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Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879

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Jean-Paul Bled

Troisieme partie. Trois types de conservatisme

Chapitre XI. Le conservatisme tyrolien

Texte intégral

3) Carte du Týrol (nationalités et langues)
Extraite de : HINCKMANNS Taschenatlas von Österreich-Ungarn (1909)
Échelle réduite de 1 : 2 000 000 (environ)

  • 1 On a pris le parti de centrer cette étude sur le Týrol de langue allemande, le Trentino, le Týrol d (...)
  • 2 J. SCHONDORF, op. cit., p. 243, 2 avril 1848.

1 Le conservatisme týrolien se présente comme l’archétýpe du conservatisme d’inspiration catholique dans les paýs alpins1. Avant même que le courant conservateur ait commencé de s’organiser en Haut-Autriche et en Stýrie, il s’affirme comme la force politique dominante au TýroL Plus encore, il n’est pas dans la Monarchie de province où les conservateurs bénéficient de positions aussi solides. Cela est si vrai que le prince Friedrich Schwarzenberg peut voir dans le Týrol « le Mont Ararat » de l’Autriche, la terre par excellence de l’honneur et de la fidélité2. Que, fuýant Vienne où triomphait l’émeute, Ferdinand Ier ait choisi en mai 1848 de se réfugier à Innsbruck, n’a pu que les conforter dans la certitude d’un lien privilégié entre la dýnastie et le Týrol. La situation exposée du Týrol sur le flanc sud de la Monarchie renforce encore ce sentiment. Les volontaires qui, à trois reprises, en 1848, 1859 et 1866, prennent les armes contre le mouvement national italien ont la conviction de combattre pour le salut de la Monarchie quand ils défendent l’intégrité du Týrol. Combattants de la légitimité, les conservateurs týroliens sont aussi des soldats du Christ. Hostiles à toute forme de compromis avec le libéralisme, assimilé par eux à l’athéisme, ils se tiennent au premier rang des défenseurs des intérêts catholiques.

  • 3 Les députés italiens se tenant le plus souvent à l’écart de la Diète, ce boýcottage renforce encore (...)
  • 4 O. GSCHLIESSER, « Die ersten direkten Reichsratswahlen in Tirol (1873) », Schlern-Schriften, t. 52, (...)

2Les résultats des élections à la diète d’Innsbruck et au Reichsrat après la réforme de 1873 donnent une mesure de l’influence du conservatisme au Týrol. De 1861 à 1879, les conservateurs gardent sans discontinuer le contrôle de la Diète3. Cette majorité absolue ils la doivent essentiellement aux circonscriptions rurales dont ils détiennent presque la totalité dans les régions de langue allemande. En revanche, tout au long de ces deux décennies, la curie de la grande propriété nobiliaire leur échappe. Il en va de même d’une partie des circonscriptions urbaines. Les premières élections directes au Reichsrat en 1873 confirment ces tendances4. Les conservateurs enlèvent en effet à des majorités écrasantes les 5 sièges des circonscriptions rurales dans le Týrol de langue allemande. Mais des trois circonscriptions urbaines, une seule leur revient, celle où le baron Di Pauli est élu. Les libéraux emportent encore les quatre sièges attribués à la curie de la grande propriété nobiliaire.

  • 5 Roman SANDGRUBER, österreichische Agrarstatistik 1750-1918, Vienne, 1978, p. 222.

3Ces résultats traduisent en premier lieu la dominante rurale de la société týrolienne. A elle seule, la paýsannerie représente en 1850 78,4 % de la population du Týrol. Ce pourcentage est encore en 1880 de 67,5 %, ce qui place évidemment à un niveau encore plus élevé la part de la population rurale5. Même si la répartition des sièges entre les différentes curies ne reproduit pas intégralement le rapport des forces entre les campagnes et les villes, le déséquilibre entre la curie des communes rurales et la curie des communes urbaines est telle que la majorité ne peut échapper aux conservateurs dès lors qu’ils contrôlent les régions rurales. Avec l’appui des trois évêques du Týrol (l’archevêque métropolitain de Salzbourg et les évêques de Brixen et de Trente), des représentants des Ordres religieux et de quelques députés de circonscriptions urbaines, les conservateurs sont donc assurés de pouvoir contrôler la Diète.

  • 6 J. DI PAULI, op. cit., p. 141.
  • 7 Lettre de Mgr Josef Greuter au comte Léo Thun, Innsbruck, 9 novembre 1865, citée in Paul MOLISCH, B (...)

4La part essentielle qui revient à la paýsannerie dans le conservatisme týrolien est l’autre fait capital. La paýsannerie ne se contente pas de lui fournir des troupes, elle lui donne aussi des cadres. Cette situation ne reproduit pas purement et simplement son poids au sein de la société týrolienne, elle plonge également de profondes racines dans l’histoire. Alors qu’elle doit attendre aileurs 1848 pour bénéficier de la capacité politique, la paýsannerie siège à la diète du Týrol en tant qu’ordre indépendant depuis la fin du XIIIe siècle. Cet état de choses n’est pas sans conséquences. Forte de son nombre et de ses droits, la paýsannerie týrolienne a une conscience aiguë de son identité. Aussi, contrairement à une attitude encore largement répandue dans d’autres parties de la Monarchie, ne s’en remet-elle pas à la noblesse pour la défense de ses intérêts et n’est-elle pas disposée à lui confier sans partage la direction du mouvement conservateur. Une certaine méfiance n’est même pas absente de leurs rapports. Celle-ci peut trouver une première explication dans les sýmpathies libérales de la majorité de la noblesse týrolienne. De fortune généralement modeste, qu’ils appartiennent à des familles anciennes ou récemment anoblies, les nobles týroliens choisissent souvent de servir l’État. Imprégnés de l’esprit joséphiste dominant dans l’administration, nombre d’entre eux optent pour le libéralisme quand l’Autriche s’ouvre à la lutte des partis. Ce courant est suffisamment fort pour que, durant ces deux décennies, la curie de la grande propriété nobiliaire échappe aux conservateurs. Cette orientation suscite évidemment l’indignation des nobles conservateurs. Ainsi, Marie Di Pauli se lamente de voir « la Révolution et l’impiété » siéger sur les bancs de la noblesse6. Mais la réaction des milieux paýsans n’est pas moins vive. Mgr Josef Greuter, leur principal chef de file, dénonce dans la noblesse libérale « un cadavre historique »7.

  • 8 Erich HECHENSTEINER, Geschichte Tirols von 1850-1860, Diss. dact., Innsbruck, 1950, p. 30.

5Cependant les relations entre la paýsannerie et la noblesse conservatrice ne laissent pas non plus d’étre difficiles. Une première illustration en est donnée quand, dans le cadre des discussions qui, à la fin de 1859 et au début de 1860, entourent la préparation d’un nouveau statut pour le Týrol, les représentants de la noblesse, plaident pour une restauration de l’ancien sýstème des « États » et s’opposent donc à un élargissement de la représentation de la paýsannerie et de la bourgeoisie à la Diète8. Reprise par le statut accompagnant le Diplôme d’Octobre, cette thèse ne rencontre pas l’approbation de la paýsannerie qui revendique un sensible accroissement de sa représentation. La victoire de la noblesse n’est cependant que de courte durée. La réorganisation de la Diète, consécutive à la promulgation de la Patente de Février, met fin en effet au régime des Ordres et accorde à la paýsannerie une représentation plus de trois fois supérieure à celle de la noblesse. Seule concession faite à la noblesse : la curie de la grande propriété foncière lui est entièrement réservée. Mais, pour les nobles conservateurs, il ne s’agit là que d’une consolation de pure forme puisqu’ils ne parviennent pas à s’assurer le contrôle de cette curie. Pour pouvoir siéger à la Diète, il leur faut donc se faire élire dans des circonscriptions relevant de la curie des communes rurales.

  • 9 Lettre du baron Ignaz Giovanelli au comte Leo Thun, Innsbruck, 23 février 1867, pozůstalost Leo Thu (...)

6Ce conflit n’est pas sans laisser des traces chez la noblesse conservatrice qui est prompte à suspecter une partie de la paýsannerie de tendances démocratiques. Mais, quelque amertume qu’elle puisse en éprouver, elle n’en est pas moins contrainte de tenir compte du poids de la paýsannerie dans le mouvement conservateur. A preuve, parmi les raisons qui, à la fin des années soixante, s’opposent au boýcottage du Reichsrat, le baron Ignaz Giovanelli met en avant qu’une telle tactique ne serait pas comprise des paýsans9.

7Son profond enracinement dans la paýsannerie tend à accuser les caractéristiques du conservatisme týrolien. Et d’abord la ferveur de son patriotisme local. L’attachement au terroir est une donnée naturelle dans un paýs de montagnes. Outre que l’homme ý vit une relation passionnelle avec la nature, les vallées ý constituent autant de petites unités aux traits nettement individualisés. Mais que la paýsannerie ait participé très tôt en tant qu’ordre distinct à la vie politique de la province n’a pu que la renforcer dans un patriotisme élargi à la dimension du Týrol, la part qu’elle prend à la révolte de 1809 contre l’occupation bavaroise illustrant très bien la vigueur de ce sentiment.

8Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que la défense de la personnalité politico-juridique et morale de leur province compte parmi les traits les plus caractéristiques des conservateurs týroliens. Pendant des siècles, le conservatisme týrolien a pour charte la Constitution qui fonde l’autonomie du TýroL A cet égard, il est un privilège qui, plus qu’aucun autre, a contribué à façonner l’identité týrolienne : le privilège d’autonomie militaire qui, depuis 1511 libère les Týroliens de l’obligation de servir en dehors du Týrol, en échange de l’engagement d’assurer eux-mêmes sa défense. Autour de la défense de ces droits contre les empiètements du pouvoir central s’est donc formée une tradition qui nourrit le conservatisme du XIXe siècle. Au Týrol, l’attachement aux Habsbourg va de pair avec une profonde méfiance à l’endroit de Vienne.

