.), Chevotet, Contant (...)
26L’utilisation de voûtes, préconisée ici, rappelle celles données par Jules Hardouin-Mansart à l’orangerie de Versailles mais, la plupart du temps, l’économie incite les architectes à préférer le plafond comme mode de couvrement. De surcroît, les lourds berceaux préconisés par Blondel imposent la construction de murs épais, eux aussi plus coûteux. L’aménagement intérieur de l’orangerie de Herces rappelle combien l’utilisation du plâtre, tant pour les plafonds que pour les murs, est fréquente pour ces bâtiments. En dépit de sa fragilité, ce matériau est préféré pour ses propriétés physiques puisqu’il absorbe le surcroît d’humidité néfaste aux plantes exotiques. L’orangerie du château de Chamarande (Essonne), du dessin de Contant d’Ivry45, est un compromis intéressant entre la voûte et le plafond. En effet, la charpente en carène renversée est, à l’origine, couverte sur sa face interne d’un plâtras sur lattis qu’atteste encore la marque des clous sur les solives. De cette manière, l’architecte concilie l’effet d’une voûte et la légèreté de la charpente.
27D’autres moyens sont utilisés pour assurer une meilleure isolation de l’orangerie. Le système de double châssis permet ainsi d’obturer les vastes baies exposées au sud sans priver les orangers de la lumière hivernale. Ce principe d’isolation thermique apparaît notamment à Versailles et à Saint-Cloud.
- 46 AN, M.C., ét. LXXXVIII, 723, 28 février 1770, art. 487-511, voir annexe III-1. Nous remercions Fra (...)
- 47 O. Choppin de Janvry, Le Désert de Retz, Croissy-sur-Seine, 1988, n° 35.
28La monumentalité des orangeries est en rapport avec le nombre et la qualité des spécimens qu’elles abritent et le propriétaire qui n’hésite pas à dépenser souvent des sommes considérables pour augmenter ses collections. L’inventaire après décès du marquis de Béringhem46 fournit un bon exemple de la composition de l’orangerie d’un grand seigneur en 1770. Elle ne compte pas moins de trois cent quarante-trois plantes en pots. Cette collection apparaît assez exceptionnelle pour qu’il soit fait appel, en qualité d’expert, à Arthur Prescott, célèbre jardinier du prince de Conti. L’évaluation de cette collection, toujours sous-estimée dans le cadre des inventaires après décès, s’élève à huit mille huit cent trente-cinq livres. À titre de comparaison, la fameuse collection botanique de Racine de Monville, dans son désert de Retz, inventoriée le 25 janvier 179447, compte deux cent trente spécimens. Il s’agit là de véritables trésors auxquels l’orangerie sert d’écrin. Le rapprochement avec la galerie du château prend ici tout son sens. Lieu de promenade, elle participe du prestige du propriétaire. Seuls les matériaux et le décor caractérisent plutôt un espace extérieur. Ainsi, dans l’orangerie de Saint-Cloud, le trompe-l’œil réalisé par Rousseau, et dont le Victoria and Albert Museum conserve le modèle (ill. 28), représente les allées d’un jardin, à l’instar de la perspective de Marly, que le propriétaire fait visiter comme une galerie. J.-F. Blondel confond d’ailleurs les deux termes dans son troisième projet de maison de campagne pour lequel il donne les plans et élévation de la « galerie servant pendant l’hiver de serre aux orangers ». Le commentaire qu’en donne l’auteur révèle la fonction de ce bâtiment :
- 48 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 138.
Au-dessous de cette élévation est représenté le plan de la serre de l’orangerie, laquelle conduit à deux pièces particulières dont sont formés les deux pavillons : l’une est destinée à prendre le frais pendant la chaleur du jour, et est de retraite à ceux qui se promènent dans le bosquet planté en étoile. La serre en été devient une galerie que l’on peut décorer de peintures et de meubles faciles à enlever pour faire place en hiver aux orangers48.
29L’usage de l’orangerie préconisé ici n’est pas sans rappeler celui décrit plus haut par la princesse Palatine à Sceaux et montre combien Blondel propose une vision traditionnelle de ce programme.

Ill. 36. — Jean-François de Neufforge, projet d’orangerie, gravure, publié dans Recueil élémentaire d’architecture, Paris, Chariot d’or, 1757-1765, t. V, 54e cahier, pl. 6.
- 49 S. Saudan-Skira, Orangeries, Cologne, 1998, p. 13, 126.
30Cependant, au cours de la seconde moitié du xviiie siècle, suite à l’apparition du jardin à l’anglaise, l’orangerie connaît une certaine désaffection. En effet, le jardin irrégulier abandonne l’usage des orangers en pots qui s’intègrent mal aux parterres dans le goût nouveau49. Ainsi, le prince de Ligne écrit-il dans son « Coup d’œil sur le jardin des autres » :
- 50 C.-J. de Ligne, Coup d’œil sur Belœil, Paris, 1997, p. 91.
Les orangeries conserveront donc toujours cet ordre ridicule qui n’en fait ni un jardin d’hiver, ni un jardin d’été50.
- 51 J.-F. de Neufforge, Recueil élémentaire d’architecture, Paris, 1757-1765.
- 52 Herces, Sainte-Geneviève-des-Bois, Ménars notamment.
- 53 Arch. Inst. B 21, Claude-Nicolas Ledoux, 29 novembre 1767, cité par H. Ottomayer, « Autobiographie (...)
- 54 D. Ramée, Architecture de C.-N. Ledoux, Paris, 1848, t. II, pl. 251 ; voir D. Rabreau, Claude-Nico (...)
- 55 L’orangerie se trouve à gauche du corps de logis sur le plan gravé.
31On peut ajouter que Jean-François de Neufforge, dont les planches gravées du Recueil élémentaire d’architecture51 sont autant de modèles pour l’architecture de la seconde moitié du xviiie siècle, ne publie qu’un seul projet d’orangerie (ill. 36). Désormais, la présence d’une orangerie n’entre plus systématiquement dans le programme du château, elle perd en tout cas sa monumentalité pour redevenir un simple bâtiment d’utilité. Le bâtiment de l’orangerie est ainsi absent d’importants chantiers comme ceux du Bouilh, de Montgeoffroy (1772-1776), Bagatelle (1777) ou Dangu (1782-1789). La nature variée de ces différents domaines démontre la généralisation du phénomène. Il convient cependant de nuancer le propos et de signaler quelques exemples résiduels d’orangeries52, comme celle réalisée par Ledoux au château de Mauperthuis, que l’architecte mentionne dans sa lettre de candidature à l’Académie53. Dans la gravure idéale du plan du château de Mauperthuis, publiée seulement en 184754, Ledoux dispose l’orangerie dans l’aile de communs en retour sur la cour, à droite du corps de logis (ill. 37)55. Réduite à une pièce, curieusement ouverte sur deux façades opposées, elle ne s’affiche pas même en façade ; elle entre seulement dans la distribution et ne constitue plus un ornement. Cette tendance, plus marquée en Île-de-France qu’en province, est illustrée par deux projets de transformation d’orangeries. Le premier projet, dessiné par Henri Piètre, en 1775, consiste à transformer en appartements l’orangerie du château de Sainte-Assise (Seine-et- Marne), propriété de la marquise de Montesson (épouse morganatique du duc d’Orléans). Pour cela, l’architecte utilise le double mur qui isolait la nef de l’orangerie au nord comme corridor de circulation entre les différentes pièces des deux niveaux créés dans l’ancien bâtiment (ill. 38) ; la travée centrale de la façade sud, légèrement dilatée par rapport aux six autres, est coupée en deux à l’occasion de ces transformations afin de donner de la lumière au deux garde-robes disposées au centre de la composition. La distribution de trois nouveaux appartements de maîtres dans cette aile de la basse-cour tend à montrer également la pénurie de logements dans ce château, où le sacrifice d’une orangerie démodée ne semble guère coûter au regard de la possibilité de recevoir un plus grand concours d’invités.

Ill. 37. — Château de Mauperthuis, Daniel Ramée, plan général du rez-de-chaussée, publié dans Architecture de Claude-Nicolas Ledoux, Paris, Perroneau, 1848, t. II, pl. 251.

