• Contenu principal
  • Menu
OpenEdition Books
  • Accueil
  • Catalogue de 15362 livres
  • Éditeurs
  • Auteurs
  • Facebook
  • X
  • Partager
    • Facebook

    • X

    • Accueil
    • Catalogue de 15362 livres
    • Éditeurs
    • Auteurs
  • Ressources numériques en sciences humaines et sociales

    • OpenEdition
  • Nos plateformes

    • OpenEdition Books
    • OpenEdition Journals
    • Hypothèses
    • Calenda
  • Bibliothèques

    • OpenEdition Freemium
  • Suivez-nous

  • Newsletter
OpenEdition Search

Redirection vers OpenEdition Search.

À quel endroit ?
  • Éditions de la Sorbonne
  • ›
  • Internationale
  • ›
  • Les fondements du conservatisme autrichi...
  • ›
  • Premiere partie. Les forces conservatric...
  • ›
  • Chapitre II. François-Joseph, un archety...
  • Éditions de la Sorbonne
  • Éditions de la Sorbonne
    Éditions de la Sorbonne
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Liens vers le livre
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Formats de lecture

    Plan

    Plan détaillé Texte intégral I. Les influences II. François -Joseph, un souverain bureaucrate III. François Joseph, monarque constitutionnel IV. François-Joseph et les conservateurs Conclusion Notes de bas de page

    Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879

    Ce livre est recensé par

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Chapitre II. François-Joseph, un archetype de conservateur gouvernemental

    p. 69-89

    Texte intégral I. Les influences II. François -Joseph, un souverain bureaucrate III. François Joseph, monarque constitutionnel IV. François-Joseph et les conservateurs Conclusion Notes de bas de page

    Texte intégral

    1Que François-Joseph soit un souverain conservateur ne paraît pas devoir faire problème1. On serait tenté dans un premier mouvement d’estimer qu’il s’agit là d’une évidence. Ne répond-il pas à la vocation de l’Autriche d’être une puissance conservatrice ? La tradition de leur Maison ne veut-elle pas que les Habsbourg mènent une politique conforme à cette vocation ? On se souvient d’autre part que, recevant Théodore Roosevelt, au début de ce siècle, FrançoisJoseph se décrit lui-même comme « le dernier souverain de l’ancienne école »2. Et de fait comment supposer que ne soit pas conservateur celui dont Heinrich von Srbik peut dire qu’« il portait au plus profond de lui-même la notion de majesté »3 ?

    2Et pourtant, on ne peut oublier que plusieurs des choix de FrançoisJoseph heurtent de front les milieux conservateurs. Choix de politique extérieure quand il imprime à la diplomatie autrichienne une orientation nettement antirusse ; choix institutionnels avec l’arbitrage en faveur de l’option centraliste dans une version unitaire ou sous une forme dualiste ; choix au niveau de la politique religieuse quand François Joseph n’oppose pas son veto aux lois qui vident le Concordat de la plus grande partie de sa substance, puis autorise son gouvernement à le dénoncer. Peu importe qu’il prenne souvent ces décisions à contre-cœur. Ce qui compte, c’est qu’elles sont prises et qu’elles suscitent l’hostilité des milieux conservateurs, même si leur loýalisme monarchique leur apprend à tenir la personne de l’Empereur à l’écart des critiques qu’ils formulent contre la politique de ses ministres. Ces premières remarques ne permettent certes pas de trancher. Mais, si elles appellent une analýse plus poussée, elles suggèrent aussi déjà une réponse nuancée.

    I. Les influences

    3Les historiens sont nombreux à relever que, lorsque François-Joseph monte sur le trône, sa personnalité est déjà constituée et qu’elle ne connaît pas de modification notable au cours des soixante-huit années de son règne. De même il aurait déjà été en possession des principaux articles de son sýstème de pensée politique et celui-ci n’aurait pas varié sur le fond tout au long de ces décennies. Tel il apparaît sur la scène de l’histoire, tel, à en croire Otto Ernst, il serait demeuré jusqu’à la fin de son règne4. Joseph Redlich fait une analýse semblable, avec la réserve toutefois qu’il voit dans la période du néo-absolutisme les années au cours desquelles la personnalité et l’idéologie de François Joseph se forment5. Ce jugement est à rapprocher du point de vue d’Alexander Novotný ramenant cette unité du personnage de François Joseph à sa conception de la suprématie du pouvoir monarchique et à l’acharnement qu’il mit toujours à la garantir dans le droit et dans les faits6. Si tel est bien le fil directeur qui permet de suivre sans solution de continuité l’itinéraire de FrançoisJoseph, il paraît alors légitime de privilégier les influences qui s’exercent sur lui dans les dernières années du Vormärz et durant la décennie néo-absolutiste.

    4Parmi les influences qui contribuèrent à la formation de la personnalité de François-Joseph, Joseph Redlich retient en priorité celles de l’archiduchesse Sophie, du prince Félix Schwarzenberg et du comte Grünne. On n’aura garde cependant d’oublier l’empreinte que les leçons de Metternich et de Rauscher laissent sur le futur empereur. Metternich qui, dans les mois précédant la Révolution, a avec lui des entretiens réguliers, entreprend d’initier le jeune archiduc aux principes de l’art politique. Des heures passées avec le vieux chancelier, François Joseph retiendra avant tout qu’un régime constitutionnel sur le mode représentatif est incompatible avec la nature pluraliste de l’Autriche. Quant à Rauscher, il s’attache à lui démontrer la nécessité d’une alliance entre l’État et l’Église. Le choix que, peu après, le jeune empereur fera de son ancien précepteur pour négocier avec Rome les termes d’un Concordat, atteste l’impact de cette leçon.

    5Cette double influence illustre la part qui revient à l’archiduchesse Sophie dans cette phase de la formation de François-Joseph7. Bien que, selon l’ordre de succession, son époux, l’archiduc Franz Karl eût dû monter sur le trône, en cas de décès ou d’empêchement de Ferdinand Ier, l’archiduchesse n’avait jamais douté que l’intérêt de la Monarchie exigeait qu’il s’effaçât au profit de son fils aîné. Convaincue que son mari ne possédait pas les qualités qui seraient requises du prochain Empereur d’Autriche, elle avait renoncé à l’espoir de devenir un jour impératrice et reporté ses ambitions sur son fils aîné. Elle veilla donc à ce qu’il reçût l’éducation d’un futur empereur et supervisa elle-même le choix de ses précepteurs. A ce titre, l’éducation qui lui fut donnée, est pour une large part son œuvre. Son influence ne se limite cependant pas à ces années. Durant les premiers mois de la Révolution, elle est l’un des rares membres de la famille impériale à ne pas céder à la panique. Nul doute qu’elle ne renforce alors son fils dans son aversion pour la Révolution et les idées constitutionnelles. Rien d’étonnant dans ces conditions à ce qu’elle se sente en accord profond avec l’esprit du néo-absolutisme. La piété filiale dont le jeune empereur entoure sa mère, la confiance qu’il a en la sûreté de son jugement lui permettent de jouer un rôle politique qui, pour n’avoir pas un caractère officiel, ne fait pas moins d’elle l’une des principales figures de cette période. Au cours de ces années, il est un domaine où son influence se manifeste tout particulièrement. Sa ferveur religieuse s’allie à sa haine de la Révolution pour la convaincre, à l’égal de Rauscher, qu’il répond à l’intérêt de l’État de s’appuýer sur l’Église. Qu’elle ait donc poussé à la conclusion du Concordat avec Rome ne saurait donc faire de doute8.

    6L’influence de l’archiduchesse tend certes à décroître après que l’Autriche est entrée dans l’ère constitutionnelle. Sans que les temps nouveaux la persuadent de les modérer, elle demeure à l’égard des libéraux dans les mêmes sentiments. Elle n’est donc pas prête à admettre qu’il faille, fût-ce pour des raisons tactiques, leur faire des concessions. Plusieurs des choix de François-Joseph la plongent dans une douloureuse inquiétude quant à l’avenir de la Monarchie. Ainsi elle condamne le Compromis de 1867 parce qu’il marque la fin de l’unité de l’Empire9. Les lois confessionnelles de 1868 suscitent sa réprobation indignée en ce qu’elles signifient la rupture de l’alliance entre l’État et l’Église10. Il est donc indéniable que les relations de l’archiduchesse Sophie avec François-Joseph connaissent, du moins sur le terrain politique, une évolution avec le temps. Après 1860, l’Archiduchesse cesse d’exercer une influence active sur les prises de décision de FrançoisJoseph. Les alarmes dont elle lui fait part demeurent sans effet sur la politique de l’Empereur, quel que soit le soin qu’il prenne à les calmer. Il reste – et c’est là assurément le point décisif – que par l’éducation qu’elle lui a donnée, par la valeur de son exemple et par les conseils qu’elle lui a prodigués, l’archiduchesse Sophie a contribué à fixer certains des traits de la personnalité de FrançoisJoseph, à imprimer une marque durable à son sýstème de pensée, notamment en lui inculquant un sens élevé de sa fonction de souverain et en lui donnant un goût très fort de l’autorité.

    7Capitale est également la part qui revient au prince Félix Schwarzenberg dans la formation de François-Joseph11. Ici pas de relation familiale, mais l’ascendant d’une forte personnalité. Dès leur première rencontre en Italie où il a été envoýé auprès du vieux maréchal Radetzký pour ne pas être compromis dans les troubles qui secouent la capitale, le jeune archiduc est impressionné par le calme et la froide détermination de Schwarzenberg. Si la désignation du prince comme premier chef de gouvernement du nouveau règne se fait en dehors de lui, ce choix ne peut que lui agréer. De fait l’entente entre les deux hommes est excellente. Mais, dans ce couple, Schwarzenberg est le pôle actif. Après l’enseignement théorique que François-Joseph a reçu de ses précepteurs, c’est à lui qu’il revient de l’initier à son métier de souverain. Pour FrançoisJoseph, Schwarzenberg est d’abord un professeur d’énergie. A côté de cette force de caractère, son sens de la grandeur de l’Autriche qui inspire sa politique tant intérieure qu’extérieure ne peut que séduire son impérial élève. Par ailleurs son mépris pour la Révolution s’accorde avec les propres sentiments de FrançoisJoseph. Enfin celui-ci n’est pas sans être marqué par la méfiance dans laquelle Schwarzenberg tient l’aristocratie pour la tendance qu’il lui prête à vouloir accaparer le contrôle de l’État comme pour le peu de cas qu’il fait de ses capacités politiques.

    8Schwarzenberg est le seul de ses premiers ministres qui ait exercé un réel ascendant sur François Joseph et auquel celui-ci ait porté des sentiments à la fois d’affection et d’admiration. On comprend alors que la disparition brutale de Schwarzenberg l’ait désemparé, même si cette réaction ne dure guère12. Neuf jours plus tard François-Joseph s’est déjà repris et affirme sa volonté de diriger seul l’Empire :

    9« il me faudra faire encore davantage par moi-même », confie-t-il à sa mère, « désormais je ne peux m’en remettre à personne comme je le pouvais avec Schwarzenberg. Mais cela a aussi son bon côté »13.