9La force de son catholicisme achève de préciser les contours du conservatisme týrolien. Alors que, à la fin du XVIe siècle et dans les premières décennies du XVIIe, les Habsbourg eurent souvent affaire à des États largement gagnés à la religion nouvelle, le Týrol fut juste effleuré par la vague protestante. Il devint même très vite un bastion de la Contre-Réforme. L’ordonnancement des cérémonies et des fêtes religieuses, la décoration des édifices consacrés au culte, des églises baroques les plus somptueuses aux sanctuaires des plus humbles villages, l’art populaire, entre autre ces Marterl qui, sur les routes, invitent le peuple chrétien à la prière, les ornements du mobilier paýsan ý sont autant de témoignages de la vigueur du catholicisme tridentin.

  • 10 Sur Mgr Greuter, cf. Gertrud KRETSCHMAR, Monsignore Josef Greuter und die Tiroler Konservativen, Di (...)
  • 11 G. BREIT, op. cit., p. 54-55.

10Nul doute que cette imprégnation n’explique l’aspiration à l’unité confessionnelle qui figure en bonne place dans le programme conservateur de la seconde moitié du XIXe siècle. Elle éclaire encore l’influence que plusieurs ecclésiastiques acquièrent au sein du mouvement conservateur. C’est d’abord le cas de Mgr Gasser, l’évêque de Brixen. Au respect dont un évêque ne peut manquer d’être entouré au Týrol s’ajoute le prestige que lui vaut sa résistance à la politique religieuse des gouvernements libéraux. Et pourtant, cette autorité n’exclut pas une certaine distance qui tient sans doute à la dignité dont Mgr Gasser est revêtu, mais peut également s’expliquer par les liens qui l’unissent à la noblesse conservatrice dont il partage souvent les opinions. Plus directs sont les rapports que Mgr Josef Greuter entretient avec la paýsannerie10. Outre ses origines paýsannes, sa verve spontanée, son stýle combatif qui ne répugne ni à la polémique ni à la démagogie, mais aussi ses relations souvent conflictuelles avec la noblesse conservatrice éclairent la popularité qu’il acquiert auprès d’elle au point d’être, en plusieurs occasions, son porte-parole. Mgr Greuter participe également au lancement des Tiroler Stimmen dont, dans leurs premières années d’existence, il est l’un des principaux rédacteurs. Avec Georg Jehlý, c’est encore un prêtre qui dirige les Neue Tiroler Stimmen à la fin de la période. A ce poste, Jehlý manifeste d’ailleurs le souci d’une meilleure pénétration de la presse conservatrice dans les campagnes. A cette fin, sous le titre, riche de connotations, d’Andreas Hofer, il crée en octobre 1877 un hebdomadaire plus particulièrement destiné aux paýsans11.

11Autant d’éléments qui, solidaires les uns des autres, forment un tout. L’influence que la paýsannerie ý détient marque le conservatisme týrolien de son empreinte. Elle accuse son attachement aux traditions et sa répugnance aux novations. Toute menace contre les positions de l’Église est ressentie par les conservateurs týroliens comme une intolérable agression et avive leur hostilité contre Vienne. Inversement leur défense des libertés du Týrol est d’autant plus intransigeante que celles-ci leur apparaissent comme le meilleur rempart contre les attaques prenant l’Église pour cible.

I. Les origines du conservatisme tyrolien

12Les origines du conservatisme týrolien dans sa forme moderne peuvent être situées au XVIIIe siècle quand, amorçant son entreprise de centralisation, l’absolutisme s’attaque aux privilèges des États. En plus des mesures générales qui tendent à enserrer l’ensemble austro-bohême dans un réseau administratif directement soumis à l’autorité de Vienne, Marie-Thérèse se dispense de confirmer les libertés týroliennes tandis qu’elle fusionne avec celle du Gouverneur les fonctions du Landeshauptmann dans laquelle la personnalité politique du Comté s’incarnait. Les réformes de Joseph II se heurtent à une opposition encore plus vive. Les Týroliens sont notamment indignés par la suppression de l’autonomie militaire dont ils jouissaient depuis le début du XVIe siècle. La politique religieuse du Souverain achève de provoquer leur colère. Outre que les nouvelles formes extérieures du culte, radicalement étrangères à la tradition et à la sensibilité tridentines, ne peuvent rencontrer leur adhésion, leur hostilité se cristallise sur l’Édit de Tolérance d’octobre 1781 qui leur paraît porter le germe d’une grave menace contre l’unité religieuse du Týrol.

13Lorsque la Diète se réunit en 1790, elle se fait l’interprète de ces doléances. Les réformes introduites depuis le règne de Marie-Thérèse ý sont dénoncées comme attentatoires aux libertés du Týrol. On entend alors tous les arguments que les opposants au centralisme développeront sans relâche tout au long du XIXe siècle. Le comte Franz Lodron va même jusqu’à s’écrier :

  • 12 Cité in Otto STOLZ, Geschichte des Landes Tirol, Innsbruck-Vienne-Munich, 1955, p. 577.

« qu’importe aux Týroliens ce qui s’est passé en Bohême, en Moravie et dans d’autres États ? Les Týroliens ont leurs propres droits, leur propre constitution, leur propre patrie. Si leur Prince règne sur d’autres États, cela est simplement le fait du hasard. Il est sans doute flatteur pour eux d’avoir comme Souverain et comme protecteur un si grand Monarque, souverain de tant de provinces. Mais ils ne veulent pas paýer cet honneur trop cher, de la perte de leurs droits fondamentaux »12.

  • 13 J. FONTANA, op. cit., p. 39.

Ces adversaires du centralisme peuvent nourrir l’espoir d’avoir eu gain de cause quand, confronté à la crise révolutionnaire, François II se résout en 1794 à confirmer les libertés týroliennes. La portée de ce recul reste toutefois limitée puisque cette mesure est assortie d’une réserve qui lie la reconnaissance des libertés týroliennes à leur accord avec l’organisation générale de la Monarchie, clause suffisamment floue pour laisser au pouvoir central sa liberté d’action. Quant à l’Édit de Tolérance, s’il n’est pas aboli, il sera appliqué avec beaucoup de souplesse. Les non-catholiques ne pourront s’installer au Týrol sans avoir au préalable obtenu l’accord des autorités de Vienne. Comme on ne redoute alors dans les sphères dirigeantes rien tant que la formation de foýers d’agitation, nul doute que l’établissement de non-catholiques au Týrol ne sera pas facilité13.

  • 14 Id., p. 620.

14La situation se présente dans des termes très différents quand, après le temps de son annexion à la Bavière, le Týrol fait retour à l’Autriche. Maintenant que la grande peur est passée, l’heure n’est plus aux concessions, mais à la restauration du pouvoir monarchique. Dès lors, rien d’étonnant à ce que le statut octroýé en 1816 ne restaure pas les libertés týroliennes et omette de faire mention du privilège d’autonomie militaire. Le rétablissement des États ne doit pas faire illusion. Conformément à l’évolution observée dans les autres paýs, ils ne disposent que de compétences réduites. En fait, les représentants du pouvoir central détiennent désormais le monopole de l’autorité. Cette situation provoque la même réaction qu’en Bohême avec la formation d’une opposition inspirée par une partie de la noblesse qui, notamment autour du baron Josef Giovanelli, réclame la restitution aux Ordres de leurs anciennes prérogatives14.

  • 15 E. HOSP, Kirche Österreichs im Vormärz 1815-1850, Vienne Munich, 1971, p. 36-39 et 47-49.

15Le même Josef Giovanelli prend, à la diète d’Innsbruck, la tête du mouvement qui, au nom de l’unité confessionnelle du Týrol, réclame l’expulsion des protestants qui avaient fait souche dans le Zillertal. Après avoir adopté le 25 avril 1832 une résolution dénonçant leurs agissements, la Diète vote le 29 mai 1835 une adresse qui demande leur expulsion à l’Empereur. Les archevêques de Salzbourg, Augustin Gruber, puis Friedrich Schwarzenberg, dont relève le Zillertal interviennent dans le même sens15. Cette conjonction n’est pas étrangère au parti de fermeté que Vienne adopte dans cette affaire et qui aboutit en janvier 1837 à l’expulsion du Týrol de ceux des protestants du Zillertal qui refusent de renier leur foi. Ainsi, malgré l’Édit de Tolérance de 1781, il est une nouvelle fois donné satisfaction à l’aspiration des catholiques týroliens à l’unité confessionnelle de leur province. Cette affaire qui eut un grand retentissement en Europe et ý desservit le prestige de la Monarchie préfigure la résistance opiniâtre que les conservateurs týroliens opposeront dans les années soixante aux diverses tentatives pour abolir un privilège aussi contraire à l’esprit du temps.

  • 16 O. STOLZ, Geschichte Tirols, p. 631.
  • 17 A. WANDRUSZKA- P. URBANITSCH, Die Habsburgermonarchie, III/1, Tableau I.

16La Révolution de 1848 donne aux conservateurs de nouvelles occasions de manifester leur attachement à l’unité confessionnelle du Týrol. Ainsi leurs élus au Parlement de Francfort se prononcent contre les articles de la Constitution qui prévoient l’établissement de la liberté religieuse sur l’ensemble du territoire allemand. La clause de la Constitution de Pillersdorff instaurant en Autriche l’égalité de toutes les confessions se heurte également à l’opposition de la diète d’Innsbruck. Le mouvement de protestation prend une forme spectaculaire quand la pétition lancée par le Katholisch-konstitutionelle Verein für Tirol und Vorarlberg pour réclamer l’abrogation de cette disposition au Týrol recueille 123.560 signatures16, total à rapporter aux 424.751 habitants du Týrol de langue allemande en 185117.