Ill. 38. — Château de Sainte-Assise, Henri Piètre, plan de transformation de l’orangerie, rez-de-chaussée, 1775, dessin (AN, N III Seine-et-Marne 153).
- 56 AN, NII Seine-et-Oise 1161-6.
- 57 M. le Moël et C.-F. Rochat, Catalogue général des cartes, plans et dessins d’architecture, Paris, (...)
- 58 AN, 60AP 8.
32La création de la Maison de Monsieur en 1775 fournit un autre exemple. À cette occasion, le comte de Provence reçoit en apanage le palais du Luxembourg et, dans l’attente de l’achèvement des travaux de restauration, il commande à son architecte François-Thérèse Chalgrin la transformation de l’hôtel du petit Luxembourg, afin de disposer au plus vite d’un logement au cœur de Paris. Une série de six plans, conservés aux Archives nationales56, considérés, par erreur, comme ceux d’un projet pour le château de Brunoy57, doivent ici être rétablis dans leur destination véritable. La mention de la rue de Vaugirard sur l’un d’eux ne laisse, en effet, aucun doute sur les lieux qu’ils décrivent. Ils datent des années 1778-1780, période durant laquelle semblent commencer les travaux du palais58. Ces plans montrent l’orangerie de sept toises de long, transformée en logement pour Monsieur, comprenant au rez-de-chaussée les cuisines et leurs arrières, et, au premier étage, un appartement orienté vers le jardin (ill. 39 et 40). La distribution du nouvel appartement présente un plan ingénieux et à la mode, où les pièces circulaires et ovales se succèdent en enfilade sur le jardin, alors que la salle à manger contiguë au salon n’entre pas dans cette perspective et ouvre sur les espaces de circulation des services.

Ill. 39. — Palais du Luxembourg, Jean-François-Thérèse Chalgrin, projet de transformation de l’orangerie, plan du rez-de-chaussée, [s. d.], dessin (AN, N III Seine-et-Oise 116).

Ill. 40. — Palais du Luxembourg, Jean-François-Thérèse Chalgrin, projet de transformation de l’orangerie, plan du premier étage, [s. d.], dessin (AN, N III Seine-et-Oise 116).
33Cependant, si la mode détermine, pour une part, l’abandon de l’orangerie monumentale sur le modèle élaboré par Jules Hardouin-Mansart, le goût pour la botanique demeure et les progrès techniques, dans la fabrication du verre en particulier, conduisent durant le troisième tiers du xviiie siècle à construire des serres, plus performantes et plus adaptées à la culture des plantes tropicales, grâce, par exemple, à des surfaces vitrées plus importantes. La fonction de ces nouveaux bâtiments touche désormais plus à l’utilité qu’à l’agrément, en attendant la vogue des jardins d’hiver au xixe siècle.

Ill. 41. — Folie Saint-James, [Jean-Baptiste Chaussard], élévation de la serre chaude, [vers 1785], dessin, musée de l’Île-de-France, Sceaux (inv. 37.2.130).
- 59 L.-V. Thiéry, L. Petit de Bachaumont, J.-C. Krafft entre autres.
- 60 C.-É. Briseux, L’Art de bâtir les maisons de campagne, op. cit., t. I, p. 5-7.
- 61 Voir L. Baudoux, « Jean-Baptiste Chaussard », dans J.-L. Baritou et D. Foussard (dir.), Chevotet, (...)
34Le prix des spécimens conservés dans les serres prend le pas sur la monumentalité des édifices, bien que les architectes aient soin de leur donner un aspect palladien, alors en vogue. Les serres jusqu’alors composées de simples châssis de chêne deviennent des bâtiments importants. La plus célèbre est probablement celle réalisée par Jean-Baptiste Chaussard à la folie Saint-James (ill. 41), largement décrite par les auteurs du temps59. Le bâtiment met en œuvre les principes de chauffage exposés par Briseux dès 176160 et fait de ces serres chaudes une architecture à la mode grâce à un décor à l’antique où se mêlent harpies et renommées61. Cet exemple rappelle le goût dans la seconde moitié du xviiie siècle pour les plantes exotiques, renforcé par les voyages de Jussieu, Bougainville ou de Cook pour les plus anglophiles des commanditaires. La serre de la folie Saint-James, admirée comme une prouesse technique, n’innove, en fait, que par son plan original en T et son décor à l’antique. Il faut ajouter que Chaussard reprend ici l’idée d’une association de plusieurs agréments en disposant à la jonction des trois serres un « cabinet d’histoire naturelle », qui renvoie probablement plus à la figure à la mode d’un Buffon qu’à un véritable laboratoire.
- 62 AD Yvelines, A.F. 14, cité par M.-J. Michel, « La gestion seigneuriale des Phélypeaux », xviiiesiè (...)
- 63 AN, R3130.
- 64 P. Terver, Le Dernier Prince de Conti à L’Isle-Adam, Pontoise, 1987, p. 111.
- 65 AN, O11344, inventaire des ananas de l’orangerie de Choisy.
- 66 AN, R594, pièces 297 et 300.
35Il faut se rappeler toutefois que les collections botaniques ne sont qu’un mobile pour la construction des orangeries et des serres ; la production de fruits exotiques tant pour la consommation familiale que pour le commerce fonde la légitimité de ces bâtiments. Ainsi, la vente des fleurs d’oranger du château de Pontchartrain produit deux cents livres en 174362. Une enquête réalisée dans les archives du prince de Conti63 a ainsi permis à Pierre Terver de montrer que la vente des fleurs d’oranger du château de L’Isle-Adam fournit un revenu de trois à quatre mille livres par an durant les décennies 1770-178064. Nous retrouvons cet aspect non négligeable du commerce des fruits au château de Brunoy où le comte de Provence, à l’instar de son grand-père à Choisy65, cultive les ananas. L’analyse des archives de Brunoy révèle une production assez importante de ces fruits : pour les années 1791 et 1792 : quatre cent quarante-sept pièces vendues pour la somme de mille six cents livres66. Le comte de Provence vend également cent vingt-trois livres de fleurs d’oranger pour un montant de quatre cents livres.
Orientation et implantation
- 67 K. Krause, qui donne cette date, rapproche les plans de la maison d’un projet d’Antoine Le Pautre, (...)
36L’élévation régulière des orangeries, leurs longues façades basses, orientées au sud, permettent d’intégrer ces bâtiments au décor du jardin. Elles sont alors souvent utilisées pour clore une composition ou masquer une partie du domaine sans intérêt, comme nous avons pu le voir à Saint-Cloud ou Chanteloup. Sur ce modèle, vers 1715, Nicolas Dullin67 implante l’orangerie de la maison Pâris à Bercy à l’extrémité de la parcelle en lanière (ill. 16), fermant ainsi la composition par une façade de dix-neuf travées qui occupe toute la largeur du terrain. Elle fonctionne comme un véritable fond de scène pour cette maison de campagne d’un genre nouveau : les services disparaissent pour laisser place au seul agrément de la vue sur la Seine. L’écran qu’elle forme masque le mitoyen et une basse-cour où l’on retrouve les activités de service (forge, logement de jardinier, appentis) (ill. 42). Le caractère bourgeois de ce type d’habitation apparaît dans le décor du fronton, où les armes de la famille cèdent la place à un cadran solaire. Ainsi, le financier n’affiche-t-il pas le prestige de sa lignée mais seulement sa fortune, en dehors du cadre aristocratique conventionnel.