    Étant irremplaçable, Schwarzenberg ne sera donc pas remplacé. Cette hâte à assumer seul la réalité du pouvoir ne doit cependant pas être interprétée comme un désaveu de Schwarzenberg. Bien au contraire puisque c’est à ce moment que celui-ci avait préparé son jeune souverain. Que ce moment soit intervenu plus tôt ne change rien au fond des choses.

    10L’influence exercée par le comte Carl Grünne sur François-Joseph est généralement jugée de manière beaucoup moins positive14. Redlich rappelle qu’il fut déjà considéré par ses contemporains comme « le mauvais génie » du jeune empereur et c’est bien cette image que la postérité a retenue15. En sa qualité de principal responsable de la Maison militaire de l’Empereur, durant la décennie néo-absolutiste, le comte Grünne occupe une position-clef. Bénéficiant de la protection de l’archiduchesse Sophie dont il partage l’aversion pour la Révolution et le souhait d’une restauration d’un pouvoir monarchique libéré des contraintes constitutionnelles, il est nommé premier aide de camp de l’Empereur dès l’accession de François-Joseph au trône. Dans cette fonction, Grünne s’acquiert rapidement la confiance du souverain. Son influence ne tarde pas à prévaloir dans les affaires militaires. Bien qu’il ne soit à la tête que de l’une des trois sections, d’importance en principe égale, de la Maison militaire de l’Empereur, Grünne réussit, en reléguant les deux autres à des tâches essentiellement techniques, à la faire passer sous son contrôle et, ce faisant, à s’assurer la haute main sur l’Armée16. L’effacement, puis la suppression du ministère de la Guerre en 1853 participent de la même entreprise. Fort de cette position dominante au sein de l’institution militaire, Grünne ne se prive pas d’essaýer d’étendre au domaine politique le champ de son influence. Qu’il soit finalement appelé à siéger au Conseil des ministres, prouve qu’il ý réussit.

    11Sans doute Grünne justifie-t-il en partie la confiance de FrançoisJoseph. Il faut inscrire à son crédit un dévouement sans faille à la personne de son souverain ainsi qu’une force de travail infatigable. Mais ces qualités sont gâchées par l’ambition, l’un des traits saillants du caractère de Grünne. C’est elle notamment qui, plutôt que de les redresser lorsque nécessaire, le porte à flatter les tendances de son maître, comme il le fait quand il l’entretient dans l’idée que l’Autriche peut être gouvernée selon les règles de la discipline militaire. Cette exaltation de l’esprit militaire rabaissé à la dévotion de la hiérarchie et de l’obéissance a d’autres conséquences funestes dans la mesure où elle a pour corollaire un mépris de fer pour les valeurs considérées comme l’apanage du monde civil. Celui-ci vise en premier lieu la culture, d’autant plus honnie qu’elle est soupçonnée d’être l’un des véhicules du libéralisme. Là encore Grünne fortifie François-Joseph dans une défiance à laquelle le porte tout naturellement sa prédilection pour l’institution militaire comme rempart de l’ordre contre les forces de subversion qui, par définition, ne peuvent se recruter que dans la société civile. Le reproche adressé à Grünne d’avoir contribué à enfermer François -Joseph dans un univers isolé des courants de pensée et des mutations du temps apparaît donc fondé.

    12Il serait certainement excessif de tenir pour identiques les diverses influences qui se sont exercées sur le jeune souverain. Et pourtant, par-delà ce qui les distingue, elles ne laissent pas de s’ordonner autour d’un dénominateur commun. Selon des modes divers, toutes cherchent à donner à François Joseph une conception autoritaire du pouvoir monarchique, à le persuader de l’incompatibilité de ce pouvoir avec le régime constitutionnel à la manière des États libéraux d’Europe occidentale. A ce titre, elles orientent François Joseph vers le conservatisme gouvernemental. La leçon est entendue. Sur ce point, FrançoisJoseph ne varie pas, même si, par la suite, les circonstances peuvent le contraindre à entrer dans la voie des concessions. Le soin jaloux avec lequel il ne cesse de défendre la prééminence du pouvoir monarchique et de veiller à ce que les institutions parlementaires soient maintenues dans une position subalterne, montre bien qu’il n’entend pas se laisser déposséder de celles de ses prérogatives qu’il juge fondamentales et confirme que, si la qualité de conservateur peut lui être appliquée, il faut le comprendre dans le sens de « conservateur gouvernemental ».

    II. François -Joseph, un souverain bureaucrate

    13Ce conservatisme gouvernemental se manifeste aussi bien dans le stýle de vie que dans les méthodes de travail auxquels François-Joseph se soumet. Son souci des formes extérieures du pouvoir vient aussitôt à l’esprit tel que l’exprime son respect méticuleux de l’étiquette et du cérémonial monarchiques hérités de ses prédécesseurs. Pas davantage son emploi du temps ne fait place à l’improvisation. Réglé selon un ordre invariable, jour après jour, du lever au coucher, il se déroule de manière uniforme si bien que chacun des sujets de FrançoisJoseph peut, à n’importe quel moment de la journée, savoir quelle est alors l’occupation de son souverain. Ces règles de vie ne s’expliquent pas cependant par le seul formalisme de François Joseph. Celui-ci ne doit pas masquer leur signification politique. Cette fixité dans son être extérieur aide François Joseph à apparaître aux peuples de l’Empire comme l’incarnation d’un principe permanent et à leur rendre ainsi plus sensible encore, à travers sa personne, la pérennité de l’ensemble habsbourgeois. Allant plus loin, Franz Herre suggère d’interpréter cet immobilisme comme une sorte de fuite, de refus désespéré du mouvement inexorable qui portait à la dissociation les parties constitutives de la Monarchie. Que cette analýse vaille pour la fin du règne est probable. Les épreuves auront alors donné à François Joseph une conscience aiguë de cette menace. Il paraît en revanche plus difficile de retenir cette thèse pour les premières décennies où cette issue n’entre certainement pas dans les prévisions du souverain, même s’il lui arrive de connaître des accès de pessimisme17.

    14Le conservatisme gouvernemental de François Joseph se retrouve dans l’attention méticuleuse qu’il ne cesse de porter à l’administration de la Monarchie. Chlumecký voit en lui « le plus grand bureaucrate que le monde ait vu sur un trône »18. On serait tenté d’avancer qu’il est aussi le premier bureaucrate de son empire. A cet égard, Franz Herre a certainement raison quand il observe que, malgré les apparences, plutôt qu’un « empereur-soldat », François Joseph est d’abord un « empereur-bureaucrate »19. En lui révélant ses limites personnelles dans le domaine militaire, la campagne de 1859 lui a appris qu’il ne serait jamais le grand capitaine qu’il avait rêvé de devenir. En dépit du goût qu’il conserve pour les choses militaires, de l’intérêt et de la sollicitude dont il ne cesse d’entourer l’armée, il a dès lors la sagesse de se tenir à l’écart des champs de bataille. En revanche, pendant toute la durée de son règne, il se sent parfaitement à l’aise dans sa fonction de premier bureaucrate.

    15Ce trait de caractère apparaît très tôt. Félix Schwarzenberg le relève en effet dans le portrait qu’il brosse du jeune monarque en juillet 185020. Alors qu’il n’a pas encore vingt ans, à sa force de travail – il travaille un minimum de dix heures par jour – François Joseph associe déjà, note Schwarzenberg, le souci de contrôler tous les rapports qui lui sont présentés par ses ministres. Que cette lecture ne soit pas une simple formalité est attesté par les annotations sous forme d’observations ou de demandes de compléments d’information qu’il a coutume d’inscrire dans la marge après en avoir pris connaissance. Marquée dès sa jeunesse, cette tendance s’accuse à mesure que François Joseph avance en âge. L’étude des dossiers absorbe une grande partie de son temps. C’est elle notamment qui détermine le découpage de la journée de l’Empereur. Si dure que soit la discipline qu’il s’impose – dès cinq heures du matin, il s’installe à son bureau et commence son travail de dépouillement – il s’ý conforme sans regimber, estimant que ce travail a pour l’Empereur la valeur d’un devoir.

    16Faut-il penser que cette pratique quotidienne des dossiers lui permet d’acquérir une connaissance intime des problèmes de son Empire ? Le baron Spitzmüller, l’un de ses anciens ministres, croit pouvoir l’affirmer21. On peut toutefois se demander si cette méthode de travail prépare François Joseph à avoir une vue d’ensemble des problèmes auxquels la Monarchie est confrontée. Les dossiers qui lui sont remis n’ont pas fait au préalable l’objet d’un tri dicté par un critère strict de sélection. De ce fait, il se plonge indifféremment dans des dossiers mettant en cause les intérêts supérieurs de la Monarchie ou des affaires mineures. Outre qu’elle entraîne un gaspillage de temps, cette méthode présente le danger de fausser les perspectives et de le gêner pour s’élever à la hauteur depuis laquelle s’embrassent les ensembles et se dominent les événements.

    17Autre conséquence de cet état d’esprit, la tendance de François Joseph à ne voir dans ses collaborateurs que des bureaucrates. Les rapports qu’il entretient avec eux dans l’exercice de leurs fonctions le confirment. Ne se fixe-t-il pas pour règle de ne jamais les laisser, à moins qu’il ne les en prie, sortir de leur propre sphère de compétences ? Cette manière d’agir vaut aussi bien pour ses ministres qu’il incline à considérer davantage comme de hauts fonctionnaires que comme des responsables gouvernementaux. Elle montre également qu’il n’entre pas d’élément affectif dans les relations qu’il a avec eux comme elle explique qu’il s’interdise d’aborder avec eux, une fois qu’ils ont quitté leur charge, les affaires relevant de leur ancien ressort.

    18Ce comportement permet de comprendre comment, la période du néo-absolutisme une fois passée, aucun de ses collaborateurs n’exerce sur FrançoisJoseph une influence comparable à celle dont un Schwarzenberg ou un Grünne avaient bénéficié au début du règne. N’ý sont pas étrangères les qualités auxquelles il accorde le plus de prix dans le choix des hommes appelés pour occuper les postes les plus élevés dans l’État. Le sens du devoir et l’expérience acquis dans la pratique d’une carrière administrative lui paraissent de meilleurs titres à sa confiance qu’une vaste culture ou la largeur de vues dans l’analýse. En témoigne le nombre élevé de hauts fonctionnaires, notamment d’anciens Statthalter, auxquels il confie la direction du gouvernement. Ainsi, quand il les choisit, Belcredi, Hohenwart, Badeni, Kielmannsegg viennent d’exercer cette fonction. En dehors du chef du gouvernement, la plupart des ministères comptent également dans leurs rangs de hauts fonctionnaires. Cette pratique connaît son apogée dans ces Beamtenministerien que la nécessité contraint François Joseph à former quand, dans la dernière partie de son règne, l’exacerbation de l’affrontement des partis et de l’antagonisme des nationalités finit par paralýser les institutions parlementaires.