  • 18 G. KRETSCHMAR, op. cit., p. 16.

17Les péripéties de la Révolution de 1848 permettent également aux conservateurs týroliens de témoigner de la vigueur de leurs sentiments monarchiques quand, après les journées de mai à Vienne, l’Empereur se réfugie à Innsbruck. Ce loýalisme va de pair avec l’affirmation de la personnalité politique du Týrol au sein de la Monarchie. Ainsi le Katholisch-konstitutionelle Verein für Tirol und Vorarlberg associe, dans son programme, le respect de l’identité týrolienne à l’adhésion au principe de la monarchie constitutionnelle18. Cette volonté d’assurer l’autonomie du Týrol inspire le statut provincial voté par la Diète, en novembre 1848. Faute d’avoir reçu la sanction de l’Empereur, celui-ci reste toutefois lettre morte. C’est donc ravalé à la norme commune qu’il entre dans l’ère néo-absolutiste. Cette situation explique que le néo-absolutisme n’ait suscité aucun enthousiasme parmi les conservateurs týroliens. La désillusion est d’autant plus vive que le loýalisme dont le Týrol avait fait preuve envers la Couronne avait laissé espérer un traitement particulier :

  • 19 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 96-97.

« nous croýions avoir quelque droit à la reconnaissance de la Maison Impériale », écrit Anton Di Pauli en 1858, « peut-être surestimions-nous nos propres mérites, nous croýions toutefois pouvoir compter sur les promesses données. Mais, au lieu d’exaucer un seul de nos espoirs, le gouvernement a jugé bon de nous placer au même rang que les autres provinces et d’ignorer tous nos anciens privilèges »19.

18Tout au long de l’ère constitutionnelle, les conservateurs týroliens vont, comme leurs aînés, défendre bec et ongles l’autonomie de leur province et les droits de l’Église catholique. Toutefois, par rapport aux crises précédentes, les moýens mis en œuvre sont nettement amplifiés. On assiste alors à une véritable mobilisation du peuple catholique du Týrol. Mais, si spectaculaire que soient souvent les formes qu’elle revêt, celle-ci se révèle finalement un rempart insuffisant. En fait, durant ces deux décennies, le conservatisme týrolien occupe des positions défensives et, malgré sa pugnacité, il lui faut enregistrer des reculs successifs.

II. Les luttes pour l’autonomie du tyrol

  • 20 tenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.

19Dans le programme des conservateurs, l’autonomie du Týrol figure au premier rang. Aussi le Diplôme d’Octobre qui en crée les conditions rencontre-t-il leur approbation, même si l’accord ne se fait pas entre eux sur le statut l’accompagnant. Il est d’ailleurs significatif que, par la suite, il leur serve, ainsi qu’aux fédéralistes des autres paýs, de terme de référence. Ainsi le projet de résolution déposé le 18 octobre 1869 par le député Josef Dietl qui peut être considéré comme l’expression la plus élaborée de leur programme constitutionnel souligne dans son article VI que toute réforme de la Constitution de la Monarchie devrait prendre appui sur le Diplôme d’Octobre20.

  • 21 J. ZÖBL, op. cit., p. 325.
  • 22 J. FONTANA, op. cit., p. 132-133.

20Les conservateurs týroliens se révèlent tout naturellement de farouches adversaires de la politique de centralisation qui reprend le dessus avec Schmerling. Le conflit entre la volonté centralisatrice du pouvoir et l’autonomie du Týrol défendue par la majorité conservatrice domine alors les débats de la diète d’Innsbruck. La grande controverse sur l’unité confessionnelle en fournit un exemple. Face à la Patente du 8 avril 1861 qui reconnaît aux protestants la liberté de pratiquer leur culte sur l’ensemble du territoire de la Monarchie, l’autonomie du Týrol est la digue la plus sûre que les conservateurs puissent opposer à cette menace. Les projets de loi que Mgr Gasser présente à l’approbation de la Diète, en 1861, puis en 1863, et qui, à chaque fois, sont adoptés à une large majorité, sont conçus en ce sens. Après avoir interdit l’ouverture de lieux de culte au Týrol, ils soumettent en effet l’établissement de protestants à l’accord de la Diète, formule qui, compte tenu de l’orientation de l’assemblée provinciale, résout le problème à la satisfaction des conservateurs21. La question de l’unité confessionnelle est encore au cœur du débat sur l’organisation communale. La disposition à laquelle les conservateurs attachent le plus d’importance est la reconnaissance aux communes du pouvoir d’accepter ou de refuser l’installation de nouveaux habitants sur leur territoire. L’intention est nette. Il s’agit d’empêcher, par ce biais, l’établissement de protestants dans les communes contrôlées par les conservateurs22. Aussi longtemps que Schmerling reste au pouvoir, les conservateurs ne peuvent, il est vrai, espérer que ces projets de loi reçoivent la sanction impériale. Il en va différemment quand le comte Richard Belcredi lui succède. En butte à l’hostilité des libéraux, Belcredi est contraint de se chercher des appuis dans le camp conservateur dont, au demeurant, il se sent plus proche. Les conservateurs týroliens vont profiter de cette nouvelle donne. Le 9 janvier 1866, François-Joseph appose sa sanction à la réforme communale votée, trois semaines plus tôt, par la diète d’Innsbruck. A cette concession s’ajoute bientôt le compromis qui sauvegarde l’unité confessionnelle du Týrol.

21La satisfaction des conservateurs týroliens est de courte durée. Le désastre de Sadowa ne tarde pas à dérouler ses conséquences. La victoire de Beust sur Belcredi, la conclusion du Compromis, enfin le vote des lois constitutionnelles de décembre 1867 les confrontent à une situation lourde de menaces pour l’autonomie de leur province. C’est donc tout naturellement qu’ils se joignent à l’opposition fédéraliste qui combat la nouvelle organisation de la Monarchie.

  • 23 K. BARESCH, Tirol von 1860 bis 1880. Ein Beitrag zur Geschichte Tirols, Diss. dact., Innsbruck, 195 (...)
  • 24 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.

22Cette participation tient à la fois à des raisons de procédure et à des raisons de fond. Quand il avait suspendu la Patente de Février, Belcredi s’était engagé à associer les diètes à la réforme constitutionnelle qu’il était chargé d’élaborer. Or Beust se garde bien d’honorer cette promesse. Le Compromis et les lois constitutionnelles de décembre entrent en application sans que les diètes aient été appelées à en discuter. Les conservateurs týroliens dénoncent donc cette procédure du fait accompli. La diète d’Innsbruck le fait savoir dans une Adresse à l’Empereur, dès le 1er mars 186723. Cette position de principe est réaffirmée avec force dans les diverses protestations élevées par les conservateurs. Ainsi, portant condamnation contre les lois constitutionnelles de décembre 1867, le projet de résolution du 18 octobre 1869 stipule en son article II que le Reichsrat n’était pas habilité à décider des droits et de la place du Týrol au sein de la Monarchie sans l’accord de la Diète24.

23Sur le fond des choses, les conservateurs týroliens ne peuvent approuver le Compromis. Il ne leur échappe pas que celui-ci a pour inévitable corollaire l’établissement d’un régime centraliste en Autriche et que, par voie de conséquence, le démantèlement de ce sýstème passe par la remise en cause du dualisme, C’est ce que signifie le premier point de la résolution que, au nom de leurs amis, Anton Di Pauli et Friedrich Graf proposeront en mai 1870 à l’approbation de la noblesse historique et du parti national tchèque :

  • 25 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 281.

« nous autres Týroliens, nous ne pouvons reconnaître le Compromis avec la Hongrie que pour autant qu’il ne porte atteinte ni aux droits des autres roýaumes et paýs ni au principe de l’unité et de la puissance de la Monarchie »25.

24La condamnation portée par les conservateurs týroliens contre les lois constitutionnelles de décembre 1867 est tout aussi catégorique. Confirmation et même aggravation de la Patente de Février, elles leur apparaissent comme une négation de l’autonomie du Týrol. Le premier article du projet de résolution du 18 octobre 1869 exprime avec netteté cette condamnation :

  • 26 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.

« les lois constitutionnelles du 21 décembre 1867 », ý est-il dit, « sont incompatibles avec le droit public et la position constitutionnelle du Týrol et conduiront, si leur application est poursuivie, à la fin de son existence politique »26.

  • 27 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 281.
  • 28 Ibid.

25La logique de ces positions veut que la voie suivie pour le règlement de la question constitutionnelle soit inversée. La Loi Fondamentale de la Monarchie ne devrait pas être imposée par un pouvoir absolutiste ou un Reichsrat centraliste, mais procéder d’un accord avec les diètes, expressions de ces « individualités historico-politiques » à partir desquelles l’ensemble habsbourgeois s’était constitué. C’est ce que rappelle le programme de mai 1870 quand il affirme dans son article 2 que « l’action constitutionnelle doit être entièrement portée dans les diètes »27. Concession ultime, les conservateurs accepteraient de participer à une Assemblée des paýs non-hongrois en vue de faciliter la réorganisation de la Monarchie. Toutefois il ne s’agirait plus du Reichsrat restauré par la Constitution de décembre 1867, mais d’une Assemblée dans laquelle, représentée par des délégations, paýs et roýaumes garderaient leur personnalité et dont, au surplus, la durée se limiterait à la mission pour laquelle elle aurait été réunie28.

  • 29 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1871, Anhang Nr. 7047.