Ill. 42.— Pâté Paris, Jean Mariette, plan et élévation de l’orangerie, gravure, publié dans L’Architecture française, Paris, 1727, t. I, pl. 161.
- 68 Ibid., p. 203-217.
- 69 L’auteur se fonde sur les expertises de 1692 et 1699, AN, Z1j415, M. C. ét. LXV 126, 2 mars 1692, (...)
- 70 J. Mariette, L’Architecture française, op. cit., t. I, pl. 353.
37Vers 1720, Crozat le jeune, propriétaire depuis 1702 de l’ancien domaine de Charles Le Brun à Montmorency, commande à Gilles-Marie Oppenord une orangerie destinée à clore la composition de son jardin. Le bâtiment, réalisé semble-t-il vers 1720, révèle l’ingéniosité de l’architecte par son plan curviligne, parfaitement adapté à la topographie du domaine. En effet, le bâtiment sépare le jardin de la voie publique et rachète l’irrégularité du terrain, en remplissant la fonction de mur de soutènement pour cette partie du parc. L’orangerie, exposée au sud, épouse la forme d’un bassin circulaire, véritable rotule du plan complexe du domaine où bassins, cascades et vertugadins se succèdent selon des axes variés, autour des deux châteaux de Le Brun, puis de Crozat, dans des phases de construction successives, bien analysées par K. Krause68 à partir de différentes descriptions retrouvées aux Archives nationales69. Le bâtiment permet surtout de masquer la partie du village visible depuis le bas du jardin, alors que la vue sur la campagne est privilégiée quelques degrés plus à l’ouest où, par-dessus le chemin public, le promeneur embrasse la vue d’un potager, au dessin réglé sur celui des allées du parc. Enfin, l’orangerie clôt l’axe nord-sud du parc terminé à son autre extrémité par les parterres de broderies disposés au pied du corps de logis élevé par Cartaud pour Crozat en 1709. Mariette donne les élévations de cette orangerie qui subsiste encore sur place70, passablement enlaidie par des « restaurations » malencontreuses. Huit travées percées de baies couvertes en arcs segmentaires encadrent un avant-corps à bossage alterné de pierre de liais et de meulière, dans lequel ouvrent trois arcades en plein cintre, timbrées de mascarons. La travée centrale, marquée par une doucine, présente un décor de lion dompté par un amour (ill. 43). La façade latérale est, visible depuis le jardin, offre également une élévation soignée avec une baie couverte en anse de panier encadrée de deux pilastres toscans doublés par deux demi-pilastres formant l’ébauche d’une serlienne. Comme on le voit, ce décor d’une certaine sobriété contraste avec l’œuvre rocaille de l’architecte. Cependant, il faut voir ici la recherche d’une simplicité agreste, particulièrement prisée pour ce type de villégiature. La présence d’une haie, devant la façade, qui souligne les allèges des fenêtres et remonte à mi-hauteur des trumeaux entre les travées des ailes incurvées, renforce l’intégration au cadre paysager. Ainsi réduit à un avant-corps à bossage rustique, polychrome, le bâtiment s’apparente à une fabrique.

Ill. 43. — Château de Montmorency, Jean Mariette, élévation de l’orangerie, sur les dessins de Gilles-Marie Oppenord, gravure, publié dans L’Architecture française, Paris, 1727, t. II, pl. 353.
- 71 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 97 et suivantes.
- 72 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 12 et suivantes, p. (...)
- 73 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 137.
- 74 BNF Est. H 188 843.
- 75 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 139.
38Cette mise en œuvre de l’orangerie comme élément d’un « fond de scène » est utilisée par Blondel dans son deuxième projet de maison de plaisance fait sur un terrain sis à trois lieues de Besançon71 (ill. 44), où le bâtiment sépare le parc d’une « avenue qui conduit à l’église ». Plus que l’originalité de cette disposition, il convient ici de relever la manière dont l’auteur traite cette partie du parc comme un bosquet isolé, à l’image du jardin de Sylvie à Chantilly. L’orangerie devient alors un jardin dans le jardin, mis en valeur par son isolement, entouré de murs et cependant implanté à proximité de la maison, afin de pouvoir s’y rendre commodément. Ce procédé montre également l’embarras de l’architecte face au programme. Les solutions qu’il donne dans deux autres de ses projets de maisons de plaisance (première et troisième parties)72 révèlent sa difficulté à trouver le ton juste pour intégrer l’orangerie à ses compositions. Au château de Saint-Remy (Eure-et-Loir), Blondel utilise l’orangerie comme élément de symétrie, en pendant à l’aile des cuisines, dans l’axe longitudinal du château (ill. 45). Il cantonne ainsi l’orangerie à sa fonction de lieu de conservation, même s’il affirme qu’elle peut, en été, se transformer en galerie. Cette maladresse de l’architecte l’oblige à limiter les effets plastiques d’un programme pourtant prestigieux, à la fois pour l’harmoniser avec le décor de l’aile des cuisines opposée, et dans le but de ne pas éclipser le corps de logis principal dont l’architecture, nous dit l’auteur, « n’est pas extrêmement ornée73 ». Un dessin préparatoire de ce projet, conservé à la Bibliothèque nationale74, montre les hésitations de Blondel quant à la distribution de ces bâtiments (ill. 46). Sur ce dessin, en effet, l’orangerie figure à gauche du château et le bâtiment symétrique est « destiné à plusieurs usages ». Cette interversion de la destination des bâtiments s’explique-t-elle par l’orientation plus favorable à une orangerie de l’aile gauche ? L’absence de rose des vents sur les planches du traité nous réduit à le suggérer. Quoi qu’il en soit, ces hésitations montrent bien la priorité qu’accorde l’architecte à la symétrie, au mépris de l’usage. Pour la même raison, Blondel renonce à souligner l’avant-corps central par un fronton au profit des pavillons latéraux « afin de diversifier avec le couronnement de l’avant-corps du milieu75 ».

Ill. 44. — Jacques-François Blondel, plan général du second projet de maison de plaisance contenant la distribution d’un bâtiment de quarante-cinq toises de face, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie II, pl. 15, p. 96.

Ill. 45. — Jacques-François Blondel, plan général des bâtiments et dépendances du château de Saint-Remy-sur-Havre, édifice de trente-cinq toises de face, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie III, pl. 22, p. 116.

Ill. 46. — Jacques-François Blondel, Château de Saint-Remy-sur-Havre, plan général du domaine, dessin (BNF Est. H1188843).
- 76 Ibid., t. I, p. 12.
39Le premier projet des maisons de plaisance de Blondel (ill. 47) exploite également l’orangerie comme un élément de symétrie, mais cette fois-ci du côté de la cour. Le logis principal est bordé de deux ailes qui abritent les cuisines à gauche et l’orangerie à droite. Leurs deux façades orientées sur la cour d’honneur se répondent par leurs silhouettes basses et leur décor d’arcades aux avant-corps. La façade nord de l’orangerie ne présente aucun percement sur la cour et seul l’appartement des bains prend le jour de ce côté par six baies (ill. 34). L’orangerie est donc réduite ici à un élément de symétrie dont la seule fonction est de faire écran au parterre et de délimiter l’espace de la cour d’honneur. Le manque d’ambition de cette solution étonne alors que l’architecte parle, à propos de ce projet de cinquante toises, d’un « palais76 ». Ce parti, également adopté au château de Jossigny, paraît plus raisonnable en raison des dimensions relativement modestes du corps de logis (seulement sept travées de face, contre vingt et une chez Blondel). L’orangerie de Jossigny, rythmée de cinq travées au sud, offre à la cour un mur aveugle qui répond à celui des remises, à gauche de la cour d’honneur.