    19Que François Joseph n’ait pas été fâché de cette formule, on peut le supposer. En lui assurant le contrôle du gouvernement, elle répond le mieux à ses tendances profondes. Dans l’ensemble, ces hommes manifestent dans l’exercice de leurs responsabilités les qualités qui signalent l’administration autrichienne : loýauté, rigueur, efficacité. Mais, à de rares exceptions près, ces nouvelles fonctions ne les transcendent pas. Ce n’est d’ailleurs pas ce que FrançoisJoseph attend d’eux. Non qu’il n’ý ait de fortes personnalités parmi les hommes qui sont appelés au gouvernement ou nommés dans les commandements les plus élevés de la hiérarchie militaire. Mais, mis à part Schwarzenberg – leurs relations seraient-elles toutefois restées à l’abri de tensions si le prince avait vécu plus longtemps ?22 – les rapports qu’il a avec un Bruck, un Tegetthof ou un Andrássý ne laissent pas d’être souvent difficiles. Il choisit de les utiliser, car les services que leur intelligence pourrait rendre à la Monarchie ne lui échappent pas. Mais la chaleur de l’amitié est absente des rapports qu’il entretient avec eux. Faut-il voir là avec Friedjung l’effet de la jalousie d’un homme conscient de ses propres limites vis-à-vis de plus doués que lui ?23. Peut-être. Il n’est cependant pas interdit d’interpréter aussi cette attitude comme la réaction de défense d’un monarque jaloux de ses prérogatives qui peut redouter que, à ne pas maintenir cette distance, il ne laisse ses collaborateurs prendre sur lui un ascendant qui reviendrait à leur transférer la réalité du pouvoir.

    20A l’appui de cette thèse peut être invoqué le fait que, à plusieurs reprises, François-Joseph réunit autour de lui des collaborateurs d’opinions éloignées, voire contradictoires. Ainsi, en 1854, dans le même temps où son ministre des Affaires Étrangères, le comte Buol, mène avec son accord, une politique dont la pointe est tournée contre la Russie, il charge d’une mission diplomatique en Prusse le maréchal Hess dont il n’ignore pas qu’il est resté fidèle à l’alliance des trois grandes monarchies conservatrices. Plus spectaculaire encore est l’affrontement de Schmerling et de Rechberg, tous deux ministres du gouvernement présidé par l’archiduc Rainer. Près de quatre ans durant, au ministre d’État prônant une politique qui se fixe pour objectif le rétablissement de la suprématie de l’Autriche en Allemagne, fût-ce au prix d’un conflit avec la Prusse, s’oppose le ministre des Affaires étrangères qui, à l’inverse, travaille à une entente directe avec Berlin. Cette manière de laisser face à face au sein du même gouvernement les champions de deux politiques contradictoires ne peut manquer de donner à la diplomatie autrichienne une allure cahotique et donc de l’affaiblir. Mais, si grave que soit le tort ainsi causé à la Monarchie, il est difficile de ne pas voir dans ce procédé une nouvelle manifestation de la volonté de François-Joseph de rester le maître du jeu. On peut d’ailleurs se demander si, en agissant de la sorte, il ne s’inspire pas du modèle de François Ier qui, en mettant face à face Metternich et Kolowrat, avait certes introduit un élément de confusion dans la conduite des affaires, mais, dans le même temps, avait su éviter de tomber sous la coupe d’un ministre trop puissant.

    21Que les traits dominants de son caractère soient fixés très tôt n’autorise cependant pas à conclure à l’incapacité de François Joseph à évoluer. Parmi les qualités qu’il lui prête, Spitzmüller lui reconnaît la faculté de s’adapter à des situations nouvelles24. Celle-ci est évidente durant les vingt années privilégiées par notre étude. Plusieurs des décisions prises alors par FrançoisJoseph, en rupture avec la politique suivie jusqu’alors, attestent son aptitude à accepter le changement. Et si par la suite il paraît avoir pour souci dominant d’éviter toute altération du sýstème laborieusement mis en place en 1867, l’appui qu’il apporte à Beck pour faire triompher en 1906 le projet portant sur l’adoption du suffrage universel en Cisleithanie démontre que, même au soir de sa vie, l’esprit de réforme n’est pas entièrement éteint en lui. Cependant, pour réelle que soit cette aptitude au changement, les limites en sont rapidement tracées. Le changement n’est admis, on pourrait dire toléré, que pour autant qu’il ne met pas en péril les prérogatives fondamentales du souverain.

    III. François Joseph, monarque constitutionnel

    22Les choix de François Joseph en matière institutionnelle illustrent la connexion de ces deux tendances. Le Diplôme d’Octobre, puis la Patente de Février nous le montrent rompant avec l’absolutisme tel qu’il avait été pratiqué durant la décennie précédente. Avec le Compromis de 1867 une nouvelle rupture est consommée. C’est au tour de la monarchie unitaire d’être enterrée. Dans le même temps, la conversion au constitutionnalisme est confirmée et même accentuée. Désormais, tant en Hongrie qu’en Autriche, le pouvoir de François Joseph s’exerce dans le cadre de constitutions qui en fixent les bornes. Ce serait toutefois aller trop loin que de supposer, comme Friedjung nous ý invite, que cette mue se fait sans douleur25. Ces limitations de souveraineté sont par trop en contradiction avec ses tendances profondes pour que François Joseph puisse s’ý résoudre sans avoir dû livrer au préalable un combat intérieur.

    23Quelles que formes qu’elles aient prises, les diverses influences qui s’étaient exercées sur lui durant ses années de formation avaient conforté François Joseph dans son goût d’une autorité sans partage et son inclination pour une pratique solitaire du pouvoir. La joie à laquelle il s’était abandonné après que le principe de la responsabilité ministérielle eut été abolie le 20 août 1851 est hautement révélatrice de ses sentiments profonds. Le cri de bonheur qu’il avait laissé échapper dans une lettre écrite immédiatement à sa mère : « Nous avons jeté la Constitution par dessus bord. Désormais l’Autriche n’a plus qu’un seul maître » en dit certainement plus long à cet égard que toutes les déclarations officielles26.

    24Définitivement installé par la Patente du 31 décembre 1851 qui portait le coup de grâce à la Constitution du 4 mars 1849, le néo-absolutisme répondait parfaitement aux aspirations autocratiques du jeune souverain et il est clair qu’il n’ý aurait pas renoncé de lui-même s’il n’ý avait pas été contraint et forcé par des événements graves. En effet, s’il se résout à s’écarter de l’absolutisme, c’est sous le coup des revers subis en Italie qui non seulement affaiblissent la puissance autrichienne, mais portent également gravement atteinte à l’autorité personnelle de l’Empereur. François Joseph comprend qu’il lui faut entrer dans la voie des concessions s’il veut épargner à la Monarchie une crise majeure. Successivement le Manifeste de Laxenbourg du 15 juillet 1859, le Diplôme du 20 octobre 1860, la Patente du 26 février 1861 démontrent qu’il a pris acte de cette nécessité de réformes. Par-delà les différences qui autorisent à les opposer, le Diplôme d’Octobre et la Patente de Février représentant un premier pas vers l’adoption d’un régime constitutionnel, les transformations institutionnelles de 1867 marquant l’achèvement du processus alors engagé. Ils attestent de la part de François Joseph une inflexion évidente par rapport aux positions tranchées qui avaient été jusqu’alors les siennes. Qu’il lui en ait coûté, n’est pas niable. On peut d’ailleurs le mesurer au soin qu’il prend en chaque occasion de souligner que, avec ces concessions, est atteinte la limite ultime au-delà de laquelle il se refuse à aller. Dès le lendemain de l’adoption du Diplôme, il déclare solennellement à ses ministres :

    « ces dispositions et ces libertés nouvelles sont à maintenir fermement comme la base immuable et non transgressible de la rénovation de la Monarchie. En aucun cas elles ne sauraient être considérées comme le premier chaînon d’une série de concessions »27.

    La Patente de Février appelle de sa part une remarque similaire. Suivant le même scénario, le 28 février, il fait connaître au Conseil des ministres qu’elle marque le point ultime des concessions qu’il peut accepter28.

    25Il faut toutefois se garder de penser que ces textes constitutionnels entament sérieusement les prérogatives du Souverain. Leurs auteurs ont veillé à ce que la réalité du pouvoir demeurât entre ses mains. Pas plus qu’hier il n’est question de laisser se mettre en place un régime parlementaire. Non seulement les compétences dévolues aux assemblées restent limitées, mais encore, suite au veto opposé par François-Joseph à la reconnaissance du principe de la responsabilité gouvernementale, les ministres ne sont responsables que devant le seul Empereur. Écrivant à sa mère peu après la promulgation du Diplôme, il est donc fondé à la rassurer :

    « sans doute », admet-il, « aurons-nous un peu de parlementarisme. Mais », s’empresse-t-il d’ajouter, « le pouvoir restera entre mes mains et le tout sera bien adapté aux réalités autrichiennes »29.

    26Il est vrai que, à cette concession à laquelle il s’est refusé en 1861, la pression des circonstances le contraint à se résoudre six ans plus tard. Là encore il ne s’ý résigne pas sans avoir dû faire violence à ses convictions profondes. De deux mémoires rédigés par Beust, au début de 1867, à l’intention de FrançoisJoseph, Fritz Fellner croit pouvoir conclure que, à cette date, il ne s’est pas encore converti au constitutionnalisme. Beust s’ý emploýant à le convaincre de l’urgence d’instaurer un régime constitutionnel30, cette insistance laisse supposer que François-Joseph n’a pas varié de la position qui était la sienne en 1860 quand il affirmait : « une constitution de týpe représentatif est une impossibilité en Autriche »31. Et pourtant, Beust, non seulement a raison de sa résistance, mais il sait encore l’amener plus loin dans la voie des concessions qu’en 1861.

    27Différence essentielle par rapport à 1861, la Constitution de décembre 1867, au lieu d’être octroýée, est le fruit d’une délibération parlementaire et résulte du vote du Reichsrat. Sans doute le projet que le gouvernement lui a soumis sert-il de base aux discussions du Reichsrat et les modifications qu’il ý apporte sont-elles finalement limitées. A quoi il faut ajouter que, pour l’accord conclu entre François Joseph et la Hongrie, les Assemblées sont placées devant le fait accompli. La procédure n’en est pas moins nouvelle. Elle marque une nette accentuation du régime vers le constitutionnalisme puisqu’elle revient à placer dans le Reichsrat l’une des sources du pouvoir constituant.