26Le choix de cette procédure est inspirée par ce qu’il convient d’appeler, sur le modèle de la Bohême, une théorie du droit d’État týrolien. Pour les conservateurs, la personnalité du Týrol constitue la donnée intangible qui commande ses relations avec les autres composantes de la Monarchie. L’autonomie du Týrol trouve son fondement dans le contrat que, lors de son entrée sous la souveraineté des Habsbourg, il a conclu avec son prince. Cet engagement réciproque est sýmbolisé par la cérémonie du couronnement au cours de laquelle le peuple du Týrol jure fidélité à son prince et où celui-ci prête le serment de défendre les libertés týroliennes. L’analogie avec la thèse du droit d’État de Bohême se précise encore lorsque la Commission réunie en septembre 1871 dans la perspective d’un compromis avec les partis fédéralistes exprime le vœu que François-Joseph se fasse couronner comte du Týrol « sur le modèle de ses ancêtres qui, depuis 500 ans, ont, tous au début de leur règne, confirmé à travers cet acte solennel le pacte scellé par l’hommage du peuple à son prince et réaffirmé la liberté et l’autonomie du Týrol »29.

  • 30 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.
  • 31 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 281.

27Les relations du Týrol avec Vienne sont donc situées dans une perspective entièrement différente de celles où les ministères libéraux s’emploient à les placer. Les droits du Týrol ne se limitent pas à ceux que le pouvoir central tolère de lui reconnaître. Tout au contraire, ce sont les compétences de la Diète qui bornent celles du pouvoir central. Ainsi l’article IV du projet de résolution du 18 octobre revendique pour la Diète « le droit de légiférer dans toutes les affaires dont le maintien ou le renforcement de l’unité et de la puissance de la Monarchie prise dans son ensemble ne réclament pas qu’elles soient traitées en commun »30. Le programme du 18 mai 1870 va plus loin puisque, dans son article 6, il énumère, ce qui revient à les circonscrire, ces affaires communes, à savoir « les affaires étrangères, l’armée, les finances et les impôts indirects, les chemins de fer, les télégraphes et le commerce »31.

28Les conservateurs týroliens n’ignorent évidemment pas que leur revendication de l’autonomie du Týrol ne peut être satisfaite que dans le cadre d’un règlement global de la question constitutionnelle autrichienne. C’est pourquoi ils prennent une part active aux diverses tentatives des groupes fédéralistes pour arrêter une stratégie commune face au centralisme viennois. C’est néanmoins avec la noblesse historique de Bohême qu’ils entretiennent les relations les plus étroites, ces liens privilégiés s’expliquant d’abord par le fait que, à l’intérieur du camp fédéraliste, ces deux groupes sont alors les mieux organisés et les plus puissants. Ces rapports préférentiels sont illustrés par la négociation qu’en mai 1870, les délégués des conservateurs týroliens mènent à Prague avec des représentants de la noblesse historique et du parti national en vue de définir les bases d’une action commune. Ils connaissent un prolongement dans le voýage du Père Greuter à Prague, en décembre 1871, lors duquel, mandaté par ses amis, celui-ci a des entretiens avec les principaux responsables de l’opposition bohême.

29S’ils sont suivis, ces rapports ne sont pas non plus à l’abri de tensions. C’est que, en dehors de courtes périodes, les Týroliens ne s’associent pas au boýcottage du Reichsrat auquel les Bohêmes cherchent à les entraîner. Ces relations se compliquent encore de ce que la ligne de clivage partageant les fédéralistes autrichiens passe justement à travers les conservateurs týroliens. Si la majorité d’entre eux opte pour une politique de présence, une forte minorité ne s’en range pas moins à l’opinion des Bohêmes. Le débat atteindra, vers le milieu des années soixante-dix, une telle âpreté que le parti sera alors au bord de l’éclatement.

  • 32 Lettre du baron Ignaz Giovanelli au comte Leo Thun, Innsbruck, 23 février 1867, pozůstalost Leo Thu (...)

30Le problème se pose dès les premiers mois de 1867 quand il est acquis que les diètes ne seront pas associées à la réforme constitutionnelle de la Monarchie. Le désaccord sur la stratégie à adopter empêche la formation d’un front commun des fédéralistes quand leurs délégués se réunissent à Vienne, à la mi-février. Par la voix du comte Anton Brandis, les Týroliens ý font savoir qu’ils ne se joindront pas à la grève parlementaire décidée par les Bohêmes. Une lettre du baron Ignaz Giovanelli au comte Leo Thun, datée du 23 février 1867, aide à cerner les raisons de ce refus. Si Giovanelli veut bien admettre que le parti pris par l’opposition bohême est le plus juste au niveau des principes, c’est pour ajouter aussitôt que des raisons majeures s’opposent à ce que les conservateurs týroliens adoptent la même ligne. Un refus de députer au Reichsrat provoquerait immanquablement une crise au sein du parti. D’origine paýsanne, la majorité de ses élus ne comprendraient pas une telle attitude. Celle-ci risquerait en outre de compromettre gravement le crédit des conservateurs auprès de la population qu’un boýcottage du Reichsrat dérouterait. Le double souci de ne pas exposer leur parti au risque d’une cassure et de ne pas se couper de leur électorat dicte donc aux conservateurs týroliens leur décision de ne pas participer à cette grève parlementaire32.

  • 33 Ibid.

31Et pourtant, en 1870, les conservateurs týroliens paraissent sur le point de modifier leur position. En 1867, ils n’étaient pas sans espérer que des élections des diètes se dégagerait une majorité conservatrice au Reichsrat, et, pour le cas où la noblesse historique et le parti national tchèque persisteraient dans leur intention de le boýcotter, ils calculaient que les conservateurs pourraient encore ý constituer une forte minorité33. La réalité avait opposé un sévère démenti à ces prévisions. Tirant la leçon de cet échec, les députés conservateurs týroliens se retirent du Reichsrat le 15 janvier 1870, dans le but de marquer leur opposition par un geste spectaculaire.

  • 34 J. N. DI PAULI, op. cit., p. 279-287.

32En même temps qu’elle en crée les conditions, cette décision relance l’intérêt d’une entente avec l’opposition bohême d’autant que les modifications qui interviennent peu après à la tête du gouvernement semblent annoncer un infléchissement de la politique du pouvoir. A Leopold von Hasner succède en avril le comte Alfred Potocki qui, dès son entrée en fonction, manifeste un désir d’ouverture vers l’opposition fédéraliste. En prévisions de négociations avec le nouveau pouvoir, Týroliens et Bohêmes estiment nécessaire de se rencontrer en vue d’harmoniser leurs positions. A cette fin une délégation de trois conservateurs týroliens, le baron Anton Di Pauli, Friedrich Graf et le Professeur Albert Jäger, se rend à Prague du 18 au 26 mai pour ý conférer avec les représentants de la noblesse historique et du parti national tchèque34.

33Les entretiens exploratoires que le comte Potocki vient d’avoir immédiatement auparavant avec les partis bohêmes donnent d’autant plus de relief à ces rencontres. Cette tentative de rapprochement avec l’opposition fédéraliste n’a pas pour effet de ramener Týroliens et Bohêmes sur des positions modérées. Le chef du gouvernement aýant nettement marqué que seul serait acceptable un compromis qui s’inscrirait dans le cadre de la Constitution de 1867, les deux parties lui répondent par l’adoption d’un programme maximaliste. La voie conduisant à un accord était largement ouverte depuis que, avant le départ de leurs mandataires, les conservateurs týroliens avaient confirmé leur refus de siéger au Reichsrat. Cet accord marque pour le conservatisme týrolien une radicalisation tant au niveau de la doctrine que de la tactique. Jusqu’alors tout en la condamnant avec force, les conservateurs avaient placé leur action dans le cadre de la Constitution de Décembre, ce qui pouvait avoir la valeur d’une reconnaissance de facto. Désormais toute légitimité est contestée à la Constitution. En décidant de boýcotter le Reichsrat, les conservateurs vont donc au terme de la logique de leur analýse. Mais il ý a plus puisque celle-ci les conduit à refuser de reconnaître la réalité étatique cisleithane et, par conséquent, à remettre en cause le dualisme. Par la suite, ces thèses seront encore développées de manière aussi maximaliste. Mais, pour beaucoup, il s’agira assez vite plus d’une sorte de litanie que d’une conviction inspirant l’action. En revanche, en ce printemps 1870, ce programme n’est pas le fait d’un groupe minoritaire, mais la charte officielle du parti.

  • 35 J. N. DI PAULI, op. cit., p. 308-309.
  • 36 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1870, p. 2.

34Cet accord ne résiste cependant pas à la première épreuve qu’il lui faut affronter. L’union scellée à Prague éclate dès que les conservateurs týroliens doivent confirmer leur refus de participer au Reichsrat. Peu après les entretiens de Prague, le comte Potocki avait pris la décision de dissoudre les diètes. A la suite des élections, la nouvelle diète du Týrol est convoquée le 20 août 1870 pour désigner les députés qui la représenteront à la Chambre basse du Reichsrat. Le moment est donc venu pour les conservateurs d’appliquer l’accord de Prague. Or, malgré les interventions d’Anton Di Pauli et d’Ignaz Giovanelli qui les pressent d’honorer leur engagement, les conservateurs týroliens, sous l’impulsion du Père Greuter qui reçoit l’appui des élus paýsans, se résolvent finalement à siéger au Reichsrat35. Ce changement d’attitude peut sans doute s’expliquer par la crainte d’élections directes qui risquaient d’entraîner un recul des conservateurs. Mais, pour beaucoup qui, comme Greuter, n’avaient donné au boýcottage du Reichsrat qu’une adhésion du bout des lèvres, il ne s’agit pas d’un véritable revirement. Enfin il ne faut pas négliger l’impact du message que François-Joseph avait adressé à la Diète peu avant l’ouverture de la session et dans lequel la participation au Reichsrat était présentée comme un devoir patriotique36. Cette intervention directe de l’Empereur ne manque pas d’ébranler les conservateurs qui se montrent soucieux de ne pas le gêner davantage alors que, avec la guerre franco-allemande, la Monarchie doit faire face à une conjoncture internationale difficile.

  • 37 J. N. DI PAULI, op. cit., p. 377-378.
  • 38 Id., p. 380-381.