Ill. 47. — Jacques-François Blondel, plan général d’un palais et de ses environs, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie 1re, pl. 1, p. 18.
- 77 B. Pons, « Le château du duc d’Antin… », op. cit., p. 59.
- 78 J. Mariette, L’Architecture française, op. cit., t. II, pl. 320-325.
40L’exemple du château de Petit-Bourg, reconstruit pour le duc d’Antin par Lassurance vers 172077 et gravé par Mariette78, offre une solution plus ingénieuse dans l’agencement du corps de logis de quarante-quatre toises de face et de l’orangerie (ill. 9). Si l’on s’en rapporte au plan de Mariette, seule source documentaire à notre connaissance sur ce bâtiment, elle déployait une façade de trente-neuf toises, perpendiculaire au corps de logis, à une distance de soixante et une toises de ce dernier, offrant le recul nécessaire pour que les deux bâtiments ne soient pas en concurrence. En l’absence de représentation graphique des élévations de l’orangerie, il est difficile de pousser plus loin l’analyse. Cependant, malgré des différences notoires dans l’orientation des bâtiments, le rapport qu’ils entretiennent n’est pas sans faire penser au château de Maisons où François Mansart fut également confronté au problème du voisinage entre un corps de logis prestigieux et la façade monumentale des écuries.
Les glacières : une dépendance du service de la bouche
- 79 X. de Planhol, L’Eau de neige, Paris, 1995, p. 24-42.
- 80 Cité par R. Wittkower, Les Enfants de Saturne, Paris, 1991, p. 306.
- 81 J.-L. Flandrin, « Débat français autour du boire à la glace », dans A. Rousselle (dir.), La Glace (...)
- 82 L.-S. Mercier, Tableau de Paris, Paris, 1990, p. 368.
41Si, dès le xvie siècle, le commerce de la glace est organisé autour du Bassin méditerranéen79, il faut attendre le règne de Louis XIV pour voir éclore dans la France septentrionale la mode des sorbets. Alors qu’en Italie Bernardo Buontalenti (1536-1608) élabore un nouveau système de conservation de la neige et des aliments80, et qu’en Angleterre Francis Bacon (1561-1626) meurt à la suite de ses expériences sur la glace, la France demeure réticente à l’usage du « boire à la glace81 ». L’arrivée de Procope à Paris et le goût du roi pour ses préparations 108 donnent le départ d’une nouvelle mode82.

Ill. 48. — Château de Versailles, coupe de la deuxième glacière de Trianon, de l’étang [de Clagny] qui est vide, le caveau qui est vide et de la ménagerie qui est vide, [s. d.], dessin (AN O1 18701 n° 5).
- 83 Ch. Morin, « Les fontaines de pierre », op. cit., p. 85.
- 84 AN, Z1j760, f°3 r°.
- 85 J. Mariette, L’Architecture française, op. cit., t. I, pl. 195.
42Dans la capitale, les limonadiers assurent la distribution de la glace grâce à des glacières établies intra muros, comme celle de la fontaine du Chaume bâtie en 171083, mais également dans la proche banlieue, comme celle du Petit-Gentilly construite par Jean Fauvel84. Les particuliers usent de ce réseau de distribution et ne construisent que rarement des glacières individuelles, excepté cependant celles de quelques grands hôtels des premières années du xviiie siècle, comme celui de Clermont, construit par Le Blond85, ou l’hôtel d’Évreux.
43À la campagne, l’absence de réseau de distribution contraint les châtelains à construire des glacières individuelles. En raison de leurs liens étroits avec le service de la bouche, elles se rangent, à part entière, parmi les bâtiments d’utilité. Néanmoins, dès 1750, un certain nombre d’entre elles appartiennent également au monde des jardins et à celui de l’agrément. La mode des fabriques de jardins utilise souvent les glacières dans la composition de bosquets pittoresques.

Ill. 49. — Château de Versailles, Nicolas Heurtier, plan et coupe d’un projet de glacière pour conserver le gibier du roi, contresigné par le comte d’Angivilliers le 18 août 1778, dessin, (AN, O1 18701 pce 122).
- 86 B. Spinner et P. Prodoscimi, « Aspects scientifiques de la fabrication et de la conservation de la (...)
44Le fonctionnement des glacières repose sur un principe simple : une grande quantité de glace fond proportionnellement plus lentement qu’une petite. L’étude thermique conduite par Bernard Spinner et P. Prodoscimi86 montre, chiffres à l’appui, l’efficacité de ces bâtiments et explique le processus physique de fabrication de la glace. Les conditions climatiques requises pour la formation de la glace, durant l’hiver, sur les bassins, rivières et canaux demeure le problème essentiel de l’approvisionnement des glacières.
- 87 AN, O18701 n° 1.
45L’exemple de Versailles, où l’on ne compte pas moins de neuf glacières réparties entre Trianon, la ménagerie, l’étang de Clagny et la plaine de Satory (ill. 48), montre l’augmentation constante de la consommation de glace à la cour jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Cependant, ces bâtiments permettent également de conserver les aliments, les venaisons en particulier, comme l’indique Jean-François Heurtier sur le devis qu’il soumet en 1778 pour la « construction d’une glacière pour conserver le gibier du roi à l’habitation de Monsieur Le Roy inspecteur des chasses87 » (ill. 49). Cette fonction explique que plusieurs glacières puissent être construites les unes à côté des autres, comme à Versailles, Marly ou Bellevue, afin de séparer la glace destinée à la consommation de celle utilisée pour la réfrigération des aliments.
Intendance et gestion
- 88 É. Le Roy Ladurie, Histoire du climat depuis l’an mil, Paris, 1993.
- 89 P. Verlet, Le Château de Versailles, Paris, 1992, p. 194 ; Ph. de Dangeau, Journal, Paris, 1854, t (...)
- 90 AN, O11346290, 20 mars 1759.
- 91 AN, O113601, f° 4 v° : la description du domaine de Choisy indique qu’elles furent construites en (...)
- 92 AN, O11346290, voir annexe III-3.
46Si le règne de Louis XIV est bien connu pour ses hivers rigoureux88, durant lesquels la cour s’adonne au patin à glace sur le Grand Canal de Versailles89, la seconde moitié du xviiie siècle semble moins propice à la formation de glace si l’on en juge par plusieurs courriers inquiets des contrôleurs des domaines royaux, responsables de l’entretien des glacières et de la fourniture de glace à la cour. L’importance de la glace pour le service de la bouche du roi explique que la surveillance des glacières soit directement confiée au contrôleur qui en réfère exclusivement au directeur des bâtiments du roi. En mars 1759, Michel-Barthélemy Hazon90, contrôleur des bâtiments de Choisy, s’émeut de n’avoir pu remplir que les deux tiers de l’une des deux glacières du domaine91, quantité insuffisante, à ses yeux, pour satisfaire la consommation annuelle de la cour lors de ses voyages. Trois ans plus tard, à Marly, Ange-Jacques Gabriel indique, dans un courrier au marquis de Marigny, que l’hiver 1761-1762 n’a pas été favorable pour « serrer la glace » dans les trois glacières du domaine92, et espère que les « douze à quinze toises cubes » restantes permettent d’assurer le bon fonctionnement du service jusqu’à la saison suivante. Ces lettres démontrent l’importance de la glace dans le mode de vie à la cour : la glace est bien une affaire d’État, surtout en cas de disette.
47Plus prudent, Jean-René Billaudel, contrôleur de Bellevue, remplit les glacières
- 93 AN, O11531 94, 28 décembre 1762.
de façon à espérer que dans le cas où l’on ne pourrait pas en serrer l’année prochaine, l’on n’en manquerait pas l’année d’ensuite [sic]93.
- 94 O. Caffin-Carcy, « Les glacières du domaine de Versailles », Versalia, n° 4, 2001, p. 28.
- 95 Louis XVI donne le château à Mesdames à la mort de son prédécesseur.
- 96 AN, O11731168.
48Malgré les précautions des responsables, l’utilisation des ressources offertes par les glacières royales est largement grevée par une foule de « privilégiés » qui organisent un véritable pillage. Hazon se voit contraint de confisquer la clef de la glacière de Choisy afin de lutter contre ce brigandage. Dans son article sur « Les glacières du domaine de Versailles94 », Odile Caffin-Carcy révèle l’ampleur de ces vols institutionnels, fruits de la prévarication des gardes qui organisent eux-mêmes un commerce parallèle de la glace du roi. Les autorités ne sont pas dupes de ce trafic, comme en témoigne l’exemple du commissaire des glaces de Bellevue qui, remercié à la mort de Louis XV, ne reçoit aucune gratification car, aux dires de Marie-Adélaïde95 : « Le sieur Letendre n’est à aucun égard susceptible de l’indemnité qu’il demande96. » Ces abus entraînent parfois une pénurie de glace ; les privilégiés sont alors les premiers visés par les restrictions de la délivrance de glace.
- 97 AN, O11531157-158, 6 août 1764, voir annexe III-3.
- 98 Ibid.
49Ces mesures demeurent cependant insuffisantes et, en l’absence de glace, l’intendant doit trouver une solution de remplacement. Bellicard97, contrôleur de Compiègne, est, par exemple, contraint de faire appel à des particuliers pour fournir la glace nécessaire à la fin du séjour du roi, en août 1764. Il contacte tout d’abord le régisseur du domaine de Monché, voisin de Compiègne, qui propose de céder le contenu de sa glacière pour « quinze livres le cent », avant de lui préférer un limonadier qui fournit la glace au roi à meilleur compte98.
- 99 AN, M. C., ét. LXV, 15 août 1737, voir annexe III-2.
- 100 Voir à ce sujet J. Duma, Les Bourbon-Penthièvre, op. cit., p. 181 et suivantes ; K. Béguin, Les Pr (...)
50Afin d’éviter de telles pénuries, la duchesse du Maine prend le parti original de déléguer la gestion des glacières à un limonadier parisien avec lequel elle signe un « bail à glacière ». Le sieur François Fournier s’engage à livrer quotidiennement à la duchesse cent cinquante livres de glace (environ soixante-treize kilogrammes)99, contre l’utilisation des trois glacières de la ménagerie de Sceaux. Cette quantité — impressionnante — s’explique par le nombre des commensaux de la duchesse qui, à l’instar de ses pairs, entretient une cour renommée et un réseau de clients qui donne la mesure de la consommation d’une grande maison durant la première moitié du xviiie siècle100. Il faut par ailleurs remarquer que le bail passé avec Fournier oblige ce dernier à approvisionner le département de la bouche de la duchesse où qu’elle soit, exception faite du château de Danot (non localisé) qui dispose, on peut l’imaginer, également de glacières.
51Ce type de contrat demeure unique, à notre connaissance, pour les châteaux d’Île-de-France. En règle générale, les propriétaires renoncent à faire appel à des fournisseurs extérieurs en raison du coût élevé du transport et se chargent eux-mêmes du remplissage de leurs glacières.
Remplissage
- 101 AD Val d’Oise, 10J480, ch. 12, et 10J481, ch. 12.
- 102 AN, O11732175, voir annexe III-3.
- 103 AN, O1153193, voir annexe III-3.
- 104 AN, R1327, voir annexe III-3.
- 105 AN, NIII Seine-et-Marne 20410, voir annexe III-3.
52L’opération de remplissage est soumise aux conditions météorologiques et nécessite des équipes nombreuses et organisées. À La Roche-Guyon, le remplissage de la glacière requiert vingt-six hommes pendant quatre à six jours en 1744 et trente-sept durant cinq jours en 1745101. Nous retrouvons ce personnel de journaliers au château de Bellevue où cinq piqueurs et trente-sept ouvriers participent au remplissage des glacières durant deux jours, l’hiver 1761-1762102. L’année suivante, l’opération se déroule sur douze jours et les piqueurs ne sont plus que six103. Les employés au remplissage des glacières trouvent dans cette activité un complément de revenu utile dans une saison où les travaux des champs sont rares. Le coût annuel des glacières, malgré les variations climatiques, reste à peu près constant et s’élève à environ deux cents livres pour un particulier. Chez un prince du sang, comme le comte d’Artois, la somme de cinq cent trente-quatre livres requise pour le remplissage de la glacière de Bagatelle en 1783 s’explique par le nombre important d’ouvriers employés à cette tâche : quatre-vingt-seize104. On peut alors s’étonner que le budget du remplissage des glacières de Choisy se monte à un millier de livres en 1759 et celui de Fontainebleau à deux mille cinq cents livres en 1763105. Dans le cas de Choisy, Hazon, responsable du remplissage des glacières, rembourse la somme qu’il n’a pas utilisée à cette fin après la mauvaise récolte de l’hiver 1758-1759. À Fontainebleau, en revanche, cette opération, sous-traitée au sieur Tige, charron, revient à deux cent cinquante livres après que ce dernier a demandé une augmentation, suite à l’« augmentation de la famille royale ». Mais nous ne nous expliquons pas la différence de deux mille trois cents livres entre la somme allouée à Tige et celle portée au budget du château.
- 106 F. Blondel et L. Savot, L’Architecture française, op. cit., p. 218.
- 107 Voir ch. Morin, L’Art des glacières, 1660-1850, maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de (...)
53L’outillage utilisé se compose de pelles de bois (elles ne rouillent pas), de maillets, de crocs et de perches pour tirer les blocs de glace sur la rive des étangs et pièces d’eau. Il faut ajouter à cela quelques fournitures comme des chandelles, indispensables pour éclairer l’intérieur des glacières, et des fagots de bois destinés à isoler la glace du fond de la cuve. La glace amassée dans des tombereaux est voiturée jusqu’à la glacière où elle est pilée en un bloc compact sur lequel les ouvriers versent régulièrement de l’eau afin d’homogénéiser l’ensemble106. Le manteau de paille disposé autour de la glace rend l’isolation meilleure. La glacière est ensuite fermée jusqu’à l’été. Ce n’est qu’avant le lever du jour, aux heures les plus fraîches, que le préposé aux cuisines rompt alors la glace à l’aide d’un piolet et retire la quantité nécessaire pour la journée. La glace est ensuite stockée dans une armoire à glace installée dans l’office avant d’être utilisée dans la préparation des sorbets et desserts107.