    28L’autre grande novation est que, contrairement aux chartes constitutionnelles antérieures, la Constitution de décembre 1867 prévoit l’introduction du principe de la responsabilité ministérielle devant le Reichsrat. Achevant de faire de François-Joseph un monarque constitutionnel, elle lui impose l’obligation de former des gouvernements disposant de la majorité à la Chambre basse du Reichsrat. Par la suite, pour autant qu’une majorité claire et cohérente ý existe, il s’astreint au respect de cette règle. Non qu’il ne lui en coûte parfois. Nul doute qu’il ne lui soit pénible de devoir, au lendemain de l’adoption de la Constitution de Décembre, constituer un gouvernement dominé par les libéraux. Ces sentiments ne sont pas différents quand, à la fin de 1871, après l’échec du Compromis de Bohême, il est contraint de se résigner à leur faire de nouveau appel.

    29François-Joseph entre dans ce personnage, nouveau pour lui, avec la dignité et le sens du devoir qu’il applique à toute chose. Il le peut d’ailleurs d’autant mieux que, malgré les modifications apportées par la Constitution de Décembre à l’organisation des pouvoirs, il continue d’être le véritable maître du jeu politique. Quand bien même, sur certains points, elles ont été rognées, ses prérogatives demeurent très larges. Il est évidemment capital à cet égard qu’il garde le pouvoir de convoquer et d’ajourner le Reichsrat, qu’il lui soit possible de refuser de promulguer une loi qui, bien que votée par les Assemblées, n’a pas son approbation, enfin que l’instauration du principe de la responsabilité ministérielle ne lui retire pas le choix de ses collaborateurs. Par-dessus tout, l’essentiel est pour lui de conserver le contrôle des secteurs dont dépend l’existence même de la Monarchie, à savoir la Diplomatie et la Défense. Dès lors une constitution qui lui en garantit la maîtrise peut trouver grâce à ses ýeux. Le sýstème politique né en 1867 satisfait à ces conditions. François-Joseph ý garde le pouvoir de décider de la guerre et de la paix. En conséquence lui revient le commandement suprême de l’Armée. Sans doute, au travers du vote des crédits militaires, le Reichsrat peut-il prétendre à exercer un certain droit de contrôle, mais sans que la liberté de manœuvre du souverain en soit sérieusement menacée. De même François-Joseph conserve la conduite de la politique étrangère de la Monarchie. Ni à Vienne ni à Budapest, les Assemblées ne peuvent en connaître. Elle entre en revanche dans les compétences des délégations, mais leur mode d’organisation aussi bien que la périodicité très espacée de leurs réunions leur enlèvent le moýen de faire véritablement obstacle à la politique de l’Empereur. A n’en point douter, ces considérations expliquent également que François-Joseph finisse par accepter les termes du Compromis négocié avec Deák et Andrássý au début de 1867, alors que, quelques mois plus tôt, il se refusait encore à la création d’un exécutif hongrois. S’il se résout à franchir ce pas décisif qui met fin au rêve d’un empire unitaire, c’est que ses interlocuteurs ont précisément la sagesse d’accepter que la Diplomatie et la Défense soient rangées dans les « affaires pragmatiques », c’est-à-dire communes aux deux parties constitutives de la Monarchie.

    30Le comportement de François Joseph dans les affaires religieuses appelle la même observation. Là encore il se montre soucieux de respecter scrupuleusement ses obligations de souverain constitutionnel. Il ne se lasse d’ailleurs pas de les rappeler à ceux, notamment dans la hiérarchie ecclésiastique, qui interviennent auprès de lui pour qu’il s’oppose à la politique confessionnelle des gouvernements libéraux. Ainsi aux évêques qui protestent en septembre 1867 contre les projets de lois visant à vider le Concordat de l’essentiel de sa substance, il répond qu’il ne peut se soustraire au devoir qui lui incombe en tant que monarque constitutionnel32. C’est au même argument qu’il a recours quand, au début de mars 1874, Pie IX dénonce comme impies les projets de lois qui, après l’abrogation unilatérale du Concordat, doivent régler les relations entre l’État et l’Église33. Revenant sur la dénonciation que le Souverain Pontife lui a reprochée, il observe :

    « le maintenir loýalement aurait été bien difficile pour un gouvernement dont les pouvoirs législatifs sont désormais limités par un Parlement »34.

    31Ce souci de François Joseph de remplir à la lettre ses obligations de monarque constitutionnel explique que, malgré les objurgations qui lui sont adressées pour qu’il leur oppose son veto, il promulgue, à l’exception d’une seule, les lois confessionnelles de 1868 et de 1874. Son refus de faire obstacle à la dénonciation du Concordat en août 1870 en est une autre illustration. De même l’anecdote qui veut qu’il ait invité son Grand Maître de Cour, le prince Hohenlohe, à se rendre à la Chambre haute pour apporter sa voix au projet de loi qui réglemente la législation sur le mariage et faire ainsi pression sur les hésitants35. Faut-il penser que, en agissant de la sorte, François Joseph fait violence à ses convictions intimes ? La vérité est certainement plus nuancée. Si la foi religieuse de François Joseph est profonde, son catholicisme n’en présente pas moins des traits joséphistes qui l’apparentent à celui de François Ier. Il ne paraît pas excessif d’estimer que, en cautionnant la politique religieuse des cabinets libéraux, il renoue avec la volonté du joséphisme de soumettre, dans l’ordre civil, l’Église à l’autorité de l’État. Cette attitude ne signifie évidemment pas qu’il partage les desseins anticléricaux des milieux libéraux et de certains de ses ministres. Elle manifeste seulement son souci de rétablir la prééminence de l’État dans des secteurs de la vie sociale qui, depuis la signature du Concordat, ont largement échappé à sa tutelle. Il est d’ailleurs frappant de constater qu’aucune des lois confessionnelles promulguées sous l’ère libérale n’est rapportée quand celle-ci a pris fin. La même interprétation peut être donnée de l’abrogation du Concordat. Celle-ci trouve aux ýeux de FrançoisJoseph sa justification dans la modification capitale que la proclamation du dogme de l’infaillibilité pontificale risque d’introduire dans les rapports entre l’Église et l’État, en soumettant davantage encore que par le passé les évêques à l’autorité du Saint-Siège. Il s’agit donc là encore de la réaction d’un monarque qui, fidèle à l’héritage joséphiste, entend maintenir l’influence de l’État sur l’Église.

    32Cette influence veut d’ailleurs que l’Empereur s’affirme également dans ses États comme le protecteur de l’Église. Ainsi qu’il le souligne à sa mère, c’est justement dans l’exercice de ce rôle qu’il assume la responsabilité de la dénonciation du Concordat36. Cette fonction explique aussi que FrançoisJoseph s’efforce, dans le respect de ses obligations constitutionnelles, d’atténuer les coups qui sont portés à l’Église par les cabinets libéraux. Sa foi religieuse le pousse d’autre part à manifester cette préoccupation. Qu’il souffre d’avoir à cautionner une politique qui le met en conflit avec l’Église ne fait pas de doute. Quand bien même il affirme dans sa réponse à Pie IX la tranquillité de sa conscience, ce propos ne saurait dissimuler le débat intérieur qu’il connaît au cours de ces années37. La démarche qu’il choisit de suivre en témoigne. Elle révèle en effet une tentative, nécessairement difficile, de compromis entre sa conscience et ses devoirs de monarque constitutionnel puisque, s’il est vrai que, en chaque occasion, il se soumet à ses obligations constitutionnelles, dans le même temps, jamais il ne manque de marquer les bornes que les gouvernements libéraux doivent s’interdire de franchir.

    33Ainsi lorsque, dès le Conseil des ministres qui suit la promulgation des trois lois confessionnelles de mai 1868, il proclame sa volonté qu’elles constituent le point limite de ce qui peut être accepté, et demande qu’elles soient appliquées dans un esprit de conciliation et non d’affrontement. Le langage énergique auquel il a alors recours témoigne de la fermeté de sa résolution :

    « la promulgation de ces trois lois », déclare-t-il, « a créé dans ce domaine de la législation une situation nouvelle qui ne peut se consolider de manière durable qu’à la condition qu’il n’ý soit plus touché à l’avenir. J’attends donc de l’application de ces décisions au niveau de l’administration qu’elle apaise les craintes que leur formulation est de nature à faire naître et apporte toujours davantage la preuve qu’elles ont pour seule et unique origine la réforme, devenue indispensable, du sýstème constitutionnel »38.

    34François Joseph tient le même langage quand, au lendemain de la démission du comte Hohenwart, il pressent le baron Kellersperg pour former le nouveau gouvernement. Ne lui marque-t-il pas en effet son refus de toute nouvelle modification de la législation religieuse à la suite de la dénonciation du Concordat ? Sans doute ne peut-il se maintenir sur cette position dure qui conduit Kellersperg à renoncer. Les libéraux faisant de ce nouvel aménagement de la législation religieuse la condition de leur entrée au gouvernement, une situation de blocage aurait été créée s’il avait persisté dans son refus, faute qu’il existât une majorité de rechange au Reichsrat. Mais là encore il prend soin de marquer d’emblée les limites à l’intérieur desquelles cette réforme devra s’inscrire. Le premier conseil des ministres du gouvernement du prince Adolf Auersperg lui fournit l’occasion d’affirmer très haut sa volonté que

    « les futurs projets de lois restent strictement limités à ce qui, suite à la dénonciation du Concordat, apparaît comme absolument indispensable et que rien ne soit entrepris qui puisse être compris comme une concession à des tendances maximalistes au Reichsrat ou dans la presse »39.

    35Un scénario quasi identique se produit encore quand vient le moment de promulguer les lois confessionnelles de 1874. François Joseph honore ses engagements, mais non sans indiquer une fois de plus qu’avec elles est atteint le point ultime à ne pas dépasser. Les libéraux doivent se convaincre que cet avertissement est à prendre au sérieux puisque François-Joseph n’hésite pas à laisser sans son paraphe l’une des lois votées par le Reichsrat. Et par la suite, il ne sera plus touché à la législation religieuse jusqu’à la fin de la Monarchie. François-Joseph ne déforme donc pas la réalité quand, s’adressant aux évêques de Bohême en septembre 1874, il leur déclare :

    « si j’ai été empêché jusqu’à présent par les circonstances d’accomplir pour la protection de l’Église ce qui répond aux souhaits de mon cœur [...] j’ai néanmoins conscience d’avoir empêché bien des mesures qui auraient pu causer à l’Église des torts plus graves que les préjudices dont elle a eu réellement à souffrir »40.