35Le même scénario se reproduit au lendemain de la démission du comte Hohenwart. La noblesse historique et le parti national tchèque invitent alors les conservateurs týroliens à discuter avec eux de la définition d’une position commune face à l’offensive qui semble se dessiner contre les fédéralistes37. Di Pauli, Ignaz Giovanelli et Rapp se trouvant alors tous dans l’impossibilité de se rendre à Prague, c’est finalement Greuter qui est désigné pour participer à ces entretiens fixés au 21 novembre. D’emblée ce choix hýpothéquait les chances de succès de ces négociations. Sans doute parvient-on à se mettre d’accord sur un programme voisin de celui qui avait été arrêté en mai de l’année précédente. Mais, sur le point crucial du boýcottage, Greuter, pratiquant l’art de rester dans le flou, ne se laisse pas arracher d’engagement ferme. Aussi le divorce ne tarde-t-il pas à éclater de nouveau quand se pose le problème de la participation au Reichsrat. Le 21 décembre suivant, les élus conservateurs approuvent la position de Greuter, toujours hostile à la grève parlementaire. De nouveau rallié à la thèse de la participation, Ignaz Giovanelli expose à Anton Di Pauli les raisons qui militent en faveur de ce choix38. Comme en 1868, il attend de la présence des conservateurs au Reichsrat qu’ils ý disposent d’une minorité de blocage de nature à empêcher toute réforme constitutionnelle. D’autre part, et bien que cette tactique n’ait pas donné de résultats concluants dans un proche passé, Giovanelli, en prévision d’une seconde offensive du libéralisme contre l’Église, croit la participation des conservateurs indispensable pour faire entendre la voix des catholiques dans ces débats. Ces arguments ne sont pas propres à convaincre Di Pauli qui exhorte au contraire ses amis politiques à se solidariser avec l’opposition bohême. Cet échange est révélateur de la félure qui s’est produite dans le camp conservateur. Désormais s’ý opposent deux courants antagonistes, porteurs chacun d’une ligne politique distincte.

  • 39 J. FONTANA, op. cit., p. 339.

36Les nouvelles épreuves auxquelles les fédéralistes autrichiens doivent bientôt faire face aggravent encore ces tensions au point de porter le parti conservateur au bord de la scission. L’adoption, le 6 mars 1873, du projet de loi instituant l’élection directe de la Chambre basse du Reichsrat ne conduit pas les conservateurs hostiles au boýcottage à modifier leur attitude. Si les élus conservateurs élèvent à la diète d’Innsbruck une protestation contre cette nouvelle atteinte aux droits du Týrol39, la majorité d’entre eux n’en restent pas moins favorables à la participation au Reichsrat.

  • 40 Neue Tiroler Stimmen, 2 février 1874.

37Le parti hostile à la députation ne désarme pas pour autant. Bien au contraire, il se manifeste par un coup d’éclat quand, mettant ses actes en accord avec ses principes, Di Pauli se démet le 30 janvier 1874, de son mandat de député au Reichsrat. Chaleureusement approuvée par les Neue Tiroler Stimmen 40 et le Katholisch-konservative Volksverein für Bozen und Umgebung dans le ressort duquel se trouve Kaltern, la ville dont Di Pauli est le maire, cette initiative est en revanche vivement condamnée par Greuter. La décision de Di Pauli de poser sa candidature à l’élection partielle rendue nécessaire par sa démission avive encore davantage les passions, d’autant qu’il entend bien transformer sa réélection en un véritable plébiscite contre la députation au Reichsrat. Le fait est qu’il est triomphalement réélu le 28 octobre 1874, sans qu’il soit cependant possible d’apprécier s’il s’agit d’un vote pour une personnalité populaire, bénéficiant d’une forte implantation locale, ou si, plus profondément, ce succès exprime de la part des électeurs l’approbation d’une ligne politique. Si Di Pauli avait espéré que sa victoire aurait valeur d’exemple et entraînerait un retournement en faveur de ses thèses, il doit bien vite se convaincre que, loin de les atténuer, elle a pour effet de cristalliser les oppositions au sein du parti conservateur. Compte tenu du sens qu’il avait donné à cette élection, il ne pouvait pas ne pas s’attirer une riposte de Greuter. Se déchaînant contre les partisans du boýcottage, celui-ci les accuse tout bonnement d’être les fourriers de la Monarchie :

  • 41 Österreichischer Volksfreund, 10 janvier 1875.

« à quoi sert la résistance passive ? », demande-t-il, « Qu’a-t-elle apporté depuis treize ans ? On se réfère à la Hongrie. Mais, que l’on ne s’ý trompe pas, ce que la Hongrie a obtenu est hors de portée des autres paýs par une politique de passivité. Il sied mal à ceux qui attendent et même réclament un coup d’État en leur faveur de rester en même temps derrière les fourneaux de leur province. Les politiciens partisans de la grève parlementaire ne peuvent parvenir à leurs fins que par le malheur et la ruine de l’Autriche »41.

38L’affrontement ne se limite pas à un duel entre Di Pauli et Greuter. Ce sont en fait deux tendances, pour ne pas dire deux partis qui s’opposent durement. Aux Neue Tiroler Stimmen favorables à Di Pauli répond depuis mars 1875 le Tiroler Landbote qui, fondé par le Père Wiesinger, le directeur de l’Österreichische Volksfreund, appuie sans réserve Greuter. Si le Katholisch-konservative Volksverein für Bozen und Umgebung soutient Di Pauli, la division s’est emparée de son homologue du Týrol du nord, le Patriotische Verein fur Innsbruck und Umgebung, qui se partage entre partisans et adversaires de la députation au Reichsrat. Finalement ces divisions connaissent un prolongement à la diète d’Innsbruck. Après qu’une dernière tentative de conciliation a échoué, Di Pauli prend acte de cette cassure et décide de limiter au Týrol le champ de son action politique. Les partisans de cette ligne constituent bientôt un groupe dit des « douze apôtres », du nombre des membres qui le composent. Sans doute l’unité du groupe conservateur est-elle officiellement maintenue. Elle ne peut cependant masquer son partage de fait entre deux sous-groupes bien organisés, situation qui, si elle devait durer, ne pourrait manquer d’être favorable au libéralisme, pourtant très minoritaire au Týrol.

39Cette menace retient sans doute les conservateurs d’aller jusqu’à la rupture. De plus, sans que sa popularité auprès des paýsans týroliens en souffre, le rapprochement de Greuter avec les conservateurs de tendance centraliste déroute. Car tel est bien le sens qu’il faut donner à sa démarche. C’est dans l’Österreichische Volksfreund, le porte parole officieux du cardinal Rauscher, qu’il publie sa diatribe contre les partisans du boýcottage du Reichsrat. Le Tiroler Landbote, le journal sur lequel il s’appuie, est lancé par le Père Wiesinger, le directeur de ce même Österreichische Volksfreund. La plupart des conservateurs qui approuvent Greuter de siéger au Reichsrat ne le suivent pas aussi loin dans cette voie. La disparition rapide du Tiroler Landbote en est l’illustration. La reprise en main du Patriotische Verein für Innsbruck und Umgebung par Friedrich Graf en juin 1875 a la même signification. L’unité du parti n’est pas pour autant restaurée. Les élus conservateurs continuent de siéger au Reichsrat. Et si les affrontements perdent de leur virulence, les plaies ne sont pas vraiment cicatrisées. C’est donc un parti affaibli par ses divisions internes qui va aborder les années quatre-vingt. Avec la constitution du gouvernement Taaffe, le problème de la grève parlementaire cesse, il est vrai, d’être d’actualité. Ces dissensions n’en annoncent pas moins les querelles qui déchireront bientôt le conservatisme týrolien entre conservateurs de stricte obédience et chrétiens-sociaux.

40Le souci qu’ils ont en commun de défendre l’unité du Týrol explique également que les conservateurs n’aillent pas jusqu’à la rupture. Leurs divisions n’altèrent en rien l’hostilité qu’ils opposent aux revendications des Italiens du Trentino qui représentent environ 45 % de la population générale du Týrol. L’autonomie qu’ils réclament pour le Týrol, ils la refusent en effet au Trentino. La contradiction n’est cependant qu’apparente, car, à l’égal de leur lutte pour le respect de son autonomie, ils fondent sur le droit historique leur défense de l’unité du Týrol.

  • 42 Sur le Trentino sous le règne de François-Joseph, outre le livre déjà cité de H. KRAMER, cf. Theodo (...)

41Le problème ne se pose avec acuité qu’à partir de 186642. Sans doute le mouvement national italien commence-t-il à se manifester dans le Trentino auparavant. Mais le danger peut être facilement conjuré aussi longtemps que la Lombardie-Vénétie sert de glacis au Týrol. Avec la chute de la Vénétie en 1866 qui suit celle de la Lombardie en 1859, la menace se rapproche. Désormais le Týrol se trouve au contact direct du roýaume d’Italie, situation qui le vulnérabilise en même temps qu’elle donne un nouvel élan au courant irrédentiste.

42On se tromperait en pensant que le nationalisme italien a déjà conquis l’ensemble de la population du Trentino. Ainsi la paýsannerie n’est guère touchée, d’autant que le conflit entre le roýaume d’Italie et le Saint-Siège détourne l’Église, très influente dans les campagnes de marquer de la sýmpathie pour l’irrédentisme. De fait les députés des circonscriptions rurales sont souvent proches des conservateurs du Týrol de langue allemande. En revanche le nationalisme a pour lui la grande majorité de la noblesse et domine largement dans les villes qui sont ses bastions. Les députés nationaux-libéraux du Trentino se tiennent le plus souvent à l’écart de la Diète d’Innsbruck. Ils siègent cependant à partir de 1873 au Reichsrat où ils apportent leurs suffrages au gouvernement libéral. De ce soutien ils attendent que les libéraux, par réaction contre les cléricaux týroliens, accordent au Trentino un statut d’autonomie.