Ill. 50. — Château de Saint-Cloud, glacière à former et couvrir de voûte le 26 avril 1711, dessin (AN, N III Seine-et-Oise 336).
Construction et implantation
- 108 Voir ibid., p. 8-14 ; ch. Morin, « Glacière, architecture », Encyclopaedia Universalis, CDROM vers (...)
54Trois éléments essentiels composent les glacières : une cuve maçonnée ou en bois, enterrée, de forme généralement tronconique, équipée d’un puisard destiné à évacuer les eaux de fusion, un élément de couvrement, charpenté ou maçonné (coupole), et enfin une ou plusieurs portes orientées vers le nord108, percées dans la couverture. Les exemples conservés témoignent de la forme la plus achevée des glacières, équipées de cuves maçonnées et couvertes de coupoles de pierre, comme à Bellevue notamment. Ce bâtiment requiert un aménagement particulier des abords afin de mieux assurer l’isolation de la glace. Il est donc préférable de loger la glacière dans un endroit sec, ombragé, de préférence à proximité des cuisines. Les glacières, aux trois quarts enterrées, sont généralement recouvertes de tertres plantés d’arbustes à feuilles persistantes comme les buis et les ifs, ou de bosquets d’arbres aux feuillages épais (marronniers ou tilleuls) qui permettent de retenir la terre. Leur ombrage empêche les rayons solaires de réchauffer la terre et isolent plus efficacement la glace. Ainsi, au château de Champs, la glacière disposée à droite de l’avant-cour, derrière le mur de clôture du domaine, ne se signale que par une porte de bois sans aucun décor, orientée au nord d’une butte plantée. Afin d’éviter que l’humidité n’entre dans la glacière et n’altère son contenu, la coupole est recouverte d’une couche de glaise, comme le montre la coupe d’un projet de glacière daté de 1711, pour le château de Saint-Cloud (ill. 50).

Ill. 51.— Château de Gennevilliers, Georges-Louis Le Rouge, plan du parc et du château, gravure, Jardins à la mode puis jardins anglo-chinois, Paris, Le Rouge, 1788, XXe cahier, pl. 1.
- 109 Voir à ce sujet J. Martin, Les Glacières françaises, Paris, 1997.
55Au château de Chamarande (Essonne), comme en de nombreux autres domaines, la glacière est construite loin du corps de logis109, dans la partie isolée d’un bois, à proximité de la ferme. L’implantation même de la glacière, rejetée loin du logis, dans une partie peu fréquentée du parc, montre le peu d’intérêt accordé à ce bâtiment vernaculaire ; son utilité seule lui donne de l’importance aux yeux du propriétaire. Il n’existe semble-t-il aucun rapport entre le prestige d’une table où l’on sert de la glace durant l’été et le bâtiment qui permet ce prodige. En effet, la glacière, élément nouveau dans l’histoire du château à l’époque moderne, ne figure pas parmi les « enseignes de la féodalité » au même titre que le four banal ou le pigeonnier ; son statut se résume à l’utilité, elle n’est en réalité qu’un simple accessoire.