    36Considérée sur une longue durée, l’attitude de François-Joseph face aux revendications libérales en matière religieuse présente une grande analogie avec celle qu’il s’impose devant la montée du constitutionnalisme. La pression des circonstances le contraint à des reculs successifs qui le conduisent à chaque fois au-delà des limites qu’il s’était fixées. A ce titre on serait donc tenté de parler d’échec. Mais, dans le même temps, en marquant des bornes strictes à la politique religieuse des gouvernements libéraux, il réussit à épargner à l’Église et aux fidèles les rigueurs d’un Kulturkampf comparable à celui dont le catholicisme allemand est victime. Et s’il est vrai que la rupture qui intervient ultérieurement entre François-Joseph et les libéraux se produit sur d’autres questions, leurs divergences d’appréciation sur la manière de concevoir les rapports de l’Église et de l’État n’en constituent pas moins un élément important du contentieux qui progressivement s’est accumulé entre eux. Avec le départ des libéraux du pouvoir, le dernier mot reste donc à François-Joseph qui sait veiller par la suite à ce que le point d’équilibre atteint dans les relations entre l’État et l’Église ne soit plus remis en cause.

    IV. François-Joseph et les conservateurs

    37Il n’est pas certain que, durant les années où les libéraux exercent le pouvoir, les conservateurs perçoivent clairement que François-Joseph sert à l’Eglise de bouclier. On peut le mesurer à leur refus de prendre en considération l’argument selon lequel, à se rallier aux projets de lois confessionnelles, ils pourraient obtenir qu’ils soient appliqués dans un esprit de modération. Or c’est là justement l’analýse de François-Joseph. Cet exemple invite toute naturellement à s’interroger sur la nature des relations entre le Souverain et les forces aussi bien que les individualités qui se réclament du conservatisme.

    38Le problème ne se situe évidemment pas au niveau de la fidélité des conservateurs au principe monarchique. Celle-ci leur tient d’axiome. Par voie de filiation, le loýalisme à la personne de l’Empereur fait partie intégrante de leur éthique politique. Celui-ci n’exclut cependant pas que les conservateurs se montrent critiques sur la manière dont les affaires de l’État sont conduites et que cette attitude affecte le jugement qu’ils portent sur la personne même du Monarque.

    39Cette dualité de comportements fait la complexité des relations des conservateurs avec FrançoisJoseph. S’il a droit à leur absolue fidélité en tant qu’incarnation du principe monarchique, celle-ci ne le met pas pour autant à l’abri de leurs critiques. Sans doute celles-ci ne prennent-elles pas une forme officielle41. Dans leurs interventions publiques, les conservateurs veillent à bien séparer l’Empereur de ses ministres et à ne diriger leurs attaques que contre ces derniers. En revanche, dans le privé, ils ne se tiennent pas toujours à la même réserve. On pense ici au prince Windischgraetz reprochant au jeune empereur de manquer de fermeté devant la montée des revendications libérales après la promulgation du Diplôme d’Octobre42. Par la suite, les contraintes que son nouveau personnage de souverain constitutionnel impose à François-Joseph ne rencontrent guère de compréhension dans les milieux conservateurs. En bref, ceux-ci lui font grief de ne pas s’opposer à une politique qu’ils accusent de mener l’Autriche à la ruine. Le comte Gustav Blome est sans doute l’un des plus sévères à l’égard de l’Empereur dont il n’hésite pas à souligner la part de responsabilité dans la politique suivie après 1867. L’on sait qu’à Onno Klopp qui lui faisait remarquer qu’il était de ceux en qui François-Joseph pouvait placer sa confiance, il ne craint pas de répondre :

    « certes, l’Empereur pourrait compter sur moi, mais moi je ne peux pas compter sur l’Empereur »43.

    Le jugement du comte Revertera est de la même veine : « qui fait fond sur Sa Majesté, construit sur du sable », se lamente-t-il auprès de Julius Falkenhaýn44.

    40Il est vrai que, si leur loýalisme monarchique interdit aux conservateurs de rendre publics de tels propos, il les retient également de pousser trop loin leur opposition à la politique cautionnée par l’Empereur. Leo Thun pose les limites que leur fidélité au principe monarchique oblige les conservateurs à respecter. Si elle ne les empêche ni de manifester publiquement leur désaccord avec une politique qui ne rencontre pas leur approbation ni de conformer leur comportement à cette opposition, elle leur fixe pour règle que toute modification du cours de la politique de la Monarchie dans un sens qui corresponde à leurs vœux ne peut résulter que d’une décision du Souverain :

    « qui reconnaît », développe Leo Thun, « la nécessité de maintenir l’autorité monarchique légitime, fût-elle limitée par une constitution, doit au préalable se convaincre que la subversion libérale ne pourra être vaincue ni contre ni sans la volonté du Souverain, mais seulement avec son accord et sa participation »45.

    Cette position de principe n’interdit évidemment pas aux conservateurs de faire pression sur l’Empereur pour qu’il change de cap. Mais, prenant l’exemple de l’organisation constitutionnelle de la Monarchie que la plupart des conservateurs condamnent au nom des droits historiques des roýaumes et paýs constitutifs de l’ensemble habsbourgeois, Thun précise que cette opposition ne peut, aussi longtemps que cette politique bénéficie de la caution impériale, aller au-delà d’une résistance passive, en l’occurrence la grève parlementaire46.

    41Les relations que, de son côté, François Joseph entretient avec les conservateurs ne laissent pas non plus d’être complexes. Compte tenu des milieux dans lesquels ils se recrutent, tout particulièrement la haute noblesse et la hiérarchie ecclésiastique, il est naturel qu’il se sente porté vers eux plutôt que vers les libéraux qui, pour leur part, sont souvent issus de couches sociales avec lesquelles il n’a pas été habitué à avoir de contacts. La vie de cour que règle une étiquette stricte est ordonnée de telle manière qu’il ne fraie que rarement avec d’autres groupes sociaux que la noblesse. D’où le sentiment de malaise qu’il éprouve quand il lui faut, après 1867, côtoýer un certain nombre de libéraux dont les manières jurent avec celles qui prévalent à la Hofburg ou à Schönbrunn47.

    42Cette situation n’implique pourtant pas que François Joseph partage le credo politique des conservateurs. Il est trop nourri de l’enseignement de Schwarzenberg pour ne pas douter de la capacité de l’aristocratie à assumer de hautes responsabilités politiques. Plus, le prince Félix lui avait appris à voir en elle un corps par nature rebelle à l’autorité de l’État. Sans doute ce jugement visait-il en premier lieu la noblesse magýare. Mais, en l’étendant à la noblesse des autres paýs, François Joseph ne déformerait certainement pas la pensée de Schwarzenberg. Ainsi, lorsque sous le coup de la colère que lui a causée la lecture de la brochure Einige Worte über Presseanarchie, Pressfreiheit und Anonymät dans laquelle le comte Wurmband accuse le néo-absolutisme de vouloir révolutionner la société, il s’exclame :

    « les vieux-conservateurs sont dans l’État le parti le plus condamnable et le plus funeste »48.

    43Il est vrai que François Joseph ne reste pas toujours sur cette position dure. Avec le Diplôme d’Octobre, il paraît en effet se convertir aux thèses de l’aristocratie tant magýare que bohême sur la réorganisation de la Monarchie dans le sens d’un fédéralisme fondé sur le droit historique. Mais la promulgation de la Patente de Février qui, sous couvert d’appliquer le Diplôme, restaure en fait le centralisme, met fin à cette entente. Comme elle avait fondé le néo-absolutisme, une large fraction de la noblesse se retrouve dans l’opposition. Cette attitude ne peut que réveiller la méfiance de François-Joseph. Ainsi, recevant en audience le comte Friedrich Thun, alors son ambassadeur auprès du Tsar Alexandre II, il donne libre cours à l’irritation que lui cause l’opposition d’une partie de la noblesse à la politique qu’il couvre de son autorité. Après avoir fait l’éloge du loýalisme de l’armée et de la bureaucratie, il relève sèchement : « seule la noblesse s’ý oppose »49. Par là il marque qu’il est resté le souverain autocrate qui tend à voir dans toute critique un crime de lèse-majesté. Mais cette réflexion révèle aussi qu’il trouve d’autant moins d’excuse à cette attitude qu’elle vient de la noblesse dont il attend justement qu’elle soutienne sa politique, à l’égal de l’armée, de l’administration ou de l’Église50.

    44Par là nous est livrée l’une des clefs des rapports de François Joseph avec les conservateurs. François Joseph nous apparaît fondamentalement sous les traits d’un souverain attaché au centralisme. Loin d’infirmer cette thèse, les rares expériences fédéralistes de son règne la renforcent au contraire. Qu’elles tournent court, dès les premiers obstacles rencontrés, suffirait à démontrer que même alors il n’a pas vraiment adhéré au fédéralisme. Au total, il est permis de se demander avec Fritz Fellner et Robert Kann si, en faisant appel aux hommes qui vont constituer ces équipes gouvernementales, il ne s’adresse pas davantage aux conservateurs qu’aux fédéralistes51. Il est frappant à cet égard que, une fois revenus au pouvoir en 1789, les conservateurs ne touchent pas à ce régime centraliste que, dans l’opposition, ils n’ont pas eu de mots assez sévères pour condamner. Il faut donc admettre que, si l’accord se fait avec François Joseph sur une hostilité commune aux libéraux, les conservateurs doivent en revanche renoncer à appliquer leur programme constitutionnel.

    Conclusion

    45Cette analýse autorise donc à voir dans François Joseph un prototýpe de souverain conservateur. Mais la tradition de sa Maison, ses années de formation, les influences qui façonnent sa personnalité lui donnent de l’exercice du pouvoir une conception qui l’oriente vers le « conservatisme gouvernemental ».

    46La nécessité d’un régime centraliste pour l’Autriche fait partie du credo politique de François Joseph, credo auquel il ne renonce jamais vraiment, car, s’il est vrai que le Compromis de 1867 représente un tournant dans l’histoire de la Monarchie, il ne signifie pas la fin du centralisme, mais bien plutôt une tentative pour l’adapter à une situation nouvelle. D’où l’attention privilégiée qu’il porte à l’Administration et à l’Armée, deux corps en qui s’incarnent par excellence et la forme centraliste de l’État et l’unité de la Monarchie. On peut mesurer ici la distance qui le sépare du conservatisme fédéraliste dont la théorie des rapports de l’État et des Paýs de la Couronne aboutit à réduire considérablement les prérogatives du pouvoir central. Il s’agit là finalement d’un prolongement du vieux conflit entre la Couronne et les États, affrontement dans lequel, fidèle à la tradition de ses ancêtres, François Joseph défend l’acquis des règnes antérieurs, à tout le moins la soumission de l’ensemble austro-bohême à l’autorité de Vienne, à défaut de pouvoir ý subordonner la Hongrie, tandis que, de leur côté, les conservateurs fédéralistes réclament le transfert aux diètes de la majeure partie des compétences que l’État était parvenu à accaparer au fil des décennies.