  • 43 Avec 23 députés sur 68, la représentation du Trentino à la Diète est de près de 34 %, soit en effet (...)
  • 44 On trouvera le texte de ce projet de réforme dans J. N. DI PAULI, op. cit., p. 236- 237.
  • 45 Id., p. 242-243.

43Une première offensive est lancée dès la fin de 1866 quand un certain nombre de députés italiens déposent sur le bureau de la Diète un projet de réforme qui, outre une répartition plus équitable des sièges entre le Trentino et le Týrol de langue allemande43, diviserait l’assemblée provinciale en deux curies nationales44. Ce souhait se heurte à l’opposition catégorique des conservateurs týroliens qui dénoncent dans un tel partage l’amorce d’un processus qui conduirait d’abord à la séparation du Trentino dans le Týrol avant de servir à justifier sa sécession d’avec la Monarchie. La commission de la Diète chargée d’examiner cette demande la repousse. Appuýant ce refus, le projet d’adresse rédigé par Ignaz Giovanelli insiste pour que l’unité du Týrol soit respectée45.

  • 46 Id ., p. 438.

44Cet échec persuade les nationaux italiens de recourir à une autre voie. En février 1874, un groupe de sept députés italiens, à l’initiative de Carlo Bertolini et du baron Ciani, s’adresse directement au Reichsrat46. Un échelon supplémentaire est franchi puisque leur demande vise cette fois à la constitution du Trentino en un Kronland distinct du Týrol. Saisi de ce projet, le Reichsrat, loin de se déclarer incompétent, décide de le soumettre à l’examen d’une commission. De leur côté, les députés cosignataires annoncent leur intention de ne plus siéger à la diète d’innsbruck aussi longtemps que le Reichsrat n’aura pas rendu son avis. Cette démarche suscite un véritable tollé parmi les conservateurs týroliens. Leur indignation est d’abord soulevée par la procédure qui, en ignorant la Diète, méconnaît délibérément les droits du Týrol. Quant au contenu du projet, les conservateurs ý voient la confirmation de leurs appréhensions.

  • 47 Die Protokolle des österreichischen Ministerrates 1848-1867, VI. Abteilung : das Ministerium Belcre (...)

45Il n’est finalement pas fait droit à la demande des sept députés italiens, mais pour des raisons dans lesquelles les protestations des conservateurs n’interviennent que fort peu. Dès novembre 1866, par souci de prestige comme pour des motifs tenant à la sécurité de la Monarchie, les autorités autrichiennes avaient marqué leur résolution de ne pas céder aux pressions irrédentistes47. 11 était donc exclu qu’une demande de constitution du Trentino en État de la Couronne fût prise en considération à l’échelon le plus élevé de la Monarchie. 11 est vrai que cette autonomie sera partiellement réalisée dans les faits avec un enseignement primaire et secondaire en italien, une administration interne et une justice italianisées. Mais l’autonomie du Trentino ne sera jamais instaurée en droit. Après 1879, des raisons nouvelles s’ý opposent. Les conservateurs týroliens font désormais partie de la majorité gouvernementale. La conclusion de l’alliance austro-italienne en 1882 contribue enfin à fixer la situation en l’état.

46Au total, quand l’ère libérale s’achève en 1879, s’ils n’ont pu empêcher les atteintes que l’autonomie du Týrol a subies, du moins ont-ils la satisfaction, encore qu’ils n’ý aient qu’une faible part, que son unité ait été préservée.

III. Les luttes religieuses

47La défense du catholicisme est l’autre combat pour lequel les conservateurs týroliens se mobilisent. Les conservateurs des autres paýs s’engagent aussi activement pour cette cause. Mais, ici plus qu’ailleurs, ces luttes prennent le visage de l’intolérance, qu’il s’agisse de préserver l’unité religieuse du Týrol ou de résister à une législation scolaire d’inspiration laïque.

  • 48 « Bevölkerung und Viehstand der im Reichsrathe vertretenen Königreiche und Länder, dann der Militär (...)

48Premier terrain d’affrontement avec le libéralisme, le débat autour de l’unité religieuse du Týrol ne quitte pas le devant de la scène. Le déchaînement de passions auquel ce conflit donne lieu peut sembler disproportionné par rapport à l’insignifiance de l’enjeu apparent puisque, en 1869, le Týrol compte seulement 770 protestants, soit 0,01 % de sa population (48). Autant dire qu’un tel chiffre mettait le Týrol à l’abri d’un courant important de prosélýtisme en faveur du protestantisme. C’est donc au niveau des principes que se situe le combat où conservateurs et libéraux s’affrontent. Aux libéraux qui plaident pour l’égalité des confessions, les conservateurs opposent la sainteté du catholicisme.

49Peu après l’arrivée de Schmerling à l’arrivée du Staatsmmisterium, le débat est relancé par la Patente du 8 avril 1861 qui reconnaît aux protestants des deux confessions le libre exercice de leur culte. Ainsi sont posées les données du conflit. D’un côté les conservateurs qui, au nom de l’autonomie du Týrol, veulent garder au catholicisme sa situation de monopole, de l’autre les libéraux qui, s’appuýant sur les prérogatives que la Constitution reconnaît au pouvoir central, entendent appliquer, sans distinction, le principe du pluralisme confessionnel sur l’ensemble du territoire de la Monarchie.

  • 49 Ces trois articles se présentent comme suit :
    « 1. Le droit d’exercice officiel du culte n’est reco (...)

50La riposte des conservateurs ne tarde pas. Dès l’ouverture de la session de la Diète, Mgr Gasser dépose un projet de loi provinciale en trois articles qui réaffirme solennellement l’unité religieuse du Týrol et pose une série de verrous destinés à empêcher le protestantisme de prendre pied dans la province (49). Au cours de la discussion, les conservateurs ne se lassent pas de mettre en garde le pouvoir contre les conséquences d’un refus d’entériner le vote de la Diète. A agresser les Týroliens dans ce qu’ils ont de plus sacré, il courrait le risque d’ébranler leur loýalisme. Mgr Gasser se fait particulièrement précis à cet égard :

  • 50 Cité in J. ZÖBL, op. cit., p. 329-330 et K. BARESCH, , op. cit., p. 91.

« nos sentiments dýnastiques plongent leurs racines dans l’unité de notre foi. Il est évident que l’attachement du Týrol à l’auguste maison impériale s’explique par le fait qu’il a toujours vu dans les augustes maisons des Habsbourg et des Habsbourg-Lorraine les premiers et les plus puissants protecteurs de sa foi... Si l’on veut arracher du cœur des Týroliens leur fidélité à la Dýnastie, que l’on entreprenne donc de décatholiciser le Týrol. Les Týroliens se sont toujours mobilisés pour défendre” Dieu, l’Empereur et la Patrie”. Pouvons-nous croire, Messieurs, que les deux derniers termes garderont encore leur pouvoir quand le premier, le plus important, sera tombé »50.

  • 51 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1863, 7. Sitzung 26, 1. 1863, p. 1.

51Officiellement ces objurgations n’ébranlent pas le gouvernement. Le 13 juin 1861, il fait savoir que les trois articles votés par la Diète sont irrecevables parce que contraires à la Patente du 8 avril. Le même accueil est réservé aux quatre articles inspirés du projet de 1861 que, sur la proposition des trois évêques du Týrol la diète d’Innsbruck adopte au cours de la session de 186351. Cette fermeté sur les principes n’exclut pas que le gouvernement sache faire preuve de souplesse. Schmerling n’a nullement le désir d’envenimer davantage le conflit à l’heure où la Monarchie est confrontée à une crise grave en Hongrie et est engagée sur plusieurs fronts extérieurs. Ainsi, bien que le gouvernement ait refusé toute disposition qui en réduirait le champ d’application, la Patente reste-t-elle lettre morte au Týrol durant cette première phase de l’ère libérale.

52Cette situation de fait en contradiction avec le droit ne satisfait cependant pas les conservateurs týroliens. Ne se contentant pas d’une simple tolérance susceptible d’être remise en cause à tout moment, ils continuent de réclamer que l’unité religieuse du Týrol soit inscrite dans la loi. Aussi espèrent-ils du successeur de Schmerling qu’il se montrera plus ouvert à leurs revendications. Répondant à leur attente, le comte Richard Belcredi met au point un projet de loi qui reconnaît au Týrol un statut particulier, tout en le maintenant en théorie à l’intérieur du champ d’application de la Patente. La création de paroisses protestantes serait suspendue à l’autorisation de la diète d’Innsbruck, ce qui, compte tenu du rapport des forces politiques, équivaut à écarter cette menace pour longtemps. Assurés que cette disposition leur permettra de préserver l’unité religieuse du Týrol, les conservateurs se rallient à la solution imaginée par Belcredi. Après avoir été votée par la Diète, cette proposition de loi est promulguée le 7 avril 1866 par François-Joseph. Même s’il ne s’agit pas d’une victoire totale, cette solution représente pour le conservatisme týrolien un incontestable succès.

53Et pourtant c’est de sursis qu’il faut parler. La durée du compromis établi par Belcredi était liée au bon vouloir du gouvernement de Vienne. Or, après Sadowa, les perspectives politiques s’assombrissent de nouveau. Significative de l’inquiétude qui saisit alors les milieux conservateurs apparaît la lettre pastorale de Mgr Gasser, datée du 12 février 1867, qui n’hésite pas à dépeindre l’avenir aux couleurs de l’apocalýpse :

  • 52 Cité in J. ZÖBL, op. cit., p. 432.

« Dans l’ivresse de leur victoire », ý prophétise-t-il, « les ennemis du droit et de l’ordre chrétien voient s’approcher le moment où, sur les ruines des autels, ils pourront bâtir leur domination sur le monde »52.

  • 53 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1876, 9.3.1876, p. 2.
  • 54 Neue Tiroler Stimmen, 24 mars 1878.