Ill. 52. — Château de Gennevilliers, [Giovanni-Niccolo Servandoni], glacière dite « pavillon de l’Aurore », photographie ancienne, (musée de l’Île-de-France, Ph. 92 230.6).
La glacière au jardin
- 110 Ch. Morin, « Une nouvelle fabrique de jardin : la glacière monumentale », dans D. Rabreau (dir.), (...)
- 111 A. Lamy, Le Parc et le château de Gournay-sur-Marne, maîtrise d’histoire de l’art sous la directio (...)
- 112 Anonyme, Véritable vie du maréchal de Richelieu, Paris, 1996, p. 350.
- 113 Ch. Morin, « Une nouvelle fabrique de jardin… », op. cit., p. 213-214.
56Il faut attendre le milieu du xviiie siècle pour que les architectes s’intéressent à ce bâtiment et l’intègrent au jardin. L’éminence formée par la butte qui recouvre la glacière offre un point de vue sur lequel les architectes bâtissent des fabriques pittoresques ; elle devient un support de l’iconographie du jardin110. Les parcs de Gournay-sur-Marne (Seine-Saint-Denis) et Gennevilliers (Hauts-de-Seine), les premiers à notre connaissance à utiliser la glacière comme ornement du jardin, mettent en place une typologie qui n’évolue guère durant le xviiie siècle, avec d’une part un mont Parnasse111 organisé au-dessus de la glacière et d’autre part un temple de Mercure112 sur le modèle du temple de Vesta à Tivoli113 (ill. 51 et 52). Ces dispositifs exploitent deux aspects différents de la glacière. À Gennevilliers, Servandoni se contente seulement d’utiliser l’éminence formée par la coupole couvrant la cuve comme socle à son belvédère ; en revanche, à Gournay, tout l’édifice se transforme en attraction et les caveaux ménagés sous la glacière servent de vide-bouteilles. De même, la glacière du château de Villeroy (Essonne) est aménagée à l’occasion en auditorium, ainsi décrit par Dézallier d’Argenville :
- 114 A.-J. Dézallier d’Argenville, Voyage pittoresque des environs de Paris, op. cit., p. 253.
57La voûte qui couvre la glacière, loin de déparer le parc, y ajoute un ornement : elle soutient un bosquet qui s’élève en belvédère, dans le goût du limaçon exécuté au jardin du roi. Sous cette voûte, dans l’intérieur de la glacière est une galerie garnie d’une balustrade de fer destinée à la promenade de ceux qui s’amusent à faire retentir du son de leur voix l’écho que rend cette voûte. On y a même organisé des concerts114.