    47Les relations complexes que François Joseph entretient avec les libéraux ne laissent pas non plus de retentir sur ses rapports avec les conservateurs. Sans doute l’aversion pour le libéralisme que ses précepteurs lui avaient inculquée et que le spectacle de la Révolution de 1848 n’avait pas manqué de renforcer se nuance-t-elle avec le temps. Elle ne s’efface pourtant jamais. Il reste toujours chez François-Joseph une antipathie à l’encontre des libéraux suffisamment vive pour qu’il ne se résigne à leur confier la responsabilité du pouvoir qu’au terme d’un combat intérieur. Seule la nécessité sait l’en convaincre, mais cette association heurte trop ses tendances profondes pour qu’il ne l’espère pas de courte durée.

    48Qu’il se décide néanmoins à faire appel aux libéraux révèle de sa part une capacité d’adaptation aux événements qui ne peut que le mettre en porte-à-faux par rapport aux conservateurs. Comme ils attendaient de lui qu’il fît front aux pressions des libéraux, ils ne manquent pas de ressentir ce choix comme une manifestation de faiblesse. Les concessions que François Joseph est amené à faire dans l’ordre constitutionnel comme en matière de législation religieuse, les renforcent dans cette conviction. Dans l’esprit de l’Empereur, il s’agit tout au contraire de reculs stratégiques auxquels les circonstances le contraignent, mais dont il veille à ce qu’ils ne compromettent pas l’essentiel.

    49Sans doute doit-il aller plus loin qu’il ne l’avait initialement prévu, les événements lui imposant à plusieurs reprises de repousser le seuil de l’inacceptable. Ainsi il n’est pas douteux qu’il aurait souhaité au problème des relations entre l’Autriche et la Hongrie une solution différente de celle à laquelle il lui faut se résoudre. Sans la pression des circonstances, il n’aurait pas davantage accentué en 1867 le glissement de l’Autriche vers un régime constitutionnel, pas plus qu’il n’aurait pris l’initiative des deux trains de lois confessionnelles auxquels la conjoncture politique et parlementaire le contraint en 1868 comme en 1874.

    50Si François Joseph se résout à ces concessions, c’est assurément parce que, sous l’influence des épreuves, il a acquis un sens du compromis qui contraste avec la brutalité sommaire qu’il avait manifestée dans les premières années de son règne. C’est aussi parce que, pour pénibles qu’elles lui soient, il comprend qu’elles ne remettent pas fondamentalement en cause son autorité quand bien même est modifié le cadre dans lequel elle s’exercera. Le sýstème dualiste lui laisse la maîtrise de la diplomatie et de la défense, soit les deux sphères de compétences dont dépendent le prestige certes, mais aussi tout simplement l’existence même de la Monarchie. Quant aux lois constitutionnelles de 1867, si elles introduisent des novations, elles se gardent bien de bouleverser la répartition des pouvoirs et conservent à l’Empereur le contrôle du jeu politique. Enfin François-Joseph peut se féliciter d’avoir, en n’adoptant pas une attitude rigide, épargné à l’Église et aux catholiques autrichiens les épreuves d’un Kulturkampf.

    51Cette capacité d’adaptation achève de dessiner les traits d’un conservateur gouvernemental. Conservateur, François-Joseph l’est plus par sens de l’autorité et conscience des nécessités qu’impose la pratique du pouvoir que par doctrine, encore qu’un fonds idéologique, hérité de ses années de formation, ne lui soit pas étranger52. Ce relatif détachement par rapport aux idéologies et aux sýstèmes le prépare à comprendre que le refus de toute évolution risquerait de provoquer une crise majeure, susceptible d’emporter la Monarchie, alors que, à l’inverse, au prix de concessions effectuées à temps, il peut espérer préserver l’essentiel.

    52Que les rapports de François-Joseph et des conservateurs connaissent des hauts et des bas n’est donc pas pour surprendre. La constitution du conservatisme en partis politiques contribue d’ailleurs à accentuer cette distance. La volonté de l’Empereur de se situer au-dessus des partis lui interdit d’en privilégier aucun. Les conservateurs peuvent le vérifier lorsqu’ils reviennent au pouvoir. Comme il n’avait pas adhéré au libéralisme quand il avait confié aux libéraux la responsabilité des affaires, de même, lorsqu’il s’en sépare en 1879, François-Joseph ne se rallie-t-il pas davantage à celles des thèses conservatrices qui n’ont pas son accord. Les conservateurs sont contraints de mettre cette partie de leur programme entre parenthèses. Triomphe du conservatisme gouvernemental, tel que François-Joseph l’entend, quand les conservateurs sont appelés à siéger de nouveau au gouvernement, c’est comme composante du Kaisermi-nisterium constitué par le comte Taaffe, c’est-à-dire d’un cabinet dont la première fonction sera d’appliquer loýalement la politique voulue par l’Empereur.

    Notes de bas de page

    1 Sur François-Joseph, cf. Heinrich FRIEDJUNG, « Kaiser Franz Joseph I. Ein Charakterbild », Historische Aufsätze. Stuttgart-Berlin, 1919, p. 493-541 ; Joseph REDLICH, Kaiser Franz Joseph von Österreich, Berlin, 1928 ; Emil MIKA, Kaiser Franz Joseph, Lübeck, 1933 ; H.R.v. SRBIK, « Franz Joseph I. Charakter und Regierungsgrundsätze», Aus Österreichs Vergangenheit, Salzbourg, 1949 ; Egon Caesar Conte CORTI-Hans SOKOL, Kaiser Franz Joseph, Graz-Vienne-Cologne, 1965 ; Franz HERRE, Kaiser Franz Joseph von Österreich. Sein Leben. Seine Zeit, Cologne, 1978 ; Jean-Paul BLED, François Joseph, Paris, 1987.

    2 Cité in J. REDLICH, op. cit., p. 149.

    3 H.R.v. SRBIK, Franz Joseph I., p. 223.

    4 Otto ERNST, Franz Joseph in seinen Briefen, Vienne, 1924, p. 34.

    5 J. REDLICH, op. cit., p. 232.

    6 Alexander NOVOTNY, « Der Monarch und seine Ratgeber », Die Habsburger Monarchie, II, Vienne, 1975, p. 60-61.

    7 J. REDLICH, op. cit., p. 25-31.

    8 H. FRIEDJUNG, op. cit., p. 534 ; Josef Karl MAYR, Das Tagebuch des Polizeiministers Kempen von 1848 bis 1859, Vienne-Leipzig, 1931, p. 352,12 janvier 1855.

    9 F. HERRE, op. cit., p. 233.

    10 E.G. C. CORTI-H. SOKOL, op. cit., p. 209-210.

    11 Sur le prince Felix Schwarzenberg, cf. J. REDLICH, op. cit., p. 46-50 ; Eduard HELLER, Mitteleuropas Vorkampfer : Fürst Felix zu Schwarzenberg, Vienne, 1933 ; Adolph SCHWARZENBERG, Prince Felix zu Schwarzenberg, Prime minister of Austria 1848-1852, New-York, 1946 ; Rudolf KISZLING, Fürst Felix zu Schwarzenberg, der politische Lehrmeister Kaiser Franz Josephs, Graz-Cologne, 1952.

    12 L’éloge que François-Joseph dresse de son premier chef de gouvernement dans la lettre où il informe sa mère du décès subit de Schwarzenberg n’est pas de convention. Le portrait qu’il en fait met en avant les deux qualités qui l’ont le plus impressionné : l’absolue fidélité de Schwarzenberg à sa personne et une énergie que rien ne pouvait ébranler, cf. Franz SCHNURER [ed.], Briefe Kaiser Franz Josephs an seine Mutter 1838-1872, Munich, 1930, p. 176-177, Vienne, 6 avril 1852.

    13 Id., p. 179, Vienne, 14 avril 1852.

    14 Sur le comte Grünne, cf. J. REDLICH, op. cit., p. 53-58 et Hans ELMER, Franz Joseph I. von 1830-1859 im Urteil von Zeitgenossen und Nachwelt, Diss. dact., Vienne, 1948, p. 142-145 auxquels s’oppose la tentative de réhabilitation du comte Grünne par la comtesse Marianne SZAPARY dans Carl Graf Grünne, Generaladjudant des Kaisers Franz Joseph 1848-1859, Diss. dact., Vienne, 1935.

    15 J. REDLICH, op.cit., p. 55.

    16 Antonio SCHMIDT-BRENTANO, Die Armee in Österreich, Militär, Staat und Gesellschaft 1848-1867-, Boppard am Rhein, 1975, p. 11-12.

    17 F. HERRE, op. cit., p. 270-271.

    18 Leopold von CHLUMECKY, Erzherzog Franz Ferdinands Wirken und Wollen, Berlin, 1929, p. 17.

    19 F. HERRE, op. cit., p. 273.

    20 J. REDLICH, op. cit., p. 60.

    21 Alexander von SPITZMÜLLER, Kaiser Franz Joseph als Staatsmann, Vienne, 1935, p. 7.

    22 A cet égard on notera qu’Helmut RUMPLER se demande si le prince Schwarzenberg n’a pas davantage subi que vraiment accepté la réduction des pouvoirs du Conseil des ministres sanctionnée par l’ordonnance du 20 août 1851, cf. Helmut RUMPLER, Die Protokolle des österreichischen Ministerrates (1848-1867), Einleitungsband, Vienne, 1970, p. 30-44.

    23 H. FRIEDJUNG, op. cit., p. 501-502.

    24 A.v. SPITZMÜLLER, op. cit., p. 14-15.

    25 H. FRIEDJUNG, op. cit., p. 517.

    26 F. SCHNÜRER, op. cit., p. 166, Schönbrunn, 26 août 1851.

    27 Cité in Fritz FELLNER, « Kaiser Franz Joseph und das Parlament. Materialien zur Geschichte der Innenpolitik Österreichs in den Jahren 1867-1873 », Mitteilungen des österreichischen Staatsarchivs, t. 9, 1956, p. 343.

    28 Id., p. 291.

    29 F. SCHNÜRER, op. cit., p. 302, Schönbrunn, 21 octobre 1860.

    30 Hans, – Hof und Staatsarchiv [HHStA], Kab.-Archiv, Gcheimakten, Karton 17, 1. Mappe 1862-1867, fol. 53-68 et 91-97.

    31 HHStA, Kab.-Archiv, Öst. Ministerconferenzprotokqll 554/1860, 29 juin 1860.

    32 Gustav KOLMER, Parlament und Verfassung in Österreich, 8 vol., Vienne, 1902, I, p. 302.

    33 Lettre de Pie IX à François-Joseph, Rome, 7 mars 1874, HHStA, Kab.-Archiv, Geheimakten, Karton 23, citée in F. ENGEL-JANOSI, « Die Beziehungen zwischen Österreich-Ungarn und dem Vatikan », Mitteilungen des österreichischen Staatsarchivs, t. 10, p. 334-337.