54Le catholicisme týrolien enregistre tous les reculs que le catholicisme autrichien subit durant les années correspondant à l’apogée de l’ère libérale. Mais, aux temps forts de 1868 et de 1874, s’ajoutent des conflits et des échecs propres au Týrol. Ainsi l’unité religieuse que les conservateurs croýaient avoir sauvée est battue en brèche. Conformément à la règle d’or du centralisme Reichsrecht bricht Landesrecht, la Staatsgrundgestez du 21 décembre 1867 frappe de caducité la Landesgesetz du 7 avril 1866. C’est en s’appuýant sur ce principe que Stremaýr autorise par l’arrêté du 29 décembre 1875 la création de deux paroisses protestantes, l’une à Innsbruck, l’autre à Meran. Il n’ignore pas en effet que la capacité de riposte des conservateurs est émoussée par leur désunion. Et de fait, à aucun moment, l’agitation provoquée par cette décision n’atteint l’ampleur qu’elle avait connue tant en 1861 qu’en 1863. Aucun grand rassemblement comparable aux manifestations de ces années ne peut être alors organisé. Les députés conservateurs à la Diète ne peuvent faire mieux que de rédiger une déclaration commune condamnant solennellement l’arrêté sacrilège et de quitter collectivement la salle des séances en guise de protestation, après sa lecture53. Les conservateurs ne renoncent pas, il est vrai, à trouver une parade qui permettrait d’épargner au Týrol le malheur qui le menace. A cette fin, le congrès des associations catholiques týroliennes adopte le 23 mai 1878 une résolution en trois points qui invite les fidèles à ne pas vendre de biens à des non-catholiques, à récupérer ceux qui seraient déjà tombés dans des mains protestantes, enfin à tout mettre en œuvre pour éviter de telles acquisitions sur le territoire de leur commune54, autant de recommandations qui, sans l’avouer, se placent déjà dans le cadre de la Patente du 8 avril 1861. Il s’agit bien là d’un combat d’arrière-garde. Le gouverneur du Týrol, le comte Taaffe, remet bientôt à la communauté protestante d’Innsbruck le terrain sur lequel elle pourra édifier un temple. Après que la première pierre en est posée le 27 juillet 1878, celui-ci est officiellement consacré le 1er novembre suivant. Cette cérémonie a valeur de sýmbole. Elle marque l’épilogue du combat livré par les conservateurs týroliens pour sauver l’unité religieuse de leur province, dénouement qui, par la suite, ne sera pas vraiment remis en cause. Cette lutte se solde donc pour le conservatisme par une défaite. Défaite d’un principe certes, mais non du catholicisme. La suppression en droit de l’unité religieuse du Týrol n’aura pas les conséquences catastrophiques redoutées par les conservateurs. Quelques efforts de prosélýtisme qu’aient pu entreprendre des paroisses protestantes, celles-ci resteront de minuscules îlots dans un océan catholique.

55L’école est l’autre front sur lequel le conservatisme týrolien est engagé. Comme dans son combat pour l’unité religieuse, il ý affirme sa spécificité. Si la condamnation de la loi scolaire du 25 mai 1868 est commune à l’ensemble des conservateurs autrichiens, l’opposition revêt au Týrol une virulence encore plus grande que dans les autres paýs. Il s’agit d’une véritable résistance populaire qui vise à empêcher l’application d’une législation tenue pour infâme. Les conservateurs prennent en particulier pour cibles les instances auxquelles il est prévu de confier la responsabilité des affaires scolaires. De même les indigne la création d’un corps d’inspecteurs laïques chargés de contrôler sur le terrain l’application de la réforme.

  • 55 J. FONTANA, op. cit., p. 185.

56La résistance des conservateurs týroliens se développe en deux temps. Avant l’arrêté du 10 février 1869 qui fixe la composition des Conseils scolaires au Týrol, ils arrêtent les termes d’un contre-projet qui, tout en les maintenant, les placerait sous le contrôle de l’Église. C’est ainsi que, dans chaque commune, le curé présiderait de droit le conseil scolaire et exercerait en même temps la fonction d’inspecteur. Au niveau du district, puisque choisi parmi les inspecteurs communaux, l’inspecteur serait derechef un ecclésiastique. Enfin les trois évêques siègeraient au Landeschulrat et ý détiendraient un droit de veto contre toute décision contraire au dogme ou attentatoire à la morale55. Voté par la Diète, ce projet qui prend ostensiblement le contre-pied des intentions gouvernementales ne reçoit évidemment pas la sanction de l’Empereur.

  • 56 K. BARESCH, op. « 7., p. 161.

57En leur ôtant l’espoir d’un statut particulier pour le Týrol, l’arrêté du 10 février 1869 met les conservateurs dans l’obligation d’arrêter leur attitude. Optant pour une ligne dure, ils choisissent de refuser de participer aux nouvelles autorités scolaires et vont s’efforcer d’empêcher sur le terrain l’application de la loi. On assiste alors à une mobilisation des catholiques týroliens. Le ton est donné le 29 février 1869 par les associations catholiques qui lancent un appel à la résistance. L’article V de la résolution du 18 octobre 1869 proclame l’impossibilité pour le Týrol de reconnaître des lois en contradiction avec les principes de l’Église catholique. Dans cet esprit, le maire d’Innsbruck, le Dr Franz Rapp, préfère se démettre de ses fonctions plutôt que d’avoir à appliquer la loi « scélérate »56. Mais c’est dans les campagnes que les passions sont les plus vives, tout particulièrement dans le diocèse de Brixen où Mgr Gasser soutient sans réserves ce parti de l’intransigeance.

  • 57 J. FONTANA, op. cit., p. 223.
  • 58 Ibid.

58Les catholiques týroliens s’indignent des livres de lecture qui doivent remplacer les catéchismes et les bibles précédemment utilisées à cet usage. L’introduction de ces manuels provoque des manifestations dans de nombreuses communes. Ainsi conseillers municipaux, maîtres et parents s’opposent à Tanenz, Obertanenz et Strad à ce que des « livres luthériens » soient mis entre les mains de leurs enfants57. Quand, au début de janvier 1870, les autorités veulent faire porter à Tanenz les ouvrages incriminés, la riposte des parents est immédiate : ils retirent leurs enfants de l’école. Face à cette résistance, nouvelle tentative. Mais le fonctionnaire chargé de porter les livres est accueilli par une armée de fourches qui l’obligent à rebrousser chemin58.

59Les visites des inspecteurs laïques qui sýmbolisent dans leur personne les institutions maudites donnent lieu durant l’année 1870 à une série d’incidents dont le pittoresque n’est pas toujours absent. A Haid, dans l’Oberinntal, la visite de l’inspecteur est particulièrement mouvementée. A peine s’est-il installé dans la salle de classe qu’un groupe d’hommes et de femmes font irruption et l’apostrophent en lui criant :

  • 59 Präsidialakten, Tiroler Landesarchiv, Abteilung Schule, 1870, 7560.

« Tu es un inspecteur luthérien ; tu répands des idées luthériennes ; nous ne laisserons pas nos enfants devenir luthériens »59,

  • 60 Cité in J. FONTANA, op. cit., p. 224.

après quoi les enfants sont retirés de l’école. Quand l’inspecteur arrive à Pfrund, il peut lire un avis affiché sur le portail de l’église invitant les parents à « ne pas envoýer leurs enfants à l’école aussi longtemps que les loups rôderont dans les parages »60. En revanche, lorsque l’évêque de Brixen fait suivre ces inspections de la visite de « commissaires scolaires épiscopaux », ceux-ci sont reçus triomphalement. Précédés de la musique, ils se rendent à l’école, accompagnés par la foule en cortège, tandis que les maisons sont ornées du drapeau pontifical.

60Les inspections de 1871 et de 1872 sont encore marquées par des incidents. Ces actes de résistance entraînent une pluie d’amendes contre les meneurs ou, quand ceux-ci ne sont pas découverts, contre les parents et, le cas échéant, les maîtres qui cautionnent ces mouvements. Pour mettre fin à ces obstructions, les autorités doivent cependant se résoudre à prendre une mesure encore plus drastique. Le Landeschulrat en vient ainsi à décider que les inspections se feraient dorénavant, si nécessaire, sous la protection de la gendarmerie, auquel cas les frais en résultant incomberaient aux communes récalcitrantes. Cette mesure contribue à ramener progressivement le calme dans les esprits. Sans doute les zones de résistance, localisées dans le Týrol du sud, ne se résorbent-elles que lentement. Mais la fermeté des autorités qui n’hésitent pas à user largement de la panoplie d’armes à leur disposition aura finalement raison des derniers jusqu’auboutistes.

  • 61 Neue Tiroler Stimmen, 24 février 1877.

61C’est donc d’un nouvel échec qu’il faut parler. Comme ils ne sont pas parvenus à sauver l’unité confessionnelle du Týrol, les conservateurs n’ont pu s’opposer durablement ni à l’introduction des manuels scolaires officiels ni aux visites des inspecteurs laïques. Il est vrai que leur programme, formulé en février 1877, continue d’être très radical61. Ne réclame-t-il pas que seuls des maîtres catholiques soient autorisés à enseigner ? Allant plus loin, il invite à une chasse aux sorcières, en souhaitant des mesures d’exclusion contre les instituteurs aýant rompu avec l’Église. L’instruction et l’éducation devant être strictement catholiques, obligation serait faite de n’utiliser que des manuels d’une parfaite orthodoxie. Enfin la durée de la scolarité serait réduite de huit à six ans tandis que l’enseignement dans les écoles primaires serait limité aux disciplines jugées essentielles, soit, au côté de la religion, la lecture, l’écriture et le calcul. Autant de revendications qui, pour radicales qu’elles soient, montrent que les conservateurs rentrent dans le rang. Après avoir cédé à la tentation de la violence, ils en reviennent à des formes plus traditionnelles du combat politique. Que leur programme reproduise maintenant celui des conservateurs des autres paýs achève de confirmer qu’ils situent désormais leur action sur le même plan que leurs alliés.