Ill. 53. — Jardins de Monceau, Louis Carrogis de Carmontelle, « vue de la hauteur du Minaret », gravure, publié dans Jardin de Monceau, Paris, Delafosse, 1779, pl. VIII.
- 115 Cette légende est donnée par G.-L. Le rouge, Jardins à la mode puis jardins anglo-chinois, Paris, (...)
- 116 P.-V. de Besenval, Mémoires, Paris, 1987, p. 155. M. Constant, Bagatelle dans ses jardins, Paris, (...)
- 117 On sait la manière dont Lewis Caroll utilisera ce personnage.
- 118 A. de Maurepas et F. Brayard, Les Français vus par eux-mêmes : le xviiiesiècle, Paris, 1996, p. 38 (...)
- 119 L. Carrogis de Carmontelle, Jardins de Monceau, près de Paris, appartenant à S.A.S. Mgr le duc de (...)
58Les thèmes retenus dans les différents cas recensés de glacières-fabriques, de la pagode chinoise au temple antique, donnent une clef de lecture, souvent mésestimée, aux jardins à programmes. À Bagatelle, Bélanger transforme la glacière en tour des paladins115. La référence aux mythiques chevaliers de Charlemagne renvoie à un monde onirique où la « gloire militaire » naissante du comte d’Artois, fait colonel général des gardes suisses en 1771116, apparaît comme un jeu digne d’un conte : l’île voisine de la tour des paladins n’abrite-t-elle pas le tombeau du roi de cœur117 ? L’iconographie du jardin oscille entre fiction et réalité. Le décor fantaisiste de tente militaire de la chambre d’Artois, les tours d’entrée du domaine sont à mettre en rapport avec le goût du prince pour le déguisement et le théâtre évoqué par le comte de Ségur118 ; cependant, le grade d’officier du prince et sa qualité de descendant d’Hugues Capet sont bien réels, et il faut se garder de ne voir que de l’autodérision dans cette iconographie guerrière. Deux ans après la construction du pavillon de Bagatelle, en 1779, de Carmontelle119 couvre d’un minaret la glacière de la folie du duc de Chartres à Monceau ; ce kiosque signale le caractère pseudo-oriental du jardin (ill. 53). Il n’est pas question, ici encore, de vérité historique et, Carmontelle, en présentant un Turc sur la gravure qu’il donne du bâtiment, évoque seulement un Orient d’opéra digne des Indes galantes.
59De manière générale, la glacière n’est plus, dans le cadre du jardin, l’apanage du maître maçon ou du chef d’office, elle passe sous la responsabilité de l’architecte, son implantation répondant désormais à des critères de composition. Racine de Monville brave ainsi les conseils des théoriciens qui recommandent d’orienter l’entrée des glacières au nord afin d’éviter que le soleil ne pénètre dans la cuve lors de l’ouverture et implante sa fameuse pyramide-glacière du désert de Retz de manière qu’elle offre une vue en biais, plus agréable depuis la colonne d’habitation. Le jardin anglo-chinois de Baudard de Saint-James dessiné par Bélanger livre un autre exemple d’implantation savante de la glacière, en dehors de tout impératif utilitaire. L’architecte organise un microcosme, raccourci poétique et philosophique du monde, par la confrontation des deux sagesses antique et orientale. La première est incarnée par la façade du temple dorique insérée dans le fameux rocher salle de bains, face auquel, au-dessus de la glacière, Bélanger dispose un kiosque chinois, entouré d’un réseau complexe de souterrain, grotte et salle fraîche.
Notes
1 A.-N. Dézallier d’Argenville, Voyage pittoresque des environs de Paris, ou description des maisons royales et autres lieux de plaisance, Paris, 1779.
2 A.-C. Quatremère de Quincy, Dictionnaire historique d’architecture, op. cit., t. III, p. 40.
3 J.-B. de La Quintinie, Traité de la culture des orangers, Paris, 1690, p. 413-414.
4 D. Diderot, Encyclopédie, Neuchâtel, 1779, t. XXIII, p. 863.
5 Ibid.
6 A.-C. Quatremère de Quincy, Dictionnaire historique d’architecture, op. cit., t. III, p. 40.
7 Mercure de France, Paris, 1686.
8 L. Hautecœur, Histoire de l’architecture classique, op. cit., t. II, p. 268.
9 Ch. Bourel-Le Guilloux, « Il castello e la grotta di Meudon », Francesco Primatice architecte, dans S. Frommel (dir.), Milan, 2005, p. 283.
10 M.-T. Herlédan, « Peut-on dater l’orangerie de Meudon ? », Bulletin de la Société des amis de Meudon, septembre 1987, p. 772.
11 P. Biver, Histoire du château de Meudon, op. cit., p. 210 et suivantes.
12 M.-T. Herlédan, « Peut-on dater l’orangerie de Meudon ? », op. cit., p. 776.
13 A.-C. d’Aviler, Cours d’architecture, op. cit., p. 197.
14 J. Guillaume, « La galerie dans le château français… », op. cit., p. 32-42.
15 J.-P. Babelon, Chantilly, op. cit., p. 32-35.
16 K. Krause, Die Maison de Plaisance, op. cit., p. 153.
17 Musée national de Stockholm, fonds Tessin, CC2175.
18 J. Guillaume, « La galerie dans le château français… », op. cit., p. 32-42.
19 Lettres de la princesse Palatine (1672-1722), Paris, 1985, p. 195, 5 décembre 1700.
20 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 14.
21 Ibid., t. I, p. 139.
22 Elle fut démolie sous le Second Empire.
23 Quarante toises sur cinq.
24 L. Hautecœur, Histoire de l’architecture classique, op. cit., t. II, p. 359.
25 Le coup d’État du 18 brumaire a lieu entre la galerie qui reçoit les délibérations du Conseil des Anciens et l’orangerie qui abrite celui des Cinq-Cents.
26 Nous devons ce néologisme à Monique Mosser.
27 Cette salle de spectacle est mentionnée dans l’inventaire après décès du Régent, AN, X1A9162, 16 mars 1724.
28 Légende portée sur la coupe de l’orangerie BNF Est. Va60, t. 12. ; J.-P. BaBelon, Album du comte du Nord, Saint-Rémy-en-l’Eau, 2000, p. 44.
29 J.-P. Babelon, Chantilly, op. cit., p. 138-139.
30 Ibid., p. 42-44.
31 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. I, p. 412.
32 Ibid., t. I, p. 215.
33 C.-É. Briseux, L’Art de bâtir les maisons de campagne, op. cit., t. I., p. 5 ; J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 78.
34 Cet esprit a marqué également la construction de l’orangerie de Bagatelle qui doit, pour sa façade, être rapprochée de celle de Herces.
35 J.-M. Pérouse de Montclos, Les Prix de Rome, op. cit., p. 52, 99-100, 154, 170. Les dessins des concurrents ne sont conservés que pour les années 1750, 1769 et 1781.
36 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. I, p. 392.
37 Ibid., t. IV, p. 182-183.
38 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. IV, p. 181-182.
39 D. Massounie, L’Architecture des bains privés, 1650-1810, maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de D. Rabreau, université Paris I, 1993, p. 69.
40 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 14 et 75, pl. 10 [8 pour l’auteur].
41 C.-É. Briseux, L’Art de bâtir les maisons de campagne, op. cit., t. I, p. 7.
42 C.-É. Briseux, ibid., t. I, p. 5-7, voir annexe I-9.
43 R. Edouard-André, « Documents inédits… », op. cit., p. 6.
44 J.-F. Blondel, Cours d’architecture, op. cit., t. IV, p. 182-183.
45 G. Joudiou, « Pierre Contant d’Ivry », dans J.-L. Baritou et D. foussart (dir.), Chevotet, Contant, Chaussard : un cabinet d’architectes au siècle des Lumières, Paris, 1987, p. 111.
46 AN, M.C., ét. LXXXVIII, 723, 28 février 1770, art. 487-511, voir annexe III-1. Nous remercions François Marandet de nous avoir communiqué cette information.
47 O. Choppin de Janvry, Le Désert de Retz, Croissy-sur-Seine, 1988, n° 35.
48 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 138.
49 S. Saudan-Skira, Orangeries, Cologne, 1998, p. 13, 126.
50 C.-J. de Ligne, Coup d’œil sur Belœil, Paris, 1997, p. 91.
51 J.-F. de Neufforge, Recueil élémentaire d’architecture, Paris, 1757-1765.
52 Herces, Sainte-Geneviève-des-Bois, Ménars notamment.
53 Arch. Inst. B 21, Claude-Nicolas Ledoux, 29 novembre 1767, cité par H. Ottomayer, « Autobiographies d’architectes parisiens », op. cit., p. 38.
54 D. Ramée, Architecture de C.-N. Ledoux, Paris, 1848, t. II, pl. 251 ; voir D. Rabreau, Claude-Nicolas Ledoux. L’architecture et les fastes du temps, Annales du centre Ledoux, Paris/Bordeaux, 2000, p. 64-65.
55 L’orangerie se trouve à gauche du corps de logis sur le plan gravé.
56 AN, NII Seine-et-Oise 1161-6.
57 M. le Moël et C.-F. Rochat, Catalogue général des cartes, plans et dessins d’architecture, Paris, 1972, t. III, p. 517 : « Plan de l’orangerie de Brunoy. »
58 AN, 60AP 8.
59 L.-V. Thiéry, L. Petit de Bachaumont, J.-C. Krafft entre autres.
60 C.-É. Briseux, L’Art de bâtir les maisons de campagne, op. cit., t. I, p. 5-7.
61 Voir L. Baudoux, « Jean-Baptiste Chaussard », dans J.-L. Baritou et D. Foussard (dir.), Chevotet, Contant, Chaussard, op. cit., p. 195.
62 AD Yvelines, A.F. 14, cité par M.-J. Michel, « La gestion seigneuriale des Phélypeaux », xviiie siècle, n° 15, 1983, p. 229.
63 AN, R3130.
64 P. Terver, Le Dernier Prince de Conti à L’Isle-Adam, Pontoise, 1987, p. 111.
65 AN, O11344, inventaire des ananas de l’orangerie de Choisy.
66 AN, R594, pièces 297 et 300.
67 K. Krause, qui donne cette date, rapproche les plans de la maison d’un projet d’Antoine Le Pautre, malgré l’attribution de Mariette à Nicolas Dullin, Die Maison de Plaisance, op. cit., p. 291.
68 Ibid., p. 203-217.
69 L’auteur se fonde sur les expertises de 1692 et 1699, AN, Z1j415, M. C. ét. LXV 126, 2 mars 1692, et 145, 12 juillet 1699.
70 J. Mariette, L’Architecture française, op. cit., t. I, pl. 353.
71 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 97 et suivantes.
72 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 12 et suivantes, p. 120 et suivantes.
73 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 137.
74 BNF Est. H 188 843.
75 J.-F. Blondel, De la distribution des maisons de plaisance, op. cit., t. I, p. 139.
76 Ibid., t. I, p. 12.
77 B. Pons, « Le château du duc d’Antin… », op. cit., p. 59.
78 J. Mariette, L’Architecture française, op. cit., t. II, pl. 320-325.
79 X. de Planhol, L’Eau de neige, Paris, 1995, p. 24-42.
80 Cité par R. Wittkower, Les Enfants de Saturne, Paris, 1991, p. 306.
81 J.-L. Flandrin, « Débat français autour du boire à la glace », dans A. Rousselle (dir.), La Glace et ses usages, Perpignan, 1999, p. 113-122.
82 L.-S. Mercier, Tableau de Paris, Paris, 1990, p. 368.