    34 Réponse de François-Joseph à Pie IX, Vienne, avril 1874, ibid., citée in F. ENGEL-JANOSI, Die Beziehungen, p. 337-340.

    35 Comte Ferdinand von BEUST, Aus drei Viertel-Jahrhunderten, 2 vol., Stuttgart, 1887, II, p. 183.

    36 F. SCHNÜRER, op. cit., p. 377, Schönbrunn, 25 août 1870.

    37 F. ENGEL-JANOSI, Die Beziehungen, p. 337-340.

    38 Cité in F. FELLNER, op. cit., p. 314.

    39 Öst. Ministerratsprotokoll 127/1871, 26 novembre 1871.

    40 Cité in G : KOLMER, op. cit., II, p. 236.

    41 Il faut considérer comme une exception le cas du prince Alfred Windischgraetz répondant à François-Joseph, en avril 1849, après qu’il eut été démis de son commandement à la tête de l’armée de Hongrie : « Veuille bien Votre Majesté ne pas oublier que, sans moi, elle n’aurait pas de devoirs », cf. J. K. MAYR, op. cit., p. 168, 18 février 1850.

    42 Lettre du prince Alfred Windischgraetz au comte Bernhard Rechberg, Tachau, 11 décembre 1860, 25 décembre 1860, HHStA, PA I, Nachlass [=NL] Rechberg, Karton 528, Konv. 8, fol. 51-53 et 57-58.

    43 Cité in Wiard von KLOPP, « Die Briefe des Grafen Gustav Blome an den Freiherr Karl von Vogelsang », Jahrbuch der österreichischen Leo-Gesellschaft, t. 3, 1928, p. 147.

    44 Lettre du comte Friedrich Revertera au comte Julius Falkenhaýn, Tollet, 5 janvier 1876, NL Julius Falkenhaýn, Korrespondenz.

    45 Comte Leo THUN, Der Föderalismus im österreichischen Parteikampfe, Graz, 1875, p. 25.

    46 Id., p. 26.

    47 Carl von STREMAYR, Erinnerungen aus dem Leben, Seinen Kindern und Enkeln erzählt, Vienne, 1899, p. 48.

    48 J. K. MAYR, op. cit., p. 204, 12 mars 1851.

    49 Comte Friedrich REVERTERA, Tagebuch, 3 janvier 1862, Familienarchiv [=FA] Revertera, NL Friedrich Revertera, Schachtel 47.

    50 Cette conception des devoirs de la noblesse s’accorde assez mal avec l’esprit d’indépendance qui survit chez certains féodaux. Ainsi le comte Eugen Czernin justifiant en 1867 son refus de siéger à la Chambre haute du Reichsrat : « Sa Majesté », écrit-il à Léo Thun, « a eu la bonté de m’accorder le droit d’apparaître dans une assemblée parlementaire, mais rien ne m’oblige à en faire usage » cf. Lettre du comte Eugen Czernin au comte Leo Thun, Petersburg, 13 juin 1867, SOA Litomĕrice, pob. Dĕcin, Ra Thun-Hohenstein (Dĕcin), pozůsralost Leo Thun-Hohenstein, A3 XXI-E 215.

    51 F. FELLNER, op. cit., p. 344 et R. A. KANN, The multinational Empire, I, p. 181.

    52 Heinrich von Srbik note avec justesse que, si François-Joseph croit à un certain nombre d’idées-force, en revanche doctrines et sýstèmes de pensée rigides lui répugnent, cf. H.R.v. SRBIK, Franz Joseph, I, p. 225.

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Cette publication numérique est issue d’un traitement automatique par reconnaissance optique de caractères.

    Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

    Voir plus de livres
    Les Europe des Européens

    Les Europe des Européens

    René Girault et Gérard Bossuat (dir.)

    1993

    Le marché du charbon, un enjeu entre l’Europe et les États-Unis de 1945 à 1958

    Le marché du charbon, un enjeu entre l’Europe et les États-Unis de 1945 à 1958

    Régine Perron

    1996

    L’Europe des Français, 1943-1959

    L’Europe des Français, 1943-1959

    La IVe République aux sources de l’Europe communautaire

    Gérard Bossuat

    1997

    Les identités européennes au XXe siècle

    Les identités européennes au XXe siècle

    Diversités, convergences et solidarités

    Robert Frank (dir.)

    2004

    La soif de Jérusalem

    La soif de Jérusalem

    Essai d’hydrohistoire (1840-1948)

    Vincent Lemire

    2011

    Misère de l’historiographie du « Maghreb » post-colonial (1962-2012)

    Misère de l’historiographie du « Maghreb » post-colonial (1962-2012)

    Pierre Vermeren

    2012

    Autour des morts de guerre

    Autour des morts de guerre

    Maghreb - Moyen-Orient

    Raphaëlle Branche, Nadine Picaudou et Pierre Vermeren (dir.)

    2013

    Capitales culturelles, capitales symboliques

    Capitales culturelles, capitales symboliques

    Paris et les expériences européennes (XVIIIe-XXe siècles)

    Christophe Charle et Daniel Roche (dir.)

    2002

    Le Paris des étrangers depuis 1945

    Le Paris des étrangers depuis 1945

    Antoine Marès et Pierre Milza (dir.)

    1995

    Au service de l’Europe

    Au service de l’Europe

    Crises et transformations sociopolitiques de la fonction publique européenne

    Didier Georgakakis

    2019

    Le laboratoire démocratique : le Mexique en révolution 1908-1913

    Le laboratoire démocratique : le Mexique en révolution 1908-1913

    Elisa Cárdenas Ayala

    2001

    Diplomatie et religion

    Diplomatie et religion

    Au cœur de l’action culturelle de la France au XXe siècle

    Gilles Ferragu et Florian Michel (dir.)

    2016

    Voir plus de livres
    1 / 12
    Les Europe des Européens

    Les Europe des Européens

    René Girault et Gérard Bossuat (dir.)

    1993

    Le marché du charbon, un enjeu entre l’Europe et les États-Unis de 1945 à 1958

    Le marché du charbon, un enjeu entre l’Europe et les États-Unis de 1945 à 1958

    Régine Perron

    1996

    L’Europe des Français, 1943-1959

    L’Europe des Français, 1943-1959

    La IVe République aux sources de l’Europe communautaire

    Gérard Bossuat

    1997

    Les identités européennes au XXe siècle

    Les identités européennes au XXe siècle

    Diversités, convergences et solidarités

    Robert Frank (dir.)

    2004

    La soif de Jérusalem

    La soif de Jérusalem

    Essai d’hydrohistoire (1840-1948)

    Vincent Lemire

    2011

    Misère de l’historiographie du « Maghreb » post-colonial (1962-2012)

    Misère de l’historiographie du « Maghreb » post-colonial (1962-2012)

    Pierre Vermeren

    2012

    Autour des morts de guerre

    Autour des morts de guerre

    Maghreb - Moyen-Orient

    Raphaëlle Branche, Nadine Picaudou et Pierre Vermeren (dir.)

    2013

    Capitales culturelles, capitales symboliques

    Capitales culturelles, capitales symboliques

    Paris et les expériences européennes (XVIIIe-XXe siècles)

    Christophe Charle et Daniel Roche (dir.)

    2002

    Le Paris des étrangers depuis 1945

    Le Paris des étrangers depuis 1945

    Antoine Marès et Pierre Milza (dir.)

    1995

    Au service de l’Europe

    Au service de l’Europe

    Crises et transformations sociopolitiques de la fonction publique européenne

    Didier Georgakakis

    2019

    Le laboratoire démocratique : le Mexique en révolution 1908-1913

    Le laboratoire démocratique : le Mexique en révolution 1908-1913

    Elisa Cárdenas Ayala

    2001

    Diplomatie et religion

    Diplomatie et religion

    Au cœur de l’action culturelle de la France au XXe siècle

    Gilles Ferragu et Florian Michel (dir.)

    2016

    Accès ouvert

    Accès ouvert freemium

    ePub

    PDF

    PDF du chapitre

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque

    Acheter

    Édition imprimée

    Éditions de la Sorbonne
    • amazon.fr
    • leslibraires.fr
    • placedeslibraires.fr
    ePub / PDF

    1 Sur François-Joseph, cf. Heinrich FRIEDJUNG, « Kaiser Franz Joseph I. Ein Charakterbild », Historische Aufsätze. Stuttgart-Berlin, 1919, p. 493-541 ; Joseph REDLICH, Kaiser Franz Joseph von Österreich, Berlin, 1928 ; Emil MIKA, Kaiser Franz Joseph, Lübeck, 1933 ; H.R.v. SRBIK, « Franz Joseph I. Charakter und Regierungsgrundsätze», Aus Österreichs Vergangenheit, Salzbourg, 1949 ; Egon Caesar Conte CORTI-Hans SOKOL, Kaiser Franz Joseph, Graz-Vienne-Cologne, 1965 ; Franz HERRE, Kaiser Franz Joseph von Österreich. Sein Leben. Seine Zeit, Cologne, 1978 ; Jean-Paul BLED, François Joseph, Paris, 1987.

    2 Cité in J. REDLICH, op. cit., p. 149.

    3 H.R.v. SRBIK, Franz Joseph I., p. 223.

    4 Otto ERNST, Franz Joseph in seinen Briefen, Vienne, 1924, p. 34.

    5 J. REDLICH, op. cit., p. 232.

    6 Alexander NOVOTNY, « Der Monarch und seine Ratgeber », Die Habsburger Monarchie, II, Vienne, 1975, p. 60-61.

    7 J. REDLICH, op. cit., p. 25-31.

    8 H. FRIEDJUNG, op. cit., p. 534 ; Josef Karl MAYR, Das Tagebuch des Polizeiministers Kempen von 1848 bis 1859, Vienne-Leipzig, 1931, p. 352,12 janvier 1855.

    9 F. HERRE, op. cit., p. 233.

    10 E.G. C. CORTI-H. SOKOL, op. cit., p. 209-210.

    11 Sur le prince Felix Schwarzenberg, cf. J. REDLICH, op. cit., p. 46-50 ; Eduard HELLER, Mitteleuropas Vorkampfer : Fürst Felix zu Schwarzenberg, Vienne, 1933 ; Adolph SCHWARZENBERG, Prince Felix zu Schwarzenberg, Prime minister of Austria 1848-1852, New-York, 1946 ; Rudolf KISZLING, Fürst Felix zu Schwarzenberg, der politische Lehrmeister Kaiser Franz Josephs, Graz-Cologne, 1952.

    12 L’éloge que François-Joseph dresse de son premier chef de gouvernement dans la lettre où il informe sa mère du décès subit de Schwarzenberg n’est pas de convention. Le portrait qu’il en fait met en avant les deux qualités qui l’ont le plus impressionné : l’absolue fidélité de Schwarzenberg à sa personne et une énergie que rien ne pouvait ébranler, cf. Franz SCHNURER [ed.], Briefe Kaiser Franz Josephs an seine Mutter 1838-1872, Munich, 1930, p. 176-177, Vienne, 6 avril 1852.

    13 Id., p. 179, Vienne, 14 avril 1852.

    14 Sur le comte Grünne, cf. J. REDLICH, op. cit., p. 53-58 et Hans ELMER, Franz Joseph I. von 1830-1859 im Urteil von Zeitgenossen und Nachwelt, Diss. dact., Vienne, 1948, p. 142-145 auxquels s’oppose la tentative de réhabilitation du comte Grünne par la comtesse Marianne SZAPARY dans Carl Graf Grünne, Generaladjudant des Kaisers Franz Joseph 1848-1859, Diss. dact., Vienne, 1935.

    15 J. REDLICH, op.cit., p. 55.

    16 Antonio SCHMIDT-BRENTANO, Die Armee in Österreich, Militär, Staat und Gesellschaft 1848-1867-, Boppard am Rhein, 1975, p. 11-12.

    17 F. HERRE, op. cit., p. 270-271.

    18 Leopold von CHLUMECKY, Erzherzog Franz Ferdinands Wirken und Wollen, Berlin, 1929, p. 17.

    19 F. HERRE, op. cit., p. 273.

    20 J. REDLICH, op. cit., p. 60.

    21 Alexander von SPITZMÜLLER, Kaiser Franz Joseph als Staatsmann, Vienne, 1935, p. 7.

    22 A cet égard on notera qu’Helmut RUMPLER se demande si le prince Schwarzenberg n’a pas davantage subi que vraiment accepté la réduction des pouvoirs du Conseil des ministres sanctionnée par l’ordonnance du 20 août 1851, cf. Helmut RUMPLER, Die Protokolle des österreichischen Ministerrates (1848-1867), Einleitungsband, Vienne, 1970, p. 30-44.

    23 H. FRIEDJUNG, op. cit., p. 501-502.

    24 A.v. SPITZMÜLLER, op. cit., p. 14-15.

    25 H. FRIEDJUNG, op. cit., p. 517.

    26 F. SCHNÜRER, op. cit., p. 166, Schönbrunn, 26 août 1851.

    27 Cité in Fritz FELLNER, « Kaiser Franz Joseph und das Parlament. Materialien zur Geschichte der Innenpolitik Österreichs in den Jahren 1867-1873 », Mitteilungen des österreichischen Staatsarchivs, t. 9, 1956, p. 343.

    28 Id., p. 291.

    29 F. SCHNÜRER, op. cit., p. 302, Schönbrunn, 21 octobre 1860.

    30 Hans, – Hof und Staatsarchiv [HHStA], Kab.-Archiv, Gcheimakten, Karton 17, 1. Mappe 1862-1867, fol. 53-68 et 91-97.

    31 HHStA, Kab.-Archiv, Öst. Ministerconferenzprotokqll 554/1860, 29 juin 1860.

    32 Gustav KOLMER, Parlament und Verfassung in Österreich, 8 vol., Vienne, 1902, I, p. 302.

    33 Lettre de Pie IX à François-Joseph, Rome, 7 mars 1874, HHStA, Kab.-Archiv, Geheimakten, Karton 23, citée in F. ENGEL-JANOSI, « Die Beziehungen zwischen Österreich-Ungarn und dem Vatikan », Mitteilungen des österreichischen Staatsarchivs, t. 10, p. 334-337.

    34 Réponse de François-Joseph à Pie IX, Vienne, avril 1874, ibid., citée in F. ENGEL-JANOSI, Die Beziehungen, p. 337-340.

    35 Comte Ferdinand von BEUST, Aus drei Viertel-Jahrhunderten, 2 vol., Stuttgart, 1887, II, p. 183.

    36 F. SCHNÜRER, op. cit., p. 377, Schönbrunn, 25 août 1870.

    37 F. ENGEL-JANOSI, Die Beziehungen, p. 337-340.

    38 Cité in F. FELLNER, op. cit., p. 314.

    39 Öst. Ministerratsprotokoll 127/1871, 26 novembre 1871.

    40 Cité in G : KOLMER, op. cit., II, p. 236.

    41 Il faut considérer comme une exception le cas du prince Alfred Windischgraetz répondant à François-Joseph, en avril 1849, après qu’il eut été démis de son commandement à la tête de l’armée de Hongrie : « Veuille bien Votre Majesté ne pas oublier que, sans moi, elle n’aurait pas de devoirs », cf. J. K. MAYR, op. cit., p. 168, 18 février 1850.

    42 Lettre du prince Alfred Windischgraetz au comte Bernhard Rechberg, Tachau, 11 décembre 1860, 25 décembre 1860, HHStA, PA I, Nachlass [=NL] Rechberg, Karton 528, Konv. 8, fol. 51-53 et 57-58.

    43 Cité in Wiard von KLOPP, « Die Briefe des Grafen Gustav Blome an den Freiherr Karl von Vogelsang », Jahrbuch der österreichischen Leo-Gesellschaft, t. 3, 1928, p. 147.

    44 Lettre du comte Friedrich Revertera au comte Julius Falkenhaýn, Tollet, 5 janvier 1876, NL Julius Falkenhaýn, Korrespondenz.

    45 Comte Leo THUN, Der Föderalismus im österreichischen Parteikampfe, Graz, 1875, p. 25.

    46 Id., p. 26.

    47 Carl von STREMAYR, Erinnerungen aus dem Leben, Seinen Kindern und Enkeln erzählt, Vienne, 1899, p. 48.

    48 J. K. MAYR, op. cit., p. 204, 12 mars 1851.

    49 Comte Friedrich REVERTERA, Tagebuch, 3 janvier 1862, Familienarchiv [=FA] Revertera, NL Friedrich Revertera, Schachtel 47.

    50 Cette conception des devoirs de la noblesse s’accorde assez mal avec l’esprit d’indépendance qui survit chez certains féodaux. Ainsi le comte Eugen Czernin justifiant en 1867 son refus de siéger à la Chambre haute du Reichsrat : « Sa Majesté », écrit-il à Léo Thun, « a eu la bonté de m’accorder le droit d’apparaître dans une assemblée parlementaire, mais rien ne m’oblige à en faire usage » cf. Lettre du comte Eugen Czernin au comte Leo Thun, Petersburg, 13 juin 1867, SOA Litomĕrice, pob. Dĕcin, Ra Thun-Hohenstein (Dĕcin), pozůsralost Leo Thun-Hohenstein, A3 XXI-E 215.

    51 F. FELLNER, op. cit., p. 344 et R. A. KANN, The multinational Empire, I, p. 181.

    52 Heinrich von Srbik note avec justesse que, si François-Joseph croit à un certain nombre d’idées-force, en revanche doctrines et sýstèmes de pensée rigides lui répugnent, cf. H.R.v. SRBIK, Franz Joseph, I, p. 225.

    Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879

    X Facebook Email

    Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879

    Ce livre est cité par

    • Pasteur, Paul. (2011) Histoire de l'Autriche. DOI: 10.3917/arco.paste.2011.01.0300
    • (2021) Les relations internationales de 1800 à 1871. DOI: 10.3917/arco.randi.2021.01.0221
    • (2019) L'Europe au 19e siècle. DOI: 10.3917/arco.caron.2019.01.0455
    • Höbelt, Lothar. (1996) The Discreet Charm of the Old Regime. Austrian History Yearbook, 27. DOI: 10.1017/S0067237800005919
    • N. Kalyvas, Stathis. Chiaramonte, Alessandro. (1996) LA FORMAZIONE DEI PARTITI CONFESSIONALI IN EUROPA. Italian Political Science Review/Rivista Italiana di Scienza Politica, 26. DOI: 10.1017/S0048840200024254
    • Wielomski, Adam. (2020) Austro-Węgrzy i paneuropeiści. Arystokratyczni krytycy Europy wersalskiej. Kultura Słowian Rocznik Komisji Kultury Słowian PAU, 16. DOI: 10.4467/25439561KSR.20.003.13292
    • Kolář, Pavel. (1999) The Genesis of Modern Coservatism as a Problem of 20th Century Social Sciences. Czech Sociological Review, 35. DOI: 10.13060/00380288.1999.35.4.01

    Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879

    Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://freemium.openedition.org/oebooks

    Acheter ce livre aux formats PDF et ePub

    Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org

    Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879

    Vérifiez si votre bibliothèque a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books.

    Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque d’acquérir un ou plusieurs livres publiés sur OpenEdition Books. N’hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées : access[at]openedition.org

    Vous pouvez également nous indiquer, à l’aide du formulaire suivant, les coordonnées de votre bibliothèque afin que nous la contactions pour lui suggérer l’achat de ce livre. Les champs suivis de (*) sont obligatoires.

    Veuillez, s’il vous plaît, remplir tous les champs.

    La syntaxe de l’email est incorrecte.

    Référence numérique du chapitre

    Format

    Bled, J.-P. (1988). Chapitre II. François-Joseph, un archetype de conservateur gouvernemental. In Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879 (1‑). Éditions de la Sorbonne. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.51283
    Bled, Jean-Paul. « Chapitre II. François-Joseph, un archetype de conservateur gouvernemental ». In Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879. Paris: Éditions de la Sorbonne, 1988. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.51283.
    Bled, Jean-Paul. « Chapitre II. François-Joseph, un archetype de conservateur gouvernemental ». Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879, Éditions de la Sorbonne, 1988, https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.51283.

    Référence numérique du livre

    Format

    Bled, J.-P. (1988). Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879 (1‑). Éditions de la Sorbonne. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.51243
    Bled, Jean-Paul. Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879. Paris: Éditions de la Sorbonne, 1988. https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.51243.
    Bled, Jean-Paul. Les fondements du conservatisme autrichien, 1859-1879. Éditions de la Sorbonne, 1988, https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.51243.
    Compatible avec Zotero Zotero

    1 / 3

    Éditions de la Sorbonne

    Éditions de la Sorbonne

    • Mentions légales
    • Plan du site
    • Se connecter

    Suivez-nous

    • Facebook
    • X
    • Flux RSS

    URL : http://editionsdelasorbonne.fr/

    Email : edsorb@univ-paris1.fr

    Adresse :

    212, rue Saint-Jacques

    75005

    Paris

    France

    OpenEdition
    • Candidater à OpenEdition Books
    • Connaître le programme OpenEdition Freemium
    • Commander des livres
    • S’abonner à la lettre d’OpenEdition
    • CGU d’OpenEdition Books
    • Accessibilité : partiellement conforme
    • Données personnelles
    • Gestion des cookies
    • Système de signalement