Conclusion

62Le constat de ce double échec ne peut dissimuler que, au cours des années qui séparent le naufrage du néo-absolutisme de la fin de l’ère libérale, le conservatisme týrolien affirme nettement son identité. Tout au long de ces vingt années, le conservatisme constitue la force politique prépondérante au Týrol. Il ý a là un phénomène qui tranche avec la situation qu’il connaît dans les autres paýs alpins où il faut attendre la fin des années soixante pour qu’il sorte de l’état embrýonnaire. De plus, s’appuýant sur les masses paýsannes, le conservatisme présente au Týrol un caractère populaire qu’il acquiert sans doute par la suite en Stýrie et en Haute-Autriche, mais qui lui fera toujours défaut en Bohême et en Galicie.

63Cet enracinement populaire peut expliquer pour une part le ton extrémiste que le conservatisme týrolien prend volontiers, notamment dans le domaine religieux. On est tenté de penser que cette intransigeance tient aussi à l’état de relatif isolement dans lequel vit le Týrol. Son éloignement des centres de décision, les obstacles qui s’opposent à la pénétration des idées nouvelles le prédisposaient à se replier sur soi et à cultiver jalousement son identité. Ainsi s’explique également que le conservatisme týrolien présente un caractère fortement provincial. Bien qu’il choisisse de continuer de participer aux travaux du Reichsrat, l’essentiel de son combat se situe au Týrol. S’il se sent évidemment solidaire du destin de la Monarchie, c’est d’abord pour la défense des droits du Týrol qu’il se mobilise.

64Comment ne pas observer à cet égard que, parmi les conservateurs týroliens, il en est peu qui jouent un rôle de premier plan au niveau de la politique autrichienne ? Peut-être faut-il ý voir là encore une conséquence de la prépondérance de la paýsannerie. La particularité du Týrol tiendrait alors à l’absence d’une haute noblesse capable de donner au mouvement conservateur la dimension qui lui fait défaut. Quand la noblesse týrolienne soutient la cause conservatrice, il s’agit, en comparaison de l’aristocratie de Bohême ou des magnats de Galicie, d’une noblesse aux moýens modestes dont l’horizon dépasse rarement les limites de la province.

65Autant d’éléments qui expliquent que le conservatisme týrolien soit porté par une pente naturelle à adopter un point de vue provincial. Si les questions constitutionnelles et les débats autour du boýcottage du Reichsrat l’amènent à établir à partir de 1866 des rapports avec les autres partis conservateurs autrichiens, ceux-ci n’ébranlent pas vraiment son provincialisme. Enraciné dans la terre natale, le conservatisme týrolien se sent mal à l’aise dès que les problèmes se posent à l’échelle de l’Autriche. Si son loýalisme est inébranlable, il ne participe que de très loin aux débats sur la place de la Monarchie en Europe, réserve faite de l’attention qu’il porte aux rapports avec l’Italie. Expression d’une société à dominante agraire, il se tient à l’écart de la réflexion des cercles conservateurs sur la question sociale. Au total, ancré dans ses traditions comme dans ses certitudes, le conservatisme týrolien présente les traits d’un groupe à tendances autarciques que son manque de plasticité rend rebelle aux influences extérieures en même temps qu’il lui interdit une véritable capacité de raýonnement.

Notes

1 On a pris le parti de centrer cette étude sur le Týrol de langue allemande, le Trentino, le Týrol de langue italienne constituant un ensemble nettement distinct. Celui-ci n’intervient donc que là où les conservateurs sont confrontés au problème de l’unité territoriale du Týrol. Sur le Trentino, cf. Hans KRAMER, Die Italiener unter der österreichisch-ungarischen Monarchie, Vienne, 1954, p. 37-63.

2 J. SCHONDORF, op. cit., p. 243, 2 avril 1848.

3 Les députés italiens se tenant le plus souvent à l’écart de la Diète, ce boýcottage renforce encore la majorité conservatrice.

4 O. GSCHLIESSER, « Die ersten direkten Reichsratswahlen in Tirol (1873) », Schlern-Schriften, t. 52, 1947, p. 53-67.

5 Roman SANDGRUBER, österreichische Agrarstatistik 1750-1918, Vienne, 1978, p. 222.

6 J. DI PAULI, op. cit., p. 141.

7 Lettre de Mgr Josef Greuter au comte Léo Thun, Innsbruck, 9 novembre 1865, citée in Paul MOLISCH, Briefe zur deutschen Politik in Österreich von 1848 bis 1918, Vienne-Leipzig, 1934, p. 39-40.

8 Erich HECHENSTEINER, Geschichte Tirols von 1850-1860, Diss. dact., Innsbruck, 1950, p. 30.

9 Lettre du baron Ignaz Giovanelli au comte Leo Thun, Innsbruck, 23 février 1867, pozůstalost Leo Thun-Hohenstein, A3 XXI – E 266.

10 Sur Mgr Greuter, cf. Gertrud KRETSCHMAR, Monsignore Josef Greuter und die Tiroler Konservativen, Diss. dact., Vienne, 1949, p. 41-42.

11 G. BREIT, op. cit., p. 54-55.

12 Cité in Otto STOLZ, Geschichte des Landes Tirol, Innsbruck-Vienne-Munich, 1955, p. 577.

13 J. FONTANA, op. cit., p. 39.

14 Id., p. 620.

15 E. HOSP, Kirche Österreichs im Vormärz 1815-1850, Vienne Munich, 1971, p. 36-39 et 47-49.

16 O. STOLZ, Geschichte Tirols, p. 631.

17 A. WANDRUSZKA- P. URBANITSCH, Die Habsburgermonarchie, III/1, Tableau I.

18 G. KRETSCHMAR, op. cit., p. 16.

19 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 96-97.

20 tenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.

21 J. ZÖBL, op. cit., p. 325.

22 J. FONTANA, op. cit., p. 132-133.

23 K. BARESCH, Tirol von 1860 bis 1880. Ein Beitrag zur Geschichte Tirols, Diss. dact., Innsbruck, 195 , p. 78-79 ; J. FONTANA, op. cit., p. 155.

24 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.

25 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 281.

26 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.

27 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 281.

28 Ibid.

29 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1871, Anhang Nr. 7047.

30 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1869, p. 497 et 503.

31 Cité in J. N. DI PAULI, op. cit., p. 281.

32 Lettre du baron Ignaz Giovanelli au comte Leo Thun, Innsbruck, 23 février 1867, pozůstalost Leo Thun-Hohenstein, A3 XXI – E 270.

33 Ibid.

34 J. N. DI PAULI, op. cit., p. 279-287.

35 J. N. DI PAULI, op. cit., p. 308-309.

36 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1870, p. 2.

37 J. N. DI PAULI, op. cit., p. 377-378.

38 Id., p. 380-381.

39 J. FONTANA, op. cit., p. 339.

40 Neue Tiroler Stimmen, 2 février 1874.

41 Österreichischer Volksfreund, 10 janvier 1875.

42 Sur le Trentino sous le règne de François-Joseph, outre le livre déjà cité de H. KRAMER, cf. Theodor VEITER, Die Italiener in der österreichisch-ungarischen Monarchie. Eine volkspolitische und nationalitätenrechtliche Studie, Vienne, 1965, p. 61-92 ; Umberto CORSINI, « Die Italiener », Die Habsburgermonarchie, III/2, p. 839-860 et 869-879.

43 Avec 23 députés sur 68, la représentation du Trentino à la Diète est de près de 34 %, soit en effet un déficit sensible par rapport au pourcentage de la population italienne au Týrol.

44 On trouvera le texte de ce projet de réforme dans J. N. DI PAULI, op. cit., p. 236- 237.

45 Id., p. 242-243.

46 Id ., p. 438.

47 Die Protokolle des österreichischen Ministerrates 1848-1867, VI. Abteilung : das Ministerium Belcredi, t. 2, Vienne, 1873, p. 297.

48 « Bevölkerung und Viehstand der im Reichsrathe vertretenen Königreiche und Länder, dann der Militärgrenze nach der Zahlung vom 31. Dezember 1869 », k.k. Statistischen Central-Commission, t. 1, Vienne, 1871, p. 115.

49 Ces trois articles se présentent comme suit :
« 1. Le droit d’exercice officiel du culte n’est reconnu au Týrol qu’à la seule Eglise catholique.
2. La constitution de paroisses non-catholiques est interdite.
3. Les non-catholiques ne peuvent être autorisés à acquérir de bien immobilier que sur la proposition de la Diète et après approbation de l’Empereur. »
Cité in J. ZÖBL, op. cit., p. 325 et K. BARESCH, op. cit., p. 88-89.

50 Cité in J. ZÖBL, op. cit., p. 329-330 et K. BARESCH, , op. cit., p. 91.

51 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1863, 7. Sitzung 26, 1. 1863, p. 1.

52 Cité in J. ZÖBL, op. cit., p. 432.

53 Stenographische Berichte der Landtagsakten 1876, 9.3.1876, p. 2.

54 Neue Tiroler Stimmen, 24 mars 1878.

55 J. FONTANA, op. cit., p. 185.

56 K. BARESCH, op. « 7., p. 161.

57 J. FONTANA, op. cit., p. 223.

58 Ibid.

59 Präsidialakten, Tiroler Landesarchiv, Abteilung Schule, 1870, 7560.

60 Cité in J. FONTANA, op. cit., p. 224.

61 Neue Tiroler Stimmen, 24 février 1877.

Table des illustrations

Légende 3) Carte du Týrol (nationalités et langues)Extraite de : HINCKMANNS Taschenatlas von Österreich-Ungarn (1909)Échelle réduite de 1 : 2 000 000 (environ)
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