83 Ch. Morin, « Les fontaines de pierre », op. cit., p. 85.
84 AN, Z1j760, f°3 r°.
85 J. Mariette, L’Architecture française, op. cit., t. I, pl. 195.
86 B. Spinner et P. Prodoscimi, « Aspects scientifiques de la fabrication et de la conservation de la glace », La Glace et ses usages, op. cit., p. 105-112 ; voir annexe I-7.
87 AN, O18701 n° 1.
88 É. Le Roy Ladurie, Histoire du climat depuis l’an mil, Paris, 1993.
89 P. Verlet, Le Château de Versailles, Paris, 1992, p. 194 ; Ph. de Dangeau, Journal, Paris, 1854, t. I, p. 83.
90 AN, O11346290, 20 mars 1759.
91 AN, O113601, f° 4 v° : la description du domaine de Choisy indique qu’elles furent construites en 1740, voir annexe II-3.
92 AN, O11346290, voir annexe III-3.
93 AN, O11531 94, 28 décembre 1762.
94 O. Caffin-Carcy, « Les glacières du domaine de Versailles », Versalia, n° 4, 2001, p. 28.
95 Louis XVI donne le château à Mesdames à la mort de son prédécesseur.
96 AN, O11731168.
97 AN, O11531157-158, 6 août 1764, voir annexe III-3.
98 Ibid.
99 AN, M. C., ét. LXV, 15 août 1737, voir annexe III-2.
100 Voir à ce sujet J. Duma, Les Bourbon-Penthièvre, op. cit., p. 181 et suivantes ; K. Béguin, Les Princes de Condé, Paris, 1999, p. 149 et suivantes.
101 AD Val d’Oise, 10J480, ch. 12, et 10J481, ch. 12.
102 AN, O11732175, voir annexe III-3.
103 AN, O1153193, voir annexe III-3.
104 AN, R1327, voir annexe III-3.
105 AN, NIII Seine-et-Marne 20410, voir annexe III-3.
106 F. Blondel et L. Savot, L’Architecture française, op. cit., p. 218.
107 Voir ch. Morin, L’Art des glacières, 1660-1850, maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de D. Rabreau, université Paris I, 1993, p. 20-29.
108 Voir ibid., p. 8-14 ; ch. Morin, « Glacière, architecture », Encyclopaedia Universalis, CDROM version VII.
109 Voir à ce sujet J. Martin, Les Glacières françaises, Paris, 1997.
110 Ch. Morin, « Une nouvelle fabrique de jardin : la glacière monumentale », dans D. Rabreau (dir.), Paris. Capitale des arts sous Louis XV, Annales du centre Ledoux, Paris/Bordeaux, 1997, p. 211-218.
111 A. Lamy, Le Parc et le château de Gournay-sur-Marne, maîtrise d’histoire de l’art sous la direction de D. Rabreau, université Paris I, 1994, p. 39-44.
112 Anonyme, Véritable vie du maréchal de Richelieu, Paris, 1996, p. 350.
113 Ch. Morin, « Une nouvelle fabrique de jardin… », op. cit., p. 213-214.
114 A.-J. Dézallier d’Argenville, Voyage pittoresque des environs de Paris, op. cit., p. 253.
115 Cette légende est donnée par G.-L. Le rouge, Jardins à la mode puis jardins anglo-chinois, Paris, 1784, XIIe cahier, pl. 2.
116 P.-V. de Besenval, Mémoires, Paris, 1987, p. 155. M. Constant, Bagatelle dans ses jardins, Paris, 1997, p. 71, affirme pour sa part qu’il était grand maître de l’Artillerie.
117 On sait la manière dont Lewis Caroll utilisera ce personnage.
118 A. de Maurepas et F. Brayard, Les Français vus par eux-mêmes : le xviiie siècle, Paris, 1996, p. 385.
119 L. Carrogis de Carmontelle, Jardins de Monceau, près de Paris, appartenant à S.A.S. Mgr le duc de Chartres, Paris, 1779.
Table des illustrations
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Légende | Ill. 24. — Château de Chantilly, Jules Hardouin-Mansart, élévation de la galerie des cerfs et coupe de l’orangerie, 1er janvier 1683, dessin (BNF Est. Va 60, t. 12 R. de Cotte 198). |
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Légende | Ill. 25. — Château de Sceaux, projet de plan du rez-de-chaussée, à l’extrémité de l’aile gauche : la chapelle, dessin (Stockholm, musée national, coll. Tessin CC 1275). |
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Légende | Ill. 26. — Château de Sceaux, Jacques Rigaud, vue de l’orangerie, gravure (BNF Est., Va 17 pet. f° pl. 78). |
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Légende | Ill. 27. — Château de Saint-Cloud, orangerie et façade à l’ouest du château, [avant 1861], photographie (BNF Est., Va 92b f°, t. 2). |
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Légende | Ill. 28. — Château de Saint-Cloud, décor en trompe-l’œil de l’orangerie, dessin d’après Rousseau [?], (Londres, Victoria & Albert museum). |
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Légende | Ill. 29. — Château de Saint-Cloud, plan du premier étage, dessin (AN, N III Seine-et-Oise 4041). |
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Légende | Ill. 30. — Château de Herces, Jacques-Denis Antoine, façade nord de l’orangerie avec sa modénature ancienne, vers 1772, cliché de l’auteur. |
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Légende | Ill. 31. — Charles De Wailly, projet d’orangerie, élévation, Grand Prix de 1750, lavis et aquarelle, (ENSB-A PRA 33). |
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Légende | Ill. 32. — Château de Versailles, portail des grandes écuries, [Jules Hardouin-Mansart], 1679, cliché de l’auteur. |
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Légende | Ill. 33. — Pierre Panseron, projet d’orangerie, élévations et coupe transversale, Prix d’émulation de mai 1769, dessin (ENSB-A Pj 22 c). |
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Légende | Ill. 34. — Jacques-François Blondel, plan et élévation de la façade de l’orangerie, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie 1re, pl. 10. |
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Légende | Ill. 35. — Château de Chanteloup, P. Lenfant, vue cavalière du château de Chanteloup et de la ville d’Amboise, vers 1770, gouache, musée des Beaux-Arts de Tours. |
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Légende | Ill. 36. — Jean-François de Neufforge, projet d’orangerie, gravure, publié dans Recueil élémentaire d’architecture, Paris, Chariot d’or, 1757-1765, t. V, 54e cahier, pl. 6. |
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Légende | Ill. 37. — Château de Mauperthuis, Daniel Ramée, plan général du rez-de-chaussée, publié dans Architecture de Claude-Nicolas Ledoux, Paris, Perroneau, 1848, t. II, pl. 251. |
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Légende | Ill. 38. — Château de Sainte-Assise, Henri Piètre, plan de transformation de l’orangerie, rez-de-chaussée, 1775, dessin (AN, N III Seine-et-Marne 153). |
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Légende | Ill. 39. — Palais du Luxembourg, Jean-François-Thérèse Chalgrin, projet de transformation de l’orangerie, plan du rez-de-chaussée, [s. d.], dessin (AN, N III Seine-et-Oise 116). |
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Légende | Ill. 40. — Palais du Luxembourg, Jean-François-Thérèse Chalgrin, projet de transformation de l’orangerie, plan du premier étage, [s. d.], dessin (AN, N III Seine-et-Oise 116). |
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Légende | Ill. 41. — Folie Saint-James, [Jean-Baptiste Chaussard], élévation de la serre chaude, [vers 1785], dessin, musée de l’Île-de-France, Sceaux (inv. 37.2.130). |
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Légende | Ill. 42.— Pâté Paris, Jean Mariette, plan et élévation de l’orangerie, gravure, publié dans L’Architecture française, Paris, 1727, t. I, pl. 161. |
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Fichier | image/jpeg, 462k |
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Légende | Ill. 43. — Château de Montmorency, Jean Mariette, élévation de l’orangerie, sur les dessins de Gilles-Marie Oppenord, gravure, publié dans L’Architecture française, Paris, 1727, t. II, pl. 353. |
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Légende | Ill. 44. — Jacques-François Blondel, plan général du second projet de maison de plaisance contenant la distribution d’un bâtiment de quarante-cinq toises de face, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie II, pl. 15, p. 96. |
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Légende | Ill. 45. — Jacques-François Blondel, plan général des bâtiments et dépendances du château de Saint-Remy-sur-Havre, édifice de trente-cinq toises de face, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie III, pl. 22, p. 116. |
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Légende | Ill. 46. — Jacques-François Blondel, Château de Saint-Remy-sur-Havre, plan général du domaine, dessin (BNF Est. H1188843). |
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Légende | Ill. 47. — Jacques-François Blondel, plan général d’un palais et de ses environs, gravure, De la distribution des maisons de plaisance, Paris, Jombert, 1737, t. I, partie 1re, pl. 1, p. 18. |
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Légende | Ill. 48. — Château de Versailles, coupe de la deuxième glacière de Trianon, de l’étang [de Clagny] qui est vide, le caveau qui est vide et de la ménagerie qui est vide, [s. d.], dessin (AN O1 18701 n° 5). |
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Légende | Ill. 49. — Château de Versailles, Nicolas Heurtier, plan et coupe d’un projet de glacière pour conserver le gibier du roi, contresigné par le comte d’Angivilliers le 18 août 1778, dessin, (AN, O1 18701 pce 122). |
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Légende | Ill. 50. — Château de Saint-Cloud, glacière à former et couvrir de voûte le 26 avril 1711, dessin (AN, N III Seine-et-Oise 336). |
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Légende | Ill. 51.— Château de Gennevilliers, Georges-Louis Le Rouge, plan du parc et du château, gravure, Jardins à la mode puis jardins anglo-chinois, Paris, Le Rouge, 1788, XXe cahier, pl. 1. |
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Légende | Ill. 52. — Château de Gennevilliers, [Giovanni-Niccolo Servandoni], glacière dite « pavillon de l’Aurore », photographie ancienne, (musée de l’Île-de-France, Ph. 92 230.6). |
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Légende | Ill. 53. — Jardins de Monceau, Louis Carrogis de Carmontelle, « vue de la hauteur du Minaret », gravure, publié dans Jardin de Monceau, Paris, Delafosse, 1779, pl. VIII. |
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© Éditions de la Sorbonne, 